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Session ordinaire de 1999-2000 - 12ème jour de séance, 30ème séance

3ÈME SÉANCE DU VENDREDI 22 OCTOBRE 1999

PRÉSIDENCE de M. Raymond FORNI

vice-président

Sommaire

LOI DE FINANCES POUR 2000 -première partie-
(suite) 2

APRÈS L'ART. 10 2

ART. 11 2

APRÈS L'ART. 11 3

ART. 12 4

APRÈS L'ART. 12 6

ART. 13 8

APRÈS L'ART. 13 9

ART. 14 9

APRÈS L'ART. 14 10

ART. 15 16

APRÈS L'ART. 15 16

ART. 17 19

APRÈS L'ART. 17 20

ART. 18 21

APRÈS L'ART. 19 21

ART. 20 22

ART. 22 22

APRÈS L'ART. 22 23

ART. 24 24

APRÈS L'ART. 24 24

ART. 26 38

APRÈS L'ART. 26 39

APRÈS L'ART. 27 39

ART. 28 39

APRÈS L'ART. 28 40

ART. 29 40

APRÈS L'ART. 29 42

ART. 31 44

APRÈS L'ART. 31 45

ART. 33 47

APRÈS L'ART. 33 47

ART. 34 49

APRÈS L'ART. 34 50

ART. 36 et ÉTAT A 51

SECONDE DÉLIBÉRATION 54

La séance est ouverte à vingt et une heures trente.

LOI DE FINANCES POUR 2000 -première partie- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2000.

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APRÈS L'ART. 10

M. Philippe Auberger - Les cessions de parts de sociétés civiles d'exploitation agricole sont actuellement taxées au taux de 4,80 %. En revanche, les cessions de parts de GAEC et d'EARL sont taxées au droit fixe de 500 F.

L'amendement 298 tend à harmoniser les droits d'enregistrement pour les cessions de parts de sociétés agricoles, qui devraient être soumises au droit fixe, quel que soit le type d'apport qu'elles représentent.

M. Didier Migaud, rapporteur général de la commission des finances - Avis défavorable. La commission a rejeté ce matin un amendement de même nature.

M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget - Défavorable.

L'amendement 298, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 284, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l'amendement 374.

M. Gilbert Gantier - Les professions médicales et les agents généraux d'assurance figurent au nombre des rares professions qui restent assujetties à la taxe sur les salaires. Cette charge constitue un frein à l'emploi. L'amendement 147 vise à doubler la franchise et la décote en les portant respectivement à 9 000 et 18 000 F. L'amendement 350 est identique.

L'amendement 147, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l'amendement 350.

M. le Rapporteur général - La commission est défavorable à l'amendement 233 de M. Méhaignerie.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis défavorable également.

L'amendement 233, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Daniel Feurtet - L'amendement 435 vise à favoriser les investissements des entreprises en instituant au sein de l'encours de la collecte CODEVI une ligne prioritaire égale à 25 % de celui-ci.

M. le Rapporteur général - Avis défavorable.

M. le Secrétaire d'Etat - Je propose à M. Feurtet le retrait de son amendement, car la ressource CODEVI est déjà surabondante par rapport à ses emplois.

M. Daniel Feurtet - Je retire notre amendement.

ART. 11

M. Jean-Jacques Jegou - L'imposition forfaitaire annuelle conduit à faire payer une taxe aux entreprises en difficulté, puisqu'elle est exigible même en l'absence de bénéfices. La suppression de cette taxe permettrait à certaines entreprises de surmonter leurs difficultés, sans être grevées par cet impôt. Notre amendement 289 participe donc d'une logique de redressement des entreprises en difficulté.

Notre amendement 290 tend à supprimer l'imposition forfaitaire annuelle pour les sociétés dont le chiffre d'affaires est inférieur à 50 millions, soit le niveau retenu par Bruxelles.

M. Philippe Auberger - Mon amendement 114 est plus modeste puisqu'il tend à supprimer l'imposition forfaitaire annuelle des sociétés dont le chiffre d'affaires est inférieur à 1 million. Le Gouvernement fait un geste sur l'imposition forfaitaire en direction des petites sociétés, mais lui propose le maintien de la première branche d'imposition, dont nous demandons la suppression.

M. Gilbert Gantier - Notre amendement 213 est défendu.

M. le Rapporteur général - La commission est défavorable aux amendements 289, 290 et 213 qui entraîneraient une charge supplémentaire de plusieurs milliards.

Sur l'amendement 114, avis également défavorable, car la commission considère que la politique des petits pas permet de grandes avancées.

M. le Secrétaire d'Etat - Nous avons là quatre amendements de félicitations au Gouvernement... (Sourires) La suppression de l'imposition forfaitaire annuelle pour les sociétés dont le chiffre d'affaires est inférieur à 500 000 F est une mesure raisonnable et suffisante. Le Gouvernement est donc défavorable à ces amendements.

L'amendement 289, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que les amendements 290, 114 et 213.

L'article 11 mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 11

M. Daniel Feurtet - Notre amendement 440 tend à participer à la lutte contre la fraude -ou au moins contre l'évasion fiscale caractérisée- dans le droit fil du rapport de M. Jean-Pierre Brard. Une modification de la loi fiscale est en effet indispensable pour restreindre l'usage abusif des sociétés de personnes, fiscalement semi-transparentes, qui permet de contourner les règles relatives à la remontée des déficits des filiales. Ce cantonnement conduit à faire supporter par la collectivité les charges résultant d'investissements passifs, sans lien avec l'objet social de l'entreprise.

M. le Rapporteur général - Cet amendement ouvre, sur un sujet important, des pistes de solutions intéressantes mais la commission a considéré qu'il lui était impossible de l'adopter dans sa rédaction actuelle. Elle propose donc à ses auteurs de le retirer, afin de lui donner le temps de mûrir.

M. le Secrétaire d'Etat - Cet amendement s'inscrit dans la lignée du travail important accompli par M. Brard afin de lutter contre la fraude fiscale. J'approuve son intention mais non sa rédaction. D'une part parce que l'Assemblée a déjà adopté, à l'article 77 du DDOEF pour 1998, d'importantes mesures pour réprimer de tels abus. D'autre part parce que les sociétés de personnes n'ont pas toutes pour but de frauder le fisc et qu'il conviendrait donc de faire un tri. Enfin parce qu'en cas de déduction de pertes provenant d'investissements dans des sociétés de personnes déficitaires, il est déjà possible de réprimer cette fraude sur le fondement de l'acte anormal de gestion.

Je souhaite donc que cet amendement soit remis sur le métier et, dans cette attente, qu'il soit retiré.

M. Daniel Feurtet - Nous attendrons donc, non sans impatience. Je retire l'amendement 440.

M. Christian Cuvilliez - L'amendement 447 vient en quelque sorte en complément de l'amendement Hollande que nous avons adopté ce matin.

Nous proposons en effet que les charges de licenciement pour motif économique ne soient pas déductibles pour la détermination des résultats imposables à l'impôt sur les sociétés. Ces charges correspondent à la totalité des dépenses occasionnées par le licenciement ou en prévision du licenciement, notamment les indemnités de licenciement, les indemnités de préavis et compensatrices de congés payés, les cotisations d'assurance, les actions ou options de souscription ou d'achat d'actions attribuées aux salariés à l'occasion de leur départ de l'entreprise, suivez mon regard... Ainsi introduirait-on un peu de moralité lorsque des sociétés réalisant plus de 50 millions de chiffre d'affaires procèdent à des licenciements économiques.

M. le Rapporteur général - La commission partage pleinement cette volonté d'empêcher de véritables scandales. Elle a toutefois rejeté cet amendement qui ne lui a pas semblé la réponse la plus adaptée.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement partage également le souci de mettre un frein à des comportements peu soucieux de conséquences sociales. Je vous rappelle toutefois qu'il a été décidé en 1997, sur proposition du groupe communiste, de ne plus admettre de provision pour licenciement en déduction des bénéfices. En outre, un amendement à la deuxième loi sur les 35 heures conditionne tout plan social au passage effectif aux 35 heures ou à l'ouverture de négociations en ce sens. Enfin, dans son discours de Strasbourg, le Premier ministre a dit qu'il veillerait à ce que les fonds publics ne puissent être alloués à des entreprises qui envisagent de supprimer des emplois alors qu'elles engrangent des bénéfices substantiels. Il a également affirmé qu'un lien serait instauré entre les cotisations à la charge des entreprises et leur comportement en matière de licenciements économiques.

Je crains par ailleurs que la mesure proposée ne décourage certains chefs d'entreprise d'embaucher.

Pour toutes ces raisons, je souhaite le retrait de cet amendement d'appel qui semble satisfait par les décisions antérieures du Gouvernement.

M. Christian Cuvilliez - Nous maintenons l'appel, et l'amendement...

L'amendement 477, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Gilbert Gantier - Notre amendement 150 fixe à 25 % le taux de base de l'impôt pour toutes les entreprises dont les bénéfices n'excèdent pas 1 million.

L'amendement 150, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Gilbert Gantier - L'amendement 176 supprime l'IFA, nous en avons déjà parlé.

L'amendement 176 repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 12

M. Jean-Jacques Jegou - Cet article dément à l'évidence l'affirmation du Gouvernement selon laquelle les entreprises ne seraient pas plus taxées qu'en 1999. La mesure proposée ici est

anti-économique, inéquitable, complexe et coûteuse tant pour les entreprises que pour l'administration.

Une double imposition des bénéfices non compensée par un avoir fiscal à 50% ne peut avoir sur le plan économique que des conséquences négatives pour les entreprises.

Le mécanisme de l'avoir fiscal a été créé par la loi du 12 juillet 1965 pour éliminer la double imposition des bénéfices des sociétés soumise à l'IS : pour la société lors de la réalisation des bénéfices et pour les actionnaires lors de leur distribution.

Or si cette double imposition est effectivement éliminée avec un taux d'IS à 33,1/3 % et un avoir fiscal à 50 %, tel n'est déjà plus le cas avec l'application des contributions additionnelles de 10 % et 15 %. La nouvelle diminution annoncée de l'avoir fiscal aggrave encore la situation même en tenant compte de la suppression de la contribution de 15 % en 2000.

Certes la baisse du taux de l'avoir fiscal serait neutre pour les sociétés bénéficiant du régime mère ou intégrées fiscalement, mais non pour toutes les autres et l'investissement s'en trouverait à coup sûr ralenti.

Si l'objectif est de limiter les placements financiers des entreprises, la mesure aura un impact aussi bien sur ces derniers que sur les participations concourant au renforcement des fonds propres des entreprises, au moment où un grand nombre de sociétés envisagent d'entrer au second marché, où le rythme des privatisations semble devoir s'accélérer, où les rapprochements des grands groupes nécessitent de nouveaux apports.

Dans la mesure où la plupart des personnes morales étrangères actionnaires de sociétés françaises, au premier rang desquelles les fonds de pension anglo-saxons, utilisent leur droit à se faire rembourser l'avoir fiscal, la baisse du taux de celui-ci se traduira par une perte de trésorerie égale à 5 % des dividendes versés. Voilà qui ne devrait pas rendre plus attractive la Bourse de Paris.

Enfin, les entreprises craignent que cette mesure ne soit qu'une étape dans un processus de suppression de l'avoir fiscal. En effet une première diminution du taux de l'avoir fiscal à 45 % avait déjà eu lieu l'an dernier, et une deuxième est prévue cette année.

Cette mesure instaurerait en outre un traitement fiscal inégal des actionnaires puisque les personnes physiques continueraient à bénéficier de l'avoir fiscal à 50 % au contraire des personnes morales et que les sociétés mères seraient favorisées.

Par ailleurs, la gestion des entreprises va s'en trouver bien compliquée. Le mécanisme de l'avoir fiscal en vigueur et celui du précompte qui en dépend, conduisent déjà à une gestion des distributions complexe et coûteuse pour les entreprises et rendent difficile le contrôle fiscal. La modification proposée ne fera qu'accroître cette complexité, dans la mesure où elle obligera la société distributrice à identifier et à suivre la qualité des actionnaires en fonction de critères encore plus détaillés. Les entreprises et établissements payeurs devront en outre procéder à une double liquidation du précompte.

Les entreprises françaises et les investisseurs, français ou étrangers, ont besoin d'un environnement fiscal stable. Force est de constater que tel n'est pas le cas en France, cette nouvelle mesure en est la preuve, d'autant qu'elle montre que la fiscalité française est un frein au dynamisme de l'économie, donc à la croissance et à l'emploi. Je croyais que telles étaient les priorités du Gouvernement.

Pour toutes ces raisons nous proposons, par l'amendement 291, de supprimer l'article 12.

M. Gilbert Gantier - Je n'ai rien à ajouter à cette démonstration, mais je veux exprimer mon admiration aux services de Bercy qui ont concocté cet article en apparence anodin. Une ligne et demie, qui rapportera 4,2 milliards aux finances publiques... Comme l'a dit M. Jegou, on fragilise nos entreprises, notamment celles qui ont la structure mère-filiale, et qui sont soumises à une forte concurrence internationale. On leur prend ainsi 4,2 milliards, pendant que le Gouvernement se répand en discours sur la baisse des charges des entreprises... Pour toutes ces raisons je propose, par l'amendement 179, la suppression de l'article.

M. le Président - Il faut comprendre, n'est-ce pas, que vous avez rendu hommage à l'administration de Bercy d'hier et d'aujourd'hui...

M. le Rapporteur général - La croissance et l'emploi, Monsieur Jegou, sont bien les priorités du Gouvernement, et je suis heureux que les résultats soient aujourd'hui plus positifs que précédemment. Sur le fond, l'inspiration de cet article vient assurément de la majorité, et même d'une composante de celle-ci, et cette inspiration consiste à favoriser, dans l'investissement des entreprises, la dimension productive par rapport à la dimension spéculative. Il est vrai que la quote-part est alourdie, passant de 2,5 à 5 %, et il est vrai que cela rapporte de l'argent. Mais les entreprises bénéficient par ailleurs, au titre de l'impôt sur les sociétés, d'allégements substantiels. Et que diriez-vous si nous étions en Allemagne, où le taux est de 15 % ? Nous restons modérés par rapport à la moyenne européenne, et le spectre germanique est écarté... Il faut donc rejeter les amendements de suppression. M. Jegou a lié l'avoir fiscal et la quote-part. Mais, concernant cette dernière, il ne s'agit aucunement de double imposition. Et même avec ce doublement, le régime mère-filiale reste plus avantageux que le droit commun. Et ce doublement est parfaitement conforme au droit communautaire ; des pays comme la Belgique, le Portugal et l'Allemagne ont des taux très supérieurs. Avis défavorable aux amendements de suppression 179 et 291, et aux amendements de même esprit 180 et 181.

M. le Secrétaire d'Etat - Je remercie M. Gantier d'avoir loué au moins la forme de cet article, lui qui a critiqué l'article sur le droit de bail qui faisait trois pages...

M. Gilles Carrez - Vous dites, Monsieur le ministre, que les entreprises bénéficieront d'allégements substantiels au titre de l'IS. J'aimerais qu'ensemble nous fassions quelques comptes. Partons des 4,2 milliards prélevés par cet article. Ajoutons-y le 1,5 milliard de l'amendement de nos collègues communistes...

M. Christian Cuvilliez - Il n'est pas encore voté !

M. Gilles Carrez - Nous en sommes à 5,7 milliards. Mais il faut regarder aussi ce qui se passe du côté de Mme Aubry et de la loi de financement : on y trouve une contribution sur les bénéfices pour un produit attendu de 4,3 milliards ; une extension de 1,2 milliard de la taxe sur les activités polluantes ; et 8 milliards attendus sur les heures supplémentaires. Faisons l'addition : nous sommes à 20 milliards. Soucieux d'objectivité, je me souviens qu'on trouve, plus loin dans votre budget, 2 milliards de moins sur la taxe professionnelle. Cela fait quand même un alourdissement de 18 milliards des prélèvements sur les entreprises !

M. le Rapporteur général - C'est faux !

M. Gilles Carrez - Ne cédez pas à la tentation de l'autisme en faisant semblant d'ignorer le budget de Mme Aubry (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF).

M. le Secrétaire d'Etat - L'arithmétique de M. Carrez me paraît se limiter à l'addition. Reprenons le calcul. Du côté de l'Etat -mais n'ayez crainte, je regarderai ensuite la Sécurité sociale- le présent article crée un prélèvement supplémentaire de 4,2 milliards. Si l'on y ajoute l'amendement du groupe communiste -que je vous remercie de considérer comme adopté- cela fait 1,5 milliard sur l'avoir fiscal. Mais la taxe professionnelle est réduite de 2 milliards et l'impôt sur les bénéfices des sociétés de 12,6 milliards.

M. Gilles Carrez - C'est vous qui avez créé ce prélèvement en 1997 : vous n'avez pas le droit de le compter !

M. le Secrétaire d'Etat - Du côté de la Sécurité sociale, il y aura un fonds, qui présente le mérite suivant : c'est que tout ce qui y entrera en sortira. Il est alimenté par la TGAP et la contribution sur les bénéfices.

Mais en face de ces plus, il y aura des moins de même montant. Ainsi, du côté de l'État, les entreprises connaîtront en 2000 des baisses de charges nettes et substantielles ; et, compte tenu de la Sécurité sociale, l'ensemble des prélèvements sur les entreprises sera stable l'an prochain.

Les amendements 179 et 291, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Gilbert Gantier - Les amendements 180 et 181 sont défendus.

M. le Rapporteur général - Défavorable.

M. le Secrétaire d'Etat - Défavorable.

L'amendement 180 n'est pas adopté, non plus que l'amendement 181.

L'article 12, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 12

M. le Rapporteur général - L'amendement 42 de la commission est identique au 442 du groupe communiste, qui en est l'origine.

M. Daniel Feurtet - L'avoir fiscal a été créé vers 1965. A-t-il empêché le développement du chômage en France ? Il n'a guère montré son efficacité à cet égard (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF).

M. Jean-Louis Debré - Ce n'était pas son objet.

M. Daniel Feurtet - J'admets que je procède à un raccourci, mais j'entends parfois dans l'opposition des arguments qui me sidèrent, et M. Michel Debré devrait être plus attentif à mon propos (Rires et exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. Jean-Louis Debré - Vous avez toujours eu un peu de retard...

M. Daniel Feurtet - Pour ces raisons, nous défendons cet amendement destiné à faire que les bénéfices des entreprises contribuent davantage à leur finalité : créer des emplois.

M. le Rapporteur général - La commission a adopté cet amendement raisonnable : il ne remet pas en cause l'avoir fiscal, il vise des participations financières qui ne sont pas au c_ur de notre économie.

M. le Secrétaire d'Etat - Cet amendement illustre la constance avec laquelle le groupe communiste souhaite favoriser les comportements productifs par rapport aux comportements spéculatifs. La réduction proposée de l'avoir fiscal de 45 à 40 % a un double mérite. Elle encourage les entreprises à investir dans l'équipement et la création d'emploi ; et elle rapporte de l'argent, qui peut servir à des mesures de justice sociale ou à d'autres aides à la création d'emploi. Le Gouvernement soutient donc pleinement cette initiative du groupe communiste.

M. Jean-Jacques Jegou - Je veux intervenir avec un peu de solennité. Nous avons eu cet après-midi un débat d'une haute tenue. Mais ce soir je vois passer, sous l'_il goguenard de la majorité plurielle et du ministre, une attaque en règle contre les entreprises (Murmures sur les bancs du groupe socialiste) qui n'a d'autres raisons qu'idéologiques. On prend 1,5 milliard aux entreprises pour régler les problèmes de la majorité plurielle (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste). Cette majorité est tirée vers le bas par un parti communiste qui a une ou deux générations de retard, comme l'a révélé le lapsus de M. Feurtet. C'est une triste suite pour un débat qui avait pris de la hauteur.

M. Philippe Auberger - Les auteurs de l'amendement ont-ils bien compris ce qu'ils faisaient ? Ils croient sans doute que la structure mère-fille peut toujours fonctionner. Or il arrive qu'une entreprise soit amenée à prendre une participation dans une autre, sans que cela donne lieu à consolidation : c'est le cas pour des participations croisées ou certaines coopérations techniques : il serait alors tout à fait anormal de réduire l'avoir fiscal.

Ce n'est pas davantage justifié dans le cas des sociétés d'assurance vie car cela va à l'encontre de l'intérêt des assurés, auxquels doit être reversée une partie du produit des actions qu'elles détiennent.

J'appelle donc à voter contre ces amendements.

M. Jean-Pierre Brard - Monsieur Jegou, je ne suis pas étonné que vous défendiez comme d'habitude les privilèges (Exclamations sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR), mais il n'est pas acceptable de remplacer l'argumentation par l'invective. Je suis un député apparenté et de ce côté, nous travaillons très bien ensemble ; chez vous, on n'arrive pas à mettre deux députés d'accord ! (Exclamations sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR) Vous devriez mettre autant de zèle à défendre les gens modestes que vous en mettez à défendre l'avoir fiscal...

M. Jean-Jacques Jegou - Vous n'avez pas le monopole des gens modestes.

Les amendements 42 et 442, mis aux voix, sont adoptés.

M. Gilbert Gantier - L'amendement 178 est défendu.

L'amendement 178, repoussé par la commission et par le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. Christian Cuvilliez - M. Jegou a voulu nous présenter comme des nostalgiques du passé. Non, nous sommes nostalgiques de l'avenir meilleur que nous voulons construire, non tant pour les détenteurs d'avoir fiscal que pour les gens que nous représentons.

Avec l'amendement 443, nous souhaitons ouvrir le débat sur la légitimité d'un dispositif fiscal qui autorise les sociétés mères à déduire de leurs propres bénéfices les déficits qu'elles organisent sur les comptes de leurs filiales, et qui permet ainsi à 5 000 très grosses sociétés de voir leur impôt considérablement réduit. Sur le manque à gagner pour l'Etat qui résulte de ces opérations de passe-passe, le chiffre de 19 milliards a été avancé.

Cette disposition favorise des stratégies financières qui n'ont pas grand-chose à voir avec l'intérêt général. Le fait que ce dossier ne puisse être traité dans le seul cadre hexagonal ne change rien à la nécessité d'agir. Nous souhaiterions au moins connaître le coût pour la collectivité de ce régime d'intégration fiscale.

M. le Rapporteur général - Défavorable.

M. le Secrétaire d'Etat - Le coût de cette disposition ne peut pas être chiffré de manière suffisamment précise. Par ailleurs, je distinguerai les grands groupes auxquels on peut faire confiance pour trouver les moyens le plus souvent licites de contourner votre dispositif, et les petits. Les deux tiers des groupes ont un chiffre d'affaires inférieur à 60 millions et 55 % ne sont formés que de deux sociétés. Dans ces conditions, cet amendement est moins bien ciblé que le précédent. Je vous suggère donc de le retirer, faute de quoi je demanderai son rejet.

M. Christian Cuvilliez - Je le maintiens car il ne s'agit que d'ouvrir une piste.

M. Philippe Auberger - J'apporte mon soutien au Gouvernement (Murmures sur divers bancs) face à un amendement rétrograde. Revenir sur le régime du bénéfice consolidé, c'est absurde ! On laisse entendre que c'est un avantage offert aux entreprises, en feignant d'oublier qu'un contrôle des valeurs a été institué par la précédente majorité et codifié dans le cadre de l'OCDE. Par ailleurs la procédure de l'abus de droit existe, même si elle est trop rarement mise en _uvre.

Quant au chiffre de 19 milliards qui a été avancé, il est assez faible par rapport aux 60 milliards de supplément d'IS entre 1997 et 2000...

L'amendement 443, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 13

M. Maurice Adevah-Poeuf - Quand des ajustements sont nécessaires, nous les réalisons ; mais je ne saurais personnellement accepter qu'on revienne sur les consolidations et l'intégration fiscale, élément déterminant de la stratégie des groupes.

Sur l'article 13, je voudrais poser deux questions techniques. D'abord, quelle en est l'incidence financière ? D'autre part, sur quel fondement le ministère, le 24 juin 1999, a-t-il accordé un agrément à M. Jérôme Seydoux qui permet à celui-ci de reporter son engagement de conservation des titres Pathé sur les actions Vivendi pour le délai restant à courir ? Ce délai prendra fin immédiatement si l'article 13 est adopté.

M. Jean-Pierre Brard - Bonne question.

M. le Secrétaire d'Etat - L'incidence financière de cet article est nulle.

Pour le reste, une mise au point a été publiée par Dominique Strauss-Kahn et moi-même le 20 octobre. Les dispositions de cet article ne s'appliquent ni à la restructuration du groupe Chargeurs de 1996 ni à l'opération Pathé-Vivendi réalisée en 1999. En effet elles ne s'appliquent pas aux opérations réalisées sans agrément.

Si M. Seydoux était autorisé à céder ses titres avant l'expiration du délai de 5 ans, cette cession entraînerait l'imposition immédiate et anticipée des plus-values en sursis. Il n'y a donc aucun rapport entre cette affaire particulière et l'article.

M. le Rapporteur général - Le Gouvernement vient d'apporter d'utiles précisions. Les auteurs de l'article dont il a été question n'ont sans doute pris qu'imparfaitement connaissance du rapport général, car celui-ci démontre justement, page 356, que les plus-values réalisées à l'occasion de la fusion Pathé-Vivendi seront intégralement imposées, avant de conclure à l'adoption de l'article 13.

L'amendement 43 est de coordination, l'amendement 44 supprime la mention de la consultation du comité des investissements, qui n'a pas à figurer dans la loi, tandis que l'amendement 45 précise, au contraire, le délai de conservation des titres en cas d'agrément, soit trois ans.

M. le Secrétaire d'Etat - Le premier amendement supprime le ministre chargé du budget (Sourires), ou plutôt la mention qui en est faite ; je me sacrifie bien volontiers (Même mouvement). Le deuxième constitue une simplification judicieuse. Je suis très réservé, par contre, sur le troisième, dont la compatibilité avec la directive de 1990 sur les fusions m'apparaît pour le moins douteuse.

M. le Rapporteur général - Je me rends à cet argument.

Les amendements 43 et 44, successivement mis aux voix, sont adoptés.

L'amendement 45 est retiré.

L'article 13, modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 13

M. le Rapporteur général - L'amendement 46 résulte d'une suggestion de la MEC, qui a constaté que le crédit d'impôt créé voici un an dans le but de favoriser la création d'emplois avait presque entièrement manqué son objectif. Il vous est donc proposé de le supprimer.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement s'incline devant le travail d'investigation mené par la MEC.

M. Jean-Jacques Jegou - Nous voterons cet amendement, grâce auquel les finances publiques vont économiser plus d'un milliard, mais l'Assemblée a adopté, tout à l'heure, sur proposition du groupe communiste, une mesure qui aggrave d'un milliard et demi les impôts des entreprises. Mieux aurait valu, pour réduire le déficit, choisir d'accorder moins d'aides à des entreprises qui, comme l'ont déclaré nombre de patrons interrogés par la MEC, ne les revendiquent pas et qui préféreraient que l'on baisse leurs charges !

M. Lucien Degauchy - Très bien !

L'amendement 46, mis aux voix, est adopté.

ART. 14

M. Gilles Carrez - La réforme de la taxe professionnelle instituée par cet article comporte une grave lacune : elle oublie les membres des professions indépendantes, libérales en particulier, imposés au titre des bénéfices industriels et commerciaux, et employant moins de cinq salariés. La taxe est en effet calculée sur une assiette incluant, outre les salaires et les équipements, 10 % des recettes ; ce régime dérogatoire, qui remonte aux origines de la taxe professionnelle, se justifiait en 1975 par la faiblesse des immobilisations de ces praticiens, mais la situation a radicalement changé en l'espace d'un quart de siècle.

Tous les médecins ou presque possèdent désormais un équipement informatique, si bien que la part équipement de leur taxe professionnelle n'est plus négligeable. Tous les membres des professions libérales acquittent aujourd'hui une taxe représentant 2 % à 4 % de leur chiffre d'affaires TTC, soit un taux infiniment supérieur à celui auquel sont assujetties les autres professions. Déjà pénalisés donc, ils ne bénéficieront pas non plus de la réforme en cours, qui consiste à supprimer progressivement la part salariale de la taxe professionnelle.

J'avais déposé l'an dernier un amendement sur le sujet, dont le ministre et le rapporteur général avaient reconnu qu'il soulevait une vraie question. Je propose aujourd'hui, ce qui paraît le plus simple, d'appliquer à compter du 1er janvier 2000 aux professions assujetties aux bénéfices non commerciaux et comptant moins de cinq salariés, les règles de droit commun en matière d'imposition à la taxe professionnelle. Peut-être le Gouvernement pourrait-il déroger à la règle qui lui a jusqu'à présent dans ce débat fait refuser tous les amendements de l'opposition et accepter celui-là, qui serait très apprécié des 500 000 professionnels concernés. Il y va de la justice mais aussi de l'efficacité économique puisque ce secteur est un important gisement d'emplois, et nous savons bien que les emplois se créent aujourd'hui plutôt dans les petites structures.

M. le Rapporteur général - Les amendements 47 et 48 sont rédactionnels. L'amendement 49 tend, pour sa part, à asseoir la compensation de la suppression à terme de la part salariale de la taxe professionnelle sur la DGF hors application de la régularisation négative au titre de 1998, et non la DGF régularisée comme le prévoyait le Gouvernement. Ce dernier avait sans doute oublié le débat de l'an passé sur le sujet... Dans ces conditions, la compensation progresserait de 2,05 % au lieu de 0,821 %.

M. le Secrétaire d'Etat - M. le rapporteur général vient en réalité de présenter l'amendement 50 et non l'amendement 49. Le Gouvernement est favorable aux trois amendements 47, 48 et 49, rédactionnels.

M. le Rapporteur général - Pardonnez-moi de mon erreur. L'amendement 49 est en effet purement rédactionnel.

M. Gilles Carrez - Je disais tout à l'heure que l'opposition n'avait pas de chance avec ses amendements. Ce n'est pas tout à fait exact car c'est elle qui a déposé l'amendement relatif à l'exclusion de la régularisation négative effectuée sur la DGF 1998 pour le calcul de la compensation accordée aux collectivités au titre de la réforme de la taxe professionnelle, amendement que le rapporteur général a repris.

M. Augustin Bonrepaux, président de la commission des finances - Contrevérité ! On ne vous a pas attendus !

M. Gilles Carrez - C'est moi le premier qui, au comité des finances locales, me suis aperçu que le Gouvernement s'apprêtait de manière subreptice à verser beaucoup moins aux collectivités.

M. le Président de la commission - Vous n'avez rien vu du tout !

M. Gilles Carrez - La compensation n'aurait en effet progressé que de 0,8 % et non de 2 %.

Lors du rendez-vous que nous a accordé M. Sautter le 8 juillet dernier, celui-ci nous a confirmé qu'il n'était pas question de ne pas tenir compte de la régularisation négative de 1998, et le Gouvernement nous a fait la même réponse lorsque nous avons de nouveau posé la question au comité des finances locales. Relisez également, si vous n'êtes pas convaincu par ce que je dis, l'excellent rapport du ministère des finances sur la réforme de la taxe professionnelle, qui nous fut finalement remis l'an dernier après que nous l'avons réclamé avec résistance : il n'y est nulle part question de l'indexation de la compensation. Nous avons donc eu raison de nous battre tout l'été pour obtenir cette indexation et je me félicite que la commission des finances nous ait suivis.

L'amendement 47 mis aux voix, est adopté, de même que les amendements 48 et 49.

L'article 14 modifié, mis aux voix, est adopté.

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APRÈS L'ART. 14

M. le Rapporteur général - L'amendement 52, présenté par la commission et MM. Bonrepaux, Idiart et Cuvilliez, tend à réduire le montant maximal de taxe d'habitation supporté par les contribuables les plus modestes de 1 500 à 1 200 francs.

M. le Secrétaire d'Etat - Cet amendement s'inscrit dans le droit fil d'un article de la loi de finances pour 1998, adopté à l'initiative conjointe des groupes socialiste et communiste, et qui avait profité à 1,2 million de contribuables modestes. Pour remonter plus loin encore, c'est dans la loi de finances pour 1990 que le groupe communiste avait proposé un mécanisme de dégrèvement qui fut par la suite supprimé.

M. Jean-Pierre Brard - Par M. Arthuis...

M. le Secrétaire d'Etat - ...puis rétabli.

Pour l'heure, j'accepte l'amendement 52 qui représente une majoration de 25 % de l'effort de l'Etat et je lève le gage.

M. Jean-Pierre Brard - Je vous rappelle, Monsieur le secrétaire d'Etat, que vous aviez pris l'engagement d'abaisser encore le montant, à 1 000 francs. Je vois, à votre visage, que vous ne vous en souvenez plus... (Sourires)

M. Gilles Carrez - Je suis d'accord avec cet amendement (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste). Mais il est aussi un autre moyen d'alléger la taxe d'habitation due par les foyers les plus modestes. C'est d'engager la révision des bases, c'est-à-dire des valeurs locatives, qui aboutirait à une diminution de 12 % de la taxe d'habitation mais aussi de la taxe foncière sur le bâti. Où en est, Monsieur le secrétaire d'Etat, votre réflexion sur le sujet ?

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement ne réfléchit pas seul, mais en concertation avec la commission des finances qui procède actuellement à des simulations sur la base des valeurs locatives de 1990, et non plus de 1970.

Contrairement à ce qu'a dit M. Carrez, il y a des mouvements de hausse et de baisse qui se compensent. Il serait malheureusement trop simple que les mouvements à la baisse ne portent que sur les ménages les plus modestes. C'est beaucoup plus compliqué, et c'est pourquoi le Gouvernement doit poursuivre sa réflexion sur ce sujet.

M. Jean-Pierre Brard - Il est utile que le Gouvernement prenne son temps avant de s'engager dans cette voie. Dans ma ville, les pavillons auraient payé plus de 60 % de plus et, du fait du mécanisme du plafonnement, les locataires des HLM n'auraient ressenti aucune baisse.

M. le Secrétaire d'Etat - Paroles d'orfèvre !

M. Jean-Pierre Brard - Nous portons au crédit du Gouvernement de n'avoir pas mis en _uvre cette mesure qui aurait été destructrice pour ceux qui sont juste au-dessus des plus pauvres.

M. Jean-Jacques Jegou - M. Brard invite le Gouvernement à prendre son temps mais le travail a déjà été fait et nous a coûté plusieurs milliards. Le groupe communiste devrait donc nous aider à faire adopter cet amendement.

L'amendement 52, mis aux voix, est adopté à l'unanimité.

M. Gilles Carrez - J'ai défendu tout à l'heure l'amendement 85 et je reviens seulement sur un exemple des problèmes posés par le maintien du régime dérogatoire. Dans le domaine du conseil aux entreprises, nous assistons à une forte expansion des cabinets anglo-saxons qui bénéficient d'une situation beaucoup plus favorable que leurs homologues français assujettis au régime des bénéfices non commerciaux. L'avantage ainsi donné aux grandes sociétés étrangères de conseil crée une situation préoccupante. Il est aberrant de maintenir un régime dérogatoire pour les entreprises de moins de cinq salariés.

M. le Président - Les amendements 183 et 351 sont défendus.

M. Philippe Auberger - Je rappelle à M. le ministre qu'il avait reconnu que l'assujettissement aux bénéfices non commerciaux des professions indépendantes qui emploient moins de cinq salariés posait problème, puisqu'elles ne bénéficiaient pas de l'allégement de taxe professionnelle lié à la suppression de la part salariale. Aucune solution n'ayant été trouvée, mon amendement 120 vise à diminuer à due concurrence la référence aux recettes.

Comme l'a justement rappelé M. Carrez, l'objectif est de mettre fin aux distorsions de régime entre les professions indépendantes employant plus de cinq salariés -dont les cabinets de conseil- et les autres personnes exerçant en libéral, qui emploient souvent moins de deux salariés, qu'il s'agisse des médecins, des infirmières, des kinésithérapeutes ou des architectes. Cette mesure de justice fiscale permettrait une adaptation du régime des bénéfices non commerciaux en attendant une réforme de la taxe professionnelle dans son ensemble.

M. le Rapporteur général - La commission n'est pas favorable à ces amendements. Ces professions acquittent une taxe professionnelle assise sur des bases spécifiques qui excluent les salaires. Il est donc naturel que la suppression de la part salariale soit restée sans impact sur leur imposition. Toutes les mesures de réduction de l'assiette de cette taxe sont très coûteuses et leur effet sur l'emploi est très réduit. Il n'y a donc pas d'urgence à donner suite à ces amendements.

M. le Secrétaire d'Etat - Je rends à mon tour hommage aux professions libérales qui ont été assez habiles pour obtenir un régime dérogatoire de taxe professionnelle, excluant les salaires. Elles en ont bénéficié pendant plus de vingt ans. Aujourd'hui, celles qui emploient moins de cinq salariés ne bénéficient pas de l'allégement mais c'est là une conséquence logique de la situation dérogatoire qu'elles avaient réclamée.

En outre, l'amendement de M. Auberger entraînerait une dépense de 2,3 milliards. Quant à la « mesure Carrez », son coût est estimé à 4,6 milliards. Le Gouvernement considère qu'une mesure favorable à ces professions n'est pas prioritaire. Il n'est pas favorable aux amendements 183, 351 et 120.

L'amendement 183, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que les amendements 351 et 120.

M. Philippe Auberger - Les directives européennes imposent aux entreprises la mise en conformité de nombreux équipements -les adaptations sont souvent coûteuses et elles ne sont pas amortissables. Mon amendement 116 vise à exclure de l'assiette de la taxe professionnelle le montant des dépenses de mise en conformité des machines.

L'amendement 116, repoussé par la commission et par le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. Jean-Louis Idiart - Une disposition de la loi de finances pour 1995 a défini un triple seuil de plafonnement de la taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée.

De ce fait, des entreprises moyennes à forte intensité de main-d'_uvre ne bénéficient pas de la suppression progressive de la fraction des salaires incluse dans la base de la taxe professionnelle, décidée dans le cadre de la loi de finances pour 1999, alors même que leurs emplois sont souvent menacés.

L'amendement 477 tend à réintroduire un taux de plafonnement de 3,5 % pour les entreprises réalisant un chiffre d'affaires inférieur à 500 millions de francs.

M. le Rapporteur général - Le coût serait de l'ordre de 600 millions, selon un rapport du Gouvernement ; la commission est donc défavorable.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis.

L'amendement 477, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Gilles Carrez - Le Gouvernement envisage l'indexation de la dotation d'Etat qui compense la suppression de la part salariale de la taxe professionnelle sur l'évolution annuelle de la DGF hors régularisation. Est-ce suffisant ? La base «salaires» évolue chaque année en fonction de la masse salariale des entreprises assujetties. Mon amendement 84 tend à indexer la compensation de la suppression de la base salaires sur l'évolution de la masse salariale des activités économiques assujetties car l'indexation avant évolution de la masse salariale n'est pas favorable aux collectivités locales. Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale prévoit une évolution de la masse salariale supérieure à 4 %. Or, dans le projet de loi de finances, la dotation d'Etat n'évolue que de 2 % -soit un taux qui fait la moyenne entre l'évolution des prix et la moitié du taux de croissance. Cet écart du simple au double est très défavorable.

Mon amendement 84 vise donc à indexer la dotation qui remplace la base «salaires» sur la prévision annuelle -ou sur le constat de l'évolution de la masse salariale, retenue au titre de la cotisation effective entrant dans les recettes prévues de la Sécurité sociale et donc parfaitement connue. Les collectivités locales seraient reconnaissantes au Gouvernement d'aller dans cette voie.

M. Jean-Jacques Jegou - Notre amendement 421 corrigé est identique.

M. le Rapporteur général - Avis défavorable à ces deux amendements car, de 1992 à 1997, l'évolution de la DGF est plus favorable que l'indexation proposée -12 % contre 10,5 %.

M. Carrez a été pris tout à l'heure en flagrant délit de mensonge (Protestations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF). Ou alors il a commis une erreur. La majorité n'a nul besoin qu'on lui souffle des idées et sa proposition, même si elle la rejoint, est antérieure à celle de l'opposition. Elle est en outre bien meilleure puisque l'amendement 83 de M. Carrez, à la différence de l'amendement 50 de la commission, ne tient pas compte d'éventuelles régularisations de la DGF antérieures à 1999 et ne vise que des régularisations négatives.

Du coup la revalorisation ne serait que de 1,44 % avec l'amendement 83 alors qu'elle atteindra 2,05 % avec l'amendement 50. CQFD !

C'est donc bien parce que son amendement est plus favorable aux collectivités locales que la commission l'a préféré à celui de l'opposition.

M. Jean-Pierre Brard - Notre amendement 448 est complémentaire de l'amendement 50. Il n'y a aucune raison de tenir compte de l'évolution de la DGF antérieure à la réforme de la taxe professionnelle applicable au 1er janvier 2000.

M. Philippe Auberger - Que cesse cette querelle inutile !

La majorité actuelle a mis en place un pacte de croissance à partir de 1999 et prévu des mécanismes d'ajustement reprenant celui que j'avais imaginé en 1993 dans le cadre du pacte de stabilité.

M. Jean-Pierre Brard - Du diktat !

M. Philippe Auberger - Mais non ! Il avait été approuvé par l'Assemblée et par le Sénat, qui est très attentif aux problèmes des collectivités locales.

Pourquoi la majorité veut-elle rejeter sur le Gouvernement précédent la responsabilité éventuelle d'une indexation défavorable aux collectivités locales ? Qu'elle ait donc le courage de reconnaître que les pactes sont différents.

M. le Secrétaire d'Etat - M. Auberger reconnaît ainsi que notre contrat de croissance et de solidarité est meilleur que le pacte de stabilité antérieur...

M. Jean-Jacques Jegou - La situation n'est plus la même...

M. le Secrétaire d'Etat - Le passage de l'un à l'autre s'est traduit par 3,7774 milliards de plus pour les collectivités locales.

Cela dit, plusieurs d'entre vous, et plus particulièrement le Président Bonrepaux, nous ont fait observer que l'indexation prévue était trop faible. Le Gouvernement est donc favorable à l'amendement 50. Il espère qu'il sera adopté à l'unanimité et il lève le gage.

M. Gilles Carrez - Où est le mensonge ? Le ministre vient de le dire : la question a été soulevée dès cet été et mon amendement visait à régler au mieux le problème, de la façon la plus honnête, puisqu'il évitait de prendre en compte dans l'indexation des régularisations antérieures à la réforme de la taxe professionnelle. En affirmant qu'avec l'amendement de la commission, en cas d'erreur de prévision, une régularisation négative devrait intervenir l'année suivante, mon erreur est précisément due à mon honnêteté.

Je déplore par ailleurs, Monsieur le ministre, que vous ayez cherché devant le comité des finances locales à faire porter la responsabilité de ce problème d'indexation à M. Auberger. Cela n'a rien à voir puisque la régularisation existait avant même que Philippe Auberger soit élu député.

M. le Président de la commission - Pas la régularisation négative !

M. Gilles Carrez - A l'époque elle était plutôt positive, mais rien n'empêchait qu'elle joue négativement.

Quoi qu'il en soit, j'espère que l'adoption à l'unanimité de l'amendement de la commission enterrera cette mauvaise querelle.

Les amendements 84 et 421 corrigé, repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.

L'amendement 50, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - Les amendements 448, 83 et 419 tombent.

M. le Rapporteur général - Par l'amendement 51, la commission souhaite demander au Gouvernement de présenter, avant le 30 avril 2000, un rapport proposant et analysant diverses modalités de réforme de la taxe d'habitation susceptibles d'aboutir, à compter de l'imposition perçue au titre de 2000, à un allégement significatif de la charge supportée par les contribuables. Depuis juin 1997, nous nous sommes efforcés de stabiliser le plus possible les prélèvements obligatoires, et -à côté des engagements que nous voulions tenir en matière et de priorités budgétaires, et de réduction des déficits- d'engager leur réduction. Or il se peut que l'année 2000 soit meilleure que nous ne nous y attendons, compte tenu des hypothèses de croissance du projet. Si le rythme actuel de croissance se confirme, le début 2000 sera meilleur que les prévisions. Si c'est le cas, et si l'exécution du budget 1999 est également meilleure que prévu, il pourrait apparaître des marges de man_uvre supplémentaires. Nous souhaiterions alors qu'elles soient utilisées pour réduire les impôts et les charges qui pèsent sur une grande majorité de nos concitoyens. Et nous souhaitons notamment que des propositions soient faites sur la taxe d'habitation. Si le Gouvernement pouvait faire le point à ce sujet, on pourrait anticiper de nouvelles baisses d'impôts, ce qui correspond à une priorité du Gouvernement et de la majorité.

M. le Secrétaire d'Etat - Cet amendement s'inscrit dans la volonté du Gouvernement, qui a annoncé le principe d'une réforme des impôts directs pesant sur les ménages dans le cadre du projet de loi de finances pour 2001. La question que pose cet amendement est de savoir si l'on peut anticiper cette décision pour 2001 dès les impôts de 2000. S'il était possible d'y répondre affirmativement, le Gouvernement y serait favorable. Il aimerait faire profiter plus tôt les Français d'un allégement des impôts directs, et notamment de la taxe d'habitation, dont M. le rapporteur a rappelé combien elle est injuste et lourde pour les plus modestes. Il soutient donc la démarche à la fois dynamique et mesurée de la commission et il est favorable à l'amendement 51.

L'amendement 51, mis aux voix, est adopté.

M. Christian Cuvilliez - Certains chefs d'entreprise, bien qu'enregistrant des résultats bénéficiaires, procèdent néanmoins à des licenciements et considèrent l'emploi comme une simple variable économique parmi d'autres. Notre amendement 51 a pour but de pénaliser ces comportements, en prévoyant en pareil cas un taux de 50 % d'impôt sur les sociétés pendant les cinq ans suivant le licenciement.

L'amendement 451, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Daniel Feurtet - Notre amendement 452 concerne France Télécom. M. le ministre nous a partiellement répondu à ce sujet, mais nous souhaitons deux types de précisions. D'une part, M. le ministre a indiqué qu'on procédait actuellement à l'identification des lieux d'implantation de France Télécom. Une fois cette recherche achevée, quelles sont les intentions du Gouvernement quant à la répartition du produit de la taxe professionnelle payée par l'entreprise ? Envisage-t-il un reversement intégral aux communes qui ont des implantations, ou un partage entre elles et le fonds national de péréquation ? Et d'autre part quel sera le calendrier d'application des mesures qui seront décidées ?

M. le Rapporteur général - C'est un amendement lourd que propose M. Feurtet, et la commission ne l'a pas retenu. Le sujet a été longuement évoqué dans le débat sur le budget de 1999. Nous étions alors convenus avec le Gouvernement de constituer un groupe de travail ; le président Bonrepaux et moi-même avions écrit à M. le ministre à ce sujet. Un groupe de travail Etat-France Télécom a bien été mis en place, à ce jour sans les parlementaires. France Télécom a procédé à l'inventaire des bases : selon nos informations, il serait achevé et ses résultats viendraient d'être communiqués à M. le secrétaire d'Etat. Par conséquent, même si la commission n'a pas voté l'amendement, nous aimerions connaître l'état des réflexions du Gouvernement, et nous souhaitons que 2000 soit l'occasion d'une avancée significative dans ce domaine.

M. le Secrétaire d'Etat - Le sens de cet amendement est d'appeler à des explications. Je les fournirai volontiers. J'avais pris l'engagement que l'Etat travaillerait avec France Télécom à voir, avant tout, quelles sont les bases d'imposition ; un groupe de travail entre France Télécom et la direction générale des impôts a entrepris de les recenser. Contrairement à ce qu'on vous a dit, Monsieur le rapporteur, ce travail n'est pas achevé. Dans une première étape, en effet, France Télécom a donné ses effectifs par implantation ; or ce qui compte est d'avoir une idée claire des équipements. Nous travaillons donc avec l'entreprise pour avoir les vraies bases, et surtout les bases pérennes de la taxe professionnelle. J'espère que ce travail sera achevé d'ici la fin de l'année. Je proposerai alors à la commission des finances de voir avec elle comment imaginer un système respectant à la fois les intérêts de France Télécom, de l'Etat et des collectivités locales -non seulement celles qui ont des implantations, mais aussi les autres. En effet France Télécom apporte aujourd'hui au fonds de péréquation de la taxe professionnelle des sommes considérables, qui selon moi devraient être renforcées plutôt que réduites si France Télécom se rapproche d'un régime de droit commun.

M. Michel Bouvard - Je souscris pleinement à l'amendement de nos collègues communistes. J'ai bien entendu M. le ministre. Mais ce recensement qu'on nous fait attendre depuis trois ans, c'est peu admissible. En outre nous allons devoir nous mettre en conformité avec le droit européen pour ce qui est des impôts locaux de France Télécom. C'est d'autant plus nécessaire que cette entreprise développe aujourd'hui au sein de ses locaux toute une série d'activités secondaires liées aux nouvelles technologies, qui échappent souvent à l'imposition locale, dans des conditions parfois un peu limites. Il importe donc de mettre en _uvre cette réforme. Il est souhaitable que les parlementaires y soient associés. Et vous comprendrez notre méfiance, quand on voit un dossier comme celui de la dotation touristique, qui a pris trois ans avant qu'on obtienne un rapport, et dont on a l'impression qu'il est de nouveau en panne. Sur tous ces dossiers touchant aux relations fiscales entre l'Etat et les collectivités locales, on a le sentiment que certaines choses n'avancent pas très vite. Je me réjouirai si nous avons le recensement avant la fin de l'année. Mais il serait bon d'avoir un calendrier précis, et de savoir à quelle date France Télécom basculera dans le droit commun de la fiscalité locale.

M. le Secrétaire d'Etat - Monsieur Bouvard, vous trouvez que nous traînons sur ce dossier, mais le Gouvernement précédent avait été aux abonnés absents ! Je vous ai promis pour la fin de cette année quelque chose que vous attendez depuis dix ans. Travaillons donc dans la courtoisie.

M. Jean-Jacques Jegou - Nous avons parfois subi, c'est vrai, les insuffisances de gouvernements que nous soutenions, mais vous ne pouvez pas dire que nous attendons depuis dix ans : le problème se pose depuis le changement de statut de France Télécom.

Le caractère alambiqué de votre réponse, qui tranche avec votre talent habituel, dénote un certain flottement.

Je voudrais illustrer le problème par deux exemples.

Une petite commune à dominante rurale de ma circonscription a sur son territoire un centre de recherche technique de France Télécom. Son maire, qui appartient d'ailleurs à la majorité plurielle, a découvert que France Télécom louait plus de 40 ha à des sociétés privées, sans donc qu'il y ait paiement de taxe professionnelle à la commune -qui en perçoit moins de 40 F par habitant. Il y a là matière à enquête.

De même, La Poste, depuis l'évolution de son statut, a des filiales à 100 % qui sont des sociétés privées. Dans ma commune se trouve la société Dilipac, qui échappe ainsi au droit commun de la taxe professionnelle.

Nous soutenons tous l'amendement de M. Cuvilliez ; il faut bien comprendre que certains comportements bravent la loi et pénalisent des collectivités locales souvent très modestes.

M. Jean-Pierre Brard - Très bien.

M. Gérard Fuchs - La cotisation de France Télécom va au fonds national de péréquation ; elle est donc redistribuée aux communes modestes.

M. Jean-Jacques Jegou - Il n'empêche qu'il y a des comportements frauduleux.

M. le Président de la commission - Il ne faut pas mélanger La Poste et France Télécom.

La Poste a en effet autant d'avantages ; mais c'est parce qu'elle n'est pas assujettie à des impôts locaux qu'elle assure certains services en zone rurale.

France Télécom se trouve défavorisée dans la mesure où les collectivités préfèrent voir s'installer ses concurrentes qui, elles, leur versent directement la taxe professionnelle. Mais comme l'a souligné notre collègue Fuchs, la taxe professionnelle payée par France Télécom alimente le fonds de péréquation, dont nous avons besoin... (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

L'amendement 452, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 15

M. le Président - Je suis saisi de trois amendements de suppression : 53 de la commission des finances, 336 de M. Cochet, 457 de M. Cuvilliez.

M. Christian Cuvilliez - Il s'agit de ne pas actualiser le barème de l'ISF en fonction de la hausse des prix. En effet les patrimoines ont été nourris par la forte progression des indices boursiers et par la santé insolente du marché immobilier (Exclamations sur les bancs du groupe UDF et du groupe du RPR).

En 1999, l'ISF aura rapporté seulement 13 milliards, au lieu des 18 ou 19 milliards espérés. Cela paraît suspect, s'agissant d'un impôt déclaratif. En tout cas, les 60 millions que rapportera la suppression de cet article pourront être utilement consacrés à relever des minima sociaux.

M. Yves Cochet - Très bien.

M. le Rapporteur général - La commission a adopté ces amendements.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

Les amendements 53, 336 et 457, mis aux voix, sont adoptés et l'article 15 est ainsi supprimé.

APRÈS L'ART. 15

M. Daniel Feurtet - L'amendement 458 inclut, comme le font d'autres pays de l'Union européenne, une part des biens professionnels dans l'assiette de l'ISF.

M. Yves Cochet - L'amendement 335 également, mais de façon plus modérée.

M. Jean-Pierre Brard - On ne se refait pas... (Sourires)

M. Yves Cochet - Un rapport du Conseil national des impôts souligne que l'exclusion des biens professionnels est à la fois socialement inéquitable et économiquement pernicieuse. Elle prive, en outre, les finances publiques de 4 milliards par an. Hier, dans une interview à La Tribune, le président Bonrepaux se prononçait même pour une extension de l'assiette à tous les biens et regrettait que le débat sur l'inclusion de l'outil de travail ait été clos prématurément l'an dernier.

M. le Rapporteur général - La commission des finances n'a pas retenu ces amendements.

M. Jean-Pierre Brard - Ce n'est pourtant pas l'envie qui lui en manquait... (Sourires)

M. le Rapporteur général - On peut penser, en effet, que la meilleure formule consisterait en une assiette large assortie d'un taux diminué, mais un arbitrage différent a été rendu, et l'instabilité fiscale n'est pas recommandable.

M. le Secrétaire d'Etat - La loi de finances pour 1999 a repris un certain nombre de mesures contenues dans la proposition de loi de M. Hue sur l'ISF. Si celui-ci a rapporté 13 milliards au lieu des 14,9 attendus, cela signifie peut-être qu'à force de superposer les dispositifs, le rendement cesse de croître. Aussi proposé-je, étant donné que l'Assemblée vient de décider de ne pas indexer les tranches du barème, d'en rester là pour cette année.

Les amendements 458 et 335, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Rapporteur général - L'exonération des droits de propriété littéraire et artistique est légitime, mais son extension aux héritiers est plus contestable. C'est pourquoi l'amendement 54 rectifié la réserve aux seuls auteurs, comme c'est le cas déjà pour les inventeurs en matière de propriété industrielle.

M. le Secrétaire d'Etat - Mme Trautmann m'a chargé de vous dire son souci de ne pas affaiblir la protection internationale du droit de propriété littéraire et artistique, et en particulier du droit de suite. Cela dit, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

L'amendement 54 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Pierre Brard - Point n'est besoin, je suppose, que j'insiste sur l'importance que revêt à nos yeux l'amendement 483, lequel témoigne de notre volonté de combattre la fraude et l'évasion fiscales. Il s'agit d'intégrer à l'assiette de l'ISF les _uvres d'art ainsi que les objets d'antiquité et de collection, à l'exception des biens meubles constituant le complément artistique des immeubles classés ou inscrits à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques, des _uvres présentées au public et des _uvres des artistes contemporains encore en vie. La valeur retenue serait estimée à 3 % de l'ensemble des autres valeurs mobilières et immobilières du patrimoine déclaré.

Il faut que l'on sache que certains piliers de cocktail de la bonne société parisienne, qui sont à la gauche ce que le caviar est aux _ufs de lump (Sourires), se livrent à un lobbying fort actif, y compris ici, pour défendre des ultra-privilégiés de la fortune qui ne font profession d'aimer l'art que pour échapper légalement à l'impôt. Si vous en voulez la preuve, je vous recommande d'assister au colloque organisé le 2 novembre à Paris par notre collègue Lellouche, avec la participation annoncée des présidents de la chambre nationale des commissaires-priseurs, du syndicat des experts antiquaires et libraires, de la société d'encouragement aux métiers d'art, de la compagnie des commissaires-priseurs de Paris, et j'en passe - mais il n'y a guère d'érémistes dans le lot.

M. François Baroin - Quelle démagogie !

M. Jean-Pierre Brard - Quant à l'argument selon lequel le marché parisien de l'art serait fragile, Christie's et Sotheby's se battraient-ils si férocement pour son contrôle, ainsi qu'il ressort de la lecture des revues spécialisées, s'il était vraiment à l'agonie ?

Il faut en vérité mettre fin à l'anomalie que constitue l'exclusion de l'assiette. Notre amendement va moins loin que celui défendu l'an dernier -sans succès- par le Rapporteur général, ce qui explique sans doute que la commission l'ait adopté sans barguigner.

M. le Président - Monsieur Brard, le colloque auquel vous faites allusion n'est pas consacré aux _uvres d'art mais à la réforme de la profession de commissaire-priseur.

M. Jean-Pierre Brard - Lisez les titres des tables rondes !

M. le Rapporteur général - La commission a accepté l'amendement 483 qui pose une nouvelle fois la question de l'assujettissement des oeuvres d'art à l'ISF.

La commission était partie l'an dernier du constat que les patrimoines deviennent plus diversifiés au fur et à mesure que leur valeur augmente et que l'acquisition d'_uvres d'art intervient souvent après la constitution d'un patrimoine professionnel et mobilier. Il s'agissait là d'un simple constat et non d'une quelconque volonté de stigmatiser les détenteurs d'_uvres d'art, contrairement à ce qu'ont voulu faire croire certains, ou de déstabiliser le marché de l'art. Qui d'ailleurs pourrait croire que la force ou la faiblesse de ce marché tient à l'exonération des _uvres d'art à l'ISF.

La commission avait en outre jugé absurde qu'un même Picasso puisse être taxé à l'ISF comme meuble meublant s'il est apposé au mur et exonéré s'il reste dans un coffre.

Evitant toute attitude maximaliste, elle s'était efforcée de trouver un compromis. En effet, si la nation a besoin d'artistes, de collectionneurs, de marchands d'art et d'amateurs, il n'en est pas moins vrai que la possession de certaines _uvres d'art est bien un signe de fortune.

La commission avait délibérément exclu certaines _uvres du champ de taxation à l'ISF, comme celles des monuments historiques ouverts au public. Par extension, elle avait décidé d'exclure toutes les _uvres présentées en public. Afin de ne pas pénaliser les artistes contemporains, elle avait également exclu les _uvres des créateurs vivants.

Elle avait également refusé que l'on puisse procéder à un inventaire forcé, à charge pour l'intéressé d'apporter la preuve éventuelle d'une valeur inférieure à celle estimée.

Enfin, elle avait retenu le principe d'une taxation forfaitaire consistant en une augmentation d'assiette imposable égale à 3 % de l'actif net, ne pouvant être éventuellement remise en question qu'à l'initiative de l'intéressé.

Jugeant ses préoccupations reprises dans l'amendement 483, dont elle n'avait pas pris l'initiative, elle ne pouvait que l'accepter. Si cet amendement est adopté, comme la commission vous le propose, il conviendra par coordination avec l'amendement 54 corrigé d'insérer à la fin du I le mot « et » avant les mots « les objets d'art ».

M. le Secrétaire d'Etat - Bien que n'étant pas un pilier de cocktails mondains, et il en est fort peu parmi nous ce soir, je ne suis pas favorable à cet amendement.

Tout d'abord, il importe que notre patrimoine culturel reste dans notre pays.

MM. Michel Bouvard et Jean-Jacques Jegou - Très bien !

M. le Secrétaire d'Etat - Cet amendement risquerait de favoriser la sortie clandestine du territoire national d'_uvres d'art qui honorent notre patrimoine. Il arrive déjà que les domaines interceptent des _uvres sur le point de quitter illégalement le pays.

En deuxième lieu, il ne faut pas fragiliser le marché de l'art parisien qui est en concurrence directe avec ceux de Londres, Genève ou New-York. Si les _uvres sont mobiles, les transactions, elles, sont très volatiles. Et il y aurait un risque certain de pertes d'emplois.

En troisième lieu, une mission de réflexion sur le sujet a été confiée à M. Douyère. Peut-être celui-ci pourrait-il d'ailleurs nous présenter ses conclusions.

Enfin, en acceptant cette année de ne pas indexer le barème de l'ISF et d'étendre cet impôt aux héritiers de droits d'auteur, le Gouvernement a déjà consenti un effort significatif dans le sens d'une plus grande justice fiscale, et ce tout en évitant les multiples inconvénients qu'aurait l'amendement 483. Avis défavorable donc.

M. Raymond Douyère - La commission des finances m'a en effet chargé d'une réflexion sur les _uvres d'art. Mes conclusions seront annexées à mon rapport sur le budget de la culture.

Sur un plan philosophique général, il ne paraîtrait pas anormal que l'ensemble des biens d'une personne, qu'il s'agisse d'_uvres d'art, de biens immobiliers ou de biens professionnels, soit assujetti à l'ISF. J'avais d'ailleurs par le passé, et M. le secrétaire d'État était à l'époque d'accord avec moi, développé l'idée d'un impôt sur le capital à assiette large et à taux réduit, dont le produit aurait été bien supérieur à celui de l'ISF. Ne revenons pas sur le passé : la solution retenue a été celle d'un ISF de l'assiette duquel sont exclus les biens professionnels et les _uvre d'art.

Contrairement à ce que l'on pense parfois, il existe déjà une fiscalité importante sur les _uvres d'art. Les acquéreurs paient la TVA, les vendeurs sont taxés sur les plus-values et les _uvres supportent des droits de succession. C'est d'ailleurs grâce aux dations, ces _uvres données en guise de paiement des droits de succession, que bien des musées nationaux ont enrichi leurs collections. L'assujettissement des _uvres d'art à l'ISF ne remédierait donc pas à une absence totale de taxation. Il y aurait d'ailleurs quelque incohérence à les y assujettir quand nous venons de décider d'exclure les biens professionnels.

Ensuite, la détention d'_uvres d'art ne relève pas toujours de la spéculation, loin s'en faut. Il est des collectionneurs qui collectionnent les _uvres pour leur seul plaisir et se retrouvent parfois à la tête d'un patrimoine dont ils ne connaissent même pas la valeur qui, soit dit au passage, est très difficile à évaluer.

La taxation forfaitaire proposée l'an passé par le rapporteur général et dont l'idée est cette année reprise dans l'amendement 483 présentait l'avantage de la simplicité puisqu'il appartenait à l'intéressé qui estimait que ses _uvres représentaient moins de 3 % de son actif net d'en apporter la preuve. Mais comment s'assurer que tous les détenteurs souscriraient bien une déclaration ? Les risques de fraude étaient grands.

Par ailleurs, le marché de l'art est actuellement en grande difficulté...

M. Jean-Pierre Brard - Ce n'est pas vrai.

M. Raymond Douyère - J'ai reçu de très nombreux professionnels au cours de ma mission, et pas seulement des maisons Sotheby's ou Christies. Tous se plaignent d'un marché très déprimé. Le marché français souffre d'ailleurs du retard pris par le projet de loi sur la profession de commissaire-priseur. L'assujettissement des oeuvres d'art à l'ISF risquerait d'accroître ces difficultés, beaucoup d'_uvres risquant alors de quitter notre pays.

Enfin, si les collections publiques se sont notablement enrichies au travers des dations, beaucoup de collectionneurs leur consentent des dons ou, comme cela a encore été récemment le cas, leur donnent les moyens d'acheter des _uvres qui autrement seraient vendues à des musées ou à des collectionneurs étrangers.

Notre droit ne permet pas de s'opposer à la sortie des _uvres d'art du territoire national, sauf à les acheter au prix du marché. Il n'y a pas lieu de modifier le régime d'imposition applicable aux _uvres d'art, sauf si le Gouvernement s'engageait à mettre en place un impôt sur le capital incluant l'ensemble des biens. Il ne faut pas «stigmatiser» les oeuvres d'art.

M. Jean-Pierre Brard - M. Douyère a dit des choses inexactes. Le marché de l'art n'est pas déprimé. S'il y a de vrais collectionneurs, ils ont en général les moyens de contribuer modérément. Tout cela me rappelle Mme de Wendel, qui, ayant perdu une partie de ses aciéries de Lorraine, s'écriait : «Nous n'avons plus rien !» Je rappelle que son mari est un personnage important.

Je n'hésite pas à le dire, ceux qui dissimulent une partie de leur patrimoine, constituée d'_uvres d'art, volent la République.

Le ministre a invoqué le patrimoine culturel. Mais les revues dont nous parlions tout à l'heure témoignent du «lobbying» qui s'acharne contre la fiscalité française.

S'agissant du marché de l'art contemporain, tel qu'il se présente à la FIAC, la cote des _uvres exposées est telle que ceux qui les acquièrent ont certainement les moyens de contribuer un peu. Quant au rapport de M. Douyère, attendons de l'avoir lu pour en débattre (Sourires).

La solution que nous proposons dans l'amendement 483 est simple et elle offre une garantie d'accès du public aux _uvres d'art, en maintenant l'exonération des _uvres exposées.

L'amendement 483, mis aux voix, est adopté.

M. Gilbert Gantier - Je défends mon amendement 214, ainsi que l'amendement 185.

L'amendement 214, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l'amendement 185.

L'article 16, mis aux voix, est adopté.

ART. 17

M. le Rapporteur général - L'amendement 55 vise à supprimer, à compter du 1er janvier 2000, le droit de timbre dû au titre de la délivrance de la carte de séjour des étrangers, qui bénéficiera ainsi du même régime que la carte nationale d'identité.

Cet amendement reprend les propositions de MM. Dray et Cochet notamment.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement est favorable et lève le gage.

L'amendement 55, mis aux voix, est adopté.

L'article 17, modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 17

M. Jean-Jacques Jegou - Afin d'encourager la conversion en euros du capital des sociétés françaises, l'amendement 541 tend à prévoir que les opérations d'augmentation ou de réduction de capital en résultant soient exonérées de droits d'enregistrement et de timbre.

M. Philippe Auberger - L'amendement 542 a le même objet.

M. le Rapporteur général - Avis favorable.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement est favorable à ces amendements de l'opposition (« Ah ! » sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF) et lève le gage.

L'amendement 541, mis aux voix, est adopté, de même que l'amendement 542.

M. le Président - Les amendements 186, 311 et 519 sont défendus.

L'amendement 186, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que les amendements 311, et 519.

M. Maurice Adevah-Poeuf - Mon amendement 532 tend à étendre le régime applicable au conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres en exonérant de droits les acquisitions et échanges d'immeubles effectués par les conservatoires régionaux d'espaces naturels.

L'amendement 532, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Yves Tavernier - Mon amendement 23, dont l'incidence financière serait modeste, supprime les droits de timbre -d'une valeur de 100 francs- pour les recours formés contre les refus de visa. Les étrangers intéressés ne peuvent en effet trouver dans leur pays des timbres fiscaux et voient leurs recours jugés irrecevables pour ce seul motif. N'est-ce pas absurde ?

M. le Rapporteur général - La commission a émis un avis favorable, d'autant que le coût de la mesure est de l'ordre de 200 000 francs.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement qui risque de favoriser une multiplication des requêtes devant les juridictions administratives. Une progression du budget de la justice est prévue dans le budget pour 2000 mais elle va de pair avec la lutte contre l'engorgement des tribunaux. Le principe vaut pour les juridictions administratives et je demande donc à M. Tavernier de retirer son amendement.

M. Alain Barrau - M. Tavernier, auteur d'un excellent rapport sur la rénovation du service des visas, présente un amendement très pertinent. Le premier contact avec l'administration française doit être positif. Le refus de visa n'est pas une décision facile à accepter ; le paiement d'un droit de timbre pour former un recours est donc particulièrement mal venu.

M. Yves Tavernier - Le législateur a décidé que les refus de visa devaient être motivés. Dans le cadre de la loi relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d'asile, le droit régalien de l'Etat d'octroyer ou de refuser un visa sans motiver sa décision a été levé dans plusieurs cas, pour répondre d'ailleurs à certaines exigences européennes.

Je trouve choquant, alors que le législateur a ouvert cette possibilité, d'interdire en fait qu'elle s'exerce, puisque les consulats et les ambassades ne peuvent vendre de timbres.

Il est bon en outre que les rapports faits devant notre commission des finances soient parfois suivis d'effets. Je maintiens donc l'amendement (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste).

M. le Secrétaire d'Etat - Il est vrai que la difficulté de se procurer le timbre gêne le recours (Rires sur divers bancs).

M. Michel Bouvard - On peut même dire que cela l'empêche... (Sourires)

M. le Secrétaire d'Etat - Je plaide moins pour les services de la comptabilité que pour ceux de mes collègues de la justice. Je propose donc que le paiement de 100 francs puisse être effectué de n'importe quelle façon auprès des chancelleries et qu'il suffise de pouvoir produire le reçu.

L'amendement 23, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - A l'unanimité, Monsieur le ministre...

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ART. 18

M. le Rapporteur général - L'amendement 56 vise à supprimer cet article. En effet, les manifestations sportives professionnelles, en particulier dans le football, sont de nature commerciale. La taxe sur les spectacles est une recette pour les collectivités locales qui, souvent, investissent dans les infrastructures sportives. Les collectivités sont d'ailleurs libres d'exonérer ou de moduler le paiement de cette taxe.

La suppression de cette taxe n'aurait aucun effet sur le prix d'entrée des manifestations sportives. En revanche renoncer à cette suppression entraînerait des économies pour l'Etat.

Si nous partageons la volonté du Gouvernement d'alléger les charges pesant sur les contribuables, en l'occurrence, la commission ne l'a pas suivi.

M. le Secrétaire d'Etat - Il me restera la satisfaction d'avoir proposé une simplification... Je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée, tout en n'en pensant pas moins.

L'amendement 56, mis aux voix, est adopté et l'article 18 est ainsi supprimé.

L'article 19, mis aux voix, est adopté.

La séance, suspendue le samedi 23 octobre à 0 heure 50, est reprise à 1 heure 05.

APRÈS L'ART. 19

M. le Secrétaire d'Etat - Le Premier ministre a annoncé dans son discours de Strasbourg qu'une mesure serait proposée, dans le présent projet de budget, afin de maintenir l'exonération professionnelle en cas de retour à l'emploi. Tel est l'objet de l'amendement 347 du Gouvernement. La mesure concerne les allocataires du RMI qui retrouvent un emploi. Elle corrige une inadaptation de la loi fiscale par rapport à l'évolution de la réglementation sociale. En effet, depuis le décret du 27 novembre 1998 sur les modalités de cumul de certains minima sociaux avec un revenu d'activité, on a instauré la possibilité de cumuler pendant un an ou plus le RMI avec un revenu d'activité à condition d'être en deçà d'un seuil de 750 heures de travail par an. L'objectif est de lutter contre les « trappes à pauvreté », ces mécanismes qui font qu'on sort difficilement, une fois qu'on y est tombé, de la dépendance envers la solidarité. Cette mesure était donc favorable au retour à l'emploi des chômeurs de longue durée. Il fallait une adaptation parallèle en matière fiscale. Le bénéficiaire du RMI qui retrouve un emploi perd aujourd'hui l'exonération de taxe d'habitation : il est proposé de prévoir une période de transition, en maintenant cette exonération pendant toute la période où il continue à cumuler le RMI avec son revenu d'activité, et en outre pendant l'année qui suit celle où il perd son droit à cette allocation. Ainsi le droit fiscal, qui était en retard sur le droit social, va être en avance, puisqu'il ajoute un an de plus. Cet amendement devrait profiter à 175 000 personnes par an ; son coût est estimé à 400 millions. J'espère que l'Assemblée tout entière se retrouvera pour l'adopter.

M. Gérard Fuchs - Nous sommes nombreux à avoir reçu dans nos permanences des personnes sortant du RMI et qui se trouvaient de nouveau redevables de la taxe d'habitation, de la redevance audiovisuelle, et subissaient une réduction d'APL. A mon étonnement, j'ai pu constater que dans certains cas il en résultait une baisse brutale de leur revenu ! C'est pourquoi j'avais proposé, avant le discours de Strasbourg, mon amendement 544, qui a le même objet que celui du Gouvernement, et que je retire volontiers. J'espère que cette mesure aura des suites dans les années qui viennent, par exemple sur la redevance audiovisuelle ; et j'espère que l'amendement du Gouvernement sera adopté à l'unanimité.

M. le Rapporteur général - La commission est très favorable à l'amendement 347.

M. Jean-Jacques Jegou - Je ne m'y opposerai pas, mais je pose un problème. Ceux qui travaillent et n'ont pas des salaires élevés peuvent s'interroger. Pour ma part, avec M. Méhaignerie, je suis pour le relèvement des bas salaires. L'insuffisance des salaires directs fait qu'il y a trop peu d'écart entre ceux qui travaillent et ceux qui perçoivent des revenus sociaux. En conséquence ces derniers, même s'ils ont envie de travailler, peuvent hésiter à le faire pour les raisons qu'a indiquées M. Fuchs. Il serait fâcheux qu'on en vienne, comme aux Pays-Bas, à décider que 9 % de la population sont définitivement dispensés de l'obligation de chercher du travail. Il serait dangereux que certaines catégories de Français en viennent à s'interroger sur la nécessité de rentrer dans le monde du travail.

L'amendement 347, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - Il est adopté à l'unanimité.

M. Daniel Feurtet - J'indique déjà que nous retirerons l'amendement 454, car il est satisfait. Quant aux 455 et 456, ils font partie du travail sur la réforme de l'assiette de la taxe d'habitation.

L'amendement 493 est en cohérence avec ce qui vient d'être dit. Les bénéficiaires du RMI sont exonérés de taxe d'habitation sur leur résidence principale. Mais les jeunes de moins de 25 ans sont exclus du RMI. Or il y a parmi eux des gens dont les ressources sont très faibles, inférieures parfois au RMI.

Notre amendement 493 tend à faire bénéficier d'office d'un dégrèvement de taxe d'habitation les jeunes de moins de 25 ans dont les revenus sont inférieurs ou équivalents au SMIC, à l'exclusion des étudiants non boursiers, dont le statut de l'étudiant devrait prochainement définir le régime.

M. le Rapporteur général - La commission n'a pas adopté cet amendement.

M. le Secrétaire d'Etat - Défavorable, à regret.

L'amendement 493, mis aux voix, n'est pas adopté.

Les amendements 454, 455 et 456 sont retirés.

ART. 20

M. le Rapporteur général - Comme le droit d'inscription au baccalauréat, le droit d'inscription au brevet des collèges trouve son fondement dans un texte législatif, l'article 23 de la loi du 26 septembre 1948 fixant l'évaluation des voies et moyens du budget pour 1948. L'amendement 57 a donc pour objet de supprimer ce droit, que le Gouvernement proposait d'étendre par voie réglementaire.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement l'accepte et lève le gage.

L'amendement 57 est adopté.

L'article 20, ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

L'article 21, mis aux voix, est adopté.

ART. 22

M. Gilbert Gantier - Le gazole est un carburant populaire, utilisé par les artisans et beaucoup d'entreprises. Il n'y a pas lieu d'augmenter la TIPP qu'il supporte. Notre amendement 188 tend donc à supprimer cet article.

L'amendement 188, repoussé par la commission et par le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. Jean-Jacques Jegou - L'amendement 366 est défendu.

L'amendement 366, repoussé par la commission et par le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. Yves Cochet - Notre amendement 339 vise à limiter l'augmentation de la TIPP pour l'aquazole, carburant écologique dont l'industrialisation du procédé de fabrication a bénéficié d'une subvention européenne et qui a été expérimenté lors des journées sans voitures.

Mme Nicole Bricq - L'amendement 59, que j'ai cosigné avec le rapporteur et qui se situe dans la continuité de la politique engagée l'année dernière, vise à encourager les collectivités locales à utiliser l'aquazole -ce qui, outre l'aspect environnemental, aura pour avantage de limiter l'effet de la hausse du gazole sur les collectivités locales ayant des flottes captives.

M. Michel Bouvard - Mon amendement 306 a le même objet. Cette mesure est d'autant plus justifiée qu'en province le renouvellement des flottes est entièrement à la charge des budgets locaux.

M. le Rapporteur général - La commission a adopté l'amendement 59, un peu plus modeste que l'amendement 339.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis favorable à l'amendement 59, dont je lève le gage. Je suggère à M. Cochet de retirer l'amendement 339.

M. Yves Cochet - Je le maintiens.

L'amendement 339, mis aux voix, n'est pas adopté.

Les amendements 59 et 306, mis aux voix, sont adoptés à l'unanimité.

M. le Président - Nous avons le même schéma avec l'amendement 338 de M. Cochet, 60 de la commission et 307 de M. Bouvard.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis favorable à l'amendement de la commission.

L'amendement 338 n'est pas adopté.

Les amendements 60 et 307 sont adoptés.

M. le Rapporteur général - L'amendement 58 corrige une erreur de référence.

L'amendement 58, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. Christian Cuvilliez - L'amendement 486 est défendu.

M. Gilbert Gantier - Mon amendement 189 également.

M. le Président - De même que l'amendement 259.

M. le Rapporteur général - La commission a rejeté ces amendements, qui tendent à instituer des mécanismes de remboursement de la TIPP sur le gazole pour les réseaux de transport en commun. Certes, un dispositif de ce type a été adopté pour les poids lourds, mais en raison d'une concurrence internationale forte, de la quasi-absence de carburants de substitution et de la faiblesse des marges, à un moment où il était indispensable d'améliorer les conditions de travail dans le secteur. Pour les transports en commun, priorité est donnée à l'utilisation de carburants propres.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis.

L'amendement 486 n'est pas adopté, non plus que les amendements 189 et 259.

APRÈS L'ART. 22

Mme Nicole Bricq - Mon amendement 124 tend à porter de 25 à 50 % l'exonération dont bénéficient les véhicules de société fonctionnant en bicarburation.

M. Gilbert Gantier - Mon amendement 190 a le même objet.

M. le Rapporteur général - La commission n'a pas suivi nos collègues.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement est d'accord, et lève le gage.

M. Michel Bouvard - Je suis favorable à ces amendements, à condition d'en réserver le bénéfice aux véhicules neufs.

M. Jean-Jacques Jegou - Si on se limite aux véhicules neufs, on ne pourra pas faire profiter de cette disposition les véhicules équipés après leur achat par des équipementiers.

M. le Rapporteur général - Eh bien, je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée...

Les amendements 124 et 190, mis aux voix, sont adoptés, à l'unanimité.

M. Jean-Jacques Jegou - Les amendements 367 et 365 sont défendus.

Les amendements 367 et 365, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

L'article 23, mis aux voix, est adopté.

ART. 24

M. Georges Sarre - Le projet de loi de finances gagnerait à inclure une mesure audacieuse et novatrice telle que la taxe Tobin. Son adoption serait un acte fondateur, qui aurait valeur d'exemple pour l'Union européenne en affirmant le contrôle public sur les fonds spéculatifs et la souveraineté des peuples face à une mondialisation dont le visage actuel est celui d'une finance toute-puissante, de fonds de pension dictant aux entreprises une stratégie orientée vers la recherche du profit à très court terme. L'amendement déposé par les députés membres du groupe ATTAC marque, selon l'expression de Bernard Cassen, «la volonté de reconquérir les espaces perdus par la démocratie au profit de la finance». 80 % des 1 500 milliards de dollars échangés chaque jour sur les marchés le sont à des fins purement spéculatives, et constituent une menace de déstabilisation économique, porteuse de chômage et de misère. L'adoption de la taxe Tobin aurait un effet dissuasif sur ces mouvements erratiques de capitaux, rendrait aux économies nationales quelques marges de man_uvre, et son produit pourrait être réinvesti dans le développement des pays du Sud.

MM. Yves Cochet, Julien Dray et Yann Galut - Très bien !

M. le Président - Le sujet ne viendra en discussion que dans une cinquantaine d'amendements. Je propose que nous nous en tenions, pour l'heure, à l'article 24.

M. Yves Cochet - L'amendement 329 tend à supprimer cet article, qui unifie et affecte au budget général les taxes sur les installations nucléaires de base, en vue d'assujettir celles-ci à la TGAP, à l'instar des installations classées pour la protection de l'environnement, dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, qui ne sera examiné que la semaine prochaine. Cela aiderait au passage le Gouvernement et Mme Aubry, qui a quelque difficulté, ai-je cru comprendre, à financer les 35 heures... (Rires sur divers bancs)

M. le Rapporteur général - La commission n'a pas examiné l'amendement, mais je suis défavorable, à titre personnel, à la suppression d'un article qui clarifie le régime juridique de la taxe sur les installations nucléaires de base. Intégrer celle-ci à la TGAP serait habiller Mme Aubry en déshabillant M. Sautter... (Rires)

M. le Secrétaire d'Etat - L'article 24 présente un triple avantage : il régularise un prélèvement peu conforme à l'ordonnance organique, il rapporte 830 millions au budget de l'Etat et, surtout, il ne préjuge pas des formes que prendra, à l'avenir, le contrôle du nucléaire civil.

L'amendement 329, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 24, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 24

M. Jean-Jacques Jegou - Le dispositif Besson ne permet pas à qui en bénéficie, contrairement à l'amortissement Périssol, de louer son bien à un ascendant ni à un descendant. Or, les jeunes font des études de plus en plus longues et ont souvent du mal à trouver un emploi. Afin de favoriser la solidarité entre les générations, l'amendement 312 lève cette restriction.

L'amendement 312, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Brard - L'amendement 441 est le premier d'une série d'amendements destinés à combattre la fraude. Il est paradoxal que, contrairement aux pénalités d'assiette, les pénalités de recouvrement, qui sanctionnent le versement tardif des impôts et taxes, soient déductibles du résultat imposable lorsqu'elles portent sur des impôts eux-mêmes déductibles, telle la TVA. Afin que ces pénalités ne soient plus virtuelles, je propose qu'elles ne soient plus déductibles, étant entendu que l'administration fiscale pourra continuer de tenir compte de certaines situations particulières.

M. le Rapporteur général - Je salue le travail remarquable accompli par M. Brard dans le domaine de la lutte contre la fraude.

M. Jean-Pierre Brard - Voilà qui commence mal... (Rires)

M. le Rapporteur général - Cette disposition a paru particulièrement intéressante à la commission, qui l'a donc acceptée ("Ah !" sur divers bancs).

M. le Secrétaire d'Etat - Je m'associe à l'hommage rendu à M. Brard et donne également un avis favorable.

L'amendement 441, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Jacques Jegou - L'amendement 224 est défendu.

L'amendement 224, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Marie-Line Reynaud - Les viticulteurs peuvent choisir d'être imposés au réel normal ou au réel simplifié. La différence entre les deux régimes est minime, sauf pour les producteurs de cognac et d'armagnac, dont les stocks sont à rotation lente. Ils sont en effet évalués au prix de revient dans le premier cas, au cours du jour dans le second, et il arrive, étant donné la fluctuation des cours et l'évaporation -que l'on appelle en Charente «la part des anges» (Sourires)-, que la valeur comptable soit supérieure à la valeur marchande et que les exploitants soient donc taxés sur des profits inexistants. Mon amendement 392, troisième rectification, que je rectifie d'ailleurs une quatrième fois pour lever la condition d'âge du vin, leur permet d'opter pour l'un ou l'autre mode d'estimation et de constituer des provisions si les conditions du marché l'exigent.

M. le Rapporteur général - La commission vous propose de retenir cet amendement. Il répond à la crise conjoncturelle à laquelle se trouvent confrontés les producteurs de cognac et d'armagnac qui voient le prix de vente de leurs productions chuter alors même que leurs coûts de stockage augmentent. Avis favorable également à la rectification demandée par Mme Reynaud.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis.

Mme Béatrice Marre - Je suis d'accord avec cet amendement. Je ferai toutefois observer que les producteurs de cognac et d'armagnac ne sont pas les seuls viticulteurs confrontés au problème de stocks à rotation lente. Je me propose d'examiner les solutions envisageables dans le rapport que je suis en train d'élaborer.

L'amendement 392 3ème rectification, mis aux voix, est adopté à l'unanimité.

M. Jean-Jacques Jegou - L'amendement 467 est un amendement sérieux (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste) qui propose, afin d'encourager le développement de l'actionnariat salarié, de porter à 20 000 francs le plafond en-dessous duquel sont affranchis de l'impôt les prélèvements opérés sur les salaires à l'occasion de l'émission et de l'achat en Bourse d'actions réservées aux salariés ou à l'occasion de la souscription des parts sociales émises par les sociétés coopératives ouvrières de production. Cela revient à aligner ce plafond sur celui du plan d'épargne d'entreprise.

M. le Rapporteur général - Cet amendement est si sérieux que la commission juge nécessaire de laisser mûrir la réflexion.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis défavorable.

L'amendement 467, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Jacques Jegou - L'amendement 219 est défendu.

L'amendement 219, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 403 est retiré.

M. Jean-Jacques Jégou - L'amendement 288 tend à rendre éligibles aux PEA les titres des sociétés ayant leur siège dans un Etat membre de la zone euro. Il serait de nature à renforcer les échanges économiques et financiers avec nos partenaires de l'Union.

M. le Rapporteur général - Avis défavorable.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis.

M. Michel Bouvard - Je comprends le souci de notre collègue Jegou mais cette mesure serait sans doute précipitée. Il faut d'abord mobiliser l'épargne française afin que les capitaux français demeurent prépondérants dans nos entreprises et que les centres de décision ne risquent pas d'être transférés à l'étranger. Encourager l'investissement dans des actions d'entreprises européennes, soit, mais seulement quand la législation entre les différents pays sera harmonisée.

M. le Rapporteur général - S'il s'agit de répondre aux exigences du droit communautaire, l'extension aux seuls pays de la zone euro ne règle pas le problème. Et dans le contexte plus large d'une politique de l'épargne, il était tout à fait justifié qu'en 1992, compte tenu de l'insuffisance traditionnelle des investissements en actions des épargnants français, on ait choisi d'abord d'inciter au renforcement de la présence d'actionnaires français dans le capital des entreprises françaises.

L'amendement 288, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Jacques Jegou - L'amendement 220 est défendu.

L'amendement 220, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Michel Bouvard - L'amendement 518 prévoit d'augmenter le plafond de la réduction d'impôt consentie aux particuliers souscrivant au capital des PME. Cette mesure permettrait de renforcer les fonds propres des PME.

L'amendement 518, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Yves Cochet - L'amendement 343 2ème rectification vise à assimiler à un don et donc à lui appliquer la fiscalité afférente, la part de rendement à laquelle, dès la souscription, les épargnants renoncent afin de soutenir une action de solidarité. Considérant que le taux du livret A est actuellement fixé à 2,25 %, un compte à terme de 10 000 F à 0 % serait assimilé à un don de 225 F et donnerait droit à une réduction d'impôt de 112,50 F.

Une réduction d'impôt de 50 F dégage dans le dispositif actuel un financement de 100 F alors qu'avec notre amendement, elle ouvrirait une possibilité de financement de 40 000 F. Cette mesure d'équité et d'efficacité fiscale permettrait de mobiliser nos citoyens en faveur de la cohésion sociale et de la création d'emplois. Elle constituerait aussi un signal politique fort de la majorité dans sa lutte contre l'exclusion et le chômage.

M. le Rapporteur général - Avis défavorable pour des raisons techniques. La question pourra être reprise plus tard.

M. le Secrétaire d'Etat - En abandonnant les produits que pourraient lui procurer ses placements dans des comptes d'épargne ou des OPCVM caritatifs, un contribuable effectue en réalité un don et peut, à ce titre, bénéficier d'une réduction d'impôt égale à 50 % du montant de ce don. Ce dispositif existe, il est cependant méconnu. Je préciserai son fonctionnement dans une instruction fiscale qui confirmera donc, Monsieur Cochet, que votre amendement est satisfait. Je vous invite donc à le retirer.

L'amendement 343 2ème rectification, est retiré.

M. Daniel Feurtet - L'amendement 404 prévoit que le prélèvement libératoire de 16 % prévu à l'article 200 A-2 du code général des impôts applicable aux revenus de cession de valeurs mobilières des personnes physiques est porté à 20 % lorsque les valeurs vendues ont été acquises moins de six mois auparavant. Ainsi limiterait-on l'injustice d'une disposition qui permet de faire échapper ces revenus à la progressivité de l'impôt sur le revenu.

L'amendement 404, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Brard - Cet amendement vise à relever les taux spécifiques d'imposition s'appliquant aux plus-values à long terme réalisées par les sociétés. Ces taux, aujourd'hui largement inférieurs au taux de l'impôt sur le bénéfice des sociétés, sont source d'un manque à gagner totalement injustifié.

M. le Rapporteur général - la commission n'a pas adopté cet amendement.

M. le Secrétaire d'Etat - Je ne puis accepter cet amendement dont je comprends bien l'inspiration.

L'amendement 444, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Michel Bouvard - C'est pour inciter les sociétés à distribuer rapidement leurs résultats qu'en 1995 le législateur a assujetti au précompte les distributions prélevées sur des bénéfices ayant supporté l'impôt sur les sociétés au taux de droit commun, réalisés depuis plus de cinq ans.

Mais les bénéfices distribués plus de cinq ans après leur réalisation supportent ainsi une double imposition qui ne se justifie pas.

Cette règle fait également obstacle à la dissolution des sociétés et à la transmission des entreprises. C'est pourquoi je propose par mon amendement 520 de la supprimer. L'amendement 112 a le même objet.

L'amendement 112, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l'amendement 520.

M. Daniel Feurtet - Notre amendement 430 reprend une demande ancienne qui est d'exonérer les hôpitaux de la taxe sur les salaires.

M. le Rapporteur général - Avis défavorable en raison du coût induit.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis.

L'amendement 430, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Gilbert Gantier - Nos amendements 191, 192 et 193 ont trait à la taxation sur les bureaux en Ile-de-France, qui touche les plates-formes multimodales, locaux de stockage de grande superficie, situés notamment près des aéroports. Plusieurs études ont montré que cette taxation désavantageait Paris, par rapport à Londres ou Bruxelles. Le ministre avait d'ailleurs pris l'engagement de traiter le problème dans le budget pour 2000.

L'amendement 191, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que les amendements 192 et 193.

M. Jean-Jacques Jegou - Notre amendement 315 porte aussi sur la taxe sur les bureaux en Ile-de-France. Il faut savoir en effet qu'elle vise aussi les bureaux des collectivités locales, les mairies, les ministères et l'Assemblée nationale elle-même. Depuis sa création, elle donne lieu à un détournement organisé de 1,8 milliard, dont près de la moitié provient de la contribution de l'Etat, plafonnée à 720 millions.

Cette taxe a pour objet de financer des solutions aux problèmes particuliers de la région francilienne. Or, elle est détournée. Par ce biais, les mairies sont parfois harcelées par les services fiscaux pour quelques milliers de francs, ainsi détournés du budget des collectivités locales pour venir abonder le budget de l'Etat. Cette disposition n'est pas morale et crée une discrimination à l'encontre des habitants de l'Ile-de-France par rapport aux autres Français.

M. le Rapporteur général - Evitons à cette heure un débat sur les discriminations entre Paris, l'Ile-de-France et la province ! La commission a rejeté cet amendement. Cette taxe est en effet payée par les personnes publiques mais à un taux réduit. Il n'y a pas lieu de modifier le dispositif.

M. le Secrétaire d'Etat - Le FARIF finance des actions qui profitent à tous les habitants de la région ; il n'y a donc rien de choquant et aucune discrimination. Le Gouvernement émet un avis défavorable.

M. Gilles Carrez - Je m'étonne que l'on passe aussi vite sur cette taxe qui, en tant qu'élu, m'intéresse bien plus qu'une hypothétique taxe internationale à laquelle nous allons consacrer des heures de débat.

M. Julien Dray - Pour ma part, les deux m'intéressent !

M. Gilles Carrez - L'Etat s'approprie le produit de cette taxe...

Mme Nicole Bricq - Vous êtes hors-sujet !

M. Gilles Carrez - L'Etat prend à son compte et assimile 4 milliards à partir d'une taxe d'assiette locale. Dans ses discussions avec l'exécutif régional, l'Etat englobe des crédits qui ne lui appartiennent pas. Le nouvel exécutif de l'Ile-de-France ne défend pas la région.

M. Julien Dray - Il n'a jamais été aussi dynamique ! Vos propos sont insultants !

M. Gilles Carrez - Vous avez voté l'extension de cette taxe sur les locaux de stockage alors que son produit ne profite pas à la région ! Personne ne défend une région sinistrée...

Mme Nicole Bricq - Qui a accumulé le retard ?

M. Gilles Carrez - Vous, Monsieur Dray, qui vous dites attaché à la défense de la vie quotidienne des Franciliens, devriez vous intéresser davantage à cette taxe qu'à une hypothétique taxe internationale !

L'amendement 315, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Brard - Notre amendement 438 vise à supprimer des charges déductibles pour l'établissement de l'impôt les intérêts des emprunts contractés pour l'acquisition de titres de participation dans le capital des sociétés.

En effet, les investisseurs peuvent racheter une entreprise bénéficiaire en franchise d'impôt en utilisant ou en créant une société holding qui empruntera la totalité du montant du rachat. Dans le cadre du régime des groupes ou des sociétés mères et filiales, les profits de l'entreprise rachetée seront ainsi absorbés par le déficit de la société holding de rachat. Il s'agit d'un montage classique, dont il convient de supprimer le mécanisme, car il revient à faire supporter une partie importante de la charge d'acquisition de l'entreprise à la collectivité publique.

Cet amendement vise à moraliser le dispositif en supprimant les failles de notre législation qui sont autant de sources de fraude.

M. le Rapporteur général - La matière est complexe et il semble difficile de bien cibler le dispositif sur les abus. Il semble à cet égard plus judicieux de régler le problème du régime fiscal des sociétés «holding» dans le cadre européen. La commission a donc émis des réserves qui ne sont pas levées et elle invite M. Brard à retirer son amendement, qu'elle serait sinon contrainte de rejeter.

M. le Secrétaire d'Etat - Je ne vais pas adresser de nouveaux compliments à M. Brard qui risquerait de s'en lasser. Le cadre international me semble cependant mieux adapté pour traiter cette question importante. Le rapport de M. Brard a inspiré depuis deux ans plusieurs initiatives au Gouvernement dans la lutte contre la fraude. Aussi, je lui demande de retirer son amendement qui n'a besoin que d'un peu de «polissage».

M. Jean-Pierre Brard - A l'imitation de Saint Thomas, les apparences me convainquent peu. Je préfère les réponses concrètes. Or, je constate que M. le ministre renvoie à des jours meilleurs l'examen de la question. Je propose donc de retirer l'amendement mais d'y revenir en deuxième lecture, après que les services de M. le ministre nous auront aidés à trouver une rédaction plus adaptée.

M. Jean-Jacques Jegou - La baisse de 4 milliards à 2,7 milliards de la dépense fiscale en faveur du crédit impôt recherche montre qu'il n'est plus assez incitatif. C'est pourquoi l'amendement 287 institue un crédit de 20 % des dépenses de recherche innovation.

M. Michel Bouvard - Les amendements 111 et 517 répondent au même esprit. N'oublions pas que la recherche d'aujourd'hui, c'est les emplois de demain.

M. le Rapporteur général - Défavorable.

M. le Secrétaire d'Etat - Le crédit impôt recherche existe, pourquoi vouloir, par ces amendements, dépenser 14 milliards de plus ? Avis défavorable.

L'amendement 287, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que les amendements 111 et 517.

M. Daniel Feurtet - Notre amendement 437 vise surtout à obtenir des éclaircissements sur le crédit impôt recherche. S'il est vrai qu'il coûte 3 milliards et que de moins en moins d'entreprises sont concernées, ne conviendrait-il pas de renforcer la transparence et l'efficacité du dispositif ?

M. le Rapporteur général - La commission n'a pas adopté cet amendement.

M. le Secrétaire d'Etat - L'action menée par le Gouvernement depuis 2 ans et demi a permis d'ouvrir le crédit impôt recherche non seulement à quelques grands groupes mais aux PME, l'examen du budget de la recherche vous le montrera. Le coût est effectivement celui que vous avez indiqué. Au bénéfice de ces éclaircissements, je souhaite le retrait de cet amendement.

M. Daniel Feurtet - Je le retire.

M. Yves Cochet - L'amendement 345 répond au principe du double dividende. D'une part, il cherche à freiner l'invasion publicitaire de vos boîtes aux lettres, dont nous souffrons tous, d'autre part il permet des économies de papier.

De nombreux documents publicitaires et journaux gratuits sont distribués dans les boîtes à lettre et sur la voie publique. Leur poids est de l'ordre de 50 kg par boîte à lettres et par an en milieu urbain. Ces documents deviennent des déchets ménagers dont la collecte, la valorisation et l'élimination sont à la charge des collectivités locales, donc des contribuables locaux, pour un coût supérieur à 1 000 F la tonne.

Il serait judicieux d'appliquer à ces déchets le principe pollueur-payeur qui est déjà en vigueur pour la valorisation des emballages ménagers.

Seraient toutefois exonérés de cette taxe les organismes non commerciaux à vocation culturelle, religieuse, politique, syndicale, éducative ainsi que l'Etat et les collectivités territoriales.

M. le Président - Cette dernière précision est fort utile car, à défaut, l'Assemblée verrait son budget considérablement amputé.

M. le Rapporteur général - C'est un vrai problème. Un groupe de travail en analyse les enjeux, sous l'égide de Mme la ministre de l'environnement. Le but est d'aboutir à un accord entre les parties mais, à défaut, la proposition de M. Cochet pourrait être appliquée.

Pour l'instant, je souhaite donc le retrait de l'amendement.

M. Jean-Jacques Jegou - Ça fait des années que nous attendons !

M. le Secrétaire d'Etat - Cet amendement vise à créer une taxe qui existe déjà, créée à l'initiative de M. Le Guen à l'article 23 de la loi de finances pour 1998,...

M. Yves Cochet - Ce n'est pas la même !

M. le Secrétaire d'Etat - ...et qui vise les dépenses de réalisation et de distribution des imprimés publicitaires ainsi que les insertions dans les journaux gratuits.

Mieux vaudrait attendre d'en mesurer les effets dissuasifs avant d'en adopter une autre d'autant, en effet, qu'un groupe de travail doit remettre ses conclusions.

M. Gilles Carrez - C'est un excellent amendement. Voilà deux ans que le problème est posé et nos boîtes aux lettres continuent d'être envahies. Tout maire qui met en place une collecte sélective le sait bien : les frais engagés ne sont pas couverts par la récupération. Une taxe nouvelle serait donc bienvenue, surtout si elle a aussi pour effet de modifier les comportements.

M. le Rapporteur général - La question a été abordée il y a peu au Sénat et Mme la ministre de l'environnement a confirmé son souhait qu'un accord soit trouvé au sein du groupe de travail.

M. Michel Bouvard - Voter l'amendement aidera à aboutir à un accord !

M. le Rapporteur général - A défaut, elle nous ferait à coup sûr des propositions, on connaît la vivacité de Mme Voynet... (Sourires).

M. le Président - Mme Voynet n'est pas toujours suivie... (Sourires)

M. le Président de la commission - Cet amendement ne me paraît pas conforme à la Constitution car la loi doit prévoir les modalités de recouvrement de l'imposition. Mieux vaudrait trouver, d'ici la deuxième lecture, une rédaction qui le rende effectivement applicable.

M. Yves Cochet - Cet amendement reprend le principe de celui de M. Le Guen, disposition qui figure déjà dans le TGI. Je ne vois donc pas où est le problème constitutionnel.

Toutefois, si le président de la commission est persuadé qu'une autre rédaction sera adoptée en deuxième lecture, je retire l'amendement 345.

M. Daniel Feurtet - Comme chaque année, nous rappelons que le surloyer appauvrit la vie sociale des grands ensembles en en éloignant des familles qui contribuaient à son équilibre. Il est en outre parfois facteur d'inégalités au sein d'un territoire communal où seuls les périmètres des contrats de villes n'y sont pas soumis. Notre amendement 431 vise donc à supprimer la taxe sur les surloyers.

M. le Rapporteur général - La commission ne l'a pas adopté. Des aménagements ont déjà été prévus dans la loi contre les exclusions et la taxe a un rendement décroissant.

M. le Secrétaire d'Etat - Je comprends le souci de M. Feurtet de préserver la mixité sociale de logements HLM. Mais nous avons diminué peu à peu les surloyers. En outre, il me semble que la disposition proposée serait plus à sa place dans le projet urbanisme, habitat et déplacements que prépare actuellement M. Gayssot. Je souhaite donc le retrait de l'amendement.

M. Daniel Feurtet - J'espère que nous bénéficierons du soutien du ministre du budget lors du débat à venir. Je retire l'amendement 431.

M. Jean-Jacques Jegou - L'amendement 355 est défendu.

M. Michel Bouvard - Le 508 également.

M. le Président - Le 536 a le même objet.

M. le Rapporteur général - Défavorable.

M. le Secrétaire d'Etat - Défavorable.

L'amendement 355, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que les amendements 536 et 508.

M. Gilbert Gantier - Le 148 est défendu.

M. Jean-Jacques Jegou - Le 358 également.

M. le Président - Le 378 est de même esprit.

M. le Rapporteur général - Défavorable.

M. le Secrétaire d'Etat - Défavorable.

L'amendement 148, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que les amendements 358 et 378.

M. Jean-Pierre Brard - L'amendement 484 vise à simplifier et moraliser les modalités de transmission à titre gratuit. Aujourd'hui les détenteurs de patrimoines importants en organisent la transmission anticipée par des stratégies élaborées, conseillés par des fiscalistes qui se rémunèrent au prorata des économies réalisées. Nous proposons de remplacer l'abattement de 300 000 F tous les dix ans par un abattement unique par enfant d'un million. Cela rétablirait une relative égalité entre les contribuables, dont beaucoup ignorent la possibilité de ces donations ou franchise d'impôts de 300 000 F tous les dix ans. La composition même du patrimoine peut d'ailleurs rendre impossible cette opération : pour la grande majorité des Français, le patrimoine se réduit au logement. Les petits patrimoines sont donc pénalisés, alors que les gens plus étoffés peuvent transmettre leurs liquidités sans payer un sou.

M. le Rapporteur général - L'amendement pose un problème de coût ; c'est pourquoi la commission ne l'a pas retenu.

M. le Secrétaire d'Etat - Le coût est en effet de 8 milliards. Défavorable.

M. Jean-Pierre Brard - Il y aurait une solution moyenne. On peut renvoyer à la prochaine loi de finances pour remonter le plafond, mais supprimer l'avantage indigne dont bénéficient les gens bien conseillés. Cet avantage n'a pas encore produit tous ses effets sur les finances publiques, puisque la mesure est récente ; mais cela rend d'autant plus facile sa suppression.

M. le Secrétaire d'Etat - J'y réfléchirai.

M. Jean-Pierre Brard - Je le retire, et je vous proposerai une autre rédaction en deuxième lecture.

L'amendement 484 est retiré.

M. Yves Cochet - L'amendement 340 a pour objet, afin de favoriser les interventions privées dans les domaines de la protection de l'environnement et des animaux, d'exonérer de droits de mutation à titre gratuit les dons et legs consentis à des associations ou fondations reconnues d'utilité publique dont les ressources sont affectées à ces domaines.

M. le Rapporteur général - La commission a accepté cet amendement qu'elle a jugé très bon.

M. le Secrétaire d'Etat - Favorable. C'est le fameux « amendement Cochet » dont on parle depuis trois jours... (Sourires) Le champ est large, l'objet précis, et ce n'est pas trop coûteux. Je lève le gage.

L'amendement 340 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur général - L'amendement 113 est satisfait.

M. Yves Cochet - J'appelle votre attention sur le caractère modéré de l'amendement 327 rectifié. Si l'on veut contrôler les flux de capitaux spéculatifs, il y a beaucoup de méthodes possibles. Nous proposons ici la plus modérée : ce n'est pas le contrôle des changes, ni la non-convertibilité de la monnaie. Il s'agit simplement de créer une taxe, au taux très faible de 0,05 %, pour lutter contre les mouvements spéculatifs de capitaux qui contribuent à l'apparition périodique de bulles financières, sources de graves crises économiques.

J'examinerai quelques arguments qu'on a opposés à cette idée. Tout d'abord, si nous adoptions cet amendement, l'argent fuirait-il massivement la France ? Je n'en crois rien. Supposons qu'un épargnant français décide de placer son argent à Londres. Tout d'abord les succursales françaises de la banque londonienne seront taxées comme les banques françaises. Ensuite, s'il s'agit d'un gros spéculateur, il a peut-être les moyens d'aller à Londres ; mais, taxe Tobin ou pas, les gros capitaux échappent déjà au contrôle et à l'impôt. Il faut donc compter sur l'inertie des mouvements de capitaux des particuliers. Ce ne sont pas ces derniers, mais les fonds spéculatifs et les banques qui font circuler la monnaie. Souvenez-vous des entreprises qui ont tenté de scinder le salaire de leurs cadres supérieurs, pour en verser une partie dans des endroits moins fiscalisés : elles y ont renoncé, parce que c'était trop compliqué à gérer. Depuis 1993 200 milliards d'épargne quittent la France chaque année. Taxe Tobin ou pas, quand le capital veut sortir, il sort.

J'affirme que la taxe Tobin ne fera pas sortir un milliard de plus, et ne détruira pas un emploi en France.

Quelle en serait d'autre part l'incidence en termes de coûts sur les banques en France ? De l'argent spéculatif quittera leurs guichets ; la mini-taxe sera répercutée dans les frais de gestion ; l'incidence sera très faible. En revanche elle sera forte sur les profits spéculatifs des banques en France. En effet ces profits résultent de mouvements rapides. Les banques ne pourront plus spéculer avec tout l'argent de tous les déposants, riches et pauvres. La taxe Tobin est donc plus qu'un symbole : elle dissuadera les banques d'organiser un marché spéculatif. En effet leur marge, leur taux de profit est très faible : elle doivent donc faire circuler des masses énormes de capital. Le 0,05 % ne touchera pas les particuliers, ni l'économie réelle, mais elle pénalisera la spéculation, qui exige des mouvements énormes et rapides.

Certains soutiennent enfin qu'il est impossible de discerner les flux spéculatifs des jeux engendrés par le commerce. C'est faux. Il est possible de savoir si une transaction monétaire correspond ou non à une transaction commerciale. Pour toutes ces raisons je propose, avec une centaine de députés de la majorité, et quelques-uns de l'opposition, l'instauration de cette taxe.

M. Julien Dray - Mon amendement 20 a le même objet. Le débat n'est pas neuf : depuis quelque quatre ans il revient à l'occasion de la discussion budgétaire. La question, qui paraissait il y a quelques années secondaire, est désormais une question d'actualité, portée par de nombreux citoyens, qui ont rejoint certains mouvements militants, par beaucoup de personnalités, et par de nombreux parlements en Europe et dans le monde. La question est désormais débattue dans toutes les capitales européennes ; même le Congrès américain s'apprête à en discuter. C'est dire qu'elle n'est plus marginale. Elle est devenue importante. Car ce qui révolte toutes les opinions publiques, c'est la façon dont s'opère aujourd'hui un certain nombre de mouvements spéculatifs, en jouant sur les différentes monnaies ; mouvements qui échappent à tout contrôle, et mettent à genoux toutes les économies et tous les Etats.

La question est de savoir s'il est possible de résister à cela. C'est le but de mon amendement. Face à l'idée de cette taxe, dite Tobin, différentes positions se sont exprimées. On dit souvent que c'est faisable, mais pas dans un seul pays ; il faut se situer à une échelle plus vaste, par exemple celle de l'Europe. Il est évidemment souhaitable que l'Europe le fasse. Mais pour cela il faut qu'au moins un pays l'ait fait, pour pouvoir servir de référence.

Pour pouvoir porter cette volonté à l'échelle européenne, il faut que la France la mette en place. D'autant plus que dans moins d'un an nous serons dans une monnaie unique, et qu'il faudra organiser la convergence. La France doit avoir déjà quelque chose à défendre. Sinon la négociation sera très difficile, car certains Etats opposeront leur veto, une partie de leur richesse provenant de ces mouvements spéculatifs. Il faut qu'un élément moteur de la construction européenne donne l'exemple. Nous devons donc prendre aujourd'hui une position claire : on ne peut se contenter de renvoyer à l'échelle européenne sans avoir donné l'exemple.

On nous dit d'autre part que nous risquons d'isoler la France sur la scène internationale. Aujourd'hui, les paradis fiscaux existent et les capitaux ont la possibilité de fuir ; mais on ne saurait imaginer que c'est une taxe de 0,05 % qui provoquera cette fuite.

L'argument est d'autant moins recevable qu'il n'y a pas de raison de l'appliquer seulement à la taxe Tobin. On ne l'a pas invoqué pour les 35 heures, et de ce fait, la France va jouer en Europe un rôle moteur dans la réduction du temps de travail.

Tout à l'heure, le ministre de l'économie et des finances faisait remarquer qu'il ne fallait pas seulement redistribuer, mais agir sur la répartition primaire. Il est logique, dans cet esprit, d'intervenir au moment où se fabriquent les profits spéculatifs.

Les agents de change sont d'ailleurs demandeurs de cette moralisation car ils pensent échapper ainsi à la suspicion. Ce serait l'honneur de la France, qui a souvent servi de référence au monde, d'être le premier pays à prendre de telles dispositions.

M. le Président - Sur l'amendement 327 rectifié, le groupe RCV demande un scrutin public.

M. le Rapporteur général - L'amendement 20 ne répond pas à l'exigence constitutionnelle, à savoir définir précisément l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement. La commission l'a repoussé.

L'amendement 327 rectifié n'a pas le même défaut ; néanmoins je ne proposerai pas à l'Assemblée de le retenir.

J'ai relu ce qu'écrivait James Tobin.

M. Jean-Pierre Brard - Qui n'est pas un gauchiste...

M. le Rapporteur général - C'est le moins qu'on puisse dire.

Dans le rapport sur le développement humain de 1994, il expliquait que cette taxe devrait s'appliquer à l'échelle mondiale, avec un taux identique dans tous les pays, faute de quoi, ajoutait-il, on pourrait y échapper en réalisant des transactions dans des zones où la taxe serait inexistante ou plus faible.

M. Bernard Cassen, président d'Attac, a déclaré pour sa part : «C'est au sein de l'Union européenne que le combat pour la taxe Tobin peut actuellement avoir le plus d'impact, non seulement parce que la zone euro pourrait techniquement se constituer sans difficulté en zone Tobin, mais parce que le Gouvernement d'un Etat-membre, la Finlande, a inscrit cette taxe dans son programme». Mais la Finlande, qui a présidé l'Union européenne il y a peu de temps, n'a pas agi en ce sens.

Au Canada, la Chambre des communes a demandé au Gouvernement de décréter une taxe sur les transactions financières, mais de concert avec la communauté internationale.

Bien que nous puissions avancer sur ce sujet, de concert avec nos partenaires européens, la commission propose par son amendement 68 rectifié que le Gouvernement dépose sur le bureau de chaque assemblée parlementaire, avant le 15 juin 2000 -c'est-à-dire juste avant la présidence de l'Union européenne par la France- un rapport comportant une évaluation des pertes de recettes publiques résultant de la concurrence fiscale internationale ; une évaluation de l'incidence que pourrait avoir l'instauration de prélèvements assis sur les mouvements de capitaux pour les finances publiques ; une présentation du programme d'action de la présidence française de l'Union européenne relatif à la régulation internationale des mouvements de capitaux, à la lutte contre la spéculation financière et à la définition de nouvelles modalités de lutte contre la concurrence fiscale dommageable.

M. le Secrétaire d'Etat - Quel que soit l'outil, l'important est de lutter contre les comportements spéculatifs sur les marchés de capitaux et contre les paradis fiscaux. Depuis septembre 1998, la France a pris au niveau international des initiatives concrètes.

Premièrement, nous avons souhaité que soient imposées des contraintes de transparence, notamment sur les fonds spéculatifs dénommés Hedge funds. Le forum de stabilité financière créé par le G7 devrait faire des propositions sur ce sujet.

Deuxièmement, nous avons plaidé pour la mise en place de normes internationales de régulation prudentielle et de lutte contre le blanchiment de l'argent. Le groupe d'action financière internationale et le forum de stabilité financière y travaillent.

Troisièmement, la France, contrairement aux Etats-Unis, soutient les pays émergents dans leur choix du régime de change le plus adapté à leurs besoins.

Quatrièmement, nous approuvons les mesures de régulation prudentielle des mouvements de capitaux prises au Chili, consistant en taxes à l'entrée sur les capitaux à court terme.

Enfin, nous avons contribué à réorienter le FMI vers la prévention de crises spéculatives.

Nous considérons que c'est au niveau international qu'il faut agir, et c'est ce que nous faisons. C'est plus efficace que d'instituer une taxe certes séduisante intellectuellement mais peu réaliste.

Peut-être n'est-il pas nécessaire de couvrir tous les pays de l'ONU, mais commencer dans un seul pays ne serait ni efficace, ni conforme au souhait de M. Tobin lui-même. Outre le fait que l'un des amendements est contraire à la Constitution, ce coup de panache se retournerait probablement contre nous. La France préfère agir que parler, et elle agit au sein de toutes les instances internationales dont elle fait partie : au sein de l'OCDE, par exemple, elle participe à l'élaboration d'un code de bonne conduite et a joué un rôle déterminant dans l'élaboration du rapport sur la concurrence fiscale dommageable, rapport qui invite les pays membres à prendre des mesures de rétorsion contre les paradis fiscaux. C'est pourquoi j'invite l'Assemblée à suivre la direction indiquée par son rapporteur général pour atteindre l'objectif qui nous est commun : la lutte contre la spéculation internationale.

M. le Président de la commission - Nous avons tous la volonté, à gauche au moins (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR), de réguler les mouvements de capitaux et de combattre les paradis fiscaux, auxquels M. Brard a consacré une part importante de ses investigations cette année. A la suite du colloque de l'an dernier, une mission a été confiée à MM. Fuchs et Feurtet pour rechercher les meilleurs moyens d'action, et examiner en particulier si la taxe Tobin en fait partie. Pour ma part, je doute que son instauration sur le seul territoire français pénalise, par exemple, les mouvements de capitaux en Andorre, et il certain que son efficacité serait plus grande si elle s'appliquait à toute la zone euro. Il faut savoir ce que l'on veut : avancer ou faire un coup politique ?

L'an dernier, à propos de la baisse de la TVA, nous étions convenus de tenter de convaincre nos partenaires européens ; nous y sommes parvenus. Nous devons adopter la même démarche aujourd'hui. L'amendement de la commission n'est pas une dérobade : il demande notamment au Gouvernement de nous faire connaître d'ici juin les propositions qu'il entend faire dans le cadre de la présidence française de l'Union européenne.

M. Jean-Pierre Brard - Notre discussion prouve que la question est arrivée à maturation. Que la coopération internationale soit nécessaire, j'en disconviens d'autant moins que j'ai pu mesurer combien l'autorité de la France était grande, grâce à Tracfin notamment, en matière de lutte contre la fraude, mais le problème est de savoir ce qui est nécessaire pour réguler les flux de capitaux, et non ce que souhaiterait M. Tobin, qui ne se situe pas très à gauche, au demeurant, sur l'échiquier politique. Pénaliser n'est pas tout : il faut aussi stabiliser, même George Soros le dit, et il faut surtout savoir quel est le but : dans notre esprit, il ne s'agit pas seulement de nous mettre à l'abri, mais de créer un outil pour le codéveloppement. La France doit mettre à profit la présidence de l'Union européenne pour faire passer ses idées ; elle a l'autorité pour le faire, puisse-t-elle en avoir la volonté !

M. Gilbert Gantier - M. Brard a raison d'être contre la spéculation internationale : je suis contre, moi aussi, comme je suis contre la misère, la maladie, la mort et tout un tas de choses désagréables qu'il faudrait abolir -mais ce n'est malheureusement pas possible. La taxe Tobin est fondée sur les meilleures intentions, mais elle est totalement inapplicable, ne serait-ce que parce que le contrôle des changes n'existe plus en Europe et que nos partenaires n'ont pas la moindre envie de le rétablir. De deux choses l'une, en vérité : ou bien son taux sera faible, comme le proposent les auteurs de l'amendement, et elle sera indolore, donc inopérante, ou bien son taux sera élevé, et elle paralysera l'ensemble des mouvements de capitaux, y compris ceux qui sont utiles au développement de l'économie. En tout état de cause, et comme l'ont fort bien expliqué le rapporteur général et le secrétaire d'Etat, elle n'aura d'effet que si elle est générale ; or, il y a fort à parier qu'une majorité des pays de l'euro n'en voudront pas.

Et même si cette taxe était appliquée dans tous les pays de l'Union, elle n'empêcherait pas que des paradis fiscaux continuent d'exister hors Europe. Aussi me paraît-elle totalement inapplicable. C'est un mythe !

M. Jean-Pierre Brard - Vive le loup dans la bergerie !

M. Jean-Jacques Jegou - La taxe Tobin a le mérite de poser le problème de la stabilité des marchés financiers et de la sécurité des placements des épargnants.

Elle provoquerait toutefois des difficultés considérables d'application. En premier lieu, il serait très difficile de répartir son produit entre les pays. Ensuite, il existe des possibilités d'évasion par des mécanismes d'ingénierie financière : des spéculateurs peuvent ainsi prendre position sur des devises sans passer par le marché des changes. Enfin, l'institution de cette taxe requiert un accord international, long à obtenir et difficile à appliquer.

Par ailleurs, le rendement en est très incertain car la plupart des transactions sur le marché des changes sont des opérations d'arbitrage sans risque visant à améliorer la liquidité du marché.

Comme les principaux contributeurs de cette taxe seraient des investisseurs institutionnels tels que les fonds de pension pour qui elle représenterait une taxe sur l'épargne, elle limiterait l'internationalisation des portefeuilles financiers. La diversification permet pourtant de réduire le niveau de risque de ces derniers sans diminuer leur rendement.

Pour limiter les risques de crise financière, il convient d'améliorer la transparence des marchés financiers et des obligations déclaratives des gouvernements ; dissuader les institutions financières de prendre des risques excessifs ; réduire l'imposition de leurs fonds propres et, parallèlement, ne plus les encourager à s'endetter par le biais d'incitations fiscales ; renforcer les mécanismes de surveillance et de coopération internationale ; enfin, améliorer les régimes de change.

Afin de limiter la propagation des crises internationales, la solution idéale réside dans la coordination sur le plan international des politiques monétaires et budgétaires nationales et régionales.

M. Gérard Fuchs - La régulation des mouvements de capitaux constitue pour une très large majorité de cet hémicycle -et je n'en définirai pas les frontières- un enjeu déterminant de la prochaine décennie. Ou nous allons vers une économie mondialisée gouvernée par les marchés financiers, avec les risques de creusement des inégalités qui s'en suivraient, ou nous décidons que l'économie, fut-elle mondialisée, reste gouvernée par les hommes qui choisissent le type de société qu'ils veulent.

Trois questions-clés. Tout d'abord, la lutte contre les paradis fiscaux -sur ce point, je vous renvoie à l'excellent rapport de notre collègue Jean-Pierre Brard. Cette lutte passe par des pressions, pouvant aller jusqu'à des sanctions. Le gouvernement français a déjà engagé un important travail en ce sens qui pourrait déboucher au niveau du G8 ou d'autres instances internationales.

Ensuite, le rôle des hedge funds, ces fonds spéculatifs qui ont précipité certaines crises, notamment dans certains pays d'Asie où le recul de la croissance s'est accompagné de pertes de richesses et de souffrances sociales inacceptables. Des règles prudentielles strictes devront être fixées pour éviter que de tels phénomènes ne se répètent et le cadre international paraît, là encore, le plus pertinent.

Enfin, la taxe Tobin proprement dit, « ce grain de sable » destiné à gripper les mécanismes des marchés financiers et à réduire la bulle spéculative. La question est de savoir quel doit être son taux minimal et son champ d'application. Je suis rarement en désaccord avec Yves Cochet, mais je ne peux le suivre lorsqu'il défend une taxe qui pourrait n'être appliquée qu'en France. Notre pays fait en effet partie de la zone euro, si bien que nul ne peut empêcher quelqu'un de réaliser ses opérations de change à Londres ou à Francfort plutôt qu'à Paris. Toute taxation, même faible, à Paris seulement risque d'y dissuader les opérateurs, et ce au détriment de notre pays. En revanche, l'idée d'une taxation au niveau européen mérite examen.

Si MM. Cochet, Dray et Sarre acceptaient de sous-amender leur amendement 327 rectifié de façon que la taxe s'applique dans tous les pays européens ou au moins à ceux de la zone euro, je pourrais le voter. Quant à l'amendement 68 rectifié de la commission, il me paraît satisfaisant. Une étude est demandée au Gouvernement français de façon que la prochaine présidence française puisse présenter des propositions en matière de lutte contre les paradis fiscaux et les mouvements spéculatifs, et j'ajoute de taxe Tobin.

M. Gilles Carrez - Voilà plus de vingt ans qu'est née l'idée, très séduisante, de jeter « un grain de sable » dans les rouages afin de freiner les mouvements de capitaux. L'idée est d'ailleurs assez populaire dans le grand public.

Mais ce type de taxe, à supposer qu'il aille de pair avec un accord international assez large, relatif à son taux, son assiette et ses modalités de perception, conduirait-il à coup sûr à une plus grande stabilité ? Ce n'est pas certain. Il n'empêcherait pas par exemple certaines monnaies d'être attaquées et pourrait même constituer un signal supplémentaire. Lors des attaques récentes portées contre le rouble ou le real, ces monnaies ont perdu jusqu'à 50 % de leur valeur. Ce type de taxe n'aurait pas été suffisant pour endiguer le phénomène.

Cela ne suffit pas à en condamner l'idée. La véritable question est de savoir quel est le niveau pertinent d'application. Limitée à la France, cette mesure traduirait du panache mais risquerait bien de n'être que gesticulation. Maintenant qu'il existe une zone euro, mieux vaudrait engager une réflexion au niveau européen pour avoir quelque chance d'efficacité, même si cela ne serait sans doute pas suffisant.

Je ne suis donc pas de ceux qui balaient d'un revers de main l'idée de la taxe Tobin, la jugeant irréaliste. Au contraire, son institution signerait un retour attendu et bienvenu des Etats dans le domaine de la politique monétaire. Elle n'est cependant pas la panacée.

Je me rallie à l'amendement de la commission, sous réserve que l'engagement d'étudier la question avec un réel souci d'aboutir soit tenu.

M. Georges Sarre - Les députés du groupe ATAC se félicitent de ce débat. Si nous sommes dans l'ordre du symbolique, nous n'en avons pas moins apporté une réponse adaptée à une question capitale. Comme l'a dit M. Fuchs, il faut qu'une première étape soit franchie sous l'impulsion d'un pays. Mais nous sommes tout à fait favorables à une deuxième étape, dans laquelle la taxe Tobin serait mise en _uvre à l'échelle de l'Union européenne.

Sous bénéfice d'inventaire, nous sommes favorables à l'amendement de la commission, mais nous proposons un sous-amendement de manière à mieux distinguer ce qui relève de la responsabilité de la représentation nationale et ce qui consiste en un appel au Gouvernement pour poursuivre l'action dans le cadre européen.

M. le Président - Sur un amendement de cette importance, il ne me semble pas de bonne méthode de proposer des sous-amendements oraux. Je ne puis donc accepter le sous-amendement que vient d'évoquer M. Sarre.

M. Yann Galut - Le dépôt par 110 parlementaires d'un amendement inspiré par le groupe ATAC aura permis la prise de conscience collective de l'opportunité de taxer la spéculation financière.

Je partage l'objectif de l'amendement 68 rectifié de la commission, mais je suis en désaccord sur la méthode. Le souci d'efficacité devrait nous conduire à un vote symbolique, tendant à porter la lutte contre la spéculation financière à l'échelle mondiale.

Sans dimension internationale, la taxe Tobin n'a pas d'avenir. Mais si, après le Canada, la France votait son instauration, cela aurait un effet d'entraînement, au moment où plusieurs parlementaires américains s'interrogent.

Si je rejoins la proposition de M. Fuchs d'examiner en deuxième lecture la manière dont la taxe Tobin pourrait être étendue à l'échelle européenne, je souhaiterais avoir l'engagement du Gouvernement que le débat sera bien porté à ce niveau dès juin 2000.

Mme Béatrice Marre - La taxation des mouvements de capitaux doit être introduite le plus rapidement possible. Cependant, les amendements de MM. Cochet et Migaud ne me semblent pas compatibles. Si, dans le cadre de la présidence française, l'on souhaite porter le débat au niveau de la zone euro puis des Quinze, il n'est pas envisageable de faire l'affront à nos partenaires de la voter un an avant. J'ai été sensible à l'idée qu'il fallait donner du « souffle » et les références de M. Dray à François Mitterrand me vont droit au c_ur.

Dans ce sens, je propose de compléter l'amendement 68 rectifié en ajoutant, à la fin du dernier paragraphe « un dispositif du type de la taxe Tobin ».

Le texte gagnerait ainsi un peu de souffle sans pour autant faire injure à nos partenaires européens.

M. le Secrétaire d'Etat - M. Galut a parlé d'un débat symbolique, qui constitue un acquis important, y compris pour le Gouvernement. Mais ce débat symbolique ne doit pas déboucher sur un vote symbolique. Dans le cadre du débat budgétaire, votre assemblée doit exprimer un vote actif, c'est pourquoi je vous propose d'adopter l'amendement actif de la commission. Cet amendement demande au Gouvernement de déposer, avant le 15 juin 2000, de manière à préparer dans les meilleures conditions la présidence française, un rapport comportant trois éléments essentiels : un diagnostic des pertes de recettes résultant de la concurrence fiscale internationale, une évaluation de l'incidence que pourrait avoir l'instauration de prélèvements assis sur les mouvements de capitaux pour les finances publiques, et enfin, une présentation du programme d'action de la présidence française.

A la majorité de 31 voix contre 11 sur 55 votants et 42 suffrages exprimés, l'amendement 327 rectifié n'est pas adopté.

L'amendement 20, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 68 rectifié, mis aux voix, est adopté..

M. Daniel Feurtet - L'amendement 445 est défendu.

M. le Rapporteur général - Avis favorable.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis.

L'amendement 445, mis aux voix, est adopté.

M. Gilbert Gantier - Il semble anormal que le taux des intérêts de retards pour les contribuables reste fixé à 0,75 % par mois, soit 9 % par an, taux qui n'est plus pratiqué par aucune banque. L'amendement 182 corrigé propose donc de s'en tenir au taux d'intérêt légal.

M. le Président - Le rapporteur général va sans doute répondre qu'il suffit au contribuable de payer ses impôts à temps pour éviter les intérêts de retard...

M. le Rapporteur général - Avis défavorable.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis défavorable. Les taux d'intérêts de retard dans les banques sont supérieurs à 9 %. Il ne faudrait pas que les contribuables gagnent à ne pas payer leurs impôts...

Les amendements 115 et 182 corrigé, mis aux voix, ne sont pas adoptés, non plus que les amendements 364, 363 et 362.

L'amendement 323, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Jacques Jegou - Nous attachons une grande importance à l'amendement 468 mais compte tenu du débat que nous avons déjà eu sur l'actionnariat salarié, je ne développe pas davantage.

M. le Rapporteur général - Avis défavorable.

Un mot sur l'organisation de nos débats. Nous pouvons interrompre maintenant la discussion et reprendre lundi mais si nous poursuivons maintenant j'aimerais que l'on n'expédie pas trop vite un certain nombre de sujets importants pour lesquels un débat s'impose.

M. le Président - Je n'ai pas l'impression que l'on expédie les sujets essentiels.

M. le Rapporteur général - Je crains que cela commence...

M. le Président - C'est M. Jegou lui-même qui n'a pas souhaité développer bien qu'il juge son amendement important.

M. Michel Bouvard - Deux ou trois sujets comme la TGAP ou la FITTVN mériteront encore un vrai débat, sur d'autres articles et amendements, nous pouvons aller plus vite. Mais, au regard du temps déjà passé à débattre, il me semble exclu que nous achevions ce débat cette nuit, même en allant jusqu'à 7 ou 8 heures. Mieux vaudrait avancer encore un peu et revenir lundi soir.

M. le Secrétaire d'Etat - Je suis à votre disposition. Je propose d'avancer encore un peu et de voir s'il est possible de finir.

M. Jean-Jacques Jegou - Avec l'habitude de 14 lois de finances, je vois bien que nous ne finirons pas. Essayons d'avancer afin de ne siéger que de 21 heures à minuit lundi.

M. Jean-Pierre Brard - Finissons l'examen des amendements après l'article 24 et faisons la pause syndicale avant de reprendre tranquillement lundi.

M. le Président - Il est difficile de calibrer notre discussion de 21 heures à minuit lundi.

M. le Rapporteur général - Il faut un consensus pour poursuivre. Si deux ou trois groupes ne le souhaitent pas, ce n'est pas possible.

M. le Président - Je me vois mal continuer tout seul... (Sourires)

L'amendement 468, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Brard - Mon amendement 439 porte à nouveau sur la fraude ou sur ce que l'on appelle, plus délicatement, la compétition fiscale dommageable.

Il est difficile pour un simple parlementaire d'apporter des preuves, des simulations, des projections, et par conséquent de faire avancer ses idées. Cependant, je suis convaincu que certains mécanismes favorisant la concurrence fiscale dommageable doivent être supprimés de notre législation. Tel est le cas de la déductibilité des intérêts d'emprunt contractés pour l'acquisition de participations. Ces mécanismes sont clairement identifiés ; j'ai tenté d'en établir la liste, certes non exhaustive, dans mon rapport.

Pourtant, il semble nécessaire d'approfondir la question avant de passer à une phase plus opérationnelle, afin que tous les acteurs de la lutte contre la fraude soient convaincus du bien-fondé de ces propositions. C'est pourquoi je propose que le Gouvernement remette à notre Assemblée avant le 1er octobre 2000 un rapport sur son action nationale et internationale contre la compétition fiscale dommageable, notamment au sein de l'Union européenne.

M. le Rapporteur général - M. Brard a eu satisfaction par avance avec l'adoption de l'amendement 68 rectifié aux termes duquel le Gouvernement déposera avant le 15 juin 2000 -c'est mieux que le 1er octobre !- un rapport comportant notamment une présentation du programme d'action de la présidence française de l'Union européenne relatif à la régulation internationale des mouvements de capitaux, à la lutte contre la spéculation financière et à la définition de nouvelles modalités de lutte contre la concurrence fiscale dommageable.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis.

M. Jean-Pierre Brard - Je retire l'amendement 439.

L'article 25 est adopté.

ART. 26

M. le Rapporteur général - L'amendement 61 corrigé est rédactionnel.

M. le Secrétaire d'Etat - Favorable.

L'amendement 61, mis aux voix, est adopté et l'article 26 est ainsi rédigé.

APRÈS L'ART. 26

M. Jean-Jacques Jegou - L'amendement 495 a déjà été repoussé.

M. le Président - En effet.

M. Michel Bouvard - Notre amendement 492 vise à supprimer le prélèvement effectué sur les impôts locaux pour financer la révision des bases locatives. Ce travail ayant été effectué depuis longtemps, les frais engagés par l'Etat sont sans doute largement amortis.

M. le Rapporteur général - Défavorable.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis.

M. Michel Bouvard - Pourquoi ? Cette taxe n'a pas vocation à être prélevée jusqu'à la fin des temps...

M. le Secrétaire d'Etat - L'Etat prend en charge une part croissante des dégrèvements : elle est passée, je crois, de 23 à 60 milliards en dix ans. Il n'y a évidemment pas de lien mécanique entre les deux, mais enfin l'Etat fait beaucoup pour les collectivités locales, et je trouve un tantinet mesquin de gratter ce 0,4 %...

L'amendement 492, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Gilles Carrez - L'amendement 418 est défendu.

L'amendement 418, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 27, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 27

M. le Secrétaire d'Etat - La question a été débattue de savoir si la TGAP était du côté de l'Etat ou de la Sécurité sociale. Il est clair qu'elle est désormais de ce second côté, et figure au projet de loi de financement. Mais, eu égard aux scrupules de certains parlementaires, l'amendement 346 du Gouvernement explicite ce transfert, vous assurant ainsi la sécurité juridique.

M. le Rapporteur général - La commission l'a accepté. Il répond aux remarques formulées par le président de la commission des finances et moi-même, ainsi que certains membres de l'opposition, sur la question de savoir quel texte pouvait servir de support à l'affectation de la TGAP aux allégements de charges sociales.

M. Gilles Carrez - Je me réjouis que le Gouvernement dépose cet amendement. J'ai souligné dans mon exception d'irrecevabilité que la TGAP existait déjà, et figurait au budget de l'Etat en 1999. Dès lors, même si elle est étendue, elle ne peut être transférée au budget de la Sécurité sociale sans qu'il y ait une disposition d'affectation. Son extension, en effet, n'en fait pas pour autant un impôt nouveau, qu'on pourrait inscrire directement au projet de loi de financement.

M. le Président de la commission - Monsieur Carrez, vous exagérez un petit peu. Reconnaissez-le honnêtement : dès que le présent projet a été présenté à la commission, j'ai moi-même soulevé ce problème. Avec le rapporteur général, nous avons écrit une lettre pour dire que nous souhaitions conserver l'universalité budgétaire, et que donc le transfert de la TGAP à la Sécurité sociale devait être voté en loi de finances. Et tout cela parce que notre collègue Yves Tavernier a fait un rapport et nous a alertés à ce sujet. N'attribuez donc pas à votre exception d'irrecevabilité le dépôt de l'amendement du Gouvernement.

L'amendement 346, mis aux voix, est adopté.

ART. 28

M. le Rapporteur général - L'amendement 62 de la commission concerne le régime de la taxe sur les huiles affectée au BAPSA, et supprime une clause d'indexation sur l'inflation constatée, qui laissait un degré de liberté trop important au pouvoir réglementaire.

M. le Secrétaire d'Etat - Acceptation enthousiaste (Sourires).

L'amendement 62, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur général - L'amendement 552 rectifié est rédactionnel.

L'amendement 552 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 28, modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 28

M. le Secrétaire d'Etat - L'amendement 535 du Gouvernement a pour objet de revaloriser les retraites agricoles : il s'agit de relever à nouveau les montants des minima de pensions garantis. La mesure devrait concerner 740 000 retraités, dont la majorité pourra atteindre 2 400 francs pour une carrière complète en agriculture. Son coût est d'environ 1 milliard. Elle sera financée par le BAPSA, grâce à l'inscription d'une recette d'un milliard de la CSSS s'ajoutant aux crédits déjà inscrits.

M. le Rapporteur général - La commission a accepté cet amendement des deux mains. Le Gouvernement veut reconduire en 2000 le prélèvement d'un milliard sur la CSSS au profit du BAPSA pour financer une mesure nouvelle de revalorisation des retraites agricoles, qui sera proposée en deuxième partie.

L'amendement 535, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Jacques Jegou - Les trois groupes de l'opposition souhaiteraient que nous suspendions nos travaux.

M. le Président de la commission - En ce cas nous devrons reprendre lundi à 16 heures. Mieux vaudrait poursuivre, pour être certains de pouvoir finir lundi soir, d'autant que nous ne pourrons alors dépasser une heure du matin.

M. Michel Bouvard - En effet, car le débat sur l'OMC est prévu mardi matin. Mais nous sommes assez responsables et familiers du débat budgétaire pour faire en sorte que tout soit fini dans les délais lundi.

ART. 29

M. Gilles Carrez - Les amendements 502 et 118 tendent à supprimer cet article, qui transfère les droits sur le tabac, pour un montant de 42,5 milliards, sur la loi de financement, avec différentes affectations. La principale, pour 39,5 milliards, est le fonds de réforme des cotisations patronales. Le solde se répartit entre la CNAM et un fonds pour la retraite anticipée des travailleurs de l'amiante.

Nous contestons le principe même d'une débudgétisation d'un montant aussi considérable. On a transféré dans le passé les droits sur l'alcool, mais le montant était sans commune mesure. Vous vous engagez là dans une direction dangereuse. En effet, vous maîtrisez la gestion du budget de l'Etat -quoi qu'on pense des orientations que vous lui donnez. Il n'en va pas de même de la loi de financement. Nous sommes très inquiets, quand nous nous rappelons les rebondissements des dernières quarante-huit heures où, face à une impasse de financement pour le fonds de réforme des cotisations patronales -l'UNEDIC semblant réfractaire- on a vu fleurir les hypothèses les plus disparates : un supplément de cotisations générales, un prélèvement sur les excédents de la caisse des accidents du travail, que sais-je encore. En aliénant votre responsabilité budgétaire, Monsieur le ministre, vous faite courir de graves risques au budget de l'Etat.

Se pose en outre un problème de clarté, de lisibilité. Le budget de l'Etat est marqué par l'universalité : les financements sont affectés à l'ensemble des dépenses. Jusqu'à présent, sans qu'il y ait affectation particulière, il se trouvait qu'un montant voisin de la recette des droits sur les tabacs était inscrit en dépenses pour financer la ristourne dégressive de M. Juppé, c'est-à-dire l'abaissement du coût du travail pour les salaires inférieurs à 1,3 SMIC.

Ces 40 milliards vont aller au fonds de réforme des cotisations patronales, mais celui-ci interviendra de deux manières radicalement différentes : par les réductions du coût du travail indépendantes de la réduction du temps de travail et par celles qui sont liées au passage aux 35 heures. La conséquence en sera un manque de lisibilité, totalement contraire aux principes de la MEC.

M. Jean-Jacques Jegou - Je défends les amendements 195 et 313. Nous considérons que cet article est contraire aux principes de l'unité et d'universalité du budget de l'Etat, qu'il contribue à démanteler, ainsi qu'à l'ordonnance du 2 janvier 1959.

M. le Rapporteur général - La commission a repoussé ces amendements. L'article 29 découle de la volonté du Gouvernement de proposer une réforme tendant à alléger les charges patronales sur les bas et moyens salaires. La solution retenue, consistant à faire appel à un établissement public, sur le modèle du Fonds de solidarité vieillesse, ne saurait être contestée puisque le principe de spécialité des établissements publics est parfaitement respecté ; de plus, elle assure la transparence puisque tous les versements au profit de la Sécurité sociale relatifs à des allégements de charges sociales seront effectués par le fonds, à l'exception des dépenses relatives à la loi de Robien -exception qui se justifie par l'extinction programmée du dispositif.

L'absence de lien entre les droits sur les tabacs et la réforme des cotisations sociales patronales ne constitue pas une objection dominante : en d'autres temps, les droits sur les alcools ont fait l'objet d'une affectation au Fonds de solidarité vieillesse.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Fonds de solidarité vieillesse ne constitue pas le seul précédent ; à la suite des lois de décentralisation, 20 milliards de droits de mutation à titre onéreux, 10 milliards de vignette et 5 milliards de taxe sur les cartes grises ont été transférés aux départements et régions.

Par ailleurs, l'Etat transfère en même temps les ressources et les charges. En conséquence, avis défavorable.

M. Yves Cochet - Une solution pour éviter que le fonds ait deux usages différents serait de fixer au 1er janvier 2001, par exemple, la date à laquelle les entreprises ne pourront plus bénéficier de la ristourne Juppé. Ce serait une incitation forte à passer aux 35 heures.

Les amendements 502, 118, 195 et 313, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Rapporteur général - L'amendement 63 vise à préciser que l'une des ressources du fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante est constituée d'une fraction du produit du droit sur les tabacs. Je le retirerai si le Gouvernement confirme son intention de déposer un amendement à vocation similaire sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale.

M. le Secrétaire d'Etat - Je confirme.

L'amendement 63 est retiré.

M. le Secrétaire d'Etat - Les amendements 521, 522 et 523 tendent à supprimer la référence à des plafonds ; mieux vaut s'en tenir à des pourcentages.

M. le Rapporteur général - La commission a accepté ces amendements, qui visent à supprimer les plafonds fixés pour l'affectation du droit de consommation sur les tabacs respectivement au fonds de financement de la réforme des cotisations patronales, à la CNAM au titre du financement de la protection complémentaire de la CMU et au fonds de financement de la cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante.

L'amendement 64 vise à rétablir l'harmonie lexicale entre le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, s'agissant de l'appellation du fonds destiné à financer les allégements de charges sociales.

M. le Secrétaire d'Etat - Favorable.

M. le Président de la commission - Je fais observer qu'avec la suppression de ce plafonnement, le gage « tabacs » ne pourra plus être utilisé que pour les pertes de recettes de la Sécurité sociale, mais non dans les projets de loi de finances...

M. le Secrétaire d'Etat - Quel bouleversment !

L'amendement 521, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 64, mis aux voix, est adopté.

Les amendements 522 et 523 sont adoptés.

L'article 29 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 29

M. le Rapporteur général - La commission n'a pas accepté l'amendement 463 de M. Recours, sans pour autant remettre en question la légitimité d'une augmentation du prix du tabac. Le Gouvernement doit engager prochainement les consultations des producteurs pour connaître leurs intentions. L'Assemblée pourra réexaminer cette question à l'occasion du prochain collectif.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis.

L'amendement 463, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jérôme Cahuzac - Mon amendement 24 a pour but de modifier les conditions dans lesquelles les fournisseurs de tabacs restituent à l'Etat les droits qu'ils perçoivent.

Est-il coûteux ? Non. Est-il anticommunautaire ? Non. Mettons-nous en péril la trésorerie des détaillants et des buralistes ? Non.

Trois décrets précisent sans ambiguïté les conditions dans lesquelles les fournisseurs doivent leur faire crédit. Ces derniers seraient-ils eux mêmes fragilisés ? Nous savons tous que leur santé financière est au contraire florissante : le bénéfice avant impôt de la SEITA est compris entre 7 et 8 milliards. Et si d'aventure le Gouvernement faisait valoir la nécessité de mener une expertise technique pour savoir comment l'Etat pourrait utiliser cette facilité de trésorerie de quelque 3 milliards, je ne comprendrais pas qu'il m'oppose le même argument l'an prochain...

Il serait abusif, enfin, d'appeler cet amendement « amendement anti-SEITA », même si je connais les relations historiques, culturelles, endogamiques qui ont existé entre cette société et le ministère des finances, et qui ne sauraient perdurer aujourd'hui entre des dirigeants ayant abandonné toute idée du service public et des fonctionnaires qui, eux, y sont restés attachés...(« Très bien ! » sur les bancs du groupe communiste)

M. le Rapporteur général - La commission n'est pas insensible aux vraies questions posées par cet amendement, mais les termes dans lesquels son auteur les a formulés m'obligent à lui répondre d'une façon moins satisfaisante qu'il ne le souhaite. Je suis incapable de dire avec certitude quelles conséquences le vote de l'amendement entraînerait pour les détaillants, mais il semble qu'il en aurait.

M. Jérôme Cahuzac - Le décret dit le contraire !

M. le Rapporteur général - Dans la pratique, il semble que les délais accordés soient supérieurs à ceux prévus par les textes.

M. Jérôme Cahuzac - C'est interdit !

M. le Rapporteur général - C'est pourquoi la commission a émis des réserves, qui sont susceptibles d'être levées par la réponse du Gouvernement, mais qui l'ont empêchée d'accepter l'amendement.

M. le Secrétaire d'Etat - Cet amendement a un objet précis, auquel M. Cahuzac a donné un arrière-plan quelque peu désagréable. Le délai actuel, de 50 jours, se partage inégalement entre les débitants, pour la fraction la plus grande, et la SEITA, pour la plus petite. S'il était abaissé à 20 jours, il ne pourrait pas ne pas y avoir de répercussions sur les débitants, étant donné que le délai de trésorerie de la SEITA est inférieur à 20 jours. La SEITA est une entreprise française importante, à laquelle l'Etat ne saurait rester indifférent, car il est bon qu'existe dans ce secteur une société non susceptible d'être rachetée par un grand groupe anglo-saxon.

M. Michel Bouvard - L'opposition n'est pas favorable à l'amendement, car il créera des difficultés aux débitants. Si les gros détaillants urbains peuvent supporter, pour la plupart, le décalage de trésorerie qui en résultera inévitablement, nous ne devons pas prendre le risque de faire disparaître ces petits bureaux de tabac ruraux qui, bien souvent, font également office d'épicerie, de bistrot, et sont le seul lieu d'animation et de convivialité du village.

M. Jérôme Cahuzac - Ni les cosignataires de l'amendement ni moi-même n'entendons en aucune façon mettre en péril les buralistes, même si nous n'avons pas la même appréciation que vous de l'effet des conditions de crédit. Par ailleurs, je n'ai pas tenu de propos déplaisants à l'égard de la direction du budget : j'ai dit au contraire que les relations entre elle et la SEITA, qui ont existé naguère, ne sauraient exister aujourd'hui...

M. le Président - Ce n'était pas désagréable : c'était perfide... (Sourires)

M. Jérôme Cahuzac - Afin qu'il ne soit pas dit que nous ayons aggravé la situation de deux bassins de vie déjà saccagés par les décisions de dirigeants irresponsables de la SEITA, je retire notre amendement.

L'amendement 24 est retiré.

M. Jean-Jacques Jegou - La sagesse commande que nous interrompions nos travaux pour les reprendre lundi à 21 heures, car des points importants restent à traiter, et nous sommes quelques-uns, depuis plusieurs jours, à n'avoir dormi que trois heures par nuit. Nous nous engageons à faire en sorte lundi que l'article d'équilibre puisse être voté dans les délais constitutionnels.

M. le Président - Si nous devions renvoyer la suite de la discussion à lundi, conviendrait-il de siéger également l'après-midi ?

M. le Secrétaire d'Etat - Il ne reste qu'une trentaine d'amendements à examiner. J'ai entière confiance dans la parole des quatre représentants de l'opposition ici présents, mais il ne serait pas responsable de courir le risque, en ne reprenant que lundi à 21 heures, qu'un incident nous empêche de terminer dans les délais. Si nous devions nous interrompre maintenant, ce que je ne souhaite pas, il faudrait que nous siégions lundi après-midi.

M. le Rapporteur général - Je suis à la disposition de l'Assemblée. Je partage toutefois l'avis du ministre : si nous reprenons nos travaux lundi, il faut le faire dès 18 heures.

M. le Secrétaire d'Etat - Si nous convenons de terminer nos travaux maintenant, je m'engage à ce que les ultimes ajustements ne prennent pas plus d'une demi-heure.

M. le Président de la commission - L'examen de la première partie du budget se termine presque toujours à huit heures du matin. L'opposition d'aujourd'hui est aussi résistante que nous le fûmes.

M. Jean-Louis Idiart - N'oublions pas que la commission des finances se réunit aussi lundi soir. Tout en conservant un rythme normal, nous pouvons terminer nos travaux ce matin.

M. Jean-Jacques Jegou - L'opposition a fait preuve de beaucoup de responsabilité tout au long de ce débat. C'est plutôt la majorité plurielle -qui, montrant qu'elle est vraiment plurielle, a allongé les débats. Nous avons attendu plus d'une heure cet après-midi que vous vous mettiez d'accord sur les stock-options. Je ne parle même pas du débat que nous venons d'avoir sur la taxe Tobin !

Je crois que nous devons impérativement libérer l'hémicycle au plus tard à 8 heures.

M. le Président - Non le Parlement mondial des enfants se réunit demain à Versailles.

M. Jean-Jacques Jegou - Nous pourrions parfaitement boucler nos travaux en trois heures lundi soir, l'opposition peut même s'y engager.

M. le Président - Je propose de suspendre la séance pour que vous puissiez vous concerter.

La séance, suspendue samedi 23 octobre à 4 heures 50, est reprise à 5 heures.

M. Yves Cochet - L'amendement 332 est défendu.

L'amendement 332, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur général - L'amendement 65 est rédactionnel.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis favorable.

L'amendement 65, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Jacques Jegou - Je défends nos amendements 317 et 318.

La loi de finances pour 1999 a réorganisé la taxation sur les locaux à usage de bureaux en Ile-de-France, en l'étendant aux locaux commerciaux et aux locaux de stockage, ainsi qu'en augmentant ses tarifs. La justification était de préserver durablement la capacité d'intervention financière de l'Etat dans cette région. Or, dans le projet de budget pour 2000, l'article 30 propose de clore le compte d'affectation spéciale -FARIF- et d'en reverser le montant au budget général de l'Etat, qui reversera la moitié des sommes au maximum à la région Ile-de-France.

Il n'est pas normal que la région Ile-de-France vienne alimenter le budget général sans tirer aucun bénéfice supplémentaire. Par ailleurs, l'élargissement de la taxe a provoqué le ralentissement immédiat de l'activité en Ile-de-France, notamment dans l'Est parisien.

C'est pourquoi il est proposé qu'à défaut de supprimer cette taxe, la totalité des recettes soit affectée à la région Ile-de-France afin d'y améliorer les conditions de vie.

M. le Rapporteur général - Avis défavorable. La suppression du FARIF ne se fait pas au détriment de la région Ile-de-France.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis.

L'amendement 317, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l'amendement 318.

L'article 30 modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 31

M. Jean-Jacques Jegou - Cet article, que l'amendement 319 vise à supprimer, propose la création d'un « fonds national de l'eau », divisé en deux sections : développement des adductions d'eau et solidarité pour l'eau. Ce nouveau fonds est abondé par un nouveau prélèvement de solidarité, qui est versé par les agences financières de bassin à l'Etat. »

Ce prélèvement est un nouvel impôt sur l'eau, qui se répercutera sur les consommateurs.

Eu égard au prix de l'eau d'une part et aux efforts des collectivités locales pour en améliorer la qualité, cette évolution n'est pas souhaitable.

M. le Rapporteur général - Avis défavorable. Le fonds national de l'eau renforcera les moyens d'intervention de l'Etat pour mener une véritable politique de l'eau. Sa création n'aura pas d'incidence sur les prix supportés par les consommateurs. Les agences de l'eau ne seront pas davantage mises en difficulté par le prélèvement à hauteur de 500 millions, qui se substitue à deux fonds de concours de 250 millions. Elles disposent de surcroît de réserves de trésorerie. Ces nouvelles modalités tendent enfin à rétablir les prérogatives du Parlement en créant des comptes d'affectation spéciale sur lesquels il se prononcera chaque année, de même qu'il statuera sur le prélèvement.

M. le Secrétaire d'Etat - La deuxième section ainsi financée par le fonds national de l'eau permettra de promouvoir des actions de solidarité. J'ajoute que l'évolution à été négociée avec les agences de l'eau et qu'elle a fait l'objet d'une large adhésion. Avis défavorable.

M. Michel Bouvard - Le Gouvernement fait état de l'accord des agences. J'ai interrogé l'agence Rhône-Méditerranée-Corse qui m'a rapporté qu'elle et ses homologues avaient eu le sentiment d'être victimes d'un marché de dupes.

Notre inquiétude n'est pas liée au renforcement des moyens de contrôle du Parlement mais au fait que les réserves des agences soient entamées. Or, leurs dépenses d'investissement s'alourdissent.

Des opérations de mise en conformité aux normes européennes doivent intervenir, en matière d'assainissement notamment. Il est donc malvenu d'introduire une incertitude sur leurs capacités d'intervention. Les agences fonctionnaient bien. Quel est l'intérêt de cette modification des règles ?

L'amendement 319, mis aux voix, n'est pas adopté

M. le Rapporteur général - L'amendement 465 est rédactionnel.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis favorable.

L'amendement 465, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Jacques Jegou - L'amendement 516 est défendu, de même que l'amendement 474, qui est rédactionnel, et que l'amendement 515.

M. le Rapporteur général - La commission a émis un avis défavorable sur l'amendement 516, favorable sur l'amendement 474, et défavorable sur le 515.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis.

L'amendement 516, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 474, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 515, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Président - L'adoption de l'amendement 474, qui substitue aux « agences financières de bassin » l'appellation « agences de l'eau » entraîne une modification du tableau de la page 80 du projet de loi de finances pour 2000.

L'article 31 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 31

M. le Secrétaire d'Etat - L'amendement 549 du Gouvernement est relatif au sport. L'article 19 du projet de loi que présentera Mme Buffet en vue de modifier la loi du 16 juillet 1984 dispose qu'il sera instauré une contribution sur les retransmissions audiovisuelles de manifestations sportives, assise sur les rémunérations perçues par les organisateurs au titre de la cession de leurs droits de diffusion.

La mesure permettrait une mutualisation d'une partie des recettes provenant des contrats signés par les fédérations sportives et de favoriser le développement des associations sportives locales et la formation de leurs animateurs.

Elle entrerait en vigueur le 1er juillet 2000, soit pour la prochaine saison sportive. Le taux de 5 % garantirait un rapport de 150 millions en année pleine.

Le produit de la taxe serait affecté au FNDS qui est cogéré par l'Etat et par un conseil de tutelle regroupant les représentants des activités sportives.

Ainsi établira-t-on une certaine égalité entre les ressources des fédérations les plus riches et celles qui sont parfois plus présentes sur le terrain mais qui ont moins de moyens car leur sport est moins télégénique.

M. le Rapporteur général - La commission n'a pas examiné cet amendement et je le déplore car il n'est jamais bon d'attendre le dernier moment pour déposer des amendements d'une telle importance.

Son principe avait toutefois été annoncé par la ministre des sports dans la perspective de la modification de la loi de 1984. Il sera très utile à certaines fédérations sportives puisqu'il rapportera 150 millions en année pleine et 75 millions l'an prochain.

La commission lui aurait sans doute réservé un accueil favorable.

M. Michel Bouvard - Nous découvrons cet amendement intéressant qui apportera une contribution utile au sport grâce à un prélèvement sur les sommes très importantes dégagées par les droits sur les retransmissions sportives.

Je me réjouis que vous ayez indiqué, Monsieur le ministre, que contrairement à ce qu'a craint un temps le mouvement sportif, le FNDS continuera à être cogéré.

Je profite de cette occasion pour regretter une fois encore que les chaînes publiques ne remplissent pas l'obligation qui leur est faite par leur cahier des charges de diffuser certains sports. Ainsi, depuis plusieurs années, le ski n'a plus l'honneur des retransmissions en direct et, du coup, la fédération internationale menace de priver la France de l'organisation de compétitions. Je souhaite que le Gouvernement se saisisse de ce problème.

M. Jean-Jacques Jegou - Je découvre aussi cet amendement, dont nous avions toutefois entendu parler par les médias...

Je me félicite néanmoins de cette mesure même si la somme ainsi dégagée me semble insuffisante pour aider efficacement les clubs amateurs qui en ont grand besoin, d'autant qu'ils sont souvent laissés en abandon par les fédérations riches. Il est ainsi scandaleux que la Fédération française de football laisse les communes faire les efforts nécessaires pour accueillir les enfants de nos banlieues, alors que certains joueurs gagnent plus d'un million par mois et, surtout, que leurs agents se livrent à un véritable trafic d'esclaves tout aussi scandaleux que les stock-options de M. Jaffré... Il faudrait vraiment que Mme Buffet regarde cela de près !

Si cet amendement astucieux aide quelque peu les bénévoles qui se dépensent sans compter, je ne peux que m'en réjouir.

M. Henri Nayrou - Je découvre également cet amendement fort bienvenu, d'autant que les droits de retransmission du championnat de football ont été triplés à mi-parcours pour atteindre 2 milliards par an. Toujours en haut de l'échelle, Anelka, gamin de 20 ans, a été transféré d'Arsenal au Real Madrid pour 200 millions, somme qui rappelle le magot de M. Jaffré. En bas de l'échelle, c'est la misère et, faute de moyens, de nombreux clubs ne peuvent accueillir les jeunes attirés par un titre de champion du monde.

En matière budgétaire, le Gouvernement a tenu ses engagements et les crédits du sport continuent d'augmenter. Le FNDS actuel dispose de 1,14 milliards, mais il est surtout voué au soutien des activités. Les clubs professionnels auraient pu décider d'eux-mêmes une péréquation logique au regard de l'utilité sportive et sociale des petits clubs. C'est bien parce qu'ils ne l'ont pas fait que le Gouvernement nous propose cette mesure. On peut aussi utiliser le Fonds Sastre provenant des recettes de la Coupe du monde, mais il n'y a pas de Coupe du monde tous les ans...

C'est bien pour pérenniser ce fonds que Marie-Georges Buffet a eu l'idée d'instituer cette taxe dont le produit permettra de soutenir les sports les plus pauvres, en particulier au sein des petits clubs. Ils ne vont pas s'en plaindre.

Bien sûr, les gros clubs, les grosses fédérations qui font le spectacle, qui font monter les enchères auprès des diffuseurs télé et qui tirent le sport vers le haut vont crier au hold-up, insister sur la distorsion avec leurs concurrents européens. Il conviendra de leur rappeler que la cohésion et la solidarité ont un prix qu'ils acquittent avec le produit d'une excellence qui appartient à tout le monde. Qu'ils songent aussi que nous venons de voter un statut des clubs sportifs qui va leur permettre de distribuer des dividendes. Qu'ils sachent enfin que ce soutien apporté aux petits clubs profitera aussi, au bout du compte, au sport professionnel et qu'il irriguera au lieu de l'assécher.

Pour toutes ces raisons, je voterai cet amendement en souhaitant aussi que la France batte l'Argentine dimanche (Applaudissements sur tous les bancs).

L'amendement 549, mis aux voix, est adopté.

L'article 32, mis aux voix, est adopté.

ART. 33

M. Gilles Carrez - Les amendements 119 et 459 tendent à supprimer cet article. Celui-ci accroît de 12 % la taxe prélevée sur les sociétés autoroutières pour alimenter le FITTVN. Les quelques parlementaires, dont je suis, qui ont eu la chance de participer aux travaux de la mission d'évaluation et de contrôle, ont étudié le problème du financement des autoroutes, et la conclusion suivante s'est imposée à eux : compte tenu de l'endettement de ces sociétés, de leur fragilité financière et des prélèvements élevés qu'elles subissent, il ne fallait en aucun cas alourdir cette taxe. Et ce d'autant plus que, par ailleurs, l'accroissement des financements du FITTVN avait un effet mécanique sur le budget de l'Etat, à savoir un désengagement de ce dernier sur les crédits budgétaires. Quand la taxe augmente de 300 millions, on peut s'attendre à ce que les crédits budgétaires se réduisent d'autant...C'est le même problème que pour le Fonds d'aménagement de la région Ile-de-France. Le rapporteur spécial des transports, M. Idiart, s'est montré favorable à la suppression du FITTVN. Pour ces raisons, et parce qu'un travail approfondi a été fait à la MEC, il est tout à fait étonnant que le Gouvernement ait cru bon d'augmenter cette taxe. D'où notre proposition de supprimer l'article.

M. Jean-Jacques Jegou - Les amendements 196, 292 et 320 ont aussi pour objet de supprimer l'article 33. J'ai également participé aux travaux de la MEC, et il est vrai que nous sommes un peu amers. Nous avions fait savoir au ministre que cette mesure constituerait une provocation, au regard des conclusions auxquelles la MEC, coprésidée par M. Auberger et le président Bonrepaux, était unanimement parvenue. Vraiment, j'aurais souhaité que le Gouvernement ne nous fasse pas une si mauvaise manière. J'attends avec impatience les travaux de notre rapporteur général sur l'ordonnance de 1959, pour que six mois de travail sérieux trouvent une justification.

M. le Rapporteur général - Sur ce dernier point j'essaierai de ne pas vous décevoir... Il faut distinguer deux problèmes : celui de l'augmentation de la taxe sur les sociétés autoroutières, et celui du maintien ou non du FITTVN.

L'augmentation de la taxe contribue à dégager des recettes supplémentaires pour l'investissement dans les transports. J'accorde à nos collègues qu'il faudra veiller à ce que la situation financière des sociétés autoroutières ne se dégrade pas davantage, compte tenu des observations que nous avons pu faire dans le cadre de la MEC. Je rappelle, comme je l'ai dit en commission, que la non-augmentation de la taxe ne figurait pas dans les propositions de la MEC, formulées dans le rapport de M. Idiart ; mais bien sûr elles faisaient partie du développement même de ce rapport. Je propose d'accepter la majoration de la taxe, surtout si nous adoptons, après l'article 33, l'amendement 546 de M. Idiart qui, en prolongement des travaux de la MEC, propose la suppression du FITTVN. Dans l'attente de cette discussion, la commission propose de ne pas supprimer l'article 33.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis. Les sociétés autoroutières, qui ont connu en 1995 et 1996 une très mauvaise période, ont retrouvé un trafic en augmentation. La taxe est portée à 0,5 centime par kilomètre parcouru, soit moins de 1 % des recettes des sociétés. Nous reparlerons du FITTVN ; mais c'est grâce à ce fonds qu'on a financé le TGV Méditerranée, les études du TGV Est, et de nombreux travaux autoroutiers et de modernisation ferroviaire. Avis défavorable à la suppression.

Les amendements 119, 196, 292, 320 et 459, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

L'article 33, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 33

M. Michel Bouvard - Mon amendement 507 a pour but de faciliter la transmission des entreprises agricoles.

L'amendement 507, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Louis Idiart - Mon amendement 546 se situe clairement dans la ligne du travail que nous avons conduit. Une précision : dans mes premières conclusions, j'avais proposé que la taxe sur les sociétés autoroutières ne soit pas relevée. Mais ce point, il faut le souligner, n'a pas été retenu dans le rapport de la MEC. En revanche le rapport a proposé la suppression du FITTVN, objet de mon amendement.

Un peu d'histoire. En 1995, dans le cadre de la loi Pasqua, la majorité d'alors a voulu créer le FITTVN. Pour ma part j'y étais hostile, craignant qu'il n'en résulte une forme de débudgétisation ; et c'est bien ce qui s'est produit. Alimenté par deux taxes, l'une sur les ouvrages hydrauliques concédés, l'autre sur les autoroutes concédées, le FITTVN devait financer des programmes nouveaux. Or, contrairement aux intentions du législateur, il n'a que très peu financé de projets nouveaux, mais a abouti à un saupoudrage de crédits sur des actions engagées, pour lesquelles existaient déjà des lignes budgétaires à la section «Transports» du budget du ministère de l'équipement, du logement et des transports. Comme le confirmait la Cour de comptes, les «ressources du FITTVN ont été largement consacrées au financement d'opérations relevant du budget général. En d'autres termes, le Fonds a surtout opéré une débudgétisation. Le FITTVN a même financé l'ADEME en 1998, à hauteur de 2 millions. L'ensemble des opérations financées par le FITTVN pourrait être transféré au budget des transports terrestres, à l'initiatives du Gouvernement. Ce que nous proposons, c'est la suppression du Fonds, et le transfert de toutes ses recettes au budget général de l'Etat. Quand nous discutons avec le ministère de l'équipement, il exprime l'inquiétude suivante : c'est qu'il assure grâce à ce fonds certaines dépenses, auxquelles il est sûr de pouvoir affecter facilement les recettes. Quant à la maison-mère dont vous êtes le responsable, Monsieur le secrétaire d'Etat, nous avons forcément des difficultés pour discuter avec elle.

Je demande la suppression du FITTVN d'abord pour appliquer clairement ce que nous avons voté. En commission des finances, sur tous les bancs, on s'est offusqué que nous ne prenions pas une initiative à la suite du vote de la MEC. Selon moi, il est nécessaire que ses suggestions soient appliquées, sous peine de revenir à d'anciens errements. Sur ce principe, il faut que le Gouvernement nous suive. Mais il faut, en second lieu, qu'il prenne de plus en plus ses responsabilités dans le cadre du budget. Il faut qu'on assure au ministère de l'équipement les moyens nécessaires pour équiper notre pays ; ce n'est pas à l'heure où partout on discute les contrats qu'il faut revenir en arrière. Je souhaite donc clairement, Monsieur le ministre, que d'un côté l'on supprime le FITTVN, et que de l'autre on garantisse au ministère de l'équipement et des transports les moyens nécessaires pour faire un certain nombre de choses.

Ce sera clair, et vous manifesterez ainsi votre volonté d'écouter le Parlement.

M. le Rapporteur général - La commission a jugé cet amendement tout à fait pertinent. En le votant, elle a voulu exprimer un profond agacement, pour ne pas dire plus, face à ce type de pratiques contraires aux intentions du législateur. Il ne sert à rien de créer des fonds, s'il en résulte des débudgétisations. Nous sommes en désaccord total avec cette manière de faire, dont l'actuel ministre n'est pas à l'origine, le fonds ayant été créé en 1995. Puisque vous avez entrepris, Monsieur le ministre, d'agir pour la transparence et la sincérité budgétaire, je crois que vous y contribueriez en supprimant ce type de fonds comme le propose M. Idiart, rapporteur spécial du budget des transports. Son amendement a recueilli un large consensus en commission des finances, après que l'unanimité se soit faite sur ce point à la MEC. La commission propose donc de l'adopter, sauf si M. le ministre nous apporte des éléments de réflexion nouveaux.

M. le Secrétaire d'Etat - J'ai dit le respect du Gouvernement pour les travaux de la MEC et M. Idiart a développé une argumentation très convaincante. L'idée de supprimer des comptes spéciaux du Trésor ne nous fait pas peur : nous en avons déjà supprimé sept, et nous comptons continuer.

Je prends l'engagement solennel de trouver d'ici 2002 avec mon collègue Jean-Claude Gayssot, en concertation avec vous, une solution au problème posé. Nous avons besoin d'un peu de temps car le caractère intermodal du fonds est important.

MM. Idiart et Migaud ont parlé de débudgétisation ; peut-être a-t-elle déjà été une tentation, mais l'existence du FITTVN n'a pas empêché que la capacité d'investissement du budget des transports progresse de 18 % depuis 1997. Les 2 millions attribués à l'ADEME avaient pour objet d'aider au transport combiné. Pour 2000, les autorisations de programme des transports vont passer de 14,2 à 15,3 milliards, soit une hausse de 8 %.

Je suggère à M. Idiart de retirer son amendement, au bénéfice de l'engagement pris par le Gouvernement.

M. Jean-Louis Idiart - Je note votre engagement, Monsieur le ministre. Je comprends qu'il soit difficile de supprimer le fonds dès cette année, mais je ne suis pas tout-à-fait d'accord sur les délais. Je veillerai à ce que l'on aboutisse au plus vite. J'espère que nous aurons la possibilité, avec vos services et ceux du ministre de l'équipement, de discuter des différents programmes. Mais je crois qu'il vaut mieux le faire dans le cadre du Parlement que dans celui d'un conseil de fonds.

L'amendement 546 est retiré.

M. le Rapporteur général - En nous renvoyant à 2002, le ministre choisit la bicyclette... La MEC continuera à s'intéresser tout particulièrement au FITTVN.

M. Michel Bouvard - Nous venons d'assister à un débat entre le Gouvernement et sa majorité, mais l'opposition n'a pas pu s'exprimer. Mieux vaudrait que nous quittions tout de suite la séance !

M. le Président - Je ne fais qu'appliquer nos règles : à partir du moment où un amendement est retiré, il n'y a plus lieu d'en discuter.

M. Michel Bouvard - Les prélèvements effectués sur le chiffre d'affaires des remontées mécaniques sont sans rapport avec les prestations fournies par l'Etat. En effet les contrôles techniques sont réalisés par des sociétés privées ou par les exploitants eux-mêmes.

Nous n'avons pas la possibilité de supprimer directement cette taxe ; nous proposons donc qu'elle soit réintégrée dans le budget général et qu'une concertation s'engage avec le Gouvernement aux fins de la moduler ou de la supprimer.

M. le Rapporteur général - La commission a été très intéressée par cet amendement. Compte tenu de la complexité du sujet et du caractère épars des informations disponibles, elle ne l'a pas adopté mais, peut-être pourrait-il être repris à l'occasion d'une prochaine lecture, lorsque la question aura été approfondie. J'invite notre collègue à le retirer.

L'amendement 506 est retiré.

ART. 34

M. Gilles Carrez - Mon amendement 86 a pour objet d'appliquer la loi en matière de prise en compte du recensement général.

Aux termes de la loi de 1993, la dotation forfaitaire des communes où le recensement fait apparaître une augmentation de la population doit être majorée de la moitié de cette évolution. Notre pays comptant deux millions d'habitants de plus, c'est un milliard et demi de francs supplémentaires qu'il faudrait inscrire au budget, mais le Gouvernement n'a prévu que 200 millions. Il sera donc nécessaire, et un projet en ce sens nous sera soumis en novembre, de modifier la loi de 1993 pour étaler ses effets sur trois ans. Le Gouvernement nous dira qu'il va, dans un instant, proposer, comme nous, 500 millions de plus, mais ce ne sont pas les mêmes : nous voulons, nous, toucher toutes les communes, qu'elles soient urbaines ou rurales, éligibles ou non à la DSU ou à la DSR. Le mieux serait d'additionner ces deux demi-milliards...

M. Jean-Jacques Jegou - Les amendements 197, 321 et 498 sont identiques, l'amendement 198 similaire.

M. le Rapporteur général - La commission ne les a pas retenus, car l'amendement que présentera le Gouvernement tout à l'heure est de nature à satisfaire la représentation nationale, de même que celui qu'elle a elle-même adopté, et qui tend à la fois à améliorer le dispositif de compensation de la taxe professionnelle et à éviter que cette compensation diminue pour les communes éligibles à la DSU ou à la DSR.

M. le Secrétaire d'Etat - Si la loi de 1993 avait été appliquée dans toute son ampleur, il aurait fallu réduire d'autant la dotation d'aménagement, ce qui n'était pas possible, d'où le projet que vient d'examiner le comité des finances locales et dont vous serez saisis en novembre. L'amendement ne soulève pas d'objection de principe de la part du Gouvernement, mais celui-ci préfère le sien, qui lui paraît mieux ciblé.

M. Gilles Carrez - L'affectation est différente : ce ne sont pas les mêmes villes.

M. Jean-Pierre Brard - C'est bien le problème !

Les amendements 86, 197, 321 et 498, mis aux voix, ne sont pas adoptés, non plus que l'amendement 198.

M. Jean-Jacques Jegou - Depuis la loi de finances pour 1994, le calcul de la DGF est fondé sur l'évolution de la population, des prix et du PIB. Or, les critères ont beaucoup changé, notamment pour les communes périurbaines devenues urbaines, de sorte que les différences de dotation peuvent être considérables au sein d'une même strate régionale. Nous proposons donc, par l'amendement 322, d'opérer un rattrapage de la DGF pour les communes dont la dotation est inférieure d'au moins 10 % à la moyenne de leur strate régionale. Comment expliquer aux habitants d'une commune qu'ils « valent » 1 000 F ou 1 800 F de moins que ceux de la commune d'à côté, dont les caractéristiques ne sont guère différentes ?

M. le Rapporteur général - La commission ne vous a pas suivi : elle a souhaité, au contraire, accentuer la péréquation, et les communes non éligibles à la DSU ne lui sont pas apparues comme prioritaires.

M. le Secrétaire d'Etat - On ne peut vouloir une chose et son contraire. Le Gouvernement fait de la discrimination positive en faveur de certaines communes éligibles à la DSU ou à la DSR. Ce qui nous est proposé est à la fois coûteux et contraire à la logique de la péréquation.

M. Gilles Carrez - En région parisienne comme en province, les inégalités de DSU sont très fortes entre communes voisines, et ne s'expliquent que par des raisons historiques. On pourrait penser que les différences de DGF rétablissent un certain équilibre, mais c'est tout le contraire. Pour les communes les moins bien traitées, la situation est ingérable si elles ne sont pas éligibles à la DSU.

Le Gouvernement doit remettre ce problème à plat, la direction générale des collectivités locales en a d'ailleurs reconnu la nécessité.

M. Jean-Jacques Jegou - Je connais bien ces disparités. Ainsi ma commune ne touche-t-elle que 19 millions de DGF quand une commune voisine, qui compte le même nombre d'habitants et a pourtant moins de charges, sa population étant plus âgée, touche, elle, 29 millions -je précise que toutes deux sont éligibles à la DSU. Est-il normal que celle qui a le plus gros potentiel fiscal soit celle qui touche le plus de DGF ? Il faut revoir cette situation qui devient très grave pour certaines communes de banlieue.

M. le Secrétaire d'Etat - Le problème dépasse de loin les cas particuliers cités.

M. Carrez a été chargé au sein du comité des finances locales d'animer un groupe de travail sur la péréquation. Nous lui fournirons tous les éléments nécessaires pour poser un diagnostic.

L'amendement 322, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 34, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 34

M. le Rapporteur général - L'amendement 67 rectifié propose de reconduire, en 2000, le dispositif de la loi de finances pour 1999, prévoyant de compenser, grâce à une attribution du Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle, les diminutions de la dotation de compensation de taxe professionnelle supportées par les communes éligibles à la dotation de solidarité urbaine ou à la fraction « bourgs-centres » de la dotation de solidarité rurale, ainsi que par certaines communes bénéficiaires de la seconde fraction de la DSR et imputables à l'enveloppe normée du contrat de croissance et de solidarité.

La commission a refusé le sous-amendement 548 de M. Carrez.

M. Gilles Carrez - Mon sous-amendement 548 a pour objet de faire également bénéficier les communes de plus de 10 000 habitants non éligibles à la DSU de la compensation en cas de diminution de la DCTP, lorsque leur potentiel fiscal est sensiblement inférieur à la moyenne.

Je ne comprends pas que la commission l'ait refusé alors que son président avait proposé exactement la même chose l'an passé.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis défavorable au sous-amendement. Les 24 communes qu'il concernerait, dont Bordeaux, Biarritz, Fréjus, Lyon... ne paraissent pas devoir bénéficier d'un effort prioritaire.

En revanche, le Gouvernement est favorable à l'amendement 67 rectifié de la commission qui va dans le sens d'une meilleure péréquation.

Le sous-amendement 548, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 67 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. Gilles Carrez - L'amendement 88 propose que, compte tenu du lissage sur trois ans, la DGF forfaitaire soit majorée sans abattement au prorata des habitants nouveaux.

L'amendement 88, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Secrétaire d'Etat - L'amendement 16 tend à abonder la DSU de 500 millions de francs, comme le Premier ministre l'a souhaité. C'est la marque d'un effort supplémentaire de la collectivité nationale en faveur des communes qui rencontrent des difficultés particulières.

M. le Rapporteur général - La DSU sera dotée de 3,7 milliards en 2000 contre seulement 2,3 milliards en 1998. Comment cet amendement ne recueillerait-il pas notre accord enthousiaste ?

L'amendement 16, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur général - L'amendement 66 propose de majorer de 150 millions de francs la fraction « bourgs-centres » de la dotation de solidarité rurale, grâce à un prélèvement sur le produit des impositions directes locales de La Poste et France Télécom versé au Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle.

M. le Secrétaire d'Etat - Sagesse.

L'amendement 66, mis aux voix, est adopté.

M. Gilles Carrez - Les amendements 87 et 420, identiques, posent le problème des relations financières entre l'Etat et les collectivités locales. Ils proposent que les dotations « sous enveloppe » de l'Etat aux collectivités locales soient indexées sur 50 % de la croissance, et non 25 % comme le propose le Gouvernement.

Les amendements 87 et 420, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Président - Je rappelle que l'article 35 du projet de loi fixant le prélèvement opéré sur les recettes de l'Etat au titre de la participation de la France au budget des Communautés européennes a été adopté par l'Assemblée jeudi après-midi.

M. le Secrétaire d'Etat - Je demande une brève suspension de séance.

La séance, suspendue à 6 heures 25, est reprise à 6 heures 35.

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ART. 36 et ÉTAT A

L'amendement 199 de M. Laffineur, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Jacques Jegou - L'amendement 234 est un amendement complexe, tendant à réduire le déficit. Il est proposé de réduire le déficit de 21,6 milliards supplémentaires, afin de le faire passer de 218,398 milliards à 196,773.

A cet effet, il est proposé de réintégrer les recettes de la taxe sur les activités polluantes et des droits de consommation sur les tabacs manufacturés, ainsi que les dépenses relatives à la ristourne dégressive sur les salaires inférieures à 130 % du SMIC. De plus, les dépenses du budget général seront diminuées de 7,148 milliards.

L'amendement 234 a donc pour objet de mettre en évidence la sous-évaluation par le Gouvernement de nombreuses recettes, ce qui lui permettra à terme d'annoncer un déficit bien inférieur.

Il est proposé de tenir compte des recettes fiscales réelles, qui seront probablement supérieures d'au moins 12 milliards, à celles annoncées par le Gouvernement.

Par ailleurs, il est proposé de réintégrer au budget général les 45,2 milliards de recettes.

Au total, les recettes fiscales attendues devraient être supérieures de 14,5 milliards par rapport à celles inscrites dans le projet de budget pour 2000.

D'autre part, les dépenses de l'Etat subissant cette année encore une dérive, il est proposé de réintégrer les charges correspondant à la ristourne dégressive sur les salaires inférieurs à 130 % du SMIC.

M. le Rapporteur général - Cet amendement proprement politique procède d'une philosophie qui n'est pas la nôtre.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis.

L'amendement 234, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Secrétaire d'Etat - Notre amendement 553, pour ainsi dire rituel, retrace les modifications apportées au cours des débats.

Le premier point concerne la réduction de 110 millions des recettes au titre de l'impôt sur le revenu. L'assujettissement de certaines indemnités de licenciement devrait rapporter 40 millions au budget de l'Etat, l'indexation des seuils de plafonnement du quotient familial pour les personnes seules ayant élevé un enfant, la suppression des conditions d'âge pour la réduction d'impôt au titre des frais de placement dans les établissements de long séjour, enfin l'aménagement de la réduction d'impôt au titre de certains dons aux _uvres réduiront au total de 150 millions le rendement de cet impôt.

L'accélération de la réforme du droit de bail réduit de 300 millions supplémentaires les recettes de l'Etat à ce titre.

Le deuxième point concerne les recettes au titre de la TVA, qui seront réduites de 1,1 milliard au titre de la réduction des taux applicables aux confiseries.

Les recettes de la taxe sur les salaires sont réduites de 100 millions, au profit des associations.

Le rendement de l'ISF devrait augmenter de 390 millions, compte tenu de l'amendement qui supprime l'indexation du barème et de celui qui élargit son assiette aux droits d'auteur et aux _uvres d'art.

Les recettes au titre de l'imposition des sociétés progresseront au total de 3,850 milliards par rapport au projet initial : 1,1 milliard, au titre du relèvement du taux de l'impôt solidarité correspondant au gage de la baisse de la TVA sur les produits de la confiserie, 1,5 milliard, au titre de la réduction du taux de l'avoir fiscal, 1,1 milliard, au titre de la suppression du crédit d'impôt emploi suggérée par les travaux de la MEC, et 150 millions au titre de l'amendement adopté à l'initiative de M. Brard sur la non-déductibilité des pénalités de recouvrement.

Les recettes de droits de timbre sont augmentées de 180 millions de francs ; les recettes de la taxe sur les voitures de société progresseront de 250 millions, après prise en compte de la baisse des tarifs pour les véhicules propres, et la suppression du timbre sur les cartes de séjour coûtera 70 millions. Les droits d'enregistrement sont réduits de 40 millions au titre des dons et legs consentis à certaines associations.

Les amendements en matière de fiscalité locale ont conduit à accroître de 1 065 millions le prélèvement au profit des collectivités locales. Outre le relèvement de 500 millions de la DSU et de 150 millions de la DSR, la compensation au titre de la réforme de la taxe professionnelle sera relevée de 250 millions. Les exonérations de taxe d'habitation pour les ménages modestes seront augmentées au total de 400 millions.

Deux mesures atténuent ces pertes de recettes : la part de la fiscalité locale de France Télécom et de La Poste affectée au FNPTP sera minorée de 150 millions, et les 85 millions prévus pour compenser la suppression de la taxe sur les spectacles n'ont plus lieu d'être, cette mesure ayant été écartée.

Toujours en matière de fiscalité locale, les remboursements et dégrèvements d'impôts sont accrus de 500 millions pour tenir compte de l'amendement qui a ramené de 1 500 à 1 200 F le montant maximum de cotisation de taxe d'habitation pour les contribuables modestes. Le total des mesures en faveur de la taxe d'habitation atteint ainsi 900 millions.

Le Gouvernement vous propose de relever le plafond des dépenses pour tenir compte de plusieurs ajustements qui seront examinés par l'Assemblée lors des débats de seconde partie.

Le plafond des dépenses du BAPSA est relevé de 1 milliard pour financer une nouvelle tranche de revalorisation des retraites agricoles. Cette majoration n'a pas d'impact sur l'équilibre puisqu'une recette nouvelle d'un même montant a été prévue au profit du budget annexe, en provenance de la contribution spécifique de solidarité sur les sociétés.

Le Gouvernement propose également d'affecter la taxe sur les droits de retransmission sportive au FNDS et de relever à concurrence les dépenses du compte spécial de 75 millions.

Toujours sans impact sur l'équilibre, le Gouvernement profite de l'amendement à l'article d'équilibre pour traduire dans le plafond des dépenses et dans les évaluations de recettes l'assujettissement à la TVA des subventions versées par l'Etat à RFF. Les dépenses et les recettes sont ajustées de 2,39 milliards à ce titre.

En fin de compte, ce sont 1 552 millions de dépenses supplémentaires qui pèseront sur l'équilibre du budget. Ce relèvement du plafond correspond pour partie à une mesure de financement des régimes de retraite, et en particulier de la caisse de retraite des agents des collectivités locales, et pour partie à ce qu'il est convenu d'appeler les v_ux de votre commission des finances. Ces mesures seront décrites lors des débats de seconde partie.

Ces modifications conduisent à corriger automatiquement, sans impact sur le solde, les montants de la dotation de compensation de la taxe professionnelle, du fonds national de péréquation de cette taxe et des dépenses du fonds national de péréquation.

Enfin le Gouvernement relève de 650 millions son évaluation du produit des recettes non fiscales pour tenir compte des dernières informations disponibles sur la situation des participations de l'Etat. Cet amendement supprime aussi la ligne TGAP de l'état A, conformément à l'amendement 346 du Gouvernement.

Au total, le déficit serait réduit de 283 à 215,117 milliards.

M. le Rapporteur général - Cet amendement retrace fidèlement nos travaux et satisfait l'ensemble des demandes de notre Assemblée.

M. Jean-Jacques Jegou - Nous nous sommes promis d'achever ce débat, nous allons le faire, mais je reste sur ma faim. Les propositions faites par le groupe UDF pour réduire le déficit ont toutes été balayées d'un revers de main. Le Gouvernement est allé chercher 600 et quelques millions de recettes non fiscales mais il en reste et j'espère qu'il fera mieux en deuxième lecture et à l'occasion du collectif.

M. le Président - Ne seriez-vous pas resté sur votre faim si nous avions repris nos débats lundi ?

M. Jean-Jacques Jegou - Je ne crois pas au Père Noël mais j'ai foi en l'évolution des esprits... (Sourires)

L'amendement 553, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - L'amendement 429 tombe.

L'article 36, mis aux voix, est adopté.

SECONDE DÉLIBÉRATION

M. le Président - En application de l'article 118, alinéa 3, du Règlement, le Gouvernement demande qu'il soit procédé à une seconde délibération des articles 4 ter, 15 ter et 36 et de l'Etat A annexé.

La seconde délibération est de droit.

Sur les dispositions faisant l'objet de la seconde délibération, le Gouvernement demande la réserve du vote.

La commission interviendra dans les conditions prévues à l'alinéa 3 de l'article 101 du règlement.

M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget - La seconde délibération a pour objet de revenir sur deux dispositions.

La première résulte d'un moment de distraction. Il s'agit donc de ne pas réduire le taux de TVA applicable aux produits de la confiserie et de revenir en conséquence sur le gage en matière d'impôt sur les sociétés. C'est l'objet de l'amendement n° 1 supprimant l'article 4 ter.

Par l'amendement 2 supprimant l'article 15 ter, le Gouvernement entend revenir sur l'extension aux _uvres d'art de l'ISF. Votre assemblée ne sera pas surprise de voir le débat sur ce point se terminer comme l'an dernier à une exception près : le Gouvernement a accepté d'inclure les droits d'auteurs dans l'assiette de l'ISF. Par voie de conséquence, il convient de modifier à nouveau l'article d'équilibre en le ramenant au niveau du projet initial, soit 215,397 milliards. Tel est l'objet de l'amendement 3.

Comme l'an dernier, notre débat a été riche. Des allégements de fiscalité ont été votés pour près de 2,4 milliards sans dégrader l'objectif de déficit initial. Par ailleurs, des ressources spécifiques ont été dégagées à hauteur de 1 milliard sur le BAPSA pour le financement des retraites agricoles et 75 millions au profit du FNDS au bénéfice du sport de masse.Je conclurai que, comme chaque année depuis l'examen du budget pour 1998, le travail parlementaire porte pleinement ses fruits. Il y a peut-être une différence cette fois-ci : c'est que cette deuxième délibération est particulièrement légère. Cela illustre la qualité du travail en commun entre le Gouvernement et sa majorité.

Par ailleurs, conformément à l'article 44 alinéa 3 de la Constitution et à l'article 96 du Règlement de votre assemblée, le Gouvernement demande qu'il soit procédé à un seul vote sur les articles faisant l'objet de cette seconde délibération ainsi que sur l'ensemble de la première partie. Ce vote aura lieu mardi ainsi que l'a prévu la Conférence des présidents.

M. le Rapporteur général - Nous aurions souhaité une seconde délibération plus légère encore, qui se réduisît au seul amendement 1, qui répare, comme vous l'avez dit, une distraction. Quant à l'amendement 2, j'ai l'impression que nous y sommes abonnés. Je ne suis pas sûr que le Gouvernement adopte ainsi la meilleure position. Nous retrouverons chaque année ce débat. Ce n'est peut-être pas le meilleur signe à adresser à l'opinion. L'argument selon lequel la proposition de M. Brard mettrait en cause le marché de l'art n'est pas sérieuse. J'espère qu'un jour nous aurons à ce sujet un vrai débat de fond, peut-être à partir du rapport de M. Douyère. Quand on discute avec des représentants du marché de l'art -car cela nous arrive aussi, et pas seulement à Mme la ministre de la culture-, eux aussi jugent que cette disposition est raisonnable, et qu'elle aurait au moins le mérite de purger ce dossier. Vous ne l'avez pas souhaité. Errare humanum est... sed perseverare diabolicum. Je tiens à exprimer le mécontentement de la commission. Passer outre une fois à la volonté de l'Assemblée, c'est déjà une fois de trop ; alors deux fois...

L'amendement 3 est de conséquence. Je conclurai sur une note positive. Il est vrai que le petit nombre d'amendements en seconde délibération est le signe d'un dialogue très constructif entre le Gouvernement et l'Assemblée. Je veux vous en remercier, car un dialogue de qualité suppose de la bonne volonté des deux côtés. Je remercie également vos services, et l'ensemble des collègues qui ont participé à nos travaux. Ceux de la majorité plurielle, bien sûr, qui ont fidèlement voté les propositions du Gouvernement et de la commission. Mais aussi ceux de l'opposition, avec qui nous avons eu un débat sérieux, dans un climat serein. Si nous avons achevé nos travaux à cette heure, c'est qu'ils ont accepté de poursuivre la discussion, et je les en remercie. Je remercie enfin la présidence, les services de l'Assemblée, en particulier ceux de la séance et de la commission, les collaborateurs de nos groupes, et l'ensemble du personnel, qui nous ont permis de travailler dans de bonnes conditions. J'adresse enfin un salut particulier à la presse, qui couvre fidèlement nos travaux.

Ce budget volontaire s'inscrit dans la stratégie définie par le Gouvernement depuis juin 1997. Il confortera la croissance et l'emploi, et, comme rapporteur général, je formule à son sujet une opinion positive (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean-Pierre Brard - Beaucoup de mesures ont été adoptées, dans l'esprit de confrontation et d'élaboration en commun qui préside à nos travaux depuis plus de deux ans. L'amendement 2 n'en est que plus désagréable, et je m'associe aux propos du rapporteur général. Pour l'amendement sur la confiserie, Monsieur le ministre, j'aurais pu vous fournir un argument meilleur que celui que vous avez utilisé : c'est que votre amendement va restreindre la prolifération des caries... Mais nous n'allons pas nous fâcher pour des bonbons...

Il en va autrement des _uvres d'art. Pour la deuxième année consécutive vous jugez bon de passer outre la volonté de l'Assemblée. C'est d'autant plus déplacé que cela fait tache par rapport à la pratique du Gouvernement, et n'en revêt qu'une force symbolique accrue. Le lobby de la gauche caviar ou caviardée a encore frappé ! Mais ces gens -qui d'ailleurs fréquentent plus les cocktails que les expositions- servent de paravent aux fraudeurs. Le Gouvernement a fait là un faux pas. Si quelqu'un en doute, député ou journaliste, je lui recommande d'assister au colloque du 2 novembre, puis de venir en parler avec nous, qui avons travaillé sur la fraude : nous les aiderons à comprendre comment fonctionnent les dispositifs permettant de blanchir l'argent et d'échapper à l'ISF.

Jamais deux sans trois, dit-on. Cet amendement devrait donc être derechef adopté l'année prochaine. J'espère qu'alors vous n'aurez pas le mauvais goût d'y revenir. Vous avez élargi l'assiette aux droits d'auteur, mais là ne réside pas l'essentiel de la fraude : il porte sur les _uvres d'art.

M. le Secrétaire d'Etat - Monsieur le Président, je veux d'abord vous remercier personnellement. Dans la discussion de cette première partie, vous avez joué un rôle éminent, en sachant allier la vélocité, la clarté et la sérénité. J'étends ces remerciements aux autres présidents de séance. Quant au président de la commission des finances, il a montré une fois de plus sa capacité à ouvrir le débat, à partir de ses fortes convictions, et aussi à le conclure quand il le fallait. Il a su donner à nos travaux un caractère constructif et serein. De son côté, infatigablement, le rapporteur général a constamment clarifié les questions, construit des solutions, contribué à améliorer ce budget.

Il n'est pas le seul. Les députés de la majorité ont joué un rôle important. Je dirai à M. Brard, dont je comprends que la seconde délibération l'ait froissé, qu'il a à de nombreuses reprises apporté à nos débats des propositions constructives, notamment -mais pas seulement- sur la lutte contre la fraude, souvent intégrées dans les votes de l'Assemblée. Mais je veux saluer aussi les députés de l'opposition. Comme l'an dernier, nous avons eu un dialogue républicain, où ils ont montré leur compétence, leur sens de l'intérêt général, et une aptitude à échanger qui n'est pas si fréquente.

Je remercie le service de la séance, les collaborateurs de la commission et l'ensemble du personnel de l'Assemblée Au nom de Dominique Strauss-Kahn et au mien, je saluerai aussi nos collaborateurs. Nos cabinets ont bien mérité de cette première partie, et derrière eux la direction du budget, le service de législation fiscale, et les autres services qui, avec une efficacité discrète, nous ont permis de travailler sur des dossiers parfaitement au point. Le presse enfin a su rendre compte de nos travaux avec sa conscience habituelle. Pour conclure, mon seul regret est de n'avoir peut-être trouvé que des mots trop faibles pour exprimer ma gratitude à tous ceux qui, depuis mardi, nous ont permis de bien travailler dans le sens de l'intérêt général.

M. le Président - Je rappelle que le vote est réservé sur les amendements 1, 2 et 3.

Nous en avons terminé avec l'examen des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2000.

Vous avez travaillé avec sérieux et compétence, dans le cadre d'un dialogue républicain qui, je pense, réjouit tous ceux qui sont ici et bien au-delà.

Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que les explications de vote et le vote par scrutin public sur l'ensemble de la première partie du projet de loi de finances auront lieu mardi 26 octobre, après-midi, après les questions au Gouvernement.

Prochaine séance mardi 26 octobre à 9 heures.

La séance est levée à 7 heures 15.

                      Le Directeur du service
                      des comptes rendus analytiques,

                      Jacques BOUFFIER


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