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Session ordinaire de 1999-2000 - 64ème jour de séance, 151ème séance

2ÈME SÉANCE DU MARDI 14 MARS 2000

PRÉSIDENCE de M. Laurent FABIUS

Sommaire

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT 2

CROISSANCE ET POLITIQUE FISCALE 2

RÉFORME DE L'ADMINISTRATION FISCALE 2

BAISSES D'IMPÔTS 3

FONDS STRUCTURELS EUROPÉENS 4

TOXICITÉ DU FIOUL DE L'ERIKA 4

MESURES ENVISAGÉES AU SUJET DES LOUPS 5

RÉFORME DE L'ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL 6

RENFORCEMENT DES MOYENS DE L'ÉDUCATION NATIONALE DANS LE GARD 7

HÔPITAL PUBLIC 8

REMISE DE DETTES FISCALES 8

DÉCHARGE DE BONFOL 9

CAISSES PRIMAIRES DE SÉCURITÉ SOCIALE 10

CARTES BANCAIRES 11

SOLIDARITÉ ET RENOUVELLEMENT URBAINS (suite) 11

ART. 3 12

Article L. 123-1 du code de l'urbanisme 19

La séance est ouverte à quinze heures.

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      QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

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CROISSANCE ET POLITIQUE FISCALE

M. Charles de Courson - Monsieur le ministre de l'économie et des finances, alors que vous aviez promis en 1999 de réduire de près de vingt milliards les impôts et les cotisations sociales, l'INSEE vient d'annoncer qu'ils ont en réalité augmenté de quelque 70 milliards l'an passé. En prélevant ainsi plus des deux tiers de la richesse nationale créée en 1999, vous avez privé les Français des fruits de la croissance auxquels ils avaient droit sans pour autant réduire, conformément à vos promesses, le poids des dépenses publiques. Ce gouvernement mène ainsi une politique économique et budgétaire inverse de celle conduite en Espagne par M. Aznar (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) qui vient de remporter une éclatante victoire électorale (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR).

Vous promettez de nouveau des baisses d'impôts pour 2000. Malheureusement, les statistiques publiées par votre propre ministère révèlent que les impôts d'Etat augmenteront de 6 %, et même de 9 % si l'on tient compte des droits sur le tabac.

Ma question est simple : allez-vous continuer en 2000 à accroître la pression fiscale et sociale sur les Français et à gaspiller les fruits de la croissance ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR)

M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - J'étais hier à Bruxelles où mes collègues ministres de l'économie et des finances, jugeant la performance économique de notre pays en 1999, lui ont en fait décerné de très bonnes notes (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Notre pays a en effet connu la plus forte croissance parmi les grands pays européens : 2,7 % (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste),... la plus forte création d'emplois privés depuis trente ans (Mêmes mouvements), une hausse des prix plus faible que prévu (Mêmes mouvements). Il a également fortement réduit son déficit public -en queue de peloton en 1997, la France a rejoint le peloton de tête à cet égard en 1999 (Mêmes mouvements). Enfin, pour la première fois depuis vingt ans, la dette de la France a reculé en pourcentage du PIB (Mêmes mouvements).

Vous êtes libre en tant que parlementaire de porter une appréciation critique sur la politique économique du gouvernement Jospin. Il est de mon devoir de souligner ses succès (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe RCV).

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RÉFORME DE L'ADMINISTRATION FISCALE

M. Michel Voisin - Monsieur le ministre de l'économie et des finances, il est pour le moins déplacé de parler de « cagnotte » quand l'excédent de recettes fiscales provient d'un excès d'imposition, insupportable aux contribuables (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR).

Quant à la réforme en cours de l'administration fiscale, elle illustre bien la méthode du gouvernement Jospin qui décidément patine. Encore une fois, ambiguïté et double jeu ont prévalu. Aucune concertation n'a eu lieu ni avec les agents, ni avec les élus locaux, ni avec les contribuables. Encore une réforme technocratique imposée d'en haut ! Il est vrai qu'un ministre qui n'a jamais été élu peut avoir du mal à comprendre la nécessité du dialogue.

N'est-il pas stupéfiant que sans tenir compte des préoccupations d'économies et d'efficacité que vous aviez affichées, un quarteron de hauts fonctionnaires ait décidé des futures structures administratives de votre ministère ? Nul doute qu'encore une fois, au lieu de conduire une réforme profitable aux contribuables, vous utiliserez une partie du surplus de recettes fiscales pour tenter de calmer le mouvement des agents.

Monsieur le ministre, quand allez-vous assumer vos responsabilités, clarifier vos positions et cesser vos volte-face pour sortir enfin de l'immobilisme ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR)

M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - Florence Parly et moi avons engagé depuis vendredi dernier avec les représentants du personnel un dialogue constructif qui a déjà porté ses fruits sur plusieurs points.

Tout d'abord, les fonctionnaires de l'administration fiscale, dont je loue la compétence et le dévouement, souhaitent une réforme ; je rends à ce propos hommage à leur sens de la réforme. Celle-ci doit tendre à simplifier les démarches des contribuables. Un seul exemple : aujourd'hui, en cas de changement d'adresse, quatre démarches différentes sont nécessaires. Voilà ce que nous entendons réformer. Enfin, les agents sont d'accord sur le projet d'instituer un interlocuteur fiscal unique.

Florence Parly et moi négociions ce matin encore. Il est prévu que nous rencontrions de nouveau les personnels demain. Voilà la méthode Jospin. Sachez que j'ai la ferme intention de conduire cette négociation jusqu'au bout. Attachés au service public, nous mènerons cette réforme à son terme, avec les agents et pour les usagers, et non, comme il était dans votre habitude, contre les fonctionnaires (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

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BAISSES D'IMPÔTS

M. Roger-Gérard Schwartzenberg - L'annonce par le Gouvernement d'un plan de baisses d'impôts de 120 milliards sur trois ans et l'existence d'importantes plus-values de recettes fiscales m'amènent à vous interroger sur certains choix.

Il paraît nécessaire de réformer, voire de supprimer, la redevance audiovisuelle dont le montant uniforme pèse plus lourdement sur nos concitoyens les plus défavorisés. Des baisses ciblées de TVA, notamment sur la restauration, où elles permettraient de créer des emplois, seraient également bienvenues. Enfin, il faudrait revoir le barème de l'impôt sur le revenu. Celui-ci pénalise par exemple les RMistes ou les bénéficiaires d'autres minima sociaux retrouvant un emploi, les décourageant ainsi de retrouver du travail. Il pèse de même trop lourdement sur les classes moyennes. Démotivant, il freine l'initiative et étouffe la croissance. Il faudrait donc relever le plafond des tranches actuelles et réduire légèrement chacun de six taux actuels, de façon que l'ensemble des contribuables bénéficie de la baisse.

Lors de la discussion du projet de loi de finances en deuxième lecture le 16 décembre dernier, j'avais proposé que dès l'automne 2000 le troisième tiers provisionnel soit réduit. Cela donnerait un nouveau souffle à la croissance retrouvée tout en allant dans le sens d'une plus grande justice fiscale. Etes-vous prêt, Monsieur le ministre, à accepter cette mesure dans le projet de loi de finances rectificative ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV)

M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - La majorité de l'Assemblée nationale a déjà voté 40 milliards de baisses d'impôts dans le budget pour 2000 : suppression du droit de bail pour les loyers inférieurs ou égaux à 3 000 F par mois, abaissement à 5,5 % du taux de TVA pour les travaux d'entretien dans les logements,...

Nous allons tout à l'heure évaluer ensemble en commission des finances le surplus de recettes fiscales pour 2000. Oui, elles seront supérieures aux pronostics, notamment parce que la croissance, prévue à 2,7 %, aura atteint 3,5 %. C'est le signe que notre pays et ses entreprises vont de l'avant, que la confiance a été restaurée (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Toutes les statistiques concernant l'investissement, la consommation, l'emploi le prouvent.

Le surplus de recettes sera, de façon totalement démocratique et transparente, affecté par vous-mêmes, Messieurs les députés, -puisqu'un collectif sera présenté au printemps- au financement de dépenses exceptionnelles, à la réduction des déficits et à des baisses d'impôts. Sur ce dernier point, de nombreux parlementaires de l'Assemblée nationale et du Sénat ont souhaité que la taxe d'habitation soit en priorité réduite. C'est une piste qu'il faut explorer.

Vous évoquez l'impôt sur le revenu : toutes les pistes seront prises en considération, et c'est lors de la discussion sur le collectif que nous aurons à en débattre (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste).

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FONDS STRUCTURELS EUROPÉENS

M. Gérard Charasse - Monsieur le Premier ministre, l'utilisation des fonds structurels européens est liée à une méthode et à un calendrier très stricts. Dans le cadre de l'élaboration des documents uniques de programmation, la concertation entre l'Etat et les collectivités locales est une condition essentielle de recevabilité de ces documents par l'Union européenne, qui sont la base d'un contrat qui liera la région, l'Etat et l'Europe dans l'utilisation de ces fonds. Depuis le 19 janvier nous sommes entrés dans la phase active d'élaboration de ces documents. Les délais sont courts, puisque les régions doivent transmettre leurs projets avant le 15 mars à l'Etat, qui doit remettre ses propositions à l'Union avant le 30 avril. Or les stratégies et les préoccupations de développement local des élus territoriaux n'ont pas été assez prises en compte.

Si le Gouvernement partage cette analyse, accepterait-il, pour éviter que le DOCUP soit rejeté par l'Union -ce qui semble déjà devoir être le cas pour le document qui sert de base à l'utilisation des fonds structurels à l'objectif 3-, d'utiliser une part du délai dont il dispose pour regrouper les documents régionaux, à mener une consultation rapide mais soigneuse auprès des élus locaux ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe RCV et sur quelques bancs du groupe socialiste)

Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement - Je partage votre analyse sur la nécessaire implication des élus locaux dans l'élaboration des documents uniques de programmation de l'objectif 2, car c'est un gage d'efficacité, du fait que les collectivités cofinancent les programmes européens, et que le partenariat entre l'Etat et les régions est concrétisé par la coprésidence des comités de programmation et de suivi. La concertation sur le zonage de l'objectif 2 a été engagée dès septembre sur le plan local. Elle porte non seulement sur la délimitation des zones, mais sur les besoins en matière de développement rural, industriel et urbain. Dans ma circulaire du 3 janvier aux préfets de régions, j'ai insisté sur un renforcement du partenariat entre l'Etat et les collectivités dès cette phase de l'élaboration du DOCUP. Le délai entre le 15 mars, date de la remontée des projets, et le 30 avril, date de leur transmission à la Commission, est nécessaire pour assurer une bonne correspondance entre le contenu du document et les orientations prioritaires définies par la Commission. Toutefois ce qui nous est demandé pour le 30 avril n'est pas une programmation détaillée mesure par mesure, mais une présentation des axes prioritaires. Des allers et retours avec les régions permettront de garantir l'adéquation aux exigences communautaires. Les comités de programmation engageront le travail en mai sans attendre l'approbation formelle du DOCUP et en associant largement toutes les collectivités. La concertation demande du temps : il faut donc l'engager sans tarder. Après la fixation des orientations générales dans le document remis le 30 avril, il nous restera plusieurs mois pour nous entendre sur des actions précises à fixer dans ce cadre (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe RCV).

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TOXICITÉ DU FIOUL DE L'ERIKA

M. Serge Poignant - Madame la ministre de l'environnement, mon collègue François Fillon vous a interrogée le 22 février sur une rumeur selon laquelle le produit échappé de l'Erika serait dangereux pour la santé de ceux qui le ramassent. En lui répondant, vous avez soigneusement évité d'employer le mot « cancérigène », alors que vous saviez que les premières analyses d'un laboratoire indépendant décelaient la présence d'hydrocarbures aromatiques polycycliques, qui sont « cancérigènes ». La contre-expertise que vous avez demandée à l'INERIS, sur des échantillons prélevés le 15 février sur la plage de La Baule, a d'ailleurs confirmé ces analyses. Certes l'INERIS ajoute que les risques pour les bénévoles sont faibles, compte tenu des temps d'exposition. Mais, même si c'est vrai, vous savez bien que l'émotionnel l'emporte toujours sur le rationnel. Certes le directeur du CEDRE affirme qu'il ne faut pas s'inquiéter, mais je me réjouis que notre collègue Daniel Paul, qui préside la commission d'enquête sur l'Erika, ait décidé des auditions en urgence sur la toxicité du produit.

D'où mes questions. Pourquoi n'avez-vous pas vous-même commandé très vite une analyse du produit au lieu d'attendre un mois et demi ?

Si vous aviez quelque suspicion sur la présence de produits cancérigènes, pourquoi n'avoir pas ordonné très rapidement un maximum de précautions ?

Souhaitons qu'aucune des personnes concernées n'en subisse de conséquences fâcheuses. Que comptez-vous faire pour vous en assurer ? Entendez-vous répondre à la demande du conseil régional des Pays de Loire qui réclame un suivi épidémiologique ? Que comptez-vous faire pour rassurer les bénévoles ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement - Je ne peux vous laisser dire que je n'aurais pas commandé d'analyses : la demande en a été formulée le lendemain du naufrage, et l'investigation confiée à l'Institut français du pétrole et au CEDRE. Ceux-ci ont rapidement communiqué leurs données au centre antipoisons de Rennes et aux DDASS qui, dès le 21 décembre, ont fait connaître une liste de précautions à diffuser sur les plages. Dès le 25 décembre, j'ai insisté sur ces consignes. Mais, lorsque nous avons eu connaissance de rumeurs concernant tant la composition réelle du produit que son impact sur la santé, Mme Gillot et moi-même avons souhaité des expertises complémentaires afin de ne pas prendre le moindre risque. Je veux bien que l'on tienne pour un fait acquis que l'émotionnel l'emportera toujours sur le rationnel ; mais, pour ma part, compte tenu de la composition du produit, j'affirme que nous avons rapidement, systématiquement et de façon répétée diffusé les procédures à respecter pour réduire les risques résultant de l'exposition. Je me suis trouvée, à Vannes, face à certains de vous qui me pressaient d'affirmer qu'il n'y avait pas de risque, pour ne pas décourager les bénévoles ! (Murmures sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF) J'ai refusé, et j'en suis fière (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV).

La responsabilité des acteurs de la santé publique ne consiste pas à diffuser en l'état les données pharmacologiques et physio-pathologiques : elle est de donner des recommandations claires permettant de réduire les risques au maximum. Vous n'avez apparemment pas consulté le site Internet de mon ministère, où jour après jour figuraient les éléments sur la composition du fioul. L'INERIS confirme que, si les règles de sécurité ont été respectées, les risques sont minimes. Par ailleurs, nous n'avons pas attendu les conseils de l'opposition pour engager un suivi sanitaire des bénévoles : il a été engagé dès janvier, après que nous avons eu vent de certains phénomènes notamment allergiques. Enfin, il n'y a pas lieu de laisser planer le doute sur les conditions de travail dans les cliniques d'oiseaux : M. Bougrain-Dubourg, comme le président de la Société d'étude et de protection de la nature en Bretagne, ont systématiquement diffusé les précautions que nous leur avions suggérées (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

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MESURES ENVISAGÉES AU SUJET DES LOUPS

M. Michel Bouvard - Ma question s'adresse à M. le Premier ministre et concerne la réapparition du loup, dans les Alpes du Nord en 1992, dans les Alpes du Sud en 1997 (« Ouh ! » sur de nombreux bancs du groupe socialiste). Le sujet est sérieux ! Quatre mille animaux détruits, 11 millions de dégâts dans le seul département de Savoie !

Dans ce département on est passé de soixante animaux détruits en 1997 à quatre cent vingt en 1999. Le résultat, c'est la fragilisation de la filière ovine, dont le revenu est déjà le plus faible de toute l'agriculture de montagne, elle-même située en dessous de la moyenne nationale. C'est la disparition progressive du pastoralisme, le retour des friches, l'aggravation des risques naturels sur des sites qui ne sont plus entretenus. En Savoie, 66 000 hectares sont pâturés par des ovins.

En 1997, le Gouvernement a demandé un rapport. Celui-ci préconisait des mesures de protection. Mais elles sont coûteuses et insuffisamment financées : 18,6 millions pour l'ensemble des Alpes du Nord, alors que la Direction départementale de l'agriculture les évalue à 61 millions pour le seul département de la Savoie. Neuf unités pastorales seulement sont protégées sur cent soixante-cinq. Ces mesures sont en outre inefficaces, comportent des dangers pour les randonneurs à cause des chiens de protection, et mettent l'Etat en infraction avec la législation sur les chalets d'étape ou sur les emplois-jeunes.

Une mission d'enquête, que j'avais proposée avec MM. Ollier et Estrosi, a conduit à une mission d'information, présidée par M. Chevallier qui a bien fait son travail. Que comptez-vous faire maintenant ? Admettez-vous comme la mission d'information que l'élevage et le pastoralisme sont incompatibles avec les prédateurs ? Ou pensez-vous, comme l'a écrit Madame la ministre de l'environnement, qu'il faut accroître le nombre des meutes et dépenser beaucoup d'argent pour améliorer l'image du loup dans l'opinion publique ? Les éleveurs attendent votre réponse (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR et du groupe DL).

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche - En effet c'est un sujet sérieux, et je vous réponds comme aurait pu le faire Mme Voynet, puisque c'est un dossier que nous traitons en concertation. Il nous faut, en effet, rendre compatibles les engagements de la France, notamment envers le programme Life et envers l'Europe, et notre volonté, non seulement de préserver le pastoralisme, mais de le redévelopper, comme nous y arrivons parfois, par exemple dans les Pyrénées. Le rapport demandé par le Gouvernement comme celui de votre mission d'information, ont bien cerné les problèmes. Nous avons présenté au Comité national de concertation un programme de travail qui comporte plusieurs pistes. L'une d'elles est l'idée d'un zonage, demandé d'ailleurs par les éleveurs de montagne, avec des zones d'expérimentation, et des zones de gestion dont le loup serait préventivement exclu pour répondre à cette nécessité de développer le pastoralisme. Ce programme va, dans les semaines qui viennent être soumis aux régions, aux élus et aux associations, pour concertation, et le Gouvernement entend qu'il soit mis en pratique dès le printemps, avant la prochaine saison d'estive (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

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RÉFORME DE L'ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL

M. Philippe Briand - Monsieur le ministre de l'éducation nationale, notre collègue André Schneider vous a alerté mardi dernier sur le malaise suscité chez les professeurs, les élèves et leurs parents par votre réforme de l'enseignement professionnel : vous lui avez répondu que cette réforme, longuement négociée, serait menée à son terme ! Mais, plutôt que négocier, vous avez communiqué : en juin dernier, vous avez publié une charte de l'enseignement professionnel intégré ; en septembre, vous avez organisé un grand colloque à Lille. Tout cela n'a pas empêché l'important mouvement de grève que nous voyons se développer. Au lieu de résorber le mal-être, vous n'avez fait que l'aggraver. Où est la concertation que vous prétendez avoir menée ? Une charte, un colloque n'ont pas suffi à expliquer cette réforme et tout démontre que votre message, si message il y a, ne passe pas ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) Que pouvez-vous encore dire aux professeurs des lycées professionnels, qui connaissent, eux, les débouchés et croient encore à leur métier mais dont vous avez décrit le combat, le 3 mars dernier, comme un combat idéologique d'arrière-garde ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR)

M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie - Cette réforme de l'enseignement professionnel intégré est une réforme importante dans la mesure où elle vise à instaurer un partenariat entre les lycées et les entreprises ou les chambres des métiers, grâce à des contrats négociés. Avec le même souci de l'avenir de nos enfants, nous avons mis à profit cette réforme pour aménager les horaires des enseignants, le ramenant de 23 à 18 heures dans les disciplines professionnelles ; en contrepartie, ce qui paraît légitime, nous avons demandé aux intéressés d'organiser un véritable suivi de leurs élèves lorsque ceux-ci sont en entreprise. Je note que cela a suscité une certaine incompréhension : sans doute ne nous sommes-nous pas montrés suffisamment pédagogues, bien que la négociation ait duré deux ans, mais le dialogue continue. Et la réforme de même ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

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RENFORCEMENT DES MOYENS DE L'ÉDUCATION NATIONALE DANS LE GARD

M. Alain Clary - Monsieur le ministre de l'éducation nationale (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL), depuis deux mois, l'ensemble de la communauté éducative du Languedoc est mobilisé pour obtenir des moyens supplémentaires en faveur de l'école. Pour la troisième fois ce samedi, à Nîmes, des dizaines de milliers de manifestants ont demandé des crédits pour l'enseignement scolaire et professionnel et exigé des emplois qualifiés. Ils ont demandé d'être écoutés, ils ont réclamé une vraie négociation et un plan pluriannuel de rattrapage. Les professeurs des LEP craignent, eux, pour leur statut, pour leurs conditions de travail et pour l'avenir de leurs établissements. Pensez-vous assortir la réduction du temps de travail, dans ce secteur, de la création d'emplois de titulaires ? Le décompte horaire tiendra-t-il compte des heures effectivement travaillées, sans flexibilité ni modulation ? Quand signerez-vous le décret d'assimilation des retraités PLP2 ?

Jeudi, une grève nationale d'une ampleur inégalée depuis 1995 réitérera cette exigence d'une consolidation du service public de l'éducation nationale. Ce message, nous nous sommes en vain efforcés de le faire passer lors du débat budgétaire. Aujourd'hui, avec l'augmentation des rentrées fiscales, l'école va-t-elle enfin recevoir sa part de la croissance ? Les défis qu'elle doit relever excluent qu'on se contente de redéploiements ou d'une gestion purement comptable, « à moyens constants ». Quel plan de recrutement et de résorption des emplois précaires envisagez-vous ? Dans quel sens allez-vous réviser la carte scolaire ? Allez-vous négocier avec les intéressés et attribuer à l'école les moyens dont elle a besoin, notamment à la faveur du prochain collectif ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur quelques bancs du groupe socialiste)

M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie - En ce moment même, le recteur Bloch reçoit l'intersyndicale des enseignants du Gard afin d'étudier avec eux les moyens de faire face à la situation. Cette rencontre et les précédentes font suite aux discussions provoquées par la mission de l'inspection générale, que j'ai envoyée pour faire le point (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR). Nous avons dégagé certains moyens et j'ai demandé au recteur de poursuivre le dialogue en vue de continuer à combler le retard dont souffre cette région. Mme Royal et moi sommes tout à fait ouverts à ce dialogue, ici comme ailleurs.

S'agissant des lycées professionnels, le décret d'assimilation des retraites concernant les PLP sera signé et appliqué à la rentrée ; nous allons ouvrir comme prévu les concours de titularisation. Ces points seront traités dans le cadre du débat sur la réduction du temps de travail, ouvert le 9 mars, mais il n'y a pas de raison d'anticiper pour les lycées professionnels une discussion qui concerne l'ensemble des enseignants.

Des réunions de travail sont organisées avec les organisations syndicales pour préciser différents points de la réforme : dans ce domaine aussi, nous sommes ouverts au débat.

Avant notre arrivée, les départements du Midi ont pris beaucoup de retard (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Ce retard, nous avons commencé à le résorber ! Cependant, la situation n'est pas comparable avec celle de la Seine-Saint-Denis ! Il n'empêche que nous sommes déterminés à ne rien négliger pour assurer l'égalité des chances pour tous les élèves, quelle que soit leur région. Nous avons ainsi commencé à corriger une carte scolaire des plus inégalitaires. Nous voulons que l'éducation nationale reste un grand service public, assurant une formation de qualité à tous les jeunes (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe DL et du groupe UDF) et je souhaite donc que l'ensemble de la majorité plurielle se mobilise pour ce secteur, bien malmené par la droite ! (Mêmes mouvements ; applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste)

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HÔPITAL PUBLIC

M. Alain Barrau - Madame la ministre de l'emploi et de la solidarité, des représentants de la gauche comme de la droite vous ont interrogée sur la situation de l'hôpital public. Or vous venez de signer deux protocoles d'accord avec les praticiens et avec les agents hospitaliers. Le second a reçu l'approbation de six organisations syndicales et la CGT, qui ne l'a pas signé, l'a cependant qualifié d'avancée pour au moins trois de ses quatre chapitres.

Votre méthode convient au groupe socialiste : elle consiste à inventorier d'abord les besoins, à ouvrir une négociation avec les organisations syndicales puis à déterminer des priorités. Trois milliards huit cents millions sont d'ores et déjà mobilisés sur le budget de 2000 -plus de dix milliards en trois ans afin de créer 12 000 emplois ! Il faut continuer en ce sens car l'hôpital est à la fois un élément essentiel à la santé public et un filet de sécurité. Maintenant que ces mesures dont tout le monde ici devrait se féliciter ont été arrêtées, comment vont-elles se concrétiser dans les hôpitaux -à Béziers et ailleurs ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité - Le Gouvernement a en effet signé hier un protocole avec l'ensemble des organisations représentatives des médecins hospitaliers et un autre ce matin avec six des huit organisations syndicales du personnel. C'est le fruit d'un travail intense et je tiens à rendre hommage à l'ensemble des syndicats -y compris à ceux qui n'ont pas signé- car tous ont démontré leur souci d'assurer un meilleur fonctionnement du service public.

M. René André - Démagogie !

Mme la Ministre - Non : les agents peuvent réellement être fiers de leurs organisations ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste)

Nous sommes partis des aspirations du personnel et nous avons fait en sorte que les absents soient remplacés -12 000 emplois seront créés pour 2 milliards ; nous nous sommes employés à accompagner l'évolution de l'hôpital, nous avons négocié sur les conditions de travail, nous avons dégagé 800 millions pour les investissements et nous avons engagé un processus de modification des relations sociales à tous les niveaux.

D'autre part, nous devons redonner toute leur place aux médecins dans l'hôpital public, en rendant la carrière hospitalière plus attrayante, grâce notamment à l'attribution d'une prime en faveur de ceux qui consacrent leur temps à l'hôpital public et grâce à une revalorisation de l'ensemble des carrières.

Enfin, des chantiers ont été définis pour l'avenir, en particulier les urgences et la psychiatrie ainsi que les changements des relations sociales tant au niveau régional que local. Dès la semaine dernière, nous avons délégué aux régions les fonds nécessaires au remplacement des absents, pour que les embauches aient lieu dans les meilleurs délais sur des emplois statutaires ou, à défaut, sur des contrats de remplacement.

Nous poursuivrons la politique hospitalière que nous menons depuis deux ans et demi pour améliorer la qualité et la sécurité du service public et pour réduire les inégalités. Maintenant que la sécurité sociale est redevenue excédentaire et après l'attribution par le Premier ministre de 2 milliards aux hôpitaux, nous ferons en sorte, avec les représentants du personnel, que notre service public hospitalier soit encore meilleur et au service de tous (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

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REMISE DE DETTES FISCALES

M. Serge Janquin - Les chiffres confirment chaque semaine la bonne santé de notre économie. Le chiffre de plus de 470 000 emplois nouveaux en 1999 est un record depuis trente ans.

Mais cette croissance économique ne doit pas nous faire oublier que de nombreuses personnes sont en grande difficulté sociale. Le 27 septembre dernier, le Premier ministre avait annoncé à Strasbourg un plan d'effacement des dettes fiscales pour les chômeurs surendettés. Ces mesures exceptionnelles ont pris fin le 29 février.

Pouvez-vous, Monsieur le ministre de l'économie, en dresser un premier bilan alors que nous examinerons, dans quelques semaines, un collectif budgétaire qui nous permettra de poursuivre l'effort ainsi entrepris en faveur de la justice sociale et fiscale ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV)

M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - Vous soulignez avec raison (Rires sur les bancs de l'opposition) que les bons résultats de notre économie ne doivent pas nous faire oublier la détresse de certains de nos concitoyens.

A Strasbourg, le Premier ministre a demandé qu'un effort particulier de remise des dettes fiscales soit consenti en faveur des chômeurs surendettés et des bénéficiaires d'une aide sociale d'urgence. 230 000 personnes en ont bénéficié dont 144 000 chômeurs surendettés. La moitié d'entre eux ne touchait qu'une allocation chômage de 2 000 F par mois. La remise de dette qui leur a été accordée s'élevait à 2 300 F en moyenne et concernait, pour 50 %, la taxe d'habitation. Autrement dit, vous aviez raison de demander que l'effort porte avant tout sur cet impôt particulièrement injuste.

Quant aux 86 000 personnes relevant de l'aide sociale d'urgence qui ont bénéficié de ces mesures exceptionnelles, elles ont obtenu une remise de dette de 1 500 F en moyenne qui portait, pour les deux tiers des bénéficiaires sur la taxe d'habitation. Le revenu moyen de ces personnes s'élevait à 4 500 F par mois.

Bref, nous concilions une volonté d'expansion économique et de création d'emplois avec le souci de ne laisser aucun de nos concitoyens au bord du chemin. Lorsque nous étudierons les allégements d'impôts pour l'automne 2000, nous devrons nous souvenir de ces personnes en grande difficulté auxquelles le marché ne peut rien apporter. C'est alors la solidarité nationale qui doit s'exprimer (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV).

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DÉCHARGE DE BONFOL

M. Jean-Louis Fousseret - Nous venons d'apprendre avec effroi qu'une ancienne décharge industrielle près de Bâle, en Suisse, stocke plus de 100 000 tonnes de produits toxiques à proximité de la frontière entre l'Alsace et la Franche-Comté.

Ces produits dangereux sont contenus dans des fûts métalliques qui, enfouis dans un sol argileux, rouillent et se décomposent, formant ainsi une véritable « fosse commune » de déchets industriels. Il y a là une véritable bombe chimique à retardement qui menace, directement ou indirectement, les rivières françaises, Rhône, Saône, Doubs et Rhin.

Nous n'avons pu prévoir ni le naufrage de l'Erika, ni la catastrophe du Danube. En revanche, en l'occurrence, nous pouvons agir avant tout incident.

Que comptez-vous faire, Madame la ministre de l'environnement, pour protéger les vallées menacées en particulier celle du Doubs sauvée une première fois grâce à la décision du Premier ministre de ne pas donner suite à un projet pharaonique de grand barrage ? Quelles mesures envisagez-vous de prendre pour protéger la vie et la santé de millions de nos compatriotes et pour éviter qu'après Tchernobyl, nous ayons « Tchernobâle » ? (Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV)

Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement - La deuxième pollution liée à un site industriel sur le Danube ces derniers jours et la mémoire que la population riveraine a gardée de la catastrophe Sandoz dans les années 70, expliquent la mobilisation que suscite ce dossier important.

Mon attention a été appelée il y a quelques jours sur la menace que constitue la décharge de Bonfol à proximité de la Franche-Comté et du comté suisse du Jura. J'ai aussitôt demandé à mon homologue suisse ainsi qu'au directeur de l'office fédéral suisse de l'environnement de me communiquer sans délai des informations complémentaires : historique de la décharge, nature des déchets, identité des entreprises qui stockent... Je tiens à souligner la coopération, la disponibilité, la transparence et l'ouverture dont les autorités suisses ont fait preuve, tout en pointant les sites français qui polluent côté suisse.

Il convient maintenant d'expertiser les informations dont nous disposons et de les compléter. J'ai demandé qu'on vérifie la qualité des eaux françaises proches de cette décharge. Aucune anomalie significative pouvant être attribuée à la décharge n'a été relevée, ce qui n'écarte pas tout danger pour l'avenir.

Je me rendrai en Suisse au mois d'avril pour visiter cette décharge et pour arrêter, avec mon homologue suisse, une stratégie de gestion propre à minorer les risques pour l'environnement (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV et du groupe socialiste).

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CAISSES PRIMAIRES DE SÉCURITÉ SOCIALE

M. Pierre Hellier - Le 2 février, Madame la ministre de l'emploi, alors que je vous interrogeais sur la situation des caisses de sécurité sociale et sur leur capacité à traiter les demandes de CMU ainsi que les feuilles d'assurance maladie, vous m'aviez répondu, non sans quelque agressivité, qu'il n'y avait pas de problème.

Pouvez-vous le confirmer aujourd'hui alors que le nombre de feuilles d'assurance maladie en attente excéderait les 10 millions ?

D'autre part, à chaque séance de questions, vous affirmez que l'hôpital se porte bien, mais vous avez dû, en toute hâte, puiser 10 milliards dans la cagnotte pour juguler la crise des urgences, sans pour autant résoudre le problème.

N'y a-t-il aucun problème alors que quinze médecins et professeurs de médecine réputés expriment leur colère devant un système qui, selon eux, mettrait la vie de leurs patients en danger, au point qu'ils ont envisagé de saisir le Procureur des faits constatés dans leurs établissements ? Ils soulignent qu'au lieu de réformes structurelles globales, l'hôpital public a fait l'objet d'ajustements conjoncturels incohérents qui nuisent à l'ensemble de l'édifice (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF).

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité - Je vous répondrai le plus gentiment possible, pour vous faire plaisir (« Ah ! » sur les bancs du groupe DL), mais sans trahir la vérité.

Je n'ai jamais dit que les caisses d'assurance maladie n'avaient pas de retard. 10 millions de feuilles sont effectivement en souffrance sur plusieurs centaines de millions qu'elles traitent chaque année. Nous avons donc accordé des moyens complémentaires à la CNAM pour faire face à la fois aux conséquences de l'épidémie de grippe, aux difficultés du système informatique et à l'afflux des demandes de CMU. Depuis le mois de janvier, 3 millions de personnes bénéficient déjà de cette couverture maladie. Près de 30 000 dossiers sont déposés chaque semaine -70 % d'entre eux ont déjà fait l'objet d'une réponse positive.

Je n'ai jamais dit non plus qu'il n'y avait pas de problème à l'hôpital public, mais que nous commencions par rétablir l'équilibre de la sécurité sociale, condition essentielle pour garantir l'avenir de l'hôpital public.

J'en viens aux professeurs de médecine dont vous avez parlé, qui n'avaient même pas averti leur hiérarchie de leur démarche et qui ont été rappelés à l'ordre par le directeur de l'Assistance publique. L'hôpital mérite mieux qu'une politisation. Nous devons avant tout défendre notre service public plutôt que le secteur libéral à l'hôpital, comme le font les médecins qui ont signé cet appel (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

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CARTES BANCAIRES

M. Christian Paul - Plusieurs millions d'utilisateurs réguliers de cartes bancaires sont inquiets. Des informations contradictoires mais alarmantes circulent depuis que, la semaine dernière, une clef de cryptage a été rendue publique sur Internet, ce qui fait courir de grands risques de détournement de cartes et de falsification. Or la confiance est essentielle aux paiements électroniques.

Quelles garanties le Groupement cartes bancaires offre-t-il aux utilisateurs et quelle est la réalité du risque ? Il faut tout faire pour garantir la sécurité des transactions (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à l'artisanat - Les risques de piratage ne sont pas les plus importants. Seulement 0,02 % des cartes à puce en sont victimes, soit une proportion très inférieure à celle de ces cartes à bande que voudraient nous imposer certains pays.

Nous disposons déjà d'éléments précis pour analyser les fraudes puisque nous avons ouvert à cet effet, l'année dernière, un site sur Internet. Mille plaintes ont été enregistrées. Dans la majorité des cas, elles ne sont pas motivées par un acte de piratage. Quand on donne son numéro de carte par téléphone ou sur Internet, il faut être sûr de la personne à qui on le donne. Or certains sites ont été ouverts, pour être aussitôt fermés, par des commerçants indélicats. Nous avons donc constitué quatorze « points de veille » chargés de surveiller le commerce électronique.

Il faut aussi faire en sorte que le numéro de la carte n'apparaisse plus intégralement sur les facturettes, puisqu'il est possible de reconnaître l'utilisateur avec une partie seulement du numéro. Je vais réunir le Groupement cartes bancaires dans ce but.

Le Premier ministre, par ailleurs, grâce au travail conjoint de Claude Allègre et de Christian Pierret, a pu réduire les risques de fraude en autorisant de manière plus large le cryptage.

Je suis persuadée que la carte à puce conservera la confiance des utilisateurs. Ce sont surtout les artisans et les commerçants qui n'ont pas confiance en ces instruments de paiement. Nous devons donc nous pencher non seulement sur les problèmes rencontrés par les clients, mais aussi sur ceux des petites entreprises. C'est là un chantier digne d'intérêt, qu'il faut ouvrir rapidement (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

La séance, suspendue à 16 heures 5, est reprise à 16 heures 20, sous la présidence de M. Ollier.

PRÉSIDENCE de M. Patrick OLLIER

vice-président

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SOLIDARITÉ ET RENOUVELLEMENT URBAINS (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains.

M. Gilles Carrez - Rappel au Règlement, sur la base de l'article 50, alinéa 4.

Je veux appeler l'attention du Gouvernement et de l'Assemblée sur les conditions de travail qui nous sont imposées sur ce texte. Nous avons appris que la Conférence des présidents avait décidé que nous siégerions cette nuit jusqu'à 4 heures du matin et les deux prochaines nuits sans limite.

M. Alain Cacheux - Ça dépend de vous !

M. Gilles Carrez - Nous allons donc travailler dans des conditions extrêmement difficiles pour nous-mêmes comme pour le personnel de l'Assemblée.

Déjà, ce texte nous a été transmis le jour même de son adoption en conseil des ministres, le 2 février, la commission de la production n'a eu qu'un mois pour l'examiner, ce qui l'a obligée à expédier les amendements, et vous avez de surcroît déclaré l'urgence. A l'évidence, vous faites tout pour qu'il soit examiné à la va-vite, adopté à la hussarde et pour que nous ne puissions approfondir les points essentiels.

Jeudi dernier, nous avons travaillé jusqu'à 2 heures et demi alors que nous devions arrêter à 1 heure, cela montre notre bonne volonté. Les quelques dizaines d'amendements que nous avons examinés aux articles premier et 2 étaient tous sérieux...

M. Alain Cacheux - Non, pas tous !

M. Gilles Carrez - ...Qu'ils émanent de la majorité ou de l'opposition, ils ne visaient en rien à faire de l'obstruction et justifiaient un débat au fond.

Nous jugeons regrettable que l'on nous impose d'examiner à des heures aussi tardives des dispositions aussi essentielles que celles qui remettent en cause la décentralisation.

M. Jacques Myard - Inadmissible !

M. Gilles Carrez - Nous ne pouvons accepter que l'on dévalorise ainsi notre travail (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. le Président - J'ai pris acte de votre rappel au Règlement.

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ART. 3

M. Aloyse Warhouver - L'expérience des POS nous montre qu'il sera indispensable de raccourcir les délais d'étude pour les nouveaux plans locaux d'urbanisme. Avec trois ou quatre fonctionnaires seulement par département, les services d'urbanisme ne pourront faire face à la demande des communes. Des bureaux privés pourront être sollicités, mais il faudra davantage aider financièrement les communes.

Enfin, pouvez-vous leur indiquer, Monsieur le ministre, si en attendant, ces communes doivent poursuivre la révision des POS déjà engagée et si des dispositions transitoires sont prévues entre les POS et les PLU, à moins que les deux puissent coexister ?

M. Jean-Claude Daniel - La loi Royer de 1973 a été souvent présentée comme une loi d'urbanisme commercial alors qu'elle n'était qu'une loi de contingentement qui a entraîné la création de véritables ZUP commerciales à la sortie des agglomérations. La loi Raffarin a durci certaines règles et prévu des schémas d'urbanisme commercial qui, peu nombreux, ne sont que des catalogues de bonnes intentions. Il faut donc redonner aujourd'hui un sens au développement commercial.

Ce projet vise à reconquérir la ville et à la confier à ceux qui l'habitent. Le commerce doit trouver pleinement sa place, au sein des agglomérations, dans un équilibre entre centres-villes, quartiers et périphéries, sans oublier les marchés. C'est un des facteurs de la mixité que l'on recherche.

Depuis cinquante ans, nos villes ont proliféré avec dynamisme mais sans ordre. Le commerce a participé à cette expansion territoriale. Dans la « nouvelle société », on cherchait des solutions plus à l'extérieur des villes qu'à l'intérieur. Le commerce a suivi la tendance et l'a même parfois anticipée. Mais aujourd'hui les nuisances ainsi provoquées montrent que le système atteint ses limites. Cette croissance urbaine rend difficile l'aménagement du territoire. Le maillage des transports en commun ne peut être installé partout et la pollution s'accroît. Les paysages sont mutilés et la vie sociale se dégrade en raison de l'organisation de ghettos qui séparent riches et pauvres, jeunes et vieux, quartiers dotés de commerce et quartiers qui en sont privés.

L'enjeu est donc de maintenir la ville dans ses limites actuelles, en organisant mieux son espace intérieur. Dans cet espace, il convient de donner au commerce la place que les consommateurs attendent. C'est une véritable ambition d'urbanisme et les plans locaux ne sauraient donc négliger le commerce.

Ce texte d'une manière générale recherche l'équilibre entre les zones urbaines. Concurrence, fiscalité, équipements, architecture : il faut en finir avec un système à deux vitesses. Ainsi en matière architecturale, les centres-villes font-ils l'objet d'une réglementation très contraignante, d'un coût parfois élevé, quand les périphéries se trouvent défigurées par des constructions agressives et de qualité médiocre. La rigueur exigée d'un côté, le laxisme toléré de l'autre nuisent à l'équilibre et à la loyauté de la concurrence commerciale entre les zones.

Equilibre ne signifie pas pour autant absence de concurrence. Toute tentative de fixer d'autorité la nature précise des commerces à installer dans une zone serait une aberration économique vouée à l'échec. Quelques outils simples de planification sont néanmoins nécessaires : le PLU en fait partie. Il est possible de maintenir des petits commerces en centre-ville : des locomotives sont pour cela nécessaires. Les différents types de commerce, loin de s'exclure, doivent se conforter. A cet égard, le commerce électronique devra être pris en compte dans l'organisation de l'urbanisme local.

M. Jean-Marie Bockel - Si un PLH ou un PDU est approuvé postérieurement à un PLU, celui-ci devra être mis en compatibilité dans les trois ans. C'est, me semble-t-il, inverser, la hiérarchie entre les documents. En effet, les PLH et les PDU, contrairement aux PLU, ne prennent pas en compte toutes les dimensions de l'aménagement de l'espace, sans compter qu'ils sont élaborés par des organismes n'ayant pas compétence en matière d'urbanisme. S'il importe d'assurer la cohérence entre PLH, PDU et PLU, comme y tend le texte, le mieux sera de veiller à la compatibilité des PLH et des PDU avec les PLU avant leur adoption.

Autre remarque : il peut arriver qu'une commune soit concernée par des PLU différents. La loi doit prévoir ce cas.

Enfin, les PLU doivent aussi tenir compte, le cas échéant, des espaces boisés et autres espaces classés au titre de l'article L.130-1 du code de l'urbanisme.

M. Jean-Michel Marchand - Si les PLU, appelés à supplanter les POS, comportent une souplesse intéressante qui faisait défaut à ces derniers, on risque de perdre en rigueur.

Si notre groupe apprécie dans ce texte la disparition des zonages monofonctionnels, il souhaite, à défaut de revenir à la définition initiale des POS, que certaines prescriptions, notamment en matière d'implantation des constructions et de COS, devenues facultatives, redeviennent obligatoires. Il souhaite de même que le texte indique expressément que les interprétations jurisprudentielles resteront acquises lorsque les POS seront remplacés par les PLU.

M. Alain Cacheux - L'article 3, qui substitue les PLU aux POS, vise à substituer un urbanisme de projet à un urbanisme de zonage et met l'accent sur le renouvellement urbain.

Il faut rechercher, c'est évident, un équilibre entre les prescriptions générales en matière d'urbanisme et l'initiative laissée aux élus locaux. En privilégiant par trop cette dernière, nous risquons de déséquilibrer l'ensemble de l'édifice. Il convenait sans doute d'assouplir la réglementation. Pas à ce point toutefois ! Les contentieux risquent de se multiplier, sans parler même du fait que la philosophie de cet article 3 paraît quelque peu contraire à celle de l'article 25. Nous y reviendrons. Ne nous en remettons pas aux décrets d'application.

De même, a-t-on eu raison de favoriser un urbanisme de projet, mais peut-être est-on là aussi allé trop loin. Il restera de toute façon toujours des zones spécifiques, qu'il s'agisse de périmètres prioritaires d'intervention dans le cas des grands projets urbains, des secteurs sauvegardés...

Nous sommes également inquiets pour ce qui est du renouvellement urbain. Cette notion figure, à juste titre, dans le titre de la loi. Nous nous étonnons toutefois que le texte en parle si peu.

Cela étant, je ne doute pas, Monsieur le secrétaire d'Etat, que vous saurez faire preuve de la même volonté d'ouverture que celle exprimée la semaine dernière par votre collègue Jean-Claude Gayssot et que vous vous attacherez vous aussi à prendre en compte les préoccupations des élus de terrain.

M. Germain Gengenwin - Si les volets transport et logement social de ce texte ne touchent pas toutes les communes, ses dispositions relatives aux POS, auxquels vont se substituer les PLU, les concernent toutes, y compris les petites communes rurales.

La gestion de l'urbanisme est un paquebot des plus lourds, très difficile à man_uvrer pour les maires, nul ne l'ignore. Alors que le POS était un outil désormais connu de tous, voilà qu'au motif de simplifier la réglementation, vous allez le supprimer. Or rien n'assure que les nouvelles procédures seront moins contraignantes et la révision des documents d'urbanisme plus facile.

Je fus l'un des premiers maires d'Alsace à élaborer un POS dans ma commune. Aujourd'hui, nous voulons le réviser : depuis quatre ans nous sommes en procédure. Et depuis deux ans nous attendons qu'un organisme situé à Grenoble nous dise quels sont les terrains inondables dans ma commune -comme si nous ne le savions pas ! Comment ne pas être gagné par la lassitude ? Comment l'enthousiasme des élus ne faiblirait-il pas ? La lourdeur des procédures, la complexité des services de l'Etat les découragent. Pourquoi faire simple, direz-vous, quand on peut faire compliqué ? Oui à une réforme, mais pourquoi changer l'ensemble du système ? Le PLU ressemble surtout à un affichage politicien.

Les élus sont confrontés à toutes les nouvelles structures créées au fil des mois par les membres du Gouvernement : en un an et demi ils ont vu arriver la loi Voynet, la loi Chevènement, la loi Gayssot-Besson... Est-ce une manière de justifier le centralisme, le grand retour des services de l'Etat ? Les élus de terrain nous font part de leur découragement, non face à leurs responsabilités, mais face au chevauchement des dispositifs, à l'empilement des textes, à la complexité croissante. Tout cela -même si ce n'est pas votre souhait, Monsieur le ministre- ne peut que renforcer la technocratie, qui est la négation même de la démocratie locale.

Enfin, le projet libère les coefficients d'occupation des sols. Qui en seront les bénéficiaires ? Sans doute pas ceux que vous croyez, car quelle qualité de vie leur préparez-vous ? On peut craindre l'extension de constructions encore plus hautes et plus rapprochées. Des enfants grandiront dans des logements où le soleil n'aura plus accès ! Légiférons sur l'urbanisme, soit ; mais n'oubliez pas que chacun a droit à une qualité de vie.

M. Gilles Carrez - Cet article prévoit la suppression des POS, remplacés par des PLU. Mais j'appelle votre attention sur le point suivant. Nous avons mis plusieurs décennies pour commencer à maîtriser les POS. Et qui n'a pas eu de déboires lors de leur élaboration ou de leur révision ? Qui n'a pas vu son POS annulé, ou les difficultés de procédure s'éterniser ? C'est dire que les POS, qui existent depuis 1967, sont aujourd'hui à peine stabilisés. J'en veux pour preuve un excellent document qu'a publié votre administration, Monsieur le ministre, et que les élus attendaient depuis des années. Publié en janvier 1999, c'est un guide pratique des POS, destiné à informer les élus sur cette procédure. Un autre document de même nature est paru en juillet 1999. Cela signifie que votre administration est bien consciente de la nécessité de stabiliser les POS. Et, quelques mois plus tard, tout cela est jeté par-dessus bord !

En remplaçant le POS par le PLU, il est clair que vous allez déstabiliser les élus locaux. Je suis frappé par un propos de M. Bockel. J'ai l'impression, a-t-il dit, qu'on est en train d'inverser la hiérarchie des normes : si un PLH ou un PDU est incompatible avec un PLU ou un schéma de cohérence territoriale, que va-t-on réviser ? Les derniers. C'est comme si, dès qu'une loi était contraire à la Constitution, on révisait celle-ci. Cela nous arrive, mais reste exceptionnel, et surtout n'est pas posé en principe, alors que l'inversion de la hiérarchie des normes est écrite noir sur blanc à l'article 3.

M. Marchand se méfie de l'excès de liberté que permettra le PLU. Permettez-moi de réfléchir un instant en tant que maire. Comment vais-je pouvoir justifier le fait d'accorder, et surtout de refuser un permis de construire, sur la base d'un document d'urbanisme dans lequel deviennent facultatifs et le choix de la destination des sols, et les règles de construction, et dans lequel il n'y a plus de coefficient d'occupation des sols ? Comme maire, je ne sais pas faire ; je ne sais pas refuser un permis de construire sans COS. Je croyais qu'un document d'urbanisme devait servir à protéger, à définir des règles minimales. Apparemment, pour les auteurs du projet, il n'est même pas nécessaire d'encadrer le choix de la destination des sols : équipements, logements, bureaux... Et comment imaginer un document d'urbanisme muet sur les règles de construction ?

Je suis donc très inquiet. D'autant que, comme l'a noté M. Warhouver, nous aurons durant une longue période une juxtaposition entre les POS et les futurs PLU, avec l'obligation de réviser ces documents en fonction des PLH, des PDU, voire des PPR, des plans de protection contre les risques d'inondation. Cet article va nous jeter dans un maelström où nous serons totalement déstabilisés. Je nous souhaite bien du plaisir pour justifier clairement la réglementation en matière d'autorisation de construire dans nos communes !

M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement - Le nombre et la densité des interventions soulignent le caractère central de cet article, et je souhaite faire échos à certains de vos propos. Un mot, Monsieur Carrez, sur votre intervention liminaire relative à l'ordre du jour et aux conditions d'examen de ce texte. Pour celles de ses dispositions qui tendent à réformer la LOV, le débat est ouvert depuis le début de la décennie quatre-vingt-dix, et nos propositions ne font que tirer les leçons de l'insuffisance de dispositions passées. Sur l'habitat et les questions de salubrité, vous le savez, un gros travail technique a été réalisé dans les services de mon ministère : il a été mis à la disposition de tous, et sera le fondement de nos propositions. Sur les transports, M. Gayssot a eu tous les contacts nécessaires. Reste la refondation de notre législation sur l'urbanisme. Certes, là encore, une réflexion a été conduite sur le terrain, mais seulement dans certaines villes, et peut-être pas dans des villes de toutes les tailles. Ce travail a néanmoins permis d'entendre les élus, les associations, les habitants, et nous ne sommes pas pris de court pour travailler sur ces questions.

Mais l'une des manières d'escamoter un débat est de prévoir des délais trop courts pour l'examen d'un projet. J'ai cru comprendre que la Conférence des présidents souhaitait, en nous permettant de travailler un peu tardivement ce soir, permettre un examen sérieux, article par article, amendement par amendement, de toutes les propositions, afin que nulle difficulté ne soit esquivée. La nuit de la semaine dernière où nous avons débattu jusqu'à deux heures et demie, c'est la méthode qui a été suivie ; et nous montrerons aujourd'hui la même disponibilité pour approfondir ce qui sera proposé.

Mais avant d'engager le débat sur l'article, je souhaite répondre à certaines des interrogations que suscite cette réforme. Certains craignent que les PLU ne définissent pas aussi précisément que les POS les droits à construire attachés à chaque terrain.

Je veux les rassurer : ce n'est pas l'objet du projet. Comme le POS, le PLU définira exactement ce que chaque propriétaire peut ou ne peut pas construire. Mais il est apparu dans le débat que la suppression du caractère obligatoire de certaines règles inquiétait plusieurs d'entre vous. Le Gouvernement en a tenu compte, et a proposé un projet fondé sur le principe de décentralisation.

J'entends M. Gengenwin nous mettre en garde contre des logements où le soleil ne pénétrerait plus. Il fait là le procès d'une forme d'urbanisation que nous avons condamnée dans nos débats de la semaine dernière : on peut a priori faire confiance aux élus locaux pour ne pas renouveler ces erreurs. Le Gouvernement entend faire confiance aux élus locaux. Mais il ne néglige pas, je le dis à M. Marchand, de renforcer le contrôle des citoyens et des associations : ils pourront désormais s'exprimer systématiquement dans le cadre d'une concertation étendue à toute la durée de l'élaboration des PLU et des schémas de cohérence territoriale, ainsi qu'à l'occasion de l'enquête publique. Le projet laissait donc aux élus locaux la liberté de choix, entre tous les outils juridiques qu'offre le code de l'urbanisme, ceux qu'ils jugeraient les plus appropriés. Mais, je l'indique dès maintenant, le Gouvernement ne s'opposera pas, dans la discussion à plusieurs amendements qui ont été déposés pour que cette liberté soit un peu plus « encadrée » et que les règles relatives à l'implantation des constructions ou les COS soient intégralement rétablis. D'aucuns se sentiront ainsi moins dépaysés !

Monsieur Marchand, il va de soi que ce simple changement de dénomination n'aura pas pour effet d'anéantir la jurisprudence constituée à propos d'un droit positif, dès lors que les règles posées par le PLU n'innoveront pas. Pour les règles modifiées ou les règles nouvelles, il faudra bien sûr attendre que cette jurisprudence se forme mais c'est le cas chaque fois que la loi change. Cela étant, notre ambition est ici d'aller plus loin qu'avec le POS : le PLU ne se limitera pas à définir la répartition des terrains constructibles. La définition et la mise en _uvre d'un projet urbain implique d'abord d'élaborer, à partir d'un diagnostic d'ensemble, une politique globale d'aménagement et de renouvellement de la ville. Le POS ne remplissait qu'imparfaitement cette fonction, ce qui obligeait les élus à rédiger des « schémas » ou des « programmes de référence » par ailleurs dépourvus de valeur juridique. Le présent texte confortera cette démarche en intégrant l'essentiel des « programmes de référence » dans le PLU -le décret d'application redéfinira le rapport de présentation en ce sens- et ce document pourra ainsi servir de support à tous les projets d'aménagement intéressant une commune.

Les POS ont un caractère essentiellement statique : ils définissent assez précisément le droit applicable dans les quartiers qui évoluent peu mais c'est seulement dans le cadre des ZAC ou de ce qu'il est convenu d'appeler, par opposition à l'urbanisme réglementaire, l'urbanisme « opérationnel » que les aménageurs peuvent faire bouger la ville et, par exemple, créer un quartier ou engager une rénovation lourde. Ce type de procédure, qui supposait souvent la disparition de tout un quartier, n'est plus adapté à la politique actuelle, qui vise au contraire à faire évoluer progressivement les quartiers. Au surplus, il ne favorise pas un aménagement cohérent. Qui n'a constaté d'ailleurs les inconvénients de cette séparation, qui aboutissait à faire des POS, ou des ZAC, n'apparaissaient qu'en blanc, une sorte de négatif de l'urbanisme opérationnel ? Les quartiers nouveaux étaient alors malaisément intégrables au tissu urbain ancien, le document ayant perdu presque son caractère prospectif... Au contraire, le PLU donnera un contenu plus concret aux projets communaux : ainsi, pour les espaces publiques, on ne se contentera plus d'indiquer un emplacement réservé, mais on pourra définir un parti d'urbanisme. Sur ce point, l'amendement de M. Vaxès a retenu toute l'attention du Gouvernement, qui est également ouvert à d'autres améliorations.

Le PLU pourra également, à la différence du POS, identifier les îlots pouvant faire l'objet d'une opération de requalification ou de restructuration, comme le souhaitait M. Cacheux ; il pourra mentionner les quartiers ayant une fonction de centralité, et préciser les actions envisagées pour renforcer ou préserver cette vocation. Il sera ainsi pour la commune un des principaux instruments en vue de mener la politique définie dans le schéma de cohérence territoriale.

M. Alain Cacheux - Très bien !

M. le Secrétaire d'Etat - M. Carrez regrettait tout à l'heure qu'un document réédité perde de son utilité en raison d'un changement des règles du jeu. Je le rassure : sur bien des points, ce document restera utile -sous réserve des adaptations nécessaires.

Monsieur Bockel, il n'y aura pas à rendre le PLU compatible avec l'ensemble des PDU et des PLH mais seulement avec les éléments de ceux-ci qui ont à voir avec le droit de l'urbanisme. Ainsi, il serait étrange que le PDU prévoie la création d'une ligne de transport ou la création d'une gare et que le PLU ignore ce projet. Le droit actuel exige la mise en compatibilité sans délai du POS avec les « normes supérieures » : le projet laisse trois années pour faire de même du PLU. Pour autant, il n'y a pas inversion de la hiérarchie des normes.

Au total, le PLU sera pour les élus plus exigeant que le POS. Pour les citoyens, ce sera un document plus lisible, qui facilitera donc la concertation. Et pour les territoires concernés, ce sera un document plus riche, parce que plus global et davantage prospectif. Le changement de dénomination recouvre donc des changements de fond ! (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste)

M. Jean Proriol - Cet article vise à remplacer la dénomination « POS » par celle de « PLU » -plan local d'urbanisme. Or des générations d'élus, de techniciens, de juristes se sont progressivement accoutumés à l'appellation actuelle, apprenant à mettre une réalité derrière les expressions « zones U », « zones nC », « zones nA ».Cela a pris beaucoup de temps...

Pour renvoyer les POS aux archives, nous invoquez l'intercommunalité. Mais ne pratiquait-on pas celle-ci chaque fois qu'il fallait réviser un POS ? Les communes et mêmes les départements et régions limitrophes étaient saisis, dès lors qu'ils étaient concernés !

Il a fallu plus de trente ans pour que ces documents soient parfaitement intégrés à notre pratique : les rebaptiser ne fera que semer la confusion et susciter des contentieux. D'autre part, vos services ont-ils bien les moyens d'aider les communes à tirer les conséquences de ce changement de législation ? Vous ne nous avez pas rassuré sur ce point non plus et notre amendement 556 vise donc à supprimer cet article.

M. Jean-Michel Marchand - J'ai déjà suffisamment défendu mon amendement 1436 pour ne pas y revenir.

M. Patrick Rimbert, rapporteur de la commission de la production - Notre débat sur cet article comme l'intervention du secrétaire d'Etat ont montré l'intérêt du travail que nous avons effectué en commission. Le dialogue que nous aurons ainsi noué se révèle fructueux et il serait dès lors dommage de supprimer cet article : cela nous priverait de ces fruits.

Monsieur Proriol, si nombre d'élus, de techniciens et de juristes ont acquis la maîtrise des plans d'occupation des sols, il n'en est pas de même d'une grande part de la population. Ces documents, d'ailleurs, ne définissent pas des projets de ville : ils se bornent à répartir des droits à construire et, à ce titre, ils n'intéressent presque que les propriétaires. Le PLU, au contraire, permettra de traiter des espaces publics, de l'évolution de l'habitat, de la mixité sociale ou de la sécurité, tous éléments constitutifs de véritables projets de quartier ou de ville. L'urbanisme cessera ainsi d'être l'affaire de spécialistes, la population pourra enfin dire ce qu'elle veut !

M. Jacques Myard - Avec ça, la cohérence est garantie !

M. le Rapporteur - Si vous ne voulez pas débattre avec la population, c'est votre problème !

Cela dit, mon intervention vaudra pour tous les amendements de suppression.

M. le Secrétaire d'Etat - Mon plaidoyer en faveur du PLU vaut rejet des amendements de suppression de l'article.

M. Eric Doligé - Selon vous, Monsieur le ministre, le PLU aura le mérite d'être plus exigeant pour les élus. Mais le POS est déjà extrêmement exigeant pour les élus et pour la population qui est en outre longuement consultée sur son élaboration. Dès lors, pourquoi supprimer le POS ?

Ensuite, selon vous, le PLU permettra de reconquérir la ville. Venez donc chez moi : il n'y a rien à reconquérir et tout fonctionne bien.

En réalité, vous voulez recentraliser et reconcentrer. Pour cela, vous avez besoin du PLU. Alors dites-le ! Pour notre part, nous refusons cette politique. C'est pourquoi nous voulons supprimer cet article 3 très dangereux.

M. Gilles Carrez - Certains éléments de votre réponse, Monsieur le ministre, sont de nature à nous rassurer. Ainsi avez-vous dit que vous seriez ouvert aux amendements destinés à réintroduire dans les PLU certaines obligations relatives à des points aussi fondamentaux que l'utilisation des sols. D'autre part, votre projet exclut le COS dans les zones urbaines à destination unique mais vous semblez être prêt à revenir sur ce point, vous rapprochant ainsi du POS.

Dans ces conditions, pourquoi vouloir absolument remplacer le POS par le PLU ? Mieux vaudrait intégrer la notion de projet dans les POS sans en changer la dénomination.

Enfin, compte tenu des difficultés des DDE, nous craignons de ne pouvoir guère compter sur les services de l'Etat pour nous aider à transformer les POS en PLU.

M. Alain Cacheux - La communauté de l'eau vous y aidera !

M. Gilles Carrez - Actuellement, pour réviser ou pour élaborer son POS, une commune bénéficie de la dotation globale de décentralisation. Autrement dit, ses dépenses sont compensées par une aide de l'Etat. Or les crédits de cette dotation globale n'ont pas été augmentés dans le budget 2000 . Sans moyens humains ni financiers supplémentaires, il sera très difficile de réviser tous ces documents d'urbanisme.

Vous avez parlé de la loi Besson de 1990, Monsieur le ministre, et de la loi d'orientation sur la ville de 1991. Cette législation nous satisfait et nous voulons qu'elle soit appliquée.

M. Alain Cacheux - Mais vous l'avez vidée de son contenu !

M. Gilles Carrez - Pourquoi critiquez-vous ainsi systématiquement ce que vous avez fait il y a quelques années ?

Les amendements 556 et 1436 identiques, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jean-Michel Marchand - Notre amendement 1437 tend à réintroduire dans le projet les dispositions relatives aux POS.

Cela dit, les propos du ministre sur l'application de la jurisprudence lorsque les normes resteront inchangées ne m'ont pas entièrement rassuré.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé cet amendement.

M. le Secrétaire d'Etat - Reprendre les textes régissant le POS mais en le baptisant PLU aboutit à un système un peu incohérent. En fait, le PLU permettra d'enrichir les documents d'urbanisme et vos craintes ne sont pas fondées. Si une nouvelle jurisprudence doit être établie, elle le sera notamment sur la base des prescriptions relatives à l'environnement. Votre démarche converge donc avec celle du Gouvernement.

Quant à M. Carrez, il ne peut pas prétendre que le texte impose des changements inutiles alors qu'il n'oblige nullement à transformer en PLU un POS qui fonctionne bien. Vous n'avez donc aucune avalanche de transformations à redouter.

Enfin, les services du ministère de l'équipement seront sensibles à l'attention que vous portez au maintien de leurs effectifs. Tels ne fut pas toujours le cas ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

L'amendement 1437, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Michel Marchand - Notre amendement 1167 est défendu. Il tend à mentionner l'utilisation des sols dans la nouvelle dénomination des plans.

L'amendement 1167, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Article L. 123-1 du code de l'urbanisme

M. Alain Cacheux - Compte tenu des progrès de la coopération intercommunale et du succès de la loi Chevènement, il importe de préciser qu'un établissement public de coopération intercommunale peut être partie prenante au projet de développement. Tel est l'objet de mon amendement 746.

M. le Secrétaire d'Etat - L'amendement 1426 rectifié du Gouvernement fait la synthèse des préoccupations qui se sont exprimées sur ce point. Je n'y reviens pas, l'ayant déjà longuement exposé.

M. le Rapporteur - L'amendement 104 précise que les PLU prennent en compte les prévisions d'équipement commercial et présentent le projet de développement et d'aménagement de la commune.

Cela dit, l'amendement du Gouvernement satisfait ces préoccupations et va même au-delà en précisant que les îlots, quartiers ou secteurs à restructurer ou à réhabiliter, figureront dans les PLU, tout comme les espaces naturels et les règles applicables à l'implantation des constructions nouvelles.

Je retire donc l'amendement de la commission au profit de l'amendement 1426 rectifié que je souhaite cependant sous-amender. En effet, après les mots « en prenant en compte les prévisions en matière d'habitat, d'emploi et d'équipements », il serait bon de préciser : « notamment industriels, commerciaux ou de loisirs ».

M. Alain Cacheux - Très bien !

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement est favorable à ce sous-amendement. Je voudrais par ailleurs apporter une deuxième rectification à l'amendement 1426 en remplaçant dans la deuxième phrase, « ils peuvent » par « et peuvent ». Il est inutile en effet de répéter le sujet.

M. Michel Vaxès - Mes sous-amendements 1089 et 1090 pourraient être examinés avec l'amendement du Gouvernement.

M. le Président - Ils tombent, car ils portaient sur l'amendement de la commission, qui vient d'être retiré.

M. Alain Cacheux - L'amendement du Gouvernement, qui prend en compte nos préoccupations, constitue une avancée. Il devrait aussi rassurer M. Marchand, puisque les règles applicables aux constructions nouvelles figureront dans le PLU.

J'accepte de retirer mon amendement 746, tout en souhaitant que le Gouvernement précise si les établissements publics de coopération intercommunale sont bien considérés comme compétents en matière d'urbanisme.

Je retirerai aussi, dans ce cas, mon amendement 1195.

M. le Secrétaire d'Etat - M. Cacheux a satisfaction à l'article L. 123-16.

M. Jacques Myard - A lire l'amendement 1426 deuxième rectification, je me rends compte que le Gouvernement demande aux communes un travail herculéen.

Pour penser la cité idéale, comme vous nous le demandez, il va falloir des mois, voire des années. En outre, comme il manquera toujours quelque chose aux PLU, il y aura des annulations en cascade. Sur la base des POS, les tribunaux administratifs et le Conseil d'Etat ont déjà annulé un grand nombre de décisions d'urbanisme. Il faudra maintenant que les élus intègrent toutes sortes d'informations prospectives aux PLU. Vous allez faire la fortune des bureaux d'études.

En voulant trop bien faire, vous risquez de paralyser le système.

M. Jean-Michel Marchand - L'amendement du Gouvernement nous donne satisfaction, même si j'aurais souhaité qu'on distingue les réhabilitations des rénovations. Je regrette en outre que le retrait de l'amendement 104 fasse tomber mon sous-amendement 1171, qui prévoyait « une évaluation des incidences du projet sur l'environnement ».

Enfin, Monsieur le secrétaire d'Etat, j'aimerais que les engagements pris par vous dans vos réponses figurent dans le texte de loi.

M. le Président - Si le sous-amendement de la commission est adopté, Monsieur le secrétaire d'Etat, il y aura deux fois le mot « notamment » dans la même phrase. Je vous le signale afin que vous profitiez de la navette pour trouver une meilleure rédaction.

Le sous-amendement de la commission, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 1426 2ème rectification, ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

M. Gilles Carrez - Mon amendement 849 porte sur un problème qui préoccupe aussi notre collègue Jean-Marie Bockel, à qui le Gouvernement n'a répondu qu'en partie : la hiérarchie des documents d'urbanisme. Mon amendement vise en effet à n'exiger de compatibilité qu'entre ces documents de même nature que sont le SCT et le PLU. On ne peut avoir la même exigence s'agissant de documents de programmation, qu'il s'agisse des plans de déplacements urbains ou des programmes locaux de l'habitat.

D'ailleurs, comme l'a dit Jean-Marie Bockel, nous allons entrer dans une spirale de révision permanente des documents. Dès qu'on modifiera un PLH, il faudra revoir le PLU pour que les deux documents restent compatibles.

Pour vous, il faut déterminer en haut ce qui doit se faire en bas. J'ai peut-être exagéré en parlant du Gosplan, mais je voulais imager mon propos (Sourires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

Le rédacteur du projet s'est bien rendu compte qu'un système aussi centralisé ne pouvait fonctionner. Il faut donc réintroduire une liberté pour que la modification puisse venir du terrain.

Je ne comprends vraiment pas pourquoi, en cas d'incompatibilité, le texte prévoit la modification des documents hiérarchiquement les plus élevés, le PLU et le schéma de cohérence territorial.

L'amendement dit donc clairement les choses et introduit ici une notion déjà présente dans le code de l'urbanisme, celle de la « prise en considération » des documents antérieurs.

Il y avait une autre solution, peut-être préférable mais l'amendement de M. Chabert est tombé : prévoir que dès l'origine le PLU prend en compte les éléments du PLH et du PDU, ce qui éviterait bien des contentieux sur la notion de compatibilité.

M. le Rapporteur - Soit le périmètre du PLU est le même que celui du PDH et du PDU, et la cohérence est absolument nécessaire, soit, dans le cadre de l'intercommunalité, le périmètre des seconds dépasse celui du premier, et nous devons assurer la cohérence, sauf à permettre à une seule commune de remettre en cause des documents intercommunaux. C'est pour cela que la commission a repoussé cet amendement.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement partage l'analyse du rapporteur.

Le PLU n'a pas à être rendu compatible avec tous les éléments du PDU et du PLH ; il ne reprend que ceux qui ont un rapport au droit de l'urbanisme.

Un PLU n'est pas seulement un document de programmation puisqu'il quantifie précisément par type de logement et peut même comporter un échéancier du financement. Le PLH n'a pas cette dimension, il est surtout une analyse des besoins.

Il pourra bien sûr arriver, comme par le passé, qu'un événement nouveau comme l'implantation d'une très grande entreprise ou la réalisation d'une très grande infrastructure, oblige à reconsidérer les documents de planification, qui seront alors révisés simultanément, donc en cohérence.

Enfin, je ne crois pas que la notion de « prise en considération » nous mette à l'abri des contentieux juridiques.

M. Yves Dauge - Lorqu'un PLH ou un PDU ne seront pas compatibles avec un schéma de cohérence, le texte ne prévoit pas la révision automatique de ce dernier, mais empêche l'approbation des deux premiers, sauf à réviser le schéma. Je ne vois donc pas où est le problème.

M. Eric Doligé - Comment ne pas s'inquiéter qu'un même texte puisse susciter des interprétations différentes ?

M. Michel Bouvard - Cela fera le bonheur des avocats...

M. Eric Doligé - Puisque différents cas sont prévus selon la date du POS, les communes ne vont-elles pas hésiter à se lancer dans l'opération complexe, longue, de transformation en PLU ? Vraiment, vous organisez l'incohérence !

M. Gilles Carrez - Si l'on s'en tient à l'analyse de M. Dauge, je crains que l'on soit amené à multiplier les révisions des PLU et des schémas de cohérence.

Prenons l'exemple du plan de déplacement urbain actuellement soumis à enquête publique en Ile-de-France : après son approbation, il faudra réviser tous les POS des centaines de communes concernées.

M. le Rapporteur - Pourquoi ?

M. Gilles Carrez - Pour intégrer les éléments du PDU.

M. le Rapporteur - Pourquoi, si cela ne change rien pour certaines communes ?

M. Gilles Carrez - Je me demande d'ailleurs si une telle révision transformerait de fait les POS en PLU.

L'amendement 849, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Michel Vaxès - Notre amendement 105, que la commission a adopté, prévoit que les PLU devront être compatibles uniquement avec les PDU et les PLH établis dans un cadre intercommunal. En revanche, il convient de faire primer le PLU sur les PDU et PLH communaux.

M. le Secrétaire d'Etat - Sagesse.

L'amendement 105, mis aux voix, est adopté.

M. François Vannson - L'amendement 8 est défendu.

L'amendement 8, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Marie Bockel - Dans certains cas, une commune pourra être concernée par des PLU différents. Cela vaut en particulier pour les forêts. Je propose donc, par l'amendement 1309, que cette possibilité soit ici mentionnée, à condition que l'ensemble du territoire communal soit couvert.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé cet amendement qui remettrait en question notre cohérence. Un PLU doit couvrir l'ensemble du territoire d'une commune.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis défavorable. Dans le cas invoqué, le Gouvernement souhaiterait plutôt que l'on élabore un PLU intercommunal.

L'amendement 1309, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 1446 est retiré.

M. le Rapporteur - L'amendement 106 tend à inscrire la lutte contre l'insalubrité parmi les objectifs des PLU.

L'amendement 106, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Daniel Marcovitch - Le commerce de proximité concourt à la mixité urbaine. La sauvegarde de la diversité commerciale des quartiers doit donc elle aussi figurer parmi les objectifs des PLU. Tel est l'objet de l'amendement 571.

M. Gilles Carrez - L'amendement 953 de M. Estrosi est identique. Les PLU, documents d'urbanisme local, doivent impérativement prendre en compte la dimension commerciale. Les commerces de proximité sont indispensables à l'équilibre et à la cohésion sociale d'un quartier. Les personnes âgées et les personnes les plus modestes sont les premières à pâtir de leur disparition.

M. le Rapporteur - La commission a accepté ces amendements.

Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à l'artisanat - Tout en comprenant bien le problème posé, le Gouvernement ne pense pas que l'on puisse le régler dans le cadre d'une loi ayant trait à l'urbanisme. C'est la liberté du commerce qui est en jeu.

M. Jacques Myard - Chacun sait qu'au travers de l'occupation des sols, on peut encourager ou dissuader l'activité commerciale. Le texte dispose que les PLU « peuvent » exposer les actions envisagées dans un certain nombre de domaines : pourquoi exclure le commerce ?

M. Christophe Caresche - Le Gouvernement nous oppose la liberté du commerce. Pourquoi celle-ci serait-elle menacée par les simples mesures de régulation que nous proposons et non par exemple par l'autorisation préalable d'implantation exigée pour les commerces d'une surface supérieure à 300 m2 ?

M. Gilles Carrez - La diversité économique et sociale concourt à la mixité sociale, objectif assigné à ce projet de loi. Pourquoi dès lors la passer sous silence ? Selon le Gouvernement, nos propositions seraient contraires à la liberté du commerce. Mais d'ores et déjà aujourd'hui, les POS peuvent comporter des dispositions particulières, notamment un COS majoré, pour favoriser l'implantation de commerces au pied de certains immeubles. Et nous ne nous privons pas d'utiliser cette possibilité.

Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat - Encore une fois, je comprends les motivations des auteurs, mais je doute que leur proposition puisse être réellement appliquée.

S'il est interdit de modifier la nature des commerces dans une rue, un commerçant qui souhaite vendre un commerce de bouche mais n'a qu'une proposition d'achat, de la part d'une personne souhaitant par exemple ouvrir un magasin d'habillement, se trouvera de fait empêché de vendre. La collectivité pourra se substituer à l'acquéreur, m'objecterez-vous. A quel prix ?

Nous réfléchissons depuis plusieurs mois avec Georges Sarre aux solutions envisageables pour éviter que dans son arrondissement parisien par exemple, des rues aux commerces auparavant équilibrés ne se trouvent plus occupés que par des commerces d'un même type, sans plus un seul commerce alimentaire. Nous avons bon espoir qu'un groupe de travail puisse trouver une solution.

M. le Président - Voilà du travail pour la navette !

Les amendements 571 et 953, mis aux voix, sont adoptés.

M. Gilles Carrez - L'amendement 853 tend à substituer à la fin de la première phrase du quatrième alinéa aux mots « le renouvellement urbain » les mots « l'urbanisation future ». En effet, ce texte ne se donne absolument pas les moyens du renouvellement urbain qu'il appelle de ses v_ux. On y cherche en vain comment le Gouvernement compte s'y prendre pour mener à bien les démolitions-reconstructions envisagées. Comment fera-t-on sans réserver d'espaces nouveaux à l'urbanisation, comme le préconisait d'ailleurs la charte de Vaulx-en-Velin ? La construction des villes nouvelles sur des sites nouveaux répondait, déjà à la fin des années 60, au souhait d'en finir avec les grands ensembles.

En s'interdisant d'urbaniser de nouveaux espaces, on contraint les villes à se renouveler sur elles-mêmes et à se densifier.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé cet amendement, estimant que la notion de renouvellement urbain était assez explicite. Ce texte suffit pour renouveler certains quartiers et restructurer les espaces périurbains aujourd'hui défigurés par une urbanisation mal maîtrisée et de mauvaise qualité. Qualité des espaces, renouvellement urbain et urbanisation future : tout cela est possible en même temps dans le cadre de cette loi.

M. le Secrétaire d'Etat - Vous pouvez être rassuré, Monsieur Carrez, en relisant le premier alinéa de l'article 3 : vous y trouverez la notion d'urbanisation future. Quant au renouvellement urbain, c'est une tâche dont chacun reconnaît qu'elle est celle de la décennie, voire des deux décennies à venir. Vous dites que nous ne nous en donnons pas les moyens. C'est oublier que, depuis le 1er janvier 1998, le PLA construction-démolition nous a permis de doubler le rythme -pour cet aspect du renouvellement urbain- et nous nous efforçons de le doubler encore. S'il s'agit de reconstruire, cela peut se faire soit dans le cadre de « l'urbanisation future », ce que prévoit le premier alinéa, soit par l'utilisation des disponibilités existant dans les quartiers d'habitat ancien. Beaucoup d'exemples montrent que les deux solutions sont possibles. Quand on pense aux moyens donnés à la politique de la ville, on peut être sûr que le renouvellement urbain connaîtra un élan nouveau.

M. Alain Cacheux - Je ne comprends pas bien votre argumentation, Monsieur Carrez. D'un côté vous jugez qu'on ne définit pas assez le renouvellement urbain, et sur ce point je n'étais pas loin d'être d'accord, même si je pense que nous avançons. De l'autre vous voulez qu'on en parle moins encore, et qu'on remplace sa mention par celle de l'urbanisation future. En réalité, des zones à urbaniser, il y en aura ; le premier alinéa le mentionne, et l'amendement fondamental qu'a déposé le Gouvernement, pour tenir compte de certaines remarques, le précise à nouveau : votre préoccupation est donc largement prise en compte. S'il faut préciser le contenu du renouvellement urbain, ce n'est pas en en supprimant la mention, c'est en définissant les dispositions qui le concernent. Or l'esprit du projet est de substituer, à des règles d'urbanisme bien adaptées aux extensions périphériques, des règles mieux adaptées au renouvellement et à la restructuration de la ville -ce qui n'exclut pas qu'il y ait des extensions : mais la priorité est le travail sur le tissu existant.

M. Eric Doligé - Puisque M. le ministre réunit dans son premier alinéa renouvellement urbain et urbanisation future -en parlant de « zones urbaines ou à urbaniser »- le mieux serait, au quatrième alinéa, de ne pas non plus choisir entre ces deux aspects, et d'ajouter, au lieu de substituer, l'urbanisation future au renouvellement urbain. On serait ainsi en cohérence avec le premier alinéa et avec la démonstration de M. le ministre.

L'amendement 853, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Pierre Cohen - Mon amendement 904 demande à être corrigé, en mentionnant, au lieu du « plan local d'habitation », le « programme local de l'habitat ». Ces programmes comportent un engagement de réaliser les logements sociaux nécessaires. Dès lors il faut inscrire dans le PLU les moyens de concrétiser cet engagement, en réservant des emplacement au logement social : c'est le meilleur moyen de garantir la complémentarité entre PLH et PLU.

M. le Rapporteur - La commission l'a repoussé, car la mesure est déjà prévue à l'article L. 123-2 concernant le PLH.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement apprécie la motivation de M. Cohen, mais note qu'il est en effet satisfait par le b) de l'article L. 123-2.

M. Jacques Myard - Procéder par emplacements réservés est un dispositif très lourd. La réalité évolue, d'autres possibilités peuvent apparaître, et il ne faut pas fossiliser prématurément certains sols : une telle contrainte risque d'être contre-productive.

L'amendement 904 est retiré.

M. Gilles Carrez - Mon amendement 850 touche à un problème sur lequel le Ministre a paru disposé à nous entendre : il s'agit de ce qui doit figurer dans le PLU. L'amendement tend à y faire figurer obligatoirement les deux aspects fondamentaux du POS : l'affectation des sols selon les usages principaux qu'on peut en faire et la nature des activités qui peuvent y être exercées, d'une part ; d'autre part, les règles de constructibilité. Le PLU doit conserver un minimum d'encadrement normatif. On ne peut laisser un libre choix, et M. Marchand a soulevé ce problème, sur des points aussi essentiels que la destination des sols et les règles de construction.

M. le Rapporteur - Je suis soucieux d'éviter qu'il y ait des PLU vides, ce que pourrait permettre le caractère facultatif de leur contenu. L'amendement du Gouvernement a déjà apporté des précisions sur certaines choses, et rendu obligatoires des règles jusque-là facultatives. Mais la commission a jugé important de préciser -c'est l'objet de l'amendement 107- que le PLU doit fixer les règles permettant d'atteindre les objectifs fixés à l'article L. 121-1.

Tout PLU qui ne remplirait pas cette condition serait considéré comme illégal : le PLU ne pourrait donc être une coquille vide. Cet amendement assure une protection minimale tout en préservant la souplesse.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement est favorable à l'amendement 107. Il ne peut en revanche approuver le 850. Celui-ci tend à rendre obligatoire non seulement les dispositions que le Gouvernement, pour faire un pas vers l'Assemblée, a reprises dans son amendement 1426, mais aussi des dispositions qui ont toujours été facultatives. Si nous suivions M. Carrez, c'est à bon droit qu'on nous reprocherait de faire un Gosplan !

M. Jacques Myard - Toutefois la jurisprudence a évolué.

M. Jean-Michel Marchand - Je ne partage pas le sentiment du Ministre. Le PLU devrait être une boîte à outils : inscrivons-y l'ensemble des prescriptions. Les unes serviront ici, les autres là, mais toutes seront à disposition. C'est l'objet d'un amendement que j'ai déposé un peu plus loin, et dont je crains la chute, tendant à supprimer les mots « tout ou partie ».

M. Serge Poignant - L'amendement du rapporteur pose une obligation de respecter les engagements de l'article L. 121-1. Mais celui-ci n'a rien de normatif : il ne fait qu'énoncer des principes. Attention à ne pas supprimer du PLU tout élément proprement normatif !

L'amendement 850, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 107, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - Les amendements 615, 1172 et 851 tombent.

M. Jean-Michel Marchand - Par l'amendement 1173, nous demandons que soit aussi prise en compte la qualité environnementale des constructions. Depuis les chocs pétroliers et la préoccupation bioclimatique aidant, on a commencé de construire des bâtiments dits « de qualité environnementale », c'est-à-dire non seulement adaptés aux besoins de leurs utilisateurs, mais respectueux du cadre et exigeant des apports énergétiques réduits. Ainsi nombre de lycées dans le Nord. L'amendement vise à consacrer ce souci dans la loi.

M. le Rapporteur - La commission l'a repoussé, estimant que la disposition n'avait pas de caractère normatif.

M. le Secrétaire d'Etat - On ne peut renvoyer ainsi à un document d'intérêt local la définition d'une règle de ce genre, au risque de voir la situation varier d'une commune à l'autre. D'autre part, les règles de construction relèvent du code de la construction et de l'habitation, et non de celui de l'urbanisme. Pour ces deux raisons, je souhaite, Monsieur Marchand, que vous retiriez cet amendement.

M. Jean-Michel Marchand - Je vous entends bien, mais peut-être la question pourrait-elle être réglée par décret afin d'éviter des abus. Je maintiens donc ma proposition.

L'amendement 1173, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. François Vannson - L'amendement 9 va dans le sens d'une restauration de la solidarité et est propre à renforcer le lien entre urbanisme et économie : il s'agit en effet de prendre aussi en considération les motifs « économiques ».

M. le Rapporteur - Rejet.

M. Eric Doligé - Le rapporteur n'aime pas l'économie !

M. le Secrétaire d'Etat - La référence aux motifs «d'urbanisme ou d'architecture » autorise déjà à maintenir la densité initiale en dépit du COS : y ajouter les motifs économiques enlèverait toute valeur à ce coefficient que l'Assemblée vient de rétablir !

L'amendement 9, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Michel Inchauspé - Notre amendement 12 vise à faire préciser, dans le PLU, laquelle des deux lois -« loi littoral » ou « loi montagne »- doit s'appliquer sur les rives de nos grands lacs. En effet, si les deux s'appliquaient, toute construction serait interdite sur une bande de 300 mètres -ou même, aux termes de la loi littoral, de cent mètres. Ces textes visent à garantir l'utilisation économe de ces milieux naturels exceptionnels, mais il convient malgré tout de prendre en compte les besoins locaux !

M. le Président - L'amendement 373 n'est pas défendu.

M. Michel Bouvard - La sédimentation des textes législatifs et réglementaires est telle pour certains territoires, notamment pour ceux de montagne, qu'on ne peut parfois plus rien faire, quels que soient les besoins des habitants et même si le projet est économiquement justifié ! Les parlementaires de montagne qui ont déposé ces amendements ne veulent bien entendu pas amoindrir la protection de l'environnement ou la cohérence des réalisations urbanistiques : leur souci n'est que de régler un problème de constructibilité.

Notre amendement 425 n'est sans doute pas parfait mais il conviendrait à tout le moins que le Gouvernement nous fasse une proposition avant l'adoption de la loi. Nous n'avons en effet que rarement à traiter d'urbanisme et, si cette question n'était pas réglée à la faveur du présent projet, j'ai bien peur que la situation ne reste figée pour des années.

M. François Brottes - L'amendement 905 est identique aux précédents, et il est dans l'esprit de ce projet dans la mesure où il tend à en finir avec certains carcans. Le logement social, la mixité sociale doivent acquérir droit de cité à proximité des lacs de montagne et les collectivités doivent pour cela retrouver certaines marges de man_uvre. L'application cumulée des lois montagne et littoral ne ferait que conforter le fait accompli et le privilège des villégiatures existantes. Notre propos est au contraire, non pas de faciliter la construction de nouvelles résidences de luxe, mais de donner aux familles modestes un accès aux enchantements des lacs de Savoie, qui ont inspiré Lamartine (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste)... et sont chers à Louis Besson !

M. le Rapporteur - La commission a longuement débattu de ce point et a reconnu que les communes du littoral comme celles de la montagne devaient avoir les moyens de se développer. Elle a donc adopté des amendements en ce sens. Par ailleurs, je constate que ni la Corse, ni les DOM, ni les Pyrénées Orientales, concernés par ces deux lois, surmontent ce handicap... Enfin, il ne semble pas que définir la loi à appliquer relève d'un plan local d'urbanisme. La commission a donc repoussé ces amendements.

M. le Président - Le président, montagnard, attend avec impatience ce que dira le secrétaire d'Etat, montagnard, de cet amendement des députés de la montagne ! (Sourires)

M. le Secrétaire d'Etat - Je ne parlerai qu'au nom de l'intérêt général ! Et je vois mal comment on réfuterait l'argument du rapporteur rappelant qu'un document local ne saurait trancher entre deux lois.

Les intentions des auteurs de ces amendements sont parfaitement louables, mais il conviendrait que nous prenions le temps de cerner l'étendue du problème posé. La loi littoral ne s'applique qu'aux lacs de plus de mille hectares : ils sont peu nombreux.

M. Jacques Myard - Il y a le lac du Bourget.

M. le Secrétaire d'Etat - Et celui de Serre-Ponçon. D'autre part, pour le classement en zone de montagne, les conditions d'altitude ne sont qu'assez rarement remplies. Je suggère donc que nous effectuions ce travail d'identification avant d'aller plus loin.

M. Jean-Michel Marchand - Je ne conteste pas les intentions de ceux qui proposent ces amendements, mais il y a des réalisations fort contestables ! Ces dispositions remettent en cause...

M. Jacques Myard - Elles remettent à leur place les écolos !

M. Jean-Michel Marchand - ...des lois protectrices. Nous nous y opposons donc fermement.

M. Eric Doligé - La loi littoral ne s'applique pas qu'au littoral et l'ouverture proposée peut être utile. Par ailleurs, lorsqu'on constate de tels chevauchements de textes, comment ne pas regretter que nous soyons obligés de débattre de la présente loi en urgence (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Nous avons autant de versions de chaque article que de lecteurs ! Une mini-navette ne nous permettra pas de triompher de toutes ces difficultés : votons donc ces amendements pour démontrer que la déclaration d'urgence était une bêtise !

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, les amendements 12, 373, 425 et 905 identiques, mis aux voix par assis et levé, ne sont pas adoptés.

M. Germain Gengenwin - L'objet de l'amendement 485 de M. Daubresse est de prendre en considération la dimension multimodale des déplacements de personnes dans le code de l'urbanisme.

M. le Rapporteur - Avis défavorable : des amendements ultérieurs satisferont cette préoccupation.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis. Le 5° de l'article 123-1 mentionne les rues et sentiers piétonniers. S'agissant des vélos, mieux vaut parler d'itinéraires cyclables que de voies réservées aux cyclistes.

M. Alain Cacheux - Mais l'apport principal de l'amendement 485 tient à ce qu'il mentionne les véhicules de transports publics. M. Gayssot est déterminé à développer les transports en commun auxquels il vient d'affecter un milliard supplémentaire. J'espère donc que la légitime préoccupation de M. Daubresse sera satisfaite ultérieurement.

L'amendement 485, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Michel Marchand - Mieux vaut parler d'« itinéraires » cyclables plutôt que de « pistes », car ce terme est plus large. Tel est l'objet de l'amendement 108 de la commission.

L'amendement 108, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 109 complète le précédent en mentionnant les « voies et espaces réservés au transport public », comme le souhaitait M. Daubresse.

M. Michel Bouvard - L'amendement 1363 a le même objet. Je me réjouis que nous ayons satisfaction sur ce point.

M. le Rapporteur - L'amendement 109 satisfait les 558 et 1363.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement est favorable au 109.

L'amendement 109, mis aux voix, est adopté à l'unanimité.

M. le Rapporteur - Par l'amendement 110, la commission a voulu réparer une omission de la loi, qui ne mentionne pas les immeubles.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis favorable.

M. Jean-Michel Marchand - Il conviendrait aussi de mentionner les rues parmi les espaces publics. Mais, pour des raisons qui m'échappent, je n'ai pas réussi à déposer un sous-amendement à cette fin.

M. Daniel Marcovitch - Cette précision figure déjà dans un autre paragraphe.

M. Jacques Myard - Et que deviennent, Monsieur le ministre, les zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysagé -ZPPAUP- ? Seront-ils intégrés au PLU ? Dans l'affirmative, il faudra non plus cinq mais dix ans pour élaborer ce document, qui prend l'allure d'une usine à gaz !

M. le Secrétaire d'Etat - Si les ZPPAUP ne sont pas mentionnées, c'est que le dispositif qui les régit n'est pas modifié. Du reste, il est si complexe que nombre d'élus ont renoncé à l'appliquer.

Tel ne sera pas le cas des PLU que nous créons. Ils resteront vivants puisque, à défaut d'actualisation, ils deviendront caducs au bout de dix ans. De surcroît, ils seront plus riches que les POS. Certains maires, avec l'aide de professionnels compétents, ont élaboré de très bons POS. La même émulation jouera pour les PLU dont la lisibilité facilitera le dialogue entre les élus et les habitants.

L'amendement 110, mis aux voix, est adopté.

M. Michel Bouvard - L'amendement 10 est défendu.

M. le Rapporteur - M. Vannson a déposé plusieurs amendements tendant à ajouter « économique » à différents endroits du texte. La commission les a tous rejetés.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis.

M. Jean-Michel Marchand - Pour ma part, je souhaiterais qu'on ajoute « esthétique » après des motifs d'ordre « culturel et historique ».

Cela dit, la réponse que M. Marcovitch m'a faite tout à l'heure ne me satisfait pas car il faut distinguer les espaces à protéger de ceux qui sont à délimiter.

L'amendement 10, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - La profusion incontrôlable des enseignes et espaces publicitaires peut nuire au cadre de vie. Il importe donc que la signalétique et la publicité soient incluses dans les PLU pour être maîtrisées, dans le respect du règlement de publicité.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis favorable.

M. Serge Poignant - Il me paraît difficile d'intégrer dans un PLU quelque disposition que ce soit sur la publicité en se dispensant de respecter les démarches très normatives qui régissent ce domaine.

M. Jacques Myard - Ces dispositions imprécises seront source d'un abondant contentieux. La procédure du règlement de publicité, extrêmement lourde et qui peut aller jusqu'à l'interdiction, est difficile à respecter. Le PLU autorisera-t-il, par exemple, des panneaux publicitaires de deux mètres sur trois en interdisant ceux de trois mètres sur quatre ? Ou bien on prévoit une procédure lourde qui donne des résultats, ou bien on laisse au juge le pouvoir de déterminer ce qui est permis et ce qui ne l'est pas.

M. Alain Cacheux - Je ne comprends pas la position de nos collègues. Avec le PLU, nous voulons dépasser les seules considérations d'occupation des sols et nous interroger sur le développement urbain. Or qui contestera que certaines enseignes détériorent le paysage urbain ? Il est normal qu'on trouve, dans les PLU, des prescriptions en matière de publicité.

C'est dans le même esprit qu'à l'article 2, nous avons souhaité que les SCT contiennent des dispositions relatives au commerce.

M. le Rapporteur - La procédure du règlement de publicité est lourde. Elle a de l'intérêt, puisqu'elle implique une négociation entre les professionnels et la municipalité, mais elle ne peut être mise en _uvre par chacune de nos 36 000 communes.

L'amendement 111 vise donc à leur donner la faculté d'intervenir en donnant des indications en matière publicitaire. Même si leurs prescriptions devront être conformes à la jurisprudence, c'est une liberté que nous donnons aux communes.

L'amendement 111, mis aux voix, est adopté.

M. Michel Inchauspé - Mon amendement 11 vise à préciser la notion de hameau, que nous avons enfin l'occasion de définir.

Compte tenu de l'extrême diversité des situations d'un massif à l'autre, il vous est proposé de laisser à chaque commune, dès lors qu'elle fait l'effort de se doter d'un PLU -ce qui sera difficile, surtout en période électorale-, d'autoriser des constructions nouvelles dans la continuité des hameaux qu'elles recensent. On éviterait de la sorte que se perdent des habitations construites avant que les règles d'urbanisme deviennent aussi strictes qu'aujourd'hui.

Il ne s'agit pas, bien entendu, de faire comme à Porticcio, où trois cents villas se sont construites. En particulier, il faut exiger que la commune réalise les travaux de voirie, d'électricité et d'adduction d'eau nécessaires. Je laisse de côté l'assainissement, qui sera individuel dans de telles zones.

M. Jean-Paul Bacquet - Mon amendement 372, identique au précédent, vise à clarifier la notion de hameau, dont il n'existe aucune définition sinon celle, négative, qui ressort de la jurisprudence. Il vous est proposé d'autoriser chaque commune se dotant d'un PLU à qualifier elle-même de hameaux les ensembles de constructions dont elle ne souhaitera pas enrayer l'extension.

M. Michel Bouvard - Mon amendement 424 est identique. Cela fait plusieurs législatures que nous tâchons de résoudre ce problème. Nous avons eu ce débat en 1995, pendant l'examen de la loi relative à l'aménagement du territoire, et plus récemment en débattant de la loi Voynet, que M. Brottes connaît bien. Dans les hameaux, la plupart des permis de construire sont refusés par les services de l'équipement ; les jeunes ménages s'en vont, ce qui aggrave la désertification rurale.

Il vous est proposé une solution souple, grâce à laquelle les zones constructibles pourraient être identifiées de manière transparente. J'ai lu dans le dernier rapport d'activité du tribunal administratif de Grenoble que les magistrats de ce ressort avaient l'intention de définir le hameau. Il est grand temps que le législateur s'en préoccupe.

J'ajoute que des logements sociaux aussi pourraient être construits dans ces espaces en voie de désertification.

M. le Rapporteur - On veut faire jouer au PLU un rôle qui n'est pas le sien. Ce document local n'a pas à définir ce qui devrait l'être par la loi.

Je comprends les motivations des auteurs de cet amendement, tout en redoutant les effets d'une application trop laxiste des dispositions proposées.

Vous déplorez l'absence de définition du hameau, mais vous ne le définissez pas vous-même. Et pourtant, le hameau est bien défini par le code de l'urbanisme, dans son article L. 145-3.

La commission a repoussé ces trois amendements.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement comprend les auteurs de ces amendements : confrontés aux mêmes réalités, ils sont parvenus à une identité de vues.

Mais leur solution n'apporte qu'une illusion de sécurité juridique, car le hameau ne sera toujours pas défini. Une liste de lieux dans un PLU ne vaudra jamais une définition législative.

Le Gouvernement souhaite donc le retrait de ces amendements, d'autant qu'il vous sera proposé ultérieurement de rétablir les prescriptions de massif.

M. le Rapporteur - J'ai indiqué pourquoi la commission avait repoussé ces amendements tout en reconnaissant qu'il y avait une difficulté.

L'amendement 147 après l'article 10 répondra donc à la préoccupation de nos collègues.

M. François Brottes - J'avais déposé un amendement similaire à ceux de nos collègues et je me suis rallié à cet amendement 147 qui permettra en effet de sortir de situations aujourd'hui figées.

M. Eric Doligé - Nos collègues semblent oublier qu'il y a aussi des hameaux dans la plaine. Je souhaite donc que la définition qui sera donnée par le biais des massifs vaille aussi pour nos communes, où les problèmes sont les mêmes.

M. Michel Bouvard - Je suis prêt à retirer l'amendement 11 mais je n'ai pas connaissance de l'amendement 147 et je crains qu'en nous remettant aux prescriptions de massifs, nous confions en fait au décret, donc au Conseil d'Etat, le soin de définir les hameaux, et que la situation évolue peu.

M. Henri Nayrou - La loi devrait effectivement autoriser les élus de montagne à prendre en main leur développement et je comprends donc fort bien les intentions des auteurs de ces trois amendements.

Il est vrai toutefois qu'ils seront satisfaits par l'amendement 147 ainsi que par un amendement que la commission a adopté à mon initiative à l'article 4 et qui fait référence aux cartes communales.

Les amendements 11, 372 et 424, mis aux voix, sont adoptés.

M. Michel Vaxès - Notre amendement 1100 traduit dans la loi l'importance du traitement de l'espace public qui doit impérativement accompagner, pour la requalification des quartiers difficiles, la réhabilitation du bâti et les opérations de démolition-construction.

Préciser que le PLU comporte une représentation de l'aménagement des espaces publics y contribuera fortement.

M. le Rapporteur - La commission y est favorable, pour peu que l'on s'en tienne là, sans ajouter les autres éléments que comportent votre rédaction et qui sont repris ailleurs dans le texte.

M. Michel Vaxès - J'accepte cette rectification.

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement - Le Gouvernement partage totalement la préoccupation de M. Vaxès. Il lui semblait toutefois que, placée à cet endroit, la précision pouvait donner l'impression que la détermination des emplacements réservés pourrait se faire sans que soient préalablement déterminés les aménagements correspondants.

Avec la rectification opérée, cette crainte n'a plus lieu d'être et le Gouvernement accepte donc l'amendement.

L'amendement 1100 rectifié, mis aux voix, est adopté.

La suite du débat est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce soir, à 21 heures.

La séance est levée à 19 heures 25.

                      Le Directeur du service
                      des comptes rendus analytiques,

                      Jacques BOUFFIER


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