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Session ordinaire de 1999-2000 - 6ème jour de séance, 13ème séance

1ÈRE SÉANCE DU MERCREDI 13 OCTOBRE 1999

PRÉSIDENCE de M. Laurent FABIUS

Sommaire

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT 2

BAISSE DE LA TVA SUR LA RESTAURATION 2

CONFÉRENCE ÉCONOMIQUE DE LA NATION 3

AVENIR DU THERMALISME 3

SORT DES JUIFS IRANIENS INCARCÉRÉS 4

AVENIR DE L'INDUSTRIE NUCLÉAIRE DANS LE GARD RHODANIEN 5

LUTTE CONTRE LES LICENCIEMENTS ABUSIFS 5

POLITIQUE EUROPÉENNE DES TRANSPORTS 6

ÉCOTAXE 7

CONTRATS DE PLAN 2000-2006 8

RÉFORME DES FONDS STRUCTURELS
EUROPÉENS 9

REMPLACEMENTS D'ENSEIGNANTS 10

PACTE CIVIL DE SOLIDARITÉ 
-lecture définitive- (suite) 11

EXPLICATIONS DE VOTE 13

RÉDUCTION NÉGOCIÉE DU
TEMPS DE TRAVAIL (suite) 19

ART. 2 (suite) 19

APRÈS L'ART. 2 26

FAIT PERSONNEL 30

La séance est ouverte à quinze heures.

    QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

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BAISSE DE LA TVA SUR LA RESTAURATION

M. François Goulard - Hier, en votre absence, Monsieur le ministre de l'économie, notre collègue Yves Nicolin a rappelé l'engagement que vous aviez pris, au nom du Gouvernement, de chercher à obtenir de la Commission européenne l'autorisation de réduire le taux de TVA appliqué à la restauration (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Or, non seulement vous n'en avez pas soutenu le principe, mais vous n'avez pas non plus soutenu la présidence finlandaise qui, appuyée par plusieurs autres pays membres de l'Union, avançait une proposition en ce sens.

Sans reconnaître que les engagements pris avaient été trahis (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV), M. le secrétaire d'Etat à l'industrie a fait valoir que le Gouvernement avait décidé de baisser le taux de TVA appliqué aux travaux des particuliers dans les logements, considérant qu'il s'agissait là d'une mesure favorable à l'emploi. Quelles considérations fondent cette décision, puisqu'il s'agit, dans les deux cas, d'activités de main-d'_uvre ? D'autre part, M. Pierret a omis de signaler, dans sa réponse

qu'au moment même où il décidait de réduire le taux de TVA sur les travaux effectués dans les logements, le Gouvernement décidait aussi de réduire pratiquement à zéro le montant du crédit d'impôt sur ces mêmes travaux, si bien que de nombreux contribuables -et notamment les plus modestes- verront leurs impôts augmenter, et non pas baisser !

Plus généralement, quand cesserez-vous de parler de baisse d'impôt, Monsieur le ministre, alors que les prélèvements publics absorbent 60 % du surplus de richesse produit par les Français ? Et je vous serais obligé de nous épargner, dans votre réponse, votre sempiternelle référence à la hausse de TVA intervenue en 1995, car nous n'avons pas remarqué une particulière impatience de votre part à ramener le taux « normal » de TVA à 18,6 % depuis deux ans que vous êtes aux affaires (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF)

M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - Je ne pouvais malheureusement être présent hier, ce dont je vous prie de bien vouloir m'excuser, mais j'ai su que les questions portant sur la réduction de la TVA appliquée à la restauration n'ont pas manqué, et je tiens à corriger trois erreurs que l'on retrouve dans votre énoncé d'aujourd'hui.

En premier lieu, la présidence finlandaise n'a aucunement avancé la proposition dont vous parlez (Protestations sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF). Je le sais : j'y étais, vous, pas ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV) De fait, la France a soutenu le compromis élaboré pour éviter au Portugal, qui s'était placé dans l'illégalité et qui, à ce titre, risquait des poursuites, d'y demeurer. L'Allemagne a, elle, continué d'opposer son veto à l'application d'un taux de TVA réduit à la restauration. Or, comme vous le savez fort bien, et comme, je crois, vous l'approuvez, les décisions d'ordre fiscal requièrent l'unanimité.

Je vous rappelle à nouveau qu'en décidant de réduire la TVA appliquée aux travaux réalisés par les particuliers dans leurs logements, le Gouvernement a suivi une résolution adoptée par votre assemblée. Je vous rappelle encore que nous sommes disposés à réduire le taux de TVA appliqué à la restauration lorsque les dispositions communautaires le permettront, et que vous prétendiez les ignorer en dit plus long sur votre connaissance des mécanismes de l'Union que sur vos souhaits en matière de TVA (Protestations sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR).

Je tiens par ailleurs à votre disposition diverses études qui établissent que la réduction ainsi ciblée est plus créatrice d'emplois que ne l'aurait été une réduction appliquée à la restauration, ce qui montre que la résolution adoptée par votre assemblée l'a été à juste titre.

Je partage enfin votre point de vue : 60 % de prélèvements publics sur le surplus de richesse produite, c'est trop. Mais c'est loin d'être un record et, puisque vous me demandez de ne pas faire référence à une certaine année, je vous dirai, sans la nommer, que cette année-là, ce taux était de 90 %... (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV ; protestations sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR)

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CONFÉRENCE ÉCONOMIQUE DE LA NATION

M. Jean-Louis Idiart - Hier s'est tenue la première conférence économique de la Nation, qui regroupe représentants des salariés et des employeurs, appelés à débattre de la situation économique. C'est une innovation intéressante que cette instance nouvelle de concertation, qui a notamment abordé la question des prochaines négociations qui doivent s'ouvrir sous peu à Seattle. Quels enseignements tirez-vous de cette première conférence, Monsieur le ministre de l'économie ? Quels seront les prochains thèmes traités dans cette nouvelle enceinte du dialogue social ? Y parlera-t-on tant des négociations à venir à l'OMC que de la réforme fiscale qu'envisage le Gouvernement ?

M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - La Commission des comptes de la Nation, quelque peu poussiéreuse, a été rénovée, et la Conférence économique de la Nation est une de ses émanations. Y sont représentés les centrales syndicales, les syndicats patronaux, le Sénat et votre Assemblée en la personne, hier, de votre collègue Didier Migaud, rapporteur général du budget. Comme vous l'avez indiqué, la première Conférence économique de la Nation a traité de la conjoncture et, de ce fait, des négociations de l'OMC où je me rendrai avec MM. Huwart et Moscovici pour défendre les intérêts de la France.

Il convient en effet de discuter plus avant la situation économique du pays, non seulement dans les assemblées parlementaires mais aussi avec les partenaires sociaux, quels que soient leurs points de vue. A cet égard, les critiques du MEDEF n'ont pas manqué, ce qui ne m'a pas surpris outre mesure. Pour autant, le sentiment était partagé que, la croissance de retour, la confiance renaissait et le chômage baissait : tous l'ont reconnu.

Nous traiterons, par la suite, de la réforme des prélèvements directs que le Premier ministre a souhaité porter à l'ordre du jour des travaux du Gouvernement, l'année prochaine.

D'une manière générale, cette première Conférence a tenu ses promesses (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

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AVENIR DU THERMALISME

M. Jean-Pierre Dufau - Dans son plan stratégique, la CNAM proposait de mettre un terme au remboursement des cures thermales, ce qui avait suscité un vif émoi. Votre décision, Madame la ministre de l'emploi et de la solidarité, de ne pas donner suite à cette proposition, nous a rassurés et je tiens à vous en remercier.

Vous avez par ailleurs annoncé la création d'une mission sur l'avenir du thermalisme. La lutte contre les abus est certes nécessaire, mais la concertation doit prévaloir. Quels seront donc les objectifs de cette mission, et ses moyens ?

Allez-vous, enfin, proroger la suspension de l'entente préalable à l'autorisation de cure thermale, arrêtée le 12 mars 1997 pour 2 ans ?

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité - Nous avons en effet décidé de ne pas donner suite à la proposition de la CNAM (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV), car nous savons la part apportée par le thermalisme à notre système de santé, et sa contribution à l'emploi. Cela dit, les cures doivent fonctionner correctement. Si abus il y a, ils doivent être corrigés, et il revient à la CNAM de le faire.

La mission sur le thermalisme que nous avons souhaité mettre en place travaillera en concertation avec tous les partenaires intéressés -corps médical, CNAM mais aussi représentants des villes thermales- et doit nous rendre ses conclusions à la mi-2000. Il était temps de réexaminer la réglementation en vigueur et de s'interroger sur la façon dont notre réseau de villes thermales peut apporter les meilleurs soins aux malades, dans des conditions compatibles avec les exigences de l'assurance maladie.

Un arrêté du 12 mars 1997 a, comme vous l'avez rappelé, supprimé les ententes préalables pour les cures. La CNAM n'ayant pas encore dressé le bilan de cette suppression -on ignore si s'en est ou non ensuivi une augmentation du nombre des cures-, j'ai décidé de proroger pour un an la suppression de ces ententes préalables, avant de prendre une décision définitive.

Comme vous le constatez, le Gouvernement reconnaît pleinement le rôle du thermalisme dans notre système de santé et son poids dans certains bassins d'emploi (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

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SORT DES JUIFS IRANIENS INCARCÉRÉS

M. Jean-Marie Le Guen - Notre pays doit accueillir dans quelques jours le président iranien, M. Khatami. Nous avons été nombreux à nous réjouir de son arrivée au pouvoir, qui a suscité un immense espoir populaire. Nous avons voulu y voir une possibilité de renforcer les relations entre la France et l'Iran et la promesse de jours meilleurs pour les citoyens iraniens, en particulier les démocrates, en lutte depuis de si longues années dans ce pays livré au fondamentalisme le plus rigide.

Cependant, de graves problèmes demeurent. Treize juifs iraniens, dont un enfant de seize ans, croupissent depuis plusieurs mois en prison et encourent la pendaison pour espionnage au profit d'Israël et des États-Unis. Cette accusation peu crédible camoufle à peine les pensées racistes, haineuses et rétrogrades, de leurs auteurs. Ces treize personnes n'ont été incarcérées et condamnées qu'en raison de leur religion.

Nous ne pouvons nous résigner à laisser triompher une telle barbarie. Si nous sommes attentifs à l'évolution de la situation intérieure de l'Iran, nous le sommes également au respect des droits élémentaires des citoyens iraniens.

Je sais que la France et vous-même, Monsieur le ministre des affaires étrangères, n'avez jamais perdu de vue l'intérêt des juifs iraniens incarcérés. Comptez-vous mettre à profit la visite du président Khatami pour obtenir des autorités iraniennes une mesure de clémence qui ne serait que justice ? Au-delà quel rôle voyez-vous pour l'Iran au Proche et au Moyen-Orient ? Votre récente tournée dans cette région du monde vous permet-elle d'envisager l'action d'un Iran plus ouvert qui doit encore lutter en son sein contre l'intolérance et l'extrémisme ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV)

M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères - Dès l'annonce de l'incarcération de ces treize juifs iraniens, la France, notamment par ma voix, s'est exprimée avec force sur le sujet. Nous n'avons cessé de dire combien cette situation était choquante. Je m'en suis encore entretenu récemment à New York avec mon homologue qui m'a fait valoir qu'il ne s'agissait pas de treize juifs mais de quarante personnes impliquées dans une affaire d'espionnage. Je lui ai répondu que, comme vous l'avez dit vous-même, cette accusation n'était pas crédible. Il a également insisté sur le fait que ces personnes n'étaient pas encore condamnées, et que les juges n'avaient pas été saisis, ce à quoi j'ai rétorqué qu'elles ne bénéficiaient d'aucune garantie. Cela étant, il semble que rien d'irréversible n'ait été accompli et que le président Khatami cherche à parvenir à une solution la moins mauvaise possible.

Partisans et adversaires de l'ouverture du pays à l'extérieur s'affrontent actuellement de manière très rude en Iran. Depuis l'élection du président Khatami, nous n'avons cessé d'encourager les tenants de l'ouverture et poursuivrons dans cette voie. Le Premier ministre et moi-même ne manquerons pas de redire à M. Khatami combien l'opinion publique mondiale sera sensible à la décision prise et combien celle-ci pourra influer sur les relations internationales de l'Iran.

Vous avez évoqué le Proche-Orient. M. Barak, avec lequel j'ai fait le point de la situation il y a quelques jours ainsi qu'avec M. Arafat, est tout à fait conscient des efforts déployés par la France et sait pouvoir compter sur notre constance et notre détermination (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

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AVENIR DE L'INDUSTRIE NUCLÉAIRE DANS LE GARD RHODANIEN

M. Gérard Revol - Le Gard rhodanien, siège d'un grand pôle industriel, voit aujourd'hui menacés deux pivots de son économie, les secteurs nucléaire et sidérurgique.

Après les menaces sur le site d'Ugine SA et les arrêts de certaines activités de la Cogema, l'avenir économique de ce bassin d'emploi s'obscurcit encore avec la prise de participation majoritaire du groupe Shering AG dans le capital d'Oris Cis-Bio, filiale à 100 % de CEA-Industrie. Cette opération entraînera des restructurations tant à Saclay qu'à Marcoule et entraînera la suppression d'environ 250 emplois, dont 130 à Marcoule.

Dans le marché de la médecine, nucléaire fortement concurrentiel, Oris Cis-Bio n'a pas bénéficié des investissements qui auraient été nécessaires à son développement. Cela ne fait que renforcer les autres questions que se posent les salariés du CEA et de ses filiales, concernant par exemple l'avenir du procédé d'enrichissement par laser ou celui du MOX, mais aussi le calendrier du démantèlement des installations déclassées.

Le Commissariat à l'énergie atomique a-t-il des objectifs clairs en matière de recherche et de politique industrielle ? Aura-t-il dans la loi de finances pour 2000 les moyens de ses missions ? Le Gouvernement entend-il tout faire pour que le Gard rhodanien ne devienne pas une nouvelle friche industrielle ?

M. Christian Pierret, secrétaire d'État à l'industrie - Oris, filiale de CEA-Industrie spécialisée dans la médecine nucléaire, connaît de très graves difficultés financières, avec 130 millions de francs de pertes attendues en 1999, et n'a pas la taille critique. L'objectif du Gouvernement est de lui redonner des perspectives et d'y maintenir le maximum d'emplois.

L'activité Kryptor fortement déficitaire, devra être arrêtée. Nous avions demandé au CEA et à la COGEMA de proposer aux 130 personnes travaillant sur le site de Marcoule des solutions satisfaisantes. Mobilité interne, mesures d'âge et départs volontaires seront privilégiés.

Le reste de l'activité de médecine nucléaire offre des perspectives à la condition qu'Oris puisse se rapprocher de la taille critique et disposer de produits innovants. Dans ce cadre, la meilleure opportunité semble être de l'adosser au groupe Schering, qui présente les meilleures garanties. Il n'existe pas d'entreprise française répondant à cette double exigence.

En tout état de cause, aucune décision définitive de cession n'a été prise à ce jour par les pouvoirs publics. Nous attacherons une grande importance aux conditions de développement des activités et de reprise des personnels y compris ceux de Kryptor, par le nouveau partenaire.

Au-delà du cas d'Oris, les différents opérateurs nucléaires sur le site de Marcoule se sont engagés à maintenir les effectifs après l'arrêt de l'usine de retraitement, ce qui a représenté un effort de reconversion important.

Enfin, il convient de souligner les importants efforts d'investissement réalisés sur le site ces dernières années, qui ont contribué au maintien de l'emploi : l'aménagement de l'usine Melox ou encore la montée en puissance de l'usine Centraco, qui traite et conditionne les déchets faiblement radioactifs (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

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LUTTE CONTRE LES LICENCIEMENTS ABUSIFS

M. André Lajoinie - La vague d'indignation suscitée par certaines pratiques patronales, illustrées dans ma région par Michelin et consistant à annoncer des licenciements alors même que l'entreprise réalise des bénéfices et a reçu d'importantes aides publiques, ne cesse de croître dans le pays. 350 000 salariés perdent chaque année leur emploi. Et que dire du drame révélé par L'Humanité (« Ah ! » sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) de ces salariés d'Aérospatiale-Matra qui n'ont dû être reclassés dans leur groupe qu'après le suicide de la fille de 14 ans de l'un d'entre eux, qui a voulu par là, « enlever à sa mère une bouche à nourrir » ? Cette stratégie illustre le profond mépris dans lequel les entreprises tiennent les hommes et les femmes qui ont pourtant contribué à leur richesse !

Cela devrait faire réfléchir le MEDEF. Avant de glorifier les entreprises et de partir en guerre contre les 35 heures, peut-être ferait-il bien de s'interroger sur leur légitimité quand elles se livrent à de telles pratique ? (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) Cela interpelle la représentation nationale (Mêmes mouvements), en tout cas sur nos bancs. Il nous faut améliorer la législation pour qu'il soi possible d'intervenir en amont, comme le réclament les salariés de l'usine Volbert-Michelin dans l'Aisne qui participeront à la manifestation pour l'emploi du 16 octobre (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste).

C'est l'objet de la proposition de loi déposée par le groupe communiste le 15 avril dernier tendant à empêcher les licenciements abusifs. Non, une telle garantie ne mettrait pas en danger la bonne marche des entreprises, non plus qu'un contrôle plus strict de l'utilisation des fonds publics. C'est même tout le contraire. Il est temps, Madame la ministre de l'emploi, que le Gouvernement et le Parlement prennent leurs responsabilités en ce domaine (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe RCV).

Plusieurs députés RPR, UDF et DL - Gayssot ! Gayssot !

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité - Je réponds avec plaisir en accord avec M. Gayssot car l'ensemble des membres du Gouvernement partage la même position sur l'emploi et les licenciements abusifs.

Nous avons tous été choqués par la façon dont Michelin a annoncé ces licenciements. On ne peut pas donner sans cesse l'impression que ce qui est bon pour les actionnaires est mauvais pour les salariés (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV). Je ne reviens par sur le drame évoqué par M. Lajoinie (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)... dont je regrette qu'il suscite sur certains bancs les cris et non le silence (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

Au-delà, il nous faut continuer à travailler pour que le licenciement soit la dernière décision prise quand tout a été essayé. Cela implique une meilleure gestion prévisionnelle des emplois -le projet de loi préparé par Nicole Péry y contribuera- et l'engagement de négociations sur les 35 heures avant tout plan social -la majorité a voté un amendement d'Odile Saugues rendant obligatoire une telle négociation (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Par ailleurs, la proposition de loi déposée par votre groupe soulève, à juste titre, le problème de la bonne utilisation des fonds publics. Elle s'impose particulièrement à un moment où certains nous pressent de réduire les prélèvements obligatoires et s'agissant de fonds en faveur de l'emploi. Le Gouvernement considère que les entreprises qui ont les moyens de financer leur restructuration ne doivent plus continuer à faire appel à la solidarité nationale, qu'il s'agisse des préretraites ou d'aides d'autre nature. Cela devrait d'ailleurs être la règle pour ceux qui défendent le libéralisme : on est libre, mais on est responsable de ses actes !

Nous sommes responsables des fonds publics et nous engagerons les moyens nécessaires pour contrôler leur bonne utilisation (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

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POLITIQUE EUROPÉENNE DES TRANSPORTS

M. Michel Vaxès - Le Conseil des ministres européens des transports a pris acte de la détermination de la France et de quelques autres pays et renoncé à remettre en cause les restrictions à la circulation des transporteurs routiers. Nous nous en félicitons. La mobilisation des salariés de ce secteur, loin de contrarier l'action gouvernementale, a contribué à donner du poids à la position française.

La prochaine réunion du Conseil des ministres des transports devra conforter ces acquis. Il est impératif, en effet, de réduire le temps de travail des transporteurs routiers et d'encourager le développement du fret ferroviaire, dans l'intérêt à la fois de l'économie, de l'environnement et de la sécurité. La création d'un réseau européen de fret ferroviaire serait une avancée à la condition de s'inscrire dans une logique de coopération. Or, les prises de positions de certains pays-membres, relayées par la présidence finlandaise, en faveur de l'ouverture du rail à la concurrence ne sont pas pour nous rassurer. L'effroyable accident de Paddington, à Londres, souligne les dramatiques conséquences des privatisations (Interruptions sur les bancs du groupe UDF et du groupe du DL).

La puissance du mouvement social, conjuguée à la détermination du Gouvernement, sont plus que jamais nécessaires. Quels sont vos objectifs pour la prochaine réunion des ministres des transports ? Comment comptez-vous obtenir une harmonisation sociale par le haut dans ce secteur ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe RCV)

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement - De fait, l'intervention des partenaires sociaux dans la construction européenne est une bonne chose !

La directive européenne sur le temps de travail des transporteurs routiers a bien failli être enterrée, mais nous avons fait en sorte qu'elle vienne en discussion.

Certains pays voudraient exclure les travailleurs indépendants de la réduction du temps de travail ; or, l'intérêt à la fois de ces personnes, de la sécurité sur les routes et de la lutte contre le dumping social commande que tous les conducteurs en bénéficient.

En ce qui concerne les interdictions de circulation des poids lourds le week-end, la France a une position ferme et elle n'est pas isolée puisque l'Allemagne, l'Autriche, l'Italie et, dans une certaine mesure, la Belgique vont dans le même sens. La partie n'est pas encore gagnée mais l'idée d'une harmonisation sociale par le haut, dans l'intérêt à la fois des chauffeurs routiers et des autres utilisateurs de la route, semble faire son chemin.

En ce qui concerne le fret ferroviaire, tous les groupes de l'Assemblée nationale, à l'exception du groupe DL, m'ont mandaté pour refuser, en juin dernier, la libéralisation proposée par la Commission européenne. Nous avançons maintenant sur une idée qui rejoint la proposition française, la création d'un réseau ferré européen de fret sur la base d'accords de coopération. Le but est de transférer une partie du trafic de marchandises de la route au rail (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste) et la déclaration du Conseil des ministres va dans ce sens. Encore faut-il qu'elle soit bien interprétée ! Nous voulons favoriser le trafic ferroviaire, dans de bonnes conditions de sécurité. Ce n'est pas la privatisation qui doit être à l'ordre du jour, mais la défense du service public (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe RCV).

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ÉCOTAXE

M. Didier Quentin - Ma question s'adressait au Premier ministre, mais je constate qu'il est absent... (Vives interruptions sur les bancs du groupe socialiste).

M. le Président - Vous étiez certainement présent, hier, Monsieur Quentin, quand le Premier ministre a expliqué les raisons de son absence d'aujourd'hui.

M. Didier Quentin - J'étais là ! Je poserai donc ma question au Gouvernement collectivement.

Ce gouvernement ne cesse de clamer que les impôts payés par les entreprises vont baisser l'année prochaine. En réalité, seule une surtaxe créée par la gauche en 1997 va disparaître, comme prévu par la loi. Il n'y a donc aucune gloire à en tirer.

Mais nous aimerions en savoir plus au sujet de votre nouvelle création fiscale, l'écotaxe sur les activités polluantes. Les deux ministres qu'on pourrait croire concernés se déclarent incompétents : M. Strauss-Kahn dit que ce n'est pas son texte, Mme Aubry dit qu'il s'agit d'une question fiscale. Vous comprenez pourquoi je voulais interroger le Premier ministre ! (Sourires sur les bancs du groupe du RPR, du groupe DL et du groupe UDF) A qui faut-il donc s'adresser pour avoir des réponses précises sur ce sujet ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL ; interruptions sur les bancs du groupe socialiste)

M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - Je vous réponds de ma part et de la part de Mme Aubry car la réponse est la même ("Ah !" sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

Nous supprimons effectivement une surtaxe temporaire dont la création avait été nécessaire, en 1997, pour passer le cap de l'euro, ce que ne permettait pas le budget que vous aviez voté ! (Vives interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL ; applaudissements sur les bancs du groupe socialiste) Si, comme vous le dites, il n'y a pas de fierté particulière à faire ce qu'on a annoncé, il doit y avoir une honte certaine à ne pas le faire -or la taxe temporaire créée par M. Juppé n'a jamais été supprimée par lui ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; huées sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

L'Union européenne discute depuis longtemps de l'instauration d'une taxe sur l'énergie pour en limiter la consommation, et donc diminuer la pollution. Cette écotaxe va se mettre en place et les gouvernements que vous avez soutenus, à droite, ont participé à ces négociations. L'écotaxe sera mise en place en concertation avec les industriels concernés... (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

M. Thierry Mariani - Quelle concertation ?

M. le Ministre - Elle ne touchera pas les particuliers (Rires et huées sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF) et ceci est cohérent avec la politique de ce gouvernement, qui n'a pas augmenté les taxes sur le super, ce qui n'était pas le cas sous les majorités précédentes... (Vives interruptions sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF)

La concertation avec les industriels gros consommateurs d'énergie -cimenteries, industrie de l'aluminium, etc.- a lieu en ce moment même. Nous aboutirons probablement à un système proche de celui qu'ont mis en place nos voisins.

Les ressources ainsi dégagées serviront à baisser les charges sur le travail non qualifié.

Vous reconnaîtrez sûrement qu'une mesure qui vise à limiter la consommation d'énergie, donc la pollution, et dont le produit sert à réduire les charges sur les bas salaires, favorisant ainsi l'emploi, est une bonne mesure (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV).

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CONTRATS DE PLAN 2000-2006

M. Christian Estrosi - Nous regrettons une fois de plus que le Gouvernement n'éclaire guère la représentation nationale en réponse à une question précise et, lorsqu'il parle de concertation, nous craignons le pire.

Alors que la planification, lancée par de Gaulle, a permis à la France de se doter, au cours des quarante dernières années, des moyens nécessaires à son développement et son aménagement, les prochains contrats de plan, couvrant la période 2000-2006 marquent, hélas, un désengagement de l'Etat puisque sa part annuelle passe de 17,6 à 15 milliards. Et les choix opérés traduisent la volonté du Gouvernement de freiner la réalisation des grands équipements structurants dont la France a pourtant besoin. On renonce ainsi à des centaines de kilomètres de routes, de rails, de voies navigables et de liaisons transfrontalières.

La dotation pour la route baisse de 27 à 20 milliards, ce qui est inacceptable, sans pour autant qu'aucun effort majeur soit

consenti en faveur du train ou du ferroutage. On parle de deuxième, voire de troisième enveloppe. Qu'en est-il exactement ? Il faudrait au moins 10 milliards supplémentaires pour réaliser les grandes infrastructures de communication qui feraient de la France un vrai pays moderne ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement - Puisque vous vous plaignez de la façon dont répond le Gouvernement, je vous citerai des chiffres précis. Les contrats de plan précédents n'ont été honorés qu'à 80 % car les retards pris sous les précédents gouvernements (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) étaient tels qu'il n'a pas été possible de les rattraper, malgré une année de prolongation.

Pour ce qui est de la route, la première enveloppe -il y en aura une deuxième, vous le savez (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) contient 21 milliards. Et si je compte ce qui existe hors contrats de plan, nous dépassons 23 milliards, soit exactement ce qui a été dépensé -je ne dis pas «promis»- lors des précédents contrats de plan. Mais la politique du Gouvernement consiste à promouvoir une politique intermodale plus respectueuse de l'environnement et de la sécurité. C'est pourquoi le budget 2000 pour la sécurité routière augmente de 17,5 % ; c'est aussi pourquoi le transport ferroviaire sera plus favorisé que par le passé : d'ici dix ans, nous voulons doubler...

Plusieurs députés RPR et UDF - Vous ne serez plus là !

M. le Ministre - ...le trafic de marchandises sur rail. Nous y consacrons 120 milliards d'investissements. Je n'ai pas souvenir que vous ayez fait autant quand vous étiez au pouvoir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste ; protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) Par ailleurs, la part du FITTVN réservée au transport ferroviaire va pour la première fois atteindre 53 %.

Nous nous attacherons aussi à développer les transports collectifs. Bref, nous sommes engagés dans une politique qui combine respect de l'environnement, sécurité et efficacité économique (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste).

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RÉFORME DES FONDS STRUCTURELS EUROPÉENS

Mme Chantal Robin-Rodrigo - Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'aménagement du territoire et porte sur la réforme des fonds structurels faisant suite à la décision de la Commission de réduire les territoires éligibles.

Il serait juste de ne pas demander le même effort à tout le monde et de tenir compte de la situation des départements qui ne comprennent pas de zone favorisée. Dans les Hautes-Pyrénées, par exemple, il n'y a ni commune riche ni quartier résidentiel aisé.

La réforme prévoit que certains quartiers dégradés de grandes métropoles deviennent éligibles. On peut le comprendre, mais je crains que ces redéploiements s'effectuent au détriment de zones rurales et urbaines de moyenne importance (Applaudissements sur divers bancs).

Comment admettre qu'une ville comme Tarbes, qui s'est dotée d'un contrat de ville élargi à son agglomération et qui est frappée de plein fouet par la restructuration de l'industrie de défense, soit pénalisée par la réforme, alors que certaines villes à fort

potentiel fiscal et non endettées, Toulouse, par exemple, qui n'ont pas mené de politique volontariste en faveur de leurs quartiers défavorisés (M. Dominique Baudis proteste), vont, elles, pouvoir prétendre du jour au lendemain aux fonds structurels européens.

L'aménagement du territoire doit reposer sur une juste péréquation entre départements riches et pauvres, et non sur des mesures uniformes consistant à déshabiller Pierre pour habiller Paul (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe DL).

Quelles mesures comptez-vous prendre pour que le nouveau zonage ne pénalise pas les villes les moins riches qui ont mené une politique volontariste de la ville, au bénéfice de nos concitoyens les plus démunis ?

Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement - Notre pays connaît une réduction sensible de la population concernée par le futur objectif II : 31,3 % de la population désormais au lieu de 41,3 %. Mais la France reste la première bénéficiaire des fonds structurels et subit une érosion moindre que celle de la moyenne des pays européens.

Un certain nombre de critères ont été soumis au CNADT afin de répartir cette baisse. Une modulation nous est en effet apparue bien préférable à une réduction homothétique de 25 % appliquée à chaque région. Sont ainsi visées les populations des zones admissibles au regard des critères communautaires, qu'ils soient industriels ou ruraux, ainsi que celles des zones urbaines sensibles et des zones de revitalisation rurale. Nous avons en outre prévu un filet de sécurité d'au moins 50 % des populations entièrement couvertes. Si tel n'avait pas été le cas, le Centre ou la région Pays-de-la-Loire auraient connu une bien plus forte réduction de la population bénéficiaire.

La consultation menée par les préfets de région doit permettre de déterminer les zones couvertes par les fonds structurels. Les parlementaires et les collectivités territoriales sont évidemment invités à donner leur avis et j'espère, Madame, que vous aurez pu défendre les intérêts de Tarbes à cette occasion.

La décision d'inclure dans le zonage des quartiers urbains dégradés ne s'effectue pas au détriment des zones rurales (Protestations sur les bancs du groupe UDF et du groupe du DL). En effet, sur les 18,7 millions d'habitants concernés par les fonds, 10 le sont au titre des reconversions industrielles, 5 au titre des difficultés des zones rurales, 2 au titre de la politique de la ville et des quartiers urbains sensibles, 1 au titre d'autres difficultés -celles de la pêche, par exemple.

Le choix qu'a fait le Gouvernement de retenir 460 000 habitants de Seine-Saint-Denis s'explique par le fait que ce département répond complètement aux critères communautaires, avec un taux de chômage supérieur à 15 % et une diminution importante du nombre d'emplois industriels.

Mais la solidarité européenne ou nationale ne dispense pas d'organiser, et nous y veillerons, la solidarité au sein des régions et entre celles-ci (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV et du groupe socialiste).

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REMPLACEMENTS D'ENSEIGNANTS

Mme Bernadette Isaac-Sibille - Avant de poser ma question, je voudrais dire à Mme Aubry que je déplore que l'on se serve d'un drame familial pour répondre à une question technique (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR).

Monsieur le ministre de l'éducation nationale, vous avez plusieurs fois affirmé qu'il faut mettre l'enfant au centre du système éducatif.

Certes, mais pour cela, encore faut-il donner aux chefs d'établissement les moyens adéquats. Or, une circulaire du rectorat de Lyon, datée du 26 juillet mais arrivée le 19 août dans les établissements, précise qu'à partir de cette rentrée, plus aucun remplacement ne sera possible quand les dotations en heures de remplacement auront été épuisées. Il faut savoir que l'enveloppe de l'académie de Lyon est de 5 897 heures pour une population de plus de 4 millions d'habitants. De plus, la circulaire dit que le choix doit se limiter à une liste académique constituée en priorité d'allocataires pour perte d'emploi. C'est ainsi qu'un professeur de latin a été remplacé par un monsieur qui n'avait pas enseigné depuis vingt ans et qui n'avait jamais fait de latin ! (Exclamations sur divers bancs)

La circulaire interdit un début de suppléance tant que l'autorité académique n'a pas adressé son autorisation. De même en cas de prolongation du congé maladie.

Mais le comble est que, pour que le remplacement commence, il faut que le professeur absent ait fait parvenir son formulaire d'arrêt maladie, que celui-ci ait été transmis à l'académie avec la proposition de candidature, que l'académie, enfin, ait fait parvenir une réponse positive ! Ne croyez-vous pas que les principaux et proviseurs pourraient assumer la responsabilité de cette procédure ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR) Est-ce ainsi que nous pouvons garantir aux enfants une scolarité normale ? (Mêmes mouvements)

M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie - Puisque vous avez commencé par mettre en cause Mme Aubry, je vous ferai observer qu'elle n'a fait que reprendre un élément de la question qui lui était posée ! (Protestations sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR)

S'agissant de cette circulaire de l'académie de Lyon, ignorez-vous qu'il y a déconcentration ? En outre, je n'ai pas pour principe de contrôler les circulaires des recteurs ! (Exclamations sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL) Plaidant pour la déconcentration, vous seriez bien mal placés pour me demander d'agir autrement !

Le problème des remplacements est réel mais, lorsqu'il s'agit comme ici de remplacements de courte durée, prenons bien garde à ne pas porter préjudice aux enfants. Or faire venir un professeur devant une classe pour huit ou dix jours seulement, c'est s'exposer à une perte de temps (Mêmes mouvements). J'ai donc entrepris de modifier le système actuel. Cependant, il y a une chose que je ne puis faire rapidement : c'est de remédier à l'absence d'un plan pluriannuel de recrutement, absence qui explique qu'on manque de spécialistes dans certaines disciplines alors qu'ils sont en excédent dans d'autres. C'est cette situation qui nous oblige à demander à des enseignants de replacer des collègues d'autres disciplines et j'admets que, du point de vue pédagogique, ce ne soit pas l'optimum ! Cela étant, on ne résoudra le problème ni dans l'instant ni par de simples déclarations : je l'ai déjà dit, je ne puis fabriquer des professeurs de latin s'il n'y en pas. (Exclamations sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL)

PACTE CIVIL DE SOLIDARITÉ -lecture définitive- (suite)

L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote, par scrutin public, sur l'ensemble de la proposition de loi relative au pacte civil de solidarité, en lecture définitive.

M. le Président - Avant de donner la parole à Mme la Garde des Sceaux, je voudrais vous communiquer quelques chiffres fournis par les services de l'Assemblée. Celle-ci a consacré au débat qui se termine aujourd'hui quelque 110 heures de séance ; 2 161 amendements ont été déposés sur ce texte, des motions ont été débattues pendant une vingtaine d'heures (Exclamations sur les bancs du groupe UDF et du groupe du DL). La discussion générale a occupé 35 heures et celle des articles 64 heures.

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice - Il convenait en effet de rappeler que ce débat fut long et les amendements nombreux -encore n'avez-vous pas mentionné la vingtaine d'heures consacrée à cette proposition par le Sénat. En outre, une exception d'irrecevabilité défendue ici-même a pulvérisé tous les records : elle a duré 5 heures 25 minutes !

Tout cela est-il un gage de sérieux et de qualité ? Je l'ignore, mais je ne regrette pas le temps que j'ai passé ici avec vous. Je remercie toutes celles et tous ceux qui ont soutenu ce texte au fil des jours et des nuits que nous avons consacrés à ce débat, nous avons vu les esprits évoluer, et l'homophobie et l'intolérance reculer ("Très bien !"sur les bancs du groupe socialiste, du groupe RCV et du groupe communiste).

Mes remerciements vont particulièrement aux deux rapporteurs, MM. Michel et Bloche, ainsi qu'à la présidente de la commission des lois, Mme Tasca (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe RCV et du groupe communiste).

Ce texte est important en ce qu'il confère à cinq millions de nos concitoyens des droits dont ils étaient privés parce qu'ils ne voulaient, ou ne pouvaient, se marier. Restera l'essentiel : prendre les textes d'application et les faire entrer en vigueur aussi vite que possible. Mais je sais que mes collègues du Gouvernement, -dont certains sont présents ici, ce dont je leur sais gré- y veilleront. Nous devrons ainsi définir rapidement les conditions dans lesquelles le Pacs sera enregistré devant les tribunaux d'instance car c'est cette formalité qui rendra le pacte opposable aux tiers et ouvrira la possibilité de jouir de certains droits fiscaux.

Je m'engage à tout faire pour que ce Pacs ait une existence pratique avant la fin de l'année (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe RCV et du groupe communiste), une fois que, comme je l'espère, vous aurez par votre vote transformé cette proposition en loi de la République (Mêmes mouvements).

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur de la commission des lois - N'ayant pas abusé de la faculté qui m'était ouverte d'intervenir à tout moment dans le débat, je me permets de vous retenir encore quelques instants.

Ouvert depuis près de dix ans, ce débat a occupé le Parlement pendant 120 heures. Si parfois, pour paraphraser Mme Boutin, la souffrance a été réelle de chaque côté de l'hémicycle, celles et ceux qui vont voter ce texte en tireront en définitive bénéfice. Nul ne pourra en effet dire que ce texte aura été adopté à la sauvette. L'Assemblée, mais aussi les Français en auront été largement informés, grâce à la presse notamment -ce dont je la remercie (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL), sans m'en tenir à la presse dite de gauche, car Le Figaro, La Croix ou La Vie ont aussi largement ouvert leurs colonnes à ce débat.

Malheureusement, du côté droit de cet hémicycle comme de celui du Sénat, on n'a rien voulu entendre... Pourtant, le 15 avril 1998, M. Delevoye, en sa qualité de président de l'Association des maires de France, appelait à mettre un terme à la précarité dont souffraient les unions homosexuelles et à étudier un contrat, éventuellement enregistré en mairie. Quant à M. Fillon, il déclarait qu'il était à l'honneur de Mme Bachelot d'avoir compris avant beaucoup les évolutions de la société française. Nos collègues Edouard Balladur et Alain Juppé ont fait, eux, état de leurs hésitations... En revanche, M. Pasqua résumait parfaitement la stratégie du RPR en disant que, favorable au texte, il voterait cependant contre, comme son groupe !

M. Sarkozy, lui, s'est illustré en téléphonant à plusieurs reprises à la rédaction de TF1 pour tenter d'empêcher Mme Bachelot de s'exprimer... (Murmures sur les bancs du groupe du RPR)

A Démocratie libérale, M. Madelin a dit à plusieurs reprises son soutien à ce texte. Enfin, à l'UDF comme d'ailleurs au RPR, les jeunes ont montré lors de leur université d'été combien ils étaient scandalisés par l'attitude leurs aînés...

La majorité de nos collègues de droite, gênée aux entournures, a essayé de convaincre qu'elle n'était pas homophobe, M. Sarkozy allant jusqu'à s'excuser auprès des homosexuels qui avaient pu croire à un discours homophobe. Mais ils n'avaient pas cru entendre car l'homosexualité ne rend pas sourd ! (Sourires) Rappelons quelques propos glanés dans la presse : «La nature, c'est l'homme et la femme», «Pourquoi pas avec son chien ?», «les tantes vont pouvoir se marier», «le mariage-tampax sans garde-folle», «retour à la barbarie»... «n'oublions pas les zoophiles, les escargots ; c'est le cirque Pinder», «l'homosexualité est l'expression d'une sexualité infantile», «il faut saisir les services vétérinaires, pourquoi pas un Pacs pour les poissons», «la nation n'a pas à encourager les déviances», «il faut limiter le Pacs aux personnes de sexe différent», «il n'y a qu'à les stériliser» et enfin je ne citerai pas les propos de certains de nos collègues, M. Hamel au Sénat et ici M. Meylan, à ce point ignobles et grossiers que je ne peux les prononcer. Celles et ceux qui tiennent de tels propos sont homophobes, comme les militants du Front national qui aux côtés de Mme Boutin demandaient le 31 janvier dernier qu'on envoie les homosexuels au bûcher (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste ; protestations sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL).

Certes nos travaux ne se sont pas limités à ces propos indignes, même s'il nous a fallu supporter une stratégie d'obstruction systématique. Il nous a fallu également subir l'ignorance de certains, tels M. de Courson pensant que la situation familiale était inscrite sur la carte d'identité, ou Mme de Panafieu que le transfert d'un bail n'était pas du domaine de la loi.

Le Pacs n'est pas destiné aux seules lesbiennes et aux seuls homosexuels. C'est aussi un texte destiné aux couples et aux communautés de vie à caractère non sexuel. Il prévoit le droit à maintien dans les lieux en cas de décès du co-contractant, ainsi que diverses mesures fiscales et sociales. Sa vocation globale est d'affirmer qu'un couple, ce peut être un homme et une femme, quelquefois mariés, mais aussi deux hommes ou deux femmes.

Le Pacs ne modifie en rien le mariage. Il prend en compte simplement le fait que les couples non mariés ne doivent pas être privés de droits ni soustraits à des devoirs. Celles et ceux qui voudront rester en union libre le pourront cependant. En outre, le concubinage sera désormais étendu par la loi aux homosexuels et aux lesbiennes, à la demande du Sénat.

Le Pacs fera partie des textes qui honorent la République. Grâce à lui, on ne pourra plus se trouver à la porte de son logement si sa compagne ou son compagnon vient à mourir comme nous l'avons trop malheureusement vu par le passé.

Si tous ceux qui ne sont pas favorables au Pacs ne sont pas homophobes, tous les homophobes sont opposés au Pacs.

C'est au premiers que je voudrais m'adresser. Mes amis de la majorité bien entendu mais aussi MM. Mattei, Séguin, Fillon, Donnedieu de Vabres, Baudis, Delevoye, et bien d'autres qui dans les couloirs me disaient ! « ton texte n'est pas mal, mais politiquement, il est gênant pour nous... » (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

Sans aller jusqu'à voter le texte, vous pourriez avoir la clairvoyance et le courage politique de vous abstenir, ne serait-ce que pour donner un signe d'espoir à toutes celles et tous ceux, jeunes souvent, qui dans vos rangs le désirent.

Enfin je voudrais conclure en remerciant Mme la présidente de la commission des lois, qui a soutenu tout au long de ce débat ses rapporteurs, ainsi que Mme la Garde des Sceaux. Nous lui faisons confiance pour que la loi entre rapidement en application. Je remercie également le groupe socialiste et son président, qui s'est mobilisé sans relâche et a accepté que sa niche parlementaire soit utilisée pour examiner ce texte (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Nous devons à cet égard nous féliciter que le premier ministre ait une fois encore tenu ses engagements en donnant au Parlement plus de pouvoir et d'autonomie.

Je remercie également les membres de la majorité parlementaire -les Verts, le PRG, le parti communiste- qui nous ont assuré de leur soutien sans s'interdire de déposer des amendements, qui ont souvent été repris -tel celui déposé par M. Birsinger.

Je salue également les militants et les associations qui se sont battus depuis huit ans pour arriver à convaincre notre Parlement et nos concitoyens et une nouvelle fois les associations de lesbiennes et d'homosexuels qui ont défendu ce texte.

Un hommage particulier doit enfin être rendu aux militants du collectif pour le Pacs et à ses dirigeants, MM. Pouliquen, Champagnec... (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

L'ensemble du combat mené par les partisans du Pacs montre que l'action politique n'est pas vaine et que le courage paie en politique, comme le disait Mme Elisabeth Badinter. Les électeurs se souviendront du choix positif qu'opéreront les députés qui adopteront les propositions de loi visant à créer un pacte civil de solidarité. Aujourd'hui, notre satisfaction est grande et nous pouvons tous être fiers de notre travail (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe RCV et du groupe communiste ; exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

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EXPLICATIONS DE VOTE

M. Georges Sarre - Le hasard et l'attitude du Sénat auront voulu que le Parlement adopte définitivement la proposition de loi portant création du Pacs en octobre 1999, soit huit ans exactement après que, dans ces murs, une première équipe d'experts -juristes, fiscalistes, spécialistes du droit du travail- a élaboré le premier projet de contrat d'union civile, dont les linéaments ont servi à tous nos travaux actuels. Je souhaite donc leur rendre hommage.

Si le Pacs a cheminé aussi vite dans l'opinion, c'est parce qu'il était adapté à la société française. Contrairement aux caricatures qui en ont été faites, il s'est imposé pour traiter des difficultés des couples qui ne veulent ou ne peuvent se marier.

Le Pacs a emprunté le souci d'universalité qui procède de la tradition juridique française, en considérant que les couples homosexuels rencontraient les mêmes problèmes que les autres en matière de logement, d'endettement ou de succession. Il a pensé en même temps aux concubins et aux enfants des couples non mariés. Il ne vise pas à créer un sous-mariage mais à apporter des réponses concrètes à des difficultés concrètes. Il apporte une pierre à l'édifice de l'égalité républicaine en posant le principe de mêmes droits pour tous les couples, sans discrimination liée à la vie privée pour l'exercice de leurs droits civils.

Le Pacs a eu finalement raison de ses détracteurs même si rarement un texte aura été aussi caricaturé et si peu de projets ont donné aux conservateurs un tel tournis.

Au moment même où la droite pourfendait ici les atteintes au mariage pouvant résulter du Pacs, la majorité sénatoriale vantait le concubinage.

Loin des dithyrambes anti-Pacs de leur porte-parole, les jeunes de certaines formations de droite dénonçaient cet été leur frilosité et leurs outrances.

Quant à l'interpellation du Président de la République, elle alimente davantage les surenchères internes à la droite qu'elle ne vise les principes fondateurs du texte.

Face à ce désarroi, un cap clair a été maintenu avec ténacité et nous nous réjouissons que la République dispose aujourd'hui d'une loi novatrice, adaptée à la société actuelle. Notre engagement a été tenu (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV, du groupe socialiste et du groupe communiste).

M. Pierre-Christophe Baguet - Mme la Garde des Sceaux aurait pu avoir raison de déclarer que nous vivions aujourd'hui un grand jour mais sommes-nous heureux du travail accompli ?

Nombreux députés socialistes, communistes et Verts - Oui !

M. Pierre-Christophe Baguet - Non, car nous sommes déçus que le grand débat de société de fond qui aurait dû avoir lieu ne soit pas intervenu (Rires sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

Faute d'objectif clair, la majorité s'est enfermée dans des positions radicalisées, le débat dans les media et dans l'opinion a tourné à la confusion générale. Plutôt que de s'attaquer au statut des couples non mariés, il aurait fallu commencer par le droit des personnes et des enfants. L'opposition réclame depuis longtemps en vain une grande réforme du droit de la famille. Il aurait fallu commencer par là. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL).

Une réponse urgente doit certes être apportée aux difficultés des couples non mariés, homosexuels ou non, qui ont soif de reconnaissance et doivent être entendus dans leurs souffrances. Ils sont des citoyens à part entière et nous nous sommes tous émus de la situation des compagnons survivants, privés d'obsèques, expulsés de leur logement, écartés des successions. Mais fallait-il cette loi pour répondre à ces attentes ?

Plusieurs députés socialistes et communistes - Oui !

M. Pierre-Christophe Baguet - M. Albertini a rappelé hier qu'une simple adaptation du droit successoral eût été suffisante et préférable à ce millefeuille électoral qui manque de courage politique. Vous voulez faire de ce texte le symbole d'une société nouvelle mais il ne s'inscrit pas dans le cadre général de la politique familiale. Comment justifier qu'il soit muet sur les enfants ? Peut-on dissocier l'enfant du couple ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR) Qui peut asséner sur ces questions des certitudes péremptoires ? Chacun devra un jour rendre des comptes à ses enfants...

Qu'on le veuille ou non, la famille demeure un espace d'amour, de solidarité et de protection des plus faibles qui mérite d'être préservé (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL).

Pour toutes ces raisons, je ne trouve pas digne de voter un tel texte. Certains se réjouissent de le faire ; ce n'est pas mon cas, et je ne suis pas heureux du travail accompli.

Le groupe UDF-Alliance votera contre ce texte et, avec l'ensemble de l'opposition, saisira le Conseil constitutionnel (Applaudissements sur les mêmes bancs).

Mme Catherine Tasca - L'histoire de la proposition de loi visant à créer le Pacte civil de solidarité a été difficile et démesurément passionnée.

A l'origine, il y eut la revendication d'une minorité : l'attention d'un petit nombre de députés fut appelée par des associations d'homosexuels sur le déni de justice dont ceux-ci étaient l'objet. Ces associations, attachées au fondement universel de notre République, militaient non pour un traitement et des droits spécifiques pour les homosexuels mais pour leur intégration dans notre Etat de droit, non en faveur d'un texte communautariste mais pour un texte de solidarité et de justice.

Des parlementaires de gauche, au premier rang desquels nos rapporteurs, Jean-Pierre Michel et Patrick Bloche, ont su forger une réponse à cette demande légitime. Et ceux qui prétendent, aujourd'hui encore, que mieux aurait valu procéder à l'adaptation de textes existants savent que cela aurait équivalu, de fait, à repousser cette réforme sine die (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe DL et du groupe UDF).

Le Gouvernement, et en particulier le Premier ministre, Mme la Garde des Sceaux, le ministre des relations avec le Parlement, ont soutenu l'initiative parlementaire et ont constamment affirmé leur volonté de voir cette proposition aboutir. Je tiens à les en remercier très chaleureusement.

Lorsque nous avons commencé à travailler au début de 1998, nous savions que ce ne serait pas facile, mais nous étions loin d'imaginer quelles armes nos adversaires utiliseraient.

Pour nous, il s'agissait d'un texte de raison et de responsabilité. Personne ne peut honnêtement prétendre que la famille, en ce qu'elle est désir de vivre à deux, désir d'enfants et de filiation, s'arrête aux bornes du couple marié, tant sont nombreux aujourd'hui les enfants nés et grandis hors du mariage et fort heureusement titulaires des mêmes droits que les autres.

Un député DL - Là n'est pas la question !

Mme Catherine Tasca - Personne non plus ne peut aujourd'hui sérieusement prétendre que le mariage est la seule réponse au désir de couple.

Il ne s'agit donc pas, pour notre société républicaine et laïque, de juger mais de voir la réalité et d'aider tous et toutes à vivre à deux librement et dignement, dans des conditions juridiquement établies. Là est l'essentiel, et c'est ce que le Pacs permettra à tous ceux qui ne veulent ou ne peuvent pas se marier et qui ne se contentent pas du concubinage.

Nous nous attendions, bien sûr, à un vrai débat. Sur un tel sujet, les confrontations philosophiques et les interrogations sociologiques et juridiques sont légitimes et utiles. Elles font avancer, du moins, elles peuvent faire avancer, la pensée et la recherche de solutions aux problèmes contemporains. Mais force est de constater que dans ce débat l'opposition n'a pas choisi de belles armes. Non seulement elle a usé et abusé de toutes nos procédures, ce qui est son droit, mais elle a, pour l'essentiel, choisi d'agiter peurs et préjugés en utilisant l'ignorance, la menace et la désinformation (Protestations sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL). Ses slogans ont été, pendant des mois, et encore sur les murs ces jours derniers, la fin du mariage, la ruine de la famille, la fraude aux droits sociaux, l'homosexualité assimilée à la pédophilie, l'immigration clandestine... Et son hostilité, malgré quelques remords tardifs exprimés cet été, ne s'est toujours pas démentie.

Nous n'oublierons pas, et les Français pas davantage, en quels termes ignobles et absurdes certains ont stigmatisé ce projet et l'action des militants qui l'ont soutenu depuis des années.

Face à tous ces assauts, la majorité a heureusement raison gardé. Le choix des socialistes, avec le Pacs, est celui de la réalité assumée, de la solidarité, du respect de l'autre et du refus des discriminations, au premier rang desquelles l'homophobie qui rend la vie invivable à toutes celles et à tous ceux qui, découvrant, souvent très jeunes, leur homosexualité, sont regardés et donc trop souvent se sentent hors de notre société, anormaux, malades, maudits, condamnés qu'ils sont soit au rejet soit à la dissimulation. Cette situation, il n'est plus possible de l'accepter et il est odieux de s'en moquer ou de l'ignorer.

Il est aussi absurde de nier la réalité des couples hors mariage et de leur refuser la possibilité d'une réponse légale. Ils n'ont que trop attendu. Nous savons pouvoir compter sur vous, Madame la ministre, pour que les textes d'application sortent au plus vite, dès la publication de cette loi, afin qu'elle entre enfin dans les faits.

Le Pacs n'est évidemment pas la Révolution. Il sera simplement pour chacun de ceux qui le choisiront une réponse moderne et juste à sa quête de liberté et de responsabilité. Pour certains, il sera la dignité retrouvée. Les députés socialistes voteront avec fierté cette réforme en pensant à toutes celles et ceux qui, demain, vivront mieux grâce à elle (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

M. Dominique Dord - Le moins que l'on puisse dire est que l'année écoulée n'a été un long fleuve tranquille, ni au Parlement ni dans le pays, pour ce qui touche au sujet que nous évoquons aujourd'hui. De cela, majorité et Gouvernement portent une large part de responsabilité. L'historique de ce texte est en effet éloquent ; j'en rappellerai quelques étapes, qui expliquent le malaise.

Tout a commencé par un formidable coup de bluff du Gouvernement, qui a souhaité faire passer en catimini un texte qui modifiait radicalement notre société. Puis ce fut le coup de tonnerre du 9 octobre 1998 lorsque, l'exception d'irrecevabilité ayant été brillamment défendue par Jean-François Mattei, la majorité de cette Assemblée n'a pas voulu, contre toute attente, endosser une paternité dont le Gouvernement s'était déjà défaussé.

Est venu ensuite le coup de force de Mme la Garde des Sceaux qui, au mépris de notre Règlement, a déposé sur le bureau de notre Assemblée un texte presque identique au premier quelques dizaines d'heures à peine après que celui-ci eût été rejeté.

Dans ces conditions, comment s'étonner que le débat ait pris la tournure que l'on sait ? Ce ne sont ni 1, ni 2, ni 3 versions différentes du texte qui nous ont été présentées, mais 6, pour aboutir au texte qui sera finalement voté aujourd'hui !

Tout au long de l'année, nous avons tenté de démontrer, sans nous arrêter à des caricatures faciles, que nous pouvions faire évoluer le droit sans passer par le Pacs, qu'il s'agisse du droit au maintien dans les lieux, du droit à la Sécurité sociale, du droit de succession ou des règles de l'imposition. Et, tout au long de l'année, vous nous avez enfermés dans une dialectique diabolique en expliquant que seul le Pacs pourrait régler des problèmes parfois dramatiques.

En dépit d'anathèmes et d'invectives multiples dont nous avons eu, hier encore, une abondante moisson, nous avons maintenu notre position et dit que, tout comme vous, nous étions soucieux de progrès social, et désireux que le droit positif accompagne l'évolution des m_urs mais que nous considérions que l'on pouvait constater des situations de fait sans devoir pour autant les consacrer par le droit. C'est bien pourquoi nous avons répété sans relâche que nous préférions la signature d'une attestation devant notaire à ce bouleversement de l'équilibre du droit de la famille dont vous vous rendez responsable.

Au nom du groupe Démocratie libérale, je le redis : le Pacs conduira à une impasse ceux qui voudront en sortir, comme ne le constateront que trop vite les plus faibles, les plus fragiles et les plus exposés -et, éventuellement, les enfants. Vous

aurez, en outre, brouillé un peu plus encore les repères fondamentaux de notre société.

Aujourd'hui, déjà, s'ouvre un nouveau débat : comment empêcher, en effet, qu'avec un seul outil juridique les mêmes droits ne soient ouverts à tous ? Vous n'avez eu de cesse d'affirmer, Madame la Garde des Sceaux, que les questions de filiation, d'adoption et de procréation médicalement assistée ne se poseraient pas. Vous savez que ce n'est pas vrai, et la Cour européenne des droits de l'homme nous obligera, plus vite que vous ne voulez l'admettre, à nous pencher sur ces questions. Est-ce un hasard si un grand hebdomadaire y consacre sa une ? Comment Claude Goasguen aurait-il pu taire les difficultés à venir au sujet de « l'homoparentabilité » et de la double parentalité ? Aucun doute n'est permis : nous serons immanquablement appelés à nous prononcer, à cause du Pacs !

Le groupe Démocratie libérale votera contre ce texte, sans états d'âme, et ce n'est pas le plaidoyer -que j'ai trouvé assez dramatique- de M. Jean-Pierre Michel- qui nous en empêchera. In cauda venenum ! Ce rapporteur que nous avons connu courtois et tolérant tout au long des débats se fait soudain procureur, et fait planer des menaces qui rappellent fâcheusement un des épisodes les plus sombres de cette saga. Qui ne se souvient qu'un de nos collègues s'est vu menacer d'entendre son homosexualité supposée révélée publiquement ? Est-ce là la société tolérante dans laquelle vous vous reconnaissez ? (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF)

Vous avez souhaité passé en force, au mépris de l'avis des représentants de toutes les confessions religieuses, des médecins, des psychologues, des philosophes, des sociologues. Ce faisant, vous insérez le Pacs comme un coin dans le droit de la famille, et, je le répète, vous brouillez davantage qu'ils ne le sont les repères sociaux fondamentaux de notre civilisation. C'est pourquoi nous voterons contre ce texte (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF).

M. Bernard Birsinger - Nous voici enfin au terme de l'examen du texte sur le Pacs, neuf ans après que quelques militants homosexuels en ont eu l'idée, six ans après le dépôt de propositions de loi en ce sens, notamment par le groupe communiste, douze mois après le coup d'envoi des travaux parlementaires. J'y vois un encouragement à continuer d'aller vers une société qui ouvre des droits nouveaux. J'y vois également la preuve que la gauche plurielle est capable de répondre aux attentes des Français quand elle en a le courage et s'en donne les moyens. Bref, je vois là un puissant appel à l'intervention citoyenne pour faire progresser le droit à l'égalité et l'égalité des droits.

Le Pacs est un nouveau pas vers la fin des discriminations. Il accorde une reconnaissance sociale aux couples qui ne peuvent ou ne veulent se marier, notamment les couples homosexuels. Il met notre droit en adéquation avec l'évolution de la famille. Il offre de nouvelles garanties juridiques et sociales dont les enfants seront aussi les bénéficiaires (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). En effet, la société bouge, les femmes se libèrent, les jeunes veulent vivre autrement tout en restant attachés à la vie à deux et en aimant leurs enfants. Mais cela, la droite ne le voit pas, rivée à une conception passéiste de la famille et de la société (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL ; applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe RCV).

Les députés communistes voteront le Pacs avec le sentiment d'avoir amélioré le texte. Je ne rappellerai que quelques-unes de ces améliorations : couverture sociale pour la personne pacsée qui ne peut y prétendre à un autre titre, suppression des délais pour la reprise de bail, possibilités accrues de mutation dans la fonction publique pour la personne pacsée. Enfin, la mention explicite que le Pacs est ouvert à deux personnes « de sexe différent ou de même sexe », permettra de couper court à toute interprétation rétrograde de la Cour de cassation sur la nature du couple.

Les députés communistes regrettent néanmoins que le Pacs n'aille pas plus loin. Il aurait pu être signé en mairie, où s'accomplissent la plupart des actes d'état-civil et où existe un personnel formé. Les délais autorisant une déclaration d'impôt commune ou ouvrant droit au séjour pour les étrangers auraient pu être supprimés. J'évoquerai à ce propos la situation de ces étrangers vivant de longue date en couple qui sont les oubliés de la circulaire du 24 juin 1997, en dépit des bonnes intentions affichées. J'espère que des améliorations pourront être ultérieurement apportées sur tous ces points. Mme la ministre s'est engagée, nous l'avons noté, à prendre les mesures réglementaires nécessaires pour que la conclusion d'un Pacs soit prise en compte à l'occasion d'une demande de naturalisation.

Enfin, une fois le Pacs adopté par des centaines de milliers de couples, il paraîtra naturel de prendre de nouvelles dispositions.

Le Pacs va maintenant entrer en application. Citoyens, associations et élus doivent rester vigilants et exiger une sortie rapide des décrets. Il conviendra également de doter les tribunaux d'instance des moyens nécessaires pour faire face à leurs nouvelles missions. Nous avons pris note là encore des engagements de Mme la ministre.

Les députés communistes, pour leur part, déposeront prochainement une proposition de loi tendant à renforcer la lutte contre l'homophobie.

Notre nouveau communisme est un mouvement moderne (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) qui vise à faire triompher les libertés individuelles contre toutes les formes de discrimination.

Les députés communistes voteront tout naturellement le Pacs qui s'inscrit dans ce mouvement d'émancipation. Ils participeront tout aussi naturellement aux autres chantiers visant à garantir aux individus de nouveaux droits (Applaudissements sur les bancs du groupe, communiste, du groupe socialiste et du groupe RCV).

M. Patrick Devedjian - Monsieur Michel, je vous ai écouté avec attention. Vous avez raison : le débat sur le Pacs a été caricaturé, je le déplore comme vous. Mais au lieu de céder si facilement à l'auto-satisfaction, ce péché de la gauche, que ne voyez-vous la poutre qui est dans votre _il ? Quand la presse socialiste écrit, à propos du Pacs, que la famille est «l'instrument de reproduction des hiérarchies sociales», comment ne pas voir là une agression contre la famille, même si des voix s'élèvent à gauche pour la défendre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

Vous avez également dit, Monsieur Michel, que le Pacs apportait une réponse claire à une aspiration sociale évidente. Dois-je vous rappeler que l'examen de cette proposition de loi, prévu pour être bouclé, bâclé devrais-je dire, en huit heures, aura duré un an ? Pas moins de sept versions du texte auront été nécessaires. Quant à l'application du texte, elle donnera lieu inévitablement à de nombreux tâtonnements. Ainsi, réponse claire, sûrement pas !

Ce texte est inutile et dangereux. Inutile car il aurait suffi d'écrire dans la loi que le concubinage ouvrait les mêmes droits quel que soit le sexe des concubins pour que cessent d'emblée les discriminations -que, sur tous les bancs, nous condamnons. Vous avez choisi une autre méthode, d'inspiration communautariste, qui en réalité aboutit à de nouvelles discriminations. Ainsi il est écrit dans l'exposé des motifs que le texte a été inspiré par les communautés homosexuelles, Mme Tasca l'a elle-même rappelé. Or, légiférer à l'intention d'une communauté est extrêmement dangereux. Votre texte déroge à l'esprit républicain, dont l'une des premières caractéristiques est l'universalité. Selon que le couple sera homosexuel ou hétérosexuel, le Pacs ne lui ouvrira par exemple pas les mêmes droits au regard des enfants (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

Cette loi n'est pas universelle car elle crée une nouvelle discrimination parmi les homosexuels. Pour bénéficier des droits nouveaux ouverts par le Pacs, les homosexuels devront se déclarer publiquement comme tels et accepter que leur nom figure dans un registre, largement accessible aux tiers, déposé au greffe du tribunal d'instance, au mépris du secret de leur vie privée (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Il y aura d'un côté les homosexuels qui, souhaitant conserver le secret de leur intimité, renonceront aux droits ouverts par le Pacs, d'un autre côté, ceux qui, pour bénéficier de ces droits, seront obligés de se déclarer publiquement. C'est l'institutionnalisation de «l'outing».

Vos intentions sont pures et généreuses, assurément. Mais votre façon de légiférer conduira à des difficultés et des souffrances pires que celles que vous prétendez régler. Tout est fini aujourd'hui, croyez-vous. Eh bien, non ! A supposer franchie l'étape du Conseil constitutionnel, ce qui n'a rien d'évident, loin de là, il faudra demain appliquer ce texte. C'est alors que les vraies difficultés commenceront (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

A la majorité de 315 voix contre 249 sur 568 votants et 564 suffrages exprimés, l'ensemble de la proposition de loi, mise aux voix, est adopté.

(Mmes et MM. les députés du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV se lèvent et applaudissent)

La séance, suspendue à 17 heures, est reprise à 17 heures 15 sous la présidence de M. Forni.

PRÉSIDENCE DE M. Raymond FORNI

vice-président

RÉDUCTION NÉGOCIÉE DU TEMPS DE TRAVAIL (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à la réduction négociée du temps de travail.

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ART. 2 (suite)

M. Maxime Gremetz - L'amendement 219 est de cohérence. Le régime des heures supplémentaires jouant un rôle essentiel pour l'effectivité de la réduction du temps de travail, la voie législative nous semble la plus appropriée pour en fixer le contingent.

La loi doit affirmer clairement notre volonté de favoriser l'emploi et il lui appartient de garantir l'efficacité réelle, en termes de créations d'emplois, de la réduction du temps de travail. Pour cela, il faut réduire le volant d'heures supplémentaires. Sinon, il se passera ce que nous avions déjà dénoncé lors de la discussion de la première loi : les employeurs préféreront payer des heures supplémentaires -et ce d'autant plus volontiers qu'elles sont peu chères- que d'embaucher.

Par notre amendement 219, nous proposerons donc que la loi ramène à 100 heures, au lieu des 130 actuelles, le contingent d'heures supplémentaires.

M. Yves Cochet - Notre amendement 1002 est identique.

Beaucoup de l'efficacité de la loi se joue ici, à cet article 2 relatif aux heures supplémentaires. Or, les inspecteurs du travail, déjà débordés, ne pourront pas suivre les choses dans le détail. Mieux vaut donc, si l'on veut que la réduction du temps de travail incite à embaucher, encadrer un peu plus rigoureusement cette modulation que constituent les heures supplémentaires. Comme nos amis communistes, nous pensons donc qu'il faut fixer dans la loi le contingent d'heures supplémentaires. Je rappelle à ce sujet que dans la loi Delebarre de février 1986, on parlait de 80 heures. En prévoir 100 me paraît donc raisonnable.

M. Gaëtan Gorce, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - Fixer le contingent par convention, comme on nous l'a proposé hier, serait un excès de souplesse, mais le fixer par la loi, inversement, serait trop rigide. Mieux vaut en rester au dispositif proposé : la loi encadre mais le contingent est fixé par décret. Avis défavorable, donc.

M. le Président - Sur l'amendement 219, je suis saisi par le groupe communiste d'une demande de scrutin public.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité - Je me suis déjà exprimée hier sur ce problème.

M. Georges Sarre - Mais pourriez-vous nous éclairer sur le décret ?

Mme la Ministre - Nous comptons maintenir à 130 heures, par voie de décret, le contingent qui figure dans le code du travail. Mais ce contingent annuel s'appliquera successivement à 39 heures, 37 heures puis 35 heures. Il y aura donc bien une réduction de la durée du travail.

Je rappelle que, depuis que le repos compensateur a été créé, toute heure réalisée au-dessus de ce contingent donne lieu à un repos compensateur à 100 % .

Aujourd'hui, 130 heures par an représentent en moyenne 2 heures et demi par semaine. C'est-à-dire que les entreprises en France ne peuvent pas dépasser 41 heures et demie en moyenne sur l'année. Et au 1er janvier 2002, elles ne pourront plus dépasser en moyenne 37 heures et demie dans l'année. Vous voyez que même si l'on ne touche pas au montant du contingent -130 heures-, il y a bien grâce à lui une réduction de la durée du travail.

Pour les entreprises qui réalisent une modulation annuelle, le Gouvernement a l'intention de réduire ce contingent à 90 heures.

Telles sont les intentions du Gouvernement pour ce qui relève de la voie réglementaire

M. François Goulard - Je partage le point de vue du Gouvernement.

Le législateur de 1982 a été raisonnable en permettant de déroger, par voie de conventions, au contingent réglementaire. Inscrire ce contingent dans la loi serait par contre dangereux. En effet, je n'exclus pas que ce gouvernement ait la sagesse, si ce contingent se révélait insuffisant, de l'augmenter par décret. Il me paraît en revanche impossible, compte tenu de la composition de la majorité, qu'une telle augmentation se fasse par une loi. C'est pourquoi je suis totalement opposé à ces amendements.

M. Maxime Gremetz - On l'avait compris.

A la majorité de 42 voix contre 5, sur 47 votants et 47 suffrages exprimés, les amendements 219 et 1002 ne sont pas adoptés.

M. Maxime Gremetz - Mon vote « pour » n'a pas été enregistré, semble-t-il.

M. Georges Sarre - Le mien non plus.

M. le Président - Si tel est le cas, nous corrigeons mais cela ne change pas le résultat final.

M. Jean Pontier - L'amendement 200 a pour objet de renforcer les mesures prises en faveur des très petites entreprises en ajoutant à la fin du dernier alinéa du VII : « sauf pour les entreprises de trois salariés au plus ».

L'amendement 200, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Marie-Thérèse Boisseau - Tous les chefs d'entreprise que j'ai rencontrés m'ont dit à propos des 35 heures : « prenez des dispositions simples et pérennes ». Pour la simplicité, nous sommes mal partis, tâchons du moins de remplir l'autre condition ! Car une entreprise est comme un paquebot qui ne peut pas changer trop souvent ni trop brutalement de cap : elle a besoin de temps.

Je comprends très bien la position de M. Goulard : au départ, il n'était sans doute pas souhaitable de fixer dans la loi les heures supplémentaires. Mais puisque nous avons affaire avec une loi qui règle tout dans le détail, mieux vaut finalement qu'elle fixe aussi cela. Au moins, les chefs d'entreprises sauront durablement à quoi s'en tenir puisqu'a priori la loi est plus pérenne que le décret.

Encore qu'on puisse en douter tant celle-ci bouleverse la donnée créée par la première loi sur la réduction du temps de travail. Avec des conséquences dramatiques pour certaines entreprises, je pense en particulier à celles du secteur agro-alimentaire et plus particulièrement encore aux abattoirs. La réglementation sanitaire, très stricte, imposant des tenues très spécifiques, le temps d'habillage et de déshabillage est de dix minutes à chaque fois. Comme par ailleurs la convention impose trois minutes de pause par heure, cela fait une heure de moins par jour, soit cinq heures de moins par semaine. Les entreprises vont donc devoir passer d'un seul coup de 39 à 30 heures, et ce à salaire égal. C'est impensable.

Madame la ministre, que comptez-vous faire pour toutes ces entreprises qui seraient ainsi contraintes de réduire le temps de travail d'au moins 25 % ?

M. le Président - Votre position me semble en fait inverse de celle de M. Goulard, quoi que vous en ayez dit !

M. François Goulard - Mais non : nos intentions sont évidemment les mêmes. Nous refusons une rigidité accrue qui rendrait la vie impossible aux entreprises. Simplement, inscrire ce contingent dans la loi peut être à double tranchant et je redoute, pour ma part, que cela ne complique un relèvement si celui-ci devenait nécessaire. Là est notre seule divergence.

M. Maxime Gremetz - Notre amendement 220 est de cohérence.

M. Yves Cochet - De même le 1003.

L'amendement 864, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Les amendements 220 et 1003 ne sont pas adoptés.

M. Yves Cochet - Notre amendement 1004 est également de cohérence.

L'amendement 1004, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Maxime Gremetz - L'article L. 212-7 du code du travail autorisant déjà l'inspecteur du travail à interdire le recours aux heures supplémentaires lorsqu'il existe, dans le secteur concerné, des travailleurs sans emploi, il convient de lever toute ambiguïté en rappelant cette disposition déjà ancienne mais si nécessaire dans la période actuelle. D'où notre amendement 206, qui la précise pour l'adapter à l'évolution de notre société.

La question des heures supplémentaires ne peut être négligée dans ce débat, compte tenu des créations d'emplois que nous pouvons attendre de sa juste solution. Aussi, de même que nous voulons réduire le contingent annuel, nous tenons à nous opposer à ces heures supplémentaires lorsqu'elles font obstacle à l'embauche. Reprendre ici la disposition de 1982 confortera en outre la marge d'appréciation laissée aux inspecteurs du travail, puisqu'ils auront à évaluer la situation de chaque profession au regard du chômage-on sait en effet que toutes ne sont pas affectées au même degré par ce mal et nous avons donc tenu à introduire ici un élément de souplesse (Rires sur les bancs du groupe UDF et du groupe du DL).

M. le Rapporteur - Les chiffres que je citais hier le montrent -400 millions d'heures supplémentaires, équivalent à 230 000 emplois à temps plein-, cette question importe en effet pour la réduction du chômage. Cependant, le droit actuel confère à l'inspecteur du travail un pouvoir d'appréciation suffisant au-delà de la cent-trentième heure. Rejet, par conséquent.

Mme la Ministre - Même avis, pour la même raison.

M. Hervé Morin - Un tel amendement ne peut qu'alourdir les contraintes imposées aux entreprises et nous nous rangerons donc à nouveau aux côtés du Gouvernement. J'aimerais d'ailleurs que M. Gremetz nous cite les secteurs qu'il vise...

Cela étant, Madame la ministre, Mme Boisseau vous a posé une question importante, relative à l'application de cette loi dans les secteurs où, en raison des pauses et des temps d'habillage ainsi que de votre définition de la durée effective du travail, il faudra passer de 39 heures, non à 35, mais à 30 ou 31. Pourriez-vous lui répondre ?

M. Maxime Gremetz - Contesterait-on qu'il y ait des secteurs où l'on recourt aux heures supplémentaires en même temps qu'on licencie ? C'est par exemple le cas dans la métallurgie, que je connais bien, mais aussi à Goodyear, dans la zone industrielle d'Amiens, où on est passé de 32 à 39 heures tout en supprimant des emplois. Je pourrais aussi citer Dunlop ou l'entreprise textile de M. Sarkozy -le frère !- qui refuse les 35 heures mais sait imposer des heures supplémentaires pour des salaires de misère ! Ce ne sont pas là, que je sache, de petites entreprises en difficulté ! Mais vous voulez peut-être d'autres noms ?

En tout cas, dans de telles situations, on ne peut invoquer des raisons économiques ou l'état du marché : ces employeurs ne recourent aux heures supplémentaires que parce que cela leur coûte moins cher que d'embaucher !

L'amendement 206, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Muguette Jacquaint - Notre amendement 221 vise à supprimer la période transitoire prévue avant que ne s'applique le seuil du contingent annuel.

Selon Mme Boisseau, il faudrait laisser aux entreprises le temps de se préparer mais elle ne peut ignorer que la question des 35 heures est posée depuis longtemps et que ces entreprises avaient tout loisir d'anticiper, en s'appuyant sur le progrès des sciences et des techniques, qui leur permettent d'améliorer leur productivité. Nous au moins le savions. Si ce n'est pas votre cas, c'est peut-être que vous n'écoutez pas suffisamment les salariés...

Actuellement, le seuil de déclenchement du quota d'heures supplémentaires correspond à la durée légale du travail. Fixer un seuil à 37, puis à 36 heures, permet de maintenir une durée réelle du travail de 39 heures 45 en 2000 et de 38heures 45 en 2001. Instituer une période de transition, ce serait en fait repousser l'entrée en application de la loi...

M. François Goulard - Je serais assez d'accord sur ce point.

Mme Muguette Jacquaint - ...et, par là même, la création d'emplois.

M. Georges Sarre - L'amendement 708 est identique et je considère donc qu'il a été défendu.

M. Yves Cochet - L'amendement 1005 a le même objet. La loi doit s'appliquer pleinement dès le 1er janvier 2000, non pour aller contre la volonté des chefs d'entreprise mais parce qu'elle doit favoriser l'emploi. Notre seul objectif est d'arriver à une loi efficace pour l'emploi.

La sous-majoration des heures supplémentaires à hauteur de 10 % pendant l'année 2000 donne déjà une souplesse suffisante. Il ne me semble pas nécessaire d'introduire plus de souplesse encore.

On peut en effet considérer que les entreprises sont prévenues de la perspective de réduction du temps de travail depuis au moins quinze mois, c'est-à-dire depuis la loi du 13 juin 1998. Ou même qu'elles devaient s'y préparer depuis dix-sept ans. En 1982, l'Union de la gauche avait en effet conclu un accord de passage aux 35 heures pour 1985. Dix-sept ans, n'est-ce pas un délai suffisant pour s'adapter ? (Sourires sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - L'intervention de M. Gremetz sur les heures supplémentaires et le rôle de l'inspection du travail en la matière comme celle de Mme Jacquaint ont posé un vrai problème même si nous ne pouvons les suivre, non plus que MM. Sarre et Cochet. L'objectif de la réduction du temps de travail est d'en faire un élément important de la bataille contre le chômage. Une partie des chefs d'entreprise est déjà engagée dans la négociation, certains s'y préparent, d'autres, enfin, sont réticents. Leur réticence est d'ailleurs moins idéologique que pratique. Ils s'inquiètent de la complexité du dispositif, des difficultés de la négociation, de la brièveté du délai d'adaptation. Ces difficultés, nous les mesurons et elles nous ont conduits à prendre la précaution de prévoir une période d'adaptation. Une application trop brutale ferait en effet courir un triple risque...

M. Hervé Morin - Enfin, vous le reconnaissez !

M. le Président de la commission - D'abord, elle risquerait de mettre certaines entreprises en difficulté. Ensuite, elle peut créer des conditions d'intensification du travail. Enfin, elle peut susciter un recours excessif à l'intérim, dont le surcoût pour les entreprises peut être évalué à 15 %, ce qui n'est pas la solution recherchée. J'observe d'ailleurs que le coût de l'intérim ruine beaucoup de démonstrations sur le coût du travail dans notre pays...

La loi amènera à négocier, à recruter, à former les nouveaux recrutés. Tout cela rend indispensable une période transitoire pour entraîner dans la dynamique l'ensemble des entreprises. Contrairement à la première loi d'incitation, ce ne sont pas seulement les entreprises volontaires qui sont concernées, celles qui ont une vision évolutive de leur organisation. La deuxième loi touche aussi les entreprises qui nourrissent encore des craintes devant ces évolutions et moins, je le répète, des craintes de nature idéologique qu'une perplexité devant les difficultés réelles qui se présentent. Je pense notamment aux chefs des PME qui sont souvent contraints de tout faire eux-mêmes et n'ont pas le temps de s'interroger sur leur organisation. Mais il reste très positif de les amener à cette réflexion, à condition de maîtriser le temps. Un délai de deux ans ne représente pas grand-chose si c'est le temps indispensable pour entraîner toutes les entreprises dans le mouvement.

Mme la Ministre - Je me suis exprimée hier soir à ce sujet et je partage l'avis de M. le président et de M. le rapporteur. Avis défavorable donc pour les mêmes raisons.

M. François Goulard - Les paroles du président Le Garrec coulent comme du miel à nos oreilles... (Exclamations sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe RCV) puisque ses arguments reprennent ceux que nous défendons depuis deux ans. Mais je souhaite lui faire remarquer que ces propos sont la nécessaire souplesse dans l'application des 35 heures, sur l'indispensable temps d'adaptation, sur les inconvénients d'une réduction du temps de travail trop brutale ou sur les difficultés des chefs d'entreprise surchargés, nous ne les avons pas entendus lors de la présentation de la première loi. Vous n'aviez à l'époque pas de mots assez durs pour fustiger ceux qui n'adhéraient pas à la vision d'une réduction du temps de travail nécessairement créatrice d'emploi.

Depuis lors, des changements inattendus sont intervenus. Pendant l'examen de la première loi, vous annonciez, Madame la ministre, que la croissance créerait 200 000 emplois, ce qui serait insuffisant. Mais la croissance a finalement amené plus d'emplois que prévu et vous craignez aujourd'hui que l'application de la réduction du temps de travail ne vienne casser ce mouvement naturel de l'économie. Vous souhaitez donc, dans la perspective des prochaines échéances électorales, que la majorité des PME n'applique les 35 heures qu'après 2002.

Vos partenaires de la majorité plurielle ne sont d'ailleurs pas dupes. Il vous appartient de justifier votre changement de position et de nous expliquer pourquoi les 35 heures n'ont plus aujourd'hui toutes les vertus que vous leur prêtiez hier.

Mme la Ministre - C'est votre position qui a changé depuis la première loi et non la mienne et je peux pour vous en convaincre citer des passages de l'intervention préliminaire que j'avais prononcée alors.

J'ai toujours plaidé pour la réduction du temps de travail, non seulement pour l'emploi mais parce que je considère qu'elle permet un meilleur fonctionnement de l'entreprise. J'ai d'ailleurs écrit un livre à ce sujet.

En présentant la première loi, j'ai dit -le Journal officiel en fait foi- qu'en prônant une approche décentralisée, la loi dégagerait de bonnes solutions, qu'elle permettrait un meilleur accès du public aux activités de services, qu'elle contribuerait dans de nombreux secteurs à une meilleure réactivité aux variations de la demande. Je pourrais citer bien d'autres passages. En suscitant de nouvelles organisations du travail, la réduction du temps de travail amène une meilleure compétitivité et la compétitivité, c'est la richesse de demain. Assez de mauvaise foi ! J'ai toujours dit et je maintiens que la réduction du temps de travail sera créatrice d'emploi. C'est vous, qui venez de vous en rendre compte, qui avez changé d'attitude !

M. Maxime Gremetz - Je demande la parole, Monsieur le Président.

M. le Président - Monsieur le député, la commission et le Gouvernement peuvent s'exprimer à tout moment. Mme Jacquaint a eu loisir de défendre votre amendement. Nous passons au vote.

Les amendements 221, 708 et 1005 mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Maxime Gremetz - Je demande une suspension de séance !

M. le Président - Je vous accorde une minute.

La séance, suspendue à 17 heures 58, est reprise à 17 heures 59.

M. Yves Cochet - L'amendement 1006 vise à réduire à une seule année, l'année 2000, la période d'adaptation pour le déclenchement du contingent des heures supplémentaires. C'est un bon compromis, qui présente en outre le mérite de simplifier le texte.

M. le Rapporteur - La commission a rejeté l'amendement.

Mme la Ministre - Je pense préférable de procéder par étapes. De plus, la période d'adaptation est nécessaire aux entreprises dans lesquelles les heures supplémentaires sont en grand nombre actuellement. Je suis donc défavorable.

L'amendement 1006, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. François Goulard - Je rappelle que les trois groupes de l'opposition avaient déposé un amendement commun à l'article premier, qui reflétait leur conception commune des relations du travail. Une réunion de concertation serait en revanche bienvenue au sein de la majorité plurielle pour éviter les incidents répétés auxquels nous assistons et qui traduisent des divergences de fond, fâcheuses sur un sujet aussi important.

L'amendement 338 est de repli, et l'amendement 339 est de cohérence.

L'amendement 338, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l'amendement 339.

M. François Goulard - L'amendement 340, qui vise à substituer le nombre «1735» au nombre «1690», est de toute première importance. Il apparaît en effet que le Gouvernement se sert de ce texte pour modifier subrepticement une règle traditionnelle du droit du travail qui veut que le seul jour de l'année chômé et non récupérable soit le 1er mai. L'application du droit du travail ne conduit pas au calcul fait par le Gouvernement. Certains juristes estiment que cette correction subreptice est constitutionnellement contestable.

M. le Rapporteur - La commission a exprimé un avis défavorable, car elle se préoccupe de protéger les salariés comme elle s'inquiète des besoins des entreprises.

Mme la Ministre - Je m'étonne que des juristes puissent s'étonner que nous nous efforcions d'éclaircir ce qui doit l'être. A ce jour, il n'était pas stipulé expressément que les jours fériés ne devaient pas être travaillés : nous le précisons. Je rappelle d'autre part qu'une loi peut toujours être modifiée par une autre loi. En l'occurrence, nous sommes dans notre rôle de Gouvernement et de Parlement, en faisant en sorte que les salariés ne soient pas spoliés.

M. Hervé Morin - Il est curieux qu'un Gouvernement qui se dit attaché à la laïcité en vienne à défendre le principe de jours fériés qui le sont par référence à des fêtes religieuses. Si l'on s'engage dans cette voie, pourquoi s'en tenir à la seule religion catholique, négliger la religion musulmane, la religion juive ? (Rires sur divers bancs)

Mme la Ministre - J'imputerai à la jeunesse de M. Morin sa méconnaissance de notre histoire commune, celle qui a forgé une France dans laquelle on s'arrête tous ensemble de travailler certains jours... Il est d'ailleurs paradoxal que ceux qui défendent certaines valeurs ne se soient jamais trouvés à nos côtés pour appuyer le droit au repos dominical !

M. Jacques Barrot - Oh !

Mme la Ministre - Qui a créé l'association « vivement le dimanche », qui militait en faveur du travail le dimanche, Monsieur Barrot ? Je me réjouis donc de constater que M. Morin nous rejoint !

L'amendement 340, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. François Goulard - Je n'ai jamais prétendu qu'une loi serait intangible. Je maintiens néanmoins ma critique, qui est qu'un gouvernement ne peut introduire des changements subreptices du code du travail à l'occasion d'un projet de loi consacré à un tout autre sujet. Or, la doctrine actuelle est parfaitement claire : les jours fériés ne sont pas automatiquement chômés, et ils peuvent faire l'objet d'une récupération. D'où l'amendement 341.

Mme la Ministre - Je réfute l'argument selon lequel nous aurions procédé à un changement «subreptice» et je vous prie de vous reporter, pour vous en convaincre, à l'exposé des motifs, qui établit explicitement le mode de calcul des 1 600 heures, compte tenu, notamment, des onze jours fériés. Mais les fluctuations du calendrier, qui font que certains de ces jours fériés tombent parfois un dimanche, empêchent de parler d'autre chose que d'une moyenne dans le projet lui-même.

L'amendement 341, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. François Goulard - L'amendement 536 est défendu.

Les amendements 536, 137, 439 et 342, repoussés par la commission et par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Maxime Gremetz - L'amendement 207 vise à répercuter dans les mêmes proportions la réduction du temps de travail sur les durées hebdomadaires maximales du travail. L'article 2 serait complété par le paragraphe suivant :

«X - L'article L. 212-7 du code du travail est ainsi modifié :

1° Dans la première phrase du deuxième alinéa, les mots «quarante-six heures» sont remplacés par les mots «quarante-deux heures».

2° Dans la dernière phrase du deuxième alinéa, les mots «quarante-huit heures» sont remplacés par les mots «quarante quatre heures».

3° Dans le troisième alinéa de cet article, les mots «quarante-six heures» sont remplacés par les mots «quarante-deux heures».

4° Dans le quatrième alinéa de cet article, les mots «quarante-huit heures» sont remplacés par les mots «quarante-quatre heures».

Il paraît loisible, n'est-ce pas, Monsieur Goulard, de parler d'autre chose que du contenu de l'amendement que l'on présente, et je vais user de cette faculté...

M. le Président - Avec la bonté du président...

M. Maxime Gremetz - Certes. Monsieur Goulard, tous vos amendements sont réactionnaires.

M. François Goulard - Le mot est faible... (Sourires)

M. Maxime Gremetz - Vous voulez que l'on retourne au Moyen-Age ! Vous allez jusqu'à remettre en question les

jours fériés...

M. François Goulard - Savez-vous combien l'on travaillait par jour au Moyen-Age ?

M. Maxime Gremetz - Nous nous battons actuellement aux côtés de jeunes femmes qui n'en peuvent plus de travailler tous les dimanches. Cela semble vous faire rire mais nous ne sommes pas seuls à leurs côtés. Des prêtres, et même un évêque, se sont mobilisés pour demander le respect du droit au repos dominical... y compris pour des personnes qui ne vont pas à la messe le dimanche. Oui, Monsieur Goulard, il faut respecter ce jour de repos hebdomadaire que les salariés doivent pouvoir consacrer à ce qui leur plaît.

M. le Rapporteur - Le code du travail prévoit une durée maximale de dix heures de travail par jour, de 48 heures par semaine et de 46 heures en moyenne sur 12 semaines. Si les maxima journaliers et mensuels ont été fixés dans le but de protéger la santé des salariés, la fixation d'un maxima sur 12 semaines répond à un objectif quelque peu différent. La commission a préféré modifier par voie d'amendement ce dernier maxima -c'est l'objet de son amendement 461, que d'appliquer une stricte proportionnalité.

Mme la Ministre - Même avis.

M. Eric Doligé - Ne vous trompez pas d'adversaire, Monsieur Gremetz. Ne vous tournez pas systématiquement vers nous pour manifester votre agressivité. C'est le Gouvernement qui s'oppose à vos amendements avec des arguments qui recoupent ceux que nous développons depuis dix jours. Cela étant, Monsieur Gremetz, je m'oppose à votre amendement 207, et ainsi vous n'aurez pas à vous en prendre au Gouvernement.

Mme la Ministre - Puisque l'opposition reconnaît qu'elle est d'accord avec le Gouvernement sur de nombreux points, ce dont je me réjouis, je l'invite à réfléchir à sa position définitive.

L'amendement 207, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 2 modifié, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - Je constate que les députés communistes, MDC et Verts s'abstiennent.

APRÈS L'ART. 2

M. le Rapporteur - L'amendement 461 tend à proposer que la durée hebdomadaire du travail sur 12 semaines consécutives, ne puisse pas dépasser 42 heures contre 46 heures actuellement. Afin de laisser un peu de souplesse au dispositif, il est toutefois prévu qu'un accord de branche puisse fixer comme aujourd'hui cette durée maximale à 46 heures.

Mme la Ministre - La durée maximale du travail, comme la durée légale, sont des clauses d'ordre public social destinées à protéger les salariés qui, sous peine de perdre leur crédibilité, doivent pouvoir être respectées sans que l'on ait à multiplier les dérogations.

Faut-il donc réduire la durée maximale du travail sur 12 semaines à 42 heures comme le propose la commission ?

On compte aujourd'hui 32 branches dans lesquelles la durée maximale moyenne est supérieure à 42 heures. C'est notamment le cas dans l'industrie sucrière, les conserveries et plus généralement, les industries agro-alimentaires dont l'activité connaît des pics saisonniers. Abaisser la durée maximale à 42 heures reviendrait à fixer une norme trop éloignée de la réalité pour que les dérogations restent exceptionnelles. C'est pourquoi le Gouvernement juge préférable de diminuer seulement cette durée à 44 heures -c'est l'objet de son sous-amendement 1047- mais de prévoir dans le même temps que les éventuelles dérogations ne puissent être effectives qu'après décret -c'est l'objet de son sous-amendement 1048.

M. Yves Cochet - Je retire mon sous-amendement 1007, identique à l'amendement 461.

M. le Rapporteur - Dans ce débat difficile, deux points sont à prendre en considération. D'une part nous avons le souci de tenir compte au maximum des accords de branche déjà conclus et dont bon nombre ont retenu 44 heures comme limite. D'autre part, nous touchons là à une notion d'ordre public social et multiplier les dérogations remettrait en cause le principe que nous voulons asseoir. Je serais donc tenté de me rallier au sous-amendement de Mme la ministre.

M. le Président de la commission - C'est un débat que nous avons eu en commission. La position initiale de notre rapporteur avait le mérite de la simplicité et de la cohérence.

Mais il faut faire attention à ne pas créer des durées maximales auxquelles nous

serions, en pratique, obligés de déroger fréquemment. Mme la ministre a indiqué que si nous en restions à 44 heures, 32 branches seraient amenées à présenter des demandes de dérogation. Autrement dit, la contrainte serait impossible à respecter.

Je crois donc utile de retenir le sous-amendement du Gouvernement, sachant que l'obligation de recourir au décret pour accorder une dérogation constitue une garantie sérieuse.

M. Hervé Morin - Je suis ravi de voir le Gouvernement reprendre ce que nous avons dit en commission, à savoir que la réduction du temps de travail ne devait pas entraîner des conséquences automatiques sur tout le droit du travail. Considérer que la durée maximale du travail doit passer de 46 à 42 heures parce que la durée légale passe de 39 heures à 35 est à la fois simpliste et inapplicable.

La majorité fait preuve de schizophrénie : quand nous disons qu'il faut respecter les accords de branche déjà conclus depuis 1998, on nous répond que c'est à la loi de fixer les principes, mais la voilà qui veut mettre la loi en harmonie avec les accords de branche...

Madame la ministre je comprends que vous souhaitiez faire plaisir à votre majorité en instituant l'extension par décret. Mais l'amendement du rapporteur se référait déjà à des accords étendus, ce qui impliquait l'intervention du ministre des affaires sociales. Renforcer le dispositif en introduisant un décret, c'est-à-dire une procédure interministérielle, complique inutilement les choses.

M. Maxime Gremetz - M. Morin semble oublier que l'Assemblée a discuté jour et nuit sur la loi quinquennale de M. Balladur présentée par M. Giraud. C'était la première fois depuis la Libération qu'on s'attaquait au code du travail, qu'on remettait en cause les garanties données aux salariés : ce « corset » aurait freiné le développement, le SMIC était jugé trop contraignant, les heures supplémentaires trop payées, la flexibilité indispensable...

Avant la loi Balladur, nous n'aurions pas eu ce type de discussion. Mais la précarité et la flexibilité se sont développées de façon considérable...

M. François Goulard - Pas du fait de la droite !

M. Maxime Gremetz - Compte tenu des conditions de travail ainsi créées, vous comprendrez que les représentants de la gauche aient le souci d'encadrer cette flexibilité -sinon nous ne serions pas de gauche !

M. Eric Doligé - Il y en a qui encadrent et d'autres qui libèrent !

M. Maxime Gremetz - Certes, je suis d'avis de prendre en compte les accords de branches signés. Mais je les ai fait vérifier et je peux vous affirmer qu'il n'y en a pas un seul qui tient la route juridiquement : ils sont tous illégaux ! Par exemple, la loi de 1998 indique que l'accord de branche doit préciser le calendrier : pas un seul ne le fait.

Alors, je vous le dis à vous, Messieurs de la droite, qui vous faites les porte-parole du MEDEF en répétant sa grande revendication -« Garantissez-nous que les accords signés resteront valables ! »- ces accords ne sont pas valables, ils seront attaqués les uns après les autres et il faudra les renégocier.

Pour en revenir à l'amendement, après une longue discussion en commission, tous les groupes de la majorité sont tombés d'accord sur le texte du 461. En effet, 46 heures, c'est trop ! Après avoir entendu toutes les explications, nous restons convaincus qu'il faut adopter cet amendement.

M. le Président - Je signale d'ores et déjà que sur cet amendement j'ai été saisi par le groupe communiste d'une demande de scrutin public.

Mme la Ministre - Monsieur Morin, en commission, aucun membre de l'opposition n'a pris la parole. Ce que nous cherchons aujourd'hui, c'est à mettre au point des clauses qui soient effectivement applicables. Mon souci n'est pas de faire plaisir à tel ou tel, mais de ne pas affaiblir des dispositions d'ordre public social par des clauses irréalistes. Elles doivent être adaptées aux réalités des secteurs à activité saisonnière, comme la conserve, les distilleries, le sucre, la charcuterie, les jus de fruit, etc. Ces secteurs sont obligés, pendant une certaine période de l'année, qui n'excède pas douze semaines, de travailler plus de 42 heures, car les produits qu'ils traient sont périssables.

C'est pourquoi je préférerais que la durée maximale soit fixée à 44 heures, avec un nombre limité de dérogations subordonnées à un décret.

Quand le ministre étend une convention collective, il n'a pas de pouvoir d'appréciation, Monsieur Morin : il étend dès lors que les clauses sont légales. Il ne peut que réserver celles qui ne le sont pas.

Un décret n'est pas un gadget, l'intervention de la puissance publique n'est pas un gadget, non plus qu'une dérogation à la durée maximale du travail. C'est parce que je souhaite que l'on n'affaiblisse pas l'ordre public social et que les dérogations gardent un caractère exceptionnel que je tiens au décret. Nous en avons pris un lorsqu'il a fallu que les banques passent à l'euro, en une nuit. Nous en prendrons un autre, concernant les informaticiens, pour le passage à l'an 2000. Mais le code du travail doit fixer une règle qui souffre le moins d'exceptions possible.

C'est pourquoi j'insiste sur l'intérêt des deux sous-amendements du Gouvernement.

M. Gérard Terrier - Je demande une suspension de séance pour réunir mon groupe (Protestations sur les bancs du groupe DL).

M. Maxime Gremetz - Mais le vote a été annoncé !

M. le Président - J'ai annoncé le scrutin mais le vote n'a pas été ouvert. Et la suspension est de droit.

La séance, suspendue à 18 heures 45, est reprise à 19 heures.

M. François Goulard - Monsieur le Président, je vous remercie de laisser se dérouler le débat sur des dispositions qui auront des effets considérables pour les salariés et pour les entreprises. Le droit du travail est largement affaire d'arbitrage : il faut s'attendre, si l'on gagne d'un côté, à perdre un peu d'un autre. Si l'on réduit la durée du travail, on risque de gagner un peu moins. Et, s'agissant de la durée maximale du travail sur douze semaines, nous croyons que mieux vaudrait laisser décider les partenaires sociaux. Vous n'avez pas fait ce choix. Cependant, avant de légiférer, je crois qu'il faut entendre les Français. Ce que nous faisons, contrairement à ce qu'a prétendu Mme Jacquaint : je reçois dans ma permanence des Français de toutes catégories. Or, si j'en ai entendu se plaindre de ne pas trouver d'emploi, de ne pas gagner assez ou -ce qui est nouveau- de subir des conditions de travail plus dures du fait de l'annualisation ou des la modulation de la durée du travail...

M. Maxime Gremetz - Merci, Monsieur Balladur.

M. François Goulard - ...je n'en ai pas trouvé qui se plaignent de cette durée maximale calculée sur douze semaines. Pourtant, mon département est de ceux où les activités saisonnières sont nombreuses et où l'on utilise au maximum les possibilités offertes par le droit du travail. Je ne pense donc pas que nos compatriotes souhaitent abaisser ce plafond et je me suis opposé aux amendements de M. Gremetz et du rapporteur, pour me rallier, comme à un pis-aller, à la solution proposée par le Gouvernement.

Vous pouvez ironiser, Madame la ministre, sur ce ralliement. C'est simplement que nous refusons la politique du pire qui consisterait à voter avec le groupe communiste ou avec les Verts -notre sens de la responsabilité politique et de l'intérêt des salariés comme des entreprises nous l'interdit !

M. le Président - Sur l'amendement 461, je suis saisi par le groupe communiste d'une demande de scrutin public, mais je dois au préalable mettre aux voix, à main levée, les deux sous-amendements du Gouvernement.

Les sous-amendements 1047 et 1048, successivement mis aux voix, sont adoptés.

M. le Président - Je rappelle que l'amendement 1007 a été retiré par M. Cochet.

A la majorité de 45 voix contre 28 sur 75 votants et 73 suffrages exprimés, l'amendement 461 sous-amendé est adopté.

M. Maxime Gremetz - Belle astuce politicienne, avec la complicité du Président !

M. le Président - N'outrepassez pas les limites.

M. Maxime Gremetz - C'est vous qui les avez franchies !

M. le Président - Je n'accepte pas vos mises en cause répétées de la présidence, d'autant qu'elles sont ridicules et sans rapport avec notre Règlement. Je n'ai pas de leçons à recevoir de vous, tenez-vous le pour dit !

M. Yves Cochet - J'avais en effet retiré mon amendement 1007, mais dans l'espoir que l'amendement initial de la commission serait adopté. Ce qui n'a pas été le cas, puisque vous avez soumis d'abord au vote les sous-amendements du Gouvernement. Enfin, la chose est faite...

M. le Président - Cet amendement tombait de toute façon dès lors que le 461 était adopté.

M. Yves Cochet - L'amendement 1008 va dans le même sens mais il a trait, non à la durée maximale calculée sur douze semaines «glissantes», mais à la durée maximale hebdomadaire prise dans l'absolu, pour chaque semaine. Dans ce cas, je propose également une réduction de quatre heures, le plafond passant de 48 à 44 heures.

L'amendement 1008, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Maxime Gremetz - Pour réunir mon groupe, je demande une suspension de séance de vingt minutes.

M. le Président - Vous en aurez cinq !

M. Maxime Gremetz - Dans ce cas, vous allez avoir beaucoup de demandes de suspension !

La séance, suspendue à 19 heures 10, est reprise à 19 heures 15.

Mme Muguette Jacquaint - L'amendement 311 corrigé vise à permettre aux salariés de bénéficier de deux jours de repos consécutifs et à donner une limite en jours à la durée hebdomadaire du travail. Il a pour but de permettre le maintien d'une vie sociale et familiale normale. De moins en moins de salariés bénéficient chaque semaine d'un temps de repos suffisant et régulier. Nous ne souhaitons pas cependant aller à l'encontre des changements qui interviennent dans le mode de vie de nos concitoyens ou dans l'activité des commerces, ouverts parfois en fin de semaine ou en nocturne.

Mais il faut assurer une limite journalière à la durée hebdomadaire du travail et le repos hebdomadaire doit inclure le dimanche en tant que jour fixe de repos permettant aux familles et aux couples de se retrouver. Ce jour de repos fixe doit également favoriser le penchant des Français pour la vie associative.

Notre amendement tend donc à assurer deux jours de repos consécutifs et, une semaine sur deux, la garantie que le dimanche

soit inclus dans l'un des deux.

M. le Rapporteur - Les 35 heures doivent amener une réduction réelle du temps de travail des salariés, qui peut prendre la forme d'une augmentation du nombre de jours de repos. Sur l'année, près de 23 jours de congé peuvent ainsi être gagnés, ce qui constitue une avancée sociale importante.

L'article L. 221-2 du code du travail dispose que les salariés ne peuvent travailler plus de six jours dans la même semaine et qu'ils doivent donc disposer d'un repos hebdomadaire de 24 heures au moins, le dimanche étant le jour de droit commun.

De plus, une directive européenne de 1993 dispose que chaque salarié doit pouvoir bénéficier d'un repos de onze heures à l'issue d'une journée de travail.

Il pourrait être envisagé, afin de créer dans le cadre de la réduction du temps de travail des zones protégées de repos, d'accoler les deux temps de repos, par transposition anticipée de la directive, afin d'arriver à 35 heures de repos hebdomadaire consécutif. Cette évolution pourrait répondre à la question importante que posent les amendements 311 corrigé, 312 corrigé et 313 corrigé.

Mme la Ministre - Ces trois amendements posent deux problèmes distincts. Il y a le souhait qu'il soit annoncé que la réduction du temps de travail débouche sur l'octroi de deux jours consécutifs de repos hebdomadaire, soit 48 heures par semaine. Tel est le sens de l'amendement 311. Et il y a la transposition de la directive européenne sur le repos quotidien de 11 heures, qui pourrait être accolé au repos hebdomadaire de 24 heures.

Sur le premier point, il ne me semble pas opportun d'annoncer que tout salarié bénéficiera en France d'un repos hebdomadaire de 48 heures car cela n'est pas envisageable dans certains secteurs tels que la grande distribution ou le cinéma. Dans certains cas, ce sont les salariés eux-mêmes qui souhaitent une autre organisation, sous la forme par exemple de six matinées de travail par semaine. Mais la question de la transposition de la directive sur le repos quotidien de 11 heures est légitime et je ne vois pas d'obstacle à ce que ce progrès intervienne plus tôt que prévu.

Je propose donc un sous-amendement aux amendements 311 corrigé et 312 corrigé tendant à la modification de l'article L. 221-4 du code du travail relatif au repos hebdomadaire : le repos hebdomadaire doit avoir une durée minimale de vingt-quatre heures consécutives, auxquelles s'ajoutent onze heures de repos quotidien. On obtient ainsi un total de 35 heures consécutives de repos hebdomadaire au lieu de 24 actuellement. Le Gouvernement propose donc de substituer à l'amendement 312 corrigé son amendement 1051.

M. Eric Doligé - Le Gouvernement manie le symbole en proposant une durée de repos hebdomadaire de 35 heures pour 35 heures de travail.

Ces trois amendements montrent les difficultés d'application de ce texte pour les entreprises. Il n'est pas raisonnable de prétendre modifier en même temps l'ensemble de la législation applicable à la durée du travail. La proposition d'un repos hebdomadaire de 48 heures incluant le dimanche n'est pas réaliste.

En contraignant les entreprises à réduire le temps de travail à 35 heures, vous les obligez à se réorganiser d'une manière qui n'est pas obligatoirement celle que souhaitent les salariés. Ceux-ci doivent donc conserver la liberté de négocier des horaires plus souples. C'est pourquoi nous sommes contre les amendements.

M. Maxime Gremetz - L'amendement 313 corrigé vise, dans le droit fil des deux amendements précédents, à instituer un repos hebdomadaire de deux jours consécutifs dont le dimanche. On sait que le repos dominical favorise la vie familiale et la cohésion sociale. Or, le travail du dimanche tend à se banaliser sans justification réelle. D'où cet amendement, sur lequel nous demandons un scrutin public.

D'autre part, nous sommes prêts à retirer l'amendement 312 corrigé au profit de l'amendement 1051 du Gouvernement.

L'amendement 311 corrigé, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 1051 du Gouvernement, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - Sur l'amendement 313 corrigé, je suis donc saisi par le groupe communiste d'une demande de scrutin public.

A la majorité de 60 voix contre 11, sur 71 votants et 71 suffrages exprimés, l'amendement 313 corrigé n'est pas adopté.

La suite du débat est renvoyée à la prochaine séance.

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FAIT PERSONNEL

M. Jean-Bernard Raimond - Au cours de la séance de cet après-midi, m'ont été prêtés des propos que je n'ai pas tenus. Je tiens à ce qu'il m'en soit donné acte.

M. le Président - Il vous en est donné acte, et cela sera porté au Journal officiel.

Prochaine séance ce soir à 21 heures 15.

La séance est levée à 19 heures 40.

                      Le Directeur du service
                      des comptes rendus analytiques,

                      Jacques BOUFFIER


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