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Session ordinaire de 1999-2000 - 96ème jour de séance, 222ème séance

1ère SÉANCE DU MARDI 13 JUIN 2000

PRÉSIDENCE de Mme Nicole CATALA

vice-présidente

Sommaire

          DÉSIGNATION DE CANDIDATS
          À UN ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE 2

          RÉUNION D'UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE 2

          POLLUTION PAR LES NAVIRES 2

          ARTICLE PREMIER 17

          APRÈS L'ART. 4 19

          ART. 5 20

          EXPLICATIONS DE VOTE 20

          FIXATION DE L'ORDRE DU JOUR 21

          A N N E X E ORDRE DU JOUR 23

La séance est ouverte à neuf heures.

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DÉSIGNATION DE CANDIDATS À UN ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE

Mme la Présidente - J'ai reçu de M. le Premier ministre des demandes de renouvellement des membres de l'Assemblée au sein du comité des finances locales.

Conformément à l'article 26, alinéa 2 du Règlement, j'ai confié à la commission des lois et à la commission des finances le soin de présenter, chacune, un candidat titulaire et un candidat suppléant. Les candidatures devront être remises à la présidence avant le mercredi 21 juin, à 18 heures.

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RÉUNION D'UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE

Mme la Présidente - J'ai reçu de M. le Premier ministre un courrier par lequel il m'informe qu'il a décidé de provoquer la réunion d'une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2000.

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      POLLUTION PAR LES NAVIRES

L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. Gilbert Le Bris et plusieurs de ses collègues modifiant la loi du 5 juillet 1983 réprimant la pollution par les navires.

M. Gilbert Le Bris, rapporteur de la commission de la production - Le 25 mai, une nappe d'hydrocarbures de 300 mètres sur 200 est signalée au large de Toulon, et dite « de provenance inconnue », ce qui signifie qu'elle résulte d'un dégazage sauvage. Le même jour, découverte identique au large de Cherbourg ! Rien d'étonnant à cela puisque, depuis le début de l'année, on a enregistré pas moins de 42 alertes de pollution par hydrocarbures pour la seule Méditerranée, le long du littoral français. Et en une seule semaine de février, une opération « coup de poing » menée par les services de la marine nationale et les douanes à la pointe de la Bretagne a permis de repérer 39 dégazages sauvages. Quant aux CROSS, ils ont répertorié 308 pollutions par dégazage en 1999.

Il suffit d'écouter marins-pêcheurs et plaisanciers, de se promener sur les plages et les zones littorales, d'interroger les associations écologistes pour se rendre compte de l'ampleur du fléau environnemental que constitue le déballastage sauvage, qui souille nos côtes, menace nos ressources halieutiques et contribue au déclin constant de la population ornithologique protégée.

Nous devons donc réagir, et unir nos forces à celles du Gouvernement qui, comme l'a dit M. Gayssot le 1er mars, « veut en finir avec ces comportements scandaleux ». Scandaleux, ils le sont bel et bien car si l'exceptionnel et dramatique naufrage de l'Erika a été favorisé par les négligences, il n'a pas été voulu, et ces pollutions volontaires rejettent sur nos côtes davantage d'hydrocarbures chaque année que ne l'a fait ce pétrolier accidenté.

Nous devons répondre au souhait exprimé par les 577 très jeunes députés réunis en mai au sein du parlement des enfants et qui, en choisissant un texte de lutte contre la pollution de l'eau, ont marqué leur préoccupation face à un environnement dévasté. Nous devons, pour eux, préparer un monde meilleur, dans lequel ressources, écosystèmes et paysages ne subiront plus les effets nocifs de ces atteintes répétées, un monde dans lequel professionnels de la mer, amoureux de la nature et simples promeneurs ne seront plus affectés par ces crimes ordinaires.

Pourquoi ces rejets volontaires en mer ? Bien entendu, des motifs financiers expliquent cette attitude dans un milieu où la recherche du moindre coût est la règle, au détriment, souvent, de la sécurité et de l'environnement. Le coût d'un nettoyage en port est en effet estimé hors de proportion avec celui d'un rejet sauvage, compte tenu du prix demandé et du coût de l'immobilisation du navire. De même, l'obligation de dérouter le bâtiment vers la haute mer pour respecter les normes de la convention de Londres du 2 novembre 1973 est considérée comme une coûteuse perte de temps.

Une opération de déballastage dans un port coûte à peu près deux fois plus cher que l'amende encourue pour un rejet illégal. Et puis, même si le navire est pris sur le fait, un bon avocat, l'absence de pratique de nos tribunaux, la difficulté de recueillir les preuves nécessaires sont autant d'éléments qui concourent à une certaine impunité des contrevenants. Dès lors que le risque d'être sanctionné est considéré comme moindre que la certitude de devoir assumer le coût élevé d'un nettoyage en bonne et due forme, notre système de dissuasion ne peut être considéré comme très efficace. Du reste, les intéressés sont parfois cyniques, à l'instar de ceux qui n'ont pas hésité à déballaster dans le secteur de l'Erika. Il est clair que seule la peur du gendarme et la crainte de sanctions financières réellement dissuasives sont efficaces pour lutter contre les pollutions. Notre proposition vise donc à tripler le montant des amendes encourues, en sorte qu'elles excèdent largement le coût d'un déballastage en port.

Ces dispositions s'appliqueront à tout capitaine de navire français ou étranger navigant dans les eaux intérieures, les eaux territoriales et la zone économique exclusive, en vertu du principe de base, au contenu symbolique fort, qu'il est seul maître à bord. Pour autant, le commandant de bord n'est souvent que le maillon d'une chaîne opérationnelle où l'armateur et le propriétaire ont largement leur part.

Aussi, sans préjudice des sanctions frappant le capitaine, le propriétaire, armateur ou exploitant qui aura donné l'ordre de commettre l'infraction encourra les mêmes peines. En seront également passibles les navires étrangers, même s'ils sont immatriculés dans un territoire relevant d'un Etat non partie à la convention de Londres.

L'aggravation des sanctions n'est pas la seule arme disponible pour lutter contre ces pollutions et le dispositif que nous proposons repose aussi sur la prévention et sur la vérification.

La prévention consiste à mettre à la disposition des navires dans les meilleurs délais les infrastructures portuaires nécessaires pour vidanger les ballasts et traiter les résidus de cargaison. A cet effet, nous avons fait adopter avec mon collègue Le Drian un amendement à l'article 11 du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans les transports. Nous anticipons ainsi sur nos obligations puisque le conseil des ministres européens du 8 novembre 1999 a adopté une position commune en vue de l'adoption d'une directive sur les infrastructures portuaires pour le traitement des déchets d'exploitation des navires et des résidus de cargaison. Il s'agit ainsi d'aller au-delà du dispositif « Marpol 1973-1978 » et de confirmer le principe pollueur-payeur.

La vérification passe par des mesures telles que celles prises par le CIADT du 28 février 2000 de Nantes qui visent à doter les Douanes de deux nouveaux avions équipés d'appareils de télédétection. Elle commence d'être appliquée dans d'autres pays, comme aux Etats-Unis où, à partir d'échantillons prélevés à l'escale, les coast guards parviennent parfois à identifier et à arraisonner les pollueurs. Le principe de vérification a aussi motivé la spécialisation des CROSS, dont celui de Jobourg, qui pourrait devenir le c_ur du dispositif de lutte contre le dégazage dans tout le secteur. La vérification attend aussi beaucoup du progrès technique qui tend à permettre un marquage de plus en plus fin des produits pétroliers et à la définition d'un quasi-ADN du pétrole, ce qui permettra de lever tout doute sur l'identification du navire pollueur.

Mais la nature humaine est ainsi faite que l'on ne pourra jamais se passer de sanctions et notre proposition vise à les rendre dissuasives, en modifiant les lois du 5 juillet 1983 et du 31 mai 1990. Notre démarche est d'ailleurs conforme à l'article 4 de la convention de Londres de 1973 qui stipule que les sanctions prévues par les législations des Etats parties doivent être, par leur rigueur, de nature à décourager les contrevenants éventuels et d'une sévérité égale, quel que soit le lieu de l'infraction.

Permettez-moi enfin de déplorer la complexité du système et la multiplicité des tribunaux devant lesquels sont portées les plaintes relatives à ces infractions : tribunaux du territoire concerné pour les eaux intérieures et territoriales, tribunal du port d'immatriculation dans la zone d'exclusivité économique pour les Français et tribunal de grande instance de Paris pour les étrangers. Bien que Mme Wigar ait avec raison attiré l'attention des Parquets sur la nécessité de réprimer ces délits avec détermination, cette situation concourt à la relative impunité dont jouissent les contrevenants. Dans un but de déconcentration et de simplicité, nous proposons de confier aux chefs-lieux des préfectures maritimes la compétence pour juger de telles infractions : Cherbourg pour la Manche et la Mer du Nord, Brest pour l'Atlantique et Toulon pour la Méditerranée, sans préjudice des prérogatives du TGI de Paris. Notre objectif central est de mettre en place des moyens juridiques adaptés, pour que la répression s'exerce de manière efficace et rapide à l'encontre de ceux qui prennent la mer pour une poubelle et nos côtes pour un dépotoir.

Votre commission de la production a donné un avis tout à fait favorable à cette proposition de loi et je vous demande de la suivre (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement - Ce 12 décembre dernier, le pétrole s'échappait des soutes de l'Erika et venait polluer l'espace marin puis nos côtes de l'Atlantique, causant ainsi un très grave préjudice à l'environnement. Comme les précédents, ce naufrage a marqué les consciences mais l'ampleur de ses conséquences ne saurait faire oublier qu'au quotidien, d'autres navires procèdent sciemment à des dégazages et à des déballastages en pleine mer ou à proximité des côtes.

Il semble même que plusieurs navires aient poursuivi leurs rejets illégaux en mer dans la zone même où l'Erika a sombré et dans les jours qui ont suivi le naufrage.

Ces pratiques sont inacceptables parce qu'elle sont le fruit d'un système qui privilégie la recherche du moindre coût au détriment de l'environnement et qui rogne sur le contrôle et la remise en état des navires ou sur les conditions de travail des marins, au mépris des risques d'accident ; d'un système qui récompense les déballastages en mer qui évitent de passer quelques heures à nettoyer les cuves dans un port.

La convention Marpol de 1973, amendée par le protocole de 1978, fixe les règles en matière de déballastage et la loi du 5 juillet 1983 permet de réprimer les rejets illicites d'hydrocarbures en mer. Mais ce dispositif est insuffisant.

Certains navires ont voulu profiter du naufrage de l'Erika pour déballaster au large des côtes bretonnes en pensant que cela ne se verrait pas. Ce comportement cynique est inacceptable. Aussi avons-nous lancé, avec les moyens des douanes et de la marine nationale, l'opération de surveillance « Rail propre ». Quatre avions de surveillance ont ainsi été engagés sur la zone et, entre le 18 et le 23 février 2000, plus d'une quarantaine de pollutions ont été constatées.

Pour lutter contre cette délinquance écologique, le Gouvernement a décidé, à l'occasion du dernier comité interministériel sur la mer qui s'est tenu à Nantes le 28 février dernier sous la présidence du Premier ministre, de doter la France de nouveaux moyens de surveillance et de soutenir activement l'adoption de la directive européenne obligeant les navires à attester du dépôt de leurs déchets avant de quitter un port de l'Union. Sans attendre cette directive, il a du reste été décidé de renforcer la réglementation française. Le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation communautaire dans le domaine des transports que vous avez dernièrement examiné dans cet hémicycle a fait l'objet d'un amendement en ce sens, déposé par Mme Odile Saugues et MM. Jean-Yves Le Drian et Gilbert Le Bris.

Enfin, la décision d'augmenter de trente postes le nombre des officiers de port et de doubler les inspecteurs de sécurité permettra d'appliquer avec toute la rigueur nécessaire la nouvelle réglementation.

J'ai également demandé que des études soient conduites pour développer des systèmes de contrôle plus efficaces des rejets illicites d'hydrocarbures en mer. Deux solutions peuvent être envisagées à ce stade. Il s'agit d'identifier les produits transportés par marquage, afin d'assurer une parfaite traçabilité de la pollution et l'identification du contrevenant, comme aux Etats-Unis, et de compléter les projets de boîtes noires sur les navires, en prévoyant d'inclure des données sur les déballastages.

Au-delà, il est indispensable de responsabiliser les armateurs et les capitaines et de renforcer notre outil de répression. C'est l'objectif de cette proposition de loi dont le Gouvernement ne peut que souligner l'opportunité et la pertinence. De même qu'il a apprécié l'esprit de responsabilité et d'initiative des élus, des professionnels et des bénévoles, des départements touchés par la pollution de l'Erika, il apprécie le dépôt de ce texte, qui va dans le sens d'une plus grande fermeté à l'égard des pollueurs.

Il prévoit dans ses quatre premiers articles un triplement des amendes encourues et un doublement des peines d'emprisonnement, ce qui de toute évidence renforcera la dissuasion.

L'autre objectif du texte est de désigner des juridictions spécialisées pour ces délits de pollution, afin de rendre les décisions plus rapides.

Enfin, comme le souligne votre rapporteur, ces sanctions seront applicables à tous les navires, même s'ils sont sous pavillon d'un pays qui n'est pas partie à la convention de Londres du 2 novembre 1973.

Notre pays aura les moyens de faire appliquer cette nouvelle législation, puisque la convention des Nations unies sur le droit de la mer signée à Montego-Bay en 1982 permet aux autorités côtières de prendre les mesures visant à la protection du milieu marin.

Le Gouvernement ne peut donc que partager les préoccupations des parlementaires et se réjouir de son inscription à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste).

M. René Leroux - Après l'Amoco-Cadiz, l'Erika... Depuis des semaines, des bénévoles, des pompiers, des militaires, des employés communaux travaillent d'arrache-pied pour nettoyer le littoral et lui redonner sa beauté. Bien sûr, les dommages ne sont pas seulement esthétiques. Ils sont d'abord écologiques : des centaines d'oiseaux sont morts, la faune et la flore sont détériorées. Ils sont aussi économiques : de la pêche et de la conchyliculture à la restauration et à l'hôtellerie, le préjudice est considérable.

Cette marée noire s'explique notamment par la vétusté du navire, par la complaisance d'Etats peu regardants qui tolèrent que des poubelles flottantes sillonnent les mers. Si ce naufrage accidentel soulève, à juste titre, autant de réactions indignées, comment supporter plus longtemps les pollueurs volontaires, ces criminels qui dégazent en pleine mer pour des motifs mercantiles ?

Ces dégazages ou déballastages sauvages sont quotidiens. Certes, la loi du 5 juillet 1983 punit d'une amende pouvant atteindre un million de francs et d'une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à deux ans les capitaines des pétroliers et autres navires qui ont enfreint les règles internationales, et ces peines sont également applicables aux propriétaires des navires ; mais ces sanctions ne sont pas assez dissuasives, comparées au coût d'une vidange organisée dans les ports. Il est donc temps de réagir.

Je peux témoigner, en ma qualité de maire d'une commune particulièrement touchée par la marée noire, La Turballe, de l'effet catastrophique de ces dégazages et déballastages. Toute la semaine dernière, le travail de nettoyage du port, qui a mobilisé 550 militaires, a révélé de nombreuses traces d'hydrocarbures qui ne provenaient pas de l'Erika. Des bateaux de plaisance et des bateaux de pêche se rendent coupables d'infractions lourdes de conséquences. Toutes ces pollutions, relativement limitées en apparence, constituent ensemble un fléau majeur.

Alors que faire ?

D'abord, renforcer le contrôle. Le Gouvernement doit donner aux services des douanes les moyens d'améliorer la surveillance, de détecter les pollutions et surtout d'identifier les pollueurs.

Ensuite, améliorer les capacités portuaires de vidange et faire en sorte que les navires puissent plus facilement accéder aux installations.

Enfin, et c'est l'objet de la proposition que nous étudions aujourd'hui, alourdir les sanctions afin de dissuader les criminels que sont les pollueurs en mer. Le groupe socialiste votera avec conviction ce texte, qui répond aux attentes de nos concitoyens, et notamment des habitants du littoral (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

M. Louis Guédon -C'est le 10 mai dernier que la présidence de l'Assemblée nationale a enregistré cette proposition de loi, cosignée par tous les députés socialistes et apparentés. Pourquoi une telle précipitation, alors que le pays et plus particulièrement le littoral atlantique, est plus traumatisé par les conséquences catastrophiques du naufrage de l'Erika que par les effets condamnables des opérations de dégazage ? Ne semblait-il pas qu'un consensus national s'était constitué autour de ce drame ? N'avons-nous pas vu tous les maires, tous les parlementaires, toutes tendances confondues, dénoncer cette catastrophe écologique et économique et réclamer des mesures de prévention et de justes dédommagements pour les sinistrés ?

Cette brusque solidarité de nombreux députés que nous n'avons jamais vu sur le terrain s'expliquerait si l'opposition n'avait pas assumé ses responsabilités et proposé des mesures appropriées. Mais en septembre 1999, donc avant la catastrophe de l'Erika, Bernard Deflesselles avait déposé, pour accentuer les pénalités à l'endroit des navires coupables de dégazage, une proposition de loi que j'avais cosignée et qui n'a jamais eu l'honneur d'un débat.

Pourquoi débattre de cette question aujourd'hui alors que l'Assemblée a constitué une commission d'enquête qui, par la voix de son rapporteur, Jean-Yves Le Drian, doit dans quelques jours faire connaître ses conclusions sur l'ensemble des problèmes que pose la pollution en mer par les hydrocarbures ?

M. Jean-Pierre Dufau - Ce n'est pas le même thème.

M. Louis Guédon -Nous pensions que le Parlement prendrait le temps de la réflexion et proposerait un plan efficace. Il n'en est rien, et c'est dommage. Vice-président de la commission d'enquête sur la sécurité du transport maritime des produits dangereux et polluants, j'aurais préféré que la majorité montre plus d'égards à l'endroit du Parlement et attende ses propositions, prévues pour le début du mois de juillet.

Il est évident que le groupe RPR votera ce texte. Toutefois, il n'échappe à personne que celui-ci ne répond pas à la première urgence. Quelles que soient les mesures répressives que justifient par exemple les 39 dégazages sauvages enregistrés entre le 18 et le 23 février dernier, la priorité doit être donnée aux grandes catastrophes. Intervenant en pleine crise, ce texte déçoit les Français par sa portée limitée.

Les habitants du littoral savent bien que les naufrages font partie des dangers de la mer, mais ils font la distinction entre la perte des navires, qui ne peut atteindre le risque zéro, et les pollutions inacceptables. Il faut prendre les précautions nécessaires pour transporter des hydrocarbures, comme on le fait pour les produits radioactifs, qui sont transportés en fûts d'acier de 25 centimètres d'épaisseur.

La première des exigences est que le propriétaire d'une cargaison de produits dangereux reste responsable de son bien pendant le transport. Est-il normal de s'en remettre à un fonds d'indemnisation, dont on voit actuellement les limites ? Est-il concevable que des propriétaires de cargaison, dont les bénéfices sont considérables, fassent appel à des pavillons de complaisance pour alléger leurs frais de transport ? L'Assemblée nationale n'aurait-elle pas mérité en priorité un débat sur l'évolution du droit du pavillon et sur celui du port ?

Au moment où la France s'apprête à présider l'Union européenne, ne fallait-il pas proposer à toutes les puissances maritimes européennes une politique efficace ? L'affaire de l'Erika ne relance-t-elle pas l'idée d'une agence maritime européenne, souhaitée par de nombreux professionnels ? Il n'est pas normal, alors que tous les membres de l'Union européenne bénéficient de voies maritimes, que seuls certains d'entre eux supportent le fardeau de leur entretien et soient pénalisés par les accidents qui y surviennent.

Il n'est pas normal que les Etats membres puissent avoir des comportements différents en matière de sécurité et de sanction des infractions, pas normal que ces questions puissent dépendre de facteurs commerciaux.

M. Jean-Pierre Dufau - Cela s'appelle le libéralisme !

M. Louis Guédon - Nos concitoyens du littoral atlantique ne peuvent accepter que la technologie joue le rôle d'un prédateur. On ne saurait se limiter à une déclaration d'intention ; avons-nous suffisamment d'inspecteurs pour assurer les contrôles nécessaires ?

M. le Ministre - On va en doubler le nombre.

M. Louis Guédon - Avons-nous dans nos ports les stations de dégazage indispensables ? Avons-nous les moyens de prouver devant les juridictions la responsabilité des commandants utilisant le procédé que nous sommes unanimes à condamner ?

Pourquoi l'Assemblée nationale donne-t-elle la priorité à ce texte répressif ? Nos concitoyens attendent d'abord qu'on organise la prévention, qu'on prenne des mesures visant à rendre impossibles de nouvelles marées noires. Ne sont-ils pas troublés de voir la majorité proposer un texte dont elle a délaissé l'idée en septembre dernier ? Ne sont-ils pas étonnés de voir que la proposition de loi rapportée par Gilbert Le Bris a été précédée le 30 mai dernier d'amendements comparables, soutenus par Jean-Yves Le Drian ? Quelles sont les chances d'application de ce texte, puisque les dispositions actuelles, moins contraignantes, ne sont pas appliquées ?

L'augmentation des amendes encourues n'est pas la seule voie possible pour lutter contre les dégazages en mer. La gravité de la situation imposait en priorité un débat de fond. Quel doit être le rôle de l'Europe ? Quelle doit être l'évolution du droit du pavillon, du droit du port, de l'OMI ?

Quand la responsabilité des propriétaires de cargaisons de produits dangereux sera-t-elle aussi engagée ? Comment améliorer la conception et le contrôle des navires ? La sagesse n'est-elle pas d'attendre les conclusions de notre commission d'enquête ? On peut s'interroger aussi sur l'application des plans Polmar mer et Polmar terre. Quelle doit être l'attitude d'un pays qui reçoit un message de détresse -même ultérieurement annulé- d'un navire transportant une cargaison dangereuse ? Que penser d'images montrant avec précision la situation d'une nappe de mazout et qui sont démenties lorsque cette dernière touche le littoral ? Que penser des systèmes de pompage existants ? Comment accélérer l'indemnisation des victimes ?

Telles sont quelques-unes des questions primordiales qui auraient dû être au c_ur de nos travaux. Plus que la reprise des termes d'une proposition de loi que nous avions soutenue, elles auraient mérité un vaste débat parlementaire.

Bien entendu le groupe RPR votera ce texte tout en sachant qu'il n'est à la hauteur ni de l'attente des populations, ni de l'ampleur des dangers. Il ne comporte aucune disposition propre à améliorer la prévention, à rendre notre littoral sûr et à protéger l'écosystème marin : c'est regrettable.

Nous formons donc des v_ux pour qu'un consensus permette d'édicter, dans un avenir proche, une réglementation complète, réaliste et constructive afin de protéger les populations maritimes de catastrophes intolérables, inadmissibles et, pour certains, inexcusables (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF).

M. Daniel Paul - La catastrophe de l'Erika, encore présente dans nos esprits, nous est rappelée par les usagers du littoral et par les professionnels, mais aussi par les dommages écologiques et économiques considérables qu'elle a laissés derrière elle. C'est tout un écosystème et un biotope qui sont ainsi victimes de la priorité donnée à la loi du marché. Et nous n'avons pas encore mesuré toutes les conséquences de cette catastrophe écologique mais aussi économique pour tous les professionnels de la mer et du tourisme.

Néanmoins, la solidarité, le courage, la générosité et l'abnégation des habitants du littoral atlantique et de tous ceux qui s'y sont joints, ont permis de limiter la dégradation de notre littoral.

Le transport maritime doit se développer dans le respect des hommes, des mers, des côtes, des faunes et des flores et il est inadmissible que des navires ne remplissant pas les normes, battant pavillon de complaisance, avec des équipages sans droits, continuent de naviguer pour le plus grand profit de quelques armateurs camouflés derrière des sociétés écrans pour échapper aux contrôles et augmenter encore leurs profits. Il est inadmissible que des réglementations insuffisantes ou inappliquées ne permettent pas de mieux lutter contre ces dérives et il serait encore plus inadmissible que nous ne prenions pas les initiatives qui s'imposent.

Le Gouvernement français a agi dès le mois de décembre dernier, en alertant la Commission européenne et les instances maritimes internationales -l'OMI-. Le Parlement a, pour sa part, désigné une commission d'enquête sur la sécurité des transports maritimes qui rendra son rapport dans un mois.

Les transports maritimes sont une jungle imposée par la mondialisation qui va avec la recherche des moindres coûts et le dumping social. Cette situation est, en grande partie, à l'origine de ces catastrophes.

Lutter contre cette logique est indispensable pour assurer la survie de nos activités et des emplois qu'elles représentent. Le présent texte y contribuera.

Les propositions faites à l'OMI et à la Commission européenne, celles que fera la commission d'enquête parlementaire, la transposition de directives européennes dans le domaine des transports : toutes ces initiatives confirment notre volonté de trouver des solutions durables.

Mais nos mers et océans ne souffrent pas uniquement de pollutions pétrolières ou de pollutions provoquées par des naufrages qui restent fort heureusement exceptionnels. Chaque jour, ils sont souillés par des dégazages et déballastages qui polluent gravement l'espace maritime. Selon des informations ministérielles ou européennes, chaque année, la mer Méditerranée reçoit 600 000 tonnes de déchets issus des navires ! Si chacune des 54 000 unités de la flotte mondiale ne perd, volontairement ou accidentellement, que 100 tonnes de déchets de soute ou de ballast, ce sont 5 millions 400 000 tonnes qui sont rejetés à la mer ! 5 000 tonnes de déchets sont quotidiennement rejetées dans la Baltique et 8 000 tonnes dans la mer du Nord soit, au total, plus de 3 millions de tonnes par an, c'est-à-dire l'équivalent de dix Amoco-Cadiz !

Les raisons de cette situation sont connues. Le dégazage et le déballastage en mer évitent de rester plus longtemps que nécessaire dans un port. Force est aussi de reconnaître que l'absence ou l'insuffisance d'installations adaptées à ce genre d'opérations permet difficilement d'imposer une obligation absolue. Ainsi, en France, seuls les ports du Havre et de Marseille disposent d'installations fixes.

Outre la loi que nous examinons, il convient d'équiper les ports et pas seulement les plus importants. Les simples caboteurs faisant des opérations entre des ports d'importance régionale ont aussi besoin de se débarrasser de leurs déchets. Mais, actuellement, le montant de l'amende encourue, comparé au coût du service ainsi offert, n'est pas dissuasif.

Il faut donc relever substantiellement le montant des amendes et se donner les moyens de découvrir les auteurs des infractions.

Les Etats-Unis, grâce à une base de données recensant toutes les sortes de pétrole et de résidus pétroliers existants, disent être capables d'identifier les responsables des déballastages ou dégazages. Ne pourrait-on introduire un produit identificateur dans les cargaisons, au moment du chargement ? C'est un vaste projet à mener au niveau européen, et même international.

Cela dit, qui doit être tenu pour responsable des infractions ? Faut-il s'en tenir à la responsabilité et à la culpabilité du capitaine ? Les conditions de transport maritime sont telles que de fortes pressions sont exercées sur les commandements pour ne pas perdre de temps dans les ports, pour ne pas payer les services de déballastage ou de dégazage, pour ne pas se faire prendre en infraction. Ces pressions peuvent aller jusqu'au chantage à la prime, ou à l'emploi. Le groupe communiste défendra donc un amendement permettant de mettre en cause l'armateur et de rompre ainsi la logique d'un texte de 1983, que certains officiers de la marine marchande considèrent comme « scélérat » parce qu'il ne permet pas de mettre en cause les véritables responsables du transport maritime.

De surcroît, la complexité des procédures judiciaires nuit à la recherche des coupables et à leur traduction devant les tribunaux. La compétence donnée aux tribunaux des chefs-lieux de préfecture maritime est une bonne proposition. Il faudra assortir ces dispositions d'une large publicité, dans un souci de dissuasion. Ne faudrait-il pas aussi réfléchir à des sanctions touchant les brevets des officiers et le blocage des marins dans les ports ?

Notre pays est engagé, au plan national, européen et international, dans de justes combats que les députés communistes soutiennent.

Mais il faut aussi donner aux ports les moyens notamment humains nécessaires à l'exercice des contrôles et à l'application des lois.

L'enjeu est d'importance si l'on veut que nos mers et nos océans redeviennent des lieux sûrs pour les hommes et des lieux de vie pour la flore et la faune (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Edouard Landrain - Si besoin était, les conversations avec les habitants du littoral que les congés de Pentecôte m'ont permis d'avoir, m'ont fortifié dans l'idée qu'ils attendent des décisions courageuses de notre part. Les populations riveraines des bords de mer en ont marre ! Le Torrey-Canyon, l'Amoco-Cadiz, le Tanyo... La liste est longue, sans parler des dégazages quotidiens au pied de nos falaises : la Bretagne est massacrée.

Certes, les bonnes intentions, les rapports de qualité, les cris du c_ur et les bons conseils ne manquent pas, mais rien n'est fait. Voilà plus de vingt ans qu'on parle des oiseaux assassinés, des paysages enlaidis, des plages souillées, en espérant que la misère se portera chez les autres... Les Etats-Unis eux-mêmes n'ont pris conscience du problème que lorsqu'ils ont été directement frappés par le naufrage de l'Exxon Valdès. Ils ont alors pris des mesures égoïstes, mais pragmatiques. Ils ont voté des lois sans concession et accordé des pouvoirs considérables à leurs garde-côtes.

Que n'avons-nous pris des mesures comparables ? Interdiction de dégazer, responsabilité des armateurs, assurances : on en discutait depuis vingt ans ! Et puis, brutalement, à cause du naufrage de l'Erika, nous prenons des mesures rapides en matière de dégazage et de déballastage, sans même attendre les conclusions de la commission d'enquête !

Cosignataire de la proposition de loi de M. Deflesselles, je voterai, ainsi que le groupe UDF, la présente proposition.

Mais permettez-moi de faire quelques suggestions. Tout le monde dénonce l'insuffisance de la loi de 1983, de surcroît mal appliquée. Selon le rapporteur, dégazage et déballastage en mer ne sont pas systématiquement interdits et la convention internationale de Londres du 2 novembre 1973 est très insuffisante.

Il faut interdire totalement ces rejets en mer, quelle que soit la zone. Mais les moyens de contrôle manquent. Donnons-nous suffisamment de navires et d'avions, créons un corps de garde-côte. Faisons respecter nos lois et plaidons pour un élargissement à l'Europe et au monde. C'est ainsi qu'on résoudra le problème de ce gangstérisme maritime qu'est la pollution volontaire.

N'infliger qu'une amende modérée à ceux qui rejettent leurs déchets dans le sillage d'un autre navire ou sur les lieux de la catastrophe, c'est inciter au vice. Soyons sévères, donnons aux préfets maritimes et aux tribunaux de proximité les moyens de se faire respecter. Francis Vallat, président de l'institut français de la mer, cite en exemple les coast guards américains et demande la création d'une agence européenne dotée de pouvoirs de sanction immédiats.

L'amendement de M. Le Drian, cette proposition comme celle de M. Deflesselles et celle que j'avais déposée avec Pierre Hériaud et Dominique Caillaud vont dans le bon sens. Mais il faudra aller plus loin. N'oublions jamais que les dégazages libèrent chaque année 1,2 millions de tonnes d'hydrocarbures, ainsi que 6 millions de tonnes de déchets.

Je conclurai par quelques recommandations. Dans ce texte, indiquons les amendes en euro pour marquer notre volonté d'extension à l'Europe et indexons-les sur le prix du pétrole. Il faut vérifier les assurances à chaque affrètement pour que la solvabilité des affréteurs et des armateurs soit toujours garantie. Aucun navire ne devrait pouvoir quitter un port avant que les vérifications aient été faites. Il faut aussi inclure nos préoccupations au programme de la présidence française ; inscrire à l'ordre du jour un grand projet de loi sur la mer dès la parution du rapport Le Drian ; nous doter de tous les moyens dont nous avons parlé. Il faut aussi dérouter tous les navires en infraction vers les ports où siègent les tribunaux de proximité. Il existe des règles particulières pour le trafic de drogue. Appliquons-les quand il s'agit d'hydrocarbures.

Il ne faudrait pas que, comme en 1993, les mesures que nous allons voter et qui pourraient devenir une résolution au Parlement européen soient ensuit enterrées parce que les Pays-Bas et la Norvège craignent la concurrence des ports russes.

Amorçons une vraie politique du respect de la mer, pour les générations futures (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR).

M. Jean-Michel Marchand - L'émotion reste grande, la colère reste forte six mois après la catastrophe de l'Erika dont les conséquences économiques et écologiques, dont certaines irréparables, sont encore visibles.

Il faut mettre un terme à ces arrivées d'hydrocarbures sur les littoraux. Mais l'espoir est mince. De nombreux navires ont profité de cette pollution accidentelle mais qui se comprend dans la logique ultra-libérale.

M. Jean-Pierre Dufau - Très bien !

M. Jean-Michel Marchand - Ils ont eux-mêmes dégazé. Ce type de pollution est plus important que celle qui résulte de catastrophes. Elle atteindrait 600 000 tonnes pour la Méditerranée, et les déballastages se compteraient chaque jour par dizaines dans la Mer du Nord et la Baltique. Ce sont ces pratiques qui font périr des milliers d'oiseaux, menacent la biodiversité, détruisent les écosystèmes.

Tripler le montant des amendes paraît donc justifié. Il faut aussi réaffirmer le principe « pollueur-payeur » et l'appliquer. Selon la convention Polmar, ce pollueur est le navire. Pour la France, c'est le capitaine. Mais celui-ci n'est plus le seul maître à bord après dieu. Il n'est qu'un salarié, et il faut définir la chaîne des responsabilités, de l'armateur à l'affréteur sans oublier le propriétaire de la cargaison, les autorités portuaires et les sociétés de certification. Le capitaine qui exécute ces opérations n'en reçoit bien sûr jamais l'ordre par écrit. L'idée de « marquer » les carburants pour en identifier la source serait également efficace.

Mais mieux vaut prévenir que punir. Pour cela il faut équiper les ports des installations nécessaires au traitement des résidus, à un prix raisonnable et harmonisé sur la façade atlantique et en Méditerranée. Ce devrait être une priorité. On peut envisager qu'un navire quitte un port si ses capacités de stockage des résidus sont suffisantes, mais il aurait obligation de déclarer le port dans lequel il les fait traiter. Mon amendement en ce sens n'a pas été retenu. Il faudrait y revenir lors d'une prochaine lecture.

Sur ce sujet sensible, les Verts avaient déposé une proposition de loi dès janvier. Celle-ci, qui prévoit des sanctions pécuniaires n'est qu'un premier pas. Les mesures propres à assurer la sécurité maritime sont du ressort de l'OMI. Mais l'Union européenne peut prendre ses responsabilités et la France, en exerçant la présidence, a un rôle à jouer.

M. Jean-Pierre Dufau - Très bien !

M. Bernard Deflesselles - Ce texte, Monsieur Le Bris me satisfait. Tout ce qui contribue à faire reculer les atteintes à l'environnement emporte mon adhésion. Mais il provoque aussi en moi un sentiment d'amertume, voire d'irritation. J'y ai en effet retrouvé, à quelques mots près, ma propre proposition de loi déposée le 8 septembre dernier !

C'est un plagiat en bonne et due forme ! La pratique est rentrée dans les m_urs de notre Assemblée, mais elle n'honore pas le travail parlementaire et n'en renforce pas la crédibilité.

Mais passons... Une vaine susceptibilité ne doit pas l'emporter sur la raison.

M. le Ministre - C'est sage, en effet.

M. Bernard Deflesselles - Pour autant, je n'ose croire que nous défendons un texte de circonstance, concocté uniquement pour apaiser les inquiétudes, voire le découragement de toute une population, qui avec détermination, avec pugnacité, a tenté de rendre vie à des côtes souillées par la catastrophe de l'Erika.

Je suis d'autant plus dépité aujourd'hui, que mon texte cosigné par plus de 80 parlementaires de l'opposition n'ait pas été discuté et voté l'année dernière, le Gouvernement n'ayant pas jugé utile de l'inscrire à l'ordre du jour. Certes, la catastrophe de l'Erika n'avait pas eu lieu et les pouvoirs publics tardaient à prendre conscience d'un phénomène de plus en plus fréquent en Méditerranée, et sur les côtes bretonnes et atlantiques où, triste record, 39 dégazages sauvages ont eu lieu dans la semaine du 18 au 23 février dernier.

Si cette proposition peut être qualifiée de tardive, elle n'en demeure pas moins pertinente. Devant ce problème récurrent, il faut rendre notre législation sensiblement plus sévère.

Vous trouverez donc en moi un allié objectif, Monsieur le rapporteur, puisque votre texte est pratiquement en tous points similaire au mien.

Je prévoyais de doubler les amendes encourues par les auteurs de rejets polluants. Tel un M. Plus, vous proposez de les tripler. Vous proposez aussi de doubler les peines d'emprisonnement, ce qui ne peut qu'emporter notre adhésion, puisque telle était notre proposition... Votre copie -dans les deux sens du mot- est parfaite.

Nous voterons donc cette loi. Mais que les députés de la gauche plurielle, reconnaissent que l'opposition a souvent de bonnes idées, qu'ils cessent de dire que nous nous complaisons dans la critique en ne proposant rien !

Il faut cependant aller plus loin et élaborer une véritable politique globale de sécurité des transports maritimes. Le renforcement de la sécurité passe inévitablement par l'accroissement des moyens consacrés à la surveillance et au contrôle des navires, par une plus grande responsabilisation des opérateurs. De ce point de vue, le Gouvernement entend-il faire pression sur ses partenaires européens pour changer la réglementation relative à la responsabilité des affréteurs ?

M. le Ministre - Oui !

M. Bernard Deflesselles - Nous pouvons en douter, car c'est un gouvernement socialiste qui, en 1992, a négocié, préparé et signé un protocole modifiant la convention internationale de 1969 sur les pollutions par les hydrocarbures, qui exonère désormais les pétroliers de toute responsabilité financière et qui limite la responsabilité au seul propriétaire et affranchit le pétrolier affréteur de toute responsabilité, alors que l'association française de droit maritime avait émis un avis contraire. La France ne s'est pas grandie en étant le premier Etat européen à signer ce protocole.

Devant l'immobilisme des pouvoirs publics, j'ai proposé le 17 décembre dernier -cinq jours après la catastrophe de l'Erika- la constitution d'une commission d'enquête parlementaire. Elle rendra ses conclusions sous peu, mais il nous appartient dès à présent de tirer les conséquences des expériences passées.

Les Américains ont su tirer les leçons de la catastrophe de l'Exxon Valdez avec l'Oil pollution act de 1990, qui soumet les pétroliers entrant dans les eaux territoriales américaines à des obligations draconiennes en matière de plan de secours et de garanties financières. D'autres moyens sont également prévus comme la responsabilité illimitée de l'armateur en cas de dommage, ainsi que la responsabilité solidaire de l'affréteur, l'obligation de la double-coque pour les navires accostant aux Etats-Unis à partir de 2010 et l'interdiction de naviguer des navires de plus de 23 ans, l'obligation que chaque navire dispose d'un certificat de responsabilité financière. La loi américaine permet également de refuser l'accès à ses eaux aux armateurs qui ne peuvent justifier pour leurs équipages d'un niveau de formation au moins équivalent à celui des équipages américains. C'est grâce à ce dispositif que les Etats-Unis ont réussi à lutter contre les marées noires avec quelque succès.

Inspirons-nous donc de cette expérience, et cessons d'accuser de tous les maux un soi-disant « libéralisme débridé ». M. Marchand pense-t-il donc que les navires cubains, russes, bulgares ne dégazent pas ?

La création de coast-guards pour les côtes européennes irait aussi dans le bon sens. Elle pourrait, en France, être financée par un prélèvement sur la TIPP, qui représente près de 85 % du prix de l'essence.

Le durcissement de la réglementation passe également par la réforme des régimes d'assurance : actuellement, les primes ne sont pas plus élevées pour un navire âgé de 25 ans que pour un bateau neuf muni d'une double coque. Pourtant, les navires de plus de 15 ans représentent 40 % de la flotte mondiale et sont la cause de 80 % des sinistres. En outre, 40 % d'entre eux ne répondent pas aux normes de sécurité minimales édictées par l'OMI.

Il faut aussi lutter contre les certificats de complaisance en vérifiant le sérieux du travail des sociétés chargées des contrôles et des vérifications techniques des navires. La France n'a pas besoin de l'aval de ses partenaires européens pour doubler le nombre des contrôleurs dans les centres de sécurité ; ils ne sont que deux à Dunkerque...

Par ailleurs, le naufrage de l'Erika, qui naviguait sous les couleurs du pavillon maltais, a relancé la polémique sur les pavillons de complaisance. Ayons donc le courage d'y mettre fin une fois pour toutes ! Il est scandaleux que les Etats en cause ne soient pas inquiétés en cas de catastrophe. En outre, il ne tient qu'à vous, Monsieur le ministre, de rendre par des mesures fiscales, budgétaires ou sociales le pavillon français plus concurrentiel.

Il serait également souhaitable d'étendre la limite des eaux territoriales françaises, afin de mieux contrôler les navires qui y circulent. Actuellement, les poursuites sont inopérantes pour toute infraction commise au-delà des limites des eaux nationales, les capitaines indélicats le savent parfaitement. Le flagrant délit est donc une nécessité absolue.

Détecter les auteurs de rejets polluants, et surtout les sanctionner effectivement, voilà l'objectif. Or, en 1999, sur 308 cas de pollution repérés, 30 navires ont été identifiés et 27 procédures judiciaires entamées, qui ne seront pas toutes menées à leur terme.

La Méditerranée, zone spéciale où tout rejet est interdit, n'est pas épargnée et l'on peut imaginer les conséquences qu'y aurait une catastrophe comme celle de l'Erika. Les échanges avec l'Atlantique par le détroit de Gibraltar la rendent particulièrement vulnérable : 2 000 navires marchands dont 300 pétroliers se croisent en permanence dans ses eaux, où transitent 20 % du trafic pétrolier mondial. Évaluée à 120 000 tonnes par an, la quantité d'hydrocarbures rejetée lors des opérations de déballastage entraîne une pollution intolérable.

La Méditerranée est une mer fragile, fermée, dont les eaux mettent un siècle à se renouveler. Elle est donc particulièrement menacée, comme l'a montré la marée noire causée par le pétrolier Haven en 1991.

Nous devons profiter de la présidence de l'Union européenne pour prendre des mesures audacieuses, d'autant plus indispensables que notre position géographique et nos 5 000 km de côtes nous rendent particulièrement vulnérables.

Encore faudrait-il que nous-mêmes respections le droit européen, qui nous fait obligation de contrôler au moins un quart des navires qui relâchent dans nos ports.

Pour que le drame de l'Erika ne soit plus qu'un mauvais souvenir, surtout pour qu'il ne puisse plus se reproduire, profitons pleinement de notre présidence pour faire évoluer significativement le droit maritime européen et international.

Nous voterons cette loi, même si elle ne peut être considérée que comme une timide avancée dans la défense de notre patrimoine commun (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF).

M. Jean-Pierre Dufau - Si je partage l'amertume de M. Deflesselles, dont la proposition n'a pu être débattue plus tôt, je rappelle que la responsabilité n'en incombe pas au Gouvernement, mais à son groupe, qui n'a pas jugé bon de la retenir dans le cadre de sa niche parlementaire...

M. Bernard Deflesselles - Mauvaise réponse !

M. Jean-Pierre Dufau - Non, bonne réponse à une mauvaise question...

« Ce qui m'intéresse, ce n'est pas l'écume des choses, c'est la mer », écrivait Paul Valéry. Parce que la mer, source de vie, appartient au patrimoine commun de l'humanité, la protection du milieu marin et des côtes est un enjeu majeur, une impérieuse nécessité, un devoir d'intérêt général pour les générations futures.

Catastrophe écologique, le naufrage de l'Erika a aussi d'importantes conséquences économiques. Or cette pollution n'équivaut qu'à 2 ou 3 % du tonnage annuel des pollutions intentionnelles liées aux dégazages et aux déballastages, c'est-à-dire au rinçage des cuves mais aussi des machineries. Rien n'échappe à l'irresponsabilité des pollueurs, rien ne doit échapper à notre détermination !

Cette proposition ne traite pas des pollutions accidentelles -qui justifient aussi des mesures sévères- mais des pollutions intentionnelles sournoisement organisées, dont les auteurs sont, forcément, coupables.

Dans un monde sans scrupules où « le temps, c'est de l'argent », il faut transporter toujours plus, toujours plus vite, au moindre coût. Dans le domaine du transport, maritime en particulier, règne le libéralisme le plus débridé. La moralité fait place à la loi du profit, au mépris des hommes et de leur environnement. Une seule réponse est possible, la fermeté, avec une stricte application du principe pollueur-payeur.

Cette proposition simple et cohérente rend les sanctions financières plus dissuasives : il faut que les amendes soient sensiblement supérieures au traitement contrôlé des opérations de dégazage et de déballastage. Il faut aussi améliorer la traçabilité des pollutions intentionnelles, comme le propose le ministre dans d'autres textes. Doter les navires d'une boîte noire éviterait les déballastages effectués en quittant un port et mettrait fin à l'impunité.

Ce texte triple les sanctions financières et augmente sensiblement les peines d'emprisonnement encourues. En cas de récidive, toutes ces sanctions sont doublées. Voilà la sévérité que nous appelions de nos v_ux. Ces mesures s'appliquent à tout capitaine de navire français ou étranger navigant dans la zone économique exclusive au large de nos côtes, dans les eaux territoriales, les eaux intérieures et sur les voies navigables françaises.

Le groupe socialiste soutient les propositions du rapporteur.

Il me reste à formuler des propositions d'ordre juridique. Je comprends que l'on souhaite donner aux juridictions de Cherbourg, de Brest et de Toulon une compétence exclusive pour la poursuite, l'instruction et le jugement des infractions commises en matière de pollution maritime, cette compétence s'étendant aux infractions connexes. Mais l'article additionnel proposé à cette fin par la commission prévoit, pour cela, une modification du code de procédure pénale. Le souci est légitime, mais des questions se posent, qui concernent aussi bien la forme que le fond de la réforme proposée. Tout d'abord, la détermination du ressort géographique des tribunaux relève-t-elle du domaine législatif ? Ensuite, en prévoyant une compétence exclusive, l'article additionnel proposé a pour effet de dessaisir le Tribunal de Paris, actuellement compétent, dont l'expertise est pourtant incontestable. Est-ce opportun ? En outre, la compétence exclusive a pour conséquence, aussi, d'entraîner l'incompétence de la juridiction qui serait territorialement compétente, ce qui peut donner matière à contestations, voire à annulations de procédures.

Pour toutes ces raisons, je proposerai une nouvelle rédaction de l'article additionnel, en veillant à en respecter l'esprit. Je proposerai ainsi que la liste des tribunaux compétents soit fixée par décret en Conseil d'Etat, pris au plus tard le 31 décembre 2001 -nous tenons à cette date-butoir. Je proposerai encore que la compétence du Tribunal de Paris s'exerce pour les infractions commises dans la zone exclusive française, et qu'il puisse être saisi concurremment avec le tribunal territorialement compétent. Je proposerai enfin que si une pollution justifie l'ouverture d'une information, le tribunal territorialement compétent transmette immédiatement les éléments dont il a connaissance au Tribunal de Paris.

Cette association des énergies permettra une meilleure mobilisation de tous les magistrats, et le dispositif proposé permettra de répartir progressivement les moyens de justice sur l'ensemble des tribunaux territorialement compétents en assurant la formation des magistrats concernés à ces nouvelles responsabilités. La Chancellerie et les magistrats se concerteront pour mettre au point ces nouvelles dispositions.

Si l'on procède de la sorte, il suffit de modifier l'article 12 de la loi du 5 juillet 1983, au lieu de modifier le code de procédure pénale -ce qui supposerait, au moins, une discussion plus approfondie avec le ministère de la justice.

Le groupe socialiste votera la proposition ainsi amendée, car il est persuadé du bien-fondé de ce texte, et de son importance dans la lutte contre les pollutions intentionnelles. Sur le plan symbolique, il convient, par un vote dans les meilleurs délais, de montrer que le Parlement apporte sa pierre à l'édifice commun. Je ne doute pas que la présidence française de l'Union européenne qui va s'engager permettra que des progrès décisifs se réalisent, au niveau européen, dans la lutte contre les pollutions intentionnelles, et que la France s'engagera dans cette voie avec la détermination dont elle fait preuve en faveur de la sécurité des transports maritimes de matières polluantes ou dangereuses (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

M. André Aschieri - Les catastrophes qui se sont succédé au fil des ans ont montré la précarité des équilibres écologiques et la nécessité de mesures préventives. On le sait, les rejets volontaires de matières polluantes ont des conséquences désastreuses pour le milieu marin et aussi pour les oiseaux. De petites nappes épaisses se forment qui, en se déposant au fil du temps, causent de plus grands dégâts encore que le naufrage d'un seul pétrolier. Des études ont montré que l'âge moyen des navires de transport de marchandises ne cesse d'augmenter et la France n'est pas à l'abri des critiques, qui a instauré le pavillon de complaisance des îles Kerguelen. Comment ne pas souligner, encore, qu'une concurrence acharnée pousse les affréteurs a faire toujours davantage d'économies sur l'entretien des bateaux, ce qui multiplie les risques d'accidents ?

Tel étant le contexte, les députés Verts ne peuvent que se féliciter qu'une proposition tendant à réprimer plus fermement la pollution par les navires soit soumise à l'Assemblée. Mais si le projet est vaste, les moyens choisis ne sont pas entièrement satisfaisants et ils sont, en tout cas, insuffisants pour permettre à la France d'honorer ses engagements internationaux en matière de contrôle des navires. Il conviendrait, en particulier, de prévoir des contrôles renforcés dans les ports et, surtout, de faire en sorte que les déchets puissent y être traités.

En l'état, les contrôles prévus sont insuffisants et, malgré toute leur bonne volonté, ceux qui les exerceront n'auront aucun moyen de s'assurer de la capacité des navires à tenir la mer. Des registres devraient donc être tenus, permettant de vérifier que le dégazage n'a pas eu lieu en mer.

Certes, les amendes actuellement prévues sont trop peu dissuasives, mais le problème majeur est celui de la responsabilité juridique des donneurs d'ordre. Qui, du capitaine, du propriétaire de la cargaison, de l'armateur, ou du propriétaire du navire est le plus coupable des pollutions intentionnelles ? L'affréteur doit, dans tous les cas, voir sa responsabilité pénale engagée, et être tenu de réparer la totalité du préjudice qu'il a causé. En clair, ce sont les vrais responsables qui doivent être poursuivis.

La déclaration de Rio a proclamé le droit de tout homme à mener une vie saine dans un environnement préservé, et certains Etats ont transcrit cette préoccupation dans leur Constitution. Ce n'est pas le cas de la France, qui refuse donc à ses ressortissants le droit à un environnement de qualité. Il importe de réformer nos institutions, et de créer un grand ministère de la mer et du littoral.

Pour autant, la répression n'est pas suffisante. Il faut aussi améliorer les conditions de travail des salariés de la marine marchande, comme cela a été fait pour ceux du transport routier. L'idée viendrait-elle à qui que ce soit de laisser conduire une voiture sans diplôme ? De toute évidence, non ! A cet égard, la lecture du livre Les damnés de la mer est édifiante, et en dit long sur ce que sont les négriers modernes.

Enfin, rien d'efficace ne se fera si la lutte contre les pollutions intentionnelles n'est pas concertée. Les députés Verts appellent donc de leur v_u des initiatives de la prochaine présidence française de l'Union européenne. Ils voteront la proposition, dont ils soulignent cependant l'insuffisance et les aspects quelque peu discriminants (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV).

Mme Jacqueline Lazard - Permettez-moi tout d'abord de saluer mon voisin de circonscription, Gilbert Le Bris, dont nous examinons aujourd'hui la proposition.

L'attention portée par les médias aux pollutions maritimes depuis le naufrage de l'Erika a relancé le débat sur la sécurité en mer. Des progrès se dessinent, qui touchent tant à la prévention qu'à la surveillance de nos côtes. Nous saluons les efforts entrepris en ce sens par le Gouvernement, alors que s'engage la présidence française de l'Union européenne, efforts qui ne manqueront pas d'être appuyés par les propositions de la commission d'enquête sur le transport maritime des produits dangereux.

Mais au-delà des catastrophes écologiques médiatisées, nous ne connaissons que trop les dégâts dus à des pollutions certes plus discrètes mais néanmoins destructrices pour la faune et la flore de nos côtes. Les données dont nous disposons sur les déballastages sauvages se passent de commentaires et suggèrent que la lutte pour un environnement préservé ne saurait se limiter aux seules périodes de mobilisation médiatique à l'occasion d'une marée noire.

La proposition dont nous sommes saisis tend à aggraver les peines encourues par les capitaines de navires français qui enfreignent les règles relatives au déballastage. Je souhaite que le débat précise plusieurs points.

Tout d'abord, on ne saurait laisser croire qu'en l'état actuel du droit international, toute opération de ce type est interdite. Comme le rappelle notre rapporteur, trois zones sont distinguées, qui ne sont pas toutes soumises au même régime d'interdiction : des seuils différents existent, qui permettent de pratiquer ce qui semble être conçu comme des opérations maîtrisées. Ne convient-il pas de revoir ces interdictions, et notamment les seuils en-deçà desquels les rejets d'hydrocarbures à la mer sont autorisés ? Ne convient-il pas d'étendre les zones d'interdiction absolue en prenant en compte l'importance du patrimoine maritime à préserver ? Ainsi, l'interdiction générale de dégazage et de ballastage en Méditerranée pourrait être étendue, par exemple, au futur parc marin d'Iroise.

En second lieu, je souhaite voir prises en compte les inquiétudes formulées par les capitaines de navire. Il convient notamment de rappeler avec force que les sanctions encourues par les capitaines de navire français sont également applicables aux capitaines de navires étrangers et, par ailleurs, applicables aux propriétaires et exploitants qui ont donné l'ordre de commettre l'infraction. Ce point est essentiel. En effet, les capitaines de navires français se sont inquiétés d'une mesure qu'ils ont parfois perçue comme une mise en cause injuste. Ils ont par ailleurs insisté sur l'inégalité du rapport entre l'armateur et le capitaine. C'est bien sûr ce dernier qui procède au déballastage mais, ce faisant, il répond aux exigences d'un donneur d'ordre, en l'occurrence l'armateur. Le droit et donc les peines encourues devraient refléter le déséquilibre de cette relation.

On connaît les motivations -économiser le moindre franc et éviter à tout prix l'immobilisation du navire- et ce sont elles qu'il convient de combattre, en instaurant une possibilité de contrôle et de certification et en renforçant les prérogatives des officiers portuaires à l'encontre des navires quittant un port sans y avoir dégazé ou déballasté. Il convient également de doter nos ports d'installations adaptées et j'observe que certains pays, a priori peu soucieux de la protection de l'environnement, n'hésitent pas à payer les boues pour inciter les navires à de bonnes pratiques. Ainsi, en Chine, les boues sont achetées à concurrence de 25 dollars la tonne, ce qui équivaut à une rémunération d'environ 2 500 dollars pour une opération faisant suite à un voyage de deux mois. La prise en charge de ces coûts va devenir un argument fort dans la compétition entre les ports et il pourrait être envisagé d'instaurer un service public de la dépollution maritime, financé par un prélèvement sur les bénéfices des compagnies pétrolières.

Enfin, il existe des solutions techniques pour limiter les risques de recours au déballastage. Il convient ainsi de réduire sur les navires les plus anciens la part du ballast, qui consiste à remplir, en plus du ballast permanent, une partie des cuves destinées à contenir du pétrole ou autres produits dangereux pour l'environnement. En transformant en ballast permanent une partie de ces cuves, on diminue certes les capacité de transport des navires -et, partant, les profits potentiels des transporteurs-,mais on réduit aussi les risques afférents à leur configuration actuelle. Il s'agit d'une mesure de bon sens, puisque les pétroliers construits depuis une dizaine d'années possèdent tous des ballasts séparés. Il conviendrait donc de veiller à la mise aux normes des navires les plus anciens (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

La discussion générale est close.

M. le Ministre - Je remercie les différents orateurs de la qualité de leurs propos, et de leurs efforts pour dépasser les intérêts politiciens, s'agissant d'un domaine qui intéresse l'intérêt général.

Je rappelle que cette proposition de loi traite exclusivement des actes délibérés de pollution et ne prétend donc pas résoudre l'ensemble du problème de la sécurité maritime. Du reste, le Gouvernement s'en est saisi et j'ai conclu avec les transporteurs, les affréteurs, les armateurs et les sociétés de qualification une charte qui tend à les responsabiliser pour éviter de nouveaux dommages. La France a également déposé trois mémorandums, à l'OMI, à la Communauté européenne et au FIPOL.

Mais c'est l'ensemble du système, qui tend à privilégier le profit sur la sécurité des hommes et de l'environnement, qu'il faut faire évoluer et l'on s'attaque alors à forte partie. Nous entendons profiter de la présidence française pour poursuivre dans la voie d'un réel progrès.

Le transport maritime dispose de nombreux atouts et le principal obstacle à son développement réside dans le refus de certains de renforcer la sécurité des navires et d'offrir aux équipages de meilleures conditions de travail.

En matière de répression des pollutions volontaires, force est de constater que le sentiment d'impunité l'emporte aujourd'hui, faute de sanctions dissuasives. Celles-ci doivent donc être approuvées, cependant que les moyens humains de contrôle et de vérification seront renforcés. Je m'étonne d'ailleurs des critiques de certains parlementaires de l'opposition sur ce point. Si je suis moi-même conduit à décider le doublement des effectifs d'inspecteurs, je vous laisse imaginer la situation que nous avons trouvée en 1997. Quant à ceux qui critiquent le protocole de 1992, que ne l'ont-ils modifié en 1993 lorsqu'ils sont revenus aux responsabilités ?

Cette proposition de loi constitue donc une avancée indiscutable, même si elle n'entend pas résoudre l'ensemble du problème de la sécurité maritime (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste).

Mme la Présidente - J'appelle, dans les conditions prévues à l'article 91 alinéa 9 du Règlement, les articles de la proposition de loi dans le texte de la commission.

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ARTICLE PREMIER

M. Daniel Paul - L'amendement 5 tend -comme plusieurs amendements à venir sur les autres articles- à renforcer les sanctions financières de manière à augmenter leur effet dissuasif. Il vise donc à porter de 3 à 4 millions le montant de l'amende encourue.

M. le Rapporteur - Je comprends l'esprit de la proposition de M. Paul, d'autant que la circonscription du Havre n'est pas épargnée. Je lui demande cependant de retirer son amendement car nous sommes parvenus à un texte équilibré qui tend à rendre les peines encourues proportionnelles aux infractions.

M. le Ministre - Le Gouvernement n'était pas défavorable à cet amendement visant à renforcer les sanctions, mais il entend les arguments de votre rapporteur. Je m'en remets donc à la sagesse de votre Assemblée.

M. Edouard Landrain - N'ayons pas peur de punir pour dissuader ! Le groupe UDF votera d'enthousiasme cet amendement de bon sens.

Je vous rappelle aussi, Monsieur le ministre, mes deux propositions : libeller le montant des amendes en euros -afin de souligner la dimension européenne de la sanction- et l'indexer sur le cours du pétrole, en sorte de lui donner une valeur « réelle », quelle que soit la conjoncture.

M. le Ministre - Un projet de loi est en préparation pour transposer en euros le montant de toutes les amendes existantes. Votre première proposition sera donc satisfaite.

Quant à l'indexation des amendes sur les cours du pétrole, elle me semble juridiquement peu réalisable. Du reste, ils sont aujourd'hui très élevés et il ne faut pas laisser penser que l'amende baissera au premier retournement de conjoncture !

M. Jean-Pierre Dufau - Je ne suis pas très partisan d'une amende flottante...

Je comprends la position de M. Paul mais la commission propose déjà de tripler les amendes existantes et de doubler les peines d'emprisonnement. Le groupe socialiste considère que c'est suffisant et votera donc contre cet amendement.

M. Bernard Deflesselles - Nous voterons l'amendement de M. Paul car notre objectif est que la sanction soit dissuasive ; or non seulement le coût d'un déballastage est élevé, mais il faut y ajouter celui de l'immobilisation au port.

M. le Rapporteur - On ne peut pas indexer une amende sur le prix d'un produit. Par ailleurs, en se ralliant aujourd'hui à l'idée d'un quadruplement des amendes alors qu'ils avaient déposé une proposition de loi visant à les doubler, nos collègues de l'opposition montrent qu'à un moment ou l'autre, ils ont insuffisamment réfléchi (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe DL et du groupe UDF).

L'amendement 5, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Daniel Paul - La loi de 1983 est considérée par les officiers de la marine marchande comme une loi scélérate car elle ne met pas en cause la responsabilité d'autres personnes que le capitaine ou le commandant. Or les marins, tenus de respecter des délais et de travailler au moindre coût, sont en quelque sorte contraints de déballaster en mer. Nous proposons donc par notre amendement 1 d'étendre les sanctions aux armateurs -sans pour autant exonérer les capitaines de leurs responsabilités.

M. le Rapporteur - N'étant pas naïfs, nous savons bien que le capitaine n'est qu'un maillon de la chaîne. Mais les dispositions nécessaires figurent déjà dans la loi de 1983 : son article 6 dispose que « sans préjudice des peines prévues aux articles précédents à l'égard du capitaine ou du responsable à bord, le propriétaire ou l'exploitant qui auront donné l'ordre de commettre l'infraction sera puni des peines prévues auxdits articles » et son article 10 que « le tribunal pourra, compte tenu des circonstances de fait et notamment des conditions de travail de l'intéressé, décider que le paiement des amendes ainsi que des frais de justice seront en totalité ou en partie à la charge de l'exploitant ou du propriétaire ». Enfin, l'article 121-7 du code pénal dispose qu' « est complice d'un crime ou d'un délit la personne qui par menace, ordre, abus d'autorité ou de pouvoir aura provoqué une infraction ou donné des instructions pour la commettre ».

Je souhaiterais donc que M. Paul retire son amendement.

M. le Ministre - Le Gouvernement partage l'avis de la commission. Il est d'accord sur le principe avec M. Paul mais, considérant qu'il s'agit seulement de savoir s'il est souhaitable d'inscrire à nouveau ces dispositions, il s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

M. Edouard Landrain - Je vous remercie, Monsieur le ministre, de faire appel ainsi à la sagesse de l'Assemblée, mais je regrette que cette sagesse ne guide pas la majorité ! Sans doute, Monsieur le rapporteur, la possibilité de sanctionner les donneurs d'ordre existe-t-elle déjà, mais cela va tellement mieux en le disant ! Actuellement, c'est toujours le petit -le capitaine- qui trinque...

M. Jean-Pierre Dufau - M. Paul ayant déjà satisfaction avec les textes en vigueur, qui visent non seulement les armateurs mais tous les donneurs d'ordre, le groupe socialiste s'en tient à la position adoptée par la commission. Nous verrons en deuxième lecture si cette redondance nous apparaît finalement nécessaire.

M. Jérôme Lambert - En voulant trop bien faire, M. Paul est restrictif par rapport à la législation en vigueur puisque celle-ci vise tous ceux qui appartiennent à la chaîne de commandement. Je partage donc l'avis exprimé par le rapporteur et par M. Dufau.

M. Louis Guédon - Mon collègue Besselat, qui n'est pas là, reprenait dans un amendement 11 la même proposition que M. Paul. Nous soutenons donc cet amendement 1 : mieux vaut dire les choses clairement.

M. Daniel Paul - Il semble que les tribunaux -si je peux me permettre cette observation- appliquent la loi de 1983 avec une certaine partialité. En effet c'est systématiquement le capitaine qui est puni. Notre assemblée ne pourrait-elle pas montrer sa volonté que les donneurs d'ordre soient responsables ? Bien sûr, un armateur ne donnera jamais l'ordre écrit de dégazer en mer, mais c`est néanmoins souvent lui qui incite à le faire...

M. Edouard Landrain - Très bien !

M. le Rapporteur - Dès lors que les dispositions législatives nécessaires existent déjà, je ne pense pas que ce soit l'adoption de cet amendement, au demeurant restrictif, qui changera l'attitude des tribunaux. Nous verrons en seconde lecture s'il est utile d'introduire une nouvelle disposition.

L'amendement 1, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Yves Besselat - Certes, le capitaine est responsable de son navire mais le dégazage peut être effectué à son insu, sans parler des pollutions accidentelles. D'où mon amendement 11, qui permet de mettre en cause la responsabilité du propriétaire.

En outre, la France manque cruellement de vocations maritimes. Evitons donc d'accabler les capitaines de navire, dont il faut relativiser la responsabilité, compte tenu notamment des consignes données par les armateurs.

M. le Rapporteur - La commission a émis un avis défavorable pour les raisons que j'ai évoquées précédemment.

En outre, le terme « propriétaire » est trop imprécis du fait de montages très complexes, comme l'a montré le naufrage de l'Erika. Dans ces conditions, mieux vaut viser plus généralement les donneurs d'ordres.

M. le Ministre - Fidèle à ma position antérieure, je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.

M. Jean-Pierre Dufau - Le groupe socialiste suivra la position du rapporteur.

L'amendement 11, mis aux voix, n'est pas adopté.

Les articles premier, 2, 3 et 4, successivement mis aux voix, sont adoptés.

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APRÈS L'ART. 4

M. Jean-Yves Besselat - Mon amendement 10 dit : « Un certificat de dégazage délivré par un organisme agréé par l'Etat français doit être présenté par tout navire pénétrant dans les eaux territoriales françaises. Si ce document ne peut être présenté, les autorités maritimes françaises seront à même de lui faire exécuter un dégazage réglementaire à quai, sous peine de sanctions pénales. »

En effet, ainsi que M. Le Drian le rappelait dans un débat récent, les autorités françaises doivent pouvoir contrôler qu'un navire pénétrant dans nos eaux territoriales a bien effectué son dégazage ou, à défaut, doivent pouvoir le contraindre à le faire. Bref, cet amendement de bon sens est destiné à éviter les dégazages volontaires en mer.

M. le Rapporteur - Votre proposition part d'un bon sentiment, mais elle est contraire aux conventions internationales relatives au droit de la mer. Le droit pour un navire de faire route ne peut être limité de la sorte. Un Etat ne peut interdire à un navire de traverser pacifiquement ses eaux territoriales. Le droit international n'offre aucun moyen d'exiger qu'un dégazage préventif ait été effectué. J'ajoute que vous anticipez sur une prochaine directive européenne, qui va dans le sens de votre amendement mais dans le respect des conventions internationales.

Pour toutes ces raisons, la commission a repoussé l'amendement.

M. le Ministre - Je ne suis pas certain, Monsieur le rapporteur, qu'il n'existe aucune possibilité d'intervenir dans les eaux territoriales.

Cela dit, la délivrance d'un certificat de dégazage par un organisme agréé par l'Etat français est envisageable, mais mieux vaudrait qu'une telle mesure soit prise au niveau de l'Union européenne, si nous ne voulons pas détourner les navires des ports français. Or, précisément, la Commission européenne prépare une directive imposant le dégazage dans les ports de l'Union. Une telle disposition pourra être introduite en droit français grâce à l'amendement de M. Le Drian au projet portant diverses dispositions d'adaptation communautaires.

Le Gouvernement souhaite privilégier cette voie qui recueille l'assentiment de nos partenaires européens. Sous le bénéfice de ces explications, je vous invite à retirer l'amendement.

M. Jean-Yves Besselat - Au bénéfice de ce que je considère comme un engagement du Gouvernement, je retire l'amendement, qui risquerait de pénaliser les ports français.

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ART. 5

M. Jean-Pierre Dufau - J'ai déjà exposé l'économie de mon amendement 9 dans mon intervention générale. Il pose le principe d'une compétence mixte des tribunaux territoriaux et du tribunal de Paris pour éviter un dessaisissement de ce dernier en ce domaine. Un décret en Conseil d'Etat fixera la liste des tribunaux territoriaux compétents. Il devra intervenir au plus tard le 31 décembre 2001.

M. le Rapporteur - L'article 5 de la proposition tend à favoriser l'émergence d'une jurisprudence plus homogène en confiant aux tribunaux des chefs-lieux des préfectures maritimes la compétence pour juger des infractions aux interdictions de dégazage et de déballastage.

Nous espérons ainsi que, face à des tribunaux très au fait des problèmes de pollution, les capitaines de navires pourront moins facilement déjouer les actions intentées contre eux.

Cela dit, la commission a accepté l'amendement en observant toutefois que, conformément à l'article 706-17 du code de procédure pénale, la définition des tribunaux compétents peut relever de la loi. C'est un point qu'il faudra peut-être réexaminer ultérieurement.

M. le Ministre - Favorable.

L'amendement 9, mis aux voix, est adopté.

L'article 5 est ainsi rédigé.

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EXPLICATIONS DE VOTE

Mme la Présidente - Nous en venons aux explications de vote.

M. Bernard Deflesselles - Nous voterons cette proposition. Monsieur le ministre, vous avez, gentiment, engagé une polémique. Je répète que la proposition de loi que j'avais déposée le 8 septembre n'a pas été discutée car elle n'a pas été inscrite par le Bureau de l'Assemblée où la gauche plurielle a la majorité. D'autre part, j'ai reproché au gouvernement socialiste d'avoir laissé aller les choses en 1992. Pourquoi n'avoir pas agi en 1993, m'avez-vous répondu. Mais alors, Monsieur le ministre, pourquoi n'avez-vous rien fait depuis juin 1997 ?

M. le Ministre - J'ai commencé.

M. Bernard Deflesselles - Je regrette que nous ayons perdu dix mois. C'est beaucoup. Depuis la catastrophe, il y a eu 40 dégazages sauvages au large de nos côtes. Nous en avons encore eu des exemples récents en Méditerranée. Mieux vaut certes voter cette loi que ne rien faire. Mais il ne suffit pas de rendre responsables les capitaines indélicats en oubliant affréteur et armateur. Vous avez beaucoup parlé de sagesse. J'aurais voulu aller plus loin. J'ai évoqué quelques pistes : la formation des équipages, comme aux Etats-Unis.

M. René Leroux - Bien sûr, du moment que c'est américain !

M. le Ministre - Cela se fera.

M. Bernard Deflesselles - Mais quand ? Je pense aussi à la double coque, à un régime de certification et d'assurances plus strict. L'Europe bouge. J'espère que la présidence française sera exemplaire dans ce domaine. La mer, notre patrimoine commun, le vaut bien.

M. Edouard Landrain - L'UDF votera cette loi même si nous la jugeons timorée. Nous avons fait des suggestions avec lesquelles, je crois, vous êtes au fond d'accord. Il faudra y revenir. Il faudrait par exemple établir un lien entre le prix du pétrole et le montant des amendes pour qu'il reste dissuasif.

Nous attendons aussi une grande loi sur la mer après le rapport de la commission d'enquête. Il y a d'autres dérapages que les dégazages et déballastages qui exigent qu'on introduise un peu de moralité.

Je crains enfin que nous ne soyons pour le moins désavantagés s'il n'y a pas d'uniformité des règles au niveau européen. La Commission avait renvoyé le problème à plus tard sous la pression de la Norvège et des Pays-Bas qui craignent la concurrence russe. Mais il faut assurer une égalité de traitement en Europe (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR).

M. Jean-Pierre Dufau - Le groupe socialiste est à l'origine de cette proposition. Il félicite le rapporteur et il la votera sans timidité aucune.

M. Louis Guédon -Cette loi ne répond pas aux attentes des populations maritimes. Elle est en retrait sur les prochaines directives européennes, et nous avons perdu dix mois. Mais le groupe RPR la votera.

M. Jean-Michel Marchand - Le groupe RCV votera cette loi, même si nous en avons souligné les limites. Il ne faut pas refuser un premier pas, il ne faut pas non plus laisser l'_uvre en chantier. Il y a urgence à agir au niveau de l'OMI -dont on connaît malheureusement la célérité...- et de l'Union européenne. La France devra profiter de sa présidence pour le faire. A défaut de résultats, nous proposerons peut-être des dispositions nationales pour protéger nos côtes.

M. Daniel Paul - Après la catastrophe de l'Erika, une prise de conscience s'est faite. On sait désormais que le danger ne vient pas seulement des naufrages mais aussi des dégazages et de déballastages sauvages, alors que 300 000 navires traversent chaque année la Manche, et des centaines de milliers la Méditerranée.

Il faut y mettre fin. Le Gouvernement a pris des mesures qu'aucun autre n'aurait osé prendre. Au niveau européen, notre rencontre avec la commissaire de Palacio nous permet de dire que les choses vont évoluer. L'OMI consent également à examiner des possibilités d'avancées.

Mais j'ai le sentiment que cette proposition reste trop limitée. Ne pas inscrire dans la loi, comme on l'a fait en 1983, la responsabilité des armateurs dans la pollution volontaire en mer est une erreur. Les Etats-Unis eux-mêmes leur ont attribué une responsabilité première, totale et illimitée. Nous voterons cette loi, mais nous présenterons de nouveau nos amendements en deuxième lecture.

M. le Rapporteur - C'est un premier pas, effectivement. Mais on prouve le mouvement en marchant. D'autres suivront. Nous le ferons en relation avec le Gouvernement et toutes les instances européennes et mondiales concernées. Des accidents comme celui de l'Erika relèvent de la négligence, et non d'une volonté délibérée. La proposition vise les pollutions volontaires. Elle tient compte de ce qui figure déjà dans la loi de 1983, le code pénal et le code de procédure pénale. Nous aurons l'occasion de revenir sur ce sujet après le rapport sur les conséquences du naufrage de l'Erika.

Je remercie l'ensemble des collègues qui ont apporté leur contribution et participé au débat, dans un esprit de sagesse.

Le risque zéro n'existe pas, mais nous voulons réduire le champ de l'imprévisible en rendant aussi rares que possible les accidents graves, mais aussi tous ces incidents quotidiens auxquels la répétition confère un caractère de gravité. Ce débat n'est donc pas clos et je sais gré à tous ceux qui entendent continuer à y participer.

L'ensemble de la proposition, mis aux voix, est adopté.

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FIXATION DE L'ORDRE DU JOUR

Mme la Présidente - L'ordre du jour des séances que l'Assemblée tiendra jusqu'au vendredi 30 juin 2000, terme de la session ordinaire, a été fixé ce matin en Conférence des présidents.

Cet ordre du jour sera annexé au compte rendu de la présente séance.

Par ailleurs, la Conférence des présidents a inscrit à l'ordre du jour complémentaire du jeudi 29 juin la proposition de résolution de M. Bernard Accoyer tendant à la création d'une commission d'enquête sur les pratiques non réglementées de modifications corporelles.

Prochaine séance, cet après-midi à 15 heures.

La séance est levée à 11 heures 45.

                      Le Directeur du service
                      des comptes rendus analytiques,

                      Jacques BOUFFIER

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A N N E X E
ORDRE DU JOUR

L'ordre du jour des séances que l'Assemblée tiendra jusqu'au vendredi 30 juin 2000, terme de la session ordinaire, a été ainsi fixé ce matin en Conférence des Présidents :

CET APRÈS-MIDI, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures :

      _ Nouvelle lecture du projet sur la chasse.

MERCREDI 14 JUIN, à 15 heures :

      _ - Questions au Gouvernement ;

à 18 heures 30 et à 21 heures :

      _ Projet de loi constitutionnelle relatif à la durée du mandat du Président de la République.

JEUDI 15 JUIN, à 9 heures 30, à 15 heures et à 21 heures,

ET VENDREDI 16 JUIN, à 9 heures, à 15 heures et à 21 heures :

      _ Suite du projet de loi constitutionnelle relatif à la durée du mandat du Président de la République ;

      _ Nouvelle lecture du projet modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.

MARDI 20 JUIN, à 9 heures :

      _ Questions orales sans débat ;

à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures :

      _ Explications de vote et vote par scrutin public sur l'ensemble du projet de loi constitutionnelle relatif à la durée du mandat du Président de la République ;

      _ Texte de la commission mixte paritaire sur la proposition sur la prestation compensatoire en matière de divorce ;

      _ Texte de la commission mixte paritaire sur le projet modifiant le code pénal et le code de procédure pénale et relatif à la lutte contre la corruption ;

      _ Texte de la commission mixte paritaire ou nouvelle lecture du projet de loi de finances rectificative pour 2000.

MERCREDI 21 JUIN, à 15 heures, après les questions au Gouvernement :

      _ Lecture définitive du projet de loi organique tendant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats de membre des assemblées de province et du congrès de la Nouvelle-Calédonie, de l'assemblée de la Polynésie française et de l'assemblée territoriale des îles Wallis et Futuna ;

      _ Lecture définitive du projet sur l'élection des sénateurs.

JEUDI 22 JUIN, à 9 heures :

      _ Proposition, adoptée par le Sénat, tendant à renforcer le dispositif pénal à l'encontre des associations ou groupements constituant, par leurs agissements délictueux, un trouble à l'ordre public ou un péril majeur pour la personne humaine,

(ordre du jour complémentaire) ;

à 15 heures et à 21 heures :

      _ Lecture définitive du projet modifiant la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives ;

      _ Lecture définitive du projet sur l'accueil et l'habitat des gens du voyage ;

      _ Texte de la commission mixte paritaire sur le projet sur le référé devant les juridictions administratives,

ce texte faisant l'objet d'une procédure d'examen simplifiée ;

      _ Propositions de loi organique :

          · de M. VERNAUDON sur l'élection de l'Assemblée de la Polynésie française,

          · de M. VERNAUDON destinée à améliorer l'équité des élections à l'Assemblée de la Polynésie française,

          · de MM. BUILLARD et PERBEN tendant à modifier la loi n° 52-1175 du 21 octobre 1952 pour rééquilibrer la répartition des sièges à l'Assemblée de la Polynésie française,

      ces trois derniers textes faisant l'objet d'une discussion générale commune.

MARDI 27 JUIN, à 10 heures, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures :

      _ Nouvelle lecture du projet relatif à la solidarité et au renouvellement urbains.

MERCREDI 28 JUIN, à 9 heures :

      _ Suite de la nouvelle lecture du projet relatif à la solidarité et au renouvellement urbains.

à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures :

      _ Lecture définitive du projet sur la chasse ;

      _ Lecture définitive du projet de loi de finances rectificative pour 2000 ;

      _ Lecture définitive du projet modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ;

      _ Suite de la nouvelle lecture du projet relatif à la solidarité et au renouvellement urbains.

JEUDI 29 JUIN, à 9 heures, à 15 heures et à 21 heures,

      _ Suite de la nouvelle lecture du projet relatif à la solidarité et au renouvellement urbains ;

      _ Proposition de résolution de M. Bernard ACCOYER tendant à la création d'une commission d'enquête sur les conditions de sécurité sanitaire liées aux différentes pratiques non réglementées de modifications corporelles (piercing, tatouages, scarification, implants divers de corps étrangers),

(ordre du jour complémentaire).

VENDREDI 30 JUIN, à 9 heures, à 15 heures et à 21 heures :

      _ Suite de la nouvelle lecture du projet relatif à la solidarité et au renouvellement urbains.


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