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Session ordinaire de 1999-2000 - 35ème jour de séance, 83ème séance 1ÈRE SÉANCE DU JEUDI 2 DÉCEMBRE 1999 PRÉSIDENCE DE M. Pierre-André WILTZER vice-président Sommaire RÉDUCTION NÉGOCIÉE DU TEMPS DE TRAVAIL -nouvelle lecture- (suite) 2 ARTICLE PREMIER QUINQUIES 2 ART. 2 3 ART. 2 BIS 12 ART. 2 TER 13 ART. 3 13 ART. 4 15 APRÈS L'ART. 4 17 ART. 4 BIS 18 ART. 5 19 MODIFICATION DE L'ORDRE DU JOUR 21 La séance est ouverte à neuf heures.
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion en nouvelle lecture du projet de loi relatif à la réduction négociée du temps de travail. M. François Goulard - Le fond de cet article relatif aux astreintes a été peu modifié par le Sénat, dont nous préférons la rédaction plus concise. Le texte voté ici en première lecture se perd dans des détails qui à l'évidence ne relèvent pas de la loi. M. Gaëtan Gorce, rapporteur de la commission des affaires sociales - L'amendement 10 tend à rétablir, avec le texte adopté en première lecture, certaines garanties apportées aux salariés. Le Sénat, en particulier, a limité la notion d'astreintes aux interventions d'urgence, ce qui ne nous paraît pas opportun. Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité - Avis favorable. M. le Président - Le sous-amendement 80 de M. Gremetz est défendu. M. le Rapporteur - Avis défavorable. Mme la Ministre - Même avis. Le sous-amendement 80, mis aux voix, n'est pas adopté. M. le Président - Il en va de même, je suppose, pour les sous-amendements 81 et 79. Les sous-amendements 81 et 79, repoussés par la commission et par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés. Mme Roselyne Bachelot-Narquin - Le texte de la commission compliquera encore la tâche des entreprises. Prévoir de remettre tous les mois à chaque salarié un document récapitulant le nombre d'heures d'astreintes effectuées, et de conserver ces documents pendant un an pour que l'inspection du travail puisse les contrôler, cela frise la caricature. Le sous-amendement 239 de M. Accoyer vise à supprimer ces dispositions, c'est-à-dire des tracasseries administratives qui constituent le premier frein à l'embauche, surtout dans les très petites entreprises qui concentrent pourtant les gisements d'emplois. M. le Rapporteur - La commission n'a pas examiné ce sous-amendement auquel je suis défavorable. M. le Ministre - Avis défavorable également. Les entreprises où il existe des astreintes éditent déjà de tels documents, notamment pour des raisons de sécurité et de garanties par les assurances. Et rares sont les astreintes dans les très petites entreprises. Le sous-amendement 239, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Maxime Gremetz - Le sous-amendement 82 est inspiré par la même philosophie que nos trois sous-amendements qui viennent d'être rejetés. Il tend à rétablir la liberté contractuelle entre le salarié et son employeur en prévoyant que les astreintes ne peuvent être accomplies qu'avec l'accord individuel de chaque salarié et font l'objet d'un avenant au contrat de travail. M. le Rapporteur - La commission n'a pas estimé nécessaire de compléter le texte voté en première lecture. Nous avons alors adopté un amendement qui a constitué un progrès indiscutable, définissant les astreintes, prévoyant qu'elles ne peuvent être mises en place que par la voie conventionnelle et doivent comporter des contreparties pour les salariés. Ne revenons pas sur ce texte. Mme la Ministre - Même avis. Le sous-amendement 82, mis aux voix, n'est pas adopté. L'amendement 10, mis aux voix, est adopté et l'article premier quinquies ainsi rédigé. M. Léonce Deprez - La future législation relative aux heures supplémentaires sera préjudiciable aux salariés dont elle limitera le pouvoir d'achat et aux entreprises, notamment les plus petites, pour qui elle sera extrêmement difficile à appliquer. Je pense, comme vous, qu'il faut développer le temps libre. Dès 1980, dans un ouvrage intitulé «Pour une politique nationale du temps libre», j'ai exposé que le temps libre des uns devait devenir le temps de travail des autres, notamment dans la perspective d'un développement du tourisme sur les quatre saisons de l'année. Le reproche que je vous fais aujourd'hui est de demander à la loi ce qui relève du contrat. Enfermer les heures supplémentaires dans un maximum de 130 heures alors qu'on réduit la durée légale à 35 heures, c'est méconnaître la réalité des entreprises, notamment des PMI. Car 130 heures divisées par 47 semaines, cela fait par employé 2,70 heures en sus des 35 heures, soit 37,30 heures au lieu de 41,30 aujourd'hui. Or un employé absent, pour cause de maladie par exemple, crée un trou de 35 heures. La moitié des heures supplémentaires servent à compenser les absences pour maladie ou pour congé parental, qui absorberont donc 1,30 heure sur les 2,70 heures que permet le projet. Il resterait donc moins d'une heure et demie par semaine pour assurer le travail du planning et couvrir les pertes de temps liées à tout incident ou difficulté dans la production. Les heures supplémentaires destinées au remplacement d'un salarié qualifié ne peuvent être assurées par un personnel non qualifié. Maintenir le contingent à 130 heures n'est donc pas rationnel. Cela nuira aux entreprises et les conduira à moins travailler -donc à moins embaucher- de peur d'accepter du travail qui les conduirait à dépasser le contingent de 130 heures. Mais cette législation sur les heures supplémentaires risque aussi de pénaliser les salariés. Vous le contestez. Mais j'ai ici un article publié par le secrétaire général de la fédération FO de la chimie. Il rappelle ce propos de vous, Madame la ministre : «Il va falloir que la CNAM fasse des contrôles plus fréquents et plus stricts et que les médecins motivent les arrêts de travail». Et ce syndicaliste s'interroge : «Que va devenir la déontologie des praticiens ? Devront-ils trahir le secret médical ? Qu'est-ce donc que cette méfiance qui s'installe ?» On lit plus loin : «Une telle attitude autoritaire d'un ministre de la solidarité, d'un gouvernement dit social, est plus que choquante (...). Sa fameuse loi des fausses 35heures, conclut-il, remet en cause la réglementation du travail au nom de l'économie de marché et de la compétitivité réclamée par les patrons». Faites donc confiance aux salariés et aux employeurs pour construire dans chaque entreprise un vrai contrat social (Applaudissements sur les bancs du groupe DL et du groupe du RPR). M. François Goulard - Si nous dénonçons la complexité du droit du travail que vous nous faites écrire, ce n'est pas par souci de purisme législatif. C'est qu'il s'agit d'un droit pratique, que salariés et employeurs doivent appliquer chaque jour. Le régime des heures supplémentaires avait le mérite d'être assez simple et assez souple. Or il fait l'objet dans cette loi d'un article de cinq pages, instaurant un dispositif incompréhensible, qui variera chaque année entre 2000 et 2004, qui change avec la taille des entreprises, et qui comporte des majorations pour les heures supplémentaires variant de 10 à 50 % ! Comment voulez-vous qu'une telle législation puisse être respectée ? La surabondance des formalités administratives est un obstacle majeur à l'embauche dans les petites entreprises. Il y aurait plus d'emplois si la loi était plus simple, et s'il n'était pas nécessaire de faire appel à des experts pour l'appliquer. Sur les heures supplémentaires apparaît clairement votre volonté d'éviter que cette loi -pourtant annoncée de façon claironnante- soit trop brusquement appliquée. Souci de souplesse, direz-vous ; j'y vois plutôt la crainte qu'une application rapide des 35 heures ne bloque nombre d'entreprises, ne réduise la production faute de la main-d'_uvre nécessaire pour la maintenir. Aussi repoussez-vous leur application effective au-delà d'une période qu'on sait sensible. L'article 2 est l'aveu de vos craintes à ce sujet. Car les 35 heures, ce n'est pas plus d'emplois, mais plus de difficultés pour les entreprises, donc moins d'emplois. M. Maxime Gremetz - Comme j'ai l'habitude de tenir mes promesses, j'ai ici la fiche que m'a demandée hier M. Morin, sur ce que cette loi coûtera et rapportera aux entreprises. Il est facile, Monsieur Goulard, d'affirmer sans démontrer, comme vous le faites à ce sujet. C'est aussi ce que vous faites sur la situation des entreprises, et j'ai là encore des chiffres. Ainsi Vivendi -qui a passé l'accord de réduction du temps de travail que j'évoquais hier- progresse de 24,6 % et réalise 249 milliards de capitalisation boursière. Il faut connaître les chiffres : ensuite on en pense ce qu'on veut. J'en viens à l'article 2. Lors de notre explication de vote au terme de la première lecture, nous avons souligné quatre questions qui restaient à résoudre : l'une d'entre elles était le régime des heures supplémentaires, qui ne nous satisfait pas. Nous avons donc déposé derechef nos amendements de fond. Il s'agit tout d'abord de supprimer les périodes d'adaptation et de transition. Dès 1997 le Premier ministre a annoncé le passage aux 35 heures ; puis est venue la loi incitative de 1998. Les employeurs ont donc eu le temps de s'adapter. D'autre part, nous avons obtenu en première lecture que la majoration des heures supplémentaires soit fixée à 50 % dès la huitième heure, comme dans la législation actuelle : c'est une bonne chose pour les salariés. Mais je n'accepterai jamais que sur les quatre premières heures après la trente-cinquième, dans les entreprises où il n'y a pas d'accord, 10 des 25 % de majoration soient pris aux salariés et versés à un fonds. Est-il concevable d'un point de vue éthique qu'une partie des heures supplémentaires faites par les salariés soit prélevée pour financer leur propre réduction du temps de travail ? Militant syndicaliste de toujours, je ne peux accepter cela. On n'a jamais vu pareille chose dans l'histoire de notre législation ! Par ailleurs, la réduction massive des heures supplémentaires aurait une influence sur la création d'emploi. Leur régime doit donc encourager l'embauche en dissuadant leur utilisation abusive. Mais celui qu'on nous propose n'est pas assez dissuasif. Nous défendrons des amendements tendant à le modifier. Un passage rapide et massif aux 35 heures conditionne en effet leur réussite, pour laquelle nous nous battons avec des centaines de milliers de salariés. La droite a peur de ces mouvements. Mais je partage l'analyse de Mme la ministre : quand cela bouge dans le pays, c'est bien. Car on ne décide jamais du bonheur des gens sans eux. Nous voulons la réussite des 35 heures : c'est le sens de nos amendements. M. le Rapporteur - L'amendement 11 rectifié de la commission a pour objet de rétablir notre texte de première lecture, prévoyant le passage effectif aux 35 heures dès le 1er janvier 2000, tout en ménageant une phase de négociation indispensable à l'efficacité. La seule modification par rapport à la première lecture concerne les entreprises du secteur social et médico-social dont les conventions doivent être agréées pour prendre effet : elles sont exonérées de la contribution au fonds pendant la période où elles attendent cet agrément. Mme la Ministre - Même avis. Mme Roselyne Bachelot-Narquin - Cet amendement est effectivement important : nous nous y opposerons. Non seulement ceux qui sont contre la réduction du temps de travail, mais aussi ceux qui en acceptent le principe s'interrogent sur ce dispositif. Outre que le mécanisme est incompréhensible, il est choquant qu'une partie de la rémunération des heures supplémentaires soit versée à un fonds. Cette disposition fait l'unanimité contre elle. En ce qui concerne les heures supplémentaires, Mme la ministre fait valoir qu'il suffit d'en demander l'autorisation à l'inspection du travail. Il est évident que cette démarche va décourager les chefs d'entreprise, car le recours aux heures supplémentaires exige beaucoup de souplesse : il s'agit souvent de répondre à une urgence -salarié malade, surcroît de commandes etc. En outre, souvent on ne trouve pas les salariés compétents, ou bien il faut un certain temps pour les former : c'est le cas, par exemple, des préparateurs et pharmaciens qu'il m'est arrivé d'engager, ils ne peuvent être opérationnels avant trois mois. Alors que va-t-il se passer avec votre dispositif ? Le travail dissimulé va augmenter. Les entreprises vont payer des heures supplémentaires sans les déclarer, de la main à la main, avec tous les inconvénients que cela comporte pour les salariés. Mme la Ministre - Il n'y a pas de changement par rapport à la législation antérieure, qui remonte à 1982 : pour le contingent des 130 heures supplémentaires, il n'y a pas besoin de l'autorisation de l'inspecteur du travail. Mme Roselyne Bachelot-Narquin - Oui, mais désormais elles seront calculées à partir de 35 heures hebdomadaires ! Mme la Ministre - On a entendu le même argument chaque fois qu'on a réduit la durée du temps de travail ! Le droit du travail est complexe, c'est vrai, mais c'est un gage de souplesse. Le repos compensateur a été créé par M. Stoléru en 1976, puis il a été modulé. Cette complexité est d'ailleurs relative : la première année, la majoration pour heures supplémentaires sera de 10 % pour tout le monde : le produit sera versé au fonds si l'entreprise n'est pas aux 35 heures, aux salariés dans le cas contraire. A partir de la deuxième année, la majoration est de 25 % pour tout le monde : 10 % sont versés au fonds s'il n'y a pas d'accord de réduction du temps de travail, la totalité est versée aux salariés s'il y a accord . Préférez-vous, pour des raisons de simplicité, qu'on applique le taux de majoration de 25 % tout de suite ? M. Maxime Gremetz - Le dispositif n'est pas compliqué, il est même tout à fait évident, c'est bien pourquoi je voudrais qu'on le change !(Rires) Nous voulons une simplification par le haut ! Le sous-amendement 106 prend en compte les entreprises de travail temporaire. J'ai deux exemples assez remarquables dans ma circonscription : les intérimaires de Whirlpool ont décidé de ne plus se laisser traiter comme du bétail, c'est une bonne chose. Dans une autre entreprise, où il n'y avait jamais eu de grève, tout le personnel a décidé un arrêt de travail à la suite du licenciement d'un intérimaire. Dans l'entreprise Valéo, dont j'étais à la fois salarié et actionnaire, ce qui n'a pas empêché le patron de me licencier -oui, j'ai été licencié de ma propre maison ! (Rires)- 200 intérimaires sont employés en permanence : eh bien la direction refuse de les prendre en compte dans l'effectif pour déterminer le budget du comité d'entreprise ! Le sous-amendement 106 prévoit des modalités spécifiques pour l'application de la réduction du temps de travail dans les entreprises d'intérim. Celles-ci emploient des centaines de milliers de salariés, il faudra bien qu'ils cessent un jour d'être taillables et corvéables à merci ! M. le Rapporteur - La commission a repoussé le sous-amendement. Mme la Ministre - Même avis. Le sous-amendement 106, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Roselyne Bachelot-Narquin - Je rappelle le caractère profondément immoral du racket exercé sur la rémunération des heures supplémentaires pour financer les 35 heures. Sur le sous-amendement 125, le groupe RPR demande un scrutin public. M. le Rapporteur - Vous tenez parfois un double langage. Vous prétendez défendre les salariés, parlant même de «racket» sur leurs rémunérations, terme manifestement excessif, mais en même temps vous déposez un sous-amendement qui aboutit purement et simplement à supprimer toute rémunération des heures supplémentaires au-delà des 35 heures ! Où est la cohérence ? La commission l'a repoussé, ainsi que le sous-amendement 145. Mme la Ministre - Même avis. A la majorité de 23 voix contre 9 sur 32 votants et 32 suffrages exprimés, le sous-amendement 125 n'est pas adopté. Le sous-amendement 145, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Maxime Gremetz - Compte tenu de l'importance de ce vote, je demande une suspension de séance pour réunir mon groupe. La séance, suspendue à 9 heures 50, est reprise à 10 heures 5. M. François Goulard - Le sous-amendement 146 de M. Mariani est défendu. Le sous-amendement 146, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Léonce Deprez - Pour une fois, nous sommes d'accord avec M. Gremetz : ce n'est pas aux salariés qui font des heures supplémentaires de financer le dispositif d'allégement des charges. C'est le sens de notre sous-amendement 214. Le sous-amendement 214, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Maxime Gremetz - Je crois que mon sous-amendement 105 corrigé tombe. Vous pouvez constater que j'ai fait beaucoup de progrès depuis hier soir... (Rires) Mme Roselyne Bachelot-Narquin - Le sous-amendement 147 de M. Mariani est défendu. Le sous-amendement 147, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Germain Gengenwin - Il n'est pas normal de pénaliser les salariés qui font l'effort de travailler davantage pour répondre à un besoin précis de leur entreprise et servent ainsi l'économie de notre pays. Nous proposons donc, par le sous-amendement 186, de supprimer la contribution de 10 %. M. le Rapporteur - La commission ne l'a pas examiné, mais j'y suis défavorable à titre personnel, car il repose sur une interprétation erronée. Le sous-amendement 186, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. François Goulard - Si nous insistons tant sur cette pénalisation de 10 %, c'est parce qu'elle soulève à nos yeux une question de principe. Vous me répondrez, bien sûr, que les intéressés ne perdront rien par rapport à la situation actuelle, mais il est profondément choquant de ponctionner la majoration de salaire qu'ont méritée des salariés qui ont fait l'effort de travailler davantage que les autres. Notre sous-amendement 181 tend à faire du paiement, et non du repos compensateur, la contrepartie normale des heures supplémentaires en l'absence d'accord ou de convention. C'est ce que préfèrent, en effet, les salariés. M. le Rapporteur - Je note que l'opposition, par la voix de M. Goulard, reconnaît enfin que les salariés ne gagneront pas moins qu'aujourd'hui. La contribution a notamment pour objet d'inciter les entreprises à négocier, ce qui dément les discours de la droite sur la réduction «autoritaire» du temps de travail. Sa sollicitude envers les intérêts des salariés est louable, mais nous souhaiterions qu'elle s'applique également dans d'autres domaines... Mme la Ministre - Je relève avec satisfaction, à mon tour, que l'opposition admet qu'il n'y aura pas détérioration de la rémunération des salariés. Il ne serait pas normal, en revanche, qu'ils gagnent 10 % de plus en restant à 39 heures du fait de l'absence d'accord. Quant au repos, c'est la loi quinquennale de 1993 qui, la première, en avait fait le mode normal de compensation. Les organisations syndicales que j'ai consultées y sont favorables, ce qui prouve qu'elles sont soucieuses de favoriser l'emploi. Je regrette, par contre, que la droite soit en recul sur ses positions de 1993... (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) M. François Goulard - C'est inutilement polémique ! Le sous-amendement 181, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Roselyne Bachelot-Narquin - Le sous-amendement 148 de M. Mariani est défendu. Le sous-amendement 148, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Léonce Deprez - On ne peut à la fois encourager les entreprises à s'installer dans les zones de revitalisation rurales ou dans les zones franches urbaines et les taxer. C'est pourquoi nos sous-amendements 176 et 177 tendent à les exonérer, dans l'un et l'autre cas, de la contribution de 10 % sur les quatre premières heures supplémentaires. M. le Rapporteur - La commission ne les a pas examinés, mais j'y suis défavorable à titre personnel, et je rappelle qu'un amendement adopté à l'initiative du groupe RCV prévoit que les allégements de cotisations seront majorés en cas d'implantation dans une zone de revitalisation rurale. Les sous-amendements 176 et 177, repoussés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés. M. François Goulard - Notre sous-amendement 178 vise à supprimer la partie la plus complexe de l'article adopté en première lecture. Madame la ministre, comment pouvez-vous dire que nous ne nous préoccupons pas de l'emploi parce que nous préférons la rémunération des heures supplémentaires au repos compensateur ? Prétendez-vous sérieusement que le repos accordé à des salariés est générateur d'embauches ? C'est un argument particulièrement spécieux. L'augmentation des rémunérations, en revanche, parce qu'elle est une distribution de pouvoir d'achat, stimule l'économie et donc l'emploi. Mme la Ministre - Mon argument spécieux est aussi celui de Mme Bachelot-Narquin, qui nous a très bien montré hier combien il est difficile d'obtenir des repos compensateurs qui obligent à embaucher. Déjà en 1976, M. Stoléru avait créé le premier repos compensateur parce qu'il considérait qu'il fallait embaucher dans les secteurs où on faisait des heures supplémentaires. La droite, donc, partageait cette idée ; j'observe qu'aujourd'hui certains marquent un recul. M. le Rapporteur - La commission n'a pas examiné ce sous-amendement, mais à titre personnel j'y suis défavorable. Mme la Ministre - Défavorable. M. Maxime Gremetz - Monsieur Goulard, vous n'étiez pas député quand nous avons discuté de la loi quinquennale de 1993, défendue par M. Giraud, mais vous feriez bien de la relire pour ne pas vous mettre en contradiction avec ce que la droite avait voté à l'époque en matière de déréglementation, annualisation du temps de travail, modulation en tous genres et repos compensateur... Vous devriez être content qu'on aille dans le même sens ! Le sous-amendement 178, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Roselyne Bachelot-Narquin - Même si le repos compensateur a un effet plus favorable à l'emploi, ce dont je doute, les salariés modestes, à tout le moins, doivent pouvoir choisir le paiement de leurs heures supplémentaires. Les sous-amendements 126 et 127 de M. Accoyer visent ceux qui sont rémunérés jusqu'à hauteur de deux fois le SMIC M. le Rapporteur - La commission n'a pas examiné ces sous-amendements. A titre personnel, avis défavorable. Mme la Ministre - Défavorable. Le sous-amendement 126, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que le sous-amendement 127. Mme Roselyne Bachelot-Narquin - Le sous-amendement 143 est défendu. Le sous-amendement 143, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Roselyne Bachelot-Narquin - Notre amendement 179 tend à supprimer le paragraphe relatif à la création du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale, à la fois parce qu'il est anormal que la compensation -toute partielle- du coût du passage aux 35 heures ne relève pas du budget de l'Etat et parce qu'il n'est pas admissible de ponctionner 7 milliards sur les salariés par une taxation des heures supplémentaires. M. le Président - Le sous-amendement 149 de M. Mariani a le même objet. M. le Rapporteur - Avis personnel défavorable. Mme la Ministre - Défavorable. M. Maxime Gremetz - Je propose de sous-amender encore le sous-amendement de Mme Bachelot : nous supprimons le fonds et nous augmentons de 5 % l'impôt sur les bénéfices. Mme Roselyne Bachelot-Narquin - Je vous remercie de votre bonté, mais nous aurions du mal à nous rejoindre ! Les sous-amendements 179 et 149, mis aux voix, ne sont pas adoptés. M. Maxime Gremetz - Notre sous-amendement 140 concerne les institutions sociales et médico-sociales ; je le retirerai si le Gouvernement peut apaiser les craintes qu'avaient exprimées leurs salariés. Plus généralement, Madame la ministre, à la suite de Daniel Paul hier, j'appelle votre attention sur l'application des 35 heures aux associations, en soulignant par ailleurs le problème des accords locaux qui ont été signés et ne sont pas agréés. Je pourrais à ce propos évoquer la situation dans la Somme, qui est dramatique. M. le Rapporteur - La préoccupation de M. Gremetz est bien prise en compte dans l'amendement 11 rectifié. En conséquence, avis défavorable. Mme la Ministre - Vous pouvez être rassuré, Monsieur Gremetz. Nous n'avons pas souhaité que les salariés des institutions médico-sociales soient exemptés de la taxation des heures supplémentaires ou de la contribution de 10 % en l'absence d'accord sur les 35 heures ; nous avons simplement voulu dire que lorsque l'accord a été signé, nous n'allons pas pénaliser l'entreprise jusqu'à la date de l'agrément. Mme Roselyne Bachelot-Narquin - De tous les bancs de cette assemblée, Madame la ministre, vous avez été interpellée au sujet des institutions sociales et médico-sociales. Je vous ai interrogée sur la rénovation de la loi de 1975. Éludez-vous nos questions, ou allez-vous nous répondre plus tard ? M. Germain Gengenwin - Nous avons tous eu des courriers des institutions sociales et médico-sociales pour réclamer six mois de délai supplémentaires. Je vous serais moi aussi reconnaissant de nous rassurer. Le sous-amendement 140 est retiré. M. Maxime Gremetz - Notre sous-amendement 103 vise à supprimer la période d'adaptation. En effet, ce délai supplémentaire pénaliserait les entreprises qui ont signé rapidement un accord et récompenserait celles qui ont traîné les pieds et continueront de le faire, au détriment de la création d'emplois. Le sous-amendement 103, repoussé par la commission et par le Gouvernement, n'est pas adopté. Mme Roselyne Bachelot-Narquin - Le sous-amendement 150 est défendu. Le sous-amendement 150, repoussé par la commission et par le Gouvernement, n'est pas adopté. M. Yves Cochet - Le sous-amendement 101 vise à supprimer la discrimination entre les salariés d'entreprises de plus de dix salariés et de moins de dix salariés. Ceux-ci ne bénéficient en effet actuellement que d'un repos compensateur réduit de moitié par rapport à ceux-là. Ce sous-amendement tend également à prévoir le déclenchement de l'ouverture du droit à repos compensateur, comme aujourd'hui, trois heures au-delà de la future durée hebdomadaire légale, c'est-à-dire 38 heures. M. le Rapporteur - Nous avons déjà eu ce débat en première lecture. Avis défavorable. Mme la Ministre - Avis défavorable également. Le sous-amendement 101, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Catherine Génisson - Le sous-amendement 185 concerne plus particulièrement les entreprises de services : nous avons pu mesurer, lors des récentes inondations survenues dans le sud de la France, le surcroît d'activité momentané auquel elles peuvent avoir à faire face. Il convient donc que ces heures supplémentaires ne s'imputent pas sur le contingent annuel pouvant être effectué sans autorisation de l'inspecteur du travail ; d'autre part, qu'elles soient considérées comme des heures ouvrant droit au même repos compensateur que dans le régime de droit commun, c'est-à-dire 50 %. M. le Rapporteur - La commission n'a pas examiné cet amendement, mais j'y suis favorable. Mme la Ministre - Avis favorable également. Mme Roselyne Bachelot-Narquin - Je me félicite que certains de nos collègues de la majorité plurielle abandonnent le dogmatisme pour prendre en compte les difficultés de la pratique. C'est ainsi qu'un député élu d'une région viticole a présenté un amendement spécifique aux entreprises de négoce en vins, que M. Patriat en a déposé un autre «spécial Clos-Vougeot». M. Maxime Gremetz - Ça sentait la vinasse... Mme Roselyne Bachelot-Narquin - Des dispositions spécifiques relatives aux institutions médico-sociales ou bien encore aux associations intermédiaires ont également été adoptées. Le sous-amendement de Mme Génisson va dans ce sens et nous le voterons. Les entreprises doivent pouvoir facilement faire face aux surcroîts d'activité qui ne se présentent pas seulement en cas de catastrophes naturelles. Mais ce sous-amendement montre bien les limites des 35 heures puisque d'innombrables dérogations au principe posé par la loi seront nécessaires. Mme la Ministre - Vous faites une erreur d'analyse. La législation relative à la durée du travail était jusqu'à présent l'une des plus complexes, ce qui explique sans doute qu'elle était mal appliquée. Précisément aujourd'hui, nous la simplifions et lui redonnons cohérence dans le double objectif de protéger les salariés tout en permettant aux entreprises de bien fonctionner. Il est tout à fait cohérent et juste que les salariés ayant effectué des heures supplémentaires dans le cadre de travaux urgents bénéficient d'un repos compensateur, non pas de 20 %, mais de 50 %, comme dans le régime de droit commun. M. Maxime Gremetz - On m'a consulté sur ce sous-amendement qui modifie un amendement que j'avais fait adopter en première lecture. Comme vous le savez, je ne peux être soupçonné de laxisme s'agissant des garanties des salariés. Mais il est important que les collectivités et les entreprises, notamment publiques, puissent faire effectuer à leurs salariés des travaux urgents, tels que définis dans le code du travail. Je pense notamment en cas de catastrophes à la SNCF... M. Hervé Morin - Lorsque ses agents ne sont pas en grève ! M. Maxime Gremetz - Ils ont raison de faire grève pour exiger de bons accords et défendre le service public. Si vous tenez à ce que je vous le confirme, je soutiens les luttes des cheminots. Je reviens au sous-amendement qui nous occupe. J'y suis favorable car il ne modifie pas le principe général énoncé dans le code du travail, se limitant à prévoir des dispositions pour des cas bien précis. Le sous-amendement 185, mis aux voix, est adopté. M. le Président - A l'unanimité. M. Yves Cochet - Le sous-amendement 102 vise à supprimer la discrimination entre les salariés d'entreprises de plus de dix et de moins de dix salariés. Pour ces derniers, les heures supplémentaires au-delà du contingent annuel n'ouvraient droit à repos compensateur qu'à hauteur de 50 %. Nous proposons de le porter à 100 % pour tous. Les salariés des petites entreprises ne sont pas plus résistants physiquement que ceux des grandes ! M. Maxime Gremetz - Très bonne proposition ! M. le Rapporteur - La commission a repoussé cet amendement. Mme la Ministre - Avis défavorable. M. François Goulard - Ce sous-amendement fait partie des amendements de surenchère déposés par les députés Verts et communistes qui ont considérablement durci le texte initial. J'observe que des députés du même groupe RCV présenteront, dans quelques instants, un sous-amendement 49, signé notamment par M. Pontier et le président Schwartzenberg, dont l'objet est exactement opposé à celui de M. Cochet. Pour ce dernier, le droit du travail doit s'appliquer dans toute sa rigueur à toutes les entreprises, quelle que soit leur taille. M. Pontier et ses collègues soulignent avec raison que les petites entreprises ont plus de mal que les autres à appliquer le droit du travail. Au-delà de cette divergence un peu surprenante au sein d'un groupe, j'y vois l'opposition des doctrinaires et des réalistes. Ces derniers, en demandant qu'une entreprise de moins de dix salariés ne soit pas traitée comme une grande entreprise, sont les vrais protecteurs de l'emploi. N'oublions jamais en effet que dans notre pays plus de 50 % des emplois sont dans des entreprises de moins de cinquante salariés. Le sous-amendement 102, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Léonce Deprez - C'est avez vigueur que je défendrai le sous-amendement 180, déposé par les trois groupes de l'opposition. Renvoyer au décret la fixation d'une période pendant laquelle les repos compensateurs peuvent être pris est contraire à l'ambition affichée par le Gouvernement de favoriser le dialogue social. En outre, dans un contexte d'annualisation du temps de travail, la prise des repos compensateurs doit pouvoir coïncider avec les différents rythmes d'activité de l'entreprise. La motivation essentielle de ce sous-amendement est la crainte que votre loi prive de son contenu le dialogue social. Depuis plusieurs années une évolution considérable a eu lieu dans les entreprises. La loi quinquennale avait fait progresser l'économie partenariale. Mais si même les questions de repos compensateurs sont extraites du champ du dialogue social, celui-ci va dépérir. Il ne faut pas demander à la loi ou au décret ce qui doit l'être au contrat, car le contrat, c'est la confiance. Le sous-amendement 180, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix n'est pas adopté. Mme Roselyne Bachelot-Narquin - Le sous-amendement 128 a pour but de redonner de l'espace à la négociation partenariale. Dans votre dispositif, le seuil maximum au-delà duquel toute heure supplémentaire donne droit à un repos compensateur est ramené de 130 à 90 heures en cas d'accord de modulation dépassant un plafond donné. Cela est peu adapté à la réalité de certains secteurs économiques. Nous proposons donc que cette réduction du seuil soit confiée à la négociation entre les partenaires sociaux, qui pourraient en décider en tenant compte de la spécificité des entreprises. M. le Rapporteur - Il faut garder en tête la frontière entre ce qui relève de la négociation et ce qui touche à l'ordre public social, comme les contingents d'heures supplémentaires. Il ne paraît pas légitime d'accorder un contingent aussi important à une entreprise qui pratique la modulation qu'à celle qui ne le fait pas. Mme la Ministre - Même avis. Le sous-amendement128, mis aux voix, n'est pas adopté. M. le Président - Le sous-amendement 49 n'est pas défendu. M. François Goulard - Je le reprends. Nos collègues radicaux, qui font pour l'instant partie de la majorité plurielle, se souviennent qu'à sa grande époque leur famille politique était attachée au libéralisme économique, avec lequel ils renouent par ce sous-amendement de bon sens. M. le Rapporteur - Défavorable. Je rappelle qu'un grand radical, Clemenceau, était favorable à la journée de huit heures, c'est-à-dire à la réduction du temps de travail Mme la Ministre - Défavorable. Le sous-amendement 49, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Roselyne Bachelot-Narquin - Il peut arriver que le contingent ne soit pas entièrement utilisé, et les variations de la charge de travail n'obéissent pas à l'année calendaire. Il pourrait donc être utile de reverser sur l'année suivante -sans pouvoir bien sûr les capitaliser au-delà- les heures non utilisées : c'est l'objet du sous-amendement 129. M. le Rapporteur - L'opposition considère les heures supplémentaires comme un mode normal de gestion des entreprises, ce qui est très discutable. Notre dispositif permet des modulations, incitant ainsi à une réorganisation du travail : c'est par ce biais qu'il faut avancer, plutôt que par l'utilisation systématique des heures supplémentaires. Celles-ci demeurent assurément nécessaires, et la loi ne modifie d'ailleurs pas le contingent, sauf en cas de modulation. C'est donc un dispositif équilibré, qu'il faut maintenir : des heures supplémentaires, oui, mais dans des condition encadrées par la loi et la négociation quand il s'agit d'en faire un usage important. Mme la Ministre - Même avis. M. Germain Gengenwin - J'ai l'impression qu'on ne sait pas comment fonctionne une petite entreprise de deux ou trois personnes : si elles veulent réussir, elles ne comptent pas leur temps, et ne peuvent éviter de faire des heures supplémentaires ! J'ai peur qu'on ne contraigne les gens à recourir au travail dissimulé. M. Maxime Gremetz - Je me demande si nous vivons dans le même monde. Chez moi des petites entreprises me disent qu'elles vont enfin pouvoir créer des emplois, alors qu'elles étaient contraintes d'abuser des heures supplémentaires. J'ai notamment entendu ces propos lors d'une réunion avec la Chambre de commerce et d'industrie d'Amiens. Et pourquoi peuvent-elles aujourd'hui embaucher ? Parce que l'exonération de charges patronales a été portée de 1,3 à 1,8 SMIC. M. Seillière l'a reconnu lui-même quand nous l'avons auditionné : je constate, a-t-il dit, que ce gouvernement, non seulement n'a pas supprimé les exonérations, mais les a portées à 1,8 SMIC, et je dois prendre ce fait en considération. A cela s'ajoutent les aides financières incitatives. Jamais dans notre pays, pas même avec les accords de Robien, on n'a accordé d'aides aussi amples, et sans limitation dans le temps. Que l'opposition cesse donc de pleurer sur les PME. J'en connais, y compris de deux salariés, qui se réjouissent de pouvoir enfin embaucher. Ne rajoutez donc pas des heures supplémentaires. Plus il y en a, moins on crée d'emplois. Les heures supplémentaires sont un mode archaïque de gestion. Le sous-amendement 129, mis aux voix, n'est pas adopté. M. Maxime Gremetz - Si on veut créer de l'emploi, il faut appliquer le nouveau régime des heures supplémentaires le plus vite possible. C'est l'objet du sous-amendement 104. M. le Rapporteur - La commission l'a repoussé. Mme la Ministre - Avis défavorable. Le sous-amendement 104, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Roselyne Bachelot-Narquin - Le dispositif prévu étant pervers et néfaste, le sous-amendement 124 tend à donner au moins un délai de grâce aux entreprises. Le sous-amendement 124, repoussé par la commission et le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme la Ministre - Le sous-amendement 224 du Gouvernement est de précaution. Il précise que si la loi ne devait pas être promulguée au 1er janvier, les heures supplémentaires au-delà de 37 heures seraient imputables sur le contingent annuel. M. le Rapporteur - A titre personnel, j'y suis favorable. Mme Roselyne Bachelot-Narquin - Ce sous-amendement illustre bien les difficultés auxquelles les entreprises vont être confrontées : si le texte entre en vigueur au 1er février ou au 1er mars il faudra faire un calcul complexe de proratisation. Je vous demande au moins que la loi s'applique au début d'un trimestre -si ce n'est pas au 1er janvier, alors au 1er avril. Enfin, je le souligne, le président par intérim du Conseil constitutionnel a rappelé que celui-ci siège entre Noël et le Jour de l'an, notamment pour examiner les textes budgétaires. Le sous-amendement 224, mis aux voix, est adopté. L'amendement 11 rectifié, sous-amendé par les sous-amendements 185 et 224, mis aux voix, est adopté et l'article 2 est ainsi rédigé. M. François Goulard - Les articles 2 bis et 2 ter ont été introduits en première lecture par l'Assemblée et ajoutent des contraintes supplémentaires. Le Sénat a proposé de supprimer le premier et d'assouplir le second. Mme la ministre a dit qu'elle avait le sentiment d'opérer une simplification du droit du travail : avec 50 pages de plus, le code du travail sera incontestablement plus lisible ! Mais surtout, chaque fois que vous imposez une nouvelle contrainte, vous allez à l'encontre de votre objectif de créer des emplois. Avec ce texte, vous avez ouvert, Madame la ministre, la boîte de Pandore : compte tenu de la composition de votre majorité, vous deviez vous attendre à des surenchères de la part du groupe communiste et des Verts, ce qui vous condamne à leur donner des gages et à durcir le texte. Nous avions déjà le droit du travail le plus contraignant des pays développés, sans que pour autant les salariés soient mieux protégés : au contraire, les pays qui font davantage confiance à la négociation collective ont des niveaux de protection bien souvent supérieurs au nôtre. M. le Rapporteur - Monsieur Goulard, lorsque vos amis étaient au pouvoir, le chômage n'a cessé d'augmenter, et depuis que nous mettons en place notre politique, l'économie française crée de l'emploi. Nous souhaitons rétablir le dispositif adopté en première lecture. L'amendement 12 vise à préciser que la durée réelle du travail, heures supplémentaires comprises, ne pourra excéder une moyenne de 44 heures hebdomadaires sur une période de 12 semaines, cela pour protéger la santé des salariés. M. Yves Cochet - Cet amendement n'a rien d'excessif puisqu'il ne fait baisser la durée maximale que de deux heures. La droite parle de catastrophe pour l'économie française, mais j'observe que la crise n'a jamais été économique à proprement parler : depuis 25 ans le PIB a augmenté de 60 %. En outre, actuellement les perspectives d'emploi sont bonnes, les employeurs et les salariés font confiance à la politique du Gouvernement. Cet amendement va même accroître la productivité du travail, car quand les gens sont moins fatigués ils travaillent mieux. L'amendement 12, mis aux voix, est adopté et l'article 2 bis est ainsi rédigé. M. le Rapporteur - L'amendement 13 est un retour au texte de l'Assemblée. M. le Ministre - Le Gouvernement y est favorable sous réserve d'une modification rédactionnelle : il s'agit de supprimer le mot «onze», car la durée du repos quotidien peut être différente dans les cas de dérogations. M. le Rapporteur - D'accord. L'amendement 13 rectifié, mis aux voix, est adopté et l'article 2 ter est ainsi rédigé. M. Jean-Claude Sandrier - Aux termes du projet, pour ouvrir le bénéfice des allégements de cotisations sociales, l'accord négocié dans l'entreprise doit être signé par des syndicats représentant la majorité des salariés. C'est un progrès incontestable pour la démocratie sociale, mais seuls sont concernés les accords d'entreprise intervenant dans une entreprise de 50 salariés au moins. Le chef d'une entreprise plus petite pourrait donc appliquer directement un accord de branche étendu. Or ces entreprises de moins de 50 salariés regroupent la moitié des salariés du secteur privé et plusieurs accords de branche ont été signés par des syndicats minoritaires. Cette situation est d'autant plus anormale que c'est dans les petites entreprises que les salariés sont les moins organisés et donc les plus exposés aux pressions patronales, qui ne font souvent que refléter la domination de grands groupes. Il est également choquant et contraire à la démocratie que l'on méconnaisse la volonté des salariés lorsque ceux-ci ont majoritairement accordé leur confiance à telle ou telle organisation syndicale. C'est pourquoi nous proposerons que le principe majoritaire soit étendu aux accords de branche, la représentativité étant ici appréciée par référence aux élections prud'homales. M. Jean-Luc Warsmann - Je voudrais appeler l'attention sur les problèmes posés par l'application des 35 heures aux salariés sous contrat d'intérim. Dans mon département, où l'intérim est très développé -et où les textes actuels ne sont d'ailleurs pas appliqués-, il arrive que des accords de réduction du temps de travail prévoient une compensation de la diminution de salaire sous forme de prime. Or, en général, les salariés intérimaires ne bénéficient pas de celle-ci. Dans d'autres cas, la réduction de la durée de travail est obtenue par l'octroi de jours de congé supplémentaires. Les intérimaires appelés à remplacer les salariés en congé ne seront payés qu'à raison des heures qu'ils auront effectuées, ce qui réduira considérablement leur pouvoir d'achat. Une telle situation apparaît scandaleuse, s'agissant de personnes déjà exposées à la précarité de l'emploi ! M. le Rapporteur - L'amendement 14 rectifié tend à rétablir, sans autres modifications que des précisions sur les contreparties, le texte que nous avions adopté en première lecture sur la modulation. Les garanties que nous avions introduites, en particulier celle qui tient à l'exigence d'un délai de prévenance, sont donc intégralement maintenues. Mme la Ministre - Avis favorable. En ce qui concerne l'intérim, je répondrai lorsque viendra en discussion l'amendement de M. Terrier, relatif aux rémunérations. M. Germain Gengenwin - La modulation est décidément à la mode : le ministre de l'agriculture en parle souvent aussi, à propos d'aides ou de primes, il est vrai. Par leur sous-amendement 192, les trois groupes de l'opposition souhaitent supprimer le plafond de 1 600 heures. En effet, la modulation n'apparaît pas favorable aux salariés : c'est un outil de pression à la disposition des entrepreneurs pour faire varier la durée du travail en fonction des périodes «de pointe» ou des périodes creuses. Or l'agroalimentaire est loin d'être le seul secteur où l'activité soit soumise à des variations saisonnières : c'est le cas aussi de l'industrie automobile, par exemple. Le sous-amendement 192, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Roselyne Bachelot-Narquin - Un certain nombre des accords déjà signés n'entrent pas dans le cadre de cette deuxième loi. Lorsque la durée annuelle du travail ne dépasse que de peu le maximum de 1 600 heures, il ne semble pas difficile de régler la question mais treize de ces accords prévoient une durée de 1 645 heures, pour des raisons techniques. Par le sous-amendement 191, pour simplifier les choses et rendre immédiatement applicables ces accords, nous proposons de porter la durée maximale de 1 600 à 1 645 heures. Le sous-amendement 191, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. Mme Roselyne Bachelot-Narquin - Les sous-amendements 130 et 131 sont défendus. Les sous-amendements 130 et 131, repoussés par la commission et par le Gouvernement, successivement, mis aux voix, ne sont pas adoptés. M. Maxime Gremetz - Comme l'opposition, nous sommes attentifs à ce qui se passe avec les accords de branche, car nous pensons qu'il y a là, en effet, matière à préoccupation. Ainsi, onze nouveaux accords auraient été étendus pendant la discussion de cette loi sans que nous en soyons informés -nous ne l'avons appris que par les syndicats ! Ne serait-il pas bon que les parlementaires sachent de quoi il retourne ? Comme M. Sandrier l'a excellemment expliqué, cette loi donne encore à une minorité de salariés la possibilité d'imposer à la majorité un accord qui ne lui conviendrait pas. Je ne pensais pourtant pas qu'on soit favorable ici à la dictature du prolétariat ! (Murmures sur divers bancs) Nous avons certes fait une avancée en prévoyant l'application du principe majoritaire aux accords d'entreprise : ceux-ci ne seront validés, ouvrant ainsi droit aux aides financières et exonérations, que s'ils sont signés par un ou des syndicats représentant la majorité des salariés. Cependant, cette disposition ne concernera pas les entreprises de moins de 50 salariés, de loin les plus nombreuses : là, des accords de branche, signés par un syndicat minoritaire, seront d'application directe ! Un entrepreneur n'aura qu'à convaincre un salarié de signer pour parvenir à ses fins, au mépris de la démocratie et de la citoyenneté dans l'entreprise... Avec des syndicalistes et des juristes, nous avons cherché une solution pour que tous les salariés soient traités à l'identique : la seule qui semble praticable et qui fait l'objet du sous-amendement 83, consiste à étendre le principe majoritaire aux accords de branche. On m'opposera l'absence d'élections professionnelles permettant d'apprécier la représentativité : mais, à l'échelle nationale, les élections prud'homales sont là pour déterminer quels sont les syndicats représentatifs dans telle ou telle branche ! De cette disposition dépendent beaucoup de choses : le respect du droit, de la démocratie et de la justice, mais aussi l'efficacité économique ! Car les salariés, lorsqu'on les traite mal et qu'on ne les consulte jamais, travaillent moins efficacement. M. le Rapporteur - La commission avait déjà repoussé le sous-amendement en première lecture, après de longs débats. Mme la Ministre - Avis défavorable. S'agissant des derniers accords étendus, leur liste est, bien entendu, à votre disposition, et je vais vous la faire distribuer. M. Hervé Morin - Le sous-amendement fait mention des organisations syndicales «commissaires». Les commissaires politiques ayant disparu avec la dictature du prolétariat, à laquelle le parti communiste a renoncé officiellement voici plus de vingt ans (Interruptions sur les bancs du groupe communiste), je propose d'écrire plutôt « majoritaires ». M. le Président - Il n'est pas possible de sous-amender un sous-amendement. Sur celui-ci, le groupe communiste a demandé un scrutin public. A la majorité de 30 voix contre 7 sur 37 votants et 37 suffrages exprimés, le sous-amendement 83 n'est pas adopté. Mme Roselyne Bachelot-Narquin - Le sous-amendement 53 de M. Inchauspé est défendu. Le sous-amendement 53, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. L'amendement 14 rectifié, mis aux voix, est adopté, et l'article 3 est ainsi rédigé. M. le Rapporteur - L'amendement 215 rétablit le paragraphe I de cet article dans la rédaction adoptée par l'Assemblée en première lecture. Mme la Ministre - Avis favorable. M. Hervé Morin - Notre sous-amendement 15 vise à obtenir une précision : les journées ou demi-journées de repos seront-elles bien décidées d'un commun accord entre le salarié et l'employeur ? M. le Rapporteur - Elles seront pour partie au choix de l'employeur et pour partie au choix du salarié. Contre le sous-amendement. Le sous-amendement 215, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté. L'amendement 15, mis aux voix, est adopté. M. Yves Cochet - J'ai écouté, il y a deux mois, le discours du Premier ministre à Strasbourg, et j'en ai notamment retenu sa volonté de combattre la précarité. En effet, si le chômage recule, une grande partie des emplois créés sont précaires : CDD, intérim, etc. Nous proposons donc, par l'amendement 68, que chaque employeur informe ses salariés, au début de chaque année, du total des heures travaillées l'année précédente par des personnels sous statut précaire et des mesures prises pour réduire leur volume de 10% au moins. Quant à l'amendement 69, il vise à faire baisser de quatre points par an, dans les entreprises de plus de 20 salariés, la proportion de salariés sous statut précaire, de façon à la ramener à 8 % au maximum. M. le Rapporteur - Nous aurons l'occasion de débattre de ces questions au début de l'année prochaine, et la commission n'a donc pas accepté les amendements, dont je comprends néanmoins la motivation. Mme la Ministre - Même avis. Mme Roselyne Bachelot-Narquin - J'admire souvent les amendements de M. Cochet, et comme ces sujets austères nous offrent peu d'occasions de rire, je voudrais citer la réponse qu'il a faite, en commission, à Mme Boisseau qui s'étonnait de cet objectif de 8 % : c'est un chiffre qui figurait, nous a-t-il dit, dans un document du parti socialiste ! Comment ne pas être ému par tant de dévotion ? M. Yves Cochet - Dans l'exposé sommaire de l'amendement 69, j'indique que la limite de 8 % figurait dans le programme électoral socialiste de mai 1997. J'avoue ne pas avoir retrouvé ce chiffre ; peut-être mes collègues socialistes pourront-ils me confirmer que tel était bien l'objectif fixé. M. Maxime Gremetz - Ce chiffre ne m'avait pas frappé ; sinon je l'aurais utilisé. Lorsque j'avais interpellé Mme la ministre au sujet des emplois précaires et de l'utilisation abusive des intérimaires, elle m'avait répondu qu'il fallait attendre la fin des négociations entre partenaires sociaux pour légiférer. Dans ses interventions publiques, il me semble qu'elle a en général fixé la barre à 10 %. En première lecture, j'avais proposé un amendement tendant à taxer les entreprises qui utilisent abusivement les emplois précaires, en citant le cas de Valéo à Abbeville, où 33 % des salariés sont des intérimaires. Malgré mes interventions auprès du préfet, de la direction départementale du travail et du ministère, la situation n'y a toujours pas changé (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe DL). Je pense donc qu'il faut légiférer et j'approuve la proposition de M. Cochet. Bien sûr, tout ne sera pas résolu pour autant ; il faut reconnaître les droits des intérimaires et leur appliquer le principe «à travail égal, salaire égal». Notre groupe, pour sa part, n'a pas encore décidé si le texte qu'il proposera dans le cadre de la niche parlementaire portera sur le contrôle des licenciements économiques ou sur la précarité. M. Hervé Morin - Puisque vous êtes contre l'intérim, Monsieur Gremetz, pouvez-vous nous dire comment doit faire une entreprise du bâtiment qui a des fluctuations d'activité considérables ? Doit-elle refuser des commandes ? Embaucher des personnes pour deux mois et les licencier ensuite ? M. le Président - Ne vous engagez pas dans un dialogue, d'autant qu'il s'agit d'un autre débat. M. François Goulard - Si les dispositions proposées par M. Cochet étaient adoptées, les entreprises publiques seraient les premières à devoir corriger leur mode de gestion des ressources humaines. Le problème s'étend à de nombreuses administrations, le ministère des finances interdisant de créer des postes pour consolider les emplois précaires. Que l'Etat mette de l'ordre dans ses services avant de s'intéresser aux entreprises privées ! M. Maxime Gremetz - Monsieur Morin, il ne faut pas confondre le problème des entreprises d'intérim et celui des intérimaires -qui peuvent avoir des contrats de vingt-quatre heures ou de huit jours. L'amendement 68, mis aux voix, n'est pas adopté. L'amendement 69, repoussé par la commission et par le Gouvernement, n'est pas adopté. M. Yves Cochet - Notre amendement 70 concerne le travail de nuit. La directive européenne de 1993 n'est pas encore totalement transposée en droit interne ; il est temps de combler ce vide juridique, en apportant des garanties aux salariés, en particulier aux femmes qui en ce domaine sont très défavorisées ; Mme Génisson, qui est cosignataire de cet amendement, a fait un rapport sur le sujet. M. le Rapporteur - Défavorable. Mme la Ministre - Le Gouvernement partage avec M. Cochet la conviction qu'il faut avancer, d'autant plus que nous avons à transposer la directive européenne dans des délais relativement brefs. Mais je souhaite que ces dispositions prennent place dans le projet de loi de transposition de plusieurs directives que le Gouvernement présentera au printemps. Cela nous laissera le temps de régler d'ici là certains points : conditions dans lesquelles le recours au travail de nuit est autorisé, garanties apportées aux salariés, notamment pour le droit au retour à un travail de jour en cas de problèmes de santé, dispositions spécifiques pour les femmes enceintes dont l'état de santé serait incompatible avec le travail de nuit. Le Gouvernement s'engageant à présenter ce projet de loi de transposition au printemps, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement. M. Yves Cochet - Après l'engagement ferme que vous venez de prendre, j'accepte de le retirer si Mme Génisson, cosignataire, en est d'accord. Mme Roselyne Bachelot-Narquin - Je le reprends car j'avais l'intention de le voter. Mme la Ministre - Vous voterez ces dispositions au printemps prochain. Mme Roselyne Bachelot-Narquin - La France est sommée par Bruxelles de supprimer les interdictions de travail de nuit pour les femmes. Censées protéger les femmes, ces interdictions les ont en fait pénalisées. Discriminatoires donc, elles sont de surcroît absurdes car les femmes sont précisément les plus nombreuses à travailler dans le secteur sanitaire et social où le travail de nuit est inévitable. Je partage pleinement les autres attendus de cet amendement. Oui, le travail de nuit est nuisible à la santé et à la vie sociale. C'est pourquoi il ne faut y recourir que dans des situations précises et apporter des garanties aux salariés, tout en évitant les discriminations. Il est donc tout à fait regrettable qu'il ait été retiré. L'amendement 70, mis aux voix, n'est pas adopté. L'article 4, mis aux voix, est adopté. M. Maxime Gremetz - Que les femmes puissent faire les «trois huit», voilà, selon vous, l'égalité ! L'amendement 84 tend, lui, à mieux encadrer le travail le dimanche dans les grandes surfaces alimentaires. M. Hammel a cosigné cet amendement, car le problème est particulièrement aigu dans la Somme où des collectifs de jeunes femmes notamment, se sont créés pour s'opposer au travail le dimanche. Nous avions adopté en première lecture un amendement tendant à exiger que les grandes surfaces n'ayant pas obtenu l'autorisation dérogatoire d'ouvrir le dimanche ne puissent vraiment pas ouvrir. En effet, la loi est fort mal respectée et des centaines le font quand même ! Nous proposons aujourd'hui par notre amendement 84 d'aller plus loin, dans le double souci de protéger les salariés, qui ont droit à une vie de famille, et de limiter la concurrence déloyale des grandes surfaces vis-à-vis des petits commerces de centre-ville. J'indique par avance que je suis favorable au sous-amendement 229 qui tend à prévoir que les nouvelles dispositions s'appliquent aux établissements de plus de dix salariés, et non de cinq comme initialement prévu. M. Hervé Morin - Nous avons en effet voté l'amendement de M. Gremetz en commission à la condition qu'il soit sous-amendé comme il vient de l'indiquer. Fixer le seuil à cinq salariés risquerait en effet de nuire aux commerces de détail dans les zones touristiques qui emploient parfois davantage de personnel. M. le Rapporteur - Certains principes doivent être intangibles : c'est le cas du droit au repos compensateur et au repos dominical. Malheureusement, la loi quinquennale de 1993 a multiplié les dérogations, et la situation aujourd'hui est bien celle décrite par M. Gremetz. Nous avons déjà voté en première lecture une disposition autorisant l'inspection du travail à saisir en référé la justice pour faire respecter la loi. Celle-ci doit en effet, comme il a été dit, être appliquée plus rigoureusement. Mais un toilettage de l'ensemble de la réglementation relative au travail le dimanche est nécessaire. La commission a repoussé cet amendement dans l'attente d'une réflexion générale complémentaire qu'à titre personnel j'estime indispensable. Mme la Ministre - Je fais partie de ceux qui considèrent que le travail le dimanche doit demeurer exceptionnel. Souvenez-vous que c'est moi qui ai fait fermer le magasin Virgin des Champs-Elysées, qui depuis quatre ans, contrevenait à la loi en ouvrant le dimanche. Mais il faut prendre en compte la situation de l'ensemble des établissements, notamment dans les zones touristiques ou pour les commerces alimentaires. Je comprends le souci de défendre le petit commerce mais il n'appartient pas au droit du travail de régler les problèmes de concurrence. Pourquoi certains commerces pourraient-ils rester ouverts le dimanche et d'autres non? Comment fixer un seuil ? Dans les quartiers défavorisés, les supérettes, qui sont d'ailleurs souvent les seuls commerces qui restent, et qui, à ce titre, jouent un rôle essentiel, devraient-elles fermer quand les petits commerces des centres-villes pourraient, eux, ouvrir ? Je suis donc défavorable à cet amendement tout en restant disposée à reprendre une réflexion globale sur le travail dominical. M. le Président - Je suis saisi par le groupe communiste d'une demande de scrutin public sur l'amendement 84. Mme Roselyne Bachelot-Narquin - Sous-amendé ou non ? M. le Président - Considérons qu'il s'agit d'un amendement 84 rectifié. M. Maxime Gremetz - Je précise que nous ne visons nullement la supérette des quartiers en difficulté. D'ailleurs, ces supérettes n'emploient généralement pas dix salariés. Nous visons les grands groupes, les grandes chaînes alimentaires. Simplement, Mme Lebranchu, avec laquelle nous avons examiné le problème, nous a fait valoir qu'il valait mieux prendre en compte le critère du nombre d'employés que la surface du commerce, ce que nous avions prévu de faire au départ. M. François Goulard - Je n'ai pas trouvé dans le Règlement de l'Assemblée d'article donnant à M. Gremetz le pouvoir de prendre la parole sans en référer au président de séance... Mais passons. Pour une fois, sur l'amendement 84, je veux exprimer mon désaccord avec mes collègues de l'opposition. Et, pour une fois encore, je rejoins Mme la ministre pour dire qu'il n'appartient pas au droit du travail de réglementer les modes de distribution : ce sont deux domaines législatifs différents, qu'il est maladroit de confondre. Sans doute le travail du dimanche n'est-il pas souhaité par une majorité de salariés. Il y a toutefois des exceptions : étant étudiant, j'avais des amis qui subvenaient à leurs études en travaillant le dimanche. Et surtout l'ouverture dominicale des magasins de toute taille est plébiscitée par les consommateurs. Et Mme la ministre a raison de rappeler que dans certains quartiers ce sont des grandes surfaces qui rendent ce service à la population. Je suis donc hostile à l'amendement 84 rectifié. M. Germain Gengenwin - Une fois n'est pas coutume, je suis d'accord avec le Gouvernement. J'ai peur que l'adoption de cet amendement n'aboutisse pas à réglementer la situation des magasins qui ouvrent déjà le dimanche, mais à inciter ceux qui ne le font pas encore à ouvrir. Si un commerce ouvre, dans une rue, comment son voisin pourra-t-il rester fermé ? Il faut prendre en considération non seulement la vie des familles, mais l'ensemble du commerce, qui va être concerné. Cet amendement aura un résultat contraire à son but. A la majorité de 26 voix contre 11, sur 39 votants et 37 suffrages exprimés, l'amendement 84 rectifié n'est pas adopté. M. le Rapporteur - Je regrette que l'amendement 16 contredise le titre du beau film de Truffaut «Vivement dimanche», mais il vise à fournir les moyens de faire respecter les règles dans ce domaine. L'amendement 16, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté. L'article 4 bis est rétabli et ainsi rédigé. M. François Goulard - Cet article concerne l'application de la réduction du temps de travail aux cadres. Avant ce texte, les cadres -à l'exception des cadres dirigeants- relevaient du droit commun, c'est-à-dire des 39 heures. Nous savons que beaucoup d'entre eux dépassaient largement ce seuil : leur durée moyenne de travail, d'après certaines études, est d'environ 45 heures. Ce que voyant, et dans une intention louable, le Gouvernement a voulu prendre des dispositions particulières pour les cadres, afin que la réduction du temps de travail leur soit appliquée, mais selon des modalités spécifiques. Malheureusement, en méconnaissant une fois de plus la diversité des situations, il a posé des règles dont il est à peu près certain qu'elles ne seront pas suivies. En outre il a compliqué la situation des cadres, puisque chacun devra déterminer à laquelle des trois catégories créées par la loi il appartient. Résultat : le projet, et les débats à son sujet, ont créé l'inquiétude chez les cadres, et la crainte de voir leur temps de travail quotidien augmenter de façon importante. J'en conclus qu'en cette matière il est impossible de réglementer, et j'en veux pour preuve le fait que la réglementation actuelle n'est pas respectée. La sagesse est donc de renvoyer ce type de questions à la convention collective et à l'usage des entreprises. C'est d'ailleurs largement ce qui se passe aujourd'hui : les catégories concernées ne revendiquent pas un traitement différent de celui qui leur est réservé. Le Sénat a adopté une disposition simple, renvoyant à la convention collective. Il a fait preuve ainsi de plus de sagesse que l'Assemblée. Il est vain de réglementer quand on sait d'avance que la loi ne sera pas respectée. M. Daniel Paul - Tout d'abord, quelques rappels. En avril 1999, une déclaration unitaire des organisations de cadres de la CFDT, la CGT, la CFTC et FO appelait à «une réduction du temps de travail pour les cadres avec des références horaires précises». En octobre, un millier de cadres manifestaient à Saint-Lazare, à l'appel de la CGT, de la CGC et de la CFTC, pour réclamer «une véritable réduction du temps de travail des cadres avec décompte horaire. Le même mois une déclaration commune des confédérations CGT, FO, CGC et CFTC demandait des références et limitations horaires dans les forfaits, et la suppression des notions d'horaires non prédéterminés et de salariés itinérants. En novembre, grève de nombreuses catégories de cadres : informaticiens, sociétés de services, de la radio-télévision, des grands magasins se sont mises en grève. Le 24, à l'appel de la CGC, de la CGT et de la CFTC, dix mille cadres manifestaient à Paris, Marseille, Toulouse et Nantes, «pour une véritable réduction du temps de travail des cadres et des salariés itinérants avec décompte et limitations horaires». Sur ce point la volonté des cadres ne fait donc aucun doute. Qui d'ailleurs tirerait bénéfice du forfait sans référence horaire ? Pas les chômeurs, puisque des milliers d'emplois sont gelés par le travail gratuit qu'effectuent les cadres. Pas davantage les autres salariés : ils ont tout à gagner à plus de solidarité et de sérénité dans les entreprises. Le MEDEF en revanche était soulagé : les situations de travail dissimulé qu'on dénonce aujourd'hui, y compris devant la justice, allaient être légalisées au-delà de ses espérances... Car les cadres travaillent déjà en moyenne 2 070 heures par an, mais, avec le forfait prévu par la loi, ils auraient pu être contraints de travailler 2 200, 2 400, voire 2 821 heures ! Nous étions bien loin des 1 600 heures. De plus, la définition, trop floue, du cadre dirigeant et l'intégration dans le forfait des salariés itinérants permettaient déjà des interprétations abusives dans plusieurs accords. Ceux conclus chez Carrefour, Syntec, Aérospatiale-Toulouse, Sanofi, ont montré que les forfaits-jours allaient être utilisés pour la plupart des cadres et largement étendus à d'autres salariés. Depuis la première lecture, le groupe communiste est convaincu que, pour réussir, la réduction du temps de travail devait s'appliquer à toutes les catégories de salariés. C'est une question de justice mais aussi d'efficacité économique. Nous avons donc déposé des amendements en vue de rétablir les références et limitations horaires et de limiter le forfait jour, sans référence horaire, aux seuls cadres réellement assimilables à des dirigeants. Nous sommes heureux qu'une évolution ait pu avoir lieu, et nous avons volontiers cosigné les amendements qui viennent d'être déposés. Ils tiennent compte des mouvements sociaux de ces derniers jours, et c'est tant mieux. C'est aussi ce qu'attendent de la gauche les acteurs du mouvement social et tous les salariés. M. Hervé Morin - Le débat actuel sur la réduction du temps de travail des cadres est une vraie révolution culturelle. D'un seul coup une catégorie qui travaillait bien plus de 39 heures réclame, au moins en partie, le passage aux 35 heures. On perçoit une césure entre les jeunes cadres et leurs aînés, plus enclins à se considérer comme une catégorie à part à laquelle on ne peut appliquer de limites horaires. Mais regardons vers l'étranger. Dans la métallurgie allemande, par exemple, les cadres se sont eux-mêmes exclus du passage aux 35 heures, jugeant absurde de les leur appliquer. Il est vrai qu'en France la catégorie des cadres est beaucoup plus nombreuse qu'ailleurs. Mais la disposition que nous allons adopter sera une première, et une fois de plus notre pays sera le seul à en adopter une semblable. Si, d'autre part, une partie des cadres revendiquent les 35 heures, c'est aussi en raison du niveau élevé des prélèvements obligatoires. S'ils pouvaient tirer un meilleur parti du fruit de leur travail, leur revendication de congés serait moins forte. Enfin, je voudrais souligner que nous allons avoir un véritable «bogue» au 1er janvier 2000 : l'article 5 subordonne l'application aux cadres du forfait horaire à une clause de la convention collective. On imagine la situation dans laquelle vont se retrouver les entreprises où il n'y a pas de convention collective : elles seront obligées d'appliquer à leurs cadres le régime des 35 heures tant qu'une convention n'aura pas été négociée ! Cette question aurait dû être traitée par des accords de branche, non par la loi. M. Maxime Gremetz - Cet amendement montre que quand il y a volonté partagée de trouver une solution constructive, en tenant compte des aspirations exprimées, on parvient à un très bon résultat. Je m'associe à l'amendement de la commission. M. Yves Cochet - Je voudrais tout de même indiquer que la rédaction proposée comporte trois risques pour les cadres supérieurs soumis au régime du forfait. Contrairement aux salariés, ils risquent de voir leur durée du travail augmenter dans les faits alors que les enquêtes montrent qu'ils en souhaitent la diminution. Depuis 1982, la durée hebdomadaire moyenne du travail a ainsi augmenté de deux heures pour les cadres, alors que la durée légale est passée de 40 à 39 heures. Deuxième risque, ce serait donner un mauvais exemple aux autres pays européens. Aucune législation, que je sache, ne supprime toute référence horaire pour une catégorie de salariés. Enfin, troisième risque, cela va aggraver la discrimination aux dépens des femmes. Toutes les statistiques montrent qu'en dépit d'une certaine avancée dans les mentalités, les femmes supportent beaucoup plus que les hommes la charge des enfants et des tâches domestiques. S'il n'y a plus aucune référence horaire pour les postes de cadres supérieurs, cela fera obstacle à leur accès à ces postes. J'espère que la discussion, en particulier celle de l'amendement fixant la durée hebdomadaire maximale à 48 heures, fera encore évoluer ce texte et je me déterminerai sur cet article à ce moment. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance. MODIFICATION DE L'ORDRE DU JOUR M. le Président - J'ai reçu de M. le ministre des relations avec le Parlement une lettre m'informant que le Gouvernement fixe ainsi l'ordre du jour de ce soir et, s'il y a lieu, de demain : JEUDI 2 DÉCEMBRE, le soir : _ suite de la nouvelle lecture sur le projet de loi relatif à la réduction négociée du temps de travail ; _ sous réserve de sa transmission par le Sénat, dernière lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour l'an 2000. Eventuellement, VENDREDI 3 DÉCEMBRE, le matin, l'après-midi et le soir : _ Suite de l'ordre du jour de la veille. L'ordre du jour prioritaire est ainsi modifié. Prochaine séance, cet après-midi à 15 heures. La séance est levée à 12 heures 35. Le Directeur du service © Assemblée nationale |