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Session ordinaire de 1999-2000 - 94ème jour de séance, 218ème séance

1ère SÉANCE DU MERCREDI 7 JUIN 2000

PRÉSIDENCE de M. Raymond FORNI

Sommaire

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT 2

BREVETABILITÉ DU VIVANT 2

PRIX DES CARBURANTS 2

RÉMUNÉRATIONS DANS LA FONCTION PUBLIQUE TERRITORIALE 3

VIOLENCES EN MILIEU SCOLAIRE 4

PLAGES POLLUÉES 5

ALLOCATION PARENTALE D'ÉDUCATION 6

VIOLENCES URBAINES 6

TAXE PROFESSIONNELLE DES
PROFESSIONS LIBÉRALES 7

POLITIQUE SOCIALE D'ACCÈS AU SPORT 8

INDEMNISATION DES VICTIMES DE
LA MARÉE NOIRE 8

AGENCE FRANCE-PRESSE 9

PROBLÈMES DE LA PRODUCTION PORCINE 10

FORÊT (suite) 11

ARTICLE PREMIER 13

Article L. 1 du code forestier 16

Article L. 2 du code forestier 21

Article L. 3 du code forestier 22

Après l'article L. 3 du code forestier 23

Article L. 4 du code forestier 23

Article L. 5 du code forestier 24

Article L. 6 du code forestier 26

Après l'article L. 6 du code forestier 27

Article L. 7 du code forestier 28

Article L. 8 du code forestier 29

La séance est ouverte à quinze heures.

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      QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

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BREVETABILITÉ DU VIVANT

M. André Aschieri - Madame la Garde des Sceaux, le 30 juillet 2000, une directive européenne sur la brevetabilité du vivant sera censée s'imposer en droit français. Or, si le paragraphe 1 de son article 5 précise que le corps humain n'est pas brevetable, le paragraphe 2 du même article revient au réalisme marchand en affirmant le contraire : « un élément isolé du corps humain, ou la séquence partielle d'un gène, peut constituer une invention brevetable même si la structure de cet élément est identique à un élément naturel ». Cette position est en totale contradiction avec celles du comité consultatif national d'éthique de l'Unesco. Elle est aussi en contradiction avec nos lois de 1994 sur la bioéthique, qui se trouveraient de fait abrogées.

La Norvège, les Pays-Bas et l'Italie ont réagi en déposant un recours contre ce texte devant la Cour européenne de justice. Notre pays se doit de se porter à l'avant-garde de toute action contre la privatisation du vivant. Nous devons donc refuser de transposer cette directive en droit français. Associerez-vous la France à l'action des trois pays cités ? Quelle sera notre position lors de la réunion du G8 qui aura lieu à Bordeaux et où cette question de la brevetabilité du vivant sera abordée ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV)

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice - La possibilité de breveter des séquences de génome humain intéresse les chercheurs et les industriels mais suscite aussi de grandes craintes, spécialement en France où existe une tradition de non-commercialisation du corps humain. La directive européenne dont vous parlez est incompatible avec les lois sur la bioéthique de 1994, avec le code de la propriété industrielle, qui interdit la brevetabilité du génome humain, et avec l'article 16-5 du code civil, qui prohibe la commercialisation du corps humain, de ses éléments et de ses produits.

La transposition de cette directive soulèvera des problèmes, il faut qu'un débat s'instaure dans notre pays à ce sujet. Le Gouvernement a sollicité l'avis du comité consultatif national d'éthique : il est attendu pour très bientôt.L'Académie de médecine et l'Académie des sciences se sont également saisies de cette question et nous disposons d'ores et déjà du rapport du Conseil d'Etat du 25 novembre 1999 sur la révision des lois de bioéthique, lequel constate l'incompatibilité de la directive avec nos lois.

Quant au Parlement, il importe qu'il puisse débattre des conséquences de la mise en _uvre d'une telle directive. J'ai reçu aujourd'hui même le Président et les rapporteurs de la mission parlementaire sur la bioéthique et je considère qu'il est indispensable que le Parlement soit associé à l'élaboration des solutions que nous devrons apporter à ces graves questions. Aussi, un projet de loi sera-t-il prochainement soumis à votre Assemblée (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe RCV et du groupe communiste).

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PRIX DES CARBURANTS

M. Patrice Carvalho - Ma question s'adresse au ministre de l'économie et concerne les prix des carburants. Je sais, Monsieur le ministre, que vous rencontrerez vendredi les représentants des compagnies pétrolières mais je veux ici témoigner du mécontentement des Français face à des compagnies qui ne répercutent pas sur les prix à la pompe les baisses des cours du pétrole brut, alors qu'elles s'empressent de répercuter les hausses (Protestations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF).

Plusieurs députés RPR - Et les taxes ?

M. Patrice Carvalho - Ainsi, les prix à la pompe ont augmenté de 4 à 17 centimes, selon le type de carburant, entre le 19 et le 26 mai. Dans ces conditions, la baisse de la TVA de 20,6 % à 19,6 %, intervenue fin mars, n'aura été qu'une timide et éphémère bonne nouvelle.

L'autre problème est le poids de la fiscalité indirecte. La TVA et la taxe intérieure sur les produits pétroliers représentent en effet 83 % du prix de l'essence et 77 % du prix du gazole. C'est évidemment considérable.

Je crois donc qu'il faut agir dans deux directions : d'une part, exiger avec fermeté que les compagnies pétrolières dont les profits annuels sont importants, répercutent les baisses des cours et voir par quelles mesures nous pouvons les y contraindre ; d'autre part, accompagner cette exigence d'une diminution substantielle de la fiscalité des carburants (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). A titre indicatif : j'ai vu tout à l'heure sur l'autoroute que le prix du gazole s'établissait à 6 F et celui de l'essence à 8,29 F.

Quelle est la position du Gouvernement sur ce sujet ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste).

Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation - Les consommateurs réagissent comme vous et vous avez raison de vous faire leur porte-parole, car il est vrai que les prix des carburants ont énormément augmenté ces derniers temps. Et, ce n'est pas la fiscalité qui est responsable du jeu de yo-yo auquel nous assistons puisqu'elle est assise sur les quantités. D'ailleurs, quand la TVA a baissé d'un point, cela n'a guère eu d'effet sur les prix à la pompe.

Trois mécanismes les déterminent : les cours du pétrole brut à Rotterdam, la parité dollar-euro, des raisons techniques ou météorologiques qui agissent sur la demande -en ce moment, par exemple, elle monte.

Mais je voudrais dire quelque chose d'important (« Ah ! » sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Il me semble que, sur certains bancs de l'Assemblée, on oublie que les marges participent aussi à la formation des prix et qu'elles peuvent faire l'objet de discussions. Quand les prix à Rotterdam montent, les prix à la pompe montent immédiatement ; par contre, quand les premiers baissent, les prix à la pompe ne baissent pas. C'est pourquoi M. Laurent Fabius, M. Christian Pierret et moi-même rencontrerons à nouveau les pétroliers pour voir si l'on peut trouver avec eux des solutions négociées. Sinon, nous serons obligés de voir comment faire sans eux.

Je suis d'ailleurs choquée de voir qu'avec des résultats comme ceux de 1999 et des marges nettes à nouveau très importantes à l'issue du premier trimestre, les grandes compagnies ne traitent pas sur un pied d'égalité tous les détaillants, au mépris du rôle que jouent ces derniers dans l'aménagement du territoire (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

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RÉMUNÉRATIONS DANS LA FONCTION PUBLIQUE TERRITORIALE

M. Jean-Pierre Brard - Il y a dans ce pays de grands écarts de fortune et de revenu. D'un côté, des nouveaux riches nagent dans l'opulence et affichent leur arrogance ; de l'autre, des gens modestes triment et ont du mal à joindre les deux bouts (Exclamations sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL). Les hurlements de ces messieurs de la droite, qui sont ici les fondés de pouvoir des premiers dont j'ai parlé, sont d'ailleurs éloquents (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste). Qu'y a-t-il de commun entre par exemple un Jaffré qui a réussi à soustraire 230 millions de stock-options et ceux qui au quotidien rendent notre vie possible ? Je veux parler de ceux qui chaque jour nettoient les rues ou les salles de classe (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL), je pense à tous ces fonctionnaires de la fonction publique territoriale dont le travail est insuffisamment reconnu et qui, pour nombre d'entre eux, gagnent moins de 5 500 F par mois (Un député RPR sort son mouchoir). Monsieur le Président, je trouve choquant ce geste d'un de nos collègues de droite, qui témoigne par là de son arrogance et de son mépris ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste ; protestations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF).

Que compte faire le Gouvernement pour revaloriser les traitements des catégories les plus modestes de la fonction publique territoriale ; pour intégrer les primes dans les rémunérations ; pour aider les collectivités territoriales à supporter ces dépenses nouvelles ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe RCV)

M. Michel Sapin, ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat - Permettez au responsable de collectivité territoriale que j'étais encore tout récemment de s'associer à l'hommage que vous avez rendu au travail fait par tous ceux qui permettent à nos collectivités locales de fonctionner dans de bonnes conditions, travail souvent insuffisamment reconnu par nos concitoyens.

Depuis 1997, ce gouvernement a été particulièrement attentif à l'évolution des rémunérations des fonctionnaires, qu'il s'agisse de ceux de l'Etat, de la fonction publique territoriale ou des hôpitaux. Un accord est intervenu en 1998 qui a permis une augmentation du pouvoir d'achat, pour les années 1998 et 1999, d'un peu plus de 1 %.

Pour les catégories les moins bien rémunérées, le même accord prévoyait une augmentation voisine de 10 %. Avant 1997, il y avait dans les trois fonctions publiques des agents rémunérés sur une base inférieure au SMIC. Ce n'est plus le cas depuis 1997.

J'ai donné rendez-vous en juillet aux organisations syndicales. Nous ferons le point sur l'évolution des traitements et nous aborderons beaucoup d'autres questions : les fonds d'action sociale, les dispositifs de cessation d'activité, les heures supplémentaires. L'année 2000 ne sera pas une année blanche. Les rémunérations augmenteront, dans une proportion qui reste à déterminer.

Quant au problème des primes, il sera abordé dans les prochaines semaines, en même temps que celui de nos retraites. Le Gouvernement souhaite pérenniser nos systèmes fondés sur la solidarité, quelle que soit l'évolution démographique des régimes.

Le Parlement comme le Gouvernement ont donc du travail devant eux.

Je serai attentif à l'évolution des rémunérations (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

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VIOLENCES EN MILIEU SCOLAIRE

M. Bernard Perrut - Monsieur le ministre de l'éducation nationale, un député de votre majorité vient de dresser, dans un quotidien, un constat accablant des violences commises dans les établissements scolaires d'Ile-de-France.

En trois mois, le numéro vert « Jeunes-Violence-Écoute » a été composé par 60 000 jeunes, victimes de rackets et de violences sexuelles. Chacun sait que la violence sévit aussi dans les autres régions, et qu'elle s'aggrave. Pourtant, vous en minimisez l'importance et ses auteurs restent impunis. Les enfants qui en sont victimes, traumatisés, risquent l'échec scolaire.

Cette situation accablante est le résultat du plan Allègre, que vous avez repris à votre compte, alors qu'il est totalement inadapté. Les emplois-jeunes ne veulent pas servir d'agents de sécurité. Les enseignants ne sont pas préparés -et encore moins autorisés- à faire acte d'autorité (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste). Les parents ne sont pas suffisamment responsabilisés et les jeunes s'identifient à des héros de séries télévisées qui ne jurent que par la violence.

Avez-vous des réponses ? (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste) Nos établissements doivent redevenir des lieux où on a le plaisir d'apprendre. Ils doivent cesser de fonctionner sans repères, sans limites, sans sanctions et sans valeurs morales (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR).

M. Jack Lang, ministre de l'éducation nationale - L'école républicaine a le devoir d'assurer la sécurité et la tranquillité des élèves ainsi que des professeurs. Nous sommes plusieurs responsables politiques à avoir pris des mesures en ce sens (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). A peine désigné par le Premier ministre, j'ai adressé sur cette question des instructions et des circulaires... (« Ah ! » sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

Des mesures ont été prises en liaison avec le ministère de l'intérieur et celui de la ville. Elles visent à renforcer la protection des élèves et à garantir que les fauteurs de violence seront sanctionnés. J'ai demandé aux chefs d'établissement de n'accepter aucune forme d'impunité.

Dans quelques jours, je vais mettre en place un comité national anti-violence (« Ah ! » sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Composé de magistrats, de policiers, de chefs d'établissement, de représentants des parents et des professeurs, il sera présidé par une inspectrice générale qui a obtenu de bons résultats dans la lutte contre la violence. Année après année, il nous a fallu pourvoir de nouveau ces postes d'encadrement supprimés par certains gouvernements (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

A la rentrée prochaine, l'encadrement sera encore renforcé, qu'il s'agisse du personnel administratif, des surveillants ou des professeurs.

Par ailleurs, l'idée de Julien Dray -constituer des réseaux d'aide aux victimes- est intéressante.

M. le Président - Monsieur le ministre, pouvez-vous « encadrer » votre réponse ? (Rires)

M. le Ministre - Combattre l'insécurité, c'est enfin remédier à ses causes. Ce n'est pas seulement en réprimant qu'on avancera, mais en rendant confiance aux jeunes (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV).

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PLAGES POLLUÉES

M. Edouard Landrain - Monsieur le Premier ministre, les préfets viennent de recevoir une circulaire relative à l'ouverture des plages publiques dans les zones polluées du littoral atlantique.

La direction générale de la santé recommande la fermeture de ces plages, au nom, affirme-t-elle, du simple principe de précaution. Les mesures d'interdiction définitives ne seront prises qu'à la fin juin, alors que la saison du tourisme et du sel aura commencé.

Quelles assurances pouvez-vous donner à ceux qui vivent de la mer ? Certes, il appartiendra aux responsables du naufrage de l'Erika de les indemniser, mais la procédure prendra du temps. En attendant, comment l'Etat compte-t-il aider les familles et les entreprises ? Ce n'est pas tout d'interdire, Monsieur le Premier ministre : il faut indemniser rapidement ceux qui vivent de la mer (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL).

M. le Président - La parole est à Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement (« Ah ! » sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL). Mes chers collègues, il ne me paraît pas anormal que Mme Voynet réponde à une telle question.

Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement - Nous n'avons pas d'inquiétudes liées à la toxicité des produits. Il ne s'agit pas d'interdire des plages, mais d'indiquer par un panneau si elles sont propres ou non (Interruptions sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL).

Les études réalisées ont montré que ces plages pouvaient être fréquentées sans danger, moyennant quelques précautions : par exemple, interdire aux enfants de manger du sable (Rires sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Il s'agit d'un problème sérieux.

L'indemnisation des professionnels est à l'étude. Il reste une zone d'ombre : le secteur du tourisme. Une mission conjointe du ministère des finances et de celui du tourisme doit arrêter une position avant la réunion du FIPOL, prévue début juillet.

Ces professionnels ont besoin que leurs dossiers soient traités sans retard. Cependant, leurs prévisions dramatiques ne se vérifient pas et la fréquentation constatée paraît très honorable (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV, du groupe socialiste et du groupe communiste).

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ALLOCATION PARENTALE D'ÉDUCATION

M. Patrick Delnatte - A plusieurs reprises, à l'occasion de débats sur la famille, des députés de la majorité, relayés par les ministres concernés, ont mis en question les modalités et le principe même de l'allocation parentale d'éducation. Après l'abaissement du plafond du quotient familial, la diminution de l'AGED ainsi que la réduction d'impôt accordée pour l'emploi d'un salarié à domicile, une nouvelle menace plane donc sur l'APE, laquelle connaît pourtant un grand succès.

Les femmes aspirent à pouvoir choisir librement la meilleure manière de concilier vie familiale et vie professionnelle. Il faut leur laisser ce libre choix plutôt que, pour des raisons idéologiques ou purement comptables, chercher à redéployer les moyens de la branche famille, au moment même où celle-ci est de nouveau excédentaire.

L'égal accès du père et de la mère à l'APE, garanti par la loi actuelle, ne saurait non plus être remis en question au nom du préjugé selon lequel l'éducation parentale constituerait un progrès pour les pères et une régression pour les mères. Les deux parents doivent être traités d'égale façon, sans aucune discrimination.

Pourquoi ne pas accorder l'APE dès le premier enfant, d'autant que les modes de garde extra-familiaux sont aidés dès ce stade ? Ne pas rendre l'utilisation de l'APE plus souple, notamment pour ce qui concerne sa durée ? Ne pas la compléter par un contrat de libre choix incluant une formation destinée à faciliter le retour à l'emploi de ses bénéficiaires ? Enfin, le Gouvernement a-t-il l'intention de revenir sur les mesures restrictives qu'il a prises à l'encontre des familles comme il a su le faire pour les allocations familiales et comme le réclament les familles ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

Mme Ségolène Royal, ministre déléguée à la famille et à l'enfance - Comme vous le savez, le Premier ministre présidera le 15 juin une nouvelle Conférence de la famille. Un peu de patience donc, et vous en saurez bientôt davantage...

Mais je puis dès à présent vous rassurer. L'APE rencontre en effet un vif succès : versée à 542 000 personnes, elle coûte 18 milliards à la nation, il ne faut pas l'oublier non plus. Ce gouvernement cherche à améliorer les outils de la politique familiale, non à revenir sur les dispositifs existants (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

Beaucoup reste à faire pour aider les femmes à concilier vie familiale et vie professionnelle et parvenir à un partage plus équitable des tâches entre les pères et les mères -une récente étude du CNRS a en effet révélé qu'en dix ans, la situation n'avait que fort peu bougé de ce point de vue. Au sortir de l'APE, les femmes connaissent un taux de chômage de 5 % supérieur à celui des autres femmes. Il nous faut donc accompagner la reprise d'activité des femmes ayant choisi d'élever leur enfant : elles ont droit à une formation professionnelle solide leur permettant de retrouver un égal accès au marché du travail (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe RCV et du groupe communiste).

Plusieurs députés RPR, UDF, DL - Des mots !

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VIOLENCES URBAINES

M. Michel Terrot - Monsieur le ministre de l'intérieur, voilà trop longtemps que vous prétendez prendre des mesures efficaces pour enrayer le développement des violences urbaines. Dans mon agglomération, la réalité est bien différente et le droit à la sécurité de nos concitoyens est constamment bafoué.

A cet égard, je tiens à rendre hommage au gendarme Yannick Redon, âgé de 31 ans, marié et père de deux enfants, sauvagement agressé vendredi dernier dans l'exercice de ses fonctions, et qui lutte aujourd'hui contre la mort. Le silence du Gouvernement comme des bonnes consciences, promptes à s'émouvoir en d'autres circonstances, a été sur ce drame assourdissant (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

Les sapeurs-pompiers dénoncent la multiplication des incendies de véhicules : près de 600 depuis le début de l'année dans le grand Lyon. Outre que l'extinction de ces incendies est dangereuse pour les soldats du feu, le développement de cette nouvelle forme de violences urbaines est préoccupant.

Quand le Gouvernement prendra-t-il enfin des mesures réellement efficaces pour mettre un terme à ces actes gravissimes de délinquance ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur - Le Gouvernement partage votre émotion quant au drame que vous avez rappelé et ne peut que déplorer qu'un gendarme ait été sauvagement blessé par une bande de voyous qui a réussi à prendre la fuite. Cela étant, je note que de tels faits tragiques sont toujours pour vous une occasion de monter au créneau. En revanche, vous ne reconnaissez jamais que la situation s'améliore, comme dans le Rhône où la délinquance a reculé de 6 % pendant les quatre premiers mois de l'année après avoir déjà connu une baisse comparable en 1999 (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Cette amélioration de la situation résulte des mesures prises par le Gouvernement, notamment des directives énoncées dans ma circulaire du 11 mars 1999 relative aux violences urbaines et au démantèlement des réseaux de trafic dans les quartiers.

Nous généralisons les expériences de police de proximité, celle-ci couvrant désormais un tiers du territoire national (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Cette police, plus proche de la population, pourra agir plus efficacement (Mêmes mouvements).

M. le Président - Monsieur Nicolin, du calme !

M. le Ministre - Nous devons tous nous mobiliser pour enrayer ces faits déplorables et faire en sorte que la loi soit partout respectée. Mais que je sache, du temps du gouvernement précédent, de tels faits aussi regrettables se produisaient et jamais nous ne les avons exploités comme vous le faites (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe RCV et du groupe communiste).

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TAXE PROFESSIONNELLE DES PROFESSIONS LIBÉRALES

M. Arthur Dehaine - La réforme de la taxe professionnelle décidée il y a deux ans par le gouvernement Jospin ne s'applique malheureusement pas aux professions libérales employant moins de cinq salariés. Monsieur le ministre de l'économie, tous vos prédécesseurs ont systématiquement refusé de les en faire bénéficier. Corrigerez-vous, vous, cette criante injustice ?

Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation - (Protestations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe DL) Ayant la charge du secteur des professions libérales, c'est moi qui vous répondrai : si dans un premier temps les professions libérales employant moins de sept salariés n'ont pas pu bénéficier d'allégement de leur taxe professionnelle, c'est en raison même de la base de leur imposition. Nous avons proposé à l'UNAPL un système de décote pour les personnels embauchés qui n'est d'ailleurs pas simple à mettre au point car des franchises seront nécessaires en fonction du nombre de personnes embauchées. Reste à voir comment et à quel coût un tel système pourra fonctionner. Si pour les pharmaciens, les médecins, les dentistes, il ne semble pas y avoir de difficultés particulières, ce n'est pas le cas pour les avocats et les notaires. Nous recherchons la meilleure solution : les professionnels préfèrent négocier le temps qu'il faudra pour aboutir à une solution satisfaisante pour tous plutôt que d'aboutir trop vite à une cote mal taillée.

Au-delà de l'assiette de la taxe professionnelle, les professions libérales souhaitent que l'on examine la question du statut des conjoints collaborateurs et celle des baux commerciaux. Nous nous y attachons (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

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POLITIQUE SOCIALE D'ACCÈS AU SPORT

M. Jean Rouger - La loi contre les exclusions avait prévu dès 1998 des « coupons-sport », aide financière octroyée par le ministère de la jeunesse et des sports aux jeunes bénéficiaires de l'ARS et licenciés dans un club agréé. Il a été décidé pour la saison sportive 1999 d'étendre le bénéfice de ces coupons à tous les jeunes âgés de 10 à 18 ans, ce qui a quadruplé le nombre de leurs bénéficiaires. Certaines directives départementales de la jeunesse et des sports ont fait un effort considérable d'information en liaison avec les CAF, si bien que le succès du dispositif s'est encore accru. Or les moyens financiers prévus sont insuffisants. En Charente Maritime, un tiers des demandes seulement ont pu être satisfaites. Que compte faire le Gouvernement sur le plan financier pour soutenir cette politique sociale d'accès au sport ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports - Les coupons-sport ont été créés en réponse à la demande exprimée par de très nombreux jeunes, lors des Rencontres locales de la jeunesse en 1997, de voir facilité leur accès aux clubs sportifs. Mise en place en 1998 pour les 14-18 ans, la mesure a été élargie en 1999 aux 10-14 ans, et elle est de plus en plus connue des clubs, mais aussi des familles bénéficiant de l'ARS. Et il est vrai que nous n'avons pas pu faire face à toutes les demandes des familles qui pourtant y avaient droit en vertu de la loi contre les exclusions. Ainsi, dans votre département, quelque mille familles n'ont pu être satisfaites.

Prenant en compte cette situation, le Premier ministre, lors de sa rencontre du 12 mai avec le Comité national de la jeunesse, a annoncé une mesure nouvelle de 20 millions. S'ajoutant aux 26 millions déjà inscrits au budget, elle devrait permettre pour 2000 de faire face à toutes les demandes dans tous les départements (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe RCV).

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INDEMNISATION DES VICTIMES DE LA MARÉE NOIRE

M. René Leroux - Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie et recoupe en partie celle de M. Landrain. A la suite du naufrage de l'Erika le 12 décembre, la marée noire a déferlé sur les côtes atlantiques. Depuis lors, et en vue de la saison d'été, des milliers de bénévoles, en association avec les agents des services publics, nettoient quotidiennement les côtes. Les résultats sont déjà visibles, et je peux personnellement en témoigner ; quant aux plages, les maires prendront toutes les mesures nécessaires. Différentes procédures d'indemnisation -à caractère public ou assurantiel- sont en cours, mais certains de nos concitoyens ne les voient pas aboutir. Pouvez-vous préciser à la représentation nationale où en sont ces indemnisations, à quoi sont dus les retards dont souffrent certaines victimes, et comment l'on peut accélérer ces procédures ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV)

M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - Comme vous, le Gouvernement est conscient des difficultés que connaissent les principales victimes de la catastrophe : pêcheurs, conchyliculteurs, professionnels du tourisme, et plus généralement tous ceux qui travaillent ou habitent sur ces côtes. Je souhaite vous apporter quatre séries de précisions. Tout d'abord l'Etat a pris un ensemble de dispositions préventives pour éliminer les retards et faire que la saison touristique se déroule le mieux possible. Ainsi 560 millions ont été dégagés pour le fonds Polmar, afin de permettre notamment le nettoyage des côtes. Des crédits complémentaires seront délégués sans délai à partir de la provision pour dépenses accidentelles inscrite au collectif que vous avez voté et que le Sénat examine cet après-midi.

En second lieu, nous sommes conscients comme vous de l'importance des délais d'indemnisation par le groupe des assureurs de l'Erika et par le FIPOL. Nous avons donc mis en place des avances de trésorerie à taux 0 pour les pêcheurs, les conchyliculteurs et les paludiers, pour un montant total de 300 millions. Plus de la moitié de ces crédits est déjà consommée, et, sur 2 204 dossiers déposés, 1 438 professionnels ont déjà bénéficié de ces aides. Je vous informe d'autre part qu'un dispositif d'avance de trésorerie sans intérêt au bénéfice des entreprises du tourisme a été mis en place cette semaine par la BDPME. Cette banque accordera en outre des avances aux entreprises d'autres secteurs, à un taux de 1,5 %.

En troisième lieu, l'Etat, comme la compagnie Total, ont déjà indiqué au FIPOL qu'ils présenteraient leurs créances uniquement si des fonds restaient disponibles après indemnisation des autres créanciers. Enfin le Gouvernement a demandé à l'Observatoire du tourisme et à l'Inspection des finances d'évaluer les préjudices prévisibles subis par le tourisme, et nous aurons ce rapport dans dix jours. Nous pourrons alors évaluer si les sommes versées par le FIPOL sont suffisantes ; si nécessaire, nous prendrons une décision complémentaire. Notre détermination est de faire que les choses aillent très vite (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV).

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AGENCE FRANCE-PRESSE

M. Didier Mathus - L'AFP est à nouveau en crise. Crise déontologique, après la vente au Figaro de photographies de Sid Ahmed Rezala, dans des conditions confuses et contraires aux principes éthiques traditionnels de l'agence. Mais aussi crise d'identité, avec les interrogations sur le statut de l'agence, à la suite du dépôt au Sénat d'une proposition de loi RPR. Tout cela illustre le malaise de l'agence, confrontée à l'explosion de la société de l'information et des nouveaux médias. Comment le Gouvernement entend-il lui permettre de s'adapter à cette nouvelle donne, l'aider à relever les défis, tout en préservant l'éthique professionnelle et l'indépendance qui ont fait sa force ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Mme Catherine Tasca, ministre de la culture et de la communication - Effectivement, depuis quelques jours, l'AFP est au centre d'une vive polémique après avoir vendu à un organe de presse des clichés de Sid Ahmed Rezala dans sa prison portugaise. Au vu des éléments connus, il est clair qu'il y a là un dérapage regrettable, alors que l'exigence déontologique doit être constante dans une information en pleine mutation. L'AFP a une longue histoire fondée sur le respect scrupuleux de la déontologie, clé de la confiance qu'on lui accorde. On ne peut donc que déplorer cette initiative : plus que toute autre, l'AFP doit être irréprochable sur ce plan. Je souhaite fermement que cet événement reste seul en son genre, et que les professionnels concernés se souviennent que l'information n'est pas une marchandise comme les autres.

A ce propos je souhaite évoquer comme vous les interrogations qui se lèvent sur l'évolution éventuelle du statut de l'agence, et en particulier sur la proposition de loi déposée au Sénat. Je précise, contrairement à ce qu'on a dit, que je n'ai été ni consultée, ni même informée sur cette initiative, et qu'a fortiori elle n'a pas l'accord du Gouvernement. Mais depuis quelque temps une réflexion est conduite au sein de l'AFP sur les perspectives de son développement. A ce jour cette réflexion n'a pas encore débouché sur un projet, mais rendez-vous est pris à la mi-juin avec le syndicat de la presse parisienne et le syndicat de la presse quotidienne régionale. Si les instances de l'AFP s'accordent sur un plan -ce que je tiens pour nécessaire- et si elles considèrent que sa mise en place requiert des aménagements techniques du statut historique de l'agence, alors le Gouvernement déterminera en pleine responsabilité sa position sur ces problèmes. Mais à ce jour un tel problème ne peut se résoudre par la seule initiative parlementaire, ni par celle du Gouvernement. Il faudrait un engagement du conseil d'administration de l'agence, et en particulier des éditeurs de presse, s'ils sont tous attachés comme l'est le Gouvernement, à l'indépendance de l'AFP (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

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PROBLÈMES DE LA PRODUCTION PORCINE

M. François Colcombet - Les élevages hors sol, notamment porcins, ont connu un grand développement. Ils ont sans doute concouru à la prospérité de notre pays, mais depuis quelque temps ils révèlent beaucoup d'inconvénients : crise de surproduction, problèmes sanitaires, début de catastrophe écologique avec la pollution croissante de l'eau. Le rapport sur le PMPOA montre qu'un bon paquet d'argent public, prélevé sur les agences de bassin, donc sur les consommateurs et non sur les pollueurs, a été englouti en pure perte. Une nouvelle loi sur l'eau s'impose, mais elle sera douloureuse.

Nous serions toutefois plus crédibles face au monde agricole si nous ne laissions pas se développer chez nos voisins ce que nous critiquons chez nous. L'Espagne a accru de 91 % sa production porcine, et n'a transcrit aucune directive communautaire alors que ce sont des fonds européens qui ont permis d'y moderniser la filière. Pire, elle n'a mis en place ni plans d'épandage, ni contrôle sanitaire, ni contrôle en abattoir. Farines animales suspectes, activateurs de croissance antibiotique, tout est bon pour réduire les coûts. Résultat : une bonne part du marché français est aujourd'hui captive, centrales d'achat ou abattoirs. Dernière touche à ces cochonneries : ce ne sont pas des paysans ou des coopératives qui en profitent, mais des capitaux spéculatifs, notamment américains... A l'heure où la France s'apprête à jouer un rôle de premier plan en Europe, que compte faire le Gouvernement pour protéger les consommateurs et faire respecter les règles d'une concurrence loyale envers nos agriculteurs ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV)

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche - Votre question comporte plusieurs aspects. En ce qui concerne la crise européenne de surproduction porcine, nous en sortons lentement, à supposer même que nous en sortions : partout en Europe la production continue de croître, sauf peut-être au Royaume-Uni. La France compte faire de la maîtrise de cette production une des priorités de sa présidence. La Commission doit présenter à ce sujet une proposition, qui bien que timide, ne recueille pas une majorité d'avis favorables. Nous entendons donc nous battre pour la maîtrise de la production.

Vous estimez qu'avec le PMPOA, on a beaucoup dépensé pour rien. Mais l'investissement de l'Etat dans ce plan n'a pas représenté 15 milliards -contrairement à ce qu'ont affirmé certains hebdomadaires, y compris satiriques- mais le sixième de cette somme, le reste ayant été financé notamment par les agriculteurs. Ce plan est-il efficace ? Il est difficile d'en juger. La pollution en profondeur d'un sol ne peut être éliminée du jour au lendemain. Il faut inscrire notre action dans la durée.

Quoi qu'il en soit, en dehors de toute considération d'efficacité, ne faut-il pas mettre aux normes les bâtiments d'élevage ? Bien sûr, il faut le faire, même si cela prend du temps, si l'on veut améliorer la qualité des nappes phréatiques.

Enfin, que faisons-nous pour mieux maîtriser les installations et agrandissements des élevages hors sol, pas seulement porcins ? Depuis la loi d'orientation agricole, ils sont soumis à des contrôles de structures, sans limite de taille pour les élevages porcins sur caillebotis et avec une limite de taille pour les autres. Vous le savez parfaitement, puisque c'est à la suite d'un de vos amendements. Tous les projets d'installation et d'agrandissement sont soumis aux commissions départementales d'orientation agricole. Enfin, j'ai donné des instructions très fermes aux préfets et aux directeurs départementaux de l'agriculture en ce qui concerne les contrôles de structures (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. le Président - Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

La séance, suspendue à 16 heures est reprise à 16 heures 20, sous la présidence de M. Cochet.

PRÉSIDENCE de M. Yves COCHET

vice-président

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          FORÊT (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi d'orientation sur la forêt.

M. le Président - Hier soir, l'Assemblée a entendu les orateurs inscrits dans la discussion générale.

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche - Ce projet était attendu depuis longtemps. Il répond, je l'espère, aux attentes placées en lui.

Pour commencer, j'exprime ma gratitude à votre rapporteur, François Brottes, et à la commission de la production pour le travail qu'ils ont accompli. Pris en main avec ardeur, le dossier de la forêt a donné lieu à une très large concertation avec tous les partenaires concernés. Les parlementaires de toutes tendances qui sont passionnés par la forêt ont travaillé de façon extrêmement fructueuse.

Il en résulte que ce projet est presque davantage le vôtre que celui du Gouvernement. Il est devenu grâce à vous une véritable proposition de loi, par un juste retour des choses, car il est né ici du rapport établi voilà deux ans par Jean-Louis Bianco, sous le titre La forêt, une chance pour la France. Ce travail parlementaire honore votre assemblée.

J'aborde ce débat dans un esprit ouvert et disponible pour tout enrichissement. Or, sur ce point, vous ne manquez pas d'idées, puisque 675 amendements ont été déposés. Aucun d'entre eux n'est a priori irrecevable à mes yeux. Le Gouvernement est donc prêt au dialogue qui permettra d'aboutir au meilleur projet possible.

Nous examinons ce projet dans des conditions particulières, nées des tempêtes de décembre et des dégâts qu'elles ont provoqués. Il s'ensuit un décalage entre l'objet du texte, qui porte sur le long terme et l'exigence de court terme ressentie dans les régions sinistrées.

Le mieux consiste, je crois, à assumer ce décalage, sans démagogie. La discussion d'aujourd'hui fournit une opportunité pour parler de la situation de la forêt française après les tempêtes, sans que la perspective dans laquelle se place le projet d'orientation en soit altérée.

Parlons donc du plan national pour la forêt adopté par le Gouvernement après la tempête. On me presse d'engager un processus d'indemnisation des propriétaires. Prenons-y bien garde ! Si un exécutif, de quelque tendance qu'il soit, se lançait dans une logique d'indemnisation pour la perte de biens assurables mais non assurés, il mettrait le doigt dans un engrenage infernal pour les finances de l'Etat, comme pour les principes qui fondent l'Etat de droit. Non, le Gouvernement n'a pas cédé à cette tentation démagogique, il n'a jamais envisagé d'indemnisation pour des biens assurables que leurs propriétaires n'avaient pas assurés.

M. François Guillaume - Ils n'étaient pas assurables ! Ce n'est pas sérieux !

M. le Ministre - Si, ils l'étaient, et c'est vous qui n'êtes pas sérieux. Le Gouvernement a choisi une autre démarche, qui consiste à soutenir l'activité économique, à aider au dégagement des chablis, à leur transport et à leur stockage, bref à leur exploitation.

Nous l'avons fait aussi vite que possible. En effet, le plan national pour la forêt a été arrêté autour du 12 janvier, soit quinze jours après les tempêtes, et les premiers crédits ont été délégués à la mi-février, conformément aux engagements pris.

Certains d'entre vous ont fait référence au plan forêt « exemplaire » qu'a adopté l'Allemagne en 1990. Je signale donc qu'il a fallu six mois aux Allemands pour l'élaborer.

Je ne conteste pas que le nôtre ait rencontré certaines difficultés d'application et continue à en connaître, Monsieur Sauvadet, mais il faut dire aussi que nous avons dû faire, sans mauvais jeu de mots, du défrichage administratif, la France n'ayant pas mémoire d'une catastrophe de cette ampleur. Nous avons donc dû inventer. Et le plan a évolué à mesure que nous le mettions en place. Pour le transport des grumes, par exemple, nous avons commencé par des aides au transport ferroviaire. Mais une vérité de bon sens nous est vite apparue : les voies ferrées ne vont pas jusqu'au c_ur des forêts vosgiennes ou du Massif central. Nous avons donc mis au point des aides au transport routier. Et dans un troisième temps, des aides au transport maritime. Bref, nous n'avons cessé d'adapter ce plan et je suis encore disponible pour faire plus et mieux, si c'est nécessaire et possible.

Plusieurs députés UDF et RPR - C'est nécessaire.

M. le Ministre - Ce plan représente tout de même, pour 2000, 2 milliards de crédits budgétaires et 12 milliards de prêts bonifiés. Nous avons en outre prévu 600 millions par an, pendant dix ans, pour reconstruire les forêts. La TVA sur les travaux forestiers n'est que de 5,5 %. Et lors du dernier CIAT, des avenants aux contrats de plan Etat-région prévoyant 1,7 milliard pour panser les plaies de la forêt française ont été décidés. Tout cela témoigne d'un effort considérable de solidarité, qui est, je crois, à la hauteur des enjeux.

Je ne m'en satisfais pas pour autant et vous annonce donc aujourd'hui deux mesures. La première est de laisser ouvertes autant que de besoin dans les mois qui viennent, les enveloppes d'aides au transport arrivées à épuisement dans certaines régions.

M. Pierre Ducout - Très bien !

M. le Ministre - La deuxième consistera à publier, au plus tard cet été, une circulaire sur l'aide à la reforestation. Je ne voulais pas le faire plus tôt car j'attendais le rapport du groupe de travail chargé du « retour sur expérience » que vous souhaitez tous. Ce rapport sera disponible d'un jour à l'autre. Je voulais aussi ouvrir la concertation avec les professionnels. Cela se fera dans les semaines qui viennent.

Après avoir évoqué ce plan, qui porte sur le court terme, j'en reviens à ce projet, plus orienté sur le long terme. Permettez-moi d'abord quelques mots sur sa genèse.

Après le rapport Bianco d'il y a deux ans, La forêt, une chance pour la France, les pouvoirs publics et l'interprofession ont travaillé ensemble à une stratégie forestière sur quinze ans qui permet à tous les acteurs de la filière de savoir dans quel cadre ils évoluent.

Après quoi nous avons voulu que le projet de loi de finances pour 2000 traduise la priorité que nous entendions donner à la forêt. Le Gouvernement a donc proposé au Parlement une réforme du Fonds forestier national qui s'est soldée pour les acteurs de la filière par un allégement de charges de 500 millions et qui a donc été unanimement saluée.

Après toutes ces étapes, voici ce projet de loi d'orientation pour la forêt. Lors de la discussion générale d'hier soir, je vous ai tous entendus faire l'éloge du rapport Bianco, ce qui m'a rassuré, mais j'ai ensuite entendu de la part de l'opposition cette rengaine : le rapport Bianco, formidable, mais ce projet de loi, comme il est décevant, quel dommage qu'il oublie le rapport Bianco !

M. Bianco a répondu mieux que je n'aurais pu le faire en montant lui-même à cette tribune pour déclarer qu'il jugeait le projet parfaitement respectueux des orientations de son rapport et qu'il les retrouvait toutes.

Je vais être plus sévère que lui car il manque dans ce projet une des propositions du rapport, une seule : celle relative au plan d'épargne forestier.

M. François Sauvadet - Nous l'avons réintroduit par voie d'amendements.

M. le Ministre - Nous n'en sommes pas encore aux amendements ! Mais je peux vous dire que le Gouvernement est favorable à la mise en place d'un tel dispositif, auquel il travaille depuis plusieurs mois, et que s'il ne se trouve pas dans le projet, c'est simplement parce que nous n'avons pas encore trouvé la solution technique. Le Premier ministre souhaite que cela se fasse avant la deuxième lecture. Je serai donc très ouvert aux amendements en ce sens et nous comblerons ensemble cette lacune (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste).

Je voudrais maintenant répondre à certaines critiques. Plusieurs d'entre vous ont jugé ce texte faible du point de vue de la dynamisation économique. Mais d'abord je ne vois pas comment une loi pourrait à elle seule dynamiser l'économie.

M. François Vannson - Pourtant, vous dites toujours que la croissance, c'est grâce à vous !

M. le Ministre - Je pense en effet que la croissance a été favorisée par tout un ensemble de décisions gouvernementales, mais pas par une seule loi.

Quoi qu'il en soit, je vous mets au défi de trouver dans ce projet la moindre disposition qui puisse entraver le dynamisme économique (Murmures sur les bancs du groupe UDF).

Ce projet ne peut que favoriser le dynamisme économique, de même que la stratégie forestière dont j'ai parlé ou l'abondement du FFN.

D'autres disent que la recherche et la formation sont insuffisamment prises en compte ; mais ces domaines relèvent en l'occurrence plutôt de textes réglementaires : ceux-ci sortiront dans les mois qui viennent.

Notre rapporteur ayant excellemment décrit ce projet, je me bornerai à quelques observations.

En premier lieu, l'adoption de ce texte nous permettra de tenir les engagements que nous avons pris à Rio. Il est important que la France respecte sa parole.

Avec ce texte, nous modernisons le code forestier. Comme l'a déjà souligné Jean-Louis Bianco, nous supprimons plus d'articles que nous n'en créons. On m'accuse souvent de vouloir suradministrer notre agriculture. Vous voyez que c'est à tort.

Dans ce projet, en outre, nous reconnaissons le caractère multifonctionnel de la forêt française, qui ne nous rend pas que des services d'ordre économique. Cette approche multifonctionnelle vaut d'ailleurs pour l'ensemble de notre agriculture.

Enfin, nous avons choisi une approche moderne : nous raisonnons par massif, car la forêt française n'est pas homogène et nous adoptons une démarche contractuelle avec les chartes de territoire forestier.

Les Français ont un amour profond de la forêt, un attachement qui confine parfois à l'irrationnel : il serait bon de leur expliquer parfois qu'abattre un arbre n'est pas un crime, que c'est même en général, un service rendu à la forêt. Quoi qu'il en soit, cet attachement nous crée des obligations.

Nous devons aussi faire preuve d'humilité. Nous légiférons aujourd'hui pour nos petits-enfants, voire pour nos arrière-petits-enfants. La politique n'est pas toujours à court terme. Elle consiste aussi à penser aux générations futures. Je me réjouis que nous ayons l'occasion de le faire ensemble (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

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ARTICLE PREMIER

M. François Vannson - Notre filière forestière fonctionne mal. La façon dont nous exploitons nos forêts est coûteuse et la tempête n'a fait que révéler une situation de fragilité. Il faut donc renforcer le volet économique et en particulier réduire les charges qui pèsent sur les entreprises forestières, de manière à rendre ce secteur plus compétitif. J'ai déposé de nombreux amendements en ce sens.

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont - Ce texte contient de nombreuses avancées. Son article premier fixe les orientations du Gouvernement et de sa majorité. Cette vision nouvelle de notre forêt, nous la devons à notre collègue Jean-Louis Bianco, dont le rapport a rendu espoir à tous les professionnels.

Ambitieux et novateur, le projet que nous examinons est conforme aux engagements internationaux de la France. Il nous donne des outils pour moderniser la filière et valoriser notre forêt, dont il reconnaît par ailleurs les fonctions sociales et écologiques.

Il réaffirme la nécessité de tenir compte des contraintes naturelles et tend à favoriser la gestion commune des propriétés, ce dont il faut se féliciter, notre forêt étant très morcelée.

L'élue locale que je suis aimerait que les nuisances causées par l'exploitation forestière ne soient pas supportées par les seules collectivités locales. Je pense tout particulièrement à ces voiries communales ou départementales endommagées pendant les débardages. Je regrette par ailleurs que notre réseau routier soit peu adapté à l'exploitation forestière.

En commission, nous avons imaginé le plan épargne forêt pour favoriser l'investissement dans une filière, peu attractive aujourd'hui. Il faut soutenir cette initiative, qui permettra de financer la restructuration de notre forêt.

La procédure souple des chartes de territoire s'inspire de la politique définie par le Gouvernement dans la loi d'orientation sur l'aménagement durable du territoire votée le 25 juin 1999.

Parlementaire d'un département dont le taux de boisement est supérieur à 25 % -un département, Monsieur le ministre, que vous nous avez fait l'honneur de visiter-, je me félicite de ce texte.

M. Daniel Boisserie - Arbre à pain des régions pauvres, le châtaignier, le plus noble des feuillus, est connu comme un fruitier : on semble ignorer l'intérêt de son bois.

Les vents de décembre ont ravagé notre forêt. Si certaines espèces de résineux ont été anéanties, vous avez pu constater sur place, Monsieur le ministre, comme le rappelait Mme Perol-Dumont, que les feuillus aussi ont souffert. Or j'ai le sentiment que le châtaignier est négligé. Son exploitation représente tout de même 1 500 emplois. Il fournit la balivelle, qui sert à la fabrication des parquets et qui est appréciée des menuisiers, voire des ébénistes.

Son bois est utilisé pour la restauration des monuments historiques, car les araignées ne peuvent tisser dessus leur toile. J'ai donc le soutien le plus total de tous les hommes et les femmes de ménage... (Sourires)

Ce bois se retrouve encore dans les piquets de nos vignobles les plus prestigieux.

Il y a un premier problème : les entreprises ne peuvent aujourd'hui stocker et exploiter une réserve de bois représentant huit à dix ans de production ordinaire. Il y en a un deuxième : les usines de pâte à papier comme International Paper -on ne peut d'ailleurs que s'en féliciter pour l'instant- se sont équipées pour transformer tous les bois en provenance de taillis de châtaigniers en bois de trituration. Auparavant seul le châtaignier et le chêne de mauvaise qualité, ou bien encore le bouleau, étaient utilisés pour la pâte à papier. Les entreprises craignent de manquer à plus ou moins long terme d'un bois indispensable à la fabrication de produits de renommée mondiale. En outre, la présence de chablis augmente de 20 à 25 % le coût du débardage et du bûcheronnage.

Dernier problème : les aides importantes au reboisement accordées par le passé ont incité de gros investisseurs à acquérir à bas prix des surfaces importantes de taillis qu'ils ont défrichées puis replantées en résineux, si bien que le châtaignier, bois de qualité, est devenu beaucoup plus rare.

Cette loi d'orientation arrive donc à point nommé pour valoriser encore mieux la production et mieux gérer la forêt grâce à des plans simples de gestion, des documents d'aménagement, des réglements-types qui pourront être adaptés à chaque région, un code de bonnes pratiques sylvicoles.

Il faut éviter, vous y avez insisté, Monsieur le ministre, « l'enrésinement » déraisonnable de tous nos massifs forestiers. Encourageons plutôt la plantation d'espèces menacées ou abandonnées pour des raisons de rentabilité immédiate. C'est le cas du châtaignier dans plusieurs régions françaises mais aussi d'autres essences qui entrent dans la fabrication de produits indispensables (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

M. François Guillaume - L'article 1 de cette loi, abusivement qualifiée de loi d'orientation, se résume à un simple toilettage du code forestier. Les déclarations d'intention qu'il contient s'inspirent du rapport Bianco, lequel a suscité une quasi unanimité que rendaient fort probable les généralités et les incantations auxquelles il se bornait. « La forêt est un atout important pour notre économie », « sa production ne cesse d'augmenter », « la filière bois est un gisement important d'emplois », qui pourrait dire le contraire ? Malheureusement, ce qui était vrai en 1998 ne l'est plus autant aujourd'hui.

Ce projet fait l'impasse sur les moyens. Pis encore, il infléchit fâcheusement le rôle de la forêt au détriment de sa vocation socio-économique. Qu'entendez-vous exactement par « multifonctionnalité » ? En effet, le rôle environnemental de la forêt n'est pas nouveau : on sait depuis longtemps que les massifs forestiers absorbent du gaz carbonique et rejettent de l'oxygène, ce qui contribue à réduire l'effet de serre. Quant à ouvrir les forêts aux promeneurs, ce n'est pas nouveau non plus ! Au contraire, les réticences viennent plutôt aujourd'hui de l'ONF -je pense à ses gardes qui interdisent l'accès de la forêt au pied du Donon. Enfin, l'impératif de gestion durable que vous mettez en avant n'est pas nouveau non plus. Un arbre vivant en moyenne 80 ans, tous les propriétaires forestiers savent que la sauvegarde de la valeur de leur patrimoine est subordonnée à une exploitation convenable.

J'aurais préféré que vous nous disiez comment encourager et soutenir tous les acteurs de la filière, notamment les scieries qui gagneraient à regrouper leur production pour la commercialiser. Ainsi nos bois cesseraient-ils de partir vers l'Italie où ils sont transformés en meubles ensuite exportés vers notre pays.

Autre omission, surréaliste, dans cet article premier : les tempêtes de décembre dernier. Peut-on envisager l'avenir de la forêt française à partir des propositions d'un rapport datant de 1998 alors que les deux tiers des 150 millions de mètres cubes de bois mis à terre par ces tempêtes seront perdus ? Plus encore d'ailleurs l'auraient-ils été si dès le lendemain de la catastrophe, les élus et les employés des communes forestières, ainsi que les agents de terrain de l'ONF, ne s'étaient rendus dans les massifs une tronçonneuse à la main et n'avaient pris les mesures nécessaires. Vous avez mis, vous, trois semaines à élaborer un « plan de sauvetage » alors que pendant ce temps, les prix chutaient de 30 %. Il a fallu ensuite attendre trois mois pour que soient mis en place des fonds de garantie. Quant aux aides, elles ont été débloquées, mais elles ne sont toujours pas parvenues à leurs destinataires. Où sont-elles aujourd'hui ? Sans doute bloquées dans quelque ordinateur d'une administration. Nous avions proposé, pour notre part, un schéma rationnel avec un organisme unique par massif habilité à exploiter et à stocker les bois. Notre idée n'a malheureusement pas été retenue. Vous êtes ouvert à toutes les propositions, avez-vous dit tout à l'heure, Monsieur le ministre. Dommage que vous ne l'ayez pas été plut tôt !

Les petits propriétaires n'exploiteront pas leurs bois car le coût de cette exploitation serait supérieur aux recettes qu'ils peuvent escompter. Nous avions demandé une garantie de bonne fin de 50 F le m3 pour les chablis, mais là encore, notre idée n'a pas été retenue.

Enfin, des prêts ont été octroyés aux acheteurs de bois, mais ce n'étaient pas eux qui en avaient besoin puisqu'ils peuvent aujourd'hui acheter pour un même montant des quantités bien supérieures de bois. Il aurait fallu aider les propriétaires forestiers.

Nous avions proposé également la création d'un CTE forestier avec une aide de 50 000 F pour les agriculteurs consentant à déblayer un hectare de forêt, à le replanter et à l'entretenir durant deux ans pour éviter que les ronces n'étouffent les jeunes pousses. Nous suggérions aussi que les communes forestières puissent placer les recettes exceptionnelles qu'elles vont retirer de l'exploitation des bois abattus par la tempête sur des comptes portant intérêt car, ensuite, elles n'auront plus de ressources pendant longtemps. Elles devraient aussi être exonérées de frais d'ingénierie sur les investissements et des prélèvements pour services de gardiennage.

D'une façon générale, il faut tirer les leçons des tempêtes et revoir nos plantations. Il faudra à l'avenir varier les essences, procéder à un indispensable remembrement forestier, créer de nouvelles voies de desserte...

M. le Président - Veuillez conclure, je vous prie. Votre temps de parole est épuisé depuis longtemps.

M. François Guillaume - Vos propositions, notoirement insuffisantes, ne permettront pas à la forêt de sortir de ses difficultés actuelles. Pour toutes ces raisons, je ne peux approuver l'article premier.

Article L. 1 du code forestier

M. Jean Charroppin - L'amendement 37 est défendu.

M. François Brottes, rapporteur de la commission de la production - La commission l'a repoussé, le jugeant redondant avec d'autres dispositions de l'article.

M. le Ministre - Même avis.

L'amendement 37, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Maurice Adevah-Poeuf - Mon amendement 493 tend à remplacer le mot « environnementale », si usé par la mode qu'il finit par ne rien vouloir dire, par les mots « écologique et paysagère ».

M. le Rapporteur - Avis défavorable. A développer le terme générique, nous risquerions des oublis. Tenons-nous en à « environnementale ».

M. le Ministre - Même avis.

L'amendement 493, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. François Vannson - L'amendement 38 tend à ajouter, après les mots « fonctions économique, environnementale », les mots « de loisirs et de tourisme ».

M. le Rapporteur - Avis défavorable pour les mêmes raisons que précédemment.

L'amendement 38, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - Dans le socle du nouveau code forestier, il fallait mentionner la qualification des emplois : c'est l'objet de l'amendement 186 de la commission.

M. le Ministre - Favorable.

M. Patrice Carvalho - Notre sous-amendement 636 précise que la qualification des emplois doit conduire à leur pérennisation. Cela pourra aider à résorber le fort taux de précarité dans la filière bois. Mentionner la pérennisation avant la compétitivité souligne en outre que celle-ci ne doit pas être poursuivie au détriment de l'emploi.

M. le Rapporteur - La commission l'a accepté. On ne saurait favoriser la précarité, déjà très importante.

M. le Ministre - Je partage la préoccupation que traduit ce sous-amendement : il est clair que le Gouvernement souhaite la pérennisation des emplois, et que leur qualification peut y contribuer. Toutefois cet ajout dans le texte semble inutile : il introduirait implicitement un doute sur les objectifs de la politique de l'emploi du Gouvernement, en voulant les spécifier dans le seul contexte de la politique forestière. Mais enfin, je suis prêt à m'en remettre à la sagesse de l'Assemblée.

Le sous-amendement 636, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 186 ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

M. François Vannson - L'amendement 377 a pour but de faire état de la spécificité des zones de montagne.

M. Pierre Micaux - L'amendement 450 a le même objet.

M. le Rapporteur - L'élu de montagne que je suis ne peut être opposé à cette préoccupation... Mais elle est satisfaite plus loin à l'article L.7, où elle me semble mieux placée : c'est pourquoi la commission a rejeté ces amendements.

M. le Ministre - Même avis.

Les amendements 377 et 450 mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. François Vannson - En 1998 la filière bois a connu un déficit de 18,5 milliards. Si nous souhaitons un développement plus soutenu de cette filière, il importe de faire des efforts sur ses débouchés. L'amendement 138 a pour objet d'inscrire cette notion dans la loi.

M. le Rapporteur - La commission l'a repoussé, car ses objectifs sont inclus dans la notion de compétitivité de la filière, mentionnée au même article.

L'amendement 138, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Pierre Micaux - L'amendement 160 est défendu.

L'amendement 160, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 187 de la commission lève une petite ambiguïté en précisant que la production mentionnée à la dernière phrase du premier alinéa est bien la production forestière. Quant au 188, il est également de précision.

Les amendements 187 et 188, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.

M. Didier Julia - Comme l'a montré le retard pris dans la gestion des conséquences de la tempête, les forêts publiques ont perdu le caractère exemplaire et innovant qu'elles possédaient traditionnellement. En réaffirmant ce caractère dans la loi -ce qui est l'objet de l'amendement 382- j'espère aussi vous permettre d'obtenir plus facilement les fonds nécessaires pour remettre les forêts en état après la catastrophe. N'oublions pas le rôle des forêts dans la dépollution de l'eau et de l'air.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé cet amendement, non pas que les forêts publiques n'aient pas a être exemplaires et innovantes, mais ce n'est pas leur apanage exclusif. N'oublions pas que 70 % des forêts sont privés. Quant aux missions spécifiques des forêts publiques, nous y reviendrons dans des articles ultérieurs, qui devraient satisfaire notre collègue.

M. le Ministre - Même avis.

L'amendement 382, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Pierre Micaux - Je souhaite préciser, par l'amendement 8, qu'il ne s'agit pas seulement de maintenir la diversité biologique, mais de l'améliorer, à l'encontre de trop de gestions déficientes.

M. le Rapporteur - La commission l'a rejeté pour la raison suivante : nous procédons ici à la transcription exacte d'une résolution de la conférence paneuropéenne d'Helsinki en juin 1993. Mieux vaut nous en tenir à nos engagements internationaux et aux textes qui les formalisent.

M. le Ministre - Monsieur le rapporteur parle d'or.

L'amendement 8, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 189 de la commission répond à la nécessité d'inscrire dans la loi une référence à l'équilibre entre activités forestières et activités de chasse. Cet « équilibre sylvo-cynégétique » est indispensable à la préservation de la forêt.

M. le Ministre - L'amendement 690 du Gouvernement propose une rédaction très voisine, mais plus simple.

M. le Rapporteur - Peut-être est-elle en effet plus limpide. L'important est qu'on reconnaisse enfin l'équilibre sylvo-cynégétique.

M. Pierre Micaux - Le problème est important. La régénération forestière risque toujours d'être remise en cause si les cerfs ou les chevreuils dévorent tous les jeunes plants. Il est donc nécessaire à la forêt que les plans de chasse soient bien conçus et bien surveillés. Les Allemands ont rendu les leurs plus exigeants depuis la dernière tempête, et nous devons en tirer leçon.

M. Maurice Adevah-Poeuf - Je me réjouis de cette introduction de l'équilibre sylvo-cynégétique, et je ne suis pas choqué de voir apparaître la chasse comme un élément constitutif de l'espace forestier. Comparé à l'amendement de la commission, celui du Gouvernement fait disparaître l'idée que la régénération des peuplements forestiers doit être possible « sans protection spéciale ». J'aimerais comprendre la portée de cette suppression.

M. François Vannson - Nous notons la pirouette de procédure du Gouvernement, car cet amendement a été fortement soutenu en commission par les députés de l'opposition, et nous souhaiterions recueillir le fruit légitime de nos efforts. Sur le fond, il est important de tenir compte de l'équilibre sylvo-cynégétique. Les commissions de plans de tir ont fait leurs preuves, et la réalisation de ces plans est de plus en plus scientifique. Il faut donc inscrire cette notion dans la loi,

M. Pierre Ducout, vice-président de la commission de la production - Nous sommes très favorables à l'équilibre sylvo-cynégétique et la rédaction du Gouvernement va dans le bon sens. La régénération peut être obtenue de façon naturelle ou artificielle, et donc sans protection spéciale.

M. le Ministre - Soyez certains que le Gouvernement veut vraiment aller dans votre sens. Simplement, ne traitons pas ici de problèmes qui seront réglés dans la loi sur la chasse.

Nous supprimons la formule « sans protection spéciale » pour ne pas avoir à opposer l'article 40.

M. François Guillaume - Mais non !

M. le Ministre - Sinon, il faudrait dire qui couvre les dégâts causés par le gibier, l'Etat ou les chasseurs.

M. le Rapporteur - J'ai fait adopter des amendements à la loi sur la chasse qui prévoient la consultation systématique des intérêts forestiers avant l'élaboration des plans de chasse. L'équilibre sylvo-cynégétique prévu ici est une avancée complémentaire. Je retire l'amendement 189 au profit de celui du Gouvernement.

L'amendement 690, mis aux voix, est adopté.

M. Maurice Adevah-Poeuf - L'environnement est une notion plus large que le paysage, dit le rapporteur. Dans l'énumération du troisième alinéa, je propose par mon amendement 494 de rajouter la mise en valeur des paysages pour compléter la liste des composants de l'environnement.

M. le Rapporteur - La commission l'a repoussé. L'environnement comprend déjà le paysage. Inutile de l'ajouter.

M. le Ministre - Même avis.

L'amendement 494, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Claude Jacquot - Il faut tenir compte des tempêtes passées mais aussi de celles qui pourraient venir, selon les études des scientifiques, notamment pour le choix des essences. C'est l'objet de mon amendement 395.

M. le Rapporteur - La commission, reconnaissant la pertinence de l'argument, l'a adopté ainsi que l'amendement identique 190.

M. le Ministre - Une très grande pertinence en effet. Si je ne suis pas toujours convaincu par les prévisions sur le réchauffement, celles qui concernent la multiplication des accidents climatiques dans l'hémisphère nord me semblent sérieuses. Je suis donc très favorable.

M. Pierre Micaux - Soit, mais qu'est-ce que cela signifie exactement ? Que fera-t-on en ce sens pour les petits propriétaires comme pour les collectivités locales ?

Les amendements identiques 190 et 395, mis aux voix, sont adoptés.

M. Maurice Adevah-Poeuf - J'ai voté l'amendement précédent non sans avoir le sentiment qu'on cherche à prévoir l'imprévisible...

A mes yeux, la politique forestière ne concerne pas que la forêt, mais elle doit « veiller à une bonne répartition des terres entre les productions agricoles, la forêt, les espaces de nature, les espaces de loisirs et les espaces habités ». D'où mon amendement 495.

M. le Rapporteur - La commission l'a repoussé. La loi sur la forêt ne peut inclure tous les domaines. L'article L. 126-1 du code rural répond déjà à cet objectif.

M. le Ministre - Même avis.

L'amendement 495, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 191 a une portée symbolique. Le code de 1827 parle d'une forêt « soumise au régime forestier ». Faisons en sorte que notre forêt ne soit plus soumise en écrivant qu'elle « relève » du code...

L'amendement 191, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 192 prévoit que la politique forestière développe, de façon volontariste, les conditions favorables au regroupement technique et économique des propriétaires forestiers et encourage l'organisation interprofessionnelle. Le volontarisme s'impose car le morcellement de la propriété privée fait obstacle à une bonne gestion de la forêt.

M. Pierre Micaux - Je retire l'amendement 137 mais je pense qu'on peut nous associer à la signature de celui qu'a adopté la commission.

M. le Président - Nous considérons donc que l'amendement 137 de MM. Micaux, Vannson et Sauvadet, l'amendement 563 de M. Gatignol et l'amendement 602 de M. Michel Bouvard sont retirés et que leurs auteurs demeurent cosignataires de l'amendement 192.

M. Jean Proriol - Il faut faciliter le regroupement technique et économique de la propriété -plutôt que des propriétaires. Mais est-ce une nouvelle façon d'agiter le chiffon rouge du remembrement ? Il est encore plus délicat en forêt qu'en agriculture.

M. François Guillaume - Distinguons bien entre le regroupement parcellaire, que la catastrophe de décembre a rendu plus facile, et le regroupement des propriétaires pour mieux valoriser leurs produits et mieux gérer techniquement leurs forêts. Il existe déjà un centre spécialisé dans cette gestion collective, qui fonctionne bien.

M. le Ministre - Vous avez raison, je me plais à le souligner. Nous traitons ici du regroupement des propriétaires désireux de gérer en commun, pas de celui des propriétés. Le Gouvernement est favorable aux amendements, et plus spécialement à celui du rapporteur.

M. le Rapporteur - Le regroupement des propriétaires est un outil mis au service d'une démarche volontariste.

L'amendement 192, mis aux voix, est adopté à l'unanimité.

M. François Vannson - Notre amendement 140 tend à renforcer la multifonctionnalité de la forêt. Nous proposons que des mesures incitatives et contractuelles aident à réaliser certains travaux. Ce dispositif va dans le sens des engagements pris par la France en 1993 à la conférence d'Helsinki.

M. le Président - Les amendements 564 et 605 sont identiques au 140.

M. le Rapporteur - Avis défavorable, car vous avez satisfaction. En effet le respect des principes de gestion durable ouvre droit à des fonds publics, tout comme la conclusion d'une charte de territoire forestier, dont traite l'article L. 12.

M. le Ministre - Même avis.

M. Pierre Micaux - Cet amendement est en apparence presque anodin. Mais il pose une question de fond : quelle est la politique financière et fiscale envisagée par le Gouvernement pour garantir la pérennité de la forêt ? Je sais bien que le Fonds forestier national, que vous budgétisez, est doté de 520 millions, soit 190 millions de plus que l'an dernier. Mais M. Bianco, dans son excellent rapport, demande 100 millions par an pendant 10 ans. Que comptez-vous faire ?

M. Jean Proriol - Combien le ministre a-t-il dans la poche ?

M. le Ministre - Ce n'est jamais que l'argent du contribuable ! Le Gouvernement a prouvé cette année qu'il était décidé à consentir un effort important en faveur de la forêt. Il le maintiendra. Mais il est constitutionnellement impossible de faire figurer dans la loi des engagements financiers pluriannuels. L'annualité budgétaire s'oppose sur ce point à la démarche de programmation. Sur l'idée d'accorder des contreparties, nous reviendrons à l'article L. 12.

M. le Rapporteur - Au cours de la discussion budgétaire, j'ai employé la formule « Banco pour le milliard Bianco ! ». De façon plus générale, il serait souhaitable d'y voir plus clair dans les crédits affectés à la forêt, certaines lignes budgétaires n'étant parfois pas utilisées.

Les amendements 140, 564 et 605, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Rapporteur - L'amendement 193 a trait aux contraintes naturelles d'exploitation supportées par les forêts méditerranéennes et de montagne.

M. le Ministre - Avis très favorable.

L'amendement 193, mis aux voix, est adopté.

M. François Vannson - L'amendement 154 est défendu.

M. le Président - L'amendement 606 est identique.

M. le Rapporteur - D'accord pour les forêts linéaires.

M. le Ministre - Sagesse.

Les amendements 154 et 606, mis aux voix, sont adoptés.

M. François Vannson - L'amendement 538 est défendu.

L'amendement 538, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - Notre amendement 194 énonce peut-être une évidence, mais la commission unanime a souhaité qu'elle figure dans la loi. A l'heure de la nouvelle économie, n'oublions pas que certaines activités s'inscrivent dans un cycle très long. Et cela demeurera, quelle que soit la mode.

M. le Ministre - Très bien !

M. Pierre Micaux - L'amendement 139 est défendu.

M. le Rapporteur - Rejet.

M. le Ministre - Rejet également.

L'amendement 194, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - Les amendements 139 et 603 tombent.

M. François Vannson - L'amendement 136 est défendu.

M. le Président - L'amendement 604 est identique.

M. le Rapporteur - Avis défavorable car l'amendement 195 de la commission qui fait référence à la cohérence nationale, donne satisfaction aux auteurs des amendements.

M. le Ministre - Même avis.

Les amendements 136 et 604, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

Article L. 2 du code forestier

M. le Rapporteur - Je viens de présenter l'amendement 195.

M. le Ministre - Avis favorable.

M. Patrice Carvalho - L'amendement 195 a été adopté par la commission à l'initiative du groupe communiste, qui souhaitait souligner le rôle dévolu à l'Etat en matière forestière. Les contrats passés par les collectivités territoriales avec l'Etat doivent l'être dans le respect d'une gestion équilibrée sur l'ensemble du territoire.

L'amendement 195, mis aux voix, est adopté.

M. Jean Proriol - Le ministre nous a dit tout à l'heure qu'il ne pouvait pas s'engager budgétairement au-delà d'un an mais le Gouvernement peut tout de même s'engager, comme je propose de l'écrire dans l'amendement 448, à ce que les crédits du Fonds forestier national soient affectés à la mise en _uvre de la stratégie forestière. Cet engagement ne porte pas sur un montant précis, lequel dépendra de ce que voudra bien verser Bercy, mais au moins serait-il écrit que le Fonds forestier national assurera le coût de la « gestion durable » dont nous parlions précédemment.

M. le Rapporteur - La suppression de la taxe alimentant le FFN est une bonne chose et chacun l'a reconnu. Pour autant, certains considèrent la budgétisation comme une menace, même si cette année, elle s'est soldée par un abondement des fonds. Je crois que nous pouvons compter sur la vigilance du Parlement pour que les années suivantes ne soient pas décevantes. Cette vigilance me semble en tout cas une meilleure garantie qu'une taxe prélevée sur un compte spécial, qui peut se réduire à peu de chose.

Cela étant, la commission a repoussé cet amendement car le Conseil supérieur de la forêt sera là, lui aussi, pour veiller à la bonne utilisation de la ligne budgétaire FFN.

M. le Ministre - Même avis.

M. Jean Proriol - Je ne puis m'en remettre à la vigilance d'un Conseil supérieur de la forêt. La meilleure vigilance, c'est tout de même bien celle que nous exerçons sur le budget. Il dépend aujourd'hui de nous d'engager le FFN dans la mise en _uvre de la stratégie forestière, faisons-le.

M. le Rapporteur - J'ai moi-même parlé de double vigilance et cité en premier celle du Parlement, le Conseil supérieur de la forêt constituant en quelque sorte une deuxième version. Je vous renvoie donc à l'amendement 196 de la commission qui dit que le Conseil supérieur de la forêt est associé au suivi des actions du FFN.

M. le Ministre - Cet amendement me gêne, d'une part car il n'y a plus de compte spécial du Trésor affecté au FFN mais une ligne budgétaire, par nature soumise au contrôle du Parlement, d'autre part, parce que c'est une lapalissade d'écrire que les crédits du FFN sont affectés à la mise en _uvre de la stratégie forestière. A quoi d'autre pourraient-ils servir ? Vous craignez qu'ils baissent, soit, mais jugez le Gouvernement sur ses actes : ils ont augmenté en 2000. Faites-moi donc confiance pour 2001 !

L'amendement 448, mis aux voix, n'est pas adopté.

Article L. 3 du code forestier

M. le Rapporteur - Nous en arrivons à l'amendement que j'évoquais il y a quelques instants, le 196 rectifié, qui précise qualitativement et quantitativement les contours du Conseil supérieur de la forêt. Nous souhaitons que les représentants de l'ensemble de la filière puissent y siéger, nous lui confions des missions de recherche et de suivi du FFN, et nous créons un comité de politique forestière qui, composé d'une vingtaine de membres seulement, en constitue en quelque sorte le bureau.

M. le Ministre - Favorable.

M. Patrice Carvalho - Notre sous-amendement 637 tend à ce que, chaque année, ce conseil remette au Gouvernement et au Parlement un bilan des résultats économiques, sociaux et de création d'emplois dans le champ de la filière bois. Je précise que nous sommes cosignataires de l'amendement 196 rectifié.

M. le Rapporteur - La commission n'a pas adopté ce sous-amendement car l'amendement 196 rectifié dit déjà que le conseil -dans lequel siégeront des représentants des organisations syndicales de salariés- concourt à l'évaluation du rôle économique, social et environnemental des activités liées à la forêt. Il n'y a pas lieu de décliner toutes les façons de procéder à cette évaluation.

M. le Ministre - Sagesse.

Le sous-amendement 637, mis aux voix, est adopté.

M. Claude Jacquot - Je retire le sous-amendement 552.

M. François Guillaume - Je suis gêné par la composition, très élargie par rapport au texte initial du projet, de ce conseil. Elargie et imprécise, puisque l'on ne sait même pas si c'est un décret qui la fixera. Je crains que les représentants de ceux qui ont vraiment quelque chose à dire en matière forestière soient réduits à la portion congrue, comme dans le fameux pâté d'alouette.

M. Patrice Carvalho - Vous pouvez préciser ?

M. le Rapporteur - Je pense que M. Guillaume fait allusion à la biodiversité, si précieuse pour la forêt...

Pour tous les articles du code forestier que cet article premier tend à modifier, c'est par décret que seront fixées les précisions de détail.

L'amendement 196 rectifié, sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

M. Didier Julia - Les conseils d'orientations des forêts publiques permettent aux élus locaux, aux associations de défense de l'environnement et aux représentants des usagers de se réunir.

Mon amendement 383 vise à créer de tels conseils au niveau régional.

M. le Rapporteur - Avis défavorable. Il existe déjà des commissions régionales.

M. le Ministre - Même avis.

M. Didier Julia - Les commissions régionales ne sont composées que d'élus régionaux. Les usagers et les défenseurs de l'environnement n'y siègent pas.

L'amendement 383, mis aux voix, n'est pas adopté.

Après l'article L. 3 du code forestier

M. Pierre Ducout - L'amendement 432 est défendu.

L'amendement 432, mis aux voix, n'est pas adopté.

Article L. 4 du code forestier

Mme Marie-Hélène Aubert - Mon amendement 657 vise à préciser que « des orientations régionales forestières traduisant les objectifs définis à l'article L.1 sont élaborées par les commissions régionales de la forêt et des produits forestiers, comprenant notamment des représentants des conseils généraux, et arrêtées par les ministres chargés de la forêt et de l'environnement après avis des conseils régionaux ».

Il s'agit de préciser que ces choix sont faits sous la tutelle du ministère de l'agriculture mais aussi de celui de l'environnement.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé cet amendement, car il appartient au Gouvernement de définir qui, en son sein, est en charge de la forêt.

La rédaction actuelle de l'article est plus satisfaisante.

M. le Ministre - Ne provoquons pas de conflits de compétences entre les ministères. Les commissions seront présidées par le préfet, qui est le représentant de l'Etat, c'est-à-dire de l'ensemble des ministères. D'ailleurs, la forêt concerne de nombreux ministères.

M. Patrice Carvalho - Le tourisme, les transports...

M. le Ministre - Je souhaite le retrait de cet amendement.

Mme Marie-Hélène Aubert - Ne doutant pas que le ministre ait la volonté de se concerter avec sa collègue de l'environnement, je retire mon amendement.

M. le Rapporteur - L'amendement 197 de la commission est rédactionnel.

L'amendement 197, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Claude Jacquot - Mon amendement 396 vise à modifier le nom des commissions régionales, qui doivent être en charge « de la forêt, des produits forestiers et du bois ».

M. le Rapporteur - Avis défavorable. Le bois est un produit forestier.

M. le Ministre - Même avis.

L'amendement 396, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - On reprochera sans doute à la commission de vouloir élargir la composition de plusieurs organismes. Son amendement 198 vise à autoriser une représentation des conseils généraux au sein de la commission régionale -laquelle, contrairement à ce qui a été dit, n'est pas composée que d'élus locaux.

Les conseils généraux sont des partenaires naturels de la politique forestière. Ils doivent participer à l'élaboration des chartes de territoire.

M. le Ministre - Pour la première fois et, je l'espère, la dernière, j'ai le cruel devoir de demander le rejet d'un amendement défendu par le rapporteur. La composition des commissions régionales sera fixée par voie réglementaire. On ne peut déroger à ce principe pour les seuls conseillers généraux.

M. François Guillaume - Notre rapporteur a oublié un argument : les conseils généraux peuvent apporter des financements complémentaires.

M. le Rapporteur - Je note que le ministre n'est en désaccord avec moi que pour des raisons de forme. S'il prend l'engagement de ne pas oublier les conseils généraux dans les textes réglementaires, je retire mon amendement.

M. le Ministre - L'engagement est pris.

M. Pierre Micaux - Mon amendement 135 est défendu.

L'amendement 135, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean Proriol - Mon amendement 447 vise à substituer au terme de « schéma », qui prête à confusion avec ces « schémas de services collectifs des espaces naturels et ruraux » que nous attendons toujours, le terme plus large de « référentiel ».

Les amendement 141 et 608 corrigé sont identiques au mien.

M. le Rapporteur - Même si le mot « schéma » est très utilisé, la commission n'en a pas cherché d'autres. Il a en tout cas un sens plus large que le mot « référentiel ». Avis défavorable.

Les amendements 447, 141 et 608 corrigé, repoussés par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Joseph Parrenin - Mon amendement 391 vise à faire participer l'office national des forêts à la définition des stratégies forestières.

M. le Rapporteur - Avis défavorable. Il appartient au ministre de préciser les missions de l'ONF.

L'amendement 391, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - Ces amendements 199 et 200 de la commission sont rédactionnels.

L'amendement 199, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté, de même que l'amendement 200.

Article L. 5 du code forestier

M. le Rapporteur - L'amendement 201 rectifié de la commission vise à préciser les droits et les devoirs des propriétaires forestiers, qui sont responsables du boisement, de l'aménagement et de l'entretien de leur propriété.

M. le Ministre - Tout en comprenant le souci du rapporteur, je suis extrêmement réservé, voire hostile, à cet amendement. Celui-ci conduirait en effet à imposer à tous les propriétaires forestiers d'assurer la valorisation économique de leurs bois, leur ôtant la possibilité d'en privilégier une autre fonction. Encourager cette valorisation, oui, mais l'imposer, non ! Certains copropriétaires possèdent des parcelles de forêt ayant pour seule fonction par exemple de les protéger du bruit. L'injonction préconisée serait d'ailleurs sans doute contraire à la Constitution.

J'invite donc le rapporteur à retirer cet amendement. A défaut, j'en demanderai le rejet.

M. François Guillaume - Je partage l'avis du ministre dont je note qu'il est plus libéral que la majorité ! Je n'ajouterai qu'un argument à ceux qu'il a développés. Comment pourrait-on obliger aujourd'hui les 300 000 petits propriétaires forestiers que compte notre pays à reboiser à grands frais alors même qu'ils ont perdu toute leur récolte ?

M. le Rapporteur - Le texte du Gouvernement indique que le propriétaire doit réaliser le boisement, l'aménagement et l'entretien de ses bois « conformément à une sage gestion économique ». Qu'entend-on exactement par là ? Est-ce si différent de la « valorisation économique » que nous préconisons ?

M. Jean Proriol - Je rejoins tout à fait le ministre dont j'apprécie le libéralisme. Je regrette d'ailleurs qu'il ait refusé tout à l'heure le terme « référentiel » qui relève moins de la prescription que celui de « schéma ». Imposer à un propriétaire forestier de valoriser ses bois soulèverait par ailleurs assurément un problème de constitutionnalité.

M. Pierre Ducout - L'article L.1 indique que la politique forestière prend en compte les fonctions économique, environnementale et sociale des forêts et enjoint déjà de donner la priorité à la valorisation économique. Mais il est des forêts qui ont un rôle exclusif de protection. Il faut en tenir compte et parvenir à une rédaction satisfaisante pour tous.

M. le Rapporteur - Je ne veux pas déduire de tout ce qui vient d'être dit qu'une « sage gestion économique » serait une gestion libérale !

Pour l'heure, j'accepte de retirer l'amendement en espérant que nous pourrons nous accorder sur une nouvelle rédaction en cours des navettes.

L'amendement 201 rectifié est retiré.

M. Maurice Adevah-Poeuf - L'amendement 496 tend à substituer aux mots « l'équilibre forestier » les mots « la diversité biologique ». Le concept serait plus approprié, d'autant que l'on parle plus haut dans le texte de biodiversité.

M. le Rapporteur - Avis défavorable. Le texte évoque en effet auparavant la biodiversité mais précisément la notion d'équilibre biologique vient en complément.

M. le Ministre - Même avis.

L'amendement 496, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Joseph Parrenin - Mon amendement 387 tend ajouter après les mots « l'entretien » les mots « les prélèvements ». Une forêt vivante, contrairement à ce que certains semblent penser, est en effet une forêt sur laquelle sont régulièrement opérés des prélèvements.

M. le Rapporteur - La commission avait repoussé cet amendement, estimant que l'objet en était repris dans son propre amendement 201 rectifié. Mais celui-ci ayant été retiré, j'y suis maintenant favorable.

M. le Ministre - J'y serais, pour ma part, plutôt opposé car entretien suppose prélèvement. Je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.

L'amendement 387, mis aux voix, est adopté.

M. François Vannson - L'amendement 134 tend à ajoute après les mots « et l'entretien » les mots « en vue d'en assurer la rentabilité ». En effet, sans rentabilité, point de gestion durable de la forêt possible ! D'ailleurs, les lois du 6 août 1963 et du 4 décembre 1985 intégraient déjà cette notion.

M. le Rapporteur - Alors que je préconisais tout à l'heure la valorisation économique, le Gouvernement et l'opposition m'ont objecté qu'une telle injonction n'était pas possible. Je suis donc défavorable à cet amendement.

M. le Ministre - Je me félicite de l'occasion qui m'est donnée de m'absoudre du procès en libéralisme que certains voudraient m'intenter.

Nous en étions d'accord tout à l'heure, la valorisation économique des forêts ne peut être rendue obligatoire : il y va du respect de principes constitutionnels. Et voilà que maintenant par cet amendement, vous feriez de la rentabilité économique le seul critère de gestion de la forêt. Vous n'êtes pas cohérents. Je vous invite à retirer cet amendement.

M. François Guillaume - Nous souhaitons seulement insister sur la nécessité de ne pas négliger la rentabilité, sans laquelle il n'est point de salut pour la forêt.

L'amendement 134, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Maurice Adevah-Poeuf - L'amendement 497 tend à compléter le dernier alinéa par les mots « écologique et paysagère ». Pourquoi en effet ne pas inciter aussi les propriétaires à une telle gestion ?

M. Pierre Ducout - Certaines forêts ont un rôle exclusif. Dans les Landes, les forêts artificielles de pins ont une fonction presque exclusivement économique, même si elles jouent aussi un rôle cynégétique. Dans tous les cas il faudra rédiger correctement cet article L.5 pour permettre ces trois rôles, tout en sachant, c'est vrai, que la propriété privée a une vocation économique et de rentabilité.

M. le Rapporteur - A l'article L.5, la première phrase donne des indications sur l'aspect écologique et environnemental, et la deuxième sur l'aspect économique, de sorte que chaque fois il manque un aspect. Mais l'article pris globalement est suffisamment parlant ; la commission a donc repoussé l'amendement pour ne pas allonger ce texte.

M. le Ministre - Même avis.

L'amendement 497, mis aux voix, n'est pas adopté.

Article L. 6 du code forestier

M. le Rapporteur - Les amendements 202,203 et 204 sont rédactionnels.

M. le Ministre - Favorable.

L'amendement 202, mis aux voix, est adopté, de même que les amendements 203 et 204.

M. le Rapporteur - L'amendement 205 rectifié précise quels sont les documents de gestion dont il est question.

M. François Vannson - L'amendement 142 corrigé a le même objet.

M. le Rapporteur - La commission préfère sa propre rédaction.

M. le Ministre - Même avis.

L'amendement 205 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. Pierre Micaux - L'amendement 146 est défendu.

M. le Rapporteur - La commission préfère l'amendement 206, qui traduit la même préoccupation : favoriser l'appel à des gestionnaires en commun.

M. le Ministre - Je ne suis pas très favorable à ces amendements. Obliger les propriétaires de plusieurs parcelles à faire appel à un gestionnaire en commun serait une contrainte supplémentaire ; elle rendrait peu attractif ce type de regroupement, que le Gouvernement souhaite encourager.

M. Jean Proriol - Je souhaite à nouveau épauler M. le ministre, si besoin est. Il a bien compris que la forêt n'admet pas les contraintes. Nous avons peut-être eu tort de voter cet amendement en commission, sous l'effet du charme et de la conviction de notre rapporteur. Je reviens pour ma part sur ce vote : laissons les propriétaires choisir leur gestionnaire.

M. le Rapporteur - Nous avons tout de même en commun, Monsieur le ministre, le souci de faire que la propriété forestière morcelée fasse appel de plus en plus à la gestion en commun. Je propose de rectifier l'amendement 206 en remplaçant « est réalisée » par « peut être réalisée ». A quoi bon l'écrire, dira-t-on ? Pour être incitatifs, donner une direction en faveur de la gestion en commun des petites parcelles.

Mme Marie-Hélène Aubert - Je regrette cette rectification. Elle fait de l'amendement une simple recommandation sans grande portée. On ne peut à la fois déplorer le morcellement des propriétés et ne rien faire pour développer la gestion en commun. J'aurais plus volontiers soutenu l'amendement 206 initial tendant à imposer cette gestion, d'autant qu'il y a des aides publiques en jeu.

M. le Ministre - Ici encore nous sommes dans un débat entre incitation et obligation. L'obligation n'est pas une bonne chose. Les coopératives, notamment, ne la souhaitent pas, mais elles souhaitent une incitation. Et celle-ci doit être forte. Dans la circulaire que nous préparons sur la reconstitution des forêts après la tempête, des prêts à taux bonifiés seront réservés à ceux qui se regroupent : voilà de l'incitation. Si j'étais opposé à l'amendement 206, je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée sur sa version rectifiée.

M. François Vannson - Je retire l'amendement 146.

L'amendement 206 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 207 de la commission prévoit l'accès du public, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat, aux documents de gestion des forêts bénéficiant d'une aide publique. Mais je le retire, car le Gouvernement a déposé un amendement 691 qui semble régler la question.

M. le Ministre - Il précise en effet que les directives et les schémas visés au deuxième alinéa de l'article L. 4, ainsi que les documents d'aménagement des forêts relevant de l'article L.111-1, sont consultables par le public.

M. Maurice Adevah-Poeuf - Chacun sera d'accord pour la transparence. Mais l'amendement qui vient d'être retiré avait le mérite d'organiser cette transparence en renvoyant le dispositif à un décret en Conseil d'Etat. L'amendement du Gouvernement introduit un principe sans en préciser les modalités. D'autre part les deux amendements ont un inconvénient commun : ils ne visent que les forêts privées. Pourquoi l'obligation de transparence ne s'appliquerait-elle pas aux forêts publiques ?

M. le Rapporteur - Rassurez-vous : l'article L.111-1, ce sont les forêts publiques.

Mme Marie-Hélène Aubert - En commission, nous avions défendu un amendement tendant à établir la transparence et la possibilité de consultation des documents par le public, notamment pour les propriétés qui bénéficient d'une aide publique. Nous l'avions retiré au profit de l'amendement 207 du rapporteur, que nous avons cosigné. Et voici que ce dernier est retiré... J'ai l'impression d'un tour de passe-passe. Car le 691 du Gouvernement ne dit pas exactement la même chose. Il indique que les directives et schémas sont consultables par le public, mais ils le sont de fait. En revanche, l'amendement 207 précisait que le public, et notamment les associations, pouvaient, dans le cas des propriétés bénéficiant d'une aide publique, s'assurer de la façon dont les parties techniques et sylvicoles des documents correspondent à cette aide. Nous avions accepté qu'un décret en Conseil d'Etat définisse les conditions de cet accès. Au total, l'amendement 207 nous semble bien préférable.

M. Pierre Micaux - Je pourrai voter l'amendement du Gouvernement ; il est normal qu'il puisse contrôler ce qu'il décide. En revanche, l'amendement du rapporteur, en prévoyant d'afficher les aides publiques reçues par chacun, frôle la démagogie.

M. le Président - Je rappelle qu'il est retiré.

M. le Ministre - Il n'y a là aucune man_uvre. Le Gouvernement veut plus de transparence, sans aller jusqu'à ce que demande Mme Aubert. Il faut rendre accessibles les documents d'aménagement, mais les documents de gestion sont de nature privée. Les propriétaires ne veulent absolument pas qu'on les mette sur la place publique. De toute façon, c'est aux collectivités à vérifier l'usage des fonds qu'elles allouent, pas au public. Notre souci est de compromis.

M. le Rapporteur - L'argument du ministre est sage et m'a convaincu de retirer l'amendement 207.

En outre, Madame Aubert, il est apparu difficile de dissocier les aspects techniques et les aspects financiers des documents de gestion.

M. le Président - M. Adevah-Poeuf souhaiterait que les documents soient consultables dans les mairies des communes concernées. Souhaitez-vous rectifier l'amendement en ce sens ?

M. le Rapporteur - J'y suis défavorable. N'entrons pas dans le détail des modalités. Le décret le précisera.

M. Maurice Adevah-Poeuf - On aurait dû conserver le décret en Conseil d'Etat prévu à l'amendement 207.

L'amendement 691, mis aux voix, est adopté.

Après l'article L. 6 du code forestier

M. Pierre Micaux - J'ai déjà développé le contenu de l'amendement 64 relatif à la politique fiscale. Il serait bon que Monsieur le ministre précise sa position.

M. le Rapporteur - La commission l'a repoussé. C'est au conseil supérieur de la forêt que le ministre rendra compte de tous ces problèmes.

M. le Ministre - Même avis.

L'amendement 64, mis aux voix, n'est pas adopté.

Article L. 7 du code forestier

M. Jean Proriol - Prévoir dans la loi le principe absolu que les aides publiques doivent être exclusivement réservées aux propriétaires présentant les garanties légales de gestion durable, au lieu de la priorité actuelle, conduira à exclure brutalement des aides publiques 98 % des propriétaires privés de moins de 25 ha, possédant les ¾ de la forêt privée, qui n'ont pas de plan simple de gestion, alors que leur forêt est très généralement gérée de façon durable.

Mon amendement 445 et l'amendement identique 133 de M. Micaux remplacent « exclusivement » par « prioritairement ». Le ministre peut-il dire ce qu'il en sera des aides solennellement promises aux propriétaires sinistrés par la tempête de décembre 1999 ?

M. le Rapporteur - Il faut dissocier ces deux aspects. La loi d'orientation privilégie le développement durable, auquel iront les fonds publics. La commission a donc rejeté l'amendement. Mais en ce qui concerne l'aspect conjoncturel -les effets de la tempête- c'est au ministre à répondre à votre question.

M. le Ministre - Même avis que le rapporteur sur l'amendement. Sur le problème que vous soulevez, Monsieur Proriol, nous verrons ensemble ce qu'il en est.

Les amendements identiques 133 et 445, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Patrice Carvalho - Pour créer 100 000 emplois dans la filière bois, objectif jugé possible par le rapport Bianco, il faut mettre en place une stratégie dynamique. La puissance publique doit l'affirmer de façon volontariste. Notre amendement 622 inscrit l'objectif d'emploi à l'article 7 .

M. le Rapporteur - Rejet. Nous avons affirmé ce principe à l'article 1. Ce serait redondant.

M. le Ministre - De plus, la forêt crée surtout des emplois indirects. Conditionner les aides à la création d'emplois directs serait inefficace. Rejet.

L'amendement 622, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - A l'initiative de M. Marchand et de Mme Aubert, la commission a adopté l'amendement 208 qui porte de 15 à 30 ans -durée qui figure actuellement dans le code forestier- l'interdiction de démembrer des parcelles éligibles à certaines aides publiques.

M. le Ministre - J'y suis opposé. Ce délai est excessif.

Mme Marie-Hélène Aubert - Trente ans, c'est le cycle naturel de la forêt. Pourquoi passer à quinze ans ?

M. le Ministre - Nous donnons la priorité à une valorisation économique de la forêt. Un délai aussi long fait obstacle à la fluidité du marché.

M. le Président - M. Proriol veut venir en aide au ministre...

M. le Ministre - Vous allez finir par me compromettre !

M. Jean Proriol - Le ministre a raison. Il faut plus de souplesse pour pouvoir saisir les occasions sur le marché. Je n'irai pas jusqu'à accuser le ministre de libéralisme, mais il a bien compris ce besoin.

M. le Rapporteur - Cela ne bloquerait en rien la vente du bois. Ce que nous voulons, c'est lutter contre le morcellement des parcelles.

L'amendement 208, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - Les amendements 35, 143, 444 et 613 tombent.

Mme Marie-Hélène Aubert - Notre amendement 209 tend à moduler les aides publiques en fonction des caractères particuliers des différentes forêts, en particulier méditerranéenne et de montagne.

M. le Rapporteur - Avis favorable.

M. le Ministre - Je suis très réservé. Je comprends qu'il faille tirer les conséquences concrètes de la situation de certaines forêts. Mais cette préoccupation relève de la circulaire et d'appréciations locales. Restons-en à une gestion déconcentrée et de nature réglementaire.

L'amendement 209, mis aux voix, est adopté.

M. Jean Proriol - La loi de finances pour 2000 a supprimé le Fonds forestier national en tant que compte d'affectation spéciale. Soit. Mais l'article 37 tend en outre à abroger l'article 531-2 du code forestier, qui définit l'objet de ce fonds.

Il n'est pas acceptable de retirer de la loi des dispositions relatives au financement de la politique forestière et aux actions ainsi subventionnées. Il convient au contraire de garantir à la politique forestière un financement stable, conformément aux principes adoptés en 1993 à la conférence d'Helsinki.

Au demeurant, la disposition proposée par l'amendement 446 n'engage en rien le Gouvernement sur le montant de la ligne budgétaire correspondant désormais au FFN.

M. le Rapporteur - Avis défavorable. Un amendement adopté à l'article L. 3 relatif au Conseil supérieur de la forêt vous donne satisfaction.

M. le Ministre - Même avis que la commission.

L'amendement 446, mis aux voix, n'est pas adopté.

Article L. 8 du code forestier

Mme Marie-Hélène Aubert - Nous jugeons opportun de rappeler, par l'amendement 658, les engagements pris par la France à Helsinki. Nous devons veiller à articuler les orientations du projet avec nos engagements internationaux.

M. le Rapporteur - Avis défavorable. Nous avons posé à l'article L. 1 les principes de la gestion durable. Préciser davantage paraît excessif.

M. le Ministre - C'est aussi mon avis.

L'amendement 658, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Marie-Hélène Aubert - L'amendement 659 est analogue au précédent.

L'amendement 659, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Mme Marie-Hélène Aubert - Nous souhaitons, par l'amendement 660, supprimer la référence au code de bonne conduite sylvicole, qui n'a aucune consistance. Puisqu'il s'agit de bénéficier d'aides publiques, il convient de définir des conditions précises sans se limiter à des v_ux pieux.

M. le Rapporteur - Avis défavorable. Ces codes de bonne pratique sylvicole ont une vertu pédagogique, et font partie des instruments reconnus au niveau international.

De plus, votre préoccupation est prise en compte par les dispositions de l'amendement 210 de la commission, qui fixe une double condition : adhérer au code de bonnes pratiques, adhérer aussi à un organisme agréé de gestion technique et économique en commun.

M. le Ministre - Même avis défavorable.

L'amendement 660, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - Je viens d'exposer le contenu de l'amendement 210. L'amendement 211, lui, est rédactionnel.

M. le Ministre - S'agissant de l'amendement 210, le 2° de l'article L. 6 tend à inciter les petits propriétaires à adhérer pour dix ans à un code de bonnes pratiques, lequel est la traduction directe d'un engagement international. Ajouter une contrainte supplémentaire telle que l'adhésion à un organisme agréé de gestion en commun risque d'avoir un effet décourageant. Le mieux étant l'ennemi du bien, je suis défavorable à l'amendement 210, mais très favorable à l'amendement 211.

Les amendements 210 et 211, successivement mis aux voix, sont adoptés.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce soir à 21 heures.

La séance est levée à 19 heures 30.

                      Le Directeur du service
                      des comptes rendus analytiques,

                      Jacques BOUFFIER


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