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Assemblée nationale COMPTE RENDU ANALYTIQUE OFFICIEL Session ordinaire de 1998-1999 - 104ème jour de séance, 267ème séance 3ème SÉANCE DU MARDI 8 JUIN 1999 PRÉSIDENCE DE M. Arthur PAECHT vice-président SOMMAIRE : PACTE CIVIL DE SOLIDARITÉ -nouvelle lecture- (suite) 1 QUESTION PRÉALABLE 1 MOTION DE RENVOI EN COMMISSION 15 AVANT L'ARTICLE PREMIER 20 ARTICLE PREMIER 22 La séance est ouverte à vingt et une heures quarante-cinq. DÉCLARATION D'URGENCE M. le Président - J'ai reçu de M. le Premier ministre une lettre m'informant que le Gouvernement déclare l'urgence de la proposition de loi portant diverses mesures relatives à l'organisation d'activités physiques et sportives. Acte est donné de cette communication. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, en nouvelle lecture, de la proposition de loi relative au pacte civil de solidarité. M. le Président - M. Jean-Louis Debré et les membres du groupe RPR opposent, en application de l'article 91, alinéa 4, du Règlement, la question préalable. M. Patrick Delnatte - On pourrait croire que tout a été dit. Pourtant, les péripéties qui ont marqué le cheminement de ce texte, les transformations qu'il a subies tant ici qu'au Sénat, les mécontentements et les interpellations des différentes composantes de la société qui se sentent exclues du débat, les questions fondamentales restées sans réponse, nous obligent à prendre du recul, voire de la hauteur. Comment pourrait-il en être autrement ? Ce texte n'a rien de banal : il touche à l'essence même de la nature humaine, aux fondements de notre société ; c'est la vie des personnes qui est concernée, c'est la place du couple par rapport à la famille dans la société qui est en jeu, c'est l'assimilation d'une tendance sexuelle à un modèle social qui est créée. Croyez-vous que tout cela puisse trouver son expression et sa solution dans la seule limite du débat parlementaire ? On peut comprendre l'impatience d'une majorité parlementaire, par essence temporaire dans une démocratie, pressée d'afficher l'euphorie de sa victoire en imposant ses idées et ses promesses électorales à toute la société, quelles qu'en soient les conséquences. M. Daniel Marcovitch - Tenir ses promesses ? Quelle horreur ! M. Patrick Delnatte - On peut comprendre la lassitude d'élus soumis aux contraintes de l'obéissance aux règles majoritaires, qui souhaitent rapidement tourner la page du Pacs pour se retrouver plus en phase avec leurs électeurs. Le Gouvernement et la majorité composite de cette assemblée ont choisi la seule voie parlementaire pour toucher aux fondements de notre société. Pour nous, élus de l'opposition, il s'agit là d'une erreur, je dirais même une faute. En raison du choix de votre méthode, nous avons comme seule possibilité d'utiliser tous les droits que nous accorde la procédure parlementaire pour nous opposer pied à pied à vos erreurs et traduire ici même les inquiétudes des Français en quête de repères. Mme Christine Boutin - Très bien ! M. Patrick Delnatte - Dans une démocratie participative comme la nôtre, il eut été préférable d'adopter la même méthode que celle utilisée en 1987 par le gouvernement de Jacques Chirac sur un sujet tout aussi fondamental pour notre société : la nationalité. La commission Marceau Long a permis, par des auditions publiques, l'expression de toutes les composantes de la société française : intellectuelles, philosophiques, sociales, religieuses, culturelles, associatives... Elle a pu dégager les points de convergence et de désaccords, exprimer des propositions en toute indépendance. C'est seulement ainsi que les élus peuvent légiférer, sous leur propre responsabilité, si possible dans le consensus et en évitant les polémiques inutiles, les simplifications outrancières, les amalgames absurdes. L'opinion, quant à elle, a tous les éléments pour comprendre et juger. Cette méthode ne correspondait peut-être pas à votre urgence. Mais l'urgence du parti socialiste n'est pas l'urgence de la France (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Loin de moi l'idée qu'il n'y a pas de problèmes à régler, y compris de façon urgente, pour la protection des personnes qui vivent en couple, ou pour répondre à la souffrance et au respect des personnes qui vivent une sexualité différente, autrement que dans l'altérité. M. Bernard Grasset - Que cela est bien dit ! (Sourires) M. Patrick Delnatte - Mais vous n'avez pas voulu saisir la perche que vous ont tendue le Sénat et l'opposition parlementaire, en proposant une législation appropriée sur le concubinage et l'utilisation normale des lois fiscales et sociales. Non, vous voulez imposer, coûte que coûte, un nouveau modèle social, le Pacs. Il faut reconnaître qu'en l'état actuel du débat, ce Pacs pose au moins quatre questions qui ne peuvent trouver de réponse. Peut-on légiférer sur le statut des personnes non mariées vivant en couple sans toucher à la législation sur le mariage et au droit de la famille ? Plusieurs députés socialistes - Oui ! M. Patrick Delnatte - Votre réponse est claire, Madame la Garde des Sceaux, je vous cite : "Le Pacs concerne le couple, il ne concerne pas la famille". Plusieurs députés socialistes - C'est vrai ! M. Patrick Delnatte - Non seulement cette affirmation est fausse dans les faits, mais encore elle est dangereuse car elle conduit à dévaloriser la famille. Mme Geneviève Perrin-Gaillard - Faux ! M. Patrick Delnatte - Ne serait-ce que par "ricochet", la famille est bien concernée par l'instauration du Pacs. Ne prenons qu'un exemple : celui des successions. Le partenaire "pacsé" profitera dorénavant d'un abattement supérieur à celui des enfants légitimes ; de même, le bénéficiaire du capital décès, en l'absence de conjoint issu d'un mariage, sera le partenaire pacsé et non les enfants légitimes. Mais plus grave que cette négation des faits, les propos du Gouvernement avalisent l'idée que le couple et la famille sont deux notions totalement étrangères l'une à l'autre. Reconnaître cela, c'est nier que la famille et les enfants sont la justification même du couple. L'enfant n'est pas l'accessoire du couple, il en est le but (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Je sais bien que les faits peuvent contredire cette affirmation. Mais quel est le rôle de la loi ? J'ai souvent entendu la majorité de cette assemblée dire que la législation doit se contenter de suivre l'évolution des faits et des moeurs. Notre position à nous est celle que vient d'exprimer le Président de la République lors de la remise de la médaille de la famille française (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). M. Jean-Pierre Michel, rapporteur de la commission des lois - Médaille pétainiste ! M. Patrick Delnatte - "Respectueuse des choix de chacun, la loi ne peut pour autant se faire l'auxiliaire de tous les arrangements de la vie privée, ni les placer tous sur le même plan. Ce serait méconnaître la portée de sa mission. La loi n'est pas la servante du bonheur individuel, elle est au service de l'intérêt général. C'est lorsqu'il est mû par les intérêts supérieurs de notre société que le législateur est pleinement dans son rôle". Les Français demeurent attachés à la famille, premier lieu du partage, du réconfort et de l'entraide, comme l'atteste la hausse du nombre des mariages. Ils ne sont pas acquis à cette idéologie individualiste qui disjoint couple et famille. Et l'honneur du Parlement n'est pas de sanctionner cette dérive, qui n'est pas étrangère aux violences quotidiennes commises par des jeunes en déshérence, ni aux faits de maltraitance de certains parents sur leurs enfants (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Sachons répondre à l'appel du Parlement des Enfants qui a exprimé l'aspiration à l'amour filial. Entre le collectif à tout prix, qui déshumanise la société, et l'absolu de l'individu qui dénature la personne humaine, le groupe familial est une cellule sociale qui peut permettre l'épanouissement de l'être humain, la création du lien social et la pérennité de la société. Dans ces conditions, n'est-ce pas répondre à l'intérêt général que de replacer la famille au premier rang de nos priorités ? Il serait temps d'actualiser la législation sur le mariage et la famille. Vous-même, Madame la Garde des Seaux, avez installé un groupe de travail présidé par Mme le professeur Dekeuwer, et la sagesse voudrait que l'on attendre ses conclusions avant de voter le Pacs. La deuxième question tient à la nature juridique du Pacs. Mme Guigou a dit au Sénat que "le Pacs est un contrat, il n'est pas une institution", et le rapporteur de notre commission des lois assure qu'il s'agit d'une "convention solennelle". En fait, il n'est ni un contrat, ni une institution, ni une convention solennelle. C'est un objet juridique difficilement identifiable. Si le Pacs avait été un vrai contrat, il aurait été intégré au livre III du code civil, non au livre 1er intitulé "des personnes", et dans lequel le mariage se trouve codifié. Si le Pacs était un contrat, pourquoi dérogerait-il au droit commun des contrats, tant pour la capacité à contracter que pour la dénonciation ? Les mineurs émancipés ne peuvent signer un pacte alors que le droit de contracter leur est reconnu ; les majeurs sous tutelle non plus alors qu'ils ont le droit de se marier ; les frères et les soeurs sont également exclus. S'il s'agissait d'un vrai contrat, ces catégories ne seraient pas exclues (Mme Boutin approuve). La multiplication des réponses sur la nature juridique du Pacs témoigne de la confusion du débat. Et les choses se sont encore compliquées avec la navette parlementaire ! En effet, le Sénat avait proposé comme alternative au Pacs l'introduction du concubinage dans le code civil. C'était une réponse pragmatique ne bouleversant pas la hiérarchie des valeurs de notre société. La majorité de cette assemblée n'a rien trouvé de mieux que de cumuler les deux formules ! Ainsi, la proposition de loi introduit-elle dans le code civil une définition imparfaite du concubinage, union de fait caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité entre deux personnes, de sexe différent ou de même sexe, qui vivent en couple. Comme l'a fait remarquer le rapporteur de la commission des lois du Sénat, cette définition permet de légaliser les "mariés concubins", c'est-à-dire les hommes mariés qui vivent en union libre avec d'autres personnes. En outre, cette définition trop rigide du concubinage va engendrer une nouvelle catégorie de fait, les concubins non déclarés. Actuellement, les concubins, lorsqu'ils souhaitent se voir reconnaître certains droits, demandent en mairie un certificat de concubinage. Ne pourront, à l'avenir, être reconnus concubins que ceux qui peuvent justifier la stabilité et la continuité de leur vie en couple. De la sorte, on pourra trouver des personnes vivant en union libre ; des concubins non déclarés ; des concubins déclarés ; des concubins mariés ; des concubins pacsés ; des pacsés ; des mariés. C'est à dire qu'il y aura sept régimes juridiques différents pour les couples ! Ce sera l'union à la carte ! Faut-il que le droit, pour répondre à la complexité des situations, dévalorise la hiérarchie des valeurs ? Nous ne le pensons pas. Certes, il faut respecter les choix de chacun, mais le législateur ne peut se faire l'auxiliaire de tous les arrangements de la vie privée. Le Pacs assure-t-il alors la protection des personnes comme l'affirment ses promoteurs ? Il risque plutôt d'être un leurre pour les femmes et les enfants. Non seulement les femmes pacsées n'acquièrent aucun droit à pension de réversion, mais elles n'auront aucun droit sur leur conjoint en cas de rupture unilatérale du Pacs par celui-ci. Mme Véronique Neiertz - On s'en fout, on les aime ! M. Patrick Delnatte - Cette réflexion est-elle vraiment digne des fonctions que vous avez exercées ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe DL et du groupe UDF) Mme Odette Grzegrzulka - Elle parle avec son coeur ! M. Patrick Delnatte - Le texte prévoit certes la possibilité d'un contrôle du juge, avec réparation du dommage éventuellement subi. Mais cela ne peut être assimilé à l'indemnité compensatrice du divorce, plus protectrice pour la femme. Quand un couple pacsé a des enfants, la coexistence du droit de la famille et du droit du Pacs crée une concurrence qui accentue l'ambiguïté. En fait, le Pacs est un piège pour les plus faibles. Comme l'intervention d'un professionnel du droit n'est pas obligatoire pour la rédaction de ce pseudo contrat, le plus avisé des deux signataires aura toute latitude pour l'élaborer dans le sens de ses intérêts. Enfin, quel sera le coût du Pacs ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) M. Daniel Marcovitch - De la tendresse, bordel ! M. le Président - Peut-être pourrons-nous bientôt considérer que la récréation est terminée ? M. Patrick Delnatte - Le Parlement n'a reçu aucune évaluation financière. La procédure de la proposition de loi vous permet d'éviter l'étude d'impact, obligatoire pour les projets de loi. Le rapporteur du Sénat a demandé en vain la collaboration du service de la législation fiscale, et les seules informations officieuses émanent d'indiscrétions. On estime le seul coût de l'imposition commune des pacsés à quatre ou six milliards. Mme Odette Grzegrzulka - L'amour n'a pas de prix ! M. Patrick Delnatte - Par ailleurs, le Pacs sera anti-redistributif, car il favorise les ménages mono-actifs et à grande disparité fiscale. Parallèlement, le Gouvernement remet en cause la situation fiscale des familles en orientant la politique familiale vers la seule solidarité. Rappelons quelques mesures déjà prises : l'abaissement du quotient familial, qui a coûté 4 milliards aux familles ; la baisse de l'AGED ; la réduction de la déduction fiscale pour l'emploi d'une personne à domicile ; le plafonnement de la demi-part accordée aux personnes ayant élevé seules un ou plusieurs enfants ; le refus de donner suite à la proposition de loi de l'opposition visant à revaloriser l'allocation veuvage. Or compte tenu de son rôle social et démographique, l'Etat devrait soutenir la famille et lui faciliter l'existence. Si la solidarité est un complément pour les familles les plus en difficulté, elle ne doit pas se réaliser au détriment de la reconnaissance du fait familial lui-même. M. Yves Durand - Propos signés ! M. Patrick Delnatte - Toutes ces questions montrent qu'il est nécessaire de revoir votre façon de légiférer. Il est dangereux de travailler dans l'urgence, sous l'influence des groupes de pression et des modes médiatiques. C'est pourquoi le groupe du RPR vous propose d'adopter la question préalable. Nous pourrons ainsi donner toutes ses chances à une évolution constructive de notre société, approuvée par le plus grand nombre de nos concitoyens et respectueuse de l'intérêt général (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). M. Jean-Pierre Michel, rapporteur de la commission des lois - M. Delnatte vient d'exposer en des termes modérés une position maintes fois déjà exprimée par l'opposition. Contrairement à l'Histoire, la procédure parlementaire repasse souvent les mêmes plats. Je vous demande de rejeter, à l'instar de la commission des lois, cette question préalable. M. Bernard Accoyer - Voilà donc neuf mois que nous débattons de ce texte, pourtant toujours le même ! Toujours le même dans ses outrances, son mépris à l'égard de l'opposition, ses propositions scandaleusement moqueuses à l'égard de la famille et des valeurs qu'elle représente (Protestations sur les bancs du groupe socialiste ; applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Neuf mois de travail, neuf mois d'excès, neuf mois perdus N'y a-t-il donc aucun texte plus important ni plus urgent, Madame le ministre, en matière de sécurité, de justice, de politique de l'enfance ? Vous avez choisi au contraire, pour des raisons purement idéologiques, de nous présenter ce texte emblématique, au risque de mettre notre société en pièces. Le Pacs jette le discrédit sur le mariage et l'affaiblit. Alors que notre société se cherche et que de toutes parts des menaces se font jour, dans nos banlieues, dans nos universités, dans nos écoles (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste), la cellule familiale devrait au contraire être renforcée et les familles, qui ont choisi de donner à la France des enfants, aidées. Vous avez choisi au contraire de dégager des moyens financiers pour ce projet idéologique qui n'apportera rien de bon à notre pays. Ce texte méconnaît l'intérêt des familles comme la défense des droits des plus faibles, les femmes et les enfants. Il jette la confusion dans le pays. Pour toutes ces raisons, le groupe RPR votera la question préalable (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Mme Christine Boutin - Le groupe UDF votera lui aussi la question préalable excellemment défendue par M. Delnatte. Que vous le vouliez ou non, chers collègues de la majorité, le Pacs touche à la famille. Vos cris, vos vociférations, vos excès, vos réactions passionnelles à nos arguments (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) n'empêcheront pas la réalité d'être. Nous n'avons pu discuter au fond de ce texte, ni en commission ni dans l'hémicycle. Il est purement symbolique et idéologique. Que vous l'admettiez ou non, nous croyons, nous, à la famille, fondement de la société et savons que vous allez la mettre à bas (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR). M. Jean-Pierre Blazy - Troisième lecture, troisième question préalable... pour s'entendre dire, après donc 85 heures de débat, qu'il n'y a pas lieu de débattre ! En première lecture, M. Lenoir s'était contenté de faire de l'obstruction (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) ; en deuxième lecture, M. Dord avait recherché la voie d'un consensus... pour conclure qu'il ne fallait pas toucher au code civil. M. Delnatte nous invite aujourd'hui à clore le débat. Nous pensons, au contraire, qu'il y a lieu de le mener à son terme. L'évolution du texte entre les deux lectures, avec par exemple l'exclusion des fratries ou la reconnaissance, selon le voeu du Sénat, du concubinage homosexuel, prouve, s'il en était besoin, toute l'utilité du débat. Le groupe socialiste votera donc contre la question préalable (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV). M. Bernard Birsinger - Je tiens d'abord à dire que j'aime la famille et les enfants, et que donc j'aime le Pacs (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste). Que d'efforts déployés à droite en faveur d'une manoeuvre politicienne dilatoire ! Que de salive versée pour parler, depuis la première lecture, de tout autre chose que du Pacs ! (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) Personne n'est dupe de votre attitude. Vous refusez de reconnaître les couples homosexuels et de leur accorder des droits qui leur permettraient de vivre mieux et d'être des citoyens à part entière. Vous refusez de prendre en compte la réalité des nouveaux modes de vie, en brandissant l'étendard de la famille, cette famille que le Pacs, selon vous, menacerait de mettre à bas. Deux Français sur trois et neuf jeunes sur dix sont favorables au Pacs... Plusieurs députés RPR, UDF, DL - D'où viennent ces sondages ? M. Bernard Birsinger - Vos arguments s'essoufflent. Vous avez pourtant tout essayé, ici comme au Sénat. Tirant les leçons des propos outranciers et homophobes tenus ici même en première lecture, la majorité sénatoriale a tenté de brouiller le débat en adoptant un contre-projet légalisant le concubinage homosexuel, tout en refusant de le définir clairement. Cette audace dissimulait mal vos objectifs réels : preuve en est que lorsque les députés de la gauche plurielle ont pris à contre-pied cette prétendue solution alternative, en rétablissant le Pacs et en définissant sans ambiguïté le concubinage homosexuel, la droite s'est sentie prise au piège de ses propres contradictions. La majorité du Sénat a ainsi adopté le 11 mai la question préalable, estimant qu'une deuxième lecture du texte était une perte de temps. Quant à l'opposition de l'Assemblée, elle nous invite aujourd'hui, au mépris du rôle du Parlement, à faire de même alors qu'il s'agit pourtant d'une question de société essentielle. Prenez vos responsabilités. Ayez le courage de laisser transparaître votre côté réactionnaire et votre homophobie latente. Les parlementaires communistes, quant à eux, contribueront à faire adopter un texte qui répond à un défi contemporain, qu'il nous appartient de relever sans frilosité. C'est pourquoi nous nous opposerons fermement à cette manoeuvre de la droite (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe RCV). M. Claude Goasguen - Le groupe Démocratie libérale votera la question préalable car le Pacs est d'ores et déjà un échec ("Ah !" sur les bancs du groupe socialiste). C'est un échec car vous avez refusé de rechercher le moindre accord sur un sujet de société, alors même que cela eût été possible, nos concitoyens étant, plus que vous ne le pensez, soucieux de partager des valeurs communes. Au contraire, vous avez progressivement durci le texte. L'intervention de l'orateur communiste, sans doute sous la pression de considérations électorales immédiates... (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste) Je me contente de constater les termes qu'il a employés pour caractériser l'attitude de l'opposition. Je suis, pour ma part, amusé du changement de ton observé chez les députés communistes depuis quelques jours. Sur un sujet de société, il n'aurait pas été impossible de trouver un accord entre nous. Sur le fond, votre texte est mauvais. Je regrette que le Conseil d'Etat n'ait pas été consulté, la voie de la proposition de loi ayant été choisie ; il aurait pu nous éviter de longues discussions techniques. Il sera, en revanche, obligatoirement consulté sur les décrets d'application, ce qui vous causera quelques difficultés... Nous voterons donc la question préalable (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR). La question préalable, mise au voix, n'est pas adoptée. M. Jean-Claude Lenoir - Rappel au Règlement. Monsieur le Président, j'appelle votre attention sur un petit incident. Pendant que notre collègue Christine Boutin s'exprimait, un commissaire du Gouvernement a eu une attitude parfaitement discourtoise envers elle. Cette personne n'est plus au banc, un huissier lui ayant, semble-t-il, fait une observation. Je souhaite qu'il soit rappelé aux ministres que leurs collaborateurs doivent montrer la plus totale neutralité, ne serait-ce que par respect à l'égard des membres de l'Assemblée (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR). Mme Christine Boutin - Je vous remercie ! M. le Président - Je ferai part de votre Rappel au Règlement à la prochaine Conférence des présidents. Nous en arrivons à la discussion générale. Mme Monique Collange - Je n'étais pas encore intervenue à la tribune au sujet du Pacs, mais ce soir j'ai en vie de dire : stop, ça suffit ! Je suis révoltée par toutes les âneries que j'entends sur ce texte (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV ; protestations sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL). L'opposition s'est focalisée sur les homosexuels et a voulu faire peur à nos concitoyens ; j'aimerais qu'on parle un peu plus de tous les jeunes et moins jeunes qui sont intéressés par ce texte... Qui n'a pas dans sa famille ou dans ses amis une jeune fille ou un jeune homme qui vit avec son copain ou sa copine, et qui envisage de se marier plus tard, quand l'un et l'autre auront un vrai boulot ? Le Pacs est une solution provisoire, en attendant la stabilité professionnelle et financière. Quant aux moins jeunes, beaucoup ont été mariés et, pour des raisons diverses, se retrouvent sans leur conjoint ; le Pacs leur offre une protection si, tout en ne voulant pas rester seuls, ils ne souhaitent pas se remarier. Je suis excédée d'entendre M. de Courson prétendre qu'on va accorder trop d'avantages fiscaux aux personnes qui contracteront un Pacs. Est-ce scandaleux que deux personnes qui s'aiment additionnent leurs deux petites retraites ou leurs deux SMIC, dans une déclaration de revenus commune ? Est-ce scandaleux qu'une jeune fille qui vit avec l'homme de sa vie puisse bénéficier de sa couverture sociale ? J'en ai assez de l'hypocrisie de la droite bien-pensante et moraliste (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV), qui prétend que le mariage apporterait la sécurité à la femme et à l'enfant. Combien d'hommes mariés devant M. le maire et M. le curé ont abandonné femme et enfants pour aller conter fleurette ailleurs ? (Mêmes mouvements) Combien de femmes n'arrivent jamais à toucher leur pension alimentaire et font face seules aux problèmes quotidiens ? Où sont passés les devoirs du mariage ? Moi, je préfère un Pacs d'amour à un mariage d'intérêt ! (Mêmes mouvements ; exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Ce qui compte, c'est l'affection qui unit deux êtres. Mariage, concubinage, Pacs ne sont que des accessoires juridiques. Le groupe socialiste est déterminé et que vous le vouliez ou non, cette proposition de loi sera votée ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV) M. Claude Goasguen - Avec cette troisième et nouvelle lecture, nous arrivons presque au bout d'une procédure marquée par l'absence de dialogue entre nous. La majorité a refusé d'écouter nos arguments ; au mépris du Règlement, elle a redéposé une proposition de loi qui avait été régulièrement rejetée : le Conseil constitutionnel appréciera. Elle a choisi de passer en force. Après l'échec de la CMP, nous revoici quasiment au point de départ de la discussion. Nous continuerons pourtant à nous opposer à ce texte, sans illusions sur votre volonté de nous écouter, mais persuadés qu'une majorité de Français nous entendra. Notre société souffre d'insécurité, de précarité, d'absence de références. L'échec scolaire, la délinquance juvénile, l'exclusion ont aussi pour cause l'éclatement des familles, l'absence d'autorité parentale, la solitude. Or le Pacs entretient cette évolution : contrat précaire par essence, il conforte l'insécurité dans le droit des personnes. Susceptible d'être rompu unilatéralement, il institue la loi du plus fort et n'entretient même plus l'illusion du devoir de solidarité. Ses incohérences juridiques entraîneront de nombreux contentieux. Il ne prend en compte que la volonté individuelle des signataires, sans jamais garantir les droits des tiers, notamment des enfants. Par ailleurs, le Pacs entretient l'idée qu'une même institution peut régir des situations totalement différentes. Le principe de non-discrimination, qui dans son acception positive implique l'égalité des droits et la liberté de la vie privée, notamment du choix de l'homosexualité, ne peut justifier l'artifice d'un statut commun à des couples hétérosexuels, des couples homosexuels et des unions de célibataires pour des raisons financières. Enfin, ce texte sera source de difficultés considérables, d'abus multiples et de contentieux divers. Comment accepter, en particulier, qu'on donne la carte de séjour au signataire étranger d'un Pacs en situation irrégulière ? Par ailleurs, le Pacs va bouleverser le droit de la famille et de la filiation. Vous soutenez, Madame la Garde des Sceaux, que le Pacs n'est pas un mariage bis, et qu'il n'aura aucun effet sur le mariage et la famille. Et, dans la construction du texte, ses auteurs ont cherché à dématrimonialiser le dispositif, ne faisant aucune référence à la famille et aux enfants. Soit. Pourtant cette tentative de séparation entre le Pacs et la famille n'est qu'une mystification ; sur de nombreux points le Pacs aura des implications pour le droit de la famille. Il n'est d'ailleurs pas anodin que les membres de la commission réunie aujourd'hui aient, dit-on, protesté contre cette création, qui vient briser la cohérence des travaux à venir sur la réforme globale du droit de la famille. Votre volonté de séparer le Pacs et la famille est artificielle. D'ailleurs, dans le code civil, vous introduisez le Pacs au chapitre relatif au droit des personnes, entre le mariage et le divorce. A quel titre les futurs étudiants en droit l'étudieront-ils ? A celui du droit des contrats, ou du droit des personnes et de la famille ? Vous savez bien que la bonne réponse est la seconde. Et en effet le Pacs affectera, fût-ce indirectement, l'évolution du mariage. Celui-ci est une institution hétérosexuelle, et vous n'avez pas cédé à la revendication de certains groupes qui auraient souhaité la reconnaissance du mariage homosexuel. Pour contourner cette difficulté, vous créez un statut global, ouvert à tous ceux qui -pour vous citer- "ne peuvent ou ne veulent se marier". Le Pacs est donc conçu, pour les couples hétérosexuels qui ne veulent pas se marier, comme un avatar, et, pour les couples homosexuels qui ne le peuvent pas, comme un succédané. Le mariage a une finalité, que ne peut pas avoir le couple homosexuel : mettre au monde des enfants pour perpétuer la société. C'est ce qui justifie que l'Etat en garantisse la stabilité par des avantages fiscaux et sociaux. Ainsi la confusion à terme entre les deux statuts semble impossible. Pourtant, en reconnaissant aux couples homosexuels un statut, vous résisterez difficilement à la pression de ceux qui considèrent que le Pacs n'est qu'une étape. Vous mettez le doigt dans l'engrenage : vous quittez la sphère privée pour vous engager dans la socialisation de l'homosexualité. Mme Véronique Neiertz - Et alors ? M. Claude Goasguen - Restez calme. Mme Véronique Neiertz - Ca, c'est de l'homophobie ! M. le Président - Mes chers collègues, je vous demande de faire, certes, vos interjections habituelles, mais sur un mode plus bas et moins déclamatoire, afin que l'orateur puisse poursuivre. Je vous en serai reconnaissant. M. Claude Goasguen - Pour les couples hétérosexuels, vous n'échapperez pas à la mise en concurrence des deux statuts. Or cette concurrence est évidemment déloyale. Face aux facilités du Pacs, le mariage poursuivra son déclin ; il deviendra une institution minoritaire, fondée sur la croyance plus que sur la reconnaissance civile. Quel paradoxe : vous qui invoquez sans cesse la laïcité, vous balayez les acquis de 1789, et le mariage civil, laïque, égalitaire. Seuls accepteront désormais le mariage ceux qui en ont les moyens matériels, ou ceux qui le fonderont sur une démarche religieuse. Quel intérêt conservera en effet le mariage, alors que le Pacs durable comportera des avantages similaires, sans obligation ni contrainte ? La création du Pacs préfigure ainsi la conception à venir du mariage. Ou bien celui-ci demeurera une institution lourde, et il se marginalisera. Ou bien il abandonnera sa dimension institutionnelle. On arrivera donc à ce paradoxe : c'est au Pacs que le mariage empruntera ses principales caractéristiques, en perdant sa dimension institutionnelle et symbolique. Avant tout débat sur la famille, vous aurez "pacsisé" le mariage ! Mme Véronique Neiertz - Très bien ! M. Claude Goasguen - Les intérêts matériels du couple primeront l'intérêt de l'enfant. Mais c'est aussi le droit du divorce qui subira les effets du Pacs. Votre proposition organise la rupture du Pacs. Or l'encadrement du divorce a pour but de préserver tous les intérêts en présence. Face à la facilité de sortie du Pacs, le divorce pourra-t-il résister ? Pourra-t-on encore canaliser la sortie du mariage, alors qu'une simple déclaration suffira pour sortir du Pacs ? Celui-ci engage la déjudiciarisation du divorce. Enfin, une troisième conséquence -toujours indirecte- sur le droit de la famille affectera le droit de la filiation. Vous affirmez que celle-ci n'est pas concernée. Mais en refusant d'écrire dans la loi que le Pacs ne permet pas l'adoption par un couple homosexuel, vous prenez une lourde responsabilité. Le jurisprudence sur ce point n'est pas fixée : le juge excipera de la reconnaissance que vous opérez de l'égalité des liens personnels, qu'ils soient homosexuels ou hétérosexuels, pour considérer bientôt comme nulle toute discrimination contre l'adoption homosexuelle, que la loi n'interdit pas. Le pacsé homosexuel, considéré comme célibataire, pourra adopter. Votre refus de légiférer est de fait consentement à une évolution dont vous feignez de ne pas voir les prémisses, que souligne pourtant l'évolution de nos voisins européens. C'est une illusion de prétendre qu'un statut quasi-matrimonial proposé à tous les couples pourra à terme ne pas ouvrir les mêmes droits à tous, qu'il s'agisse de l'adoption ou de la procréation médicalement assistée. Le principe de non-discrimination entre personnes se trouvant dans des situations comparables impliquera, pour les homosexuels comme pour les hétérosexuels, le droit à l'enfant. Et bien sûr nous sommes inquiets des propos du rapporteur, selon lequel le Pacs est une première étape vers l'adoption homosexuelle. Une fois de plus vous aurez confirmé une des évolutions les plus critiquables de notre société, par laquelle la volonté des individus l'emporte sur la protection et l'intérêt de l'enfant. Avec le Pacs, vous consacrez l'ère de l'enfant-objet ! Et vous compromettez gravement l'évolution de notre société (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF). Le Pacs n'est donc pas indifférent à la famille. Il est un danger pour elle. Le droit des personnes impliquant des droits acquis, il nous sera très difficile de le remettre en cause. Vous avez voulu en effet passer en force, sur un sujet de société, et le Pacs risque de perturber pour très longtemps tout votre droit civil. Pour la première fois une loi touchant au droit des personnes est imposée de façon autoritaire, en rompant avec la tradition de dialogue et de recherche du consensus qui avait présidé aux débats sur l'adoption ou sur la bioéthique. Cependant ne vous réjouissez pas trop tôt ! Nous ne laisserions pas votre Pacs étouffer les fondements juridiques de notre société. Nous rendrons le mariage et la filiation plus attractifs par des mesures fiscales, sociales et patrimoniales -tout en assurant aux homosexuels qui le souhaitent un contrat privé de vie commune spécifique, sans confusion possible avec la famille. Nous ferons tomber votre Pacs en désuétude. Quant à vous, vous aurez manqué de courage politique : en cédant à la pression de certaines associations, sans assumer le choix de légiférer exclusivement pour les homosexuels, vous avez créé une construction juridique hybride. Si bientôt vous pourrez vous enorgueillir d'avoir à moitié tenu vos engagements électoraux envers des lobbies, c'est au prix d'un grave bouleversement de l'avenir de la famille, indirectement attaquée sans que vous ayez examiné au préalable son évolution à venir. Il reste quelques jours aux députés de la majorité pour réfléchir aux conséquences à terme de leurs choix idéologiques. Je ne les sens pas très fiers, malgré les cris de quelques-uns d'entre eux. Quoi qu'il en soit, les Français vous demanderont compte de votre Pacs, quand viendront les échéances législatives ! (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF) M. Yves Cochet - C'est plus de deux ans après le début de la législature que le Pacs va être définitivement adopté, alors que de nombreuses personnes l'attendent depuis de longues années. Il est dommage qu'il ait dû pâtir des excès procéduriers de l'opposition, qui a tenté de détourner la volonté exprimée par le suffrage universel lors des dernières législatives. Je félicite ceux qui, envers et contre tous, ont cru à ce texte, et ont permis par leur ténacité que le Pacs devienne réalité, en particulier nos deux rapporteurs. Les Verts se sont d'ailleurs associés à la proposition de loi de M. Michel. Que tous ces parlementaires, qui ont su relayer au sein de l'Assemblée la volonté de nombreuses associations, soient remerciés. Je réaffirme le soutien des Verts à ce texte. Certains collègues, des deux côtés de l'hémicycle, aiment invoquer la République, quel que soit le sujet traité. Or la République repose sur trois valeurs fondamentales : la liberté, l'égalité, la fraternité. Le Pacs les renforce-t-il ? Dans les trois cas, la réponse est oui. Ainsi s'inscrit-il dans la longue lignée des avancées législatives progressistes. La première place attribuée à la liberté dans la devise républicaine nous incite à toujours vérifier que le texte contribue à accroître les libertés individuelles. L'inscription du Pacs dans le code civil correspond au droit reconnu à chacun de choisir sa vie, ses amours, le type d'union qu'il souhaite contracter. Le Pacs marque également un grand pas vers davantage d'égalité des droits. Au nom de quoi refuser à deux individus de sceller l'union de leur choix ? "Au nom de la tradition", ai-je entendu répondre. Ce n'est pas ainsi que la société progresse. Certains ont dénoncé la perspective du mariage homosexuel, comme M. Goasguen. En quoi serait-elle scandaleuse ? En vérité, les Verts n'auraient pas été hostiles au mariage de couples homosexuels. Le Pacs ne va pas dans ce sens, mais il répond à d'autres aspirations. Désormais, la loi reconnaît trois types d'union, ce qui n'est pas trop pour traiter des situations très différentes. Comme l'a dit le rapporteur en commission, chaque union produira des effets juridiques proportionnels au degré d'engagement et de contrainte qu'elle comporte. Enfin le Pacs encourage incontestablement la fraternité, en organisant la solidarité entre deux personnes, et en faisant reculer l'homophobie, euphémisme parfois utilisé pour des discriminations qui ont pu conduire à des crimes. Que l'on pense à la seconde guerre mondiale, mais aussi à l'OMS qui a longtemps considéré l'homosexualité comme une maladie mentale encore qualifiée en 1960, par la loi Debré, de "fléau social". Mme Christine Boutin - Les Soviétiques envoyaient les homosexuels au Goulag ! M. Yves Cochet - Néanmoins, nous divergeons d'avec le texte sur quelques points. Ainsi, pourquoi le Pacs n'est-il pas conclu en mairie ? Ce serait plus pratique, et c'est là d'abord que la République est présente. Ensuite, pourquoi les droits attachés au Pacs ne prennent-ils pas effet dès sa signature ? Pourquoi cette période probatoire spécifique, qui est une sorte de discrimination larvée ? Où donc est le problème ? Pourquoi, à ce compte, ne pas soupçonner tout mariage de la même manière ? Ainsi, les droits attachés au mariage, qui sont les plus importants, sont accordés sans délai, et des droits moins importants tarderaient davantage. Cette logique m'échappe. Alors que nous venons d'adopter un projet relatif à la présomption d'innocence, la suspicion affichée à l'égard des pacsés nous surprend. Des questions sont restées sans réponse. Par exemple, sur la liberté de fonder une famille, le débat s'est refermé sur des certitudes considérées comme immuables. Nous voterons à nouveau le texte ; non pas pour satisfaire je ne sais quel lobby, mais pour reconnaître les droits fondamentaux de la personne humaine ; ni non plus pour flatter une communauté, puisque le Pacs s'adresse à tous, mais parce que le Pacs représente une avancée républicaine et solidariste (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV, du groupe socialiste et du groupe communiste). M. Henri Plagnol - Il est trop facile de détourner, comme on vient de le faire, notre belle devise républicaine en présentant le Pacs comme un progrès du droit. C'est le contraire qui est vrai. S'il s'était agi seulement de mettre fin aux discriminations frappant les homosexuels, nous aurions voté le texte avec vous des deux mains, et nous avions fait des propositions concrètes dans ce sens. Mais le Pacs empiète sur la traditionnelle frontière républicaine entre vie privée et vie publique, en obligeant à rendre publics des choix privés. Cette intrusion de l'Etat et du législateur fait reculer la liberté (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR). Le Pacs apporterait-il davantage d'égalité ? Il est surprenant que la majorité se réjouisse d'un texte qui érige en dogme la loi du marché pour la famille, puisqu'à celle-ci s'applique le droit du contrat, qui est la loi du plus fort. En réalité, le Pacs est pour l'essentiel un produit fiscal. De plus, quand s'ouvrira le temps des contentieux ou de la séparation, c'est encore la loi du plus fort qui prévaudra. Curieuse conception de l'égalité ! Enfin, est-ce servir la fraternité républicaine que de défendre une législation communautariste, et d'appliquer un même statut à des couples placés dans des situations concrètes totalement différentes ? Comme si des couples ayant vocation à avoir des enfants étaient justiciables des mêmes règles que ceux qui, à vous entendre, ne pourront pas en avoir ! En fait, vous détournez la devise républicaine au profit d'une construction juridique qui est aux antipodes de la République. Le plus grave est que vous prétendiez légiférer sur les couples sans qu'il y ait de conséquences sur les familles. Pourtant, les principales victimes de votre démarche, ce seront les enfants, dont le texte ne dit pas un mot. Nous sommes opposés à un statut élaboré pour des raisons purement idéologiques. On nous a parlé tout à l'heure du Pacs d'amour et du mariage d'intérêt. Or le Pacs sera principalement une union d'intérêt. Nous souhaitons qu'il y ait encore un mariage d'amour (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR). M. Bernard Birsinger - Après huit mois de débats, nous nous rapprochons du but. Bien sûr, l'opposition a montré sa capacité d'obstruction à un texte porteur de droits nouveaux. Mais l'exigence majoritaire va devenir loi. Nous sommes heureux de contribuer au pacte civil de solidarité, qui fait avancer les droits et les libertés, et reculer les discriminations. Nous n'avons jamais cessé d'oeuvrer pour le respect de la personne humaine, quels que soient ses choix de vie. Il s'agit de répondre à l'évolution de notre société, dans laquelle des aspirations nouvelles s'expriment. La République, si elle n'a pas le droit de s'immiscer dans la vie privée des citoyens, a la responsabilité d'accorder à tous sa protection, de permettre à chacun de bénéficier de nouveaux droits. Et c'est bien ce qu'apporte le Pacs, au regard de l'évolution récente de la famille. Ces dernières décennies, les femmes ont pris une place nouvelle dans la société. Il reste beaucoup à faire pour une réelle égalité des droits, mais ce rééquilibrage a des répercussions sur la famille. Aujourd'hui, 87 % des unions se forment hors mariage. 4,8 millions de personnes vivent en couple sans être mariées. Deux enfants sur cinq naissent hors mariage. Deux millions d'enfants vivent avec leurs parents non mariés. C'est à cette famille nouvelle que le pacte civil de solidarité offre une plus grande stabilité juridique. Pour s'épanouir les enfants ont besoin d'un cadre familial solidaire et protecteur. Mme Christine Boutin - Vous ne croyez pas un mot de ce que vous dites ! M. Bernard Birsinger - Sans rien ôter à ceux qui choisissent de se marier, le Pacs est un élément d'une politique familiale qui intègre mieux les contours contemporains de la famille. Les couples pourront désormais choisir le statut qui correspond le mieux à leur conception de la vie familiale. En ce qu'il constitue une reconnaissance sociale et juridique des couples non mariés, notamment homosexuels, le Pacs revêt une portée juridique et symbolique. D'autres pays ont reconnu avant nous les couples homosexuels, et l'on continue pourtant de s'y marier et d'y avoir des enfants. Sans doute parce qu'ils étaient les premières victimes des discriminations, les homosexuels et leurs associations ont eu l'immense mérite de faire aboutir cette avancée pour l'ensemble de la société. Les députés communistes n'auront pas ménagé leurs efforts pour y parvenir. Nous sommes en effet du combat contre toutes les discriminations et pour l'acceptation des différences, et c'est cette conception qui nous a conduits à relayer dans cet hémicycle la démarche de ceux qui se battent depuis des années. Nous nous félicitons des progrès enregistrés depuis septembre : ouverture de la qualité d'ayant-droit, levée des délais pour la transmission du bail et les abattements sur succession, retrait de l'article sur les fratries, extension de l'article 62 de la loi de 1984 sur la fonction publique, reconnaissance par le code civil du concubinage sans distinction de sexe -rompant avec la jurisprudence rétrograde de la Cour de cassation. Pour autant, le texte qui nous est soumis mérite d'être encore amélioré. Nous proposerons, comme en première lecture, que le Pacs soit signé en mairie, institution la plus proche des citoyens, que soit levé le délai d'imposition commune, notamment pour les couples ayant déjà des enfants ou vivant ensemble depuis plusieurs années, et que la loi ouvre un véritable droit au séjour pour les étrangers. Nous regrettons que l'article 40 interdise à notre Assemblée de relever l'abattement sur les successions et de prendre une mesure relative aux pensions de réversion. Nous devrons également veiller à ce que les décrets d'application soient pris sans trop attendre après l'entrée en vigueur de la loi et à nous doter de nouveaux outils juridiques contre l'homophobie, dans le même esprit que la loi Gayssot. Enfin, je tiens à rappeler que le rapport sur les droits de l'Homme adopté le 17 février 1998 par le Parlement européen, et dont Aline Pailler a été la cheville ouvrière, invite tous les Etats membres à reconnaître l'égalité des droits entre hétérosexuels et homosexuels. Comme l'a dit Michela Frigiolini, jeune militante d'une association homosexuelle, "l'harmonisation par le haut n'est plus un discours dans le vide, mais une question qui se pose concrètement". Depuis trente ans, notre société a trouvé la force d'ouvrir de nouveaux droits et de nouvelles libertés, au terme de débats de société tels que ceux sur l'IVG, la réforme du mariage ou l'abolition de la peine de mort. Le Pacs est un nouveau et important moment de ce processus. Les députés communistes sont partie prenante de ce progrès de civilisation (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste). M. Patrick Devedjian - Dans ce débat qui n'est pas encore achevé, l'opposition a soulevé de nombreuses objections, que la majorité a toutes balayées d'un revers de manche, sans cesser pour autant de modifier son texte pour éviter les écueils juridiques que nous lui signalions. Il en est résulté un dispositif de plus en plus complexe, auxquels les qualificatifs descriptifs n'ont pas manqué. Vous avez vivement protesté chaque fois que nous avons taxé le Pacs de "sous-mariage", mais pour discuter cette assertion, encore faut-il définir ce qu'est le mariage. Or, c'est ce que ne fait pas, justement, le code civil, qui se contente d'en énoncer les caractéristiques, car le mariage est un fait social qui ne se laisse point réduire à une catégorie juridique. Certes, Portalis ou, plus près de nous, le Dalloz, en ont donné des définitions, mais force est de constater que ces définitions s'appliquent parfaitement au Pacs, lequel n'est en vérité qu'une variété du mariage, tout comme, d'ailleurs, le concubinage. En faisant du Pacs et du concubinage des institutions et des contrats, vous êtes en vérité en train de créer trois états de mariage, dont vous autorisez, qui plus est, le cumul : on pourra être concubin et marié, ou encore concubin et "pacsé". En d'autres termes, vous institutionnalisez juridiquement la bigamie ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) Plusieurs députés RPR et UDF - Eh oui ! M. Patrick Devedjian - Je veux bien reconnaître que telle n'était pas votre intention, mais tel est bien votre aboutissement. Le Sénat avait glissé dans votre texte une "pilule empoisonnée", qui était incompatible avec lui, et que vous avez cru habile de lui incorporer, mais cette fausse habileté était une vraie maladresse, puisqu'elle suffit à rendre le texte inconstitutionnel : le Conseil constitutionnel a condamné par deux fois, en 1973 et en 1993, la polygamie, que le nouveau code pénal réprime par ailleurs en son article 433-20. Mme Christine Boutin - Très belle démonstration ! M. Patrick Devedjian - Votre entêtement nous fournit un moyen royal de recours auprès du Conseil constitutionnel. Vous allez affaiblir la famille, non pas délibérément sans doute (Mme Neiertz s'exclame), mais l'enfer est pavé de bonnes intentions. Sans doute n'êtes-vous pas contre la famille, vous en avez une et vous l'aimez. Mais vous ne prenez pas de la famille le même soin que nous (Mme Neiertz s'indigne). Je parle évidemment de l'institution familiale. Il n'y a pourtant rien de plus moderne que la famille (Mme Neiertz s'exclame). M. le Président - Je crois, Monsieur Devedjian, que Mme Neiertz souhaite vous interrompre. M. Patrick Devedjian - Je le lui permets. Mme Véronique Neiertz - Nous avons toujours eu des relations courtoises, Monsieur Devedjian (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR). Il nous est même arrivé d'être d'accord... M. Patrick Devedjian - Mais bien sûr. Mme Véronique Neiertz - Par exemple sur le génocide arménien. M. Patrick Devedjian - Quel dommage que la même logique n'ait pas été poursuivie au Sénat ! M. le Président - Laissez parler Mme Neiertz, il ne s'agit pas d'instaurer entre vous un chant amoebée ! Mme Véronique Neiertz - En tout cas, cette leçon de M. Devedjian sur la famille est inattendue quand on connaît la vie que nous, députées, devons mener. Alors, qu'un homme vienne nous expliquer comment il faut élever les enfants ! M. Jean Ueberschlag - Vous dites n'importe quoi ! M. Jean Besson - Il faut un contrôle anti-dopage ! M. Patrick Devedjian - Quand je parlais de votre conception de la famille, je voulais dire la conception que la gauche a de la famille, la gauche qui a surchargé fiscalement la famille. La famille, c'est pourtant très moderne, c'est la meilleure des solidarités -bien plus sûr que le RMI. C'est aussi le meilleur atout pour l'intégration, je l'ai constaté en banlieue. D'ailleurs, vous le pensez aussi, mais vous êtes aveuglé par votre vision communautariste de la société. Votre politique sociale traite la société par tranches, vous légiférez pour des catégories. Nous, nous croyons que la République est universelle et que ses institutions s'adressent à tous. C'est pourquoi nous sommes pour le mariage, dont nous pensons qu'il a vocation à demeurer unique, et c'est pourquoi nous voterons avec la même résolution que devant contre ce projet (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). M. Jean-Pierre Blazy - L'adoption du Pacs suscite depuis des mois de vigoureux débats. L'Assemblée nationale a procédé en seconde lecture à d'importantes modifications, et la majorité du Sénat, dans son dogmatisme, ayant tout rejeté en bloc, j'adhère pleinement à la proposition de nos rapporteurs de rétablir à l'identique le texte équilibré que nous avions adopté en seconde lecture. A l'origine du Pacs, il y a la volonté de mettre la législation en phase avec la réalité sociale contemporaine, et le constat qu'un nombre croissant de couples ont un projet de vie commune, mais ne veulent pas se marier. Le Pacs est une forme nouvelle d'union civile. Il n'y a là nulle attaque contre la famille, car ce qui fait la famille, c'est l'enfant. La famille demeure la cellule de base de la société, le lieu privilégié de socialisation de l'enfant, mais ses formes évoluent dans le temps. S'en tenir obstinément aux schémas traditionnels revient à se voiler la face, à refuser de voir les évolutions du monde qui nous entoure, et conduit à terme, non seulement à exclure une partie croissante de la population de la reconnaissance juridique et sociale, mais à exclure le législateur de la réalité sociale. Le Pacs prend en outre en compte un état de fait, l'homosexualité, que vous, l'opposition, avez toujours rejeté comme un comportement déviant. Réduits à la marginalité par l'intolérance, les homosexuels revendiquent aujourd'hui un statut légal leur permettant de vivre à deux, d'être reconnus comme citoyens. Le Pacs leur offre cette possibilité. Nous avons refusé cependant de créer pour eux une case juridique spécifique, car nous n'acceptons pas la "ghettoïsation" d'une partie de nos concitoyens. Cette proposition de loi est moderne. Elle garantit droits et protection à tous les couples qui ne peuvent ou ne veulent pas se marier -près de cinq millions de personnes seront ainsi concernées par le Pacs. M. Jean Ueberschlag - Qu'en savez vous ? M. Jean-Pierre Blazy - L'enjeu, c'est le respect par l'Etat des choix amoureux de chacun, sans déterminer à la place des individus le sexe de leur partenaire. Face à une société où triomphent les valeurs de liberté, d'innovation, de construction autonome de sa vie, le Pacs représente un effort d'adaptation des structures juridiques aux tendances culturelles de fond. Mais le fait de proposer au citoyen un choix réel pour sa vie de couple ne doit pas signifier un droit du consommateur de tester à sa guise différentes formules. Le Pacs comporte aussi des devoirs. Le Pacs ne menace en rien l'institution du mariage, quoi que prétende l'opposition, qui va jusqu'à nous accuser, comme tout à l'heure M. Devedjian, dans son délire provocateur, de vouloir instituer la bigamie ! (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR) La famille demeure étroitement liée au mariage, le Pacs ne touche pas au droit de la famille. L'instauration du Pacs ne fait qu'ajouter un lien de solidarité supplémentaire. Le Pacs est un contrat, un engagement responsable qui vise à tisser des liens étroits et durables entre les personnes. Ses adversaires de l'opposition négligent les devoirs qu'il comporte : les partenaires se doivent aide mutuelle, ils sont solidaires à l'égard des dettes contractées pour les besoins de la vie courante. Les biens acquis sont en principe indivis. Et à ceux qui, tel M. de Courson, qualifient le Pacs de porte ouverte à la fraude fiscale, je dirai que, si pour eux la vie commune se réduit à la recherche d'avantages fiscaux, ils ont une bien piètre image du mariage. Porteur de tolérance vis-à-vis des choix de vie personnels et d'encouragement à une solidarité renforcée entre citoyens, le Pacs est une réponse adaptée aux exigences de notre époque. En s'engageant dans une obstruction démesurée, l'opposition mène une fois de plus une bataille d'arrière-garde qui manifeste à nouveau quel abîme sépare les partis de la réaction et ceux de la modernité. Votre rejet du Pacs est stérile, vous n'avez tenté à aucun moment de participer au débat de façon constructive, vous bornant à agiter de vieux démons. Le Pacs est, comme le mariage, au service de l'amour, un amour digne de respect, quelles que soient les préférences sexuelles, et pleinement reconnu par l'ensemble de la société (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). Mme Christine Boutin - Avant toute chose, je voudrais citer un extrait du compte-rendu de la première commission du congrès des notaires de France, qui s'est tenu à Marseille en mai dernier. Les membres de la commission, qui devaient traiter de l'union libre, après avoir souligné le défi paradoxal d'encadrer par la loi les relations de ceux qui souhaitent avant tout n'avoir aucune contrainte, ont reconnu n'avoir pas à discuter des choix idéologiques et moraux propres à chacun, mais seulement à appliquer la loi et à proposer des solutions raisonnées, équitables et sûres. "Le Pacs, poursuivaient-ils, ne constitue pas une réponse claire et adaptée. Ses lacunes techniques sont nombreuses et la volonté politique est si présente qu'elle s'exprime au détriment de l'efficacité technique." Il n'est donc pas mentir que de faire état des réticences des notaires. Je regrette que les mots de M. Michel aient tout à l'heure dépassé sa pensée, ce à quoi il ne nous avait pas habitués. Nous voilà de nouveau réunis pour traiter du Pacs. N'aurions-nous pas dû ou pu confronter à cette occasion nos projets de société respectifs au lieu de nous limiter à l'étude des revendications des lobbies homosexuels minoritaires ? L'opposition n'a cessé de poser des questions de fond auxquelles elle n'a pas obtenu de réponse. Il est temps d'arrêter les faux-fuyants, les tours de passe-passe, les procès d'intention et les invectives. Contrairement à ce que vous prétendez, la notion de couple et la notion de famille sont indissociables. Nous n'avons pas la même conception de la famille... Plusieurs députés socialistes - Pour sûr ! Mme Christine Boutin - Le Pacs en est le révélateur. Mais le reconnaître serait pour vous admettre l'incohérence de l'action du Gouvernement qui prétend à la fois créer le Pacs et renforcer la famille. Nous n'entendons pas la même chose par le mot famille. Pour nous, la famille naît de l'union d'un homme et d'une femme qui décident ensemble d'avoir et d'élever un ou plusieurs enfants. Cette définition prend acte de trois éléments constitutifs que la famille est seule à regrouper : la différence sexuelle, l'engagement et la filiation. Pour vous, il y a famille dès lors qu'existe un seul de ces éléments, plus particulièrement la présence d'un enfant. Peuvent constituer une famille toutes les situations de fait dans lesquelles se trouvent un adulte au moins et un enfant au moins reliés par un lien de filiation. Selon la conception à laquelle on se rallie, les conséquences à tirer sont très différentes. On nous dit, au mépris de la logique, que la famille n'est nulle part définie ou encore que sa définition peut évoluer. La réalité, c'est que l'existence du Pacs fera qu'un homme et une femme sera moins enclin à s'engager publiquement pour avoir un ou plusieurs enfants. Vous prétendez que deux personnes homosexuelles vivant avec un enfant peuvent constituer une famille. C'est votre droit mais c'est jeter la confusion que de vouloir désigner par les mêmes mots des réalités aussi radicalement différentes. Nous avons démonté un à un tous les arguments invoqués en faveur du Pacs. Une seule question demeure. Quelle famille et quelle société voulons-nous pour demain ? Une société réduite à une juxtaposition d'individus, chacun n'étant responsable que de sa propre personne, ou une société dont le socle est la famille ? Une société fondée sur l'individualisme ou sur la solidarité ? Une société fondée sur l'irresponsabilité et l'illusion ou sur le sens de l'engagement et le principe de réalité ? Une société craintive ou une société audacieuse ? Une société destructurée ou une société qui fournira des repères solides à ses enfants ? La position de chacun par rapport au Pacs trahit sa conception profonde de la société et de la personne humaine. C'est votre droit que de vouloir le Pacs mais reconnaissez que cela ne sera pas sans conséquence sur la famille et sur la société. Reconnaissez que cela nie le principe de l'altérité homme-femme, qui est le principe fondateur de toute construction sociale et politique. Nous n'avons pas tous les mêmes aspirations et c'est normal. Nous sommes à la croisée des chemins : pour ou contre le Pacs. Le vote ne sera pas neutre. Chacun d'entre nous doit pouvoir choisir en toute liberté et en pleine conscience des enjeux. Puisque vous voulez le Pacs, vous l'aurez sans doute -la majorité parlementaire est au garde-à-vous ! J'aimerais me rassurer en me disant que vous seuls en porterez la responsabilité. Le problème est que tous les Français en supporteront les conséquences (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR). Mme Yvette Benayoun-Nakache - Lourde tâche que de succéder à Christine Boutin et de clore la discussion générale ! Nous voilà réunis pour examiner en troisième lecture un texte important. En deuxième lecture, les sénateurs, sans doute épuisés, ont tout simplement proposé de réduire ce projet de société à une nouvelle définition du concubinage. C'est à se demander s'ils ont réellement lu le texte ! Pour ma part, je regrette la verve acide que le Pacs a suscité, le conservatisme qu'il a mis au jour chez certains élus et certains de nos concitoyens, que l'on a malheureusement retrouvé lors du débat sur la parité ou tout récemment sur les gens du voyage. Comme il est difficile d'introduire des idées nouvelles qui dérangent ! Sur le Pacs, on aura tout entendu. Se seront manifestés à cette occasion les défenseurs d'un ordre moral faisant de l'homosexualité une menace par rapport au noyau familial traditionnel. Les homosexuels ont été accusés de constituer un lobby visant à défaire l'ordre social, incitant nos concitoyens à un laisser-aller malsain. Certains craignent peut-être que l'avènement du troisième millénaire s'accompagne d'événements apocalyptiques et que l'homosexualité n'y soit pour quelque chose. C'est pourtant une pratique ancienne, affirmée dans la démocratie athénienne, étouffée par le christianisme, devenue une transgression dans les sociétés modernes. Je suis heureuse, pour ma part, de faire partie de ceux qui défendent non pas des déviances sociales mais des idées qui contribuent au progrès et à l'affirmation des valeurs humanistes, dont chacun aime à se revendiquer sans avoir toujours le courage de les défendre au moment où elles peuvent s'incarner dans un projet de société. Ce texte sera une pièce-maîtresse pour faire évoluer notre société vers plus de tolérance et d'écoute de l'autre. Le projet de loi sur les gens du voyage... Plusieurs députés RPR, UDF, DL - Ce n'est pas le sujet ! Mme Yvette Benayoun-Nakache - ...tente de trouver un compromis permettant une coexistence sans heurts entre nomades et sédentaires, dans le respect des différences. Le Pacs, lui, prend en compte les souhaits de millions de personnes qui se reconnaissent dans une forme d'union différente du mariage. Il est naturel que ceux qui ont érigé ce lien traditionnel en modèle social unique s'insurgent face à un projet qui le bouscule sans pour autant le remettre complètement en question. Ce sont eux qui font aujourd'hui figure de lobbies, nous inondant de propos acerbes, se laissant aller à des considérations qui font froid dans le dos. Ils ne nous donnent que plus de force pour défendre nos idéaux d'ouverture et de tolérance (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV). La discussion générale est close. MOTION DE RENVOI EN COMMISSION M. le Président - J'ai reçu de M. José Rossi et des membres du groupe Démocratie libérale une motion de renvoi en commission, déposée en application de l'article 91 alinéa 6 du Règlement. M. Cochet remplace M. Paecht au fauteuil présidentiel. PRÉSIDENCE DE M. Yves COCHET vice-président M. François Goulard - Le malheureux feuilleton du Pacs restera dans les annales parlementaires comme l'exemple absolu de ce qu'il ne faut pas faire : choix hypocrite d'une initiative parlementaire, conduite inconséquente du débat, préparation laborieuse d'un texte mal pensé, malvenu, inutile, injuste, dangereux et lourd de conséquences pour l'avenir (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR). Mais une chose au moins n'aura pas changé depuis le début, c'est le combat résolu que nous, députés de l'opposition, aurons mené et continuerons de mener contre ce mauvais projet. Vous espériez peut-être voir la combativité de l'opposition s'émousser, son courage retomber : eh bien non ! En inscrivant ce débat de troisième lecture à quelques jours des élections européennes, vous espériez peut-être que nous serions absents : eh bien non ! Comme d'autres, engagé dans la campagne européenne, j'ai pensé qu'il était de mon devoir de venir dire ce soir à nouveau mon opposition à ce texte ! Plusieurs députés socialistes - Quel courage ! M. François Goulard - Si quelqu'un contestait le droit de l'opposition à manifester son hostilité à celui-ci à chaque lecture, il se tromperait lourdement au regard des exigences de la démocratie. Les navettes entre l'Assemblée nationale et le Sénat, les motions de procédure existent pour que les textes soient examinés avec toutes les précautions nécessaires. De même, notre droit à déposer des amendements est absolu. Dès le stade de la préparation de ce texte, la méthode n'a pas été la bonne. Sur des sujets touchant à la vie privée, il faut assurer la plus large concertation, entendre toutes les familles de pensée, toutes les associations concernées, et laisser tout son temps à la réflexion. Or pressés par une toute petite minorité, vous avez pensé que deux rapports préparatoires, d'ailleurs parfaitement contradictoires, pouvaient faire office de débat. Vous auriez dû sentir dans tout le pays une hostilité réelle à vos projets. En outre, vous avez choisi d'avancer masqués : le Gouvernement, au lieu de présenter un projet de loi, a joué la fausse initiative parlementaire. La presse nous donnait le détail des arbitrages rendus au sein du Gouvernement, la Chancellerie tenait la plume... Ce manque de courage politique n'a pas été un facteur de clarification pour l'opinion. Vint le Pacs première formule. En l'inscrivant à l'ordre du jour en fin de semaine, vous pensiez qu'il serait discrètement voté. Le coup de tonnerre que fut l'adoption de l'exception d'irrecevabilité défendue par mon collègue Jean-François Mattei a révélé la puissante mobilisation de l'opposition et, surtout, un malaise évident des députés socialistes. Nous nous souvenons tous de cette journée du 9 octobre où, malgré les efforts désespérés du président du groupe socialiste pour rameuter ses troupes, ils furent nombreux à préférer leurs pantoufles et leur circonscription à l'affirmation d'une position que leurs électeurs réprouvaient. Je rappelle d'ailleurs, comme l'a fait mon collègue Lenoir en défendant une motion de procédure restée fameuse, qu'aucun d'entre vous, au moment des élections législatives de 1997, n'avait fait figurer dans sa profession de foi la proposition de loi créant le Pacs ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste ; applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF) Mme Dominique Gillot - Si ! M. François Goulard - Devant ce fiasco, vous auriez pu choisir la voie de la sagesse et de la réflexion. Au lieu de cela, en violant allègrement l'esprit, sinon la lettre, du Règlement, vous avez redéposé la même proposition de loi, en obtenant volens nolens la signature de tous les députés socialistes. M. Jean Ueberschlag - Les "malgré-nous" du Pacs ! M. François Goulard - Au cours des deux lectures qui ont suivi, tous nos amendements ont été systématiquement repoussés. M. Patrick Bloche, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles - C'est faux ! M. François Goulard - Les tentatives du Sénat pour aboutir à une forme de consensus n'ont pas été davantage couronnées de succès. En deuxième lecture, le Sénat a voté la question préalable ; nous retrouvons donc le texte voté par notre assemblée. Pour justifier ce texte, vous avez avancé des arguments divers mais qui visent tous à jeter un voile trompeur sur les objectifs poursuivis. Il s'agirait, avez-vous dit, de créer un tiers statut, intermédiaire entre l'union libre et le mariage, auquel aspireraient beaucoup de couples. Pourtant, la loi et la jurisprudence ont bâti un cadre juridique pour les couples non mariés. Peut-être faut-il y apporter quelques modifications, mais tel n'est évidemment pas le propos de ce texte. Il s'agirait aussi d'instaurer une forme de solidarité entre personnes, qui appellerait de la part de la collectivité non seulement une reconnaissance, mais aussi l'attribution d'avantages. Si tel est bien l'objectif, pourquoi cet acharnement à exclure les fratries, pourquoi limiter le Pacs à deux personnes ? Il s'agirait aussi de donner aux couples homosexuels des protections juridiques, notamment en cas de décès de l'un de ses membres ; mais s'il avait été question, par exemple, de modifier le droit de la location pour permettre le maintien dans les lieux du survivant, on aurait pu agir dans une plus grande discrétion... En réalité, vous avez voulu répondre à une demande précise, au demeurant parfaitement respectable, émanant de milieux homosexuels qui voulaient obtenir un droit au mariage, ou du moins à un statut qui, dans l'ordre symbolique, s'en approche le plus possible. Si tel n'était pas le cas, comment justifier votre insistance à inscrire le Pacs dans le livre du code civil relatif aux personnes, et non dans celui relatif aux contrats ? Pourquoi écarter tout ce qui empêcherait un parallélisme parfait avec le mariage, interdire l'équivalent de la polygamie -le Pacs à plus de deux- ou celui du mariage incestueux -le Pacs entre collatéraux ou ascendants et descendants ? Pourquoi un enregistrement devant une autorité publique, sinon pour conférer au Pacs la même solennité qu'au mariage ? Sur le plan pratique, le notaire convenait ; sur le plan symbolique, le maire était l'idéal, mais vous avez craint une réaction de rejet de nombreux maires. Vous avez donc choisi le greffe du tribunal d'instance. Faut-il instaurer un quasi-mariage accessible aux couples homosexuels ? Cette question renvoie chacun à sa conscience ; je me garderai bien de jeter l'anathème sur ceux dont la réponse est différente de la mienne. Pour ma part, je considère que si le mariage, à la fois contrat et institution, est reconnu par la société, entouré d'un cadre juridique qui définit les droits et obligations de chaque époux, assorti d'avantages fiscaux et sociaux, c'est essentiellement parce que le mariage est fondateur de la famille. Ce qui justifie l'institution du mariage, ce n'est pas seulement le couple, mais aussi et avant tout les enfants. En instituant et en protégeant le mariage, le législateur a voulu protéger la famille, c'est-à-dire le couple et ses enfants, et favoriser une institution dans laquelle se détermine une part essentielle de l'avenir de toute société. C'est pourquoi, quelle que soit la liberté inaliénable des individus à vivre comme ils l'entendent, liberté imprescriptible que l'Etat serait infondé à restreindre ; quel que soit le respect que je porte aux choix de vie privée des individus, il est impossible de mettre sur le même plan, au regard du statut matrimonial ou quasi matrimonial, les couples homosexuels et hétérosexuels. J'exprime donc là un désaccord de principe, fondamental avec ce qui, à mes yeux, est au coeur de votre proposition ; le reste, pour n'être pas secondaire, découle largement de ce constat. Nous vous reprochons de légiférer sur le couple sans vous préoccuper à aucun moment des enfants. Nous reprochons à votre texte de nous être soumis alors qu'une réforme d'ensemble du droit de la famille est à l'étude à la Chancellerie. On comprend bien pourquoi ce texte n'est pas fait pour les enfants. Pourtant des enfants naîtront de couples pacsés : par quel droit seront-ils protégés ? Une incertitude complète règne sur ce point, et il faudra attendre qu'il soit réglé par la jurisprudence : est-ce convenable ? Cette absence de souci des enfants alors qu'on établit un statut pour le couple me choque, et éclaire les intentions réelles des auteurs. Nous reprochons à votre texte d'introduire une inutile complexité dans les statuts du couple, en insérant entre le mariage et le concubinage un état hybride, qui contribuera à gommer les différences et à brouiller les repères. Nous contestons l'intervention étonnante des greffes des tribunaux d'instance, alors que l'unité de tenue de l'état-civil à la mairie est une commodité évidente et une source de sécurité juridique. Nous constatons que la solidarité présente dans le titre de votre proposition, l'est très peu dans les obligations découlant du Pacs. Relevant de l'habillage, elle est destinée à justifier, non à servir, car l'obligation de solidarité entre signataires d'un Pacs est entièrement entre leurs mains quant à sa portée et à son étendue. Les pacsés vont donc bénéficier d'un plus, sans que la collectivité ait la moindre assurance d'une contrepartie. La faiblesse des liens résultant du Pacs est encore soulignée par les conditions dans lesquelles on peut y mettre fin, au point qu'on a pu à bon droit parler de répudiation. Sur ce point le Pacs se distingue sensiblement du mariage, mais pas en bien ! Il fait fi des situations de dépendance économique, et du droit du plus faible ; il risque de créer chez certains un illusoire sentiment de sécurité ; il n'est pas respectueux de l'intérêt des personnes. Un mot sur les avantages fiscaux que vous proposez d'accorder aux pacsés. Nous en cherchons en vain la contrepartie. Le bénéfice de la déclaration unique se justifie dans le mariage parce qu'il existe de vraies obligations réciproques entre les époux. Il se justifie plus encore quand le couple a des enfants. Mais il n'a aucun fondement dans le cas du Pacs. Pourquoi donner un avantage à des couples qui n'ont souscrit aucune obligation particulière, par rapport aux célibataires isolés ? Quant aux droits de succession, ils sont anormalement élevés dans notre pays, et confiscatoires dans le cas des personnes sans lien de parenté. Le taux de 60 % ne résisterait d'ailleurs pas à la jurisprudence de la cour de Karlsruhe... Une baisse générale de ces droits est souhaitable, car choisir à qui on lègue ses biens est une liberté que ne respecte pas notre loi fiscale, laquelle fait de l'Etat le premier héritier obligé de chacun. Nous contestons l'inscription dans notre droit d'une nouvelle disposition facilitant l'immigration. Le mariage blanc, assez complexe à organiser, ne sera plus nécessaire : le Pacs blanc vaudra titre de séjour, ou à peu près. Comme aucune condition n'est posée à la conclusion d'un Pacs, la tâche sera aisée. Bonne nouvelle pour ceux qui veulent la régularisation de tous les sans-papiers, à gauche comme à droite (Rires sur les bancs du groupe socialiste). Le ministre des relations avec le Parlement et le rapporteur ont affirmé que des millions de Français attendaient ce texte. Cependant nous n'en rencontrons pas beaucoup dans nos circonscriptions. Nos concitoyens nous soumettent bien des difficultés, mais ils ne nous demandent pas de hâter l'adoption du Pacs. Beaucoup s'inquiètent en revanche de l'adoption d'enfants ou du recours à la PMA par des couples homosexuels. Bien sûr il y a aujourd'hui des enfants élevés par des couples homosexuels. Est-ce une raison pour favoriser le développement de telles situations ? Nous ne le pensons pas, et nous déplorons votre obstination à refuser tout amendement clarifiant ce point. Nous connaissons d'ailleurs l'opinion du rapporteur à ce sujet. Je crois sincèrement que refuser le Pacs n'est pas être en décalage avec la réalité sociale. Au contraire notre opposition au Pacs est largement comprise et approuvée dans le pays. Le mariage, malgré sa conclusion plus tardive, la cohabitation qui souvent le précède, l'augmentation du nombre des divorces, reste pour les Français une institution fondamentale, un modèle qui n'est plus imposé, mais largement souhaité et choisi. Il y a en France plus de douze millions de couples mariés, pour deux millions et demi de couples non mariés, qui souvent choisiront tôt ou tard le mariage. Nous croyons aussi que les Français se préoccupent plus que vous des enfants. Nous croyons enfin que dans notre pays l'urgence n'est pas de répondre à l'attente peu partagée, respectable mais irréaliste, de quelques personnes, mais de nous doter enfin de politiques plus favorables à la famille, à ceux qui ont des enfants et préparent ainsi l'avenir. Notre société est trop peu accueillante aux enfants, aux familles, aux femmes qui veulent concilier activité professionnelle et responsabilités familiales ; elle est trop peu généreuse pour celles ou ceux qui choisissent de se consacrer à l'éducation de leurs enfants. Voilà pourquoi nous souhaitons une politique profondément différente et pourquoi nous demandons le renvoi en commission (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF). M. le Rapporteur - La commission des lois ayant abondamment examiné le texte, je demande le rejet de la motion. M. le Président - Nous en venons aux explications de vote. Mme Dominique Gillot - Votre stratégie est transparente. Arc-boutés sur de vieux schémas démentis par la réalité sociale, vous misez sur la tradition, la morale, l'ordre social. Mme Christine Boutin - Ce n'est pas si mal ! Mme Dominique Gillot - Etes-vous aussi rigides sur des principes dépassés dans votre propre vie ? (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe DL et du groupe UDF) Où est le mauvais coup porté à la famille, le crime contre la société ? L'aveuglement et l'obscurantisme sont pour certains d'entre vous les seuls remparts contre ce qui vous est étranger. Le conservatisme, l'intolérance sont vos seules réponses aux comportements qui sortent des modèles traditionnels. Peut-être même êtes-vous contraints par des faux-semblants et des compromis, comme l'a suggéré Mme Collange. L'hostilité dogmatique, l'appel à l'opinion, voire les dérapages fiscaux sont exploités par ceux d'entre vous qui sont en manque de sens (Protestations sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL). Pour ma part, très attentive aux question familiales, j'ai eu l'honneur de remettre un rapport au Premier ministre pour une politique familiale rénovée, qui tienne compte des nouveaux comportements liant aujourd'hui les hommes et les femmes avant et même après l'arrivée des enfants. Aujourd'hui, le mariage est de moins en moins la réponse unique à un projet de vie commune. Il n'est plus l'acte fondateur de la famille. Il y a une vie avant et une vie après le mariage. J'ai eu un dialogue confiant avec le monde familial, et je connais ses aspirations. Alors, Madame Boutin, cessez de prendre la famille en otage ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; exclamations sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR) Alternative au mariage sans lui faire concurrence, le Pacs passé entre deux adultes peut favoriser la famille. De nombreux couples se forment hors du mariage, et il n'y a pas que la conjugalité qui crée de la filiation. Si les formes d'organisation familiales sont marquées par la diversité, la famille demeure le lieu de la solidarité et le maillon central de la cohésion sociale. Mais gardons-nous d'idéaliser une forme particulière de familles ! Cessez de prendre l'enfant en otage ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) Aujourd'hui, si la famille n'est plus le lieu de transmission des valeurs patrimoniales et sociales, elle est un lieu d'amour dont les seuls liens indissolubles sont ceux de la filiation et de la parentalité. M. Jean Ueberschlag - Qu'est-ce que cela veut dire ? Mme Dominique Gillot - Le Pacs, qui ne traite pas de ces liens-là, développe une logique de contrat entre adultes, dont l'enfant ne peut pas être un des objets. M. Jean Ueberschlag - Hors sujet ! Mme Dominique Gillot - Le Pacs ne constitue pas un bouleversement du fait familial, dont il faudra compléter l'évolution du droit. C'est le travail de la commission installée par la Garde des Sceaux (Interruptions persistantes sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Le Pacs est totalement neutre au regard du droit des enfants. Cessez donc d'effrayer les populations : ni l'adoption ni la PMA pour les homosexuels ne figurent dans le texte. M. Bernard Accoyer - Quelle hypocrisie ! Mme Dominique Gillot - En revanche le Pacs est de nature à introduire de la stabilité dans la construction du lien social. Mme Christine Boutin - Quel humour ! Mme Dominique Gillot - Tout ce qui peut apporter douceur de mieux vivre, sécurité matérielle, rapprochement visible dans la durée, ne mérite-t-il pas d'être encouragé ? (Interruptions, exclamations et bruits sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) M. le Président - Veuillez conclure ! Mme Dominique Gillot - Les personnes qui ne veulent pas ou ne peuvent pas passer devant le maire devraient-elles être punies, privées de la possibilité de passer un contrat pour un projet de vie commune ? Si cette stabilité éprouvée conduisait à renouveler le contrat au point qu'il dure plus longtemps que certains mariages, dont près d'un sur deux échoue, qui y perdrait ? Ni la société ni les enfants ! Le Pacs entre hétérosexuels n'est pas un sous-mariage, mais peut encourager au contraire à franchir le grand pas, en permettant de tester la stabilité d'une relation (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Chercher l'affrontement sur cette question, déchaîner les passions, c'est refuser de voir que les familles évoluent (Mêmes mouvements). M. le Président - Je vais vous retirer la parole ! Mme Dominique Gillot - Je soutiens la proposition, et je m'oppose à la motion de renvoi (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste). M. Bernard Accoyer - Le groupe RPR la votera. Les propos précédents, venant de quelqu'un qui nous a habitués à davantage de mesure, nous ont surpris. Mme Gillot se serait-elle trompée de lecture ? Elle m'a fait penser à la Garde des Sceaux qui le 9 octobre dernier a dû lire deux fois son discours, en l'absence de majorité. Mme Gillot devait sans doute remettre de l'ordre dans sa propre réflexion, puisqu'elle est dans son parti, chargée des questions de la famille. A l'issue de neuf fois de travail, force est de constater que le Pacs ne fait pas progresser la politique familiale en faveur des enfants et de la solidarité entre les générations. Nous voterons la motion de renvoi parce qu'en recherchant le consensus, en procédant à des consultations élargies, nous aurions pu avancer dans le bon sens. Mais le Gouvernement a décidé de passer en force, par dogmatisme et aussi pour consolider sa majorité autour d'un projet emblématique. Légiférer par voie emblématique, voilà votre mode de gouvernement. Dans votre texte, la confusion est partout : confusion sur la nature du Pacs, confusion entre différents types d'unions, si bien qu'il faudra ouvrir des cabinets de conseil. M. Daniel Marcovitch - C'est bon pour l'emploi ! M. Bernard Accoyer - Les personnes les plus fortes et les plus riches feront procéder à des études financières et fiscales pour choisir le type, le contenu et le moment du contrat. Votre texte est donc dangereux pour les plus faibles, en particulier au sein des couples homosexuels. Vous qui avez toujours à la bouche la défense des plus faibles, comment pouvez-vous méconnaître à ce point le devoir de les protéger ? Le danger est grand pour les femmes aussi, puisque la présomption de paternité n'existe pas dans le Pacs, ce qui est incompréhensible de la part d'une députée chargée de la famille au parti socialiste. Danger enfin pour les enfants, menacés dans l'équilibre de leur développement psycho-affectif (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), comme l'ont montré les travaux d'un congrès que Mme Gillot connaît. Comme l'a reconnu honnêtement le rapporteur, le Pacs conduit naturellement à l'adoption pour les couples homosexuels, en dépit des dénégations. Pour toutes ces raisons, le groupe RPR votera la motion de renvoi en commission (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). M. Pierre-Christophe Baguet - Le groupe UDF voit trois bonnes raisons de voter la motion de renvoi (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). La première, c'est de permettre à la gauche plurielle de retrouver un peu de sérénité, car le lent et sinueux cheminement du texte prouve la gêne, la réserve, l'inquiétude de nombre de ses membres, que traduit également de voir le Pacs signé en mairie. Il est d'ailleurs significatif que, comme l'a rappelé Jean-Claude Lenoir, aucune des professions de foi des candidats de la gauche ne faisait la moindre référence au Pacs (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). La deuxième raison, c'est le contenu même du texte, ainsi que ses conséquences. Plusieurs orateurs ont fait allusion au congrès des notaires ("Ah !" sur les bancs du groupe socialiste), non pour faire état de leur soutien, mais au contraire de leurs réserves face à un dispositif qui ne fait qu'ajouter à la complexité de notre droit. Or, notre devoir de législateur est de voter des lois qui non seulement préservent l'équilibre de notre société, mais encore soient applicables. Enfin, notre troisième raison, ce sont les enfants, les grands oubliés du Pacs. A l'heure où le Gouvernement annonce pour octobre une grande réforme du droit de la famille, il serait opportun de surseoir à l'examen du Pacs, car les deux démarches ne sont pas cohérentes entre elles. Pour toutes ces raisons, nous voterons la motion de renvoi (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL). M. Jean-Claude Lenoir - Notre excellent collègue Goulard offre à l'Assemblée tout entière une chance de se ressaisir, et je ne voudrais pas qu'elle fût gaspillée (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Ce texte est en effet plein d'incohérences et de contradictions, qui rendront son application, demain, d'une rare complexité, et laisseront les plus faibles bien démunis face à ceux qui sauront l'utiliser à des fins intéressées. Le groupe DL votera donc la motion de renvoi. Le rapporteur a admis, avec une honnêteté qui a été reconnue, que le Pacs ouvrait la voie à l'adoption d'enfants par des couples homosexuels, contrairement au discours officiel du Gouvernement. Il y a là un faux-semblant, et cette revendication fait partie de ces revendications spontanées dont les électeurs n'ont jamais entendu parler avant le scrutin de 1997 : à gauche comme à droite, aucun candidat, à plus forte raison aucun candidat élu, ni M. Michel, ni M. Bloche, ni Mme Guigou ni M. Jospin n'ont proposé à leurs électeurs d'organiser l'union entre deux personnes de même sexe sur les bases qui nous sont présentées aujourd'hui, et je ne comprends pas pourquoi vous affichez une telle détermination, alors que je pourrais la comprendre s'il s'agissait d'un projet sur lequel vous vous seriez engagés devant le corps électoral. Il s'agit d'une forme de tromperie vis-à-vis de l'opinion, et je considère que c'est grave. M. Goulard a eu le mérite de s'exprimer avec modération, rompant avec un climat qui devenait intolérant en cette fin de soirée ; avec conviction, ce qui n'était pas le cas de tous ses contradicteurs ; avec talent, enfin, et le contraste était encore plus grand avec certains orateurs de la gauche plurielle. Nous voterons résolument la motion de renvoi et défendrons nos amendements un par un, tout le temps qu'il faudra (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF). La motion de renvoi en commission, mise aux voix, n'est pas adoptée. M. le Président - J'appelle maintenant les articles de la proposition de loi dans les conditions prévues à l'article 91, alinéa 9 du Règlement. En application de l'article 109, alinéa 2 du Règlement, l'Assemblée se trouve saisie du texte qu'elle a précédemment adopté et que le Sénat a rejeté en deuxième lecture. M. Pierre-Christophe Baguet - L'amendement 118 de M. de Courson accorde aux couples hétérosexuels non mariés ayant élevé au moins un enfant pendant dix ans un avantage, inférieur cependant à celui dont bénéficient les couples mariés, en matière de droits de succession. M. le Rapporteur - La commission a repoussé pour la troisième fois cet amendement, qui se trouve présenté pour la troisième fois en séance publique, preuve patente d'obstruction (Protestations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF). Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice - Le Gouvernement confirme son opposition à l'amendement. M. Thierry Mariani - Il n'est pas d'usage d'inscrire à l'ordre du jour du Parlement un texte de cette importance à trois jours d'un scrutin de portée nationale, mais je suis prêt à siéger trois jours et trois nuits s'il le faut (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Dès ce premier amendement, M. de Courson remet au coeur du débat le grand absent du Pacs : l'enfant. Faut-il rappeler comment cette majorité a honteusement taxé les familles depuis trois ans ? Elle a plafonné le quotient familial. M. Alain Rodet - Et les frais de cantine, Monsieur Mariani ? On connaît à Valréas ? M. Thierry Mariani - Il est aberrant de donner les mêmes avantages aux couples homosexuels et aux couples qui élèvent des enfants. L'amendement 118, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Charles de Courson - L'amendement 119 accorde aux couples hétérosexuels certains avantages qui, sans aller jusqu'à ceux des couples mariés, permettent de résoudre leurs difficultés financières. L'amendement 119, repoussé par la commission et le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Charles de Courson - Actuellement, les concubins hétérosexuels chargés de famille doivent faire une déclaration distincte. Dans la mesure où le quotient familial est destiné à aider les familles élevant des enfants, l'amendement 117 rend obligatoire l'imposition commune des couples hétérosexuels ayant la charge d'au moins un enfant et leur accorde les mêmes avantages qu'aux couples mariés, en contrepartie du fait qu'ils transmettent la vie et éduquent leurs enfants. Ce que je reproche au texte, c'est de donner les mêmes droits fiscaux à des personnes qui se trouvent dans des situations très différentes. En droit français, l'IR s'applique depuis 1917 aux couples -à la différence de ce qui se pratique en Angleterre. Comment défendre l'imposition commune de deux veuves vivant sous le même toit ? Si j'étais mère abbé (Exclamations et rires), ou abbesse, je dirais à mes nonnes de s'affilier au Pacs. Et pourquoi pas la bonne du curé ? L'amendement 117 me paraît plus cohérent que le texte de la proposition. M. le Rapporteur - La commission n'a pas examiné, mais elle avait rejeté un amendement semblable lors des lectures précédentes. Mme la Garde des Sceaux - Rejet. M. Bernard Accoyer - Le Gouvernement fait un choix aux dépens des familles. Selon une note en provenance du ministère des finances, publiée par Libération en septembre dernier, l'imposition commune des pacsés coûterait 4 à 6 milliards de francs. En outre le Pacs favorisera les ménages mono-actifs à grande disparité fiscale. Le Gouvernement demande un effort à la nation pour financer le Pacs, mais parallèlement, il prend des mesures défavorables aux familles, telles que l'abaissement du quotient familial, qui a coûté 4 milliards aux familles ; la baisse de l'AGED ; la réduction de la déduction fiscale pour l'emploi d'une personne à domicile ; le plafonnement de la demi-part accordée aux personnes ayant élevé seules un ou plusieurs enfants ; le refus de donner suite à la proposition de loi de l'opposition visant à revaloriser l'allocation veuvage. Le Sénat avait remplacé l'imposition commune des pacsés par un abattement pour tout contribuable hébergeant une autre personne à sa charge. L'amendement de Courson est tout à fait justifié. L'amendement 117, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Charles de Courson - L'amendement 116 pose clairement que "le pacte civil de solidarité n'ouvre à aucun droit en matière de pension de réversion, au titre du régime obligatoire de base, complémentaire ou surcomplémentaire." Vous me direz que le texte n'ouvre aucun droit à la retraite. C'est vrai. Mais vous ne tiendrez pas longtemps face à la demande qui sera inévitable. Or, la situation des retraites sera de toute façon difficile, un livre blanc vient de le confirmer. Cet amendement est donc nécessaire. M. le Rapporteur - Rejet. M. Thierry Mariani - Pourquoi ? Un député socialiste - C'est toujours la même chose. Mme Christine Boutin - Parce qu'on ne répond jamais ! Mme la Garde des Sceaux - L'amendement est sans objet, le texte n'ayant rien prévu de tel. L'amendement 116, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Charles de Courson - L'amendement 120 tend à empêcher que le cosignataire d'un Pacs ne détourne à son profit les allocations familiales destinées aux besoins des enfants de son cocontractant. Il prévoit donc que "les allocations familiales ne peuvent être versées que sur le compte de celui des signataires du pacte qui possède l'autorité parentale." M. le Rapporteur - La commission a repoussé cet amendement. Mme la Garde des Sceaux - Rejet. M. Thierry Mariani - Mon sous-amendement 323 tend à ajouter après le mot "compte" le mot "personnel". En effet, deux pacsés peuvent parfaitement posséder un compte joint. Il convient donc de garantir que les allocations familiales seront bien versées sur un compte personnel du partenaire ayant l'autorité parentale. M. le Rapporteur - La commission n'a pas examiné cet amendement. A titre personnel, j'y suis défavorable. Mme la Garde des Sceaux - Cet amendement est inutile. Rejet. Le sous-amendement 323, mis aux voix, n'est pas adopté. L'amendement 120, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Thierry Mariani - L'article premier reste l'article essentiel du texte ; la lecture définitive devant être formelle, nous souhaitons saisir l'occasion d'éviter ce qui constituera un véritable séisme dans le droit de la famille et des personnes. Si vous avez réparé les erreurs les plus grossières de votre texte initial au cours de la première navette, celui-ci recèle toujours des imprécisions et des incohérences qui seront source de difficultés et de fraudes. Le Pacs risque de se retourner contre ceux qui, vous faisant confiance, en auront signé un. En effet, le Pacs ne protège en rien les partenaires qu'il unit. Nous espérons que cette troisième lecture nous permettra d'obtenir, enfin, des réponses à nos questions. Le contenu du Pacs sera totalement libre, si bien que des personnes pourront s'engager mutuellement sur des obligations dont la portée juridique pourrait être nulle. Que se passera-t-il en cas de rupture si les dispositions du Pacs censées déterminer les conséquences de cette dernière sont manifestement contraires à la loi ? Comment un juge pourrait-il conférer des effets juridiques à un texte rédigé sans le conseil d'un professionnel du droit dans un domaine aussi complexe ? Autre source d'inquiétude : la présomption d'indivision des biens acquis postérieurement à la signature du Pacs. Cette solution, la plus complexe de toutes celles envisageables, sera source d'imbroglios juridiques inextricables lors des ruptures. Le régime de séparation de biens ou de la communauté réduite aux acquêts aurait été préférable. Mais pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Votre texte ne protège pas non plus l'enfant. Vous me rétorquerez sans doute que celui-ci n'est pas concerné. Il faut être clair : soit le Pacs ne s'adresse qu'aux homosexuels, contrairement à ce que vous prétendez, soit il s'adresse aussi à des couples hétérosexuels, susceptibles d'avoir des enfants, auquel cas votre texte comporte une énorme lacune qui sera préjudiciable aux enfants. Enfin, comment accepter la réintroduction dans notre droit de ce qui ressemble à s'y méprendre à la répudiation ? Le partenaire le plus faible pourra être abandonné du jour au lendemain par son partenaire. Le délai prévu et la signification par huissier n'y changent rien : le Pacs pourra être rompu à tout moment, au mépris du droit du contrat. Le Pacs est non seulement un danger pour les individus, il est aussi un danger pour la société. La discussion qui s'ouvre sera pour nous l'occasion de le démontrer (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Mme Christine Boutin - Vous avez choisi de faire figurer le Pacs dans le livre I du code civil consacré aux personnes, aux côtés donc des dispositions relatives au mariage et à la filiation, alors même que vous prétendez qu'il ne s'agit que d'un contrat. De deux choses l'une : ou vous nous racontez des histoires ou vous êtes incohérents. M. Thierry Mariani - Les deux ! Mme Christine Boutin - Vous nous dites que le Pacs ne sera pas un mariage bis mais ne l'avez pas démontré. Il en sera en fait un piètre plagiat et Patrick Devedjian a excellemment démontré tout à l'heure qu'il constituait à tout le moins une nouvelle catégorie de mariage. Vous avez essayé timidement, maladroitement et sans conviction de "dématrimonialiser" ce texte en évitant de reprendre les dispositions relatives au mariage, au risque de le rendre bancal et impraticable. Pourtant le parallèle entre le mariage et le Pacs est évident. Les pacsés s'apportent "aide mutuelle et matérielle" quand les époux s'apportent, il est vrai, "fidélité, secours et assistance". Les deux formules sont très voisines, la première n'étant qu'une version édulcorée de la seconde. La "bipacsie" est interdite comme la bigamie ; le Pacs est automatiquement dissout au mariage de l'un des partenaires ; les interdits et les empêchements sont les mêmes pour le Pacs et pour le mariage. Les deux seules différences sont donc que le Pacs est accessible à deux personnes de même sexe et qu'il peut être rompu plus facilement que le mariage, par une simple répudiation -qui constituerait, selon vous, un progrès. Par ailleurs, si le Pacs ne se réduit pas à sa seule dimension sexuelle, pourquoi ne pas l'ouvrir à plus de deux personnes ? Vous avez manqué de courage, refusant d'aborder directement le problème de l'homosexualité, alors même que ce texte vous en donnait une occasion unique. En outre, toutes les règles de publicité, de nullité ou d'opposabilité ont été omises. Le lieu d'enregistrement a fait l'objet de nombreuses discussions. Vous aviez pensé au départ à la mairie -mais vous nous dites qu'il n'y a pas de lien avec le mariage ! M. le Président - Votre temps de parole est écoulé. Mme Christine Boutin - J'ai terminé. Je constate qu'on continue à nous répondre de manière laconique. Je souhaite que des étudiants en droit analysent ce débat : ils constateront qu'on n'a même pas eu la courtoisie de nous opposer des arguments ! M. Bernard Accoyer - Cet article, élaboré comme l'ensemble de ce texte dans la confidentialité, alors que le Sénat a procédé à de nombreuses auditions, donne avantage au fort sur le faible, aux couples sans finalité de procréation sur les familles avec enfants, sur les célibataires et sur les veufs. Un avocat au barreau de Paris a écrit ceci : "On frémit : la rédaction du contrat d'organisation sera libre et laissée à l'imagination des partenaires. Verra-t-on des contrats de plusieurs pages, fixant les pourcentages de participation aux dépenses communes, un minimum ou un maximum de relations sexuelles par jour, semaine ou mois... ?" (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) M. Claude Goasguen - Dans cet article, rien n'est vrai. On place le Pacs dans le livre du code civil relatif aux droits des personnes, alors que c'est un contrat. On nous dit que c'est un pacte, notion qui existe en droit international, mais non en droit civil français. On nous dit que ce pacte civil est "de solidarité" alors que, précisément, les obligations réciproques lui font défaut. Enfin, on ajoute dans l'intitulé du titre XII, après les mots "Du pacte civil de solidarité", les mots "et du concubinage", en sachant que cela ne sert à rien. Que de camouflage ! Nous dénonçons ce texte fallacieux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF) Les amendements de suppression 6, 41, 82 et 180, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés. Mme Christine Boutin - Mon amendement 237 tend à ne pas rattacher les dispositions au code civil. L'amendement 237, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Thierry Mariani - Je constate toujours le même laconisme de la part de la commission et du Gouvernement... Mon amendement 42 a pour objet de placer les dispositions relatives au Pacs dans le livre troisième du code civil, qui concerne les contrats. M. le Rapporteur - Défavorable. Le Pacs est une convention solennelle mais il a des répercussions sur le droit des personnes. Mme la Garde des Sceaux - Même avis. L'amendement 42, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Thierry Mariani - L'amendement 80 est défendu. L'amendement 80, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Charles de Courson - L'amendement 115 tend à rédiger ainsi le début de l'article : "Le livre troisième du code civil est complété par un titre XXI intitulé "Du contrat civil de solidarité" et comportant les articles 2284 à 2291. La majorité a fini par reconnaître qu'il s'agissait bien d'un contrat, d'une convention par laquelle une ou plusieurs personnes s'obligent, envers une ou plusieurs autres, à donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose, ce qui renvoie à l'article 1101 du code civil. Il est donc logique d'insérer ces dispositions dans le livre du code civil qui traite des contrats et des dispositions conventionnelles en général. L'amendement 115, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Bernard Accoyer - L'amendement 178 a pour but d'introduire un peu de transparence et de franchise, en rédigeant ainsi le troisième alinéa : "Du pacte relatif aux concubins, concubins pacsés, concubins mariés et pacsés". En effet le dispositif de ce texte, qui reste un objet juridique non identifié, conduit à des situations inextricables, si diverses qu'on voit mal comment notre société pourra s'y retrouver. Les jeunes devront consulter pour choisir la formule qui répond le mieux à leur intérêt. Et ce seront les intérêts matériels qui guideront les décisions. Cette situation est à nos yeux inacceptable. M. Claude Goasguen - L'amendement 7 propose une modification qui n'est pas simplement rédactionnelle, mais pose un problème juridique sérieux : le Pacs est-il un contrat, ou un contrat solennel ? Il a reçu depuis la première lecture assez de solennité et de publicité pour qu'on puisse parler d'une convention solennelle. La notion de pacte est fortuite et mal définie en droit. Je propose d'écrire : "Du contrat civil de solidarité". M. le Rapporteur - Défavorable : la commission souhaite garder l'appellation "pacte civil de solidarité". Mme la Garde des Sceaux - Même avis. L'amendement 178, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l'amendement 7. M. Thierry Mariani - Je comprends que M. le rapporteur préfère garder l'appellation du Pacs, par souci de rester dans le symbole. Mais comme cette appellation ne correspond à rien, je propose par l'amendement 177, l'appellation "pacte d'accès à des avantages accordés en dehors du célibat et du mariage". Elle a au moins l'avantage de la clarté : vous nous avez assez dit qu'il ne s'agit pas de la famille, des enfants, de l'amour. De quoi parlons-nous en somme ? D'avantages fiscaux, dont sont exclus les seuls célibataires. L'amendement a l'avantage de souligner le vrai but du texte, purement mercantile. L'amendement 177, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Christine Boutin - L'amendement 239 tend à supprimer les mots "et du concubinage" dans le troisième alinéa, intitulé du Titre XII. Le concubinage étant une union de fait, qui ignore le droit, n'a pas de raison de figurer dans le code civil. J'indique à nos collègues -puisque nous n'obtenons pas vraiment de réponses de M. le rapporteur et de Mme la ministre- un élément intéressant concernant la place du Pacs dans le code civil. Après le congrès des notaires, notre rapporteur a déclaré dans Le Figaro du 10 mai que, si le fait de placer le Pacs dans les contrats pouvait être un signe d'ouverture envers le Sénat, cela ne le gênerait pas. Il a donc compris le sens de nos interrogations. Et il poursuivait en indiquant que le Pacs n'est pas de même nature que l'institution du mariage, et ne comportait pas les même devoirs, notamment la fidélité. Ainsi, pour lui, on doit être fidèle dans le mariage, mais dans le Pacs, on peut être infidèle... M. le Rapporteur - Pour avoir un débat avec le Sénat, il aurait fallu que celui-ci s'y prêtât, au lieu de rejeter ce texte. Mme Christine Boutin - Mais nous, nous nous y prêtons ! M. le Rapporteur - En déposant trois cents amendements exactement semblables à ceux de la deuxième et de la première lecture, vous montrez que vous ne souhaitez pas un débat sérieux sur ce texte, mais que vous le refusez en bloc. Pourquoi dès lors la majorité aurait-elle changé sa façon de voir ? La commission a repoussé l'amendement 239 : si le concubinage, union de fait, ignore le droit, il ne s'ensuit pas que le droit doive ignorer le concubinage. C'est d'ailleurs un ajout du Sénat, que nous avons repris, mais je sais qu'il y a parmi vous des divisions sur le concubinage. Enfin, si l'obligation de fidélité ne figure pas dans le texte, c'est que les deux personnes que lie un Pacs sont des partenaires, qui sont sous le même toit, mais pas dans le même lit ! (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) Il aurait donc été inconséquent de prévoir une obligation de fidélité. M. Bernard Accoyer - Cet après-midi c'était le contraire. Avec les socialistes, il y a plus d'amour après minuit ! Mme la Garde des Sceaux - Défavorable à l'amendement 239. L'amendement 239, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Christine Boutin - L'amendement 238 tend à rédiger l'intitulé du chapitre premier "Du contrat civil de solidarité". On ne sait trop ce qu'est un pacte. Inscrire cette notion dans le code civil est source de confusion. Il s'agit bien d'un contrat, vous le dites tous. L'amendement 238 est donc plus clair. L'amendement 238, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. Art. 515-1 du code civil M. Claude Goasguen - L'amendement 8 tend à supprimer cet article. Mme Christine Boutin - C'est aussi l'objet du 83. M. Bernard Accoyer - Le 179 est également un amendement de suppression. Je ne suis pas sûr que nos collègues de la majorité aient bien mesuré la complexité et les conséquences de cet article premier, qui ne modifie pas moins de sept articles du code civil. Or, dans l'article 515-1, le Pacs est enfin qualifié explicitement de contrat. Je suis content de voir que le Gouvernement et la majorité progressent à petits pas. Mais je reste inquiet, car ce dispositif laisse augurer bien des insuffisances, des difficultés et des contentieux. Ne s'agit-il pas encore d'une de ces divagations oniriques de nos rapporteurs, qui font varier sans cesse cet objet aux contours flous qu'est le Pacs ? D'où cet amendement. Les amendements 8, 83 et 179, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés. M. Claude Goasguen - Je propose avec le 9 un amendement alternatif. La majorité a retenu l'idée d'une convention qui fait ressembler le Pacs à l'institution du mariage. Nous proposons d'en rester à une solution plus compatible avec l'état de la société et les souhaits des Français : nous proposons donc, par notre amendement 9, qu'une attestation civile enregistrée devant notaire puisse être délivrée à deux personnes physiques, quel que soit leur sexe. Nous présentons ainsi une proposition alternative. Naturellement, le rapporteur va nous indiquer que, pour la troisième fois, la commission a repoussé l'amendement, avec la voix triste de l'Evangéliste annonçant que le Christ est tombé pour la troisième fois. M. Alain Rodet - Pas de blasphème ! M. Claude Goasguen - Notre proposition mérite d'être discutée, au lieu d'être écartée d'un revers de main. M. le Rapporteur - Il est vrai que la commission a repoussé l'amendement. Je m'en suis expliqué longuement en première et en deuxième lecture. La proposition alternative de notre collègue n'entre pas dans le schéma retenu par la commission et par la majorité. Mme la Garde des Sceaux - Même avis. L'amendement 9, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Thierry Mariani - Je propose, par mon amendement 54, de préciser que le Pacs est un contrat à durée indéterminée pour éviter d'y introduire un délai. Monsieur le rapporteur, qu'est-ce qui interdit, dans l'état actuel du texte, d'établir un contrat à durée déterminée ? En effet, on nous l'a dit, le Pacs n'a rien à voir avec les sentiments, c'est essentiellement une affaire d'intérêt. Mme Catherine Tasca, présidente de la commission des lois - Vous offensez tous ceux qui attendent le Pacs depuis des années ! M. Thierry Mariani - Je réitère ma question. Si mon amendement est utile, oubliez qu'il vient de l'opposition. M. le Rapporteur - La commission l'a repoussé. Le Pacs est un contrat à durée indéterminée. Cependant rien n'interdit à deux parties d'introduire dans une convention une durée déterminée. Mais elles n'y auraient aucun intérêt, puisque le Pacs peut être rompu sans motif (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Vous nous l'avez assez reproché ! Mme la Garde des Sceaux - Cet amendement n'a en effet aucun sens. Rejet. M. Thierry Mariani - Vos avis sont toujours très courts ! M. Charles de Courson - Le rapporteur vient de le dire, une clause de durée déterminée est compatible avec le texte. Si un Pacs est conclu pour cinq ans par exemple, il tombe automatiquement à cette échéance par consentement mutuel, sans revendication possible d'aucune des deux parties. Le contrat peut donc disposer que la rupture n'ouvre droit à aucun dommage et intérêts de part ni d'autre. Ainsi le Pacs permet d'organiser une répudiation par consentement mutuel initialement convenu, comme nous l'indiquons depuis le début. Mme. la Présidente de la commission - Une répudiation par consentement mutuel ! M. Charles de Courson - Oui, le rapporteur l'a bien dit. Rien ne l'empêche dans le texte. C'est pourquoi il faut voter l'amendement de M. Mariani. Mme la Présidente de la commission - Le rapporteur l'a dit, cet amendement n'a pas d'intérêt. L'amendement 54, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Bernard Accoyer - Le rapporteur, qui ne dissimule pas ses intentions, reconnaît que le Pacs peut être un contrat à durée déterminée. Dans ces conditions, que reste-t-il de ses fondements sentimentaux ? L'amendement 176 peut contribuer à parer le danger, en obligeant à conclure le Pacs devant un professionnel du droit, afin de protéger les plus faibles. Il serait souhaitable que sa responsabilité soit engagée si des clauses inacceptables étaient introduites, par exemple des conditions suspensives d'ordre financier, sanitaire, fiscal, qui pourraient donner lieu à des dérapages scandaleux. M. Thierry Mariani - Après l'information apparue ce soir... Mme la Présidente de la commission - Arrêtez ! M. Thierry Mariani - Pourquoi ne pas accepter un deuxième amendement de l'opposition en neuf mois ? Après l'aveu honnête de notre rapporteur, nous voyons que ce ne sont plus trois cas de figure, mais neuf qui peuvent se présenter. Notre amendement 46 tend à ce que le contrat soit conclu devant notaire, car seul un professionnel du droit peut protéger les plus faibles. Le congrès des notaires, auquel vous avez assisté, Madame la ministre, s'est prononcé. Les notaires soulignent en effet qu' "il ne leur appartient pas de discuter les choix idéologiques ou moraux de chacun, mais de fournir un cadre juridique adapté", et qu'"il ne semble pas que la Pacs soit une réponse claire et adaptée", tant ses "lacunes" sont nombreuses. Je propose, par l'amendement 48, de rendre obligatoire le recours à un notaire : mieux vaut dépenser 1000 F à 1300 F, éventuellement remboursés par l'aide juridictionnelle, et s'épargner des contentieux ultérieurs bien plus coûteux. M. le Rapporteur - Si le recours à un professionnel du droit est en effet recommandable, il ne saurait être rendu obligatoire. Cessez de vous livrer à cette comédie (Protestations sur les bancs du groupe RPR, du groupe UDF et du groupe DL) : le Pacs est bien un contrat à durée indéterminée, et s'il est loisible aux contractants de stipuler le contraire, quel intérêt y auraient-ils, dès lors qu'ils peuvent le rompre à tout moment, d'un commun accord ou unilatéralement, sans avoir à donner de raisons ? Mme la Garde des Sceaux - Même avis. M. Claude Goasguen - En fait, le rapporteur reconnaît implicitement, soit que le Pacs est trop compliqué pour que l'on puisse se passer de conseils juridiques, soit que ceux qui ont les moyens d'y recourir prendront l'avantage sur les autres. Pour ma part, s'agissant d'une innovation aussi incertaine, je considère qu'il faut des formalités protectrices, afin que les plus faibles ne soient pas pris au piège de contrats léonins. M. Bernard Accoyer - La réponse du rapporteur est particulièrement éclairante : le Pacs bénéficiera à ceux-là seuls qui auront compris le bénéfice qu'ils pourront en tirer. En imposant un contrat à durée indéterminée, au moins éviterait-on que le fort n'abuse du faible et n'enchaîne les Pacs pour maximiser les avantages qu'il en retire. Les amendements 176, 181 et 46, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés. M. Thierry Mariani - Puisque l'on m'accuse de jouer la comédie, je vais donner un exemple montrant que le CDD devrait être obligatoire : on pourrait imaginer que deux fonctionnaires concluent un pacte prévoyant expressément sa propre dissolution sitôt que le rapprochement aurait été effectué. M. Daniel Marcovitch - Il faut vraiment avoir l'esprit tordu ! M. Thierry Mariani - Pour faire une telle loi, oui ! L'amendement 48 remplace "majeures" par "âgées de 18 ans révolus", car il n'est pas souhaitable que les mineurs émancipés puissent conclure un Pacs. M. le Rapporteur - La commission a jugé qu'ils le pouvaient au même titre qu'un mariage, dont les conséquences sont nettement plus graves. Mme la Garde des Sceaux - La rédaction que propose M. Mariani n'ajoute rien au texte. M. Claude Goasguen - Le mariage est une institution encadrée et contrôlée, présentant des garanties pour le mineur émancipé qui s'y engagerait. Dans le cas du Pacs, en revanche, le risque serait énorme de voir de jeunes garçons ou filles être victime d'abus. L'amendement 48, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Thierry Mariani - Dans la mesure où le Pacs ne concerne pas, nous dit-on, la vie de couple, mais la vie en commun, il n'est pas justifié de le limiter à deux personnes. Pourquoi interdire à trois amis ou plus vivant ensemble de conclure un Pacs afin d'organiser leur vie commune ? M. le Rapporteur - La commission l'a repoussé, car le Pacs est fait pour les couples, "sexués" ou non (Exclamations et rires sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). M. Thierry Mariani - Qu'est-ce qu'un couple asexué ? Mme la Garde des Sceaux - Cet amendement comporte de graves risques de dérives communautaristes, voire sectaires. L'amendement 51, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Thierry Mariani - Le vote de la loi sur la couverture maladie universelle étant intervenu depuis la deuxième lecture du Pacs, l'amendement 55 reprend l'une des conditions imposées pour bénéficier de la CMU : le fait de résider en France de façon stable et régulière. Compte tenu des avantages accordés, il est normal d'éviter les abus. Je ne voudrais pas que la France devienne le Las Vegas du Pacs ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) M. le Rapporteur - La commission a repoussé l'amendement, car le mariage, qui confère des droits nettement supérieurs, n'est soumis à aucune condition de cette sorte - et ne donne d'ailleurs pas automatiquement droit à régularisation ultérieure. Mme la Garde des Sceaux - Avis défavorable. M. Claude Goasguen - Il faut tout de même rappeler que certains contentieux restent ouverts dans ce domaine, alors même que le mariage, contrairement au Pacs qui constitue un contrat bien informel, est sous le double contrôle du juge et du maire. Je puis comprendre que vous veuillez appliquer une philosophie qui n'est pas la mienne. Ce que je ne comprends pas, c'est ce que viennent faire ici des dispositions sur l'immigration. Vous remettez en cause un équilibre auquel on était difficilement parvenu -et en outre, il y aura un problème de comptabilité avec le traité d'Amsterdam. L'amendement 55, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Christine Boutin - Les amendements 11 et 241 suppriment les mots : "de sexe différent ou de même sexe". Le rapporteur a dit que la distinction essentielle entre le Pacs et le mariage concernait la fidélité. Mais s'il n'y a pas de relation sexuelle dans le Pacs, pourquoi ne pas aller jusqu'au bout ? M. Thierry Mariani - Ce qui nous gène, c'est qu'on mélange dans un même texte les relations homosexuelles et les relations hétérosexuelles. Il faut choisir, et je vous propose soit par l'amendement 47 de supprimer "de sexe différent", soit par l'amendement 49 de supprimer "de même sexe". M. Bernard Accoyer - L'amendement 175 est identique à l'amendement 49. Il permettrait de réserver les avantages matériels aux couples hétérosexuels, qui ont vocation à procréer. M. Pierre-Christophe Baguet - Nous sommes tous d'accord, il faut trouver une solution décente pour les homosexuels. Mais ce texte prêt à la confusion. D'où l'amendement 240. Mme la Présidente de la commission - Je vais essayer de dissiper cette confusion où l'opposition voudrait nous enfermer. Nous ne voulons pas de statut communautaire, nous voulons intégrer les couples homosexuels dans la société. Nos points de vue sont donc radicalement différents. Vous dites, Madame Boutin, qu'il s'agit de couples asexués... Mme Christine Boutin - C'est M. Michel qui dit cela ! Mme la Présidente de la commission - Il ne s'agit pas de couples asexués, mais de couples libres de vivre ou non une relation sexuelle -après tout, c'est aussi le cas de beaucoup de gens mariés. Mais l'institution du mariage sert aussi à établir la présomption de paternité, ce qui n'est pas le cas du Pacs. Voilà, je pense, des réponses claires à vos interrogations confuses. Mme la Garde des Sceaux - Défavorable. M. Claude Goasguen - Ce sujet est très politique, et nous sommes en effet en complet désaccord. Mais qu'on ne dise pas que nous voulons enfermer les homosexuels dans une communauté. Reconnaissez que nous n'avons jamais contesté la liberté des homosexuels de vivre comme ils l'entendent. Mais le principe de non-discrimination doit se comprendre à situation comparable. Or, les situations ne sont pas comparables : deux personnes de même sexe vivant sous le même toit exercent une liberté privée, tandis que deux personnes unies par un lien matrimonial, c'est une institution à objet social. Mme Christine Boutin - La réponse de Mme Tasca était éclairante. Puisque vous ne voulez pas assumer le caractère sexuel de ce texte, vous voulez l'appliquer aux personnes "de même sexe ou de sexe différent", et selon les articles vous appuyez sur l'un ou l'autre. Mais comme il y a en réalité une incompatibilité, on arrive à des incohérences. Ainsi venez-vous de nous dire que dans le Pacs, qui peut être hétérosexuel, il n'y aurait pas de paternité... M. le Rapporteur - Présomption de paternité ! Ne dites pas n'importe quoi ! Les amendements 11 et 241, mis aux voix, ne sont pas adoptés, non plus que l'amendement 47. Les amendements 49, 175 et 240, mis aux voix, ne sont pas adoptés. M. Thierry Mariani - La liberté, oui ! Le désordre, non ! La tolérance sexuelle, oui, la confusion dans le droit de la famille, non ! Alors que nous abordons la troisième lecture, il faut en finir avec la caricature de l'attitude de l'opposition. Non, la droite n'est pas un ramassis de ringards homophobes quand la gauche irait dans le sens de l'histoire. Simplement on peut être favorable à la liberté sexuelle, acquise d'ailleurs, et refuser le désordre auquel aboutira votre texte. Mon amendement 52 tend à exiger des signataires d'un Pacs qu'ils vivent effectivement sous le même toit. Mon amendement 53 ajoute une condition supplémentaire en exigeant une cohabitation minimale d'un an préalablement à la signature du Pacs. Ces garde-fous paraissent indispensables. M. le Rapporteur - La commission a rejeté ces amendements comme elle l'avait fait lors des lectures précédentes. On ne peut pas imposer aux signataires d'un Pacs une communauté de toit que le mariage lui-même n'impose pas. Ce dernier impose un domicile commun, non un toit commun. Quant au délai d'un an, il serait anticonstitutionnel. Mme la Garde des Sceaux - Avis défavorable. L'amendement 52, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l'amendement 53. Mme Christine Boutin - Aucun de nos amendements n'ayant été adopté, la nature du Pacs n'a pas été clarifiée. Vous avez refusé que le Pacs soit conclu devant un professionnel du droit, un notaire par exemple, favorisant d'ailleurs ainsi ceux qui ont les moyens de se défendre. Je propose donc de supprimer les mots "pour organiser leur vie commune" dans la définition du Pacs. Ils sont en effet bien inutiles en l'absence de tout recours à un professionnel. Qu'est-ce qu'organiser sa vie commune ? Décider d'une communauté de toit ? Se partager les immeubles et les biens ? Se répartir les couverts ? M. le Rapporteur - La commission a rejeté cet amendement. Mme la Garde des Sceaux - Avis défavorable. Mme Christine Boutin - Aucune explication ! L'amendement 242, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Pierre-Christophe Baguet - Les signataires d'un Pacs doivent vivre sous le même toit, ce qui n'implique pas la notion de vie commune. L'amendement 10 tend donc à substituer à ce dernier terme celui de "cohabitation". Une telle disposition renforcerait l'engagement des deux partenaires. L'amendement 10, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Thierry Mariani - Il convient de délimiter le champ d'application du Pacs en indiquant expressément qu'il concerne la vie de couple des intéressés, faute de quoi les empêchements de l'article 515-2 n'auraient plus aucune justification. L'amendement 50, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Claude Goasguen - Avec l'amendement 12, nous abordons un sujet qui fâche ! Il suffit de voir ce qui se passe aux Pays-Bas ou en Suède pour se convaincre que se posera bientôt en France, surtout après l'adoption d'un tel texte, la question de l'adoption pour les couples homosexuels. Or sur ce point la jurisprudence n'est pas fixée et des arrêts contradictoires sont rendus. Les juges ne peuvent se substituer au législateur du fait même des incertitudes de la loi. Cela étant, ils pourraient tirer argument de l'adoption du Pacs pour considérer que l'homosexualité n'exclut plus l'adoption. Vous aurez bien du mal à refuser demain l'égalité de situation que vous aurez acceptée aujourd'hui. Tout arrêt en ce sens risquerait même d'être attaqué devant la Cour européenne des droits de l'homme. L'autorisation d'adopter pour les couples homosexuels tient à coeur à de nombreuses associations d'homosexuels, vous le savez. Finissez-en avec l'hypocrisie qui consiste à dire oui à tout le monde. Prenez une position claire -M. Michel, lui, l'a fait. Si vous souhaitez interdire l'adoption aux couples homosexuels, dites-le expressément dans la loi. C'est l'objet de mon amendement 12. Tranchez ! Ne laissez pas un rapport de forces incertain décider d'une évolution essentielle de notre droit de la famille. L'amendement 12, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Bernard Accoyer - Mon amendement 173 concerne le recours à la procréation médicalement assistée qui se posera immanquablement pour les couples pacsés de même sexe, certains couples homosexuels souhaitant assumer un rôle parental. Je lisais il y a quelques jours dans le Quotidien du médecin que les homosexuels danois pourront adopter le enfants de leur conjoint. Ce désir de paternité ou de maternité est naturel pour les homosexuels, comme l'expliquait d'ailleurs lui-même Jean-Pierre Michel dans le journal La Croix en septembre dernier. "Le Pacs évoluera nécessairement un jour ou l'autre pour intégrer la dimension de l'adoption. Comment refuser l'adoption aux pacsés alors qu'on l'autorise aux célibataires de plus de 28 ans dont certains vivent en couple homosexuel ?", poursuivait-il. Dans ce contexte, notamment après l'arrêt du Conseil d'Etat du 18 février 1994, chacun comprendra la nécessité de prévoir dans la loi l'interdiction pour les couples homosexuels de recourir aux techniques de procréation médicalement assistée. Il y va de l'équilibre des enfants et de leur développement psycho-affectif harmonieux. M. le Rapporteur - Rejet. Mme la Garde des Sceaux - Rejet. Mme Christine Boutin - Lorsque vous vous êtes exprimée à la tribune, Madame la Garde des Sceaux, vous avez toujours dit qu'il n'était pas question de prévoir l'adoption par des personnes homosexuelles. Pour quelle raison ne voulez-vous pas que cette interdiction soit inscrite dans la loi ? Ce ne peut être que pour laisser au juge la possibilité d'interpréter... Ce texte n'est qu'une suite d'hypocrisies et d'incohérences ! Vous voulez faire plaisir à un certain électorat et vous n'avez même pas le courage d'assumer vos choix ! L'amendement 173, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Bernard Accoyer - Mon amendement 174 tend à compléter l'article 515-1 par l'alinéa suivant : "Lorsqu'une personne ayant obtenu la garde d'un enfant à l'issue d'un jugement de divorce conclut un pacte civil de solidarité avec un signataire de même sexe, cela entraîne la saisine systématique du juge afin de réexaminer la question de la garde de l'enfant." En effet, comme le fait observer un psychothérapeute spécialiste des enfants, les enfants ont besoin de modèles pour grandir, et on peut se demander ce qu'il adviendrait si on leur imposait un modèle sans répartition symbolique des rôles du père et de la mère. M. le Rapporteur - Rejet. La commission avait repoussé des amendements presque semblables en première et en deuxième lecture. C'est une proposition scandaleuse, qui vise des situations qui existent actuellement, à la différence près que les personnes sont en concubinage ; pourquoi une telle discrimination ? Mme la Garde des Sceaux - Je m'associe entièrement aux propos du rapporteur. Cet amendement témoigne d'une méconnaissance absolue de l'évolution de la législation sur l'autorité parentale ainsi que des pratiques sociales et juridictionnelles. M. Bernard Accoyer - C'est votre réponse qui, moi, me scandalise ! Il s'agit de la santé d'enfants, placés dans une situation psychologique inextricable. M. le Rapporteur - Il existe une jurisprudence, Monsieur Accoyer... Vos propos sont homophobes. Mme Christine Boutin - Pas du tout ! M. le Rapporteur - Mais si, puisque vous considérez, a priori, qu'un enfant élevé par deux femmes ou deux hommes peut être en danger et qu'il faut systématiquement saisir le juge. M. Claude Goasguen - Monsieur le rapporteur, vous n'invoquez la jurisprudence que lorsqu'elle vous arrange ! Aujourd'hui, nous essayons de légiférer. Pour nous, l'égalité entre couples hétérosexuels et homosexuels en matière de garde de l'enfant ne va pas de soi ; je ne dis rien de plus. Nous n'avons pas employé de mots outranciers à l'égard de la majorité ; qu'elle fasse de même à l'égard de l'opposition. L'amendement 174, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Thierry Mariani - Je propose, par mon amendement 56 de compléter cet article par l'alinéa suivant : "Chaque partenaire le fait contresigner par un témoin de son choix." L'objectif, une fois encore, est de protéger le partenaire le moins averti en matière juridique. Imagine-t-on qu'un mineur émancipé, âgé de 16 ans, aurait la maturité nécessaire pour signer un Pacs sans être assisté ? M. le Rapporteur - Rejet. Je ne pense pas que les témoins pourraient empêcher quoi que ce soit... Etant maire comme moi, vous avez dû constater que les témoins de mariage signent les registres et sont contents d'être pris en photo... L'amendement 56, repoussé par le gouvernement n'est pas adopté. Mme Christine Boutin - M. Michel traite de façon un peu légère la démarche faite par un témoin de mariage ! Je propose, par mon amendement 243, de compléter cet article par l'alinéa suivant : "Les personnes concluant un pacte civil de solidarité ne peuvent déroger aux lois qui intéressent l'ordre public et les bonnes moeurs." Il s'agit notamment de prohiber les pactes sur successions futures. M. le Rapporteur - La commission a repoussé cet amendement. Il va de soi que la convention qui sera déposée au greffe du tribunal d'instance ne saurait, sous peine de nullité, déroger à l'ordre public et aux bonnes moeurs : c'est un principe général du droit civil. Mme la Garde des Sceaux - Même avis. L'amendement 243, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Christine Boutin - Puisque vous avez voulu disposer que le Pacs a pour objet la communauté de vie entre deux personnes, il relève du statut des personnes. On peut prévoir une difficulté d'application dans le cadre du droit international privé, si l'un des contractants est national d'un pays qui ne connaît que le mariage, mais pas d'équivalent du Pacs. C'est le cas des pays musulmans, mais aussi de l'Allemagne et de bien d'autres Etats. Sera-t-il possible de conclure un Pacs avec un national d'un pays qui ne connaît pas le Pacs ? Ce problème fait l'objet de l'amendement 244. M. le Rapporteur - Nous l'avons déjà dit, la réponse est oui. La commission a rejeté l'amendement. Mme la Garde des Sceaux - Défavorable : cet amendement est inutile. L'amendement 244, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Christine Boutin - L'amendement 245 a pour objet d'éviter les Pacs blancs. On sait qu'il existe un "marché noir des mariages blancs", mais la facilité de conclure le Pacs suscitera a fortiori des convoitises. Je propose de préciser : "Il n'y a pas de pacte civil de solidarité lorsqu'il n'y a pas de consentement." L'amendement 245, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Bernard Accoyer - Je demande une brève suspension pour réunir mon groupe. La séance, suspendue à 3 heures 15 le mercredi 9 juin, est reprise à 3 heures 30. Art. 515-2 du code civil M. Thierry Mariani - L'article 515-2 traite des empêchements applicables au Pacs. Les empêchements se conçoivent si le Pacs est considéré comme un substitut du mariage. Mais comme la commission et le Gouvernement nous répètent que le Pacs n'a rien à voir avec le mariage, il n'y a pas lieu de prévoir des empêchements, et c'est pourquoi mon amendement 57 tend à supprimer l'article 515-2. Cet article montre bien qu'il est impossible de légiférer globalement sur la vie en commun selon qu'il s'agit d'hétérosexuels, d'homosexuels, de personnes âgées... La discussion de l'article précédent nous a permis d'apprendre que le Pacs peut être conclu pour une durée déterminée. A l'heure ou, à la faveur de la campagne pour les élections européennes, on réclame des droits nouveaux, où M. Hollande invoque l'exemple des pays nordiques, je regrette que vous ne donniez pas suite à notre proposition d'interdire toute adoption pour des couples homosexuels pacsés. Cette lacune coupable conduira bientôt à des dérives. M. Claude Goasguen - Notre amendement 13 est également de suppression. Les deux derniers alinéas de l'article 515-2 pourraient à la rigueur être considérés comme faisant barrage à la polygamie. Mais le premier alinéa définit, à peine de nullité, des empêchements qui montrent bien que le Pacs est un contrat sexué, contrairement à ce que vous prétendez. Il ressemble furieusement à quelque chose qui ressemble au mariage. Mme Christine Boutin - M. Goasguen a excellemment expliqué pourquoi il fallait supprimer l'article, comme je le propose aussi par l'amendement 84. Nous proposons ainsi à la majorité d'être claire avec elle-même : puisque le Pacs n'a rien à voir avec le mariage, supprimons l'article qui comporte des interdictions applicables au mariage. M. le Rapporteur - Avis défavorable, comme en première et en deuxième lecture. Mme la Garde des Sceaux - Avis également défavorable. Les amendements 57, 13 et 84, mis aux voix, ne sont pas adoptés. Mme Christine Boutin - Nous voulons espérer qu'à nos nombreux amendements le rapporteur cessera d'opposer systématiquement un "avis défavorable, comme en première et deuxième lecture", d'autant qu'en première et en deuxième lecture nous n'avons obtenu aucune explication. Notre amendement 247 tend à préciser le caractère de la nullité, absolue ou relative. Les éminents juristes qui sont ici ne pourront pas s'y opposer. Il s'agit ici encore de mieux protéger les contractants. M. le Rapporteur - Avis défavorable. Mme Christine Boutin - Ça continue ! M. le Rapporteur - La commission des lois, dont je ne suis que le rapporteur, a repoussé tous les amendements. M. Bernard Accoyer - Nous voulons savoir pourquoi ! Mme la Garde des Sceaux - Avis défavorable. M. Claude Goasguen - Monsieur le rapporteur, en commission nous avons été corrects, en acceptant de renvoyer la discussion des amendements à la séance publique. Alors, ne tirez pas argument du fait que vous auriez répondu en commission pour ne pas répondre ici. S'agissant de la protection des plus faibles, la nullité absolue et la nullité relative, ce n'est pas pareil ! L'amendement 247, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Thierry Mariani - L'absence de réponse ce soir rappelle ce qui s'est passé en première lecture. L'amendement 58 tend à supprimer le deuxième alinéa de l'article 515-2. Puisque le Pacs n'est pas le mariage, pourquoi ces empêchements ? M. Claude Goasguen - L'amendement 14 est défendu. Mme Christine Boutin - Si le Pacs n'implique pas de relations sexuelles, pourquoi l'interdire aux collatéraux ? Tel est le sens de mon amendement 246. M. le Rapporteur - Rejet. J'ai déjà répondu sur les nullités. Si le contrat contient des dispositions contraires à l'ordre public et aux bonnes moeurs, la nullité absolue s'applique. Sinon, c'est la nullité relative. Mme la Garde des Sceaux - Tous ces arguments ont été développés abondamment. J'ajoute qu'adopter ces amendements pourrait conduire à cautionner l'inceste (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Mme Christine Boutin - Ça n'a rien à voir ! M. Claude Goasguen - Il ne faut tout de même pas se moquer du monde ! Cela fait plusieurs heures que nous essayons de démontrer que vous n'avez pas dit la réalité sur le Pacs et que celui-ci est bel et bien "sexué" ! Les amendements 58, 14 et 246, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés. M. Thierry Mariani - Plus le matin approche, plus le Gouvernement s'embrouille : après avoir longuement prétendu que le Pacs n'avait rien à voir avec les relations sexuelles, il nous explique maintenant que supprimer certains empêchements revenait à favoriser l'inceste ! Mais peut-être faut-il mettre cela sur le compte d'une maladroite provocation... L'amendement 59 se situe dans la logique du précédent, et la majorité devrait donc l'accepter, puisque le Pacs, dit-elle, n'est pas un mariage. M. le Rapporteur - La commission ne l'a pas examiné, mais sans doute l'aurait-elle repoussé. Il avait été soumis au président de la commission des finances au titre de l'article 40. Mme Christine Boutin - La majorité essaie de nous faire passer pour homophobes et, maintenant, pour favorables à l'inceste. C'est tout de même un peu fort, alors qu'elle n'a même pas le courage d'assumer le véritable enjeu du texte, qui est le statut des personnes homosexuelles (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). L'amendement 59, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Thierry Mariani - Imaginez que nous vous ayons accusés d'encourager la pédophilie lorsque vous avez refusé d'interdire le Pacs aux mineurs émancipés : vous n'auriez pas manqué de hurler ! L'amendement 60 supprime les empêchements visant des personnes déjà pacsées, ce qui va dans le sens de la liberté sexuelle que vous préconisez. L'amendement 60, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Bernard Accoyer - L'amendement 172 empêche la conclusion d'un Pacs par une personne en ayant déjà conclu un moins de trois ans avant, afin de limiter les risques de fraude et les possibilités de répudiation. M. le Rapporteur - Imposer un tel délai serait contraire au principe de la liberté individuelle. M. Bernard Accoyer - Alors, on pourra en conclure quatre par an ! L'amendement 172, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Bernard Accoyer - L'amendement 183 de M. Delnatte souligne une faille du texte, à moins qu'il ne s'agisse d'une intention perfide : celle d'ouvrir de nouveaux flux d'immigration clandestine. Il s'agit d'interdire aux étrangers séjournant illégalement en France de conclure un Pacs. M. Thierry Mariani - Je me rappelle avoir hérissé le poil de mes collègues de la majorité en qualifiant le Pacs de "voiture-balai" de la régularisation des sans-papiers. Au cours de l'examen de la loi sur l'immigration, on avait qualifié de "fantasmes" mes inquiétudes quant aux effets du futur CUCS ou PIC, mais les fantasmes se sont transformés en cauchemars six mois après, comme toujours avec les socialistes ! L'amendement 62 interdit le Pacs aux étrangers entrés de façon irrégulière en France, l'amendement 63 à ceux entrés irrégulièrement dans l'espace Schengen, tandis que les amendements 61 et 171 visent l'irrégularité du séjour lui-même. Nul doute, s'ils ne sont pas adoptés, que les mêmes organisations gauchistes, rebaptisées "écologistes", qui s'opposent sur les quais de gare aux expulsions de clandestins appelleront demain à la conclusion de Pacs blancs "républicains"... (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) M. le Rapporteur - La commission a repoussé ces amendements, car la conclusion d'un Pacs n'ouvre pas automatiquement droit au séjour ; elle constitue un élément parmi d'autres qui peuvent prouver l'existence de liens avec la France. Il en va de même, d'ailleurs, pour le mariage. Mme la Garde des Sceaux - Même avis. M. Claude Goasguen - Faut-il rappeler que l'administration n'est pas une juridiction ? Elle ne juge pas, elle obéit au pouvoir politique. Or, le ministre de l'intérieur ne nous a toujours pas dit comment il entendait interpréter l'article de la loi sur l'immigration relatif à la "vie privée et familiale". Vous comprendrez donc que nous préférions une garantie explicite du législateur. Les amendements 183, 62, 63, 61 et 171, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés. M. Thierry Mariani - Sans porter contre la majorité d'accusations désobligeantes, je me permets de proposer, par l'amendement 64, d'interdire la signature d'un Pacs par un mineur émancipé. A seize ans, en effet, on n'est pas apte à peser les conséquences juridiques et sexuelles d'un contrat tel que le Pacs. J'ajoute que l'ensemble de nos compatriotes sont révulsés par le phénomène de la pédophilie. M. le Rapporteur - Avis défavorable. M. Bernard Accoyer - Pourquoi ? Mme la Garde des Sceaux - Les explications figurent au Journal officiel du 8 novembre 1998 (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). L'amendement 64, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Thierry Mariani - Voilà qu'on nous renvoie au Journal officiel ! Bientôt ce sera Internet ! L'amendement 65 interdit le Pacs entre deux personnes dont l'une vit en état de concubinage avec une autre personne. On ne peut accepter de "concupacsage" -sinon de nombreux problèmes concrets risquent de se poser. M. le Rapporteur - Rejet. Le concubinage est un état de fait, il n'est écrit en droit nulle part -au reste, il y a des gens mariés qui vivent en concubinage avec de tierces personnes. Arrêtez ce type de plaisanterie ! Mme la Garde des Sceaux - Défavorable. M. Thierry Mariani - Soyons sérieux ! Moi, je siège dans une commission locale d'insertion : je sais bien que le seuil de déclenchement du RMI tient compte du fait de vivre en concubinage. Vous allez créer un imbroglio. L'amendement 65, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Bernard Accoyer - Soit nous n'obtenons pas de réponse. Soit on nous donne une réponse lapidaire et méprisante, ou on nous renvoie au Journal officiel, dont nous n'avons pas ici la collection. L'amendement 170 interdit le Pacs entre deux personnes de même sexe dont l'une a été autorisée à adopter un enfant. Vous nous dites en effet que les couples homosexuels ne pourront pas adopter -mais à quel moment cette interdiction prendra-t-elle corps ? M. le Rapporteur - Rejet. Une personne a été autorisée par le tribunal à adopter, alors qu'elle était célibataire, et vous voudriez lui interdire de se pacser ? C'est inacceptable. Mme la Garde des Sceaux - Défavorable. M. Bernard Accoyer - Voilà un nouvel aveu ! A vrai dire je n'en suis pas surpris, car le rapporteur n'a jamais caché que le Pacs devait permettre l'adoption par des couples homosexuels. L'amendement 170, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Christine Boutin - Ce texte est un tissu de contradictions -et j'aimerais que Mme la ministre ait la courtoisie de relire quand elle cite le Journal officiel -on verrait que le Gouvernement s'empêtre dans ses contradictions. L'amendement 248 interdit le Pacs entre deux personnes de même sexe dont l'une au moins a la garde légale d'un mineur. L'amendement 248, repoussé par la commission et le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Bernard Accoyer - L'amendement 169 précise que "le procureur de la République peut former opposition à l'enregistrement d'un pacte qui serait conclu en violation de l'une des prohibitions énoncées ci-dessus." L'amendement 182 prévoit des sanctions. M. le Rapporteur - L'amendement 169 n'est pas nécessaire, car cela va de soi. Le greffe du tribunal ne peut enregistrer un Pacs qui serait contraire à la loi -sinon il sera nul. Contre l'amendement 182. Mme la Garde des Sceaux - Même avis. M. Thierry Mariani - Supposons que je souscrive un Pacs à Carpentras, et six mois plus tard un autre à Paris. Comment le saura-t-on ? Y aura-t-il un fichier central ? M. le Rapporteur - Votre Pacs aura été enregistré dans la ville où vous êtes né. Certes, il peut toujours y avoir des fraudes -mais alors la nullité sera absolue. M. Bernard Accoyer - Notre connaissance du Pacs progresse ce soir ! La liste des pacsés sera donc tenue soigneusement. Cela ne peut que mettre à mal la vie privée de nos concitoyens (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Un député socialiste - Il y a bien des fichiers pour les concubins. Mme la Garde des Sceaux - Si vous lisez la proposition de loi, Monsieur Accoyer, vous trouverez la réponse à votre question. M. le Rapporteur - Article 515-3, deuxième alinéa. L'amendement 169, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l'amendement 182. Mme Christine Boutin - C'est parce que nous sommes convaincus que ce texte s'adresse d'abord aux personnes homosexuelles que nous refusons l'établissement de tout fichier. Nous cherchons à protéger la vie privée de chacun. Mon amendement 249 prévoit que l'action en nullité du Pacs peut être intentée par toute personne intéressée -membres de la famille, créanciers, ayants cause à titre particulier et ministère public. Le préciser est indispensable sous peine de connaître, après adoption du texte, et avant interprétation de la Cour de cassation, une période d'incertitude jurisprudentielle. L'amendement 249, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Christine Boutin - J'aimerais disposer du Journal officiel des débats de première et de deuxième lecture. Pouvez-vous me dire à quelle page se trouve votre réponse sur le problème soulevé par mon amendement précédent ? Quant à mon amendement 250, il prévoit que le pacte civil de solidarité conclu en fraude de la loi peut être annulé à la suite d'une demande de nullité formée dans les trente ans suivant la date de sa conclusion. Il est important de prévoir dès maintenant les délais pour l'action en nullité. En droit commun, la prescription de l'action en nullité absolue est de trente ans. M. le Rapporteur - Avis défavorable. Le texte de votre amendement est contradictoire avec son exposé des motifs. La prescription trentenaire s'impose de par la loi. J'aurais compris que vous demandiez un délai soit plus court, soit plus long. Mme la Garde des Sceaux - Avis défavorable. Mme Christine Boutin - Un exposé sommaire d'amendement n'a pas force de loi ! L'amendement 250, mis aux voix, n'est pas adopté. Art. 515-3 du code civil M. Claude Goasguen - Cet article a beaucoup évolué au fil des lectures. C'est finalement le greffe du tribunal d'instance qui enregistrera les Pacs. Mais d'une part, les greffes, qui manquent de moyens, seront-ils en mesure de le faire ? D'autre part, la tenue d'un registre à l'état-civil dans les mairies, comme le demandent certains de nos collègues ne serait-elle pas préférable, étant à la fois plus simple et offrant une plus grande protection ? Enfin, quelle sera la nature du document délivré par les greffes ? Les tiers auront-ils accès au contenu du Pacs ou ne pourront-ils qu'être informés de l'existence de celui-ci ? La déclaration du Pacs se fera-t-elle sur formulaire ronéoté, identique pour tous, à remplir chez soi et à retourner ? Toutes ces questions appellent une réponse car la nature même du contrat est en cause. Pour toutes ces raisons, mon amendement 15 tend à supprimer l'article 515-3. M. Thierry Mariani - Si je suis hostile à toute célébration du Pacs en mairie, je souhaiterais néanmoins qu'il soit enregistré à l'état-civil des mairies. C'est le seul moyen d'éviter une dispersion préjudiciable, notamment lors d'une succession. Vous avez longtemps hésité sur le lieu d'enregistrement du Pacs : mairie, préfecture, tribunal d'instance ? C'est finalement cette dernière solution que vous avez retenue. Elle pose deux problèmes. D'une part, les tribunaux d'instance n'ont pas vocation à tenir un état-civil bis. D'autre part, certains d'entre eux n'ont même pas de greffe à temps plein et manquent cruellement de moyens, notamment dans les petites villes. Au moment où l'on développe les alternatives aux poursuites afin de désengager les juridictions, n'est-il pas incohérent de confier une nouvelle mission à des tribunaux déjà surchargés et en sous-effectif notoire ? Par ailleurs, un greffier pourra-t-il refuser d'enregistrer un Pacs qu'il jugerait contraire à la loi ? Les registres de déclarations seront-ils publics ? Par qui pourront-ils être consultés ? C'est important car comment par exemple faire jouer la solidarité des dettes si personne ne peut avoir connaissance de la conclusion du Pacs ? Enfin, est-il nécessaire d'ouvrir la possibilité de conclure un Pacs à l'étranger dans la mesure où ce contrat produit des effets en matière de droit au séjour en France ? Pour toutes ces raisons, mon amendement 66 tend aussi à supprimer l'article 515-3. Mme Christine Boutin - Mon amendement 85 également, pour des raisons différentes de celles exposées par mes collègues. Ce qui nous gêne est l'établissement d'un registre des pacsés, qui seront en grande majorité des homosexuels. Ce registre identifiera donc les comportements sexuels de nos compatriotes. L'histoire a prouvé combien cela était dangereux, en particulier pour les homosexuels. M. Bernard Accoyer - Au fil des lectures, l'article 515-3 du code civil aura beaucoup évolué. Il distingue aujourd'hui entre la convention singée par les partenaires et la déclaration effectuée au greffe du tribunal d'instance. Le greffier visera et datera les deux exemplaires originaux de la convention qu'il restituera à chacun des partenaires, chargés de leur conservation. On imagine aisément les falsifications et les contentieux qui s'ensuivront. Il est également prévu que les partenaires fournissent au greffier les documents attestant l'absence des empêchements prévus et que le Pacs devienne opposable dès son inscription au registre du greffe. Que de cafouillages depuis le début de l'examen du texte ! Le Pacs devait être signé en mairie, puis ce fut en préfecture, ce sera maintenant au tribunal d'instance. Que de subtilités, la convention se distinguant par exemple de la déclaration ! Il faudra être très fort pour s'y retrouver et encore une fois, ce sont les plus faibles qui seront lésés. Quant à l'archivage, il permettra de connaître la vie privée de nos concitoyens. Et, en cas de Pacs à durée déterminée, comment les choses se passeront-elles ? Pour toutes ces raisons, mon amendement 168 tend à supprimer cet article du code civil. M. le Rapporteur - La commission a repoussé ces amendements de suppression. Monsieur Accoyer, dans le cas que vous évoquez, fort improbable puisque nul n'y aurait intérêt, les intéressés ne seraient pas dispensés de toutes les formalités prévues. Mme la Garde des Sceaux - Même avis. Les amendements de suppression 15, 66, 85 et 168, mis aux voix, ne sont pas adoptés. M. Thierry Mariani - Notre collègue Goasguen, qui va revenir, propose par son amendement 16 que l'attestation civile de solidarité soit un acte sous seing privé passé devant notaire. Il souhaite également que sa publicité soit assurée par les services de l'état civil, et non sur un registre spécial tenu en préfecture. Si la droite avait proposé un tel registre, que n'aurait-on entendu ? Qu'est-ce qui interdira l'accès aux informations qu'il contiendra, et même leur publication ? Mme Christine Boutin - Si le mariage fait l'objet d'une reconnaissance de l'Etat, c'est parce qu'il est garant de la continuité et de la stabilité de la société. Tel n'est pas le cas du Pacs. C'est la raison pour laquelle je propose par mon amendement 251 qu'il fasse l'objet d'un acte écrit sous seing privé. M. le Rapporteur - Rejet. Ce n'est pas la logique du texte. Mme la Garde des Sceaux - Défavorable. Je précise que les personnes qui n'y ont pas intérêt n'ont pas accès aux informations nominatives. M. Thierry Mariani - La solidarité des dettes, qui est la seule obligation du Pacs, fera que tout créancier aura intérêt à savoir si son débiteur est pacsé ! Tout le monde aura donc accès au registre. L'amendement 16, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l'amendement 251. M. Bernard Birsinger - Le groupe communiste propose depuis le début du débat que le Pacs soit signé à la mairie. C'est l'objet de son amendement 1. La mairie est en effet un lieu connu de tous, où s'établissent déjà les actes d'état civil. M. Thierry Mariani - Par mon amendement 69, je propose que la déclaration d'un Pacs soit fait au service de l'état civil de la mairie. L'abandon de l'idée d'une célébration est une bonne chose, mais la détention de ces informations en mentions marginales pourra être utile. M. le Rapporteur - Défavorable. Monsieur Mariani, il n'a jamais été question de célébration par l'officier d'état civil -sauf dans une pétition mensongère... L'association des maires de France et M. Delevoye nous ayant fait part de leur souhait que, pour ne pas envenimer la polémique, on trouve un autre lieu que la mairie, Patrick Bloche et moi-même avons proposé une autre solution. Nous nous y tenons ; si l'Assemblée ne veut pas faire de même, elle le dira. Mme la Garde des Sceaux - Je suis défavorable à ces amendements. L'amendement 1, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l'amendement 69. M. Bernard Accoyer - Mon amendement 167 tend à remplacer les mots "résidence commune" par le mot "domicile" ; les obligations liées au Pacs étant quasiment nulles, on peut en effet s'attendre à de multiples fraudes... L'amendement 167, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Thierry Mariani - La solidarité des dettes est inapplicable si l'on n'assure pas à la conclusion d'un Pacs un minimum de publicité. Je propose par mon amendement 73 de compléter le premier alinéa par les mots : "dix jours francs après avoir fait procéder à la mention de leur intention de conclure un pacte dans un journal départemental d'annonces légales". L'amendement 73, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Thierry Mariani - Mon amendement 76 tend à prévenir la multiplication des contentieux, en précisant que les personnes qui concluent un Pacs doivent annexer à leur déclaration un inventaire détaillé des biens leur appartenant." Tous les professionnels considèrent que l'indivision est le système le plus compliqué... M. le Rapporteur - Défavorable. Les intéressés pourront, s'ils le souhaitent, choisir un autre système que l'indivision. Mme la Garde des Sceaux - Défavorable. L'amendement 76, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Bernard Accoyer - Je suis plein d'espoir pour l'amendement 166, car il crée un nouvel impôt... La majorité devrait donc s'y rallier. Je propose de créer une taxe d'enregistrement du Pacs pour couvrir les frais qui en résultent pour les tribunaux d'instance. Ceux-ci manquent déjà de personnel, et cette taxe permettra à la chancellerie d'y créer des postes. M. le Rapporteur - La commission a repoussé ce nouvel amendement -le premier. La tendance est plutôt à supprimer les droits d'enregistrement, comme on l'a fait pour la carte d'identité. Mme la Garde des Sceaux - Enfin un amendement nouveau, le premier de cette troisième lecture ! Je vais donc répondre, ne m'étant pas exprimée à son sujet en première et deuxième lectures. Le Gouvernement est défavorable, car cette mesure irait contre la règle budgétaire de la non-affectation des ressources. En outre j'appartiens à un Gouvernement qui ne crée pas d'impôts, mais a plutôt tendance à en supprimer (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). M. Thierry Mariani - C'est un amendement de dérision : M. Accoyer ne veut pas vraiment proposer un nouvel impôt. Que dirait-on d'ailleurs si on créait un impôt sur les seuls pacsés ? Ce serait un impôt à connotation sexuelle... Mais M. Accoyer a voulu soulever un vrai problème : comment des tribunaux déjà surchargés pourront-ils assumer cette nouvelle charge ? L'amendement 166, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Claude Goasguen - Je ne peux laisser dire que ce Gouvernement a tendance à diminuer les impôts ; ce serait tromper les lecteurs du Journal officiel. L'amendement 17 est un amendement de retrait. Pour moi, le Pacs est plutôt un acte sous seing privé. Il faut assurer la protection du plus faible, par le biais d'une convention devant le notaire. L'amendement 17, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Christine Boutin - Pour montrer la bonne volonté de l'opposition, je retire l'amendement 253. M. Thierry Mariani - L'amendement 68 prévoit que, parmi les pièces d'état civil demandées lors de l'enregistrement du Pacs, figurent celles qui établissent la nationalité. Il serait paradoxal, alors que tout de nos concitoyens nés sur des territoires devenus indépendants ont bien du mal, lors du renouvellement de leur carte d'identité, à fournir toutes les pièces qui leur sont demandées, qu'on ne requière aucune preuve de nationalité pour la conclusion d'un Pacs. M. le Rapporteur - Défavorable. Cette volonté de contrôler la régularité du séjour, la nationalité, etc. n'est pas dans l'esprit du texte. Mme la Garde des Sceaux - Défavorable. M. Thierry Mariani - Ce que nous demandons, c'est de contrôler la régularité du séjour : c'est l'application des lois de la République. Et votre opinion est qu'on ne doit pas en contrôler l'application ! L'amendement 68, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Christine Boutin - L'amendement 254 a pour but de clarifier la situation patrimoniale des intéressés, afin de prévenir les contentieux. Je propose donc que soit joint à la convention l'acte d'inventaire patrimonial des contractants. L'amendement 254, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Christine Boutin - L'amendement 252 a pour objet de combler une lacune du texte, qui n'exclut pas la représentation, ce qui pourrait donner lieu à une fraude considérable. Il précise donc que la conclusion du Pacs, même enregistré à l'étranger, requiert la présence des contractuels. M. le Rapporteur - La commission l'a repoussé comme inutile. D'après le texte, les personnes qui concluent un Pacs "en font la déclaration conjointe" : cela implique qu'elles devront être présentes, que ce soit en France ou à l'étranger. Mme la Garde des Sceaux - Même avis. L'amendement 252, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Thierry Mariani - Afin de protéger le plus faible, l'amendement 321 prévoit que le Pacs peut être refusé si le tribunal considère que la convention contient des dispositions contraires à l'ordre public ou aux bonnes moeurs. M. le Rapporteur - Défavorable : cela va de soi. Mme la Garde des Sceaux - Défavorable. L'amendement 321, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Thierry Mariani - Il est proposé par l'amendement 322 que le tribunal puisse s'opposer à l'enregistrement du Pacs s'il considère que la convention contient des dispositions manifestement défavorables à l'un des partenaires. Je serai curieux de voir, un an après la mise en place du Pacs, une analyse des contrats. Je crains le pire. Si certains seront bien conseillés, je redoute que d'autres soient floués dans la rédaction de la convention, et que celui qui tiendra la plume ait parfois tendance à s'avantager. L'amendement 322, repoussé par la commission et par le Gouvernement ,mis aux voix, n'est pas adopté. M. Thierry Mariani - L'amendement 77 concerne les registres, et propose qu'ils soient publics. Si vous m'objectez que c'est dangereux, c'est que votre solution n'est pas bonne ; car si les registres ne sont pas publics, la solidarité des dettes devient inapplicable. L'amendement 78 prévoit que ces registres sont consultables par toute personne justifiant d'un intérêt légitime. Je pense en particulier au cas d'un créancier. La solidarité des dettes est la seule obligation inhérente au Pacs, la seule contrepartie que vous invoquez toujours quand nous disons que le Pacs ne crée que des droits... Mais il faut encore qu'elle puisse s'appliquer. M. Bernard Accoyer - L'amendement 162 prévoit que le registre sera accessible à quiconque le demande. Votre texte ne prévoit rien sur la communication des informations aux tiers. Ceux-ci pourront-ils avoir connaissance de la convention ? Comment seront-ils informés de son existence même ? Y aura-t-il, pour les commerçants, une publicité au registre du commerce et des sociétés ? En l'état actuel, le dispositif assure certes le respect de la vie privée, mais au détriment de la sécurité juridique des tiers. Nous avons en outre constaté qu'il existait un risque que cette vie privée ne soit pas si préservée qu'on le dit. M. le Rapporteur - Avis défavorable. Mme la Garde des Sceaux - Avis également défavorable. L'amendement 77, mis aux voix, n'est pas adopté. Les amendements 78 et 162 ne sont pas adoptés. M. Thierry Mariani - Mes amendements 72 et 193 portent sur la régularité du séjour en France des co-contractants de nationalité étrangère. Peut-on en permanence demander à bénéficier de nouveaux droits en France sans respecter les lois de la République ? M. le Rapporteur - Avis défavorable. Nous nous sommes déjà expliqués longuement. Mme la Garde des Sceaux - Avis également défavorable. Les amendements 72 et 193, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés. M. Thierry Mariani - Mon amendement 75 tend à éviter la conclusion de Pacs simultanés et à assurer une meilleure publicité. L'amendement 75, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Thierry Mariani - Les amendements 70 et 71 tendent à assurer la publicité du Pacs, soit par un journal départemental d'annonces légales, soit par un panneau municipal. Sans publicité, il est impossible de faire jouer la solidarité des dettes. Mme Christine Boutin - L'opposition cherche à éviter que ce texte mal ficelé soulève de trop nombreux contentieux. C'est pourquoi je propose, par l'amendement 255, d'organiser la publicité du projet de Pacs avant sa conclusion. M. le Rapporteur - Rejet. Mme la Garde des Sceaux - Rejet également. L'amendement 70, mis aux voix, n'est pas adopté. Les amendements 71 et 255 ne sont pas adoptés. Mme Christine Boutin - Rien ne figure dans le texte en matière d'opposition à la conclusion d'un Pacs. Or les membres de la famille des contractants, l'ex-époux ou le contractant d'un précédent Pacs peuvent vouloir légitimement s'y opposer. Mon amendement 256 tend à pallier cette carence. L'amendement 256, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Christine Boutin - Mon amendement 257 tend à combler lui aussi un vide juridique, en autorisant le ministère public à s'opposer à la conclusion d'un Pacs. Puis-je espérer une réponse, sinon du Garde des Sceaux, du moins du rapporteur, plus courtois ? M. le Rapporteur - Avis défavorable. Les oppositions ne figurent pas dans le texte, mais le droit des nullités s'applique. Le procureur pourra prononcer la nullité absolue en cas de trouble à l'ordre public et d'atteinte aux bonnes moeurs. Mme la Garde des Sceaux - Même avis. Mme Christine Boutin - Quelle incohérence que la vôtre ! Lorsque nous avons proposé, au début de la discussion, d'introduire le Pacs dans le livre des contrats et non pas dans le code civil, pour que tout soit clair, vous avez refusé. Et maintenant vous invoquez le droit des contrats. En fait vous répondez en opportunité. L'amendement 257, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Thierry Mariani - L'opposabilité aux tiers impose qu'ils puissent déterminer une date certaine à la convention, et que celle-ci fasse l'objet d'une publication dans un journal départemental d'annonces légales. C'est à quoi tend l'amendement 194. L'amendement 194, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Bernard Accoyer - Toujours des réponses lapidaires ! La lassitude gagne, sans doute, mais précédemment nous n'avons pas obtenu davantage de précisions. Le texte ne comporte aucune disposition relative aux moyens de valider les pièces produites. Je propose donc, par l'amendement 165, d'introduire un délai de 15 jours pour permettre aux tiers de faire opposition à l'enregistrement d'un Pacs. M. le Rapporteur - Avis défavorable. La nullité ne se prescrit pas en 15 jours, et le texte est donc beaucoup plus protecteur. Mme la Garde des Sceaux - Même avis. L'amendement 165, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Thierry Mariani - Les tiers doivent pouvoir consulter le registre tenu par le greffe du tribunal d'instance. Tel est l'objet de l'amendement 185. L'amendement 185, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Thierry Mariani - Pourquoi envisager la conclusion d'un Pacs à l'étranger ? Nous souhaitons par l'amendement 67, le réserver à des personnes vivant en France. Il est vrai que la conclusion d'un Pacs n'ouvrira pas droit à une carte de séjour, mais elle constituera un élément d'appréciation déterminant. Je serais curieux de savoir comment, dans deux ou trois ans, le dispositif sera appliqué par l'administration. M. Bernard Accoyer - L'amendement 160 supprime également le dernier alinéa de l'article 515-3, qui ouvre de nouvelles possibilités à l'immigration clandestine, venant après de précédents dispositifs, qui étaient déjà irresponsables. Les amendements 67 et 160, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés. M. Thierry Mariani - L'amendement 74 réserve les Pacs conclus à l'étranger aux couples constitués de deux Français. L'amendement 74, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Bernard Accoyer - L'amendement 159 est défendu. L'amendement 159, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Thierry Mariani - L'amendement 184 de M. Delnatte prévoit que les signataires étrangers devront produire une copie de leur titre de séjour. Il est vrai que votre préoccupation principale n'est pas de maîtriser les flux migratoires, mais de savoir comment régulariser les 70 000 clandestins que vous avez recensés mais non expulsés. L'amendement 184, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Christine Boutin - Quelle n'a pas été ma stupéfaction en lisant dans Le Monde d'hier soir que M. Jean-Pierre Galland, qui s'expose "à moitié dissimulé derrière une touffe verdoyante de feuilles de cannabis" et avait été condamné à 50 000 F d'amende pour avoir cru intelligent d'envoyer un "joint" à chacun des députés, est soutenu par les Verts et candidat aux élections européennes sur leur liste ! Cela en dit long sur le respect de la loi par la gauche plurielle... (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) Mes amendements 258 et 279 sont défendus. Les amendements 258 et 279, repoussés par la commission et par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance. PUBLICATION DU RAPPORT D'UNE COMMISSION D'ENQUÊTE M. le Président - L'Assemblée a été informée le 2 juin du dépôt du rapport de la commission d'enquête sur certaines pratiques des groupes nationaux et multinationaux industriels, de services et financiers et leurs conséquences sur l'emploi et l'aménagement du territoire. La Présidence n'ayant été saisie, dans le délai prévu à l'article 143, alinéa 3 du Règlement, d'aucune demande tendant à la constitution de l'Assemblée en comité secret afin de décider de ne pas publier tout ou partie du rapport, celui-ci sra imprimé sous le numéro 1667 et distribué. Prochaine séance cet après-midi, mercredi 9 juin, à 15 heures. La séance est levée à 5 heures 20. Le Directeur du service ----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- ERRATUM au compte rendu analytique de la 1ère séance du mardi 8 juin 1999 Page 7, à la fin du 2ème paragraphe de la réponse de M. Gayssot à M. Vannson, lire : © Assemblée nationale © Assemblée nationale |