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Session ordinaire de 1999-2000 - 23ème jour de séance, 56ème séance

SÉANCE DU MERCREDI 10 NOVEMBRE 1999

PRÉSIDENCE de M. Laurent FABIUS

Sommaire

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT 2

RÉFORME DES SERVICES FISCAUX 2

MÉDECINE SCOLAIRE 2

SAPEURS-POMPIERS 3

AFFIRMATIONS DU PREMIER MINISTRE
CONCERNANT SES RAPPORTS AVEC LA MNEF 4

RÉFORME DE LA JUSTICE 5

DÉLINQUANCE 5

RAVE-PARTIES 6

EQUARRISSAGE 7

PACTE CIVIL DE SOLIDARITE 8

GRATUITÉ AU COLLÈGE 9

LYCÉES PROFESSIONNELS 9

ÉPIDÉMIOLOGIE ET RESPECT DE L'ANONYMAT 10

LOI DE FINANCES POUR 2000
-deuxième partie- (suite) 11

AFFAIRES ÉTRANGÈRES
-vote sur les crédits- 11

ETAT B TITRE IV 23

ETAT C TITRE VI 26

RAPPEL AU RÈGLEMENT 27

DÉPÔT DU RAPPORT D'UNE COMMISSION D'ENQUÊTE 27

DÉFENSE -vote sur les crédits- 27

RAPPEL AU RÈGLEMENT 28

La séance est ouverte à quinze heures.

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      QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

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RÉFORME DES SERVICES FISCAUX

M. Gérard Charasse - Avant de poser ma question, qui s'adresse à M. le ministre de l'économie et des finances, je voudrais dire que nous avons tous reçu mardi dernier une belle leçon d'honneur.

Au cours de la discussion de la première partie de la loi de finances, les députés de la majorité plurielle ont manifesté leur attachement à l'impôt républicain, à son caractère universel, à sa progressivité, aux capacités de redistribution qu'il donne à l'Etat. La perception de l'impôt sur le revenu, créé par le radical Joseph Caillaux... (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV) ... repose sur un maillage à travers l'ensemble du territoire de services fiscaux, d'assiette et du Trésor. Ce réseau, qui remplit auprès des élus une mission de conseil, contribue à l'aménagement du territoire et permet à l'Etat comme aux collectivités de disposer de ressources levées avec efficacité. Or, le rapport Lépine propose de le replacer dans une nouvelle perspective, qui l'éloigne de son rôle de service de proximité. Les yeux de Chimène de l'inspection des finances pour les systèmes privatisés de recouvrement des impôts, tels que les pratiquent la Nouvelle-Zélande et le Canada inquiètent les agents des impôts comme nos concitoyens. Quelles suites, Monsieur le ministre, entendez-vous donner à ces suggestions d'inspiration libérale ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV)

M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - Vous avez placé votre question sous le patronage de Joseph Caillaux et c'est donc une belle question (« Ah ! » sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL).

La réforme des services fiscaux est nécessaire à la fois pour que l'usager dispose d'un interlocuteur compétent pour traiter de l'ensemble de son dossier, pour que les agents du ministère aient à accomplir des tâches de plus en plus enrichissantes, et pour que le service public soit maintenu au moindre coût. De nombreuses discussions sont actuellement menées au sein du ministère ; le bilan en sera fait par la «mission 2003», qui me rendra son rapport fin novembre. C'est alors que des décisions seront prises.

Je suis attaché à ce que les contribuables, qui sont les usagers privilégiés des services des impôts et du Trésor, bénéficient d'un accès commode à ces services publics et je ne cherche pas de modèle en Nouvelle-Zélande ni dans d'autres pays exotiques. Mon objectif est simplement que nos concitoyens bénéficient du meilleur service public au moindre coût (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV).

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MÉDECINE SCOLAIRE

M. Bernard Birsinger - Ma question s'adresse à Mme la ministre chargée de l'enseignement scolaire. Chacun reconnaît l'importance du grand service de l'éducation nationale qu'est la médecine scolaire. Dans le cadre du Parlement des enfants, les jeunes ont eux-mêmes demandé plus de visites médicales et la présence d'une infirmière par groupe scolaire. Comme vous l'avez vous-même souligné, la santé est une condition de la réussite scolaire. Or, la situation de la médecine scolaire reste sinistrée : 485 postes d'infirmières, 485 d'assistantes sociales et seulement 30 postes de médecins scolaires ont été créés depuis 1998. Ce bilan insuffisant est encore aggravé par la loi de finances pour 2000, qui ne prévoit de créer que 110 postes d'infirmières, 30 d'assistantes sociales et 10 de médecins scolaires.

Hier, les médecins scolaires ont manifesté pour réclamer davantage de moyens. Ils sont actuellement conduits à prendre en charge 6 400 élèves en moyenne, alors qu'aux termes des missions que leur assignent les textes, ils devraient en suivre au plus 3 000. Il faudrait pour que cet objectif soit atteint créer 1 800 postes de médecins scolaires. Vous proposez, Madame la ministre, des interventions de médecins libéraux mais l'expérience des vacataires n'est pas concluante. Entendez-vous revoir à la hausse les créations de postes, dans le cadre d'un plan pluriannuel tel que le préconise un rapport de l'IGAS, et transformer les vacations en emplois de titulaires ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur quelques bancs du groupe RCV)

Mme Ségolène Royal, ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire - Pour bien travailler, un jeune doit être en bonne santé... (Sourires sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

M. Philippe Séguin - C'est vrai.

Mme la Ministre déléguée - Cela n'a rien de risible car la souffrance physique de certains enfants les empêche de réussir.

Plusieurs députés socialistes - Très juste !

Mme la Ministre déléguée - 1 350 postes de médecins scolaires, d'infirmières et d'assistantes sociales ont été créés en deux ans, soit trois fois plus que pendant les quatre années précédentes (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe RCV)

Chacun reconnaît l'engagement de ces professionnels, qui dépistent la « maltraitance », qui sont à l'écoute du « mal-être » des adolescents. La création de 290 postes supplémentaires de médecins et d'infirmières est prévue cette année, auxquels s'ajouteront les interventions des médecins de quartier, qui doivent être associés dans le cadre d'un suivi de proximité. Il faut comparer ce chiffre avec les quatorze postes créés par la droite en quatre ans ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

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SAPEURS-POMPIERS

M. Christian Cuvilliez - Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur. Les délégations syndicales représentatives des pompiers professionnels ont été reçues hier à Matignon, à la suite de l'importante manifestation du 21 octobre et des mouvements de grève de mars dernier ; les « soldats du feu » connaissent en effet des conditions de travail particulièrement difficiles et le contexte social d'ensemble en fait souvent le premier et ultime recours pour les populations les plus fragilisées. Dans ces conditions, leur demande de voir revaloriser leur filière professionnelle est légitime, de même que leur aspiration à bénéficier d'une réduction de leur temps de travail ou à voir classer leur profession dans la catégorie des fonctions dangereuses et insalubres, afin de bénéficier de la retraite à l'âge de cinquante ans. Il faut en effet savoir que les pompiers professionnels sont souvent soumis à des obligations de service hebdomadaire qui vont de 56 à 70 heures. Notre groupe a déposé une proposition de loi tendant à mettre à contribution les compagnies d'assurance pour financer les services départementaux d'incendie et de secours. Il y avait là un moyen d'harmoniser par le haut la situation professionnelle des pompiers mais nos amendements en ce sens au projet de loi de finances pour 2000 n'ont pas été retenus. Sachant que de nouveaux mouvements sont prévus à la fin de ce mois, qu'entendez-vous faire, Monsieur le ministre, pour répondre à ces attentes légitimes ?

M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur - Il est exact, Monsieur le député, que la loi du 3 mai 1996 que je m'efforce d'appliquer se traduit par une augmentation du coût des SDIS, qui sont traditionnellement à la charge des collectivités locales, l'Etat assurant pour sa part le financement des moyens nationaux. Sur les 240 000 sapeurs-pompiers, 10 000 sont des militaires, 28 000 des professionnels et près de 200 000 des volontaires. Votre question s'attache en particulier aux difficultés des pompiers professionnels et j'observe que ce chantier a déjà fait l'objet de plusieurs textes.

S'agissant de la réforme de la filière, la situation des caporaux-chefs et brigadiers comme celle des lieutenants chefs de centre a été prise en compte. Sur les conditions du service, évitez de lancer des chiffres comme cela ! La durée du travail des sapeurs-pompiers varie beaucoup, y compris à l'intérieur d'un même département. Dans les Yvelines, elle est de 100 jours à Versailles et de 140 à Rambouillet et, comme on le sait bien, l'harmonisation a toujours tendance à s'opérer dans le sens le plus avantageux ce qui induit des surcoûts.

Ne prêtez donc pas la main à une agitation irresponsable ! (Applaudissements sur divers bancs). Le classement en catégorie dangereuse et insalubre mérite examen. Mais il est impossible, alors que le rapport Charpin trace les perspectives des régimes de retraite, de prendre une mesure d'ordre général. Le 23 novembre, je demanderai la mise à l'étude des mesures d'âge. S'agissant du financement, j'ai suggéré la piste d'une dotation globale d'équipement spécifique et celle de prêts de la Caisse des dépôts à long terme et à taux très bas.

Beaucoup de mesures ont déjà été prises. Il faut aborder les questions qui se posent encore dans un esprit de responsabilité. Une délégation syndicale a été reçue à Matignon. La commission d'évaluation et de suivi se réunira dans moins d'un mois (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV et du groupe socialiste).

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AFFIRMATIONS DU PREMIER MINISTRE CONCERNANT SES RAPPORTS AVEC LA MNEF

M. Bernard Deflesselles - Monsieur le Premier ministre, je vous prie de croire que ma question est totalement spontanée, et j'espère que sa qualité grammaticale ne soulèvera aucun commentaire de votre part.

Mercredi dernier, vous avez répondu à Patrick Ollier par l'affirmation solennelle, devant la représentation nationale, que « en ce qui me concerne, mon seul rapport avec la MNEF remonte à quarante ans, quand je payais mes cotisations étudiantes. Vous ne trouverez rien d'autre me concernant ». Et vous surenchérissiez : « Personnellement, politiquement, fonctionnellement, je suis totalement étranger à la MNEF. Si vous cherchez un système organisé où fonctionnement institutionnel et fonctionnement partisan, où gestion d'une structure et avantages personnels ont été intimement liés pendant vingt ans, ne regardez pas de mon côté » (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Or, c'est de votre côté que je regarde, Monsieur le Premier ministre ! En effet, à lire certaines informations de presse, donc sujettes à vérification... (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste) je comprends que ma question gêne, mais elle doit être posée ! (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR). Entre 1988 et 1991, lorsque vous étiez ministre de l'éducation nationale, une de vos plus proches collaboratrices, en charge de la communication à votre cabinet percevait un complément de salaire de la MNEF. Comble d'ironie, elle devait être embauchée par la suite dans les services d'Anne Sinclair, connue à la ville sous le nom de Mme Strauss-Kahn (Protestations sur les bancs du groupe socialiste) !

L'alternative est simple : ou vous ignoriez ce lien entre votre cabinet et la MNEF et vous avez péché par ignorance, ou vous la connaissiez, et vous avez péché par intention.

La question n'est pas celle du mode de financement discutable des cabinets ministériels. La question est celle de la valeur de votre parole devant la représentation nationale (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste ; applaudissements sur les bancs du groupe DL et quelques bancs du groupe du RPR).

M. Lionel Jospin, Premier ministre - Je confirme absolument ce que j'ai dit la semaine dernière et je n'ai rien à y ajouter (Huées sur les bancs du groupe DL et plusieurs bancs du groupe UDF et du groupe du RPR ; applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe RCV et quelques bancs du groupe communiste)

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RÉFORME DE LA JUSTICE

M. François Rochebloine - Le ministre de l'intérieur a déclaré hier dans un grand quotidien : « le fonctionnement de l'institution judiciaire est opaque. Les principes qu'elle affiche sont formidables mais ils sont loin de s'inscrire dans la réalité. J'ai l'impression que moins l'Etat donnera d'instructions aux procureurs plus il laissera le champ ouvert à des réseaux d'influence, à des mouvances idéologiques ou syndicales qui, par définition, n'ont de comptes à rendre à personne ».

Ces propos sont contradictoires avec la réforme du Conseil supérieur de la magistrature à laquelle le Garde des Sceaux paraît si attaché. M. Chevènement n'est pas seul à exprimer de sérieuses réserves contre ce projet. Le président du groupe RCV, M. Schwartzenberg, déclare aujourd'hui que son groupe ne votera la réforme du CSM que si le texte mentionne qu'un membre du Parquet qui n'appliquerait pas les directives générales de politique pénale du Garde des Sceaux encourra des sanctions disciplinaires.

Auquel de vos ministres, Monsieur le Premier ministre, allez-vous donner satisfaction ? Lequel allez-vous mettre ainsi en porte-à-faux ? Est-il vraiment opportun de réformer la Constitution sur un texte qui fait si peu l'unanimité sur tous ces bancs ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF)

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice - A l'initiative du Premier ministre, le Gouvernement a engagé une réforme de la justice d'une ampleur inégalée depuis celle de Michel Debré en 1958. Elle est destinée à rapprocher la justice des citoyens, à la rendre plus impartiale en renforçant l'indépendance et la responsabilité des magistrats et à mieux protéger les droits des personnes.

Déjà le premier volet, relatif à la justice au quotidien, a été voté dans sa totalité. Sur la protection du droit des personnes et la présomption d'innocence, un texte est en cours de navette. A cette occasion, il faudra considérer quels sont les éléments dans la décision juridictionnelle des juges qui doivent être soumis à des contre-pouvoirs et à d'autres regards. Enfin un projet tend à intégrer dans la loi ce qui est en pratique depuis deux ans, l'interdiction des instructions individuelles.

Si l'on pense que la justice doit être impartiale, qu'elle doit mieux respecter les droits des personnes, alors il faut voter le projet de loi constitutionnelle. Vous l'avez adopté à une écrasante majorité il y a un an. Il faut confirmer ce vote le 24 janvier (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe RCV ; «Non !» sur les bancs du groupe DL) Dès lors le CSM ne sera plus composé majoritairement de magistrats et les décisions disciplinaires qui les concernent seront prises par un organisme où les non-magistrats seront les plus nombreux.

Ensuite, nous proposerons le projet de loi organique destiné à mettre en _uvre la responsabilité disciplinaire des magistrats.

Tout cela n'est pas nouveau. Je m'en suis souvent expliquée devant vous. Commençons par voter le projet de loi constitutionnelle au Congrès ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe RCV)

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DÉLINQUANCE

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia - Monsieur le ministre de l'intérieur, vous avez répondu récemment à Mme de Panafieu inquiète de l'augmentation de la délinquance en région parisienne qu'elle était due «à l'accroissement des vols de portables». J'attire donc votre attention sur les faits suivants, qui se produisent quotidiennement : à Grigny dans l'Essonne, incendie d'un commissariat, quatre policiers blessés, à qui nous rendons hommage (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) ; dans le Val-de-Marne un autobus pris en embuscade ; à Lille et à Nantes, il a fallu mettre en place un système de vidéo-surveillance sur les réseaux de transports en commun; avenue Trudaine à Paris, quatre voitures incendiées.

Comment entendez-vous répondre à cette insécurité ? (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste) Ne nous dites pas que vous allez affecter des agents de sécurité dans ces zones sensibles. Les emplois-jeunes ne peuvent pas se substituer à de véritables policiers. Ne nous dites pas non plus que des CRS vont permettre un îlotage musclé. Elles existent déjà dans certaines zones et ce n'est pas leur mission.

Ma question n'est pas du tout politicienne (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), elle est celle d'une élue ordinaire confrontée chaque jour à l'angoisse de ses concitoyens.

M. Didier Boulaud - Rendez-nous Médecin ! (Rires sur les bancs du groupe socialiste)

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia - En revanche, cette question est vraiment politique, parce qu'elle touche à la qualité de la vie et à la liberté de nos concitoyens (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe DL et du groupe UDF).

M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur - Il n'aurait pas de sens que nous nous jetions des statistiques à la figure (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL), mais si vous en voulez quand même, sachez que le nombre des faits constatés a baissé de 0,8 % à Paris en septembre (Mêmes mouvements), et de 3 % en zone de sécurité publique. Si l'on étudie l'évolution à plus long terme, qui seule fait sens, nous sommes, sur la base de l'indice 100 en 1990, à l'indice 102,7 aujourd'hui (Mêmes mouvements). Je ne nie nullement que certains phénomènes, comme les violences urbaines ou la délinquance des mineurs, soient préoccupants, j'ai même eu l'occasion de le dire assez souvent, mais la délinquance de voie publique régresse, de même que le nombre des vols à l'arraché, à l'exception des vols de portables, ces derniers étant, il est vrai, de plus en plus répandus.

Plusieurs députés RPR - Ridicule !

M. le Ministre - Ce qui est ridicule, c'est de nier qu'il y ait un rapport entre l'évolution des délits et celle des techniques et du mode de vie.

Pour répondre plus sérieusement (« Ah ! » sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL), le colloque de Villepinte a posé trois principes : la sûreté est le socle de la démocratie ; il n'est de politique qui vaille si elle n'associe prévention, sanction et réinsertion ; l'accent doit être mis sur la proximité. Toutes les mesures que nous avons prises obéissent à ces trois principes, y compris dans les Alpes-Maritimes, où une compagnie républicaine de sécurité a été « fidélisée » et où les effectifs n'ont jamais été aussi nombreux (Protestations sur les bancs du groupe du RPR) . Il est temps que l'on s'exprime, sur ces questions, avec responsabilité (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Il y a, en effet, deux démagogies : la démagogie laxiste et la démagogie catastrophiste. Je les combats toutes deux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV, du groupe socialiste et du groupe communiste)

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RAVE-PARTIES

M. Gérard Hamel - Depuis quelque temps, certaines soirées communément appelées « rave-parties » (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV)- nous en sommes tous victimes, mes chers collègues ! (Rires sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV) - sont organisées de façon sauvage et illégale un peu partout en France. Récemment, l'une d'elles, qui s'est tenue, bien sûr, sans autorisation sur un terrain privé a réuni plus de 2 000 personnes, qui ont causé des dégâts considérables : plus de 4 tonnes de détritus ont été abandonnées, dont une bonne quantité de seringues, et le montant des réparations et de la remise en état du terrain, rendu impraticable pendant plusieurs semaines, dépasse les cent mille francs !

Par ailleurs, et sans généraliser, sous prétexte de manifestations musicales « branchées », d'importantes nuisances sonores, des débordements, des trafics de drogue ont lieu, néfastes pour les jeunes participants, voire mortels pour certains d'entre eux. Or, il semble que la consigne généralement donnée aux forces de l'ordre soit, non seulement de ne pas intervenir, mais encore d'encadrer la manifestation, ce qui est bien pis. Les populations environnantes sont scandalisées, et les propriétaires de terrains dégradés sont dépourvus de recours juridique et financier. Qu'entend faire le Gouvernement pour dédommager ces derniers et, surtout, pour empêcher la tenue de telles manifestations ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur - Les « rave-parties » sont un phénomène de société, qui existait bien avant la constitution de ce gouvernement.. (Sourires) Les participants viennent souvent de fort loin, parfois même de l'étranger (« Ah ! » sur les bancs du groupe du RPR et du groupe DL), et les portables jouent là encore, pardonnez-moi d'y revenir (Rires), un rôle très important, si bien qu'il est difficile de savoir à l'avance où se déroulera la réunion : c'est généralement une carrière, une forêt ou un autre lieu isolé. Notre politique, que j'ai exprimée dans une circulaire prise fin 1998, consiste à canaliser la manifestation, dans la mesure où les organisateurs veulent bien la déclarer à l'avance, mais nous ne pouvons empêcher qu'elle revête, dans certains cas, des formes sauvages que je déplore comme vous (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. Maurice Leroy - Des formes sauvageonnes ! (Sourires)

M. le Ministre - Il est arrivé que la police intervienne ; cela ne se fait jamais sans casse. Aucun ministre de l'intérieur n'a trouvé, à ce jour, de solution satisfaisante. S'agissant du trafic de stupéfiants, consigne a été donnée à la police d'intervenir aussi efficacement que possible (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RCV, du groupe socialiste et du groupe communiste).

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EQUARRISSAGE

M. Jean-Claude Lemoine - Un conflit oppose, depuis plusieurs semaines, les bouchers aux établissements d'équarrissage. Ces derniers, profitant de leur situation de quasi-monopole pour refuser toute concertation, exigent désormais d'être payés pour l'enlèvement de tous les sous-produits. Dans la Manche, le préfet a réussi à imposer une solution, mais le problème doit être réglé au plan national, en tenant compte, comme l'an passé pour la taxe d'équarrissage, du volume de l'activité et de la surface financière des parties concernées. Quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour remédier à la situation actuelle ? Où en sont les négociations en cours sous l'égide du ministre de l'agriculture ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche - Il est exact que le secteur de l'équarrissage connaît d'importantes difficultés, du fait de l'effondrement des cours des farines animales à la suite des événements que nous connaissons. Certains produits, qui étaient enlevés gratuitement, ne le sont plus, et le coût de la collecte augmente donc dans des proportions qui peuvent être considérables. Le Gouvernement, soucieux de faire prévaloir la santé publique sur la rentabilité, a pris l'initiative d'organiser, au niveau départemental, des rencontres entre les parties concernées, afin de parvenir à un règlement équitable. Il vous tiendra informé, à leur issue, des mesures qu'il entend arrêter pour harmoniser au niveau national les décisions prises localement (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste).

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PACTE CIVIL DE SOLIDARITE

M. Patrick Bloche - Hier soir, le Conseil constitutionnel a déclaré le pacte civil de solidarité, dans toutes ses dispositions, conforme à la Constitution (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV). Il a pris sa décision alors même que la plus haute autorité de l'Etat, parlant sans doute au nom de l'opposition (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL), venait de dire publiquement son hostilité au texte, hostilité déjà connue mais réitérée au moment même où le contrôle de constitutionnalité venait à son terme. Le Conseil a considéré, hors de toute pression politique, que le Pacs permettait, dans le respect des principes fondamentaux de notre République, d'aller plus loin dans le respect de l'égalité des droits en mettant fin à la discrimination dont souffrent tous ceux qui ne veulent ou ne peuvent se marier, lorsqu'il s'agit d'organiser leur vie commune.

Cette décision est assortie de réserves d'interprétation qui rejoignent les préoccupations juridiques que nous avions nous-mêmes exprimées, ainsi que le Gouvernement, au cours des travaux (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. Jacques Myard - Quel culot !

M. Patrick Bloche - Oui, le Pacs concerne exclusivement le couple, et non pas la famille ni l'enfant, non plus qu'il ne modifie les dispositions relatives à l'état civil , à la filiation, à l'autorité parentale, aux droits des mineurs ou à la procréation médicalement assistée (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

Soyons fiers de cette grande loi républicaine, qui valorise l'institution parlementaire : non seulement nous avons pris l'initiative de faire la loi, mais nous avons fait une bonne loi ! (Mêmes mouvements) Le Gouvernement, par la voix du Premier ministre, avait exprimé la volonté que le Pacs soit mis en application le plus vite possible. Vous-même, Madame la Garde des Sceaux, avez déclaré que les personnes désirant conclure un Pacs pourraient le faire dès la publication de la loi au Journal officiel. Pouvez-vous éclairer le Parlement sur le calendrier de son entrée en vigueur ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV)

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice - Je me réjouis comme vous de la décision du Conseil constitutionnel, qui a jugé le pacte civil de solidarité conforme en tous points à la Constitution. C'est une victoire pour tous ceux qui ont cru à la nécessité d'accorder des droits nouveaux aux couples, c'est une victoire pour les auteurs de cette proposition de loi, dont vous-même, ainsi que pour la présidente de la commission des lois et pour toute la majorité, qui a soutenu le Gouvernement avec constance et fermeté tout au long de la procédure parlementaire (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL ; applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

M. Maurice Leroy - Sauf le 9 octobre 1998 !

Mme la Garde des Sceaux - Non, le Pacs ne porte pas atteinte au droit de la famille ni au mariage, et je me bornerai à constater que les 26 pages d'attendus de la décision du Conseil constitutionnel ont rejeté aux oubliettes les dizaines d'heures d'objections juridiques soulevées par l'opposition (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

Il faut maintenant faire vivre ce pacte. Je l'ai déjà dit, la promulgation de la loi autorisera à elle seule les personnes qui le souhaitent à signer un Pacs. Ce matin même, j'ai adressé aux greffiers, qui disposeront par ailleurs de postes supplémentaires, une circulaire leur précisant ce qu'ils devraient faire et ne pas faire pour enregistrer ces pactes. Dès la promulgation de la loi également, les décrets d'application seront adressés à la CNIL et au Conseil d'Etat et j'ai bon espoir que tous deux se prononcent dans les meilleurs délais, de sorte que ces textes puissent être publiés dès le début de décembre. Nous aurons donc les moyens juridiques et matériels d'appliquer cette loi avant la fin de l'année.

Vous pouvez donc constater que mon ministère et les autres départements concernés auront tout fait pour que ce texte, longuement débattu et qui a aujourd'hui reçu l'onction de notre haute juridiction constitutionnelle, entre en vigueur le plus rapidement possible ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe RCV et du groupe communiste)

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GRATUITÉ AU COLLÈGE

M. Michel Dasseux - Plus de 3,3 millions d'enfants sont scolarisés dans les collèges. Or leurs familles ont de plus en plus à supporter l'achat de fournitures pédagogiques, cahiers d'exercices ou de travaux pratiques, cassettes de langues, etc. Elles sont obligées aussi à des dépenses liées à l'organisation de la pédagogie : achat d'un livret scolaire et d'un carnet de correspondance, frais de correspondance, contribution au budget de la coopérative... Ces dépenses sont souvent imposées par voie de circulaires internes à l'établissement. Or le tribunal administratif de Bordeaux vient d'annuler ce genre de circulaires au motif que ces dépenses sont des dépenses des collèges et qu'elles sont donc indûment mises à la charge des familles.

Quelles mesures comptez-vous prendre pour que ces dépenses soient inscrites dans le budget pour 2000, de là, dans le budget des collèges ? Plus généralement, que ferez-vous pour que le principe de la gratuité de l'enseignement soit pleinement respecté ?

Mme Ségolène Royal, ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire - Ce principe est en effet l'une des valeurs de notre école et le Gouvernement a le souci de le défendre et de le promouvoir. C'est à juste titre que la juridiction administrative l'a rappelé mais, depuis deux ans, bien des dispositions ont été prises pour venir en aide aux familles les plus modestes : l'allocation de rentrée scolaire a été augmentée et est désormais versée dès le premier enfant, pour un coût de 10 millions ; nous avons créé et doté les fonds sociaux des collèges et des lycées, rétabli les bourses des collèges, institué un fonds social pour les cantines, le tout pour un montant de plus de 4 milliards dans le seul budget pour 2000. L'égalité des chances est donc notre préoccupation, comme en témoigne encore mon instruction demandant le strict respect du principe de gratuité à l'occasion des sorties scolaires.

Quant aux documents et fournitures que vous avez mentionnés, ils doivent être fournis gratuitement par les établissements scolaires, qui disposent d'un budget à cet effet. Nous avons d'ailleurs relevé la dotation destinée à l'achat des manuels scolaires, qui doit également servir à l'achat des cahiers de travaux pratiques.

Depuis les lois de Jules Ferry, notre école est laïque, gratuite et républicaine : vous pouvez compter sur le Gouvernement pour veiller à ce qu'il en aille bien ainsi ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV)

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LYCÉES PROFESSIONNELS

Mme Martine David - Monsieur le ministre de l'éducation nationale, vous avez annoncé que les premières mesures destinées à construire le lycée professionnel du XXIème siècle s'appliqueraient dès le 1er janvier prochain. Placée sous le signe de l'enseignement intégré, cette rénovation doit ouvrir cette filière de formation sur les entreprises et le monde professionnel.

D'autre part, le conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche vient d'adopter un projet d'arrêté visant à créer la licence professionnelle : cette initiative s'inscrira pleinement dans la démarche lancée il y a un an par la France, l'Allemagne, le Grande-Bretagne et l'Italie en vue de constituer un espace européen de l'enseignement supérieur.

Cette concomitance témoigne du souci qu'a le Gouvernement de contribuer à la professionnalisation des formations. Le contrat pour l'emploi doit en effet être mené à tous les niveaux. Pouvez-vous nous préciser les modalités de ces réformes, dont nous nous réjouissons ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie - La lutte contre le chômage requiert en effet des mesures à long terme. En relève l'adaptation de la formation et de l'enseignement à l'emploi. C'est dans cette perspective que s'inscrira l'enseignement professionnel intégré, qui doit être organisé en association entre le lycée et l'entreprise, par le moyen de contrats. Nous voulons aussi donner aux lycées professionnels, aux IUT et aux sections de BTS la possibilité de créer avec les entreprises des « plates-formes technologiques » -les uns pourront utiliser le matériel des autres, des stages seront mis sur pied en commun... Tout cela fait actuellement l'objet de négociations dans toute la France.

D'autre part, en faveur des élèves, nous allons dès la rentrée appliquer les 35 heures dans les lycées professionnels. La charge de travail des professeurs sera également allégée. En outre, comme les autres lycées, ceux des lycées professionnels auront droit à des enseignements artistiques, à une éducation sportive et à une éducation citoyenne ; ils pourront travailler en petits groupes et travailler à un projet professionnel personnel, en bénéficiant de l'encadrement nécessaire.

Comme vous l'avez dit, la licence professionnelle a été créée hier. Elle s'inscrit dans une évolution que nous voulons pour que cesse l'opposition entre culture générale et formation professionnelle. Les deux doivent aller de pair !

Je crois que tout cela prépare une réconciliation historique entre l'école et l'entreprise. Nous avons pu la faire parce que, désormais, chacun respecte l'autre : les entreprises constatent la qualité de notre enseignement et de nos professeurs et ceux-ci comprennent l'intérêt d'un partenariat.

Enfin, la mission enseignement-économie-emploi, qui se met en place, permettra d'adapter les formations professionnelles aux exigences de l'emploi. Il faut en effet en finir avec l'excédent de formations dans des secteurs tels que le secrétariat alors que, dans d'autres, elles manquent, en dépit d'une offre d'emplois importante (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

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ÉPIDÉMIOLOGIE ET RESPECT DE L'ANONYMAT

M. Jean Rouger - Le 6 mai, deux décrets ont fixé les modalités de communication des données individuelles relatives aux maladies graves et contagieuses. Ils autorisaient la collecte d'éléments à caractère nominatif et, même si le nom ne devait pas être mentionné, le recoupement des données laissait planer le risque d'une identification. De nombreuses associations se sont donc émues. Après les avoir rencontrées à plusieurs reprises, madame la secrétaire d'Etat à la santé, vous venez d'annoncer la création d'un nouveau système épidémiologique de déclaration de l'infection VIH et de certaines autres maladies transmissibles. Quelles sont ces nouvelles dispositions, qui visent à garantir l'anonymat et le respect de la vie privée à tous ceux qui mènent un combat courageux contre la maladie ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale - Le projet d'étude épidémiologique a en effet suscité une vive émotion. Il importait cependant de mesurer l'évolution de l'épidémie, d'apprécier l'effet des nouveaux traitements et, surtout, d'améliorer la prévention en luttant contre la tentation d'un relâchement chez les malades -nous constatons 5 000 ou 6 000 contaminations par an. L'Institut de veille sanitaire a donc fait des proposition, d'où est sorti le projet que vous évoquez.

Ce dispositif de déclaration obligatoire de personnes porteuses du VIH a été mis en place à titre expérimental dans 22 départements, en juillet dernier. Devant les inquiétudes des associations, Mme Aubry et moi-même avons immédiatement demandé l'arrêt de cette expérimentation afin d'engager une concertation et de mieux satisfaire aux exigences légitimes des malades. Nous avons ainsi pu définir un nouveau dispositif régissant l'information des personnes, l'analyse des données recueillies et les modalités de leur acheminement.

Ensemble, les pouvoirs publics et les associations ont élaboré un système garantissant l'anonymat. Il concernera d'autres maladies transmissibles et s'appuiera sur une déclaration rendue anonyme à la source par codage informatique des données recueillies par les biologistes. Les médecins compléteront la fiche anonyme qui portera sur les facteurs de risque de la personne atteinte. La fiche sera ensuite transmise à la DDASS puis à l'INVS. Ainsi, la transmission des informations de la fiche se fera sans aucun risque de rupture de l'anonymat. Le décret général sur les maladies à déclaration obligatoire du 5 mai 1999 sera modifié afin de tenir compte de cette nouvelle approche et de garantir la protection de l'anonymat.

Nous saisirons la CNIL afin qu'elle vérifie que le nouveau dispositif est conforme.

Les associations se félicitent que la concertation ait ainsi abouti, ce qui permettra d'appliquer le dispositif dès le printemps prochain (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

La séance, suspendue à 16 heures est reprise à 16 heures 15 sous la présidence de Mme Catala.

PRÉSIDENCE de Mme Nicole CATALA

vice-présidente

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LOI DE FINANCES POUR 2000 -deuxième partie- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2000.

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AFFAIRES ÉTRANGÈRES
-vote sur les crédits-

Mme la Présidente - Nous allons procéder au vote des crédits du ministère des affaires étrangères à l'occasion duquel nous allons mettre en _uvre, en séance publique, la nouvelle procédure budgétaire définie par la Conférence des présidents.

Suivant cette procédure, la commission des affaires étrangères, saisie pour avis de ces crédits, leur a consacré une réunion publique, ouverte à tous les députés, et ses travaux seront publiés en annexe au compte rendu de la présente séance. Par ailleurs, chaque groupe a pu adresser au Gouvernement des questions écrites concernant ces crédits. Les réponses à ces questions seront elles aussi annexées au compte rendu de la présente séance.

Avant les votes, je donnerai donc la parole aux rapporteurs des commissions, à M. le ministre des affaires étrangères, à M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie et à un orateur par groupe. Chaque intervenant disposera de cinq minutes.

M. Yves Tavernier, rapporteur spécial de la commission des finances pour les affaires étrangères - Ce budget avec 20,945 480 milliards représente 1,25 % de celui de l'Etat. La réduction drastique qu'il subissait depuis 1994 a pris fin. En 1993, il représentait 1,68 % du budget général et ses crédits étaient supérieurs de 2 milliards à ce qu'ils sont aujourd'hui.

Appuyé par les rapporteurs, vous avez su mettre fin à cette hémorragie dommageable, afin de donner à notre action extérieure les moyens de ses objectifs.

La stabilisation opérée en 2000 annonce, espérons-le, un redressement. Sous votre impulsion, Messieurs les ministres, un remarquable effort de rationalisation des moyens des services a été opéré.

La fusion des administrations de la coopération et des affaires étrangères, la réorganisation de l'administration centrale, la modernisation de la gestion des services à Paris et à l'étranger ont permis d'importantes économies pour une efficacité accrue.

Les crédits de votre ministère ne représentent au demeurant qu'une part des crédits consacrés à l'action extérieure de la France. Ceux-ci s'élèveront, pour l'an 2000, à 54,44 milliards, en réduction de 2,03 % par rapport à 1999.

D'autre part, les crédits soumis par le Gouvernement au vote du Parlement ne sont pas exactement ceux qui seront mis en _uvre, puisque pour l'an 2000, le cours du dollar a été prévu à 5,83 F alors que la Direction de la prévision de Bercy le prévoit à 6,18 F. Il sera nécessaire de faire les ajustements en temps voulu.

La véritable nouveauté de ce budget est la création d'emplois après une perte de 892 agents soit 8,6 % des effectifs, entre 1991 et 1999. Certes, un seul poste supplémentaire est inscrit au budget mais les mouvements internes vont permettre de dégager 92 emplois pour renforcer l'administration centrale et les postes à l'étranger, notamment les services des visas dans les consulats, ce dont je me réjouis.

Les crédits consacrés aux moyens matériels de fonctionnement régressent de 1,95 %. Mais, je l'ai dit, un sérieux effort de rationalisation de la gestion des services a permis des économies.

Les grands investissements concernent la construction de nos ambassades à Berlin et à Pékin, la réhabilitation du palais Farnèse à Rome et la réouverture de notre consulat à Annaba en Algérie. Des crédits importants seront également consacrés à la construction, à la réhabilitation ou à l'entretien des établissements d'enseignement appartenant à l'Etat.

Les contributions obligatoires baissent de 0,58 %. Je crains que les dotations soient insuffisantes dans la mesure où les besoins de financement liés à notre action au Kosovo n'ont pas été pris en compte. En revanche, les contributions volontaires qui s'étaient effondrées de 67 % entre 1990 et 1998 augmentent pour la deuxième année consécutive, cette fois de 30 millions. Je me réjouis en particulier de l'augmentation de notre dotation au PNUD.

Je note également avec plaisir que les crédits réservés à l'assistance de nos compatriotes en difficulté à l'étranger augmentent après des années de réduction, de même que les crédits facilitant la vie des Français à l'étranger, et les moyens accordés à l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger. Enfin, le montant des bourses progresse de 15 millions.

Les crédits sont donc stabilisés avant, je le souhaite, leur nécessaire redressement. Je vous invite, au nom de la commission des finances, à les adopter (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

M. Jean-Louis Bianco, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères pour les affaires étrangères - M. Tavernier a excellemment décrit les principales caractéristiques de ce budget, et je partage ses appréciations. Il s'agit d'un budget d'espérance. Les crédits augmentent de 170 millions, soit 0,6 %. Plus exactement, si l'on tient compte des crédits inscrits en loi de finances rectificative, ils sont stables. Nous espérons que ce palier atteint en l'an 2000 préfigure une nouvelle remontée et non une chute.

M. Jean-Claude Lefort - Tout à fait.

M. Jean-Louis Bianco, rapporteur pour avis - En particulier, les effectifs cessent de diminuer, après avoir baissé de 9 % en huit ans. Aucune administration n'a certainement subi une telle déflation.

La fusion avec le ministère de la coopération a, dans l'ensemble, été bien conduite. Elle permettra de redéployer 92 postes, notamment dans les consulats. Je relève aussi les actions menées pour l'enseignement, l'audiovisuel, le social.

Sur un plan plus général, et au-delà du vote émis par les formations politiques, votre action pour animer notre politique étrangère est unanimement saluée pour son efficacité et son sérieux. Je tenais à en porter publiquement témoignage.

Dans mon rapport, j'analyse plus particulièrement la crise du Kosovo. Elle nous conduit à nous interroger et à agir pour que l'Europe se dote des moyens nécessaires à sa défense, pour que la PESC commence à prendre consistance et pour que s'engage comme l'a souhaité Kofi Annan, le débat sur l'évolution des structures de l'ONU et sur les moyens dont elle doit disposer pour agir plus efficacement et légitimer pleinement des actions comme celle que l'OTAN a conduite au Kosovo. De telles actions ne se justifient que quand la diplomatie a épuisé tous ses moyens et il est indispensable que ce soit l'ONU qui en fixe le cadre et les règles.

Car il s'agit de concilier la souveraineté des Etats, qui est l'un des fondements du droit international, et le principe d'ingérence humanitaire. Un des grands enjeux du siècle à venir est de donner aux Nations unies la pleine capacité d'agir dans ce type de situation. Au bénéfice de ces observations, votre rapporteur, comme la commission des affaires étrangères, vous invite à voter les crédits du ministère (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Maurice Adevah-Poeuf, rapporteur spécial de la commission des finances pour la coopération et le développement - Compte tenu de la nouvelle procédure que nous expérimentons et de la possibilité de trouver une analyse détaillée des crédits dans mon rapport écrit, je me bornerai à évoquer brièvement quelques points de doctrine. Pour l'essentiel, il s'agit de revenir sur les conditions internes aux Etats en direction desquels s'exerce notre aide. Par sa philosophie, la France est amenée à privilégier les rapports avec les Etats démocratiques ou du moins pluralistes. Au demeurant, la diplomatie fait mauvais ménage avec la logique du tout ou rien qui nous conduirait à exclure de la zone de solidarité prioritaire et de l'aide française des Etats manifestement peu démocratiques ou peu susceptibles de le devenir à court terme.

Cependant, je rappellerai avec insistance que nous souhaitons que l'octroi de l'aide française soit beaucoup plus subordonnée aux progrès de la démocratie et du pluralisme.

A titre d'illustration pratique, je vous rappelle qu'aujourd'hui, quatre de nos collègues ivoiriens sont déférés en justice dans le cadre d'une affaire compliquée. La Côte d'Ivoire est une république amie et nous sommes liés aux Ivoiriens par des liens étroits. Mais je souhaite que le Gouvernement use de toute son influence pour que, s'agissant de la Côte d'Ivoire, ce qui prévaut chez nous, par exemple en matière de nationalité, soit aussi valable là-bas et que des procédures judiciaires ne soient pas utilisées pour trancher des conflits politiques. Je ne demande pas au Gouvernement de s'ingérer dans les affaires internes à la Côte d'Ivoire mais qu'au nom de l'amitié qui nous unit depuis longtemps, il rappelle aux Ivoiriens que le fondement même de cette amitié ancienne repose sur des valeurs communes. Il faudrait donc que des solutions interviennent rapidement pour que nos collègues ne soient plus privés de leurs libertés fondamentales. La Côte d'Ivoire est sur la bonne voie. Il serait dommage qu'elle régresse en matière de respect des droits de l'homme.

Par ailleurs -je ne parle plus de la Côte d'Ivoire- la corruption continue de progresser. Un signal fort serait donné si le Gouvernement entamait enfin la procédure de ratification de la convention de l'OCDE de 1997 et était attentif dans la mise en _uvre de ses aides à l'analyse des budgets des Etats. Il convient notamment de s'interroger sur l'absence dans certains d'entre eux des ressources énergétiques et minières, souvent affectées à des caisses parallèles sans contrôle public. Là aussi, il convient que la conditionnalité progresse.

Il n'y a aucun rapport entre la corruption et les paradis fiscaux, chacun le comprend bien... (Sourires) Mais il est tout de même assez immoral que de l'aide multilatérale aille à des Etats dont le revenu est constitué de ressources qui ne sont pas connues. En ce qui concerne le FED, auquel la France participe à hauteur de 24 %, le Gouvernement doit veiller à ce que de l'aide publique, financée par le contribuable, ne reçoive pas un tel usage. Vous m'avez répondu en commission élargie, Monsieur le ministre, qu'un chef d'Etat avait invité les Européens à balayer devant leur porte. S'il existe en Europe des situations contestables, les Etats en cause n'émargent pas aux fonds structurels européens.

Depuis cinq ans, les budgets étaient catastrophiques. Aujourd'hui, ce budget est moyen. Il faudra poursuivre l'effort pour qu'il retrouve un rythme de progression conforme au rang et à l'ambition de la France dans le monde. Je propose à l'Assemblée de l'adopter (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Pierre Brana, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères pour la coopération et le développement - Le budget qui nous est soumis peut être considéré comme le premier véritable budget après la réforme de la coopération. Les moyens consacrés au développement sont globalement maintenus, comme le budget du ministère des affaires étrangères.

L'augmentation de 24,6 millions de la subvention à l'Agence pour l'enseignement du français à l'étranger s'explique essentiellement par un effort en faveur des bourses scolaires, dont le montant global passe de 217 à 232 millions. Un geste supplémentaire de 500 000 francs est par ailleurs prévu pour les bourses d'excellence destinées à de jeunes bacheliers africains, afin de leur permettre de suivre des classes préparatoires aux grandes écoles françaises.

Il faut également souligner l'effort en faveur des bourses d'enseignement supérieur et le soutien accru -5 millions de plus- à l'agence Edufrance afin de promouvoir le système universitaire français à l'étranger.

Cet effort devra être amplifié afin d'inverser la baisse préoccupante du nombre d'étudiants étrangers en France.

S'agissant des interventions publiques, le montant des concours financiers est en baisse de 105 millions, du fait de l'amélioration de la situation économique des pays aidés, mais aussi de la volonté, que je salue, de diminuer les moyens consacrés à l'ajustement structurel au bénéfice de l'aide projet.

En ce qui concerne la coopération décentralisée, les dotations subissent une baisse de 300 000 francs. La priorité doit être donnée à la concertation avec les collectivités locales. Alors que certains pays recueillent de nombreuses aides et que d'autres n'ont quasiment rien, une meilleure information permettrait une meilleure répartition.

Notons enfin l'augmentation de 25,32 millions des subventions aux opérateurs de l'action audiovisuelle, ce qui correspond notamment à la poursuite du plan d'amélioration des programmes de TV5.

En matière de coopération militaire, les moyens financiers sont stables. La diminution des forces françaises en Afrique va de pair avec un effort spécifique pour le programme de renforcement des capacités africaines de maintien de la paix -RECAMP, ce qui me paraît aller dans le bon sens.

En ce qui concerne les crédits d'assistance technique, je continue à regretter qu'ils soient réduits au rôle de variable d'ajustement budgétaire, mais je sais qu'une réflexion sur ce point est engagée.

Enfin, la place des droits de l'homme fait souvent objet de polémiques. On ne doit jamais éluder la nécessité d'une action visant à protéger ces droits. C'est pourquoi j'ai approuvé la décision française de suspendre en 1999 ses activités de coopération avec les Comores, la Guinée Bissau, le Niger, le Togo. Il faudra réagir de la même manière aussi souvent que nécessaire.

L'aide au développement représente une composante essentielle de la politique étrangère de la France. La réflexion aujourd'hui entreprise pour moderniser notre politique de coopération est salutaire.

Je me réjouis enfin que le Gouvernement ait accepté d'organiser un débat parlementaire annuel, hors de l'examen budgétaire, sur la politique de coopération et ses orientations. J'espère qu'une date sera prochainement retenue.

Au nom de la commission des affaires étrangères, je vous propose de voter ces crédits (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Bernard Cazeneuve, rapporteur pour avis de la commission de la défense pour les affaires étrangères et la coopération - S'agissant de la politique de sécurité et de défense, je me réjouis de l'effort de la France pour conforter sa présence dans les grandes organisations multilatérales. Ainsi, la France participe activement au conseil de sécurité de l'Organisation des Nations unies et s'acquitte de sa contribution, à la différence de la première puissance de la planète, qui tente par ce biais de faire pression sur l'Organisation. Il convient aussi de saluer les efforts de la France pour situer l'intervention de l'OTAN dans le conflit du Kosovo dans le cadre des résolutions 1199, 1203 et 1244 des Nations unies, ce qui a permis à l'ONU de reprendre l'initiative.

Il est important de noter le rôle joué par notre pays pour que, sous l'égide de l'ONU, les opérations de maintien de la paix se déroulent dans de bonnes conditions. Ainsi la MINURCA en Centrafrique présente un bilan très positif.

Au total 11 000 militaires français participent à des opérations de maintien de la paix : 3 500 au sein de la SFOR en Bosnie, 6 500 dans la KFOR au Kosovo.

Dans ce contexte, nous pouvons approuver sans réserve l'action menée par la France au sein de l'OTAN. Son implication, plus importante que jadis dans les actions et les structures de l'OTAN, a lieu dans le strict respect de la doctrine politique internationale de la France et du contrôle national de ses forces.

De fait, à l'initiative de la France, le nouveau concept stratégique fait plusieurs fois référence à la charte des Nations unies. L'action au Kosovo a préservé le contrôle politique par la France des forces qu'elle avait engagées, tout comme en Bosnie-Herzégovine.

La participation plus grande de la France aux structures de l'OTAN ne prend pas d'autre caractère qu'une meilleure connaissance des procédures et des hommes de l'OTAN pour l'action en commun.

La croissance de la participation française au budget de l'OTAN, qui atteindra 660 millions en 2000 contre 422 en 1997, apparaît ainsi comme la simple traduction d'une meilleure relation technique.

La politique menée dans le cadre de la PESC doit être approuvée, notamment la possibilité d'agir militairement sous le timbre européen. La procédure de l'abstention constructive est tout à fait adaptée à ce type d'action.

Saluons également le soutien de la France à l'OSCE, qui participe à des opérations en Bosnie, en Albanie et au Kosovo. Les cinq sixièmes des contributions au budget de l'OSCE, qui atteint 1,35 milliard sont consacrés à ces opérations.

La réforme de la coopération militaire et de défense va dans le bon sens. En effet, elle ne sacrifie pas l'Afrique. La diminution du nombre de coopérants ne compromet en rien la qualité de la coopération. La création d'une école nationale à vocation régionale a permis de développer une coopération d'appui et d'instruction.

Constatant la cohérence de la politique française de sécurité et de défense, la commission de la défense a donné un avis favorable à l'adoption des crédits des affaires étrangères (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Patrick Bloche, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles pour les relations culturelles internationales et la francophonie - La commission des affaires culturelles a donné un avis favorable à l'adoption des crédits des relations culturelles internationales et de la francophonie, qui permettent de mettre en _uvre un certain nombre d'activités prioritaires : renforcement de l'enseignement français à l'étranger, promotion de l'enseignement supérieur français auprès des étudiants étrangers, réforme de notre audiovisuel extérieur, principalement TV5.

La francophonie possède un bel avenir dans la société de l'information. La structure de l'Internet, par l'inexistence d'un centre et la création des contenus en périphérie, permet de casser la vision habituelle d'une action francophone verticale, au profit d'une francophonie transversale, rééquilibrant les rapports Nord-Sud, créant même des nouvelles relations Nord-Nord et surtout Sud-Sud. Aussi, depuis trois ans, existe-t-il un programme « nouvelles technologies » au sein de l'Organisation internationale de la francophonie. Le fonds francophone des inforoutes est déjà une vraie réussite.

De plus l'Internet permet de toucher l'individu francophile qui, au bout du monde, vit dans un environnement non francophone. On peut ainsi répondre à son « désir de France ».

Il est donc essentiel de se préoccuper des contenus : avant d'exporter, il faut savoir ce qu'on exporte, et donc mettre en _uvre un Internet public d'intérêt général.

Face à un modèle largement importé d'outre-Atlantique, il est essentiel de pouvoir développer nos propres usages de l'Internet intégrant nos valeurs et nos traditions. Tout indique, malgré les apparences, que le plurilinguisme est le champ naturel de développement de l'Internet. La pratique de l'anglais régresse sur la Toile et se situe actuellement à un taux de 56 %. Il s'agit pour les francophones d'interconnecter le français avec les autres langues et, pour les Français de devenir un peuple traducteur.

Encore peu visible dans la société de l'information mondiale, l'Internet français devrait disposer de plusieurs « portails » génériques ou thématiques et bénéficier d'actions de promotion des moteurs de recherche français et de campagnes de référencement des sites français sur les moteurs de recherche internationaux. Les « labels » permettraient de rassurer les utilisateurs sur la qualité des contenus et des services.

Nous relayons ainsi des préoccupations souvent exprimées au huitième sommet des pays ayant le français en partage, tenu à Moncton il y a deux mois. La francophonie ne veut plus apparaître comme une forteresse assiégée par l'anglais, et l'organisation s'élargit peu à peu à des pays où le français n'est pas d'usage courant.

Aujourd'hui, le plurilinguisme et la diversité culturelle sont les raisons d'être de la francophonie. Ce sera le cadre de l'intervention de la France lors des négociations de l'OMC à Seattle. On mesure ainsi l'importance des enjeux de ce budget que je vous invite à adopter (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV).

M. Jean-Claude Lefort, suppléant M. Georges Hage, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères pour les relations culturelles internationales et la francophonie - Il me faut remplacer l'irremplaçable Georges Hage qui est légèrement souffrant.

La direction générale des relations culturelles scientifiques et techniques a laissé la place depuis le 1er janvier 1999 à la direction générale de la coopération internationale et du développement.

Faut-il voir dans cette disparition de toute référence culturelle la reconnaissance du poids mineur qu'il conviendrait d'accorder aux échanges culturels ? La culture a souvent été perçue par le Quai d'Orsay non comme un objectif en soi, mais comme un moyen de faciliter les relations politiques et commerciales. Il serait fâcheux que ce principe de subordination inscrit dans l'organigramme se traduise dans les faits.

La mise en place de la DGCID doit au contraire offrir une opportunité nouvelle pour placer notre action culturelle et internationale sous le signe de la consolidation et de la rénovation.

Les concours financiers en faveur de l'action culturelle extérieure demeurent globalement stables.

Trois domaines bénéficient néanmoins d'efforts particuliers : la promotion des enseignements supérieurs français, la langue française et l'audiovisuel extérieur.

Le français est, avec l'anglais, la seule langue parlée sur les cinq continents ; elle joue le rôle de langue de travail dans de nombreuses organisations internationales ; elle constitue le lien entre une communauté internationale forte de 52 pays, la francophonie.

L'originalité de notre langue, susceptible d'être parlée par plus de 250 millions de personnes est d'être demeurée liée à des valeurs et à une culture de portée universelle, alors que l'anglais est surtout considéré comme une langue véhiculaire.

La promotion du français, dans les systèmes éducatifs nationaux doit s'inscrire dans le cadre d'un plurilinguisme bien compris. Il est également nécessaire d'améliorer l'accueil des étudiants étrangers en France. Une attention particulière doit être accordée à la place du français sur le Net.

S'agissant de l'exception culturelle, votre rapporteur veut exprimer clairement sa position, que partagent nombre de ses collègues, au-delà de tout clivage politique. Non, la culture ne doit pas être traitée comme un produit commercial, et le Gouvernement doit organiser la résistance culturelle à une entreprise qui vise à étendre à l'univers entier les intérêts particuliers de ceux qui dominent le commerce. Les Etats-Unis s'efforceront d'obtenir à Seattle la remise en cause de l'exception culturelle qu'ils ont dû concéder à Marrakech.

De même que le protectionnisme est justifié lorsqu'il s'agit de défendre une industrie naissante, l'aide publique à la création garantit la diversité des sources de la créativité européenne. Il faut se réjouir, à cet égard, que le plan d'entreprise du nouveau président de TV 5 ait eu pour effet d'accroître l'audience de cette chaîne sur l'ensemble des continents, à l'exception, que l'on souhaite provisoire, de l'Amérique, et que le Gouvernement ait fait un geste, dans le projet de loi de finances, en sa faveur. Face à ce que MM. Allègre et Moscovici appellent «une extraordinaire machine d'invasion intellectuelle», la culture française ne manque pas d'atouts. Ce budget doit servir à encourager les artistes de talent et à améliorer la diffusion de leurs _uvres. C'est pourquoi je vous invite, avec Georges Hage, à le voter (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe RCV).

M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères - Conformément à la nouvelle procédure d' examen, Charles Josselin et moi-même sommes longuement intervenus, la semaine dernière, devant la commission élargie, et avons répondu aussi complètement que possible, oralement ou par écrit, aux nombreuses questions qui nous ont été posées. Je ne reviendrai donc pas sur les grands axes de la politique étrangère de la France, ni sur les principaux enjeux de l'année 2000 : présidence française de l'Union européenne, négociations de l'OMC, non-prolifération nucléaire et désarmement.

Je rappellerai seulement que ce budget, ainsi que les rapporteurs l'ont souligné, donne un coup d'arrêt à la baisse continue des moyens, constatée depuis 1995. L'augmentation est minime, je le reconnais - 0,6 %, soit 170 millions -, mais le renversement de tendance est fondamental, notamment sur le plan des effectifs : la fusion avec le ministère de la coopération nous a permis de dégager, de sauver 92 emplois qui serviront en particulier à renforcer les moyens des consulats, et je réitère mes remerciements à ceux d'entre vous qui nous ont aidé à obtenir ce résultat. Ce changement de cap traduit la reconnaissance de l'effort de modernisation entamé voici deux ans et constitue pour moi un encouragement à le poursuivre.

Ce budget va nous permettre de travailler mieux, de relever les défis que j'ai rappelés il y a un instant, d'achever la fusion avec la coopération, de maintenir notre engagement en faveur de la diversité culturelle et de la francophonie, de continuer notre effort d'aide au développement et d'action humanitaire, d'augmenter nos contributions volontaires aux organisations internationales et de renforcer notre action consulaire.

Le mouvement de mondialisation s'accélère, avec toutes les conséquences que cela comporte, et que notre action vise à freiner lorsqu'elles sont négatives et à accompagner lorsqu'elles sont positives. Il en résulte que l'on attend chaque année une plus grande présence, je dirais même une sorte d'ubiquité de la France sur la scène internationale. Pour la première fois depuis longtemps, le budget des affaires étrangères répond à cette exigence, mais ce n'est qu'un point de départ (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV).

M. Jacques Myard - Vous vous contentez de peu !

M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie - L'essentiel de la réforme de la coopération est derrière nous, et ce budget est le premier budget unifié des deux administrations. Les structures sont en place, le Comité international de la coopération et du développement s'est réuni, les nouveaux statuts du Fonds d'aide et de coopération et de l'Agence française de développement sont en cours d'élaboration. Le budget marque, cela a été souligné, une inversion de la tendance à l'érosion des moyens. Les crédits de la Direction générale de la coopération et du développement progressent de 0,1 %. C'est peu, mais c'est nouveau ! Des économies de gestion, ou sur les crédits d'intervention, qu'elles soient dues à l'amélioration de la situation de nos partenaires où à l'impossibilité de les aider, nous permettent de financer nos priorités.

J'ai répondu aux questions que vous avez posées en commission et qui témoignent de votre connaissance des enjeux. Je porte, pour ma part, une attention particulière à la réforme de notre audiovisuel extérieur et à l'utilisation des instruments de la francophonie ; à la défense de nos intérêts et de ceux des pays en voie de développement dans les négociations internationales, comme celle de l'OMC ou la renégociation des accords de Lomé ; aux conséquences à tirer de l'annulation des dettes des pays pauvres, à l'intégration du respect des droits de l'homme parmi les critères d'appréciation ; au dossier de la corruption, qu'a évoqué M. Adevah-Poeuf, et sur lequel nous devons être d'autant plus vigilants que nous entretenons des relations amicales de longue date avec les pays concernés ; à l'association de la société civile à nos actions et à nos projets. Mais nous reparlerons de toutes ces questions lors du débat parlementaire qui aura lieu au printemps (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. François Loncle - Ce budget revêt une grande importance, car le Gouvernement a enfin compris, après des années de dérive dangereuse, qu'il fallait stopper l'érosion des crédits, afin de moderniser les services et de financer les priorités de notre politique étrangère, mais l'effort accompli ne peut être considéré comme suffisant.

M. Jacques Myard - Dites plutôt qu'il est insuffisant !

M. François Loncle - La part des crédits des affaires étrangères dans le budget de l'Etat reste trop modeste : à peine 1,25 %. Le groupe socialiste continuera d'appuyer, Messieurs les ministres, votre volonté de redressement, qui devra se manifester pendant plusieurs exercices encore.

Je ne reviens pas sur les orientations et les priorités qui ont été soulignées en commission, sinon pour insister sur la nécessité de rendre notre politique de coopération plus lisible et pour souhaiter que la redéfinition de la zone de solidarité prioritaire ne pénalise pas l'Afrique francophone. Dix ans après la chute du mur de Berlin, nous vivons dans un monde certes multipolaire, mais dominé par l'hyper-puissance américaine, et l'année en cours aura été marquée par l'intervention au Kosovo, par la reprise du dialogue israélo-palestinien, par les événements de Timor et de Tchétchénie, ainsi que par la poursuite de la construction européenne dans la perspective de l'élargissement.

Au second semestre de 2000, la France présidera l'Union européenne : nous souhaitons que ce soit l'occasion de progrès pour l'Europe de la citoyenneté, de la liberté et de la précarité ; nous formons le v_u que cette présence contribue à un élargissement maîtrisé, l'ouverture vers l'est ne freinant pas la vocation méditerranéenne de l'Europe.

Parce que nous partageons les objectifs que vous avez définis, parce que les moyens de ce ministère ont été incontestablement confortés même si le redressement reste trop modeste, mais aussi parce que nous approuvons la manière dont vous conduisez la politique extérieure de la France, notre groupe votera ce budget ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jacques Myard - Ô surprise !

M. Jean-Bernard Raimond - Votre budget est stable, marquant comme une pause dans un processus de déclin inadmissible, que vous n'aviez auparavant que freiné. Même si sa part dans l'ensemble du budget de l'Etat ne s'est pas accrue, il échappe pour la première fois à la règle des réductions d'effectifs, dont il aurait dû toujours être exonéré ; grâce à la fusion avec l'ex-ministère de la coopération, vous avez même pu dégager 92 emplois supplémentaires. Les expériences passées me font craindre que vous ne rencontriez de nouveau des difficultés. Aujourd'hui, cependant, nous redoutons avant tout les conséquences de la fusion. De celle-ci, j'ai toujours été un partisan résolu mais la création d'un fonds de solidarité prioritaire au bénéfice de 61 pays et le partage des crédits entre ce fonds et l'agence française de développement donne l'impression, peut-être injustifiée, que les pays de l'ex-champ risquent de souffrir quelque peu de cette réorganisation. L'année prochaine, lorsque vous disposerez du bilan des actions du titre IV, il sera indispensable que vous réexaminiez de près les nouveaux équilibres entre pays bénéficiaires.

Ne pensez-vous pas, Monsieur le ministre, que la diversité des questions internationales qui vous assaillent justifierait l'organisation d'un grand débat où nous pourrions traiter des grands problèmes en suspens, par exemple ceux du nucléaire militaire -Start II, prolifération nucléaire, traité d'arrêt complet des essais, défense anti-missile et traité ABM,...- ?

Ce n'est pas un hasard s'il y a eu simultanéité entre la crise du Kosovo et les progrès du projet de défense européenne. Pour le Kosovo, l'essentiel est de s'en tenir fermement à une bonne définition de la crise yougoslave. M. Milosevic est le dernier avatar de la chute du communisme en Europe. Isolé dès avant les bombardements, il est aujourd'hui, plus que jamais, seul et faible, comme le relève M. Carl Bildt, le représentant du secrétaire général. Faisons donc nôtre la formule d'un haut dirigeant roumain : « Tous les problèmes balkaniques seront résolus quand Belgrade cessera d'être communiste ». A cet égard, il est bon que vous-même et nos alliés ayez décidé de revoir la question des sanctions imposées au peuple serbe.

La défense européenne sera, je le pense, au centre de la présidence française. Depuis le sommet franco-britannique de Saint-Malo, le conseil européen de Cologne et l'accord franco-allemand de Toulouse, nous entendons un ton radicalement nouveau en faveur d'une défense européenne autonome, mais n'entrant pas en opposition avec les Etats-Unis.

Je n'ajouterai qu'un mot sur la Russie, après que vous-même vous êtes exprimé publiquement, et à raison, sur l'affaire tchéchène. Une grande partie des problèmes actuels sont ceux d'une fin de règne, aux prises avec les problèmes provoqués en partie par les conditions de l'arrivée au pouvoir de Boris Eltsine. Si les élections législatives de décembre 1999 sont, comme on peut le penser aujourd'hui maintenues, le paysage politique changera et, du même coup, la façon d'aborder les principaux défis. De fortes personnalités se situent au centre de l'échiquier politique : à gauche, MM. Primakov et Loujkov ; à droite, MM. Iavlinski et Stepachine. Le centre est la seule chance de la Russie moderne et démocratique.

J'en reviens au budget. Préoccupé par les conséquences incertaines de la fusion et par le fait que ce budget demeure un parent pauvre, le groupe RPR émettra un vote défavorable (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. Michel Voisin - Ce budget nous laisse, au groupe UDF, sur notre faim !

Vous avez enrayé la chute des effectifs ; vous favorisez l'enseignement et le développement culturel ; vous augmentez le nombre de bourses ; vous prévoyez une contribution généreuse pour les organisations internationales. Nous nous en réjouissons. Mais ces augmentations de crédits se font au sein d'une enveloppe budgétaire inchangée. Une «progression» de 0,64 % avec une inflation de 0,9 %, cela s'appelle une régression.

Les crédits des affaires étrangères et de la coopération ont connu une chute vertigineuse depuis des années. Votre budget pour 2000 marque-t-il une pause en attendant un léger mieux dans les années à venir ou une pause en attendant que sa part dans les dépenses de la nation diminue encore ? J'inclinerai, hélas, pour la seconde hypothèse. En effet, si vous profitez de la fusion du Quai d'Orsay et de la Rue Monsieur pour dégager 92 postes, ce genre de technique n'est disponible qu'une fois. Qu'en sera-t-il l'an prochain ? Je ne vois donc que des motifs temporaires de félicitations pour votre gestion des effectifs.

Cela étant, ces crédits sont aussi la traduction comptable de choix politiques dans lesquels nous nous reconnaissons pour partie. Vous poursuivez la réforme de notre politique de coopération qui conduit à privilégier la formation de gens qualifiés et la mise à disposition d'experts, plutôt que l'envoi de coopérants. Mais pourquoi diminuer plus que nécessaire les crédits de l'aide technique ? Je crains que l'Afrique ne soit une nouvelle fois sacrifiée. Certes, la diminution des bonifications de prêts et des dons en faveur de l'ajustement structurel reflète un rapprochement entre les politiques de la Banque mondiale et du FMI. Mais une telle diminution de plus de 40 % ne se justifie pas par la meilleure santé des économies africaines et nous regrettons que vous fassiez ainsi l'impasse sur ce continent.

Vous dites avoir arbitré cette année en faveur du développement culturel. Mais pourquoi alors la coopération culturelle et la défense de la francophonie sont-elles en si mauvais état en Europe centrale ? La France ne peut tout de même pas rester indifférente à une partie de l'Europe destinée à nous rejoindre dans l'Union.

La délégation française à l'OSCE a toujours milité pour que cette organisation associe à ses débats les pays du pourtour méditerranéen. Nous ne comprenons donc pas pourquoi l'Office universitaire franco-algérien ne bénéficie que de crédits résiduels. Vous promettez l'affectation immédiate de moyens en cas de retour à une coopération plus étroite. Comment se fera l'ajustement et sur quels crédits sera-t-il gagé ?

Votre budget est tellement ténu, ses marges sont tellement étroites dans une conjoncture internationale, ô combien, mouvante, que vous ne vous donnez pas les moyens d'une réaction rapide.

Un mot du Kosovo. Pourquoi, s'agissant d'un dossier aussi sensible du point de vue politique, économique et humain, avez-vous oublié le financement des actions d'urgence ?

Je conclurai en évoquant le sort fait à une grande institution européenne, véritable pont entre l'Union et nos amis d'Europe centrale : le Conseil de l'Europe. Son financement subit des retranchements préjudiciables à ses nouvelles tâches -fonctionnement de la Cour européenne des droits de l'homme, création d'un poste de commissaire à ces droits et aux programmes d'assistance technique. Au moment où s'engagent les négociations sur l'élargissement de l'Union, lorsque la France insiste sur le respect des droits de l'homme dans chacun des pays candidats, pouvez-vous vous détourner d'une institution qui incarne notre message de progrès et d'humanité ? Vous avez donné quelques gages, Monsieur le ministre, mais le groupe UDF attendra encore avant de vous donner sa voix pour l'adoption de ce budget ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL)

M. Pierre Lequiller - En préambule à notre discussion en commission, vous avez relevé, Monsieur le ministre, l'importance croissante des responsabilités qui incombent à notre pays sur la scène internationale avec l'accélération de la globalisation et l'approche de la présidence française de l'Union. Or les moyens accordés à votre ministère apparaissent insuffisants pour remplir ces missions, pour assurer la sécurité de la France et le développement de son influence et pour éviter la constitution d'un monde unipolaire.

Certes, vos crédits augmentent nominalement de 0,64 %, mais le mieux n'est qu'apparent puisque l'inflation devrait être de 0,9 %. Vous n'inversez donc pas la tendance : vous ne faites que stabiliser un budget à la baisse.

Par ailleurs, il ne semble guère réaliste de miser sur un dollar à 5,53 F alors qu'il était à 6,89 F en octobre. Comment compensera-t-on cette sous-estimation de 24 % des dépenses en deux ans ?

Le développement de la francophonie repose d'abord sur l'outil remarquable qu'est l'enseignement du Français à l'étranger. J'avais rédigé un rapport à ce sujet en 1996. La progression des crédits est insuffisante pour répondre à l'augmentation de la demande et des effectifs. Il en résulte une baisse du taux d'encadrement des élèves et une hausse des frais de scolarité qui affecte les familles françaises modestes d'autant que si le montant des bourses augmente, leur nombre diminue de 2,78 %. Surtout, le nombre des élèves étrangers se réduit depuis deux ans, ce qui va à l'encontre de la vocation culturelle de cet enseignement et du rayonnement de notre langue. J'avais dans mon rapport recommandé un redéploiement des établissements vers les zones politiquement et économiquement les plus importantes pour l'avenir -Amérique du Nord, Europe de l'Est et, surtout, Asie. Rien n'a encore été décidé.

Je réaffirme notre souhait d'une croissance plus soutenue du Fonds d'action sociale des Français de l'étranger et notre attachement au mode de fonctionnement de leur caisse de sécurité sociale, menacé par un projet de réforme de Mme Aubry contraire aux conclusions du rapport de l'IGAS à ce propos.

Nous nous inquiétons de la très forte diminution -de 410 millions- de l'aide aux Etats les plus démunis. Vers quelles actions seront redéployés ces crédits ? Comment ne pas craindre un affaiblissement sensible de notre influence ?

J'indique dès à présent que je ne suis pas favorable à l'amendement visant à réduire la souveraineté du Conseil de surveillance de l'Agence française du développement. Comment par ailleurs compensera-t-on la disparition progressive des coopérants, qui jouaient un rôle éminent ?

Messieurs les ministres, si nous vous avons soutenu à plusieurs reprises sur les grands objectifs de notre politique étrangère, nous appelons de nos v_ux une inflexion en ce qui concerne les droits de l'homme. Au moment où s'affirme le devoir d'ingérence, où s'intalle la Cour pénale internationale, nous souhaitons que notre diplomatie soit plus ferme vis-à-vis de nos partenaires économiques et politiques. Cela suppose des orientations plus claires, une réelle conditionnalité des aides, une pression plus forte dans nos relations avec les pays d'Afrique, d'Amérique latine, d'Asie et, je le dis au lendemain de l'anniversaire de la chute du Mur de Berlin, avec la Chine, le Vietnam et Cuba.

Notre position à l'égard de la Turquie est ambiguë : on ne peut défendre sa candidature à l'Union européenne tout en sachant que son adhésion n'est ni souhaitable ni possible. Susciter des espoirs fallacieux peut créer demain des problèmes graves.

Pour toutes ces raisons, le groupe Démocratie libérale votera contre ces crédits.

Un mot enfin de la procédure, que je ne condamne pas mais qui doit être améliorée afin notamment que les questions posées en commission élargie ne reçoivent pas de réponses trop tardives (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF).

M. Pierre Goldberg - Ce budget commun des affaires étrangères et de la coopération enraye enfin la compression des dépenses et la réduction des effectifs, constantes depuis 1995. Pour la première fois la part des crédits de l'action extérieure gérée par votre ministère est supérieure à celle qui demeure sous la tutelle du ministère de l'économie et des finances. Nous déplorons toutefois le décalage entre les moyens donnés à notre politique étrangère et les responsabilités de notre pays dans la nouvelle donne mondiale.

Dix ans après l'effondrement des pays de l'Est, nous sommes loin de ce nouvel ordre mondial alors annoncé, qui devait conjuguer démocratie, droits de l'homme et développement. La domination sans partage d'une seule super puissance, la fuite en avant dans une mondialisation libérale source d'inégalités nouvelles, l'instabilité provoquée par une croissance financière débridée, la remise en cause des institutions internationales par la montée en puissance de l'OMC, la tentative de marginalisation de l'ONU sont autant de défis pour une politique étrangère ayant pour ambition le progrès social partagé.

L'Europe devrait permettre aux nations qu'elle associe de s'entraider et de se dégager ainsi de la pression des marchés financiers comme de la tutelle pesante de la super puissance américaine. On attend des pays européens qu'ils contestent les rapports de domination et qu'ils favorisent des relations de co-développement pour la sécurité mutuelle et pour la paix. A cet égard, il est indispensable de relancer le désarmement nucléaire. La présidence française devrait marquer un temps fort de cette ambition nouvelle pour l'Europe et pour le monde.

Sur l'emploi, il faut aller au-delà des déclarations d'intention. l'Europe doit se fixer des objectifs chiffrés contraignants et un calendrier, comme elle l'a fait pour l'euro. Alors que la Banque centrale européenne vient de relever ses taux d'intérêt, la nécessité d'une relance sélective du crédit se confirme. L'expérience prometteuse lancée en 1994 par la Banque européenne d'investissement avec l'octroi de prêts bonifiés en contrepartie d'engagements précis sur l'emploi mériterait d'être poursuivie.

L'élargissement et la réforme institutionnelle seront des chantiers majeurs. La recherche d'un travail plus efficace ne saurait remettre en cause le droit de chaque peuple à disposer de son destin. Nous sommes pour le maintien du droit de veto en dernier recours. Dans le même esprit, notre Parlement devrait donner un mandat d'orientation au Gouvernement sur sa politique européenne.

L'organisation du continent européen est cruciale. Nous proposons la tenue d'un forum des nations d'Europe pour examiner d'égal à égal avec les pays candidats toutes les questions d'intérêt commun relatives au développement, à la sécurité, à la prévention des crises.

Cela nous permettrait aussi, face à l'OTAN, de donner plus de vigueur à l'OSCE, que le prochain sommet d'Istanbul devrait doter d'une charte pour la sécurité européenne. La seule organisation paneuropéenne devrait aussi être mobilisée pour la recherche d'une solution politique à la guerre dramatique en Tchétchénie.

Les négociations autour du renouvellement de la convention de Lomé sont importantes. Imposeront-elles la libéralisation des échanges aux peuples du Sud ou conforteront-elles des relations préférentielles entre les nations d'Europe et les pays africains afin de favoriser l'autosuffisance alimentaire, la réalisation des infrastructures de base, la promotion des capacités humaines ?

Si les moyens consacrés au développement sont globalement préservés, la question de l'efficacité et de la lisibilité des aides reste posée. Nous souhaitons comme M. Tavernier, l'organisation chaque année d'un débat parlementaire sur la politique de coopération de notre pays, à partir d'un document retraçant la destination des différents crédits de la coopération.

Affirmer notre volonté politique de pénaliser la spéculation et de réformer les institutions financières internationales pour qu'elles servent l'emploi et le développement, loin d'isoler la France, favoriserait la mobilisation de forces sociales et politiques considérables. On a vu sur le dossier de l'AMI l'impact d'une forte prise de position de notre pays.

Plus que jamais, la politique étrangère de la France doit affirmer une ambition et disposer des moyens correspondants. Afin d'encourager les premiers efforts en ce sens, le groupe communiste votera ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste).

M. Yves Cochet - Au nom des députés Verts, je veux expliquer pourquoi nous avons choisi une abstention bienveillante à l'égard de ce budget.

La première raison tient à l'absence d'un bilan sur les accords de Marrakech et la naissance de l'OMC, il y a cinq ans.

M. Jacques Myard - Il a raison !

M. Yves Cochet - Avant de s'engager dans un nouveau cycle de négociations où nous espérons que les intérêts de la France et de l'Europe seront défendus, il eût fallu faire un bilan diplomatique, mais aussi économique, social, environnemental pour l'ensemble des pays, car il ne s'agit pas ici uniquement du match Etats-Unis - Europe mais de l'ensemble de la planète.

D'autre part, on semble avoir des difficultés à faire prendre en compte dans les négociations commerciales internationales des sujets de plus en plus préoccupants. Ainsi, il existe une cinquantaine d'accords multilatéraux sur l'environnement. La France, l'Europe demanderont-elles qu'on y subordonne les accords commerciaux ? De même, ces accords seront-ils subordonnés aux normes de l'OIT ?

Sur le développement durable, les réponses écrites que vous avez apportées aux questions de Mme Aubert nous ont satisfaits partiellement.

Mais je ne crois pas que, collectivement, nous ayons suffisamment pris conscience des risques et des dangers qui pèsent sur l'environnement. Être écologiste ne me rend pas monomaniaque. Mais qui ne perçoit les problèmes de désertification, déforestation, ceux de l'eau -dont le partage est essentiel dans le conflit du Moyen-Orient-, de la prolifération nucléaire, de l'effet de serre ? Ils ne sont pas suffisamment pris en compte aujourd'hui. Sur l'aide publique au développement, vous nous avez apporté par écrit quelques réponses de bon sens.

Avec quelques collègues de la majorité et aussi certains de l'opposition, nous avons écrit une lettre ouverte à Kofi Annan à propos du déclin de l'influence de l'ONU. N'est-il pas temps de la démocratiser, et en particulier en ce qui concerne la composition du conseil de sécurité, qui n'est pas représentatif actuellement. S'il doit y avoir un gendarme du monde, ce ne sont pas les Etats-Unis, c'est l'ONU (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

Les crédits inscrits au titre III de l'état B, mis aux voix, sont adoptés.

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ETAT B TITRE IV

Mme la Présidente - Sur le titre IV de l'état B, je suis saisie de plusieurs amendements.

M. Jacques Myard - Mon amendement 36 a valeur de symbole, après un débat-croupion dans un Parlement-croupion, -ce dont il ne faut pas s'étonner puisque ce Parlement a perdu sa souveraineté (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

Nous ne sommes plus vraiment sous la Vème République. Aussi, le budget des affaires étrangères est-il examiné selon une procédure bâclée. C'est scandaleux. La globalisation a des effets jusque dans notre vie quotidienne, mais la France maîtrise son destin un peu moins chaque jour ; elle subit. Le vrai danger, ce n'est pas cette « hyper-puissance » qu'on dénonce parfois, mais notre propre faiblesse. En adoptant les concepts stratégiques de Washington, nous nous sommes mis nous-mêmes dans la dépendance des Américains. En Irak, au Kosovo, il faudrait réagir. Monsieur le ministre, vous avez écrit qu'il existe «une volonté française de vouloir». Mais avec un budget qui baisse en francs constants, la France est à quai. C'est donc pour vous donner les moyens de défendre la politique de la France que je propose, par mon amendement 36, de supprimer la mesure nouvelle qui enlève 158 millions à votre ministère. Votez cet amendement, pour que le ministre puisse faire entendre la voix de la France !

M. Yves Tavernier, rapporteur spécial - M. Myard récidive. Je lui reconnais une vertu, l'opiniâtreté. Mais je ne peux le laisser traiter l'Assemblée de Parlement-croupion. Apparemment, elle ne l'était pas lorsqu'il votait des budgets en réduction... Pour la première fois depuis 1993, grâce à l'action du ministre, mais aussi à celle des rapporteurs...

M. Jacques Myard - Qu'on leur donne la Légion d'honneur !

M. Yves Tavernier, rapporteur spécial - ...ces crédits progressent. Est-ce là un Parlement-croupion ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Comme chaque année, vous proposez de remodeler le titre IV (M. Myard interrompt) Si vous voulez comprendre, je vous demande d'écouter, mais c'est une vertu que vous n'avez pas ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jacques Myard - Vos leçons, gardez-les !

M. Yves Tavernier, rapporteur spécial - Vous voulez supprimer les mesures nouvelles. Elles sont liées à la rationalisation de la gestion. D'autre part, les besoins financiers pour l'ajustement structurel sont en baisse, car la situation en Afrique s'est améliorée. Vous devriez vous en réjouir comme nous. Dans ces conditions, les crédits prévus suffisent à répondre à la demande.

L'amendement n'a pas été soumis à la commission des finances. A titre personnel, je le trouve particulièrement inopportun et je demande à l'Assemblée de le repousser.

M. le Ministre - Le Gouvernement ne doute pas de la pureté des intentions de M. Myard. Mais un ministre ne peut s'associer à une augmentation des dépenses. Je ne peux donc le suivre.

M. Jacques Myard - Monsieur Tavernier, n'en faites pas trop ! Si ce budget augmente légèrement en francs courants, il baisse en francs constants. Mais surtout, ne venez pas dire que si l'on diminue les crédits du titre IV, c'est que l'Afrique va mieux ! Malgré le succès de la dévaluation du franc CFA, que vous aviez critiquée, ce n'est pas vrai. Simplement, Bercy a dit que c'était comme ça, alors, servilement, vous suivez ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

L'amendement 36, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Arnaud Montebourg - L'évolution du budget est louable. Notre amendement 117 vise à restreindre les crédits dans un domaine particulier, la politique de coopération avec la République de Djibouti, qui n'a pas évolué de façon significative depuis mai 1997.

Mme Yvette Roudy - C'est vrai !

M. Arnaud Montebourg - Cette continuité mérite un contrôle parlementaire plus approfondi. Nous l'avons fait dans le cadre du débat budgétaire, dans celui d'un groupe d'amitié France-Djibouti, en écrivant au ministre concerné. Cette année la générosité de la France à l'égard de ce régime -j'ai scrupule à employer le beau mot de République- est de plus en plus contestée, notamment par ses victimes. Nous avons une responsabilité particulière à l'égard de nos anciens ressortissants du Territoire des Afars et des Issas. Or, les opposants sont en exil ou en prison, les militants syndicaux sont arrêtés ou victimes de harcèlement judiciaire, les avocats se font couper la langue -je parle quand même au figuré-, les journalistes sont incarcérés. Voilà le quotidien djiboutien. Mais les intérêts français sont aussi malmenés. Mme Roudy est intervenue à plusieurs reprises sans obtenir de réponses satisfaisantes au sujet de l'assassinat d'un magistrat. Des journalistes français, qui se sont rendus sur place il y a quinze jours pour enquêter sur les conditions dans lesquelles l'argent des contribuables français était dépensé, ont vu leur matériel saisi et se sont faits expulser manu militari. Je ne parle pas des avocats empêchés de plaider au nom d'une convention d'entraide judiciaire que les autorités djiboutiennes semblent avoir dénoncée sans consultation préalable. Je note avec M. le rapporteur Adevah-Poeuf que Djibouti reçoit 449 F par habitant alors que le Mali et le Bénin se contentent respectivement de 26 et 37 F.

J'ai bien compris l'inconfort dans lequel se trouve le Gouvernement, que nous soutenons, car il semble que certaines exigences se situent au-dessus de sa tête. La politique du Gouvernement est bonne mais elle est contrariée par la coutume selon laquelle le chef du Gouvernement n'est pas le chef de la diplomatie. A cet égard il n'est pas possible pour le Parlement de discuter avec un Président de la République qui aurait des exigences sur notre diplomatie puisqu'il n'est pas responsable devant lui. Notre amendement s'adresse donc en priorité à ceux qui soutiennent au-delà de l'acceptable la République de Djibouti. Nous avons fixé la restriction de crédits à 95 millions, cette somme peut paraître considérable mais elle représente les montants attribués par les contribuables français aux ressortissants de Djibouti sur les deux exercices 1998-1999 (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste).

M. Maurice Adevah-Poeuf, rapporteur - Après le moment d'animation que nous devons à M. Myard, nous entrons dans un débat sérieux. La commission des finances n'ayant pas examiné cet amendement, je m'exprimerai à titre personnel.

A quelques nuances près, je partage l'exposé des motifs de M. Montebourg. Je ne serai pas de ceux qui élèvent la voix pour prétendre que la République de Djibouti est un régime exemplaire en matière de démocratie et de droits de l'homme, je pense le contraire. Cependant, Monsieur Montebourg, si nous avons à Djibouti une base navale, cela ne résulte pas de divergences entre l'exécutif gouvernemental et la présidence de la République, mais d'un traité approuvé par le Parlement.

Je suis en désaccord sur les modalités. Vous êtes un grand avocat et un parlementaire plus astucieux que M. Myard (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) ...mais permettez-moi d'appeler votre attention sur la technique budgétaire. En vertu de la globalité, si l'Assemblée décidait d'annuler 95 millions au chapitre 41-43, le Gouvernement pourrait maintenir l'aide à Djibouti en diminuant d'autant les crédits attribués à d'autres pays. Mais je puis vous assurer de la vigilance dont je ferai montre au conseil de surveillance de l'agence s'agissant du pays sur lequel vous avez une raison d'appeler l'attention.

Je vous invite donc à retirer votre amendement.

M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie - Vous proposez une réduction de 95 millions en invoquant l'atteinte aux libertés publiques dont seraient responsables les autorités djiboutiennes.

95 millions, d'ailleurs, c'est trop peu, nous faisons davantage.

Mme Yvette Roudy - C'est donc encore pire !

M. le Ministre délégué - L'aide atteint environ 150 millions. Encore ne faut-il pas y ajouter, comme certains journalistes l'ont fait, le milliard correspondant au fonctionnement de la base qui compte près de 3 000 militaires. S'agissant du contrôle des fonds d'aide au développement, les crédits sont soumis au contrôle de la Cour des comptes. Quant aux crédits relatifs à la présence militaire de la France à Djibouti, je réaffirme que nous connaissons avec précision la destination des 65 millions afférents : ils sont affectés à des marchés publics d'infrastructures qui ont été pour partie confiés à des entreprises françaises. Ces chiffres que vous avez rappelés -340 francs par habitant- correspondent à la moyenne de 1995 à 1997. En ce qui nous concerne, nous sommes en train de redéfinir notre relation avec cette république. Mais je vous rappelle que le ratio par habitant est mécaniquement supérieur lorsque le territoire considéré a une population relativement faible. C'est ainsi que Djibouti peut faire figure de privilégiée.

Sur la question centrale des libertés publiques, nous n'avons pas cessé d'en parler avec les autorités de Djibouti, notamment lors de la visite à Paris il y a quelques semaines du nouveau président. Notre intervention a d'ailleurs permis certains progrès, comme l'appel fait par les autorités djiboutiennes à la mission internationale de l'observatoire des prisons, pour mettre fin à la grève de la faim qui s'était déclenchée à la prison de Gabod, et qui était soutenue sur notre territoire par des ressortissants djiboutiens auxquels j'avais rendu visite.

S'agissant des projets de coopération, qu'il s'agisse d'éducation ou de santé, ils profitent d'abord aux populations. Mais nous conditionnons les crédits au progrès du respect des droits fondamentaux.

Vous avez soulevé la question de la restitution des cassettes de France 2 : notre ambassade a déjà fait des démarches et nous en reparlerons à l'occasion de la commission mixte qui se tiendra prochainement à Paris.

J'ai compris, Monsieur le député, que vous déposiez cet amendement essentiellement pour que cet échange ait lieu...

M. Arnaud Montebourg - Non !

M. le Ministre délégué - ...et je voulais vous convaincre de le retirer. Je suis prêt à rediscuter de l'affaire Borrel. Elle remonte à 1995, elle fait l'objet d'une instruction devant le tribunal de grande instance de Paris. Il y a déjà eu transport de magistrats, j'ai reçu la famille et j'espère que l'action de la justice aboutira.

M. Arnaud Montebourg - Je maintiens mon amendement.

M. Pierre Lequiller - Nous ne le voterons pas, mais nous partageons le point de vue de son auteur. La conditionnalité dont on parle tant doit être suivie d'effet, même si, en l'occurrence, supprimer les crédits ne nous paraît pas la bonne solution. M. Montebourg demande à juste raison au Gouvernement de se montrer plus ferme pour défendre les droits de l'homme dans un pays où ils sont fortement bafoués.

L'amendement 117, mis aux voix, n'est pas adopté.

Les crédits du titre IV de l'état B, mis aux voix, sont adoptés.

M. Jacques Myard - Rappel au Règlement, fondé sur son article 58. Je ne serais pas très astucieux, à en croire M. Adevah-B_uf. Je lui répondrai en paraphrasant Courteline : c'est une volupté de fin gourmet que d'être pris pour peu astucieux par quelqu'un qui n'y comprend rien !

Les crédits du titre V de l'état C, mis aux voix, sont adoptés.

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ETAT C TITRE VI

M. Maurice Adevah-Poeuf , rapporteur spécial - A M. Myard je réponds adage pour adage : heureux les gens petits car ils sont les derniers à savoir qu'il pleut ! (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

La création d'un chapitre 68-93 nouveau a pour effet de transférer un milliard en AP et 922 millions en CP de la tutelle du ministère des affaires étrangères à celle du ministère de l'économie. Cela peut poser un problème au ministre des affaires étrangères, mais après tout cela le regarde. En revanche, cette décision met en cause le contrôle parlementaire a priori.

M. Paul Quilès, président de la commission de la défense - Ne pourrait-on pas accélérer ? Nous avons un autre budget à examiner à la suite !

M. Maurice Adevah-Poeuf, rapporteur spécial - Les amendements 108 et 109 de la commission des finances tendent à supprimer ce chapitre 68-93, non pas pour vous retirer des crédits, mais pour que vous vous exprimiez sur une mesure qui aboutit à déléguer directement ces crédits à l'AFD, dont le directeur général a délégation jusqu'à 10 millions, le conseil des Etats étrangers jusqu'à 60 millions. Au-delà, le Conseil de surveillance est saisi et comme y siègent trois parlementaires, le contrôle s'exerce normalement.

Etes-vous prêts à faire modifier ces seuils pour que les contrôles parlementaires a priori puissent s'exercer normalement ?

Mme la Présidente - Pourriez-vous conclure ?

M. Maurice Adevah-Poeuf, rapporteur spécial - En second lieu, le fonds de solidarité prioritaire va fonctionner selon des règles que nous ne connaissons pas encore. Mais il semble que le conseil d'orientation ne sera plus saisi des projets. Dans ce cas, acceptez-vous que les parlementaires qui siègent au conseil d'orientation soient destinataires pour avis des projets dans la limite de l'ancien seuil de 12 millions du FAC, avant les réunions d'attribution tenues au sein de votre ministère ? Si vous levez ces deux réserves, je retirerai les deux amendements.

M. le Ministre délégué - S'agissant du FAC qui va devenir Fonds de solidarité prioritaire, les parlementaires qui participeront au conseil d'orientation pourront recevoir les projets pour avis. Ils garderont ainsi le pouvoir de s'exprimer sur chaque projet avant décision.

D'autre part, je ne vois pas d'objection à une révision des seuils en vigueur à l'AFD. Au service comité directeur du FAC, à l'initiative du sénateur Charasse, nous avons décidé d'une procédure de suivi spécifique des crédits délégués à l'Agence pour les infrastructures d'éducation et de santé.

Vous le voyez, le contrôle parlementaire n'est pas amoindri.

M. Maurice Adevah-Poeuf, rapporteur spécial - Ces explications me conduisent à retirer les amendements 108 et 109.

Les crédits du titre VI de l'état C, mis aux voix, sont adoptés.

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RAPPEL AU RÈGLEMENT

M. Michel Voisin - Rappel au Règlement. Il est difficile d'accepter le fait personnel de M. Adevah-Poeuf envers notre collègue Jacques Myard.

Le groupe UDF demande une suspension de séance pour étudier les suites à lui donner.

M. Pierre Lequiller - Dans un débat qui se déroulait bien, M. Adevah-Poeuf s'est livré par deux fois à une attaque personnelle inacceptable, d'ailleurs désapprouvée par ses collègues. Nous demandons nous aussi une suspension de séance.

M. René Galy-Dejean - Le groupe RPR s'associe à cette demande.

Mme la Présidente - Avant d'y répondre, je précise que nous avons terminé l'examen des crédits du ministère des affaires étrangères. Je souhaite que l'on respecte un minimum de courtoisie dans les échanges mutuels.

La séance, suspendue à 18 heures 25, est reprise à 18 heures 35.

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DÉPÔT DU RAPPORT D'UNE COMMISSION D'ENQUÊTE

Mme la Présidente - M. le Président de l'Assemblée nationale a reçu ce jour de M. Raymond Forni, président de la commission d'enquête sur le fonctionnement des forces de sécurité en Corse, le rapport fait au nom de cette commission par M. Christophe Caresche. Ce rapport sera imprimé et distribué, sauf si l'Assemblée, constituée en comité secret, décide, par un vote spécial, de ne pas autoriser sa publication, en tout ou en partie. La demande éventuelle de constitution en comité secret doit parvenir à la Présidence dans un délai de cinq jours francs à compter de la publication du présent dépôt au Journal officiel de demain, soit avant le mercredi 17 novembre.

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DÉFENSE
-vote sur les crédits-

Mme la Présidente - Nous allons procéder au vote des crédits du ministère de la défense, à l'occasion duquel nous allons mettre en _uvre la nouvelle procédure définie par la Conférence des Présidents. Suivant cette procédure, la commission de la défense, saisie pour avis, a tenu une réunion publique ouverte à tous les députés, dont le compte rendu sera publié en annexe à celui de la présente séance, de même que les réponses aux questions écrites des députés. Avant les votes, je donnerai la parole au ministre de la défense, aux rapporteurs des commissions, au président de la commission de la défense et à un orateur par groupe.

M. Michel Voisin - Rappel au Règlement !

M. Alain Richard, ministre de la défense - Fidèle aux principes définis par la loi de programmation, ce budget de la défense comporte les moyens nécessaires à la professionnalisation et au développement des capacités humaines, ainsi qu'à l'acquisition des matériels prévus. J'insiste au passage sur les moyens accordés à la gendarmerie pour concourir à la sécurité intérieure du pays.

L'actualité est riche de développements nouveaux : ratification en cours de l'OCCAR, achèvement de la fusion de l'administration de la défense et de celle des anciens combattants, construction du premier grand groupe industriel européen, discussion par le conseil « affaires générales », à partir de lundi prochain, des modalités concrètes de mise en _uvre de la défense européenne dans la ligne du sommet de Cologne.

Le Conseil des ministres de ce matin a, par ailleurs, tiré de l'intervention au Kosovo des enseignements qui confirment la validité des choix faits en matière de matériel et de systèmes humains.

Le volume de l'activité industrielle de défense s'accroît, et sa compétitivité s'améliore, ce qui assure à l'industrie française une place enviable en Europe. Nous lui avons passé, depuis deux ans, 45 milliards de commandes, avec un gain de visibilité pour les entreprises et un gain financier pour l'Etat. Le GIAT continue de connaître des difficultés, que nous devons surmonter. Nous avons décidé de faire commander par l'armée de terre cinq à dix véhicules-canons Caesar, promis à un grand avenir, notamment à l'exportation, et de mettre en place, comme le recommande M. Sandrier, des équipes de projets pour faciliter la diversification. Le GIAT aura reçu, cette année, entre 1,8 et 2,8 milliards, alors qu'il n'était prévu que 1,5 milliard.

Je conclurai en évoquant trois points sur lesquels je puis donner satisfaction aux parlementaires qui les ont soulevés en commission. L'étude de faisabilité du nouveau DCD est achevée, de sorte que la commande sera lancée dans le courant de l'année prochaine. 250 ouvriers d'Etat et 50 fonctionnaires supplémentaires seront recrutés. Enfin, un amendement du Gouvernement va réparer l'injustice faite aux anciens sous-lieutenants et sous-officiers partis à la retraite avant 1976 (« Très bien ! » sur tous les bancs).

Les crédits qui vous sont soumis sont conformes aux engagements à long terme de l'Etat, et tiennent compte de vos demandes, notamment en ce qui concerne les moyens de fonctionnement. Je vous invite à les adopter (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

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RAPPEL AU RÈGLEMENT

M. Michel Voisin - L'article 58 de notre Règlement dispose que les rappels au Règlement ont toujours priorité sur la question principale.

Mme la Présidente - Il dispose également que la parole est alors accordée au député qui la demande, « soit sur-le-champ, soit, si un orateur a la parole, à la fin de son intervention ». Or, j'avais donné la parole à M. le Ministre.

M. Michel Voisin - Nous l'avions demandé avant, mais je m'incline devant la Présidence.

Cela dit, si nous avons demandé cette suspension de séance, c'est en raison de propos à l'encontre de notre collègue Jacques Myard. Nous pensions cependant que, dans cet hémicycle, la tolérance et le respect de l'autre devaient et pouvaient l'emporter et nous comptions demander à notre collègue rapporteur de présenter des excuses publiques à M. Myard lorsque la séance reprendrait. Or cette personne n'a pas osé revenir parmi nous pour assumer ses actes. Le groupe UDF ne peut que s'en indigner et s'élever contre ce comportement, faisant suite à une mise en cause inacceptable.

Je voudrais maintenant parler de la nouvelle procédure adoptée pour l'examen des crédits de la défense. Il y a une semaine, nous avons discuté de ces crédits en commission et, sur 4 heures de délibérations, l'opposition n'a pu s'exprimer, rapporteurs compris, que pendant 45 minutes. Aujourd'hui, sur 80 minutes, nos trois groupes ne disposeront que de trente ! Pourtant, aux termes de l'article 3 de la Constitution « aucune section du peuple ni aucun individu ne peut s'attribuer l'exercice de la souveraineté nationale »...

Nous avons mené une expérience. Qu'ils soient de la majorité ou de l'opposition, les rapporteurs ont fait de l'excellent travail mais ils ont déjà rapporté dans les mêmes termes à deux reprises : devant la commission lors de la réunion élargie, puis à nouveau le 3 novembre. Voici qu'ils s'apprêtent à recommencer. Cependant, au total, sur 330 minutes, l'opposition n'aura parlé que 75 minutes. La disproportion est évidente avec le temps accordé à la majorité !

Nous sortons du conflit du Kosovo ; nous avons envoyé des forces au Timor oriental ; voici 25 ans que nous sommes présents au Sahara occidental, 35 ans au Liban. Comment les porte-parole de nos trois groupes pourraient-ils en cinq minutes faire le point sur tout cela, faire valoir nos critiques, observations ou suggestions ? Ce budget est tout de même avec ses 200 milliards, le troisième de l'Etat : chaque orateur devrait donc, en une minute, justifier ou critiquer 40 milliards de dépense ! De toute ma vie d'expert-comptable, ce sera bien la première fois qu'il me sera offert de me prononcer sur une somme aussi exorbitante en aussi peu de temps ! Je ne crois pas que ce soit bon pour la démocratie (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL).

Mme la Présidente - Je crois avoir dit tout à l'heure ce qu'il convenait de dire à propos de votre premier point, en rappelant chacun à la courtoisie et au respect de l'autre. Je regrette l'absence de M. Adevah-Poeuf mais il a entendu tout à l'heure mes propos et je les lui réitérerai le cas échéant.

Sur le second point, j'ai pris note de vos observations critiques. Vous devrez le faire valoir lorsque nous procéderons à l'évaluation de la nouvelle procédure qui, en effet, me semble justifier quelques objections.

M. Pierre Lequiller - M. Voisin a bien traduit notre sentiment. Au nom du groupe Démocratie libérale, je dirai à mon tour combien nous avons été choqués par les attaques personnelles gratuites dont M. Myard a été victime à deux reprises. Je regrette, moi aussi, que M. Adevah-Poeuf ne soit pas resté pour présenter des excuses mais je vous remercie, Madame la Présidente, de bien vouloir lui transmettre nos propos.

S'agissant de la procédure suivie en commission, je crois qu'elle serait mieux adaptée à des questions mineures. Appliquée au budget, elle aboutit à morceler la discussion et je crois donc qu'une réflexion s'impose en effet sur ce sujet.

M. René Galy-Dejean - Le groupe RPR s'associe bien sûr aux protestations des deux autres groupes de l'opposition et vous remercie, Madame la présidente, pour ce que vous avez dit sur le premier point.

Mme la Présidente - Pour ce qui est de cette procédure expérimentale, décidée en Conférence des présidents, je répète qu'elle fera très certainement l'objet d'une appréciation critique au terme de la discussion budgétaire.

M. Jean-Michel Boucheron, rapporteur spécial de la commission des finances - Ce débat intervient dans un contexte un peu particulier : au moment où nous célébrons le dixième anniversaire de la chute du Mur de Berlin, la quiétude l'emporte en Europe et les budgets de défense européens, en forte baisse, reflètent ce sentiment. D'autre part, les Etats-Unis font peut-être retour à un certain isolationnisme : le Sénat y reproche à l'exécutif l'intervention au Kosovo et demande une protection par des missiles antimissiles. Nos voisins européens devraient bien prendre en compte cette inclination au repli.

Ce matin, Monsieur le ministre, vous avez présenté au conseil des ministres un rapport sur le Kosovo qui mettait en lumière l'existence d'une double chaîne de commandement. On pourrait presque soutenir que cette intervention a été le fruit d'une alliance entre l'Amérique et l'OTAN ! Vous demandez donc que les responsabilités soient réparties de manière à préserver le lien transatlantique et à prendre acte de la montée en puissance de l'acteur européen. Mais cet acteur est-il bien en train de monter en puissance ? Là est tout le débat !

Ce budget nous permet d'évaluer la crédibilité de la France à cet égard. Je dirai que, grâce à lui, la France tient son rang en Europe. C'est un budget serré, auquel il manque deux ou trois milliards pour être parfait mais, à 2,5 % du PIBM, nous sommes à mi-chemin de la Grande-Bretagne, qui en est à 3,5 % et de nos autres partenaires, qui n'en sont qu'à 1,5 %. La loi de programmation sera préservée, les procédures financières ont été assainies, le lien entre autorisations de programme et crédits de paiement est clairement établi et les commandes globales engendrent des économies.

La professionnalisation se déroule correctement et la situation est également satisfaisante s'agissant des grands programmes, malgré des tensions ici ou là -je pense au renseignement, aux drones, à l'observation spatiale et à l'ATF, mais vous laverez sans doute les incertitudes sur ce dernier point l'an prochain.

Ce budget nous autorise donc à tenir le discours européen qui est le nôtre. A cet égard, je salue bien évidemment la naissance d'EADS. Il faut désormais que les Européens sachent ce qu'ils veulent faire ensemble.

Rigueur mais aussi assainissement et fidélité à une ambition : la commission des finances a approuvé ces crédits ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jean-Bernard Raimond, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères - La commission des affaires étrangères a adopté ces crédits contre l'avis de son rapporteur. J'ai cependant reconnu que ce budget comporte des éléments positifs.

Mais il ne tire pas assez les enseignements du conflit du Kosovo et, surtout, ne prend pas suffisamment en considération le développement sans précédent des conceptions de la défense européenne.

Ce n'est pas un hasard si le conflit du Kosovo a éclaté alors que s'affirmait l'idée d'une défense européenne volontariste, soit au sein de l'Alliance atlantique soit en dehors mais sans remise en question de la solidarité avec les Etats-Unis. Ce conflit a trempé la volonté des Européens et a montré que la France dispose d'une réelle capacité militaire et politique, mais il a aussi souligné la supériorité américaine et l'écart technologique et budgétaire entre les deux rives de l'Atlantique. Les Etats-Unis demeurent fermement engagés sur le continent mais rien ne prouve que cet engagement sera maintenu en toutes circonstances. Enfin, ce conflit a confirmé la justesse des choix faits par le Président de la République mais il a aussi mis en lumière certaines déficiences dans nos équipements. Une nouvelle déflation des crédits serait contradictoire avec la nouvelle approche qui prévaut en Europe.

Malgré un effort de défense significatif, ce budget est en régression de 2 milliards et le niveau des crédits de paiement est inférieur à celui prévu par la revue de programme. Les autorisations de programme sont globalement à la hausse, mais celles réservées à la marine et à l'armée de l'air diminuent, alors que ces armes ont joué un rôle important au cours du conflit du Kosovo. Vous nous avez dit, Monsieur le ministre, que les autorisations de programme, les reports et l'amélioration de la gestion des crédits permettraient de respecter la programmation. Je vous en donne acte mais je regrette que vous ne soyez pas en mesure d'afficher devant la représentation nationale un engagement budgétaire plus lisible. Il eut été heureux que la France présentât une augmentation des crédits de paiement affectés à l'équipement, ne serait-ce que pour montrer à certains de nos partenaires que nous n'entendons pas les suivre sur la voie des réductions.

Il convient de préserver la possibilité de coopération en dépit des décisions décevantes prises par nos partenaires ou par nous-mêmes. Ainsi, le programme de l'hélicoptère NH90 a été lancé en 1992 et son développement est achevé. Pourtant, aucun contrat pour son industrialisation n'a été signé. Cela tient aux difficultés budgétaires de l'Allemagne mais l'impulsion française semble aussi faire défaut alors que le vieillissement des Puma devrait nous inciter à ne pas attendre 2011 pour les remplacer. En outre, ces hésitations risquent de compromettre les exportations vers les pays nordiques. Je souhaite vivement que vous nous indiquiez comment ce dossier sera géré dans les prochains mois.

J'aimerais aussi savoir comment sont mises en _uvre les orientations arrêtées à Saint-Malo, Toulouse et Cologne. Où en sont la transformation du corps européen en corps de réaction rapide et la définition de la nouvelle architecture qui permettra à l'Union européenne de disposer d'organes permanents compétents pour l'exercice des missions de Petersberg ?

J'espère que la présidence française de l'Union au second semestre 2000 aura une influence significative en faveur de la défense européenne et que les progrès se traduiront dans les prochains budgets.

M. René Galy-Dejean, rapporteur pour avis de la commission de la défense pour la dissuasion nucléaire - La réforme de notre Règlement instituant une séance de commission ouverte au public suivie de la présente séance dans l'hémicycle pourrait conduire à nous faire répéter plusieurs fois un discours tronçonné. Je varierai donc un peu mon propos tout en maintenant le cap des convictions qui m'animent. Je peux ainsi répondre aux arguments qui ont été les vôtres, Monsieur le ministre, lorsque vous avez pris la parole après mon intervention lors de la séance publique de notre commission. Vous avez choisi de traiter à la légère, presque avec désinvolture, la proposition essentielle de mon rapport selon laquelle il serait possible de différer la mise en _uvre du quatrième sous-marin nucléaire lanceur d'engins sans porter atteinte à la crédibilité de notre dissuasion et d'engager sans tarder les études pour la réalisation d'un deuxième porte-avions à propulsion classique, afin de permettre la permanence à la mer de notre groupe aéronaval. En réponse, vous avez évoqué les jeux de lego de vos enfants auxquels j'aurais pu être associé en changeant par caprice une pièce pour une autre. Cette réponse n'a pas été à la hauteur des enjeux. Elle était pour le moins discourtoise à l'égard de la représentation nationale, qui n'est guère habituée à une telle légèreté.

Ma proposition d'inverser des priorités est argumentée par une analyse qui occupe quarante pages du rapport.

Ce sont des chiffres que j'avance, non des préférences subjectives. C'est un calendrier que je mets en perspective. Je fais valoir que la décision prise il y a trois ans mérite d'être reconsidérée si la volonté n'est plus là. Or, les budgets que vous nous avez présentés depuis trois ans l'ont anéantie.

Vous avez cherché par ailleurs à me mettre en contradiction avec ma position de 1995 sur le deuxième porte-avions. Il faut être précis : je disais alors que le deuxième porte-avions ne pourrait être financé au cours de la programmation 1997-2002. J'ai hélas eu raison et je crains qu'il ne le soit pas non plus dans la prochaine...

Vous ne pouvez pas continuer à dire que vous allez réaliser tous les grands programmes d'équipement de nos forces armées et amputer gravement, année après année, les crédits prévus pour les financer. Or c'est vous, c'est votre majorité, qui avez la maîtrise absolue des inscriptions budgétaires.

Je ne puis donc accepter que vous cherchiez à enfermer le Président de la République dans votre propre démarche financière et à me mettre en contradiction avec le Chef des armées. Le Président de la République avait, conformément à la Constitution, fixé pour notre défense et notre sécurité des orientations qui s'étaient traduites par une loi de programmation militaire. Comme nous l'a dit le chef d'état-major des armées, il manquera plus de 50 milliards pour exécuter cette loi de programmation. Ce sont bien le Gouvernement et la majorité qui en portent la responsabilité après trois budgets successifs. De cela, le Chef de l'Etat n'est pas responsable. Vous ne lui avez pas donné les moyens de ses ambitions, des ambitions de la France.

Je persiste donc : différez la mise en _uvre du 4ème SNLE et lancez sans tarder les études pour le deuxième porte-avions. Sinon la réduction des crédits vous enfermera à bref délai dans une incohérence financière et stratégique, dont vous aurez pris la responsabilité devant l'histoire (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. Bernard Grasset, rapporteur pour avis de la commission de la défense, pour l'espace, la communication et le renseignement - L'utilisation de l'espace, des communications et du renseignement de théâtre est désormais un élément essentiel de la politique militaire, le conflit du Kosovo l'a montré. Pourtant, cet enseignement ne reçoit cette année aucune traduction budgétaire.

Ainsi, les crédits de paiement et les autorisations de programme consacrés à l'espace diminuent de 15 et 24 %. L'effort budgétaire pour la recherche-développement sur les drones est modeste au regard de leur potentiel. Le renouvellement des systèmes de communication des armées est très étalé de sorte que certains retards ne seront pas comblés.

Je crains que les crédits de l'espace soient incompatibles avec la continuité des programmes spatiaux majeurs.

Je relève toutefois aussi plusieurs motifs de satisfaction. La décroissance des moyens budgétaires est contrebalancée par une nette amélioration du taux de consommation des crédits depuis 1997 et par le maintien à niveau du financement de la recherche amont. Les armées pourront par ailleurs passer un certain nombre de commandes, nécessaires à la modernisation de leurs systèmes de communication. Enfin, l'équipement des forces en moyens de recueil de renseignements tactiques sera complété par les programmes de cohérence et d'écoute électromagnétique dont le budget assure la continuité.

On peut donc être satisfait, d'autant que le budget de l'espace concilie les aléas de coopérations industrielles difficiles avec la continuité des ambitions affichées par le plan pluriannuel spatial militaire et la loi de programmation.

Bien sûr, certains aspects peuvent susciter quelques réserves. Le conflit du Kosovo est trop proche pour qu'il ait des incidences budgétaires immédiates. La France ne peut donc se passer de coopérations sans nuire à ses ambitions. C'est pourquoi nous devons poursuivre nos efforts afin de rallier nos partenaires à nos projets, quitte à participer à certains des leurs. C'est seulement ainsi qu'une identité européenne de sécurité et de défense verra le jour.

Telles sont les raisons pour lesquelles la commission de la défense a donné un avis favorable aux crédits consacrés à l'espace, aux communications et au renseignement (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean-Claude Sandrier, rapporteur pour avis de la commission de la défense pour les forces terrestres - Le budget de l'armée de terre a été considéré par le général Crène, son chef d'état-major, comme «respectant le cadre fixé par la loi de programmation militaire».

Le titre III, en légère progression, marque l'amorce d'un redressement, avec une augmentation des jours d'entraînement.

Le titre V est en diminution de 3,8 % en crédits de paiement. Sa gestion sera difficile mais cela ne devrait pas entraîner de nouveaux décalages par rapport à la programmation. Cela aura toutefois des effets sur l'emploi. Un véritable plan de transition et de diversification associant militaire et civil est donc nécessaire. Les autorisations de programme augmenteront de 13 %, c'est bon signe.

Au titre III, le déficit en personnels civils est d'environ 3 700 personnes, ce qui est préjudiciable à l'armée de terre qui ne souhaite pas utiliser des engagés sur des postes civils.

Je sais, Monsieur le ministre, que vous êtes préoccupé par ce grave problème. Il devient urgent d'obtenir de Bercy de nouvelles dérogations à l'interdiction d'embauche pour les postes géographiquement difficiles à pourvoir ou de prendre des mesures d'incitation pour favoriser le redéploiement de fonctionnaires, ouvriers d'Etat ou contractuels issus d'établissements jugés en sureffectifs. L'externalisation et la sous-traitance ne peuvent être pérennisées. Je me réjouis que vous ayez tenu compte de notre débat en commission et annoncé la création de 250 emplois d'ouvriers d'Etat et de 50 postes de fonctionnaires.

Concernant le titre V, les responsables de l'armée de terre se plaisent à souligner les performances du char Leclerc qui a donné entièrement satisfaction au Kosovo où il a joué un effet très fort de dissuasion.

Mais ces responsables sont préoccupés, en matière de blindés, par le VCI. Sans revenir sur l'histoire mouvementée des différentes tentatives de coopération et leur échec, un appel d'offres lancé par la DGA est aujourd'hui en cours.

Le fabriquant du char Leclerc, GIAT Industries, qui a fait ses preuves depuis longtemps en matière de blindés, est la société la mieux placée pour enlever ce marché.

M. Yann Galut - Très bien !

M. Jean-Claude Sandrier, rapporteur pour avis - La qualité de GIAT Industries est un atout à utiliser, y compris pour de futures coopérations. Choisir GIAT Industries comme maître d'_uvre pour le VCI est une nécessité urgente.

M. Yann Galut - Vous avez raison !

M. Jean-Claude Sandrier, rapporteur pour avis - C'est le moment de lui donner le coup de pouce industriel dont elle a besoin. Aussi votre décision de lui commander 5 à 10 Caesar est particulièrement importante.

Il serait souhaitable que l'Assemblée débatte de la situation et de l'avenir de l'industrie d'armement ; ce débat pourrait utiliser le travail d'une mission d'information demandée par des syndicats -en particulier pour GIAT Industries- dont je soutiens ardemment l'idée.

Dans le même esprit, le Parlement doit être associé à chaque étape de la loi de programmation militaire dès son lancement.

Le général Crène, chef d'état-major de l'armée de terre, considère que ce budget des forces terrestres pour 2000 respecte parfaitement le cadre de la loi de programmation militaire. Je vous invite à le voter (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste).

M. Jean-Yves Le Drian, rapporteur pour avis de la commission de la défense pour la marine - Les crédits de la marine avaient augmenté en 1999 ; ils baissent pour 2000 de 2,7 %. La réduction de leur part dans le budget de la défense est une tendance ancienne et préoccupante.

La marine est une armée d'équipement. Les crédits du titre III garantissent la prochaine annuité de professionnalisation et l'entretien général de la flotte. Mais la diminution de 21,2 % des AP nous préoccupe. Le budget 2000 permettra la mise en _uvre du porte-avions Charles-de-Gaulle, la poursuite du programme d'armement PAAMS, et les conditions sont bonnes en ce qui concerne la frégate Horizon.

Cependant, poursuivre la diminution des autorisations de programmes remettrait en question le renouvellement d'équipements majeurs ainsi que la maquette de la marine revue en 1998 et qui prévoit une réduction de 20 % des personnels et des équipements. Nous souhaitons que la prochaine loi de programmation lève les incertitudes à ce sujet.

Enfin, nous estimons que la transformation de la DCN en service de compétence nationale ne permet pas d'assurer la modernisation indispensable. Nous souhaitions une autre formule et nous craignons qu'en 2003 ou 2004 il soit trop tard pour faire face à la concurrence, alors que l'Allemagne et la Grande-Bretagne ont déjà procédé à des restructurations. Vous aviez assorti la transformation en service de compétence nationale de trois conditions : la recapitalisation de DCN internationale, l'application de la directive Réseaux pour le code des marchés et l'alliance de DCN avec des partenaires industriels. Si ces trois conditions sont remplies, pourquoi pas ? En tout cas elles sont indispensables.

La commission de la défense a donné un avis favorable sur les crédits de la marine (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Yann Galut, rapporteur pour avis de la commission de la défense pour l'air   Je souhaite souligner quelques points forts de ce budget. D'abord, la professionnalisation de l'armée de l'air est réussie. Fin 2000, ses effectifs seront à 1 % près, les effectifs prévus en 2002. Désormais, elle se préoccupe d'ajustements de postes et des modalités de la sous-traitance.

Le budget de fonctionnement proprement dit -en hausse de 12,7 % avec 1,63 milliard- permet à l'armée de l'air de participer aux grands exercices tactiques internationaux.

Je soulignerai aussi la qualité de la gestion de l'armée de l'air. Elle n'est responsable que de 17 % des surcoûts pour les opérations au Kosovo, pourtant essentiellement aériennes.

Enfin, la mise en place, à l'initiative de l'armée de l'air, d'un dispositif nouveau, interarmées, de gestion des rechanges aériens, permettra des diminutions de coûts importantes.

S'agissant du titre V, nous sommes satisfaits de la bonne orientation des équipements telle que le conflit du Kosovo l'a mise en lumière, qu'il s'agisse des Mirage 2000 D, des Mirage 2000-5, qui entreront en service à la fin de l'année, de l'armement air-sol modulaire, système de tir sur coordonnées de précision métrique, dont l'équipement est prévu dans quatre ans, de l'interopérablité vérifiée des Awacs français ou encore de nos capacités de renseignement stratégique et tactique, -20 % de ces missions ayant été confiées à l'armée de l'air- ou encore de la validation du choix du Rafale.

Pourtant, le titre V est en diminution de 6,9 % pour les crédits de paiement, avec 18,8 milliards et de 10,3 % pour les autorisations de programme, avec 18,2 milliards. Vous avez indiqué que le « creux » enregistré sur les autorisations de programme était prévu et qu'il ne ralentirait pas le programme d'équipement, notamment en ce qui concerne la deuxième tranche d'avions Rafale, et surtout, que, dès lors que l'accord relatif aux commandes d'ATF serait passé, le financement pourrait suivre, même s'il n'avait pas été prévu en programmation.

Cependant, l'expérience du Kosovo, les évolutions de l'Europe de la sécurité modifient le contexte. Les travaux de préparation de la nouvelle loi de programmation militaire devront donc comporter une réflexion d'ensemble sur le rôle, actuel et futur, de l'arme aérienne, d'où devront découler la définition et le volume des équipements nécessaires.

La commission de la défense a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de l'armée de l'air pour 2000 (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Gérard Charasse, rapporteur pour avis de la commission de la défense pour le titre III et les personnels de la défense - Les crédits inscrits au titre III hors pensions, s'élèveront l'an prochain à 104,9 milliards contre 103,9 en 1999, en augmentation d'environ 1 %. Ils englobent les 400 millions provenant du budget du secrétariat d'Etat aux anciens combattants.

L'évolution engagée depuis 1997 se confirme : les rémunérations et charges sociales augmentent de 1,5 % tandis que les autres crédits diminuent de 0,9 %. Ces ressources représentent désormais plus de 80 % des crédits du titre III.

Les effectifs du ministère de la défense s'établiront en 2000 à 474 000 emplois, en baisse de près de 5 %, ce qui traduit la forte diminution du nombre d'appelés et de sous-officiers tandis que sont créés de nombreux emplois de militaires professionnels, de volontaires et de personnels civils.

La déflation des effectifs de cadres, officiers et sous-officiers se passe au mieux. Les pécules d'incitation connaissent un large succès et les départs sont même en avance sur les prévisions. L'armée de l'air n'est plus qu'à 1 % de la réalisation de son format professionnel.

Le recrutement des engagés et des volontaires se déroule également bien. L'objectif de l'année 1999 a été atteint dès le 1er octobre.

En revanche, au 1er septembre 1999, 9 925 postes de civils étaient vacants. Pour les 6 500 emplois de fonctionnaires non pourvus, l'organisation prochaine de concours devrait améliorer la situation. On pourrait proposer aux personnels des entreprises d'armement de postuler.

Sur les 3 500 postes vacants d'ouvriers d'Etat, le ministère des finances interdit toute embauche en raison des sureffectifs constatés à la DGA et à la DCN. Toutefois, une relance de la mobilité est indispensable pour atteindre les objectifs de la loi de programmation qui fixe à 12 500 le nombre des ouvriers de la DCN contre 16 000 actuellement et pourvoir les emplois actuellement vacants au sein de nos régiments. Je soutiens les démarches du ministère de la défense pour obtenir de la direction du budget des autorisations exceptionnelles d'embauche pour les cas les plus urgents.

Il faut aussi que les moyens de fonctionnement, hors ressources humaines, soient à la hauteur.

La loi de programmation a fixé comme objectif une baisse de 20 % de ces dépenses entre 1997 et 2002. Les crédits pour 2000 sont inférieurs de 16,3 %, en francs constants à ceux de 1996, ce qui est cohérent avec l'objectif fixé. Mais la diminution enregistrée pour 2000 marque une rupture par rapport aux réductions drastiques enregistrées les années précédentes.

Ainsi, l'armée de terre pourra organiser 73 jours d'entraînement en 2000 contre 70 en 1999. Des crédits supplémentaires seront affectés à l'entretien immobilier ou à l'entretien programmé du matériel. De même, certains postes budgétaires habituellement sous-dotés à la marine évolueront favorablement.

Cependant, le taux d'activité de l'armée de terre reste encore trop bas, les hypothèses économiques sur lesquelles ont été calculées les dotations en carburant paraissent optimistes et l'entretien des grosses unités de la marine semble se faire de préférence à celui des bâtiments plus petits.

Comme la plupart des chefs d'état-major des armées, votre rapporteur considère que l'amorce de redressement des crédits de fonctionnement courant, pour encourageante qu'elle soit, devra être confirmée dans les années 2001 et 2002.

Nous ne pouvons qu'apprécier le chemin parcouru depuis la discussion du précédent budget. Je constate que le titre III tel qu'il nous est soumis est en cohérence avec la loi de programmation pour ce qui concerne les effectifs et présente une amélioration sensible en matière de fonctionnement courant. La commission de la défense a adopté ces crédits et je propose à notre Assemblée de faire de même (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean Michel, rapporteur pour avis de la commission de la défense pour les crédits d'équipement - Comme l'a dit M. Boucheron, nous sommes en présence d'un budget rigoureux.

Plusieurs députés RPR-UDF - Serré !

M. Jean Michel, rapporteur pour avis - Nous avons pu constater une amélioration importante de la gestion des crédits, avec la mise en place de la notion d'opération budgétaire d'investissement ainsi que d'une comptabilité spéciale d'investissement. On constate ainsi une consommation des crédits 1999 satisfaisante, à hauteur de 96 %, ce qui ne s'était pas vu depuis plusieurs années.

Cette amélioration se fait également sentir dans la limitation des reports de charges ramenées à 2,2 milliards en 1998, une amélioration devant encore être enregistrée en 1999 et en 2000. Si les crédits de paiement paraissent limités, les autorisations de programme ont fortement augmenté pour atteindre 87,5 milliards dans le budget pour 2000. Sur ce point, si les gouverneurs de crédits nous disent qu'il n'y a pas assez d'autorisations de programme, les services de Bercy annoncent que sont disponibles 43 milliards d'autorisations, déléguées et non consommées...

Pour conclure, l'équipement des forces armées françaises s'inscrit toujours dans le cadre de la programmation militaire, mais le budget 2000 n'entrera dans le cadre fixé pour le renouvellement des équipements militaires que si les résultats liés à la mise en place de nouvelles méthodes de gestion sont confirmés. J'ai proposé à votre commission d'adopter ce projet de budget et elle a émis un avis favorable (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Michel Meylan, rapporteur pour avis de la commission de la défense pour les services communs - Lors de la réunion publique de la commission de la défense du 3 novembre, j'ai souligné les points qui me semblaient poser problème dans l'évolution des autre services communs du ministère de la défense que sont la Délégation générale pour l'armement, le Service de santé, le Service des essences et la Délégation à l'information et à la communication de la défense. Je reviendrai aujourd'hui sur les principales interrogations que soulève l'adaptation de ces services à la réforme de notre système de défense.

La réforme de la DGA se met en place progressivement mais non sans difficultés. Ainsi, au début de l'année 1999, l'installation d'un nouvel outil informatique s'est traduite par un arrêt total des engagements et des paiements pendant quelques semaines. J'espère que le retard des engagements observés en cours d'année sera rattrapé car il serait fâcheux que la modernisation de l'équipement de nos armées pâtisse d'une réforme administrative et comptable.

S'agissant de la rénovation des liens entre la DGA et les industriels de l'armement, alors que les concentrations se multiplient dans ce secteur, la DGA reconnaît que 80 % des marchés sont notifiés sans mise en concurrence préalable. Il me semble donc essentiel de maintenir un tissu industriel viable et diversifié au niveau des entreprises sous-traitantes.

S'agissant du service de santé des armées, les tensions constatées à propos des effectifs de médecins risquent de s'aggraver avec la disparition des derniers médecins issus du contingent et du fait des difficultés rencontrées pour recruter sur titres des médecins diplômés. Il convient de mener une politique de communication active et de rendre les carrières plus attractives.

Le défi commun que doivent relever ces services communs tient à ce qu'ils doivent régulièrement participer aux opérations extérieures menées par la France. Il est regrettable que cette donnée structurelle ne soit pas prise en compte dans le projet de budget ; on voit là une carence de la prévision budgétaire.

Je m'interroge cependant sur les répercussions sur le potentiel des hôpitaux militaires de la participation, au demeurant exemplaire, du service de santé des armées aux opérations extérieures, en soutien des forces, comme au Kosovo ou pour des missions purement humanitaires, comme en Turquie ou au Timor oriental.

Devant les nombreuses interrogations que m'inspire le projet de budget des services communs, je serai conduit à titre personnel à m'abstenir sur le vote de ces crédits auquel la commission de la défense a donné un avis favorable (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe du RPR).

M. Georges Lemoine, rapporteur pour avis de la commission de la défense pour la gendarmerie - Le projet de budget de la gendarmerie pour 2000 lui donne-t-il les moyens de remplir toutes ses missions ?

Comme je l'ai souligné devant la commission de la défense, il est globalement bon et il s'inscrit dans la ligne des orientations fixées par la loi de programmation militaire pour la période 1997-2002.

Avec une augmentation des crédits de rémunérations et de charges sociales de 2,2 %, le projet de budget répond à la progression des effectifs, qui s'établit à 577 postes budgétaires.

La hausse des crédits d'investissement répond en outre à l'impérieuse nécessité de moderniser l'équipement des unités. Le budget d'équipement de la gendarmerie progresse ainsi de plus de 5 %. Cette évolution permet de passer commande de 8 hélicoptères biturbines pour répondre aux normes européennes fixées dans ce domaine.

L'évolution du budget de fonctionnement me conduit à être plus nuancé. Si ces crédits augmentent de 1 % après avoir baissé l'an dernier, leur évolution ne peut être considérée comme satisfaisante à l'heure où la gendarmerie mène de front la professionnalisation, la réforme des réserves et l'accueil des volontaires et où elle intensifie son action dans le domaine de la sécurité routière et expérimente de nouveaux modes d'intervention dans les zones périurbaines.

Ce relatif rationnement du budget de fonctionnement est d'ailleurs vivement ressenti par les personnels eux-mêmes, qui sont gagnés par un sentiment d'inquiétude diffus. Les événements qui se sont déroulés en Corse récemment n'ont évidemment rien arrangé. Mais la cause profonde de cette inquiétude réside dans la surcharge de travail des personnels. Aussi est-il à craindre qu'insidieusement une autorégulation de fait ne s'effectue sur le terrain entre les différentes missions, en raison du rationnement des moyens de fonctionnement.

Si je me réjouis, je le répète, du niveau global des crédits budgétaires ouverts pour la gendarmerie en 2000, crédits à l'adoption desquels la commission de la défense a d'ailleurs donné un avis favorable, j'insiste donc sur la nécessité de prendre en compte cette surcharge de travail des personnels. La commission de réflexion mise en place par le ministre sur les conditions d'emploi, les principes d'action de la gendarmerie et la formation de ses personnels, qui doit rendre son rapport dans les semaines à venir, apportera certainement des réponses à ce problème. Je souhaite également qu'il reçoive une réponse financière et qu'un collectif budgétaire vienne limiter autant que possible la restriction des crédits de fonctionnement de la gendarmerie. C'est là un souhait que j'avais déjà formulé en 1998. Il y va de la capacité des unités à assurer, au jour le jour, le respect d'un droit à la sécurité égal pour tous (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Paul Quilès, président de la commission de la défense - Je ne m'étendrai pas sur le problème de la procédure budgétaire expérimentée cette année ; en tant que Président de la commission de la défense, j'aurai l'occasion de faire des observations au Bureau de notre Assemblée. L'excès d'indignité qui a frappé cette procédure me semble cependant déplacé, dans la mesure où il s'agissait d'une expérience, qui n'a pas eu que des effets négatifs.

En ce qui concerne le budget qui nous est présenté, j'ai été surpris du caractère quelque peu excessif de certains propos -je pensais que le débat ancien et un peu stérile sur la baisse des crédits de défense aurait pu être évité. Depuis une dizaine d'années, tous les budgets des pays occidentaux ont baissé : de 33 % aux Etats-Unis, de 15 % en France. Il aurait été aberrant de maintenir un effort d'armement à un niveau élevé alors que la principale menace avait disparu. Je cite une déclaration faite à l'époque et qui me semble tout à fait fondée : «En dépit des risques nouveaux auxquels l'Europe sera confrontée, il n'est pas raisonnable d'exiger que les dépenses militaires françaises se maintiennent, à l'opposé des choix de nos partenaires, à un niveau aussi élevé que dans les années 1980. La France fait face à de nouvelles priorités, notamment d'ordre social, qui doivent recevoir de l'Etat les moyens nécessaires». Ainsi s'exprimait ici M. Pierre Lellouche le 6 juin 1996. Trois ans plus tard, ce propos conserve toute sa valeur (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

J'aurais préféré que nous stabilisions nos crédits de paiement cette année. Après la déclaration de Saint-Malo et le sommet de Cologne, il eût été bon de donner un signe positif à nos partenaires européens. Reste que la structure particulière des dépenses d'investissement en matière de défense nous a permis de réduire cette année nos crédits de paiement, sans décaler aucun programme. Nos armées recevront en 2000 les dotations prévues dans la loi de programmation militaire.

Nous commençons à toucher les dividendes d'une réforme de la DGA, mise en place sous un précédent gouvernement. Nous achetons nos matériels d'armement moins cher, ce qui prouve qu'en dépensant moins, nous pouvons acheter autant.

Il nous faudra dans les années à venir augmenter les AP et les CP pour financer la commande de matériels importants : NH-90, ATF, M-51. Pour les programmes conçus en coopération, nous devrons nous montrer un allié financièrement sûr.

Si je comprends que l'on puisse critiquer le budget de la défense, je souhaiterais mettre en garde les auteurs de ces critiques.

Ceux qui ont travaillé dans la mission d'information sur l'avenir de l'OTAN n'ont pas oublié que les Américains souhaitaient inscrire dans le concept stratégique le principe d'interopérabilité des forces, ainsi que celui de la nécessaire réduction de ce qu'ils estiment être un «fossé technologique» entre l'Europe et les Etats-Unis. Cette dernière notion peut paraître exagérée dans la mesure où les budgets de la défense ont diminué dans des proportions identiques de part et d'autre de l'Atlantique. Je suis d'ailleurs sceptique sur ce prétendu retard technologique de l'Europe, quand je constate que les difficultés boursières d'entreprises américaines comme Boeing ou Lockheed-Martin, dont l'action a baissé de 56 à 21 dollars en un an, ont également pour cause des échecs techniques.

L'équation se dessine dans toute sa simplicité : interopérabilité des forces + retard technologique de l'Europe = nécessité d'acheter du matériel américain. Il ne faudrait donc pas que le souci légitime de défendre le budget de la défense conduise à faire le lit de ceux qui ne souhaitent pas qu'une capacité de défense autonome européenne se construise.

C'est donc avec lucidité que notre commission a approuvé le budget 2000. Les véritables enjeux vont concerner la future loi de programmation, qui devra comporter un important volet européen. J'espère que la commission de la défense pourra être associée le plus tôt possible aux travaux de préparation (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Pierre Lellouche - Du fait d'une méchante réforme de procédure qui nous a été imposée, la discussion du budget de la défense se trouve tronquée et réduite ici à sa plus simple expression, digne des parlements de l'Ancien régime (Exclamations et rires sur les bancs du groupe socialiste).

C'est d'autant plus grave que votre budget est inacceptable, ne faisant au mieux qu'accompagner la professionnalisation, sans doter nos armées des équipements majeurs dont elles ont effectivement besoin.

Jamais nos armées n'auront été autant sollicitées que depuis la fin de la guerre froide : 60 opérations extérieures depuis 1990. Jamais la sécurité et la stabilité de notre continent n'auront été des enjeux aussi importants : nous célébrions hier le dixième anniversaire de la chute du Mur alors que nos forces campent durablement en ex-Yougoslavie et que les missiles russes s'abattent sur le Caucase. Jamais la perspective d'une future identité européenne de défense ne nous aura autant occupés face à une Alliance atlantique totalement contrôlée par les Etats-Unis, comme vous l'avez vous-même reconnu ce matin.

Jamais le contexte stratégique d'ensemble n'aura été aussi préoccupant pour notre dissuasion. Et c'est dans ce contexte que vous allez doter la France du plus médiocre budget d'équipement que l'on pouvait craindre, alors que les rentrées fiscales et la situation économique permettaient qu'il soit celui du rattrapage.

Au contraire, il marquera une étape supplémentaire dans l'effritement apparemment inévitable mais soigneusement masqué de notre appareil de défense.

Vous agissez ainsi non par manque d'argent, mais en vertu de choix politiques, idéologiques et électoraux. Vous avez choisi de consacrer 170 milliards aux 35 heures, aux emplois-jeunes et à la CMU, soit deux annuités d'équipement de nos armées.

Les opérations militaires, dont le coût sera de 4 à 6 milliards cette année, ne sont toujours pas financées. Pourquoi ne pas créer, pour y faire face, un titre VI dans le budget ? L'équipement accuse 59 milliards de retard selon l'estimation du général Kelche. Il manque 18 milliards pour réaliser les engagements sur le Rafale, le NH90 et le M51, alors que la capacité de projection, dont Lionel Jospin lui-même reconnaît qu'elle est essentielle pour le pays, ne bénéficie pas du moindre franc, ni pour l'ATF, ni pour le deuxième porte-avions. Le budget de l'espace, avec une baisse de 25 % des AP et de 15 % des CP, à laquelle s'ajoute un transfert au CNES de 1,5 milliard, est tout simplement sacrifié. Est-ce une façon de donner suite aux leçons que M. Jospin lui-même a tirées de l'intervention au Kosovo ? Est-ce pour cela que les crédits de l'armée de l'Air, qui n'a acheté qu'un avion neuf cette année, diminuent ?

A l'instar des chefs d'état-major, dont je salue le sens des responsabilités, je pourrais égrener une longue litanie de regrets concernant la marine et le vieillissement de sa flotte, l'état préoccupant de nos stocks, la durée d'entraînement insuffisante de nos forces terrestres.

En vérité notre armée, du fait des choix financiers que vous avez faits la concernant, perd toute cohérence stratégique et opérationnelle. Nous sommes tout près du point de rupture.

J'entends dire que ceux qui dénoncent cette baisse des crédits d'équipement seraient objectivement les agents des Etats-Unis. Je suis atterré par ce genre d'argument.

J'entends dire aussi que la solution au financement futur de tous les grands programmes retardés passerait par l'Europe. Si rien n'est prêt chez nous, ce serait parce que nos partenaires hésitent ou réduisent leurs budgets de défense. Ce n'est pas ma conception de l'Europe. L'Europe a réalisé Ariane ou Airbus parce que des nations, et principalement la France, en ont ainsi décidé. Se réfugier derrière les hésitations de nos partenaires est la pire des solutions.

Pour toutes ces raisons, et en protestant contre la brièveté indigne de ce débat, le groupe RPR s'élève contre le sous-équipement et l'espèce de désarmement unilatéral que vous imposez à nos armées (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR).

M. Michel Meylan - L'année dernière, le groupe DL avait fait part de ses inquiétudes, indiquant même que le pire était à venir, en particulier pour les crédits d'équipement.

Balayant nos arguments d'un revers de main, vous aviez affirmé que le Gouvernement respecterait la loi de programmation. Rendez-vous avait été pris pour le budget de l'an 2000.

Cette année, alors que le Parlement n'était pas encore informé des arbitrages budgétaires, le Président de la République, chef des armées, profitait de son traditionnel message aux armées du 14 juillet pour indiquer que « la réforme des armées devait continuer avec une détermination sans faille » et que cela supposait « que la France y consacre les moyens et les ressources indispensables ».

Il vous signifiait ainsi d'avoir à tirer les conséquences de la guerre du Kosovo et de consentir un effort budgétaire supplémentaire.

Bercy a eu raison des bonnes intentions, vous obligeant à présenter un projet de budget étriqué qui malgré vos propos rassurants n'a convaincu personne. Il ne permet pas de construire un modèle de défense dynamique, efficace et adapté aux exigences du XXIème siècle.

La légère hausse du titre III s'explique principalement par les rémunérations nouvelles liées à la professionnalisation, et nous souhaitons avec le chef d'état-major des armées que son niveau soit relevé dans les exercices suivants.

Il serait en effet regrettable que le manque de crédits entraîne des pertes de compétence pour nos forces dans le cadre de l'entraînement opérationnel.

On peut également noter que la dotation allouée à la Marine baisse et que les crédits de fonctionnement de la gendarmerie sont calculés au plus juste.

Vous jouez subtilement sur la distinction entre crédits d'équipement et autorisations de programme pour conclure que les dépenses d'équipement sont en augmentation, mais c'est du trompe-l'_il, car les crédits de paiement subissent une sévère entaille, au risque de provoquer des retards dans les programmes : il manquerait près de 60 milliards de francs pour l'ensemble de la programmation !

Mes craintes sont vives quant au devenir du missile M 51 et de l'avion de transport ATF, d'autant que le conflit du Kosovo a montré l'importance des forces aériennes et aéroportées et que vous disiez vous-même, Monsieur le Ministre, le 21 juin dernier, vouloir en tirer les enseignements. Où est, dans ce budget, leur traduction concrète ? Nos lacunes sont tout aussi criantes en matière de renseignement, notamment par satellite, pour lequel nous dépendons des Etats-Unis. Enfin, mes réserves sont plus fortes encore pour la recherche, dont les moyens stagnent, et l'espace, dont les crédits sont en chute libre : notre retard par rapport à la technologie américaine va encore se creuser, compte tenu de l'absence patente de coopération européenne.

Pour toutes ces raisons, le groupe DL votera contre ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF).

M. Gérard Charasse - Au terme de la nouvelle procédure, pour le moins originale, que l'Assemblée a souhaité instituer, nous voici revenu au mode de discussion habituel. Ce budget est celui de la cohérence et de la modernisation, deux conditions nécessaires à la construction, que j'appelle de mes v_ux, d'une Europe de la défense.

La représentation nationale n'avait pas oublié, Monsieur le Ministre, votre souhait de transparence. La diffusion de documents tels que le rapport annuel du CPRA ou l'annuaire statistique de la défense montre combien il était utile de permettre à nos armées, qui n'y étaient d'ailleurs pas hostiles, de dire ce qu'elles font et comment elles le font. Nous apprécions, pour notre part, de pouvoir soumettre toutes nos idées, avec la certitude qu'elles seront examinées et l'espoir qu'elles soient retenues. C'est un changement de méthode bienvenu.

Pour la première fois, un gouvernement va mener à son terme une loi de programmation.

M. René Galy-Dejean - Mais dans quel état !

M. Gérard Charasse - Mon âme d'Auvergnat est rassurée de voir cette promesse entrer dans les faits, et ce pour la quatrième année consécutive. Achèvement de la professionnalisation, amélioration des basses rémunérations, pérennisation du système de commandes pluriannuelles, rattrapage des retards d'engagement de 1995-1996 : ce budget a un sens et s'inscrit dans la durée. Il ne manque plus qu'un volet permettant aux employés des usines d'armement restructurées d'intégrer les corps déficitaires.

Si nous approuvons ce budget, enfin, c'est aussi parce qu'il va permettre à la France de peser dans la construction de l'Europe de la défense (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Les députés Verts, cependant, émettront un vote négatif en raison de la mise en _uvre du projet Laser-Mégajoule.

M. Guy-Michel Chauveau - Ce projet de budget s'inscrit dans la continuité de la loi de programmation et poursuit l'amélioration engagée depuis 1997. La consommation des crédits du titre III évolue de façon positive : 61 milliards en 1996, 80 en 1997, 81 en 1998, 80 cette année selon l'évaluation communiquée par le ministre à la commission, et 82,9 milliards sont inscrits en crédits de paiement pour l'an prochain. Une analyse et un contrôle plus stricts ont permis de stabiliser les crédits et d'améliorer la visibilité financière, ce dont nous nous félicitons au même titre que des réformes de structure engagées au sein de la DGA, de la DCN et du SGA.

Mercredi dernier, au cours de la séance ouverte de la commission - qui aura tout de même consacré une vingtaine d'heures à l'examen des crédits de la défense -, nombre de nos collègues de l'opposition se sont empressés de prendre argument des déclarations de nos chefs d'état-major pour exposer des vues démagogiques et misérabilistes, comme s'il suffisait d'accroître les dépenses pour régler l'ensemble des problèmes (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Auraient-ils oublié ce que déclarait Pierre Lellouche à Libération le 19 avril 1995 ? « Je suis sûr qu'on peut faire mieux avec moins d'argent. » Pour notre part, nous faisons mieux avec autant d'argent !

D'autres ont cru devoir tirer des conclusions hâtives de la crise du Kosovo, quelques mois seulement après son dénouement. S'il faut certes méditer les enseignements de l'opération militaire, la réflexion stratégique et la réflexion sur les moyens doivent être envisagées dans un cadre européen, sans précipitation ni alarmisme.

A ceux qui s'inquiètent des risques que ferait peser le budget 2000 sur la cohérence stratégique de notre politique de défense, je rappelle que, le 20 octobre, devant la commission de la défense, le chef d'état-major des armées déclarait qu'il n'entraînait pas de rupture dans la politique d'équipement et que le processus de professionnalisation se déroulait de façon satisfaisante.

Le groupe socialiste soutiendra donc ce projet de budget, tout en reconnaissant que des efforts restent à accomplir dans plusieurs domaines : recherche et développement, projets industriels tels que l'ATF, coopération spatiale européenne, commandes pluriannuelles. La période qui s'ouvre ne nous laissera pas de répit, étant donné le nombre de dossiers brûlants : définition de l'identité européenne de défense, évolution de l'OTAN et d'autres instances internationales, OCCAR, préparation de la présidence française de l'Union européenne et de la loi de programmation, défense européenne.

Je conclurai en citant de nouveau Pierre Lellouche, qui déclarait ici-même, le 6 juin 1996 : « En dépit des risques nouveaux auxquels l'Europe sera confrontée, il n'est pas raisonnable d'exiger que le niveau des dépenses militaires françaises se maintienne, à l'opposé des choix de nos partenaires, à un niveau aussi élevé que pendant les années quatre-vingt. La France fait face à de nouvelles priorités, notamment d'ordre social, qui doivent également retenir l'attention de l'Etat et recevoir les moyens nécessaires. »

M. Pierre Lellouche - C'est toujours vrai !

M. Guy-Michel Chauveau - Il s'ensuit que, si nous n'avions pas redressé l'économie de notre pays, nous n'aurions pas ce soir à voter ce budget-là ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Pierre Lellouche - C'est un aveu !

M. Michel Voisin - Il en va de la procédure budgétaire comme de la structure du budget de la défense : elle est, comme le pendule de Foucault, animée d'un perpétuel mouvement qui, s'il est bien réel, traduit une multitude de forces antagonistes dont il est bien difficile de cerner à la fois les causes et les tendances profondes (« Ah ! » sur tous les bancs).

M. Didier Boulaud, vice-président de la commission de la défense - Il faudrait demander à Allègre ! (Sourires)

M. Michel Voisin - Nous devons, en un minimum de temps et dans une grande discrétion, passer en revue le troisième budget de l'Etat, comme si l'effort que notre pays consacre à sa défense avait quelque chose de honteux. Faut-il y voir la méfiance retrouvée d'une gauche française historiquement pacifiste et trop facilement internationaliste (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), sous l'effet des concessions faites par le Gouvernement sur l'autel du pluralisme majoritaire ? Le caractère intime de notre réunion de cet après-midi...

M. Didier Boulaud, vice-président de la commission de la défense - Pas plus intime que d'habitude !

M. Michel Voisin - En tout cas, le président de la commission de la défense a disparu, ce que je regrette. Cette faible affluence est peu compatible, à mon sens, avec la nécessité de sensibiliser nos concitoyens à l'esprit de défense. Il faudra réfléchir à l'impact de ce choix de procédure, alors que s'achève la professionnalisation avec la suspension de l'appel sous les drapeaux, phénomènes qui distendront, si l'on n'y prend garde, le lien entre l'armée et la nation.

Cette année encore, la présentation du budget de la défense fait obligation aux parlementaires qui s'y intéressent de chausser des lunettes à foyer multiple. La diminution des crédits varie en effet selon que l'on y intègre ou non, en un agrégat pour le moins intrigant, ceux des anciens combattants. Quelle possibilité aurons-nous, à terme, de mesurer l'évolution de l'effort de défense proprement dit ? Il est de plus en plus difficile, année après année, de raisonner à périmètre constant, quand c'est le changement de périmètre qui devient une constante !

Pris globalement, les crédits diminuent de plus de 2 %. Cette nouvelle érosion poursuit une tendance amorcée voici une dizaine d'années (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). Combien de temps encore le Gouvernement entend-il tirer les dividendes d'une paix que la multiplication des conflits, y compris en Europe, rend chaque jour plus précaire ?

Il faudra bien un jour expliquer comment vous entendez participer à l'édification d'une défense européenne avec des crédits raréfiés ! Quelles pourront être la place et les missions de nos forces armées dans cette architecture commune si elles doivent s'y agréger avec des moyens limités ? Quel sera le poids de notre pays lorsque nos partenaires comprendront que nous nous sommes défaussés de nos charges ?

M. Pierre Lellouche - Vous êtes un agent américain !

M. Michel Voisin - Je ne crois pas !

Il faut dès aujourd'hui avoir de nouvelles ambitions pour la France. Grâce à nos militaires, l'action de notre pays en faveur de la paix est certes important. Il ne faudrait toutefois pas que leur mérite et leur capacité à servir la France sous les couleurs d'alliances internationales exonèrent à bon compte d'autres investissements indispensables. Leur valeur, leur engagement et leur enthousiasme n'auraient plus que peu de poids sans les moyens nécessaires à la réussite de leurs missions.

Malgré les efforts de rationalisation méritoires de votre ministère, ce budget ne permet pas de préparer un avenir ambitieux. La progression permanente du titre III apparaît encore pour longtemps inéluctable. Elle entraînera inévitablement une diminution des crédits d'équipement si vous maintenez ce budget à la baisse. Dans ces conditions, il y a fort à parier qu'un de vos successeurs ne soit contraint un jour de proposer une nouvelle et forte déflation des effectifs. Le choix stratégique de la professionnalisation des forces ne serait plus alors qu'un subterfuge pacifiste dont ce Gouvernement porterait la responsabilité.

Les femmes et les hommes de la défense, qui vous ont suivi sans réserve sur la voie de la professionnalisation, ont besoin d'être assurés de disposer, demain encore, des moyens de remplir une mission pour laquelle ils sont prêts à donner le meilleur d'eux-mêmes, jusqu'au sacrifice suprême.

La baisse de 3,5 % des crédits d'équipement ne peut que les inquiéter malgré toutes les bonnes paroles suscitées par l'accroissement sans précédent des autorisations de programme. Il n'y a pas si longtemps que l'on a présenté comme une _uvre de salubrité budgétaire l'annulation de plusieurs milliards d'autorisations de programme non consommées. Ne faut-il pas craindre que cette opération ne se renouvelle et que le maintien à niveau des études et des fabrications -le MNEF (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) ne soit compromis par les agissements de Bercy ?

Le groupe UDF ne peut apporter sa caution à un budget qui, malgré ces habillages comptables, consacre un manque d'ambition pour la France et pour sa défense (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL).

M. Bernard Birsinger - Ce budget est comme les précédents l'expression des choix inscrits dans la loi de programmation militaire et de ceux qu'a faits le Président de la République -la professionnalisation totale de notre armée et la projection comme principe stratégique- tous choix dont nous contestons le bien-fondé.

La priorité donnée au traitement à chaud des crises ne répond pas à l'exigence d'une politique globale de sécurité collective, dont le volet militaire ne serait qu'un élément. Un monde livré aux inégalités et à la rentabilité financière ne peut produire qu'instabilité et crises. C'est à la racine même de ces maux qu'il faut s'attaquer, si l'on veut conforter la paix et résoudre les grands problèmes de l'humanité. Il est donc aussi important de renforcer l'ONU et l'OSCE que de démocratiser le FMI et la Banque mondiale pour les mettre au service de la croissance et de l'emploi.

Au moment où va s'élaborer la prochaine loi de programmation militaire, nous souhaitons qu'un vrai débat puisse enfin avoir lieu au Parlement, mais aussi dans le pays, car nos concitoyens se sentent directement concernés aussi bien par les droits de l'homme que par la sécurité de la France et de l'Europe. L'alternative ne doit pas être entre l'acceptation de l'impuissance et la course aux armements, dans le sillage de la super-puissance américaine. La France et l'Union européenne ont un poids suffisant pour faire entendre une voix différente, en faveur d'une vraie politique de prévention des conflits et de la coopération pour le codéveloppement.

Nous ne proposons pas le désarmement unilatéral et notre pays se doit de mobiliser les moyens indispensables à sa sécurité. Mais il se doit aussi de relancer le processus de désarmement et d'être à la pointe du combat pour l'arrêt définitif de tous les essais nucléaires, y compris en laboratoire.

La défense du territoire national qui doit rester la priorité ne s'oppose pas au développement de coopérations européennes ou mondiales. Encore faut-il s'entendre sur l'orientation stratégique et sur les modalités de ces coopérations. Nous ne sommes pas opposés par exemple à ce que des moyens militaires puissent être mobilisés en commun pour des opérations de paix et de défense des droits de l'homme à condition que ce soit dans le cadre du droit international et sous le contrôle de l'ONU. Des initiatives devraient donc être prises pour renforcer cette dernière.

Notre volonté de paix durable et de désarmement ne va évidemment pas sans une réflexion sur un plan de transition et de diversification. En aucun cas, les réductions de crédits, fusions ou redéploiements ne doivent sacrifier des régions, des salariés et des savoir-faire. Notre groupe y sera attentif.

Monsieur le ministre, nous vous avons fait part de notre préoccupation quant au devenir des établissements du GIAT, de la DCN et de la DGA. Nous avons adressé plusieurs demandes à ce sujet et nous nous réjouissons que vous ayez répondu favorablement à certaines. C'est ainsi que nous accueillons avec intérêt vos déclarations sur les négociations en cours pour le passage aux 35 heures. Le fait de réduire par ce moyen le solde des suppressions de postes de 500 ou 600 unités n'est certainement pas à négliger non plus que la poursuite de l'embauche d'ouvriers d'Etat ou de fonctionnaires. Assurer le plan de charge des établissements est un préalable à tout.

Nous avons pris note de vos engagements sur la part qu'il conviendrait de réserver à GIAT dans la production du nouveau VCI et sur la confirmation de GIAT-Bourges comme pôle national d'intégration pour armes de moyens et gros calibres. Nous enregistrons également avec satisfaction votre réponse positive à notre demande de passer commande de 5 Caesar sur camion. Pour la DCN, nous souhaitons que l'entretien des sous-marins nucléaires puisse continuer après 2003 au profit du site toulonnais (Interruptions sur les bancs du groupe UDF et du groupe du DL).

Mme la Présidente - Je vous demande de conclure !

M. Bernard Birsinger - Je n'ai pas fait d'observations sur la nouvelle procédure, mais ces questions sont trop importantes pour que j'adopte l'attitude de M. Lellouche !

Nous avons bien noté votre souci de diversification industrielle, avec notamment la mise en place d'une cellule pour la commercialisation de la plate-forme off-shore ainsi que l'intérêt que vous avez manifesté pour l'étude de notre collègue Sandrier sur GIAT Industries.

Nous renouvelons enfin notre demande d'un débat à l'Assemblée, qui pourrait être précédé d'un colloque consacré à la situation et à l'avenir de l'industrie d'armement et largement ouvert aux syndicats, aux universitaires, aux militaires et aux élus locaux. Nous aurions ainsi un engagement plus précis sur ce point.

Nous confirmons, sur ce budget, les réserves de fond que nous avons exprimées en commission. Nous souhaitons que la préparation de la prochaine loi de programmation soit enfin l'occasion d'avancer dans la définition d'une politique de défense et de sécurité collective intégrant les valeurs qui guident par ailleurs l'action de la majorité.

Vous venez de prendre un certain nombre d'engagements qui rejoignent plusieurs propositions de notre groupe et des syndicats. C'est un pas que nous apprécions. Notre groupe, en demeurant vigilant et en réaffirmant son opposition à des choix stratégiques contestables, émettra un vote d'abstention.

Mme la Présidente - Il est inadmissible que vous méconnaissiez ainsi, délibérément, les règles établies pour cette discussion !

M. le Ministre - Je répondrai par courtoisie à chacun des intervenants, mais d'une phrase chaque fois.

Monsieur Boucheron, vous avez raison d'insister pour que la gestion financière soit pluriannuelle et permette de mener à bien l'application de la loi de programmation.

Monsieur Raimond, nous allons en effet pouvoir aboutir à des propositions unanimes, entre les pays concernés, pour la modernisation du corps européen.

Monsieur Grasset, des contacts constructifs nous autorisent à espérer en une relance des programmes spatiaux européens, s'ajoutant au prochain lancement du Hélios I B.

Monsieur Sandrier, vous avez raison de recommander de nouvelles incitations à la mobilité du personnel civil.

Monsieur Le Drian, le plan d'entreprise que le Gouvernement soutient à la DCN comporte les trois options de modernisation que vous avez suggérées.

Monsieur Galut, les moyens sont en effet disponibles, dans le cadre de la programmation, pour effectuer les livraisons du Rafale et, pour l'ATF, nous aurons la volonté de les dégager.

Monsieur Gérard Charasse, nous allons améliorer de nouveau l'entretien des bâtiments de la marine grâce aux gains en productivité de la DCN.

Monsieur Jean Michel, je comprends votre observation sur les autorisations de programme mais il nous faut tenir compte du fait que les procédures de marché se déroulent sur plus de six mois, ce qui nous oblige à déployer par avance des montants importants d'AP.

Monsieur Meylan, je partage pleinement votre souci quant à la concurrence et à la recherche de partenariats avec les PME.

Il est bon, Monsieur Lemoine, de souligner la modernisation permise par le dégagement des moyens pour les huit hélicoptères.

Le président Quilès a souhaité que nous travaillions de façon prospective à la préparation de la prochaine loi de programmation militaire. Nous parvenons aujourd'hui à un bon équilibre dans l'application de celle qui est engagée.

Comme M. Charasse, je crois que nous sommes entrés dans une période où des décisions permettront de faire des progrès concrets vers l'Europe de la défense.

M. Chauveau a bien fait de confirmer la cohérence de notre politique de défense avec notre vision d'ensemble. La volonté tenace du Gouvernement et de la majorité est bien d'adapter cette politique à notre époque.

Je rejoins tout à fait M. Birsinger : nous ne cherchons pas la course aux armements mais les moyens nécessaires à notre sécurité. Il existe, en effet, sous l'égide de l'ONU des possibilités de coopération européenne pour le maintien de la paix.

L'opposition, dans un exercice un peu convenu, a insisté à nouveau sur les crédits et les capacités. Comment peut-elle prétendre qu'un seul avion sera livré à l'armée de l'air en 2000 ?

M. Pierre Lellouche - Un seul avion neuf !

M. le Ministre - Il y aura un Rafale, 12 mirage 2000 D, 3 mirage 2005.

En ce qui concerne l'ATF, vous osez nous reprocher de ne pas l'avoir financé plus tôt alors que la loi de programmation militaire ne prévoyait que 600 millions pour 2002 !

Il n'est pas exact non plus que les crédits sont insuffisants pour le développement du Missile M51 puisque sera notifiée une commande globale correspondant à deux ans de développement.

Il y a donc bien un équilibre, une perspective claire conforme à la programmation. Et si nous faisons un bilan à la fin de la législature, il ne sera vraiment pas à l'avantage de la droite.

Je veux enfin remercier tous les parlementaires, qui ont souligné le dévouement, l'engagement et la professionnalisme des personnels de défense (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Mme la Présidente - J'appelle maintenant les crédits inscrits à la ligne défense.

L'article 40, mis aux voix, est adopté.

Les crédits du titre V, puis du titre VI, ouverts à l'article 41, mis aux voix, sont successivement adoptés.

L'article 41, mis aux voix, est adopté.

Mme la Présidente - En accord avec la commission des finances, j'appelle maintenant l'amendement II-118, tendant à inscrire un article additionnel après l'article 66.

M. le Ministre - J'ai déjà évoqué cet amendement.

Les sous-lieutenants retraités avant le 1er janvier 1976, ont quitté le service actif alors que le grade de sous-lieutenant était un grade de débouché. Aujourd'hui, il s'agit d'un grade de début de carrière qui concerne pour l'essentiel les élèves officiers. A la différence des autres retraités, la situation de ceux-ci n'a donc pas connu d'évolution indiciaire.

Cet amendement, qui répond à la demande de plusieurs députés, notamment MM. Cova et Dasseux, vise donc à leur offrir, ainsi qu'à leurs ayants cause, des conditions de retraite comparables à celles des autres retraités militaires, en déterminant leur pension sur la base de celle d'un grade inférieur. Cette mesure est conforme à la volonté d'équité et de solidarité qui anime toute l'action du Gouvernement.

Je remercie enfin Christian Sautter, qui nous a permis de régler rapidement ce problème.

M. Jean-Michel Boucheron, rapporteur spécial de la commission des finances - La commission n'a pas examiné cet amendement. A titre personnel, je soutiens cette mesure de justice qui devrait faire l'unanimité.

M. Charles Cova - J'avais déposé un amendement, auquel était associé notre collègue Dasseux, pour réparer cette injustice mais, malgré sa faible incidence financière, la commission des finances l'a déclaré irrecevable au titre de l'article 40.

Je me réjouis donc, Monsieur le ministre, que vous ayez inscrit cette juste réparation à votre budget. Les efforts que nous avons déployés ensemble trouvent ainsi récompense grâce à votre détermination, à la nôtre, ainsi qu'à celle des associations d'anciens militaires. Je suis heureux de pouvoir ainsi exprimer à ceux qui ont consacré leur vie au métier des armes mon estime et ma reconnaissance (Applaudissements sur divers bancs).

M. Michel Voisin - Je remercie à mon tour le Gouvernement pour cet effort destiné à réparer une injustice liée à une application littérale de textes administratifs.

Le groupe UDF votera sans réserve cet amendement qui montre notre attachement à tous ceux qui servent dans ce ministère et auxquels nous avons rendu hommage tout au long du débat.

M. Guy-Michel Chauveau - Cet amendement est conforme à notre volonté constante d'améliorer les conditions de vie des personnels civils et militaires, actifs et retraités.

Nous vous remercions donc, Monsieur le ministre, d'avoir repris la proposition de MM. Cova et Dasseux.

M. Didier Boulaud, vice président de la commission de la défense - Qu'on me permette de souligner que la commission avait adopté une observation dans laquelle était exprimé le v_u d'un tel amendement.

L'amendement II 118, mis aux voix, est adopté.

Mme la Présidente - Il l'a été à l'unanimité.

Nous avons terminé l'examen des crédits du ministère de la défense

La suite de la discussion de la loi de finances est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu lundi 15 novembre à 10 heures.

La séance est levée à 20 heures 40.

                      Le Directeur du service
                      des comptes rendus analytiques,

                      Jacques BOUFFIER

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ERRATUM

au compte rendu analytique de la 2ème séance du mardi 9 novembre 1999.

A la page 2, dans le titre de la question de Mme Muguette Jacquaint à M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; dans l'énoncé de la question, puis dans la réponse du ministre, lire : « Fusion ABB-ALSTOM ».

D'autre part, à la 5ème ligne du texte de la question lire : "65 milliards de chiffre d'affaires"


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