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    Session ordinaire de 1999-2000 - 103ème jour de séance, 240ème séance

    2ème SÉANCE DU MERCREDI 28 JUIN 2000

    PRÉSIDENCE de M. Raymond FORNI

Sommaire

    QUESTIONS AU GOUVERNEMENT 2

    CROISSANCE DU TRAFIC AÉRIEN 2

    RÉMUNÉRATION DU LIVRET A 3

    EFFETS DE LA HAUSSE DE LA RÉMUNÉRATION DU LIVRET A 3

    LOI SUR LA CHASSE 4

    CONSTRUCTION EUROPÉENNE 5

    BILAN DE LA SESSION PARLEMENTAIRE 5

    PASSAGE À L'EURO 6

    JOURNAL « DROITS DES JEUNES » 7

    CONDAMNATION D'UN FONCTIONNAIRE
    DE POLICE 8

    PERSONNES HANDICAPÉES RETRAITÉES 9

    PRÉSIDENCE FRANÇAISE
    DE L'UNION EUROPÉENNE 9

    LA PRÉSIDENCE FRANÇAISE
    DE L'UNION EUROPÉENNE ET LE SPORT 10

    MONDIALISATION DE L'ÉCONOMIE 11

    SERVICES DES DOUANES 12

    ALLOCUTION DE M. LE PRÉSIDENT 12

    CHASSE (lecture définitive) 14

    EXPLICATIONS DE VOTE. 34

    MODIFICATION DE L'ORDRE DU JOUR PRIORITAIRE 37

    La séance est ouverte à quinze heures.

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        QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

    L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

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    CROISSANCE DU TRAFIC AÉRIEN

    Mme Marie-Hélène Aubert - Grève des contrôleurs aériens, bogue informatique à Heathrow, exaspération des riverains de Roissy comme d'autres aéroports face au bruit et à la pollution, contribution croissante à l'effet de serre, tout montre que l'augmentation du trafic aérien va vite devenir ingérable et insupportable.

    Devant cette situation, la tentation peut être grande pour le Gouvernement de reprendre le discours qui a prévalu jusqu'ici en la matière au sein d'un Etat français centralisé et pétri de la culture des grands corps : considérer l'explosion du trafic aérien comme une fatalité, minimiser les dégâts sur l'environnement et la santé, qualifiés de « rançon du progrès », et construire de nouvelles infrastructures, pour le plus grand bonheur du BTP. La suite, on la connaît : toujours plus de trafic, toujours plus de nuisances, et bientôt l'impasse totale.

    Pourtant, des perspectives existent dans le cadre de l'Union européenne, dont nous allons prendre la présidence dans quelques jours. D'où ma double question : quelles mesures allez-vous soutenir auprès de nos partenaires européens, Monsieur le ministre des transports, pour rationaliser la gestion du trafic aérien et réduire les pollutions qu'il engendre ? Si un nouvel aéroport international devait malgré tout être envisagé en France, allez-vous enfin faire clairement le choix d'un aménagement équilibré du territoire national, conformément aux principes que nous avons adoptés dans la loi d'aménagement et de développement durable du territoire, afin de favoriser le développement de grands pôles régionaux et de mettre un terme à la saturation ingérable et invivable de la région parisienne en matière de transports ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV)

    M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement - Je ne parlerai pas pour ma part de « rançon du progrès » car nous voulons au contraire axer notre démarche sur le développement durable (Exclamations sur les bancs du groupe DL).

    En ce qui concerne le troisième aéroport, je puis vous dire que rien ne sera décidé sans une évaluation complète et totale de la situation, des possibilités et des perspectives. Reste qu'il existe, y compris en région parisienne, une demande forte de construction de ce troisième aéroport car il y va du respect des limites sur lesquelles nous nous sommes engagés vis-à-vis d'Orly et de Roissy.

    D'autre part, il est vrai que le trafic aérien augmente d'environ 7 % par an. Et tout montre que cette tendance à la hausse va s'accentuer. Devons-nous en concevoir des craintes au regard des nuisances sonores et des émissions de gaz ? C'est une évidence. Devons-nous pour autant négliger l'intérêt économique et social de cette croissance ? La réponse est tout aussi évidente.

    Il nous faut donc conjuguer le développement avec la lutte contre les nuisances sonores et les émissions de gaz à l'origine de l'effet de serre. Au niveau européen, je plaide donc pour une meilleure coordination, et donc une plus grande efficacité dans la gestion du trafic aérien ; je me suis aussi engagé en faveur d'un renforcement des droits des passagers. Il y a aussi des solutions à trouver concernant une meilleure intermodalité entre le rail et l'avion en particulier, ainsi que le volume et le remplissage des avions.

    En tout état de cause, nous prendrons la décision concernant le troisième aéroport après avoir procédé à toutes les évaluations nécessaires mais rapidement, durant l'été, j'espère (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste).

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    RÉMUNÉRATION DU LIVRET A

    M. Bernard Charles - Monsieur le ministre de l'économie, il y a quinze jours, je vous avais interrogé sur le relèvement de la rémunération du livret A de la caisse d'épargne et vous m'aviez répondu que vous y étiez favorable mais que vous attendiez l'avis du Comité consultatif des taux réglementés. Voici la fin de session : quelle est la décision du Gouvernement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV et du groupe socialiste)

    M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - La réunion du Comité consultatif des taux réglementés a eu lieu ce matin (« Ah ! » sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL) et je suis donc en situation d'annoncer à l'Assemblée nationale...

    M. Francis Delattre - Quel hasard !

    M. le Ministre de l'économie et des finances - ...que le Gouvernement a décidé que la rémunération du livret A de caisse d'épargne, du livret bleu du Crédit mutuel et du CODEVI passerait de 2,25 à 3 % (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste, du groupe RCV et sur quelques bancs du groupe UDF).

    Je rappelle qu'il y a 46 millions de titulaires du livret A, 5 millions de titulaires du livret bleu du Crédit mutuel et 18 millions de titulaires du CODEVI. J'ajoute que ces augmentations de rémunération auront aussi des effets positifs sur les titulaires des livrets d'épargne populaire, des comptes d'épargne logement et des plans d'épargne logement.

    Ce sera la première fois depuis dix-neuf ans que la rémunération du livret A sera ainsi augmentée (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV). En prenant cette décision en liaison avec M. Gayssot et sous l'autorité du Premier ministre, nous avons voulu à la fois assurer une juste rémunération de l'épargne populaire et éviter un financement trop coûteux du logement social. C'est la raison pour laquelle nous faisons en sorte que ces augmentations soient neutralisées dans les comptes des sociétés HLM.

    Comme l'ont proposé plusieurs d'entre vous, nous mettrons à profit cette collecte supplémentaire car désormais le livret A redevient un placement très intéressant...

    M. Bernard Accoyer - N'exagérons rien !

    M. le Ministre de l'économie et des finances - ...pour concerner chaque année 10 milliards de prêts supplémentaires en plus du logement social à l'amélioration du financement du cadre urbain et de l'habitat, à la mise en sécurité d'infrastructures collectives de transport -je pense en particulier aux ponts et aux tunnels- à la qualité de l'environnement, à la prévention des risques.

    Cette décision, qui concerne plusieurs dizaines de millions de Français est un gage du souci que nous avons de favoriser l'épargne populaire (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

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    EFFETS DE LA HAUSSE DE LA RÉMUNÉRATION DU LIVRET A

    M. Daniel Feurtet - Je viens d'entendre avec beaucoup de satisfaction la réponse du ministre de l'économie. Mais je voudrais poser au ministre de l'équipement et du logement trois questions sur les effets de cette mesure. Le gel des loyers HLM sera-t-il maintenu ? Quelles nouvelles utilisations des fonds d'épargne prévoyez-vous ? Enfin, quel impact cette hausse de la rémunération du livret A aura-t-elle sur la construction et la réhabilitation des logements sociaux ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste)

    M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement - L'an dernier, le Gouvernement avait mis en place un dispositif, une sorte d'échelle mobile, qui prévoyait cette possibilité de remontée de la rémunération. Aujourd'hui cette remontée se produit, ce qui n'était pas arrivé depuis dix-neuf ans. Et avec cette hausse de 0,75 %, nous sommes allés au-delà de ce qu'avait recommandé le Comité consultatif.

    Les nouvelles utilisations des fonds d'épargne ? M. le ministre de l'économie l'a dit, nous profiterons de la collecte supplémentaire, pour financer des politiques urbaines, la mise en sécurité des tunnels, la qualité de l'environnement.

    En ce qui concerne l'habitat social, toutes les dispositions sont prises pour que non seulement la hausse de la rémunération du livret A ne gêne pas son développement mais encore pour que l'engagement de l'Etat en sa faveur s'accroisse -voyez le projet de loi solidarité et renouvellement urbains.

    Enfin, je vous confirme que le gel des loyers pour les locataires HLM se poursuivra en 2000 et 2001 (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste).

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    LOI SUR LA CHASSE

    Mme Sylvia Bassot - Ma question s'adresse au Premier ministre et je la pose au nom de l'ensemble de l'opposition (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Dans quelques heures, nous allons nous prononcer sur le projet de loi sur la chasse, très symbolique, Messieurs de la gauche, de votre incompréhension du monde rural (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR).

    Dès le départ le Gouvernement nous a présenté un texte dont la principale caractéristique était de mécontenter tout le monde. Depuis trois mois, malgré les efforts des uns et des autres pour l'améliorer, au Sénat comme à l'Assemblée, le Gouvernement est resté figé sur ses positions, ce qui tend à démontrer que vous avez utilisé la directive européenne comme un prétexte : en fait il était possible d'aboutir à une loi qui donne satisfaction à l'Europe comme aux chasseurs.

    Les socialistes et l'ensemble de la majorité portent la responsabilité de cet échec par leur refus de tout dialogue, le ministre de l'environnement allant jusqu'à revenir sur ses promesses concernant les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse. Votre projet nie la diversité de nos campagnes et met en cause une liberté chèrement acquise lors de la Révolution française (Applaudissements sur les bancs du groupe DL ; exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

    M. le Président - Pourrez-vous en arriver à votre question ?

    Mme Sylvia Bassot - Le Gouvernement ne résiste pas à la tentation de vouloir tout régler par la loi plutôt que de faire appel à la responsabilité, qu'il s'agisse des chasseurs, des partenaires sociaux ou des collectivités locales. Pour sortir de cette impasse...

    M. le Président - Madame, pouvez-vous poser votre question ? (Vives protestations sur les bancs du groupe DL) Nous ne sommes pas dans le débat général sur la chasse !

    Mme Sylvia Bassot - ...êtes-vous prêt, Monsieur le Premier ministre, à revenir au texte tel qu'amendé par le Sénat, qui, lui, prend en compte l'importance de la chasse comme facteur de cohésion sociale du monde rural ? (Applaudissements sur les bancs du groupe DL et sur quelques bancs du groupe UDF et du groupe du RPR)

    Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement - Vous me permettrez de ne pas faire un amalgame réducteur entre la reconnaissance de la chasse et l'intérêt du monde rural.

    Le Gouvernement a manifesté à maintes reprises son intérêt pour les multiples activités qui permettent de fonder de grands espoirs sur la ruralité -je citerai le volet territorial du contrat de plan Etat-régions, l'engagement très fort sur le maintien des services publics (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV), l'effort considérable en faveur de l'installation des jeunes agriculteurs et la valorisation des filières agricoles (« N'importe quoi ! » sur les bancs du groupe DL).

    L'un des arguments qui nous a conduits à revoir la législation sur la chasse, c'est la démarche qu'ont dû entreprendre des agriculteurs auprès de la Cour de justice européenne pour voir reconnaître leur droit d'objection cynégétique.

    Le projet du Gouvernement vise simplement à nous permettre de respecter nos engagements européens et de garantir, par la définition de l'acte de chasse et la clarification des missions respectives de l'Office national de la chasse et des fédérations de chasse, les moyens d'une chasse durable, responsable, (Exclamations sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR), comprise par l'opinion et qui puisse dialoguer avec les milieux de la protection de l'environnement et les autres acteurs du monde rural.

    Peu de dossiers ont suscité autant de passions et autant de concertation depuis deux ans. Les parlementaires n'ont pas à rougir du travail accompli et ils le montreront encore tout à l'heure (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV et du groupe socialiste).

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    CONSTRUCTION EUROPÉENNE

    M. Francis Hillmeyer - Monsieur le Premier ministre, étant Alsacien et donc frontalier, je suis attentif aux relations entre notre pays et l'Allemagne voisine. Le couple franco-allemand a été, comme l'a rappelé le Président de la République hier, le moteur de la construction européenne et le demeurera pour les nouvelles étapes.

    Les Alsaciens, comme la plupart des Français, croient en une Europe forte, unie, pacifique et prospère. Je veux aujourd'hui m'incliner devant la mémoire du grand Alsacien centriste et du grand Européen qu'a été Pierre Pflimlin, disparu hier (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF).

    Le moteur de la construction européenne, le couple franco-allemand, a été relancé hier à Berlin par M. Chirac, qui a clairement défini les directions dans lesquelles l'Europe doit aller. Le groupe UDF souhaite que ces orientations soient rapidement suivies d'effet. Nous sommes toutefois inquiets car, après les propositions avancées par le ministre allemand des affaires étrangères, vous êtes resté très discret ; les propos de votre ministre de l'intérieur ont été, eux, d'une extrême maladresse. Nous avons le sentiment d'un décalage entre le rythme du Président de la République et le vôtre (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste).

Au moment où va débuter la présidence française de l'Union européenne, allez-vous vous comporter comme si rien ne s'était passé depuis trois mois et sans tenir compte des impulsions ainsi données ? Afin de dissiper toute équivoque, pouvez-vous nous dire quel est l'état de vos réflexions et quels sont vos projets d'action après l'initiative diplomatique majeure du Président de la République ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR)

    M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères - En effet, mardi, devant le Bundestag, le Président de la République a rappelé ce que la relation franco-allemande devait au général de Gaulle et au chancelier Adenauer, au président Giscard d'Estaing et à Helmut Schmidt, à François Mitterrand et à Helmut Kohl et il s'est inscrit dans cette continuité pour faire des propositions sur les étapes à venir. Au moment où nous allons prendre la présidence de l'Union, il est important que nous participions tous -pas seulement les Français et les Allemands, mais aussi les autres pays membres et les pays candidats- à cet important débat sur l'avenir de l'Europe.

    Mais notre responsabilité première et le point sur lequel nous attendent tous nos partenaires, c'est de réussir la conférence intergouvernementale pendant la présidence française. Si les quinze n'y arrivent pas, toutes les spéculations et réflexions sur la suite -il n'en manque pas, il y en aura d'autres et nous y prendrons part- n'auront pas de point d'appui. Le test de la volonté des Européens de résoudre les problèmes de fonctionnement d'aujourd'hui et d'aller plus loin demain, c'est de réussir ensemble cette conférence qui avait échoué en 1996-97. C'est là-dessus que nous allons rassembler nos énergies pour aboutir à Nice à un vrai résultat qui nous permettra d'aller plus loin (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV).

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    BILAN DE LA SESSION PARLEMENTAIRE

    M. Philippe Douste-Blazy - Monsieur le Premier ministre, à l'occasion de cette dernière séance de questions d'actualité, permettez-moi d'exprimer notre sentiment concernant le déroulement, le contenu et l'ambiance de cette session.

    Sur le déroulement, nous regrettons que le Parlement n'ait pas été le lieu des grands débats (« La question ! » sur les bancs du groupe socialiste) qui se posent à notre pays. Le débat sur les retraites ne s'est pas déroulé au Parlement, mais au sein de comités d'experts. Le débat sur les fruits de la croissance a eu lieu, hors du Parlement, grâce à l'opposition et à la presse (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Enfin le débat sur les missions, les effectifs et la modernisation de la fonction publique ne s'est pas déroulé non plus au Parlement, alors que vous venez de décider de créer 100 000 postes de fonctionnaires.

    Sur le contenu, nous avons des réserves quant aux droits de l'opposition -ces droits qui sont les nôtres aujourd'hui, mais peuvent demain être les vôtres ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe du DL) En effet, à une exception près, vous n'avez jamais accepté de débattre sur le fond de nos propositions de loi.

    Enfin l'ambiance qui règne lors des séances d'actualité est trop souvent celle de la polémique et il est dommageable pour le Parlement que votre Gouvernement y recoure pour éviter de donner des réponses précises à nos questions. Allez-vous changer à la rentrée prochaine ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR)

    M. Daniel Vaillant, ministre des relations avec le Parlement - Le Premier ministre assiste à des obsèques et vous excuserez son absence.

    Les débats animés qui ont eu lieu ici démontrent que, pour le Gouvernement, c'est bien au Parlement que le débat politique doit se dérouler et je pense que vous n'avez pas de leçons à nous donner sur ce point (Protestations sur les bancs du groupe UDF et du groupe du RPR).

    Les 35 heures, le PACS, la parité hommes-femmes, la présomption d'innocence, l'audiovisuel, la baisse des impôts, le quinquennat -vous appelez cela des occasions manquées, mais ce sont d'abord des occasions manquées par vous ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste) En effet, vous vous opposez, mais vous n'évoluez pas ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

    Dans cette législature, 30 % des lois ont été à l'initiative des parlementaires, 30 % des propositions de loi sont devenues des lois -cela, vous ne l'aviez jamais fait ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

    Jamais l'article 49-3 n'a été utilisé : c'est cela la majorité plurielle, face à une opposition divisée.

    L'opposition joue son rôle, c'est normal : elle est à l'initiative de commissions d'enquêtes, plusieurs de ses propositions de loi ont été soutenues par le Gouvernement et la proposition de loi de M. Fauchon a été votée ce matin à l'unanimité avec l'accord du Gouvernement.

    Aujourd'hui, l'Assemblée nationale est redevenue le lieu central de la vie politique de notre pays. La majorité et le Gouvernement font la preuve de leur volonté d'agir ensemble au service de l'intérêt général. Puisse cette attitude vous inspirer dans votre opposition, qui semble appelée à durer (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste ; exclamations sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR).

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    PASSAGE À L'EURO

    M. Georges Tron - Bel exemple de réponse dénuée d'agressivité !

    Monsieur le ministre de l'économie, le passage à la monnaie unique pour les particuliers aura lieu le 1er janvier 2002. Pour que ce passage, qui est un véritable bouleversement, soit bien compris, il faut qu'il soit bien expliqué.

    D'abord, un délai est sans doute nécessaire. Or il semblerait que la période pendant laquelle le franc et l'euro circuleront en même temps doive être ramenée de six mois à deux. Est-ce exact ? La clarté est également une condition de la réussite. Ainsi, les Français pourront-ils échanger des francs contre des euros dans toutes les banques et aux mêmes conditions ? L'indulgence est elle aussi de mise. Est-il vrai que les banques pourraient pénaliser les émetteurs de chèques dès leur deuxième erreur ?

    Enfin l'opération d'échange entre francs et euros sera-t-elle gratuite pour nos concitoyens ? Et pouvez-vous assurer que l'opération de change ne se traduira pas par une hausse des prix ?

    L'échéance approche. Que compte faire le Gouvernement pour que les Français la franchissent dans les meilleures conditions ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

    M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - La question est très importante et le sera de plus en plus. Beaucoup a déjà été fait, au sein de ce qui s'appelle le Comité de l'euro.

    Sur le délai pendant lequel francs et euros circuleront en même temps, beaucoup de ceux qui réfléchissent à la question pressentent que la période pendant laquelle il sera possible, chez son commerçant, de payer en francs et de recevoir sa monnaie en euros sera la plus difficile. Leur avis est qu'il faut réduire au strict minimum cette période où les risques seront les plus élevés.

    De son côté le Gouvernement, en liaison avec les associations et les organismes concernés fait tout son possible pour aller vers la gratuité.

    A partir du 1er juillet prochain, des initiatives seront prises pour le passage à l'euro dans les administrations et au sein des pouvoirs publics. A partir du 1er janvier, ce sera le tour des entreprises, puis celui des particuliers à partir du 1er juillet 2001, car il ne paraît utile de trop les sensibiliser tant qu'ils n'ont pas en main pièces et billets.

    L'enjeu est énorme, au point que la présidence française de l'Union a mis à son programme l'échange d'information sur la façon dont chaque pays va procéder.

    Je suis convaincu que l'entrée de la France dans le XXIe siècle sera marquée par deux signes concrets : l'Internet et l'euro. Le Gouvernement est déterminé à y préparer le pays de façon précise (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

    M. Christian Martin - Très bien.

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    JOURNAL « DROITS DES JEUNES »

    M. Thierry Lazaro - Madame la ministre de la jeunesse et des sports, la semaine dernière, vous n'avez pas dit la vérité en répondant à la question de Gérard Hamel relative à la nature des partenariats conclus par votre ministère dans le cadre de la publication du journal « Droits des jeunes ». « L'Humanité » est en effet un partenaire de votre opération, à l'égal de « Libération ».

    Pouvez-vous préciser enfin quelle est la nature, notamment sur le plan financier, du partenariat conclu par votre ministère avec « L'Humanité » ?

    Pourquoi le journal diffusé auprès de tous les jeunes Français avec l'argent des contribuables fait-il la promotion de la fête de « L'Humanité », manifestation du parti dont vous êtes un membre éminent ?

    M. Jacques Myard - C'est scandaleux !

    M. Thierry Lazaro - Dans mon jeune temps, on m'expliquait que la camaraderie n'avait rien à voir avec le copinage. En serait-il autrement aujourd'hui ?

    La représentation nationale attend cette fois une réponse ni évasive ni approximative (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL ; exclamations sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste).

    Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports - La direction de « L'Humanité » doit vous remercier de la publicité que vous lui faites depuis deux semaines ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste). Je réponds toujours de façon claire et brève. Ce journal a été financé uniquement sur les fonds du budget de la Jeunesse et des sports, après appel d'offres. Pour faire connaître ce journal, nous avons conclu un partenariat avec plusieurs médias. J'ai cité « Libération » parce que ce journal a publié ce guide des droits des jeunes. Je cite maintenant tous les partenaires : « Libération », le journal « Pote-à-pote », Radio Energie, France 3, qui n'est pas spécialement de mes copains et « L'Huma-hebdo ».

    Ce partenariat est entièrement gratuit. Il reste encore deux numéros, et j'accueille toutes les propositions de médias désireux de conclure un partenariat. J'espère que vos questions permettront aux jeunes de savoir qu'ils ont à leur disposition un journal pour connaître leurs droits (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste).

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    CONDAMNATION D'UN FONCTIONNAIRE DE POLICE

    M. Didier Julia - Monsieur le ministre de l'intérieur, le 21 décembre 1997 une policière îlotière dans un quartier en difficulté voit de son balcon sa voiture en train de brûler. Elle descend, est immédiatement identifiée, les jeunes la rouent de coups et lui prennent son arme de fonction.

    Votre hiérarchie l'a félicitée pour son courage et son sang-froid.

    Malheureusement, 8 jours plus tard, nous apprenons qu'un jeune s'est fait hospitaliser sous une fausse identité pour avoir reçu par ricochet une balle dans la fesse. Rien dans l'expertise n'établit formellement que la policière a tiré avec son arme.

    Poussé par quelques associations le jeune porte plainte et la policière est condamnée à six mois de prison ferme.

    Qu'allez-vous faire pour aider cette policière, et par exemple prendre en charge ses frais d'avocat, y compris en appel ? Si vous le ne faites pas, mieux vaut donner à vos policiers la consigne de rester chez eux, de ne pas venir à l'aide des personnes en difficulté et de tourner le dos à la délinquance ! (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste ; applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

    La fracture que nous constatons parfois entre la justice et le peuple français est en train de réduire à néant votre politique de sécurité et de police de proximité.

    Qu'allez-vous faire pour soutenir vos représentants au bénéfice de la sécurité publique (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste) et de l'ensemble des citoyens ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

    M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur - La tâche des policiers est difficile. Les risques qu'ils prennent se traduisent par des milliers de blessés dans leurs rangs chaque année. Dans votre département, j'ai baptisé, il y a deux jours, la promotion Laurent Delosse, du nom du capitaine tombé en 1998.

    En même temps, je suis le gardien de la déontologie policière, et il appartient à la police nationale de l'être avec moi.

    Des faits se sont produits, que vous avez rappelés sous une forme qui vous est propre. A la suite des émeutes consécutives à la mort du jeune Bouziane en 1997, ces faits ont donné lieu à une condamnation par le tribunal correctionnel, qui va au-delà du réquisitoire du procureur.

    Il ne m'appartient pas de commenter cette décision de justice. Il revient à Mme Deberna de faire appel ou non de cette décision. Je crois savoir qu'elle le fera.

    Les faits étant en relation avec l'exercice de ses fonctions, l'Etat a pris en charge ses frais d'avocat. Mme Deberna a obtenu une nouvelle affectation en Guadeloupe.

    Presque chaque semaine revient une question d'actualité sur la sécurité qui n'est pas toujours bien fondée (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

    Depuis trois ans que je suis en fonctions, le département de Seine-et-Marne a gagné plus de deux cents fonctionnaires (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR). L'an dernier, la délinquance générale a été stabilisée et la délinquance de voie publique a considérablement diminué.

    Bref, vous feriez mieux de centrer vos questions sur les faits qui méritent d'être relevés. Le catastrophisme et l'alarmisme permanents ne sont pas de bonne politique (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV et du groupe socialiste).

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    PERSONNES HANDICAPÉES RETRAITÉES

    M. Francis Hammel - Jusqu'à une période récente, le statut des personnes handicapées retraitées ne concernait que peu de gens. Tel n'est plus le cas. Grâce aux progrès accomplis dans le domaine sanitaire et social, le nombre des personnes handicapées qui vivent au-delà de soixante ans ne cesse d'augmenter. Mais leur intégration dans le dispositif prévu pour les personnes âgées pose des problèmes particuliers de prise en charge et de cohabitation, qui varient selon leur âge, leur handicap et leur état de dépendance.

    Le 4 juillet prochain, le Conseil général consultatif des personnes handicapées examinera ce problème urgent. Quelles orientations et quelles propositions le Gouvernement envisage-t-il de lui soumettre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV)

    Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés - Le 25 janvier dernier, le Premier ministre a annoncé le lancement, pour les trois prochaines années, d'une politique globale en faveur des personnes handicapées, propre à garantir le respect de leurs droits, la liberté du choix de leur mode de vie et l'exercice de leur citoyenneté. Cette politique doit s'appliquer à tous les âges de la vie. Le processus physique de vieillissement des personnes handicapées impose des modes de prise en charge adaptés évitant, dans la mesure du possible, la rupture avec le milieu de vie ordinaire.

    Des solutions diversifiées ont déjà été appliquées par des associations ou des établissements dans de nombreux départements, souvent avec l'aide des conseils généraux. Elles doivent être évaluées avant leur éventuelle généralisation.

    L'inscription de ce thème à la prochaine réunion du Conseil national consultatif des personnes handicapées traduit la volonté du Gouvernement d'ouvrir une concertation approfondie avec les associations. Le débat s'appuiera sur les propositions déjà disponibles, qu'il s'agisse des travaux du Conseil économique et social ou des rapports parlementaires, et la réflexion portera aussi sur la politique que le Gouvernement entend mener pour la prise en charge des personnes âgées dépendantes (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

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    PRÉSIDENCE FRANÇAISE DE L'UNION EUROPÉENNE

    M. Alain Barrau - Nous avons tous intérêt à ce que la présidence française de l'Union européenne, qui débutera dans quelques jours, soit un succès. Nous l'exercerons ensemble, le Président de la République et le Premier ministre au sein du Conseil européen, les autres membres du Gouvernement dans les différents conseils des ministres. Evitons donc les prises de position politiciennes. Agissons ensemble pour aider la France à apporter sa contribution aux progrès de l'Union.

    Que comptez-vous faire, Monsieur le ministre chargé des affaires européennes, pour faire bouger l'Europe dans le domaine de l'emploi, de la sécurité maritime, de la sécurité alimentaire et de l'environnement ? Sans reprendre les priorités que le Premier ministre a énoncées ici même le 9 mai dernier, comment envisagez-vous de faire avancer l'Europe tout au long de cette présidence française ? Comment informerez-vous le Parlement de ses avancées et de ses difficultés ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV)

    M. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes - Pendant les six mois de la présidence française de l'Union européenne, la France parlera d'une seule voix. La tâche historique qui nous incombe est non seulement de réussir le CIG et de préparer l'Europe de l'avenir, mais aussi de faire avancer l'Europe, de la rendre populaire, plus proche des préoccupations de nos concitoyens.

    Le dernier Conseil européen nous a facilité la tâche en nous transmettant des dossiers en bon ordre sur les questions relatives à la croissance et à l'emploi, à la sécurité alimentaire -nous aurons à créer une autorité indépendante en ce domaine-, à la sécurité maritime, à la connaissance et à la recherche. Sur ce dernier point, nous voulons supprimer les entraves à la libre circulation des étudiants, des chercheurs et des enseignants. Dans le domaine sportif, il nous faudra régler la question des relations entre le sport et l'argent, le sport et le dopage. Bien entendu, je n'oublie pas la politique étrangère et de sécurité commune, en particulier l'immense chantier de la défense européenne qui avance bien. Nous devons être capables, à la fin de notre présidence, de fixer les structures de cette défense dans le contexte de l'élargissement de l'Europe. C'est dire que le travail ne manque pas.

    Le Gouvernement est tout entier mobilisé autour de cette présidence. Nous veillerons scrupuleusement à l'information du Parlement par le biais de ses commissions mais aussi sous des formes plus larges. Je sais que le Président de votre Assemblée y est très attaché (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

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    LA PRÉSIDENCE FRANÇAISE DE L'UNION EUROPÉENNE ET LE SPORT

    M. Henri Nayrou - Ma question a trait, Madame la ministre de la jeunesse et des sports, non au match de ce soir (Sourires) mais aux conditions dans lesquelles s'exercera la Présidence française de l'Union européenne. Ce doit être l'occasion de procéder à une harmonisation indispensable dans le domaine du sport, dès lors qu'on ne considère pas comme une fatalité la diversité des pratiques communautaires en matière de dopage, de fiscalité ou de droits de retransmission télévisée.

    Vous qui avez montré qu'un chemin existe là où il y a une volonté, Madame la ministre, que comptez-vous faire pour donner un sens plus affirmé à l'Europe du sport ? Allez la France ! Allez l'Europe ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV)

    Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports - Depuis trois ans, la France agit avec détermination pour harmoniser la lutte contre le dopage et pour faire reconnaître la singularité du sport afin que les règles communautaires ne lui soient pas mécaniquement appliquées.

    Nous avons progressé avec la création de l'Agence mondiale anti-dopage. D'autre part, le Sommet de Feira a reconnu que la spécificité du sport devait être prise en considération dans l'application des règles communautaires.

    Cela dit, il reste beaucoup à faire. En particulier, l'absence d'accord unanime au sommet de Lisbonne ne crée pas les conditions propres à garantir l'indépendance de l'Agence mondiale anti-dopage dont certains pays membres de l'Union, tout en se félicitant de sa création, ont dit qu'elle ne pourrait pas agir sur leur territoire !

    Sur la base des conclusions du sommet de Feira, il convient de reconnaître concrètement la spécificité du sport. Deux axes seront privilégiés : la protection des jeunes sportifs mineurs ; la défense des pouvoirs des fédérations en matière d'organisation des compétitions et de règles sportives. N'oublions pas que nous avons récemment échappé de peu à la création d'un championnat privé de basket-ball. L'Europe doit préserver le monopole des fédérations.

    Nous réunirons le mouvement sportif européen les 26 et 27 octobre après avoir eu un débat avec le mouvement sportif français au mois de septembre (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe RCV).

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    MONDIALISATION DE L'ÉCONOMIE

    Mme Béatrice Marre - La mondialisation suscite l'inquiétude des citoyens qui lui attribuent des effets destructeurs sur l'emploi, mais aussi sur la sécurité alimentaire et sur l'environnement, sans parler de l'uniformisation des modes de vie. Il ne se passe pas de semaine sans manifestations de protestation. La prochaine aura lieu très bientôt à Millau.

    L'idée d'une nécessaire mise en cohérence des politiques nationales et internationales semble progresser mais elle n'a de sens que si l'objectif est une régulation en faveur du développement. Pour cela, il faut rééquilibrer les pouvoirs au sein du FMI et de la Banque mondiale.

    A la veille de la Présidence française de l'Union européenne, quelles initiatives envisagez-vous de prendre, Monsieur le ministre de l'économie, pour faire progresser la régulation économique et financière internationale, qu'il s'agisse de lutter contre le blanchiment de l'argent sale ou contre la spéculation ? Je pense évidemment à la taxe Tobin (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

    M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - Je commencerai par la fin de votre question, cette fameuse taxe Tobin, dont l'idée date de 1972, et dont il serait intéressant de se demander pourquoi elle revient aujourd'hui au premier plan de l'actualité. Son succès auprès d'une partie de l'opinion et de beaucoup de parlementaires résulte de la rencontre de deux idées justes. La première est la nécessité de lutter pour le développement, car c'est à quoi devait servir le produit de cette taxe. La seconde est la nécessité d'une meilleure régulation. Je ne veux pas me prononcer aujourd'hui sur les mérites et les inconvénients de cette taxe. Le rapport de MM. Feurtet et Fuchs vient de paraître ; il souligne l'ambition de la taxe, mais aussi les problèmes qu'elle pose. Je n'en évoquerai qu'un : que se passe-t-il si un ou plusieurs pays refusent d'appliquer la taxe ?

    Mais n'entrons pas dans un débat technique.

    L'objet essentiel de votre question est de savoir comment rendre possible une meilleure régulation. C'est une question cruciale. Supposons qu'on puisse réduire la population de la terre à un village de cent habitants, en conservant tous les ratios humains, économiques et démographiques. Dans ce village, 80 personnes vivraient dans un logement de mauvaise qualité, 70 seraient analphabètes, 50 souffriraient de malnutrition. Six personnes -toutes américaines- détiendraient 59 % de la richesse, et une seule aurait un ordinateur... C'est dire quel effort gigantesque s'impose, pour inverser la spirale du sous-développement.

    C'est là qu'intervient la question de la régulation. La France, parce que c'est sa tradition, et notre conviction, a fait des propositions pour réformer le FMI, pour faire que la Banque Mondiale remplisse mieux ses objectifs, pour lutter contre les paradis fiscaux. Le 17 octobre se tiendra une réunion de tous les ministres de la justice, de l'intérieur et des finances pour lutter contre les centres off shore. La mondialisation est un fait : il s'agit de la rendre humaine et d'en contrôler les effets. Pour cela il faut une régulation internationale. C'est la tradition de la gauche, depuis plus de quatre-vingt-dix ans, d'aller dans ce sens... (Murmures sur les bancs du groupe du RPR) Mais si vous vous joignez à nous, vous serez les bienvenus ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV)

    Plusieurs députés RPR - Nous ne vous avons pas attendus !

    M. le Ministre de l'économie- Aujourd'hui beaucoup ont une réaction uniquement nationale. Or, de plus en plus, c'est au niveau mondial que les questions peuvent être résolues. Et les hommes politiques qui, dans le siècle qui vient, représenteront bien leur circonscription et leur pays seront ceux qui comprennent la nécessité d'avoir aussi une vision universelle ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe RCV et sur quelques bancs du groupe communiste).

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    SERVICES DES DOUANES

    M. Marcel Cabiddu - La lutte contre la toxicomanie est une exigence morale et politique. Les services des douanes, qui sont sous votre responsabilité, Monsieur le ministre de l'économie, ont réussi cette année des prises importantes, notamment dans le Pas-de-Calais, et ces actions doivent être saluées, tout comme les prises réalisées par ces services dans les domaines de la contrebande du tabac et des contrefaçons de produits divers. Quel bilan en tirez-vous, et quels sont vos objectifs pour améliorer encore ces résultats ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

    M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - Je sais combien vous vous préoccupez de ces questions, en tant qu'élu du Pas-de-Calais, qui est au c_ur géographique de ces problèmes. Votre question m'offre l'occasion de rendre hommage à tous les fonctionnaires des Douanes. Je me souviens d'un temps où l'on pensait que, du fait de la disparition des frontières au sein de l'Union européenne, on aurait de moins en moins besoin des douaniers. La réalité est tout autre : ces hommes et ces femmes, d'une haute conscience professionnelle, sont indispensable à la lutte contre tous les trafics. On ne peut dénoncer la toxicomanie, les paradis fiscaux, les trafics de toute nature, et refuser aux douanes les moyens de travailler. C'est pourquoi le prochain budget que nous avons préparé soutiendra leurs efforts. Nous serons comme vous à leurs côtés, et je vous remercie de me donner l'occasion de leur rendre hommage, comme à tous les serviteurs de l'intérêt général (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

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    ALLOCUTION DE M. LE PRÉSIDENT

    M. le Président - Nous approchons du terme de notre session, et de l'heure du bilan ; mais c'est, avant tout, mon sentiment sur ces neuf mois de travail que j'aimerais vous faire partager. Permettez-moi, tout d'abord, de rendre un hommage particulier à mon prédécesseur, Laurent Fabius, qui, durant cette onzième législature, a exercé sa charge et incarné sa fonction avec un talent et un savoir-faire que tous lui reconnaissent.

    Cette session a été particulièrement intense : nous avons siégé plus de mille heures, au cours de quelque deux cent cinquante séances. Je ne crois pas trahir le sentiment du plus grand nombre en affirmant que notre Assemblée a travaillé dans les meilleures conditions (Murmures sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL), en respectant notamment la règle des trois jours de séance hebdomadaires. Il reste des progrès à accomplir, mais je suis certain que nous avançons dans la bonne direction. Vous y contribuez grandement, Monsieur le ministre chargé des relations avec le Parlement, et je vous en remercie vivement. Je souhaite également exprimer ma gratitude à l'égard de chacun d'entre vous, mes chers collègues, pour votre inépuisable énergie et votre indéfectible enthousiasme, quelle que soit l'heure du jour ou de la nuit. Mes remerciements vont aussi à la presse, qui effectue un remarquable travail pour rendre compte de nos débats, ainsi qu'au personnel de l'Assemblée, dont je salue la compétence et le dévouement (Applaudissements sur tous les bancs).

    Cette session est incontestablement marquée par l'amélioration des conditions de nos échanges et de nos débats -fondement essentiel d'une véritable représentation démocratique. A cela, je vois deux raisons. Tout d'abord l'implication du Premier ministre, Lionel Jospin, qui a largement contribué au retour de la vie publique vers le Palais-Bourbon. Jamais peut-être en cette période de cohabitation, la fidélité à l'article 20 de notre Constitution ne s'est autant vérifiée : « le Gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation ». Jamais un Premier ministre n'a été aussi respectueux du pouvoir du Parlement : à aucun moment, ce gouvernement n'a fait usage de l'article 49-3 de la Constitution (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV). Quant au Parlement, il n'a pas déposé de motion de censure cette année.

    Les déclarations du Gouvernement constituent un temps fort de la vie parlementaire de notre pays. Elles répondent à sa volonté d'exposer son projet, de rendre compte de son action et à notre souci de placer l'évaluation et le contrôle au c_ur de notre activité. Cette année, à quatre reprises, notre Assemblée a eu l'occasion de dialoguer et d'interroger le Gouvernement sur les priorités qu'il s'est assignées. Au cours de la session qui s'achève, beaucoup de réformes engagées par l'équipe gouvernementale ont trouvé leur traduction dans la loi. La rénovation de la vie publique et la transformation de la société ont constitué une dimension essentielle de notre travail. J'en veux pour preuve les quarante-quatre projets et propositions de loi adoptés définitivement, à l'heure où je vous parle. Je n'en citerai que quelques-uns : la réduction négociée du temps de travail, qui a redonné espoir et confiance dans l'avenir, notamment aux jeunes ; le pacte civil de solidarité, conquis dans la douleur -mais n'est-ce pas là le propre des plus belles victoires ?- pour adapter enfin notre droit à la réalité de la société ; la loi renforçant la présomption d'innocence et les droits des victimes. Cette législature aura enfin introduit la possibilité de faire appel des arrêts des cours d'assises et renforcé les garanties lors des gardes à vue et des détentions provisoires.

    Notre activité a également beaucoup porté sur la modernisation de la vie publique. Je pense bien sûr à l'égal accès des hommes et des femmes aux mandats électifs qui traduit la révision constitutionnelle votée par le Congrès. Je pense à la limitation du cumul des mandats et à l'incompatibilité des mandats électoraux. Je pense évidemment au projet de loi constitutionnel relatif à la durée du mandat du Président de la République, voté à l'Assemblée nationale il y a quelques jours. Enfin, le vote du texte sur l'expression « Guerre d'Algérie », qui fait aujourd'hui résonner dans cet hémicycle le vibrant message de paix et d'espoir que nous adressait ici même, il y a peu, le Président Bouteflika.

    Je m'emploie avec conviction à faire vivre le débat démocratique dans cette enceinte, ce qui est parfois difficile. J'ai parlé des projets et des succès de la majorité plurielle ; mais je souhaite aussi souligner que l'opposition a pu librement s'exprimer et participer ainsi à la construction de l'édifice législatif. Majorité et opposition confondues, ce sont près de douze mille amendements qui ont été déposés et, pour plus de 30 %, adoptés. Quatorze textes d'initiative parlementaire vont devenir des lois de la République. D'ici au 30 juin, d'autres textes sont encore susceptibles d'être votés, parmi lesquels le projet de loi relatif à la chasse, dont je souhaite vivement l'adoption.

    Au c_ur de la vie publique, l'Assemblée nationale ne trouvera pleinement sa place que si elle remplit l'ensemble de ses missions. Le Parlement ne doit pas se contenter de légiférer, il doit contrôler la mise en _uvre effective des lois qu'il a votées. Commissions d'enquête et missions d'information sont des instruments qui lui permettent de remplir ce rôle essentiel. Je me réjouis que cette année les commissions d'enquête créées par notre Assemblée aient produit des rapports de qualité : sur la Corse, sur la sécurité alimentaire, sur la délinquance financière et le blanchiment des capitaux en Europe ou encore sur la sécurité maritime. La dernière en date de ces commissions rendra dans les tout prochains jours un rapport attendu sur les prisons.

    Pour autant, il serait vain de plaider pour davantage d'initiative et de contrôle sans appeler à plus d'ouverture. Elus du peuple, représentants de la nation, nous avons des droits et des devoirs. Ils s'imposent à nous et nous devons les respecter. Parmi les plus essentiels, celui de rendre à notre action la clarté nécessaire pour donner aux attentes des Français une véritable réalité. Nous leur devons en particulier plus de transparence sur la manière dont leur argent est dépensé. A cet égard, je souhaite que la réforme de l'ordonnance de 1959, qui règle les modalités de présentation et d'examen du budget, soit entreprise dans les meilleurs délais. Au-delà des clivages partisans, cette réforme a besoin de rassembler toutes les volontés pour aboutir.

    Par ailleurs, il faut éviter le foisonnement des textes législatifs, qui nuit à l'efficacité de notre travail, et veiller à une meilleure compréhension de nos débats par l'opinion. Notre Assemblée a également le devoir d'informer et de faire participer les citoyens aux travaux de leur représentation. A cette fin, elle s'est dotée d'outils efficaces qui contribuent à enraciner la démocratie dans leur vie quotidienne : notre site Internet, un des plus fréquentés parmi les sites institutionnels, qui s'est enrichi il y a quelques mois d'un forum de discussion, mais aussi la chaîne parlementaire, qui assure la diffusion des débats dans l'hémicycle et des séances de commission.

    L'approche d'un certain nombre d'échéances électorales fera sans doute dire à certains que la prochaine session sera celle de l'immobilisme. Il n'en sera rien, mes chers collègues, car je sais que le Gouvernement poursuivra jusqu'au terme de cette législature les réformes qu'il a engagées depuis 1997. C'est aussi le v_u que je forme (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

    M. Daniel Vaillant, ministre des relations avec le Parlement - Au terme de la troisième session de cette législature, vous avez raison, Monsieur le Président, de souligner que l'Assemblée nationale a bien travaillé.

    Ce seront sans doute cinquante-cinq lois que vous aurez adoptées au terme de cette session, dont deux lois constitutionnelles. Les 35 heures, le PACS, la parité, la présomption d'innocence, le mode d'élection des sénateurs, le sport, l'audiovisuel public, la baisse des impôts, le quinquennat : les sujets de réforme n'ont pas manqué.

    Sur ces cinquante-cinq lois, dix-huit procèdent d'une proposition. Pour la troisième année consécutive, un tiers des lois adoptées seront donc d'origine parlementaire. Cela n'est possible que parce que le Gouvernement reprend, dans l'ordre du jour prioritaire, les propositions examinées au titre de l'ordre du jour réservé. Ces propositions ne portent pas sur des sujets mineurs : la création du PACS, (Murmures sur les bancs du groupe UDF), la refonte de la prestation compensatoire ou encore la définition des délits non intentionnels, ce sont là des réformes importantes.

    Le Gouvernement s'est efforcé de respecter le rythme du Parlement qui n'a siégé que 105 jours cette année. Nous sommes donc loin des 120 jours autorisés par la Constitution. A deux exceptions près, toutes les séances ont eu lieu le mardi, le mercredi ou le jeudi.

    Le contrôle parlementaire est souvent à l'origine des réformes. C'est ainsi que le rapport de la mission d'information sur les tribunaux de commerce a débouché sur un projet réformant profondément les juridictions commerciales.

    En octobre prochain, vous examinerez le projet de loi sur l'épargne salariale et, de nouveau, le projet de loi d'orientation sur l'outre-mer, avant d'aborder la discussion du projet de loi de finances, qui commencera le 17 octobre.

    Je veux remercier les députés, tous les députés, pour leur contribution au débat. C'est lorsque la force de conviction des uns et des autres va de pair avec leur compétence technique -et notre Parlement est celui qui fait le plus grand usage du droit d'amendement- que le Parlement redevient le lieu central de la vie démocratique.

    A vous, Monsieur le Président, aux députés, mais aussi au personnel si compétent de l'Assemblée et aux journalistes qui suivent nos débats, j'adresse les remerciements du Gouvernement.

    Il vous reste encore deux jours de session, après lesquels je vous souhaite de prendre de bonnes vacances, au demeurant fort méritées (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

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          CHASSE (lecture définitive)

    M. le Président - J'ai reçu de M. le Premier ministre une lettre dans laquelle il demande à l'Assemblée nationale de bien vouloir statuer définitivement, conformément à l'article 45, alinéa 4, de la Constitution, sur le projet de loi relatif à la chasse.

    Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement - Nous arrivons au terme d'une discussion qui fut souvent fructueuse, toujours passionnée et parfois exaltée.

    Nous débouchons sur un projet solide, pour une chasse responsable et apaisée, conformément aux v_ux de votre rapporteur.

    Plutôt que de refaire l'exposé détaillé d'un projet dont vous connaissez les avatars, je voudrais simplement insister sur ses principaux enjeux.

    Le Gouvernement a présenté, il y a à peine trois mois, un projet qui avait l'ambition de répondre, de façon globale, aux questions auxquelles le monde de la chasse est aujourd'hui confronté. Il s'agissait d'un compromis entre les préoccupations des chasseurs et celles du reste de la société (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

    Lors de vos travaux, vous avez préservé, à quelques exceptions notables près, les dispositions qui garantissent cet équilibre subtil.

    M. Jean-Luc Warsmann - Il n'y dans ce texte ni équilibre ni subtilité !

    Mme la Ministre - Même s'il a proposé, sur tel ou tel autre point de détail, des améliorations que vous avez reprises, le Sénat l'a, quant à lui systématiquement mis à mal, avec un malin plaisir.

    M. Didier Quentin - Il a eu raison.

    Mme la Ministre - Ce texte repose pourtant sur des principes clairs et précis que je vous invite à garder en mémoire.

    Premièrement, la loi doit constituer un compromis acceptable pour toute la société française. Il ne s'agit pas de consacrer par une loi la victoire d'un camp sur l'autre, car celle-ci ne serait qu'illusoire et très temporaire (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

    Ce serait, par ailleurs, rendre un mauvais service à ceux qui, de part et d'autre, malgré les propos bien peu excusables qu'ils ont pu entendre jusque dans les enceintes du Parlement, espèrent encore trouver dans l'apaisement les voies d'un dialogue pour une chasse moderne.

    Les préoccupations des chasseurs comme celles des non-chasseurs, doivent être prises en compte avec la même attention. Elles ne sont d'ailleurs pas incompatibles, pour peu qu'on ait la volonté de résister aux tentations de l'immobilisme et du clientélisme.

    Toute autre attitude risquerait d'exacerber les conflits et de renforcer les tendances au refus de la chasse d'une partie grandissante de la société française.

    Deuxièmement, le texte doit être compatible avec le droit communautaire, faute de quoi nous ne pourrions pas faire croire très longtemps avoir trouvé une solution.

    S'il faut transposer la directive de 1979 dans notre droit interne, c'est parce qu'elle repose sur des principes de bons sens qui, en vingt ans, ont été confirmés scientifiquement. L'évolution des connaissances a montré qu'ils reposaient sur des réalités biologiques incontournables touchant à l'évolution des populations et des milieux.

    M. Christian Estrosi - C'est faux !

    Mme la Ministre - Leur mise en _uvre, dans pratiquement tous les pays européens, a montré qu'ils ne menaçaient pas la chasse quand elle est soucieuse du devenir des populations d'oiseaux.

    En adoptant la directive de 1979, les ministres et le Parlement d'alors avaient pris les mesures indispensables à la gestion durable d'espèces qui constituent à la fois un patrimoine connu et le fonds du stock de gibier pour les chasseurs. Ce fut un acte fondateur des politiques de protection de la nature.

    Enfin, ce texte vise à régler l'ensemble des problèmes qui ont surgi entre la société et le monde de la chasse et qui concernent le partage de l'espace, le droit de non-chasse, le souci de l'environnement et de la sécurité... Il faut apporter à ces problèmes une solution durable, réaliste et acceptée.

    L'équilibre que vous avez maintenu tout au long des débats, en résistant, par exemple à la tentation d'inscrire dans la loi les dates de chasse...

    M. Christian Estrosi - C'est une trahison !

    Mme la Ministre - ...cet équilibre, nous le devons à cette concertation qui a associé, dans le courant de l'année 1999, tous les acteurs de la chasse. Cette concertation fut d'une telle ampleur qu'elle restera probablement dans les mémoires comme le premier débat de société sur la chasse.

    Le Gouvernement se doit donc de vous rappeler quels étaient ses objectifs.

    Le premier, c'est que la loi relative à la chasse doit garantir l'accès aux espaces naturels et ruraux aux chasseurs comme aux autres usagers de la nature.

    La promenade, la marche ou l'observation de la nature sont des pratiques de plus en plus répandues, ce qui justifie cette multifonctionnalité que la loi d'orientation agricole a reconnu aux espaces ruraux (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

    Que ces loisirs puissent être pratiqués par tous est une contrepartie bien peu coûteuse de la solidarité nécessaire au maintien de la qualité des espaces ruraux.

    M. Christian Estrosi - Ecologisme mondain !

    Mme la Ministre - Compte tenu de la démographie dynamique de bon nombre de cantons ruraux, prétendre réserver ces aspirations aux citoyens des villes serait une erreur politique grave. Ce serait créer une opposition qui n'a pas lieu d'être dans une République, dans un pays où chacun peut être, au cours de sa vie, ou dans la même semaine -beaucoup d'entre vous pratiquent cette alternance-, parfois rural, parfois urbain...

    D'autre part, ce serait introduire un ferment de ségrégation entre citoyens au sein même des collectivités rurales, dont les populations se diversifient. Evitons donc d'entraver, par un argument de salon trop simpliste pour être juste, un processus de revitalisation presque inespéré (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

    A ceux qui mettent en avant, pour s'opposer à ce partage de l'espace, le respect du droit de propriété, il faut rappeler qu'on ne peut pas invoquer le droit de propriété pour refuser toute limitation à l'exercice du droit de chasse et, simultanément, défendre la loi Verdeille et les ACCA, qui constituent, elles aussi, une limitation au droit de propriété et au droit de chasse qui lui est attaché. On ne peut à la fois être attaché à une chasse populaire et prôner une sorte de monopole d'usage pour les chasseurs sur des espaces ou des espèces dont les vocations ne se résument pas à être exclusivement des territoires de chasse ou un gibier ! Cela reviendrait à exclure d'autres plaisirs ou d'autres usages tout aussi populaires.

    Mme Geneviève Perrin-Gaillard - Très bien !

    Mme la Ministre - Sans méconnaître le droit de propriété, le Gouvernement souhaite donc que les conditions de partage de l'espace traduisent l'évolution de notre société. D'où l'instauration d'un jour sans chasse, que vous avez déjà confirmée à deux reprises (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). D'où aussi la redéfinition du rôle des fédérations de chasseurs, dont l'objet principal est la gestion d'une richesse collective, le patrimoine cynégétique, la transformation de l'Office national de la chasse en office national de la chasse et de la faune sauvage et l'ouverture de son conseil d'administration, d'où encore l'instauration du droit de non-chasse et l'inscription dans la loi d'un titre consacré à la sécurité.

    Ces dispositions sont en même temps le gage de l'ouverture d'un dialogue entre les chasseurs et le reste de la société française (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

    Les débats qui ont précédé le travail parlementaire ont montré que la chasse doit impérativement trouver une nouvelle légitimité. Et pour que celle-ci soit durablement acquise, il faut que se poursuivent le dialogue et la réflexion collective. C'est à ce prix que sera enrayée la logique infernale des conflits qui ne profitent ni à la chasse, dont l'image se brouille, ni à la nature, dont la gestion échappe aux réalités écologiques, ni à la société, qui parfois entre sur ces sujets en tension pour des motifs somme toute mineurs.

    Plusieurs députés RPR - C'est votre faute !

    Mme la Ministre - Fonder les conditions d'un dialogue équilibré correspond bien aux attentes de tous ceux qui, sur le terrain, sont prêts à faire, tant du côté des associations de protection de la nature que du côté des chasseurs, quelques pas de plus les uns vers les autres.

    Le deuxième grand objectif du Gouvernement, c'est celui de la modernisation de notre droit de chasse, qu'il faut rendre compatible avec la réglementation européenne. Il s'agit en premier lieu de définir les périodes d'ouverture de la chasse au gibier d'eau.

    Je me félicite que personne ne conteste plus la nécessité de reprendre dans le texte les principes de la directive « oiseaux » de 1979 (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF). Rejoignant en cela l'avis du Gouvernement, votre assemblée a, à deux reprises, considéré que les périodes de chasse n'ont pas à figurer dans la loi elle-même (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). La loi doit, en effet, s'en tenir à la définition des principes. En présentant un avant-projet de décret...

    Plusieurs députés RPR - Qui a beaucoup changé !

    Mme la Ministre - Si les choses n'évoluaient pas, où serait la concertation ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV)

    Avec cet avant-projet de décret, le Gouvernement a montré qu'il était possible d'envisager des dates d'ouverture et de fermeture différenciées, respectant les principes posés par la directive et adaptées aux fluctuations de la démographie des différentes populations d'oiseaux ainsi qu'aux spécificités territoriales. La possibilité d'un moratoire, pour les espèces qui seraient en mauvais état de conservation, y est prévue mais aussi des dérogations telles que celles désignées à l'article 9 de la directive de 1979. Cette souplesse correspond bien à la double nécessité de s'adapter à la réalité, année après année, et de laisser une place aux concertations nécessaires entre chasseurs, scientifiques et protecteurs de la nature.

    S'agissant de la chasse de nuit, tout en récusant l'idée avancée par le Gouvernement d'une dépénalisation temporaire et expérimentale de cette pratique, vous avez souhaité une légalisation explicite dans 21 départements, ainsi que dans des secteurs plus limités, d'un ou plusieurs cantons. Aller plus loin, en abandonnant par exemple le critère de la tradition et donc de l'ancienneté de la pratique, ne pourrait qu'aggraver la fragilité du texte et risquerait d'occasionner des contentieux difficiles avec l'Union européenne.

    Ici comme ailleurs, surenchère, rigidité et démagogie seraient mauvaises conseillères (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL), d'autant que les dispositions que vous avez adoptées en matière de chasse à la passée prêtent déjà le flanc à la critique de la Commission.

    S'agissant des adaptations qu'il convient d'apporter à la loi Verdeille après la décision de la Cour européenne des droits de l'homme, si chacun s'accorde maintenant à reconnaître le droit de non-chasse, le Gouvernement se doit de recommander d'éviter de multiplier les restrictions à son exercice. Toute disposition qui en rendrait l'exercice difficile, voire impossible, viderait le symbole de son sens et choquerait non seulement les opposants à la chasse mais aussi des convictions, beaucoup plus partagées que l'opposition à la chasse, qui ont trait à l'équité et à la liberté.

    Enfin, la loi clarifiera les rôles. A l'Office, le soin de réaliser des études, de constituer l'expertise, de mettre à disposition un appui technique qui permettra de renforcer la préservation et le développement de l'ensemble de la faune sauvage, à lui encore de délivrer le permis de chasser et d'exercer la police de la chasse. Aux fédérations départementales celui de travailler sur le terrain à la mise en valeur du patrimoine cynégétique et de proposer les schémas de gestion cynégétique. A elles aussi de financer et d'organiser l'indemnisation des dégâts de gibier.

    Pour conclure, je voudrais vous inciter à ne pas en rester à une conception de la chasse frileusement repliée sur elle-même. La société, les modes de vie et les besoins de nos concitoyens ont connu des transformations importantes. La conception que se font les chasseurs eux-mêmes de la chasse évolue.

    Il était temps de faire évoluer simultanément le droit de la chasse et son organisation. Sinon, nous risquerions de laisser grandir une distorsion entre la réalité des pratiques ou des attentes et les modalités de leur encadrement. C'est tout à l'honneur du Parlement de fixer les objectifs et les règles de cette mutation, attendue tant par un grand nombre de chasseurs que par le reste de la société qui, pour majoritairement urbaine qu'elle soit maintenant, conserve des racines rurales et reste attentive au devenir des espaces naturels, aux activités qui s'y développent et aux plaisirs qu'ils offrent (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV et du groupe socialiste).

    M. François Patriat, rapporteur de la commission de la production - Il y a un an, le Gouvernement s'engageait premièrement à ouvrir le dialogue, deuxièmement à faire des propositions, et enfin à déposer sur le Bureau de cette Assemblée un projet de loi susceptible d'être voté avant la fin de cette session. Une fois de plus, c'est à son honneur, le Gouvernement a dit ce qu'il ferait et fait ce qu'il avait dit (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). Combien de gouvernements avant celui-ci avaient-ils osé s'affronter à ce problème ?(Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

    Pendant trois mois, nous avons ouvert le dialogue avec toutes les parties. Certaines ont annoncé qu'elles ne céderaient sur rien. Je ne m'adresse pas à elles aujourd'hui mais à tous les citoyens chasseurs et non-chasseurs qui ont accepté le dialogue et qui, aujourd'hui, souhaitent qu'on en finisse avec ce problème qui, certes, n'est pas secondaire, mais qui n'est tout de même pas du même ordre que les problèmes de chômage ou de santé.

    C'est votre mérite, Madame la ministre, que d'avoir courageusement, dans un contexte difficile, mené le dialogue (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Il débouche aujourd'hui sur un texte qui ne peut évidemment satisfaire tout le monde, et en tout cas pas ceux qui sont prêts à flatter toutes les démagogies, au mépris des autres composantes de la population (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

    Nos propositions s'articulaient autour de principes simples : dialogue, sécurité, gestion, structures... Et nous avons tenté d'apporter des réponses compatibles avec un développement durable (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Que veut dire « durable » pour la chasse ? Cela ne signifie en tout cas certainement pas tirer tous les jours sur les animaux quand ils passent ! Non, cela signifie : assurer la pérennité de la ressource, le maintien des espèces, la sauvegarde du biotope... (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) Les chasseurs le font, d'ailleurs.

    M. Christian Estrosi - Alors pourquoi le mettre dans la loi ?

    M. le Rapporteur - Dans une lettre écrite le 8 mars 2000, le président Dayan disait que s'il devait être rapporteur, il y aurait quinze points sur lesquels il insisterait. Sur ces quinze points, quatorze ont aujourd'hui trouvé une issue favorable.

    M. Charles de Courson - Vous ne citez pas la lettre du 26 juin !

    M. le Rapporteur - De l'autre côté, il y a les opposants à la chasse. Que voulaient-ils ? L'application de la directive européenne ? Il est temps de s'y mettre. Un droit de non-chasse reconnu et respecté ? Il le sera. Une période de repos pour les habitats et pour les espèces ainsi qu'un jour de non-chasse ? C'est acquis. Une clarification du rôle des fédérations ? C'est chose faite. Un renforcement de la formation des chasseurs ? Il existe.

    Une élue de l'Orne nous a taxés tout à l'heure d'immobilisme. Mais l'immobilisme consisterait au contraire à ne rien changer, à ne pas prendre en compte les attentes de la société, à refuser de partager l'espace, à ne pas se soucier de la préservation des espèces... L'immobilisme se situe bien du côté de ceux qui défendent des positions extrêmes ! (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) Je refuse pour ma part toute outrance et tout anathème et je défends une vision de la politique qui est faite de convictions, d'écoute, de fermeté et de courage face à tel ou tel lobby !

    Cette loi n'est pas un aboutissement en soi mais elle permettra d'ouvrir un nouveau dialogue entre chasseurs, promeneurs, adeptes du VTT et tous ceux amenés à partager l'espace naturel et rural. Cette voie du dialogue et de la sagesse nous conduira, comme cela s'est fait dans d'autres pays de l'Union européenne, à la chasse apaisée que j'appelle de mes v_ux et que favorisera, j'en suis convaincu, ce projet de loi (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

    M. Jacques Rebillard - Ce texte est le fruit d'une recherche de compromis sur la chasse tenant compte d'un contexte qui a beaucoup évolué depuis vingt ans : ratification de la directive « Oiseaux », évolution du droit européen sur la propriété privée, nécessité de revoir le fonctionnement de l'ONC, créé en 1972, et des fédérations départementales de la chasse.

    Il était indispensable de redéfinir les rapports entre la chasse et la société et c'est à l'honneur de ce gouvernement de l'avoir fait, dans un contexte difficile, où on a parfois allègrement mélangé la chasse, la défense de la ruralité et la défiance à l'égard de l'Europe.

    Les députés radicaux et MDC ont voté ce texte en deuxième lecture et maintiendront cette position, sauf si des amendements en dénaturaient le fond.

    Nous souhaitons qu'on passe aujourd'hui à une nouvelle étape, celle d'un dialogue riche entre la société et les chasseurs -les vrais défenseurs de la chasse ne sont pas toujours où l'on croit ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV et du groupe socialiste)

    M. Antoine Carré - Le soulagement sera grand pour les parlementaires de la gauche plurielle après ce vote -mais il risque de n'être que momentané !

    Le marathon parlementaire sur cette loi aura marqué les esprits plus par les passions qu'elle a générées que par la réflexion et les progrès qu'elle est censée apporter. Nous sommes loin de la préoccupation initiale d'une chasse apaisée...

    Madame la ministre, n'osant dire que vous n'aimez pas les chasseurs, je pense seulement que vous ne connaissez pas la chasse ! (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR) C'est d'ailleurs ce qui nous a conduits à demander le rattachement de la chasse au ministère de l'agriculture.

    La chasse n'est pas un sport ou un loisir quelconque, elle touche à des traditions ancestrales, elle est un art de vivre auquel beaucoup de Français ne voudraient renoncer pour rien au monde. Cette activité, vécue avec passion, a des liens charnels avec la nature. C'est indéniablement un facteur de cohésion du monde rural, une culture et elle ne peut être la cible d'une réglementation pointilleuse et avide.

    Voilà pourquoi le Gouvernement aurait dû accepter des amendements essentiels à la poursuite de cette noble activité.

    Prévoir le contrôle a priori et a posteriori des budgets des fédérations départementales de chasse relève de la brimade : les trois cas d'irrégularités cités par la Cour des Comptes ne justifient pas cette disposition disproportionnée. Pour l'élection des administrateurs, le système un homme égale une voix sera très difficile à mettre en place et la procédure de délégation devrait être maintenue.

    En ce qui concerne la chasse de nuit, un recensement sérieux aurait établi que 28 départements la pratiquent. Votre texte n'en retient que 21...

    S'agissant des dates de chasse, vous nous aviez laissé espérer, comme à vos amis de la gauche plurielle, un arrêté donnant satisfaction aux chasseurs d'oiseaux migrateurs. Il n'en est rien. Les dates que vous proposez vont provoquer des situations ubuesques. Dans le Loiret, la chasse au pigeon ramier risque d'être fermée le 28 février et réouverte le 1er mars par autorisation de destruction d'espèces nuisibles. Ce n'est pas très cohérent ! Il faut reprendre l'amendement du Sénat sur ce point et défendre la même position au niveau européen : en cas d'échec, il conviendrait d'appliquer le principe de subsidiarité (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR).

    Le jour de non-chasse est déjà en vigueur dans 60 départements français, suite à des accords entre les fédérations et les préfets. Il ne peut être bien accepté que dans ces conditions. Son inscription dans la loi sera source de conflits.

    S'agissant de la lutte contre le braconnage, l'amendement proposé par le Sénat doit être adopté. Les nomades qui chassent sur des terrains non clos ne sont jamais sanctionnés : les procès-verbaux dressés par les gardes n'ont aucun effet car ces braconniers sont introuvables dans leur commune de rattachement. Il est donc nécessaire de pouvoir leur confisquer les armes sur place.

    En acceptant ces amendements, vous aboutiriez à un texte cohérent et n'excluant pas ce que vous appelez « les usages non appropriatifs de la nature ». Cela vous épargnerait ce concert de voix discordantes dans votre propre camp et éviterait à votre majorité plurielle de voter par discipline, mâchoires serrées et lèvres pincées ! (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR)

    Si les amendements déposés ne sont pas adoptés, le texte mécontentera tout le monde et le groupe DL votera contre avec force et conviction (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR)

    M. Christian Bataille - Contrairement à ce que je viens d'entendre, nous avons recherché et continuons à rechercher les voies d'un équilibre (Protestations sur les bancs du groupe UDF et du groupe du RPR).

    En vertu de l'article 45 de la Constitution, c'est du texte que nous avons voté le 14 juin que nous sommes saisis : nous ne pourrons donc que le confirmer ou, tout au plus, le modifier par quelques amendements rédactionnels empruntés au Sénat -notre rapporteur nous précisera lesquels.

    Les débats et la deuxième lecture ont permis d'améliorer l'équilibre du texte.

    Vis-à-vis de l'Europe, l'article 10 présente une solution acceptable : les dates de chasse seront fixées par l'autorité administrative en tenant compte des cycles de reproduction des espèces. Le principe de dérogations limitées pour les oiseaux migrateurs est inscrit dans la loi.

    Les chasseurs français trouvent aussi leur compte dans ce texte : il affirme l'autonomie des fédérations de chasse par rapport aux pouvoirs publics, leur transfère l'indemnisation des dégâts, étend leurs missions de formation des futurs chasseurs, fixe un cadre légal à des activités controversées comme la chasse à la passée et la chasse de nuit, et ceci dans le respect des usages locaux.

    Quant aux adversaires de la chasse, ils se réjouiront de l'insertion de la chasse dans une optique de développement durable, de la création d'un droit de non-chasse, de l'alignement de la loi Verdeille sur la jurisprudence communautaire et de l'instauration d'un jour sans tirs.

    Personne n'est donc ignoré par la législateur. Ce texte d'équilibre introduit en outre des règles de sécurité et une définition de la chasse. Enfin l'adoption de cette loi et le contrôle constitutionnel préciseront le caractère législatif ou réglementaire des dates de chasse pour couper court aux velléités de calendriers sauvages, ainsi que la nature expropriatrice ou neutre de l'interdiction hebdomadaire de tir.

    Assurément pour légitimer la chasse nous l'aurons un peu plus codifiée. Mais qui le regrettera si cela permet sa pratique par les uns sans heurter les autres ? Certes, certains voudraient continuer à chasser sans aucune entrave mais qui peut aujourd'hui prétendre à une telle licence ? Qui oserait se prétendre à l'abri des lois tout en sollicitant les suffrages populaires ? Oui, la chasse de demain sera un loisir policé, mais est-ce un mal, si telle est la volonté du plus grand nombre ?

    Pour retarder le cours des choses, l'opposition peut présenter la totalité des amendements adoptés par le Sénat. Est-ce constructif ? Nous agissons sous le regard de nos voisins européens (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Nous ne sortirons pas grandis d'une impasse où la France se serait enlisée au moment de prendre la présidence de l'Union et se serait mise à la merci des poursuites et des astreintes communautaires. Nous agissons aussi sous le regard de nos concitoyens. Parmi les 1,5 million de chasseurs qui suivent de près nos délibérations, quelques-uns fulminent, mais la grande majorité se retrouve dans ce compromis, et le reste des Français demande l'armistice. Peut-être faut-il encore améliorer aujourd'hui l'équilibre que nous avons construit. Ce texte ne sera pas une loi écrite par un chasseur pour les chasseurs. Il ne sera pas non plus une machine infernale dirigée contre un loisir populaire.

    Il s'agit d'un texte voté par des députés pour leurs concitoyens au mieux de l'intérêt collectif.

    Nous tirerons plus tard les leçons de la loi sur la chasse. Elles ne toucheront sans doute pas cette activité, mais un geste plus ancien de l'homme : se donner des normes acceptées par le plus grand nombre. Nous avons discuté, et je veux saluer l'esprit dans lequel la ministre a voulu entendre nos souhaits d'amélioration (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL ; applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV).

    La loi sur la chasse est emblématique de notre capacité à faire émerger l'intérêt général parmi les intérêts particuliers. Cette mission n'a jamais été facile. Aujourd'hui elle est devenue un défi.

    En échouant, nous validerons la primauté de la revendication particulière. En réussissant, nous affirmerons une volonté d'ensemble. Le choix est simple : faisons un fois de plus ce qui n'appartient qu'à nous, une loi d'intérêt général. Ma conclusion se trouve dans la Déclaration des droits de l'homme de 1789 : « La loi est l'expression de la volonté générale. Tous les citoyens ont droit de concourir personnellement ou par leurs représentants à sa formation. Elle doit être la même pour tous ». C'est dans cet esprit que le groupe socialiste adoptera le projet (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

    M. Charles de Courson - Ce mercredi 28 juin 2000 restera inscrit dans les annales de l'histoire de la chasse.

    Comme pour toutes les grandes batailles parlementaires, nous nous retrouvons avec deux camps en présence.

    D'un côté, celui des « ultras », qui se rangent derrière Mme Voynet, trop souvent soutenue par le rapporteur, et qui font preuve d'intransigeance idéologique (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR), refusant de respecter les traditions et la culture du milieu de la chasse, qui est autant urbain que rural.

    De l'autre, sur les bancs de l'opposition, du groupe communiste, et même de certains membres du groupe socialiste, tous ceux qui ont cherché un consensus et vous ont fait des propositions équilibrées, dans le double respect de la jurisprudence communautaire et des droits des chasseurs comme de ceux des non-chasseurs.

    Dès la première lecture, nous vous invitions à partager une triple ambition pour le monde rural qui consistait à mettre notre droit interne en conformité avec les exigences européennes ; à permettre l'exercice d'une activité cynégétique dans un cadre juridique clair et stable ; enfin, à moderniser les structures et les institutions en s'appuyant sur les fédérations, faisant prévaloir une idée qui nous est chère : il faut s'appuyer sur la société civile pour régler une bonne partie des problèmes de la société (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR).

    Alors que nous souhaitions donner à la chasse une nouvelle place dans notre société, et affirmer qu'elle constitue une activité de gestion harmonieuse de l'espace rural, nous nous sommes heurtés tant à la volonté de blocage qu'à l'intransigeance du rapporteur, qui est apparu sur de nombreux points moins comme le rapporteur de notre Assemblée, que comme le porte-parole de la ministre (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR).

    L'échec de la CMP le 29 mai en a été l'illustration. Comme l'a souligné Mme Heinis, rapporteur du Sénat, notre rapporteur s'y est montré aux « antipodes de notre volonté de compromis », puisqu'il a d'emblée énuméré pas moins d'une quinzaine de « points durs » qui, selon lui, rendait impossible tout accord avec l'opposition.

    Pour vous prouver, une fois encore, notre bonne volonté, nous ne présenterons que six amendements essentiels. Ils portent sur des questions que nous jugeons cruciales. Si vous les refusez, vous courez le risque de faire voter une loi qui sera totalement inapplicable. Vous n'aurez réussi qu'à obtenir ce que vous prétendiez vouloir éviter : la poursuite de contentieux interminables, la multiplication des tensions entre partisans et adversaires de la chasse, l'enracinement d'une fracture idéologique entre urbains et ruraux.

    Nos propositions s'articulent autour des quatre points suivants :

    Clarifier le statut et les missions de l'ONC qui doit rester un organisme public de gestion de la chasse. Nous veillerons donc à ce que son conseil d'administration soit équilibré et à ce que les chasseurs y soient justement représentés, à hauteur d'un tiers. De même, l'ONC ne doit bénéficier que de fonds publics, les ressources de l'établissement qui proviennent des redevances cynégétiques étant affectées exclusivement à des actions en faveur de la chasse et des espèces chassables.

    Conférer aux fédérations départementales de chasseurs un véritable statut associatif que la jurisprudence constitutionnelle de 1996 leur reconnaît déjà. C'est pourquoi il convient de les démocratiser et de les libérer d'une tutelle créée par le gouvernement de Vichy.

    Inscrire dans la loi, tout en respectant la jurisprudence communautaire, mais conformément au principe de subsidiarité, des dates d'ouverture et de fermeture de la chasse au gibier d'eau et aux oiseaux migrateurs, qui soient échelonnées dans le temps, et modulées par espèces et par départements. C'est la condition sine qua non, Madame la ministre, pour mettre en _uvre une chasse « responsable et apaisée » ; c'est aussi la condition minimale pour que nous votions ce texte. J'appelle l'attention de mes collègues socialistes sur le fait que l'amendement que nous vous proposons à l'article 10 a été adopté à l'unanimité par le Sénat et qu'il reprend l'amendement déposé ici même par Henri Sicre, président du groupe d'études sur la chasse. Je ne rappellerai pas les pressions scandaleuses qui ne lui ont pas permis de défendre son propre amendement !

    Enfin, la légalisation de la chasse de nuit dans l'ensemble des départements dans lesquels elle est traditionnellement pratiquée. Vous rendez-vous compte qu'en autorisant la chasse de nuit dans 21 départements uniquement, vous laissez les 7 autres dans une situation juridique intenable, et vous préparez de multiples tensions sur le terrain, si vous ouvrez la voie d'une extension par décret, contrairement à vos propos de deuxième lecture. Nous veillerons également à ce que vous ne programmiez pas la disparition à terme de cette activité cynégétique, en nous opposant au gel des postes fixes à compter du 1er janvier 2000.

    Voilà nos positions qui permettraient de sortir la chasse de l'étau dans lequel vous l'avez placée, avec l'aide du rapporteur.

    Je voudrais, Monsieur le rapporteur, vous lire la dernière lettre, celle du 26 juin 2000, dont vous avez soigneusement évité de parler, adressée par le président de l'Union nationale des fédérations départementales de chasseurs, et qui dit le contraire de ce que vous déclariez tout à l'heure.

    M. le Rapporteur - Je n'y peux rien s'il se contredit !

    M. Charles de Courson - « Je ne vous cacherai pas le désarroi de bon nombre de mes collègues après le passage du projet en deuxième lecture à l'Assemblée. Le choix de la voie réglementaire pour fixer les périodes de chasse des migrateurs en l'absence d'engagements clairs sur les dates et certaines espèces ne pourra pas amener l'apaisement que nous souhaitons. Au point que bon nombre de présidents fédéraux ont déjà appelé bon nombre de parlementaires à ne pas voter le projet, en considérant que l'étatisation des structures, et en particulier le carcan des contrôles a priori sur les budgets des fédérations, leurs missions et leurs ressources, est synonyme de disparition programmée sous couvert de démocratisation. Dans ces deux domaines un signe fort doit être donné aux chasseurs par l'Assemblée. »

    Est-ce ce que vous avez entendu de la bouche du rapporteur, qui expliquait que 14 des 15 points demandés par le président de l'Union en mars étaient réglés ? Vous prenez vos désirs pour des réalités, Monsieur le rapporteur !

    En l'état actuel, votre texte non seulement ne permettra pas une chasse apaisée, mais se révélera inapplicable. Nous en sommes quasiment arrivés à un point de non-retour : plus personne aujourd'hui n'a confiance en vous (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR), quant à la fixation par décret des dates d'ouverture et de fermeture de la chasse. Une partie de votre majorité sent bien l'impasse dans laquelle vous l'avez conduite, et ce ne sont pas nos collègues communistes qui nous contrediront sur ce point.

    Alors, le groupe UDF en appelle à la conscience, à la dignité et à l'esprit de responsabilité de nos collègues socialistes. Y aurait-il deux partis socialistes ? L'un qui défendrait la chasse au Sénat, l'autre qui marcherait en rangs serrés, derrière la ministre et le rapporteur pour s'opposer au premier ?

    Pour préserver l'unité de façade de la majorité plurielle, dont la composante « Verte » reste résolument anti-chasse, le groupe socialiste du Palais-Bourbon est prêt à accepter un texte qui déstabilisera durablement la pratique cynégétique. Je ne peux que m'étonner de vous voir ainsi vassalisés et inféodés (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste ; applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR). Ceux qui vont voter pour ce texte en l'état sont-ils bien conscients de ce qu'ils font ? En obéissant aux ordres de la rue de Solférino, ils auront peut-être gagné leur investiture, mais ils y auront aussi perdu leurs électeurs.

    Je n'aimerais pas, mes chers collègues, être à votre place lorsque vous devrez expliquer à ceux qui vous ont fait confiance comment vous êtes devenus les otages d'un petit groupe de six députés Verts partisans de l'anti-chasse !

    Regardez bien où sont la sagesse et l'équité. En votant les six amendements que le groupe UDF et toute l'opposition vous proposent, vous assurerez la paix civile et une chasse apaisée (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL).

    M. Maxime Gremetz - Nous abordons la dernière ligne droite de l'examen de ce projet.

    Nombreux sont ceux qui pensent que nous ne reparlerons pas de chasse, dans cet hémicycle, avant longtemps. Ils se font des illusions car ce projet n'est qu'une étape sur la voie d'une vraie réforme de la chasse qui donnera enfin toute sa place à la chasse populaire.

    Quelle que soit l'issue du vote solennel de ce soir, il nous faudra terminer demain ce que nous avons commencé hier.

    Le groupe communiste, loin des querelles politiciennes (Rires sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)...

    M. le Président - Je vous prie de garder une certaine dignité. On peut être sérieux, même lorsqu'on parle de la chasse.

    M. Maxime Gremetz - Le groupe communiste a donc abordé ce débat dans un esprit constructif, parce qu'il était urgent de mettre un terme à vingt ans d'un contentieux qui pollue la vie des chasseurs de notre pays.

    Ce contentieux a pour origine une directive européenne votée en 1979 par une droite unanime qui se croit aujourd'hui autorisée à nous donner des leçons de morale sur la défense de la chasse ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste)

    Vous avez la mémoire courte ! De surcroît, lorsque vous disposiez d'une majorité de plus de 470 députés, vous n'avez jamais eu le courage d'entreprendre une réforme globale, comme nous l'avons fait depuis le mois de janvier (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste ; protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

    Mais il y a pire : c'est par votre absence, en commission pour débattre des amendements et dans l'hémicycle pour les voter que vous avez vraiment trahi la chasse et les chasseurs (Nouveaux applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

    Combien étiez-vous le 14 juin, à 6 heures du matin, au moment du vote définitif ? Vous étiez 7 parlementaires de droite présents en séance, alors que nous étions 33 députés de la majorité à nous opposer à ce texte.

    En vous désintéressant à ce point du projet, vous avez montré aux chasseurs que ce sujet n'était pas une de vos priorités. Au contraire, les communistes ont toujours considéré la chasse comme un sujet important, et ils l'ont démontré tout au long du débat (Exclamations et interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

    M. le Président - J'ai entendu quelques signes d'encouragement venant de la droite de l'hémicycle lorsque M. Gremetz est monté à la tribune. Je vous invite maintenant à le laisser parler.

    M. Maxime Gremetz - A la différence d'autres groupes politiques, nous avons abordé ce débat avec la volonté d'aboutir à un compromis, propre à garantir le maintien d'une chasse populaire et à assurer la protection des espèces sauvages et des habitats.

    Personne n'a le monopole de la défense de la ruralité ou de l'environnement. Jamais, nous n'avons voulu défendre un camp contre l'autre. Notre collègue François Liberti a tout fait pour que nous dépassions l'opposition entre partisans et opposants à la chasse.

    Il n'a jamais été question pour nous d'en faire une querelle idéologique, comme certains de nos amis de la majorité, ou un fonds de commerce électoral, comme certains mouvements politiques de défense de la chasse. L'extrémisme de certains a provoqué des situations de blocage, qui font que ce projet n'est qu'une première étape, alors que nous aurions pu aboutir à un texte définitif.

    Bien entendu, le texte initial du projet a été amélioré, notamment grâce au groupe communiste.

    Nous nous sommes battus pour que la chasse de nuit soit légalisée dans 28 départements. Nous avons obtenu satisfaction dans 21 départements et j'espère que cette chasse sera autorisée, grâce au vote d'aujourd'hui, dans les cantons de 7 autres départements où elle est traditionnelle.

    De même, nous avons obtenu que la chasse à la passée soit permise deux heures avant le lever du soleil, et deux heures après son coucher.

    Nous avons aussi pesé pour améliorer le fonctionnement démocratique des fédérations selon le principe « un homme, une voix » et les polémiques médiatiques sur l'argent des chasseurs ne nous ont pas fait changer d'avis.

    Nous avons toujours défendu l'originalité du système associatif avec les 50 000 associations locales de chasse et les fédérations départementales chargées de missions de service public. Nous avons fermement combattu tous les amendements tendant à une étatisation rampante de la chasse.

    Je rappelle à ceux qui l'auraient oublié que si la faune sauvage se porte de mieux en mieux, ce n'est pas grâce à la prolifération des lois et règlements, mais parce que le modèle français de gestion associative de la chasse est une forme d'autogestion qui responsabilise les citoyens dans la gestion d'un patrimoine commun. De surcroît, non seulement la chasse ne coûte rien au contribuable français mais elle rapporte à l'Etat. Cela dit, le projet a introduit des contrôles inutiles, sur les fédérations départementales et sur la fédération nationale.

    En première lecture, nous nous sommes abstenus, mais nous pensions qu'il fallait encore progresser sur certains points. Après la commission mixte paritaire et le non-respect de certaines promesses, nous avons voté contre le texte, en deuxième lecture, pour marquer notre détermination et notre colère. Dans un esprit constructif, nous avons mis à profit ces dernières semaines pour aboutir à un projet plus conforme à nos aspirations.

    Mme la ministre a finalement donné son accord pour que la chasse de nuit soit autorisée, dans les sept départements où elle est traditionnelle. Nous nous félicitons aussi, que sur notre demande insistante, l'ouverture de la chasse jusqu'au 20 février ait été étendue à un plus grand nombre d'espèces. Nous avons aussi demandé que la notion de grandes régions de nidification soient supprimée. Dans un souci de compromis, nous souhaitons que la plupart des espèces migratrices soient chassables du 10 août au 20 février. A cet égard, il est indispensable que le décret à venir, qui récapitulera les dates de fermeture de la chasse pour les différentes espèces précise bien que cette date du 20 février s'inscrit dans un cadre dérogatoire.

    Enfin, nous regrettons que, pour des questions de procédure, notre Assemblée ne puisse examiner l'amendement adopté à l'unanimité par le Sénat sur le jour de non-chasse. De ce fait, la loi comportera un mauvais article sur ce sujet important. Nous continuerons donc de rechercher une solution satisfaisante avec le Gouvernement.

    Bref, le groupe communiste a montré qu'il n'était pas favorable à la politique du tout ou rien, qui ne pourrait que nuire aux chasseurs. En l'état, cette loi ne nous satisfait pas complètement (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) et certains de ses articles devront être revus, mais l'absence de loi aurait été une catastrophe, car elle aurait signifié la fin de la chasse à la passée et de la chasse de nuit.

    Demain, les « Y a qu'à » et les « Faut qu'on » nous expliqueront que cette loi est mauvaise. Que les chasseurs se méfient de ces beaux parleurs. Cette loi est perfectible. Le groupe communiste s'y emploiera. Dans le contexte actuel, si les avancées que nous avons négociées sont confirmées, le groupe communiste adoptera une attitude responsable (Rires sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) en s'abstenant dans ce vote (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur quelques bancs du groupe socialiste ; huées sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

    M. Jean-Claude Lemoine - Nous voici en dernière lecture, le dernier round, pourrait-on dire, entre ceux qui, comme nous, croient à une chasse conçue comme sport, loisir, contribution à l'équilibre naturel, et ceux qui n'y croient pas ; entre ceux qui, comme nous, veulent un consensus sur une chasse apaisée et ceux qui campent sur les positions du Gouvernement ; entre ceux qui, comme nous, veulent maintenir les espèces en bon état de conservation en s'appuyant sur les données scientifiques actuelles, et rendre la chasse en France conforme au droit communautaire, et ceux qui sont prisonniers de leur idéologie ou qui veulent, sacrifiant leur propre conviction, souder une majorité plurielle.

    Nos trois principaux points de divergence sont les suivants. Le premier porte sur la liste des départements où la chasse de nuit est légalisée. Comment accepter que la loi reconnaisse une tradition chez certains et l'ignore chez d'autres ? Ainsi cette tradition est reconnue dans mon département de la Manche, et j'en remercie Mme la ministre et M. le rapporteur, mais elle est ignorée de l'autre côté du Couesnon, en Ille-et-Vilaine... Non ! Soyez républicaine, Madame la ministre, et traitez de façon égale les citoyens de tous les départements, héritiers de cette tradition. Adoptons le texte du Sénat qui retient vingt-huit départements. C'est un problème d'équité. Nous étions partis de quarante-et-un départements : treize ont été supprimés. Vous voyez quelles concessions nous avons déjà faites.

    Second point de divergence : le traitement réservé à l'ONC et aux fédérations de chasseurs. Pourquoi les traiter autrement que toutes les fédérations sportives, et les mettre sous tutelle ? Et comment les chasseurs accepteraient-ils de financer l'ONC sans conserver aucun droit de regard sur l'utilisation de leurs subsides qui pourraient, pour comble, être utilisés à des fins opposées à la chasse ? Ne manifestez pas une telle méfiance à l'égard des chasseurs et ne les humiliez pas. Nous acceptons que l'ONC devienne Office de la chasse et de la faune sauvage : acceptez de votre côté que les chasseurs aient une place suffisante dans son conseil d'administration, au moins un tiers, à défaut d'une parité, qui serait pourtant légitime, avec les représentants de l'Etat et de la société civile. Nous avons fait des concessions : suivez notre exemple.

    Mais la question essentielle est celle des dates d'ouverture et de fermeture de la chasse aux migrateurs. Leur fixation doit répondre à trois objectifs. Le premier est de rétablir la paix dans les campagnes et de rassurer les chasseurs, qui en ont bien besoin. Il faut en second lieu maintenir les espèces en bon état de conservation. Il faut enfin rendre les dates conformes à la directive européenne, pour éviter tout contentieux.

    Deux points nous opposent aujourd'hui sur ce sujet : faut-il confier au législateur ou à l'administration le soin de déterminer le calendrier ? Et quel doit être celui-ci ? Sur le premier point, nous voulons l'inscription des dates dans la loi, indispensable pour éviter la plupart des contentieux, et surtout pour rassurer les chasseurs. Pour vous cette mesure relève du domaine réglementaire. J'objecterai l'arrêt rendu le 9 juin dernier par le Conseil d'Etat, qui reconnaît la compétence du législateur en matière de fixation du calendrier des périodes de chasse. Il reconnaît en effet la délégation de compétence faite par le législateur à l'autorité administrative : si le législateur peut déléguer cette compétence, c'est qu'elle lui appartient. Vous devriez donc accepter d'inscrire les dates dans la loi, pour rassurer les chasseurs et rétablir la paix. Paris valait bien une messe : le calme dans nos campagnes mérite bien cette concession de votre part. Acceptons donc la position du Sénat. D'autant que le droit de chasse découle directement du droit de propriété, sur lequel seul le législateur est compétent. De plus, le code rural punit la chasse en temps prohibé d'un emprisonnement de dix jours à un mois ; or le Conseil constitutionnel a estimé que les peines privatives de liberté relevaient nécessairement de la compétence du législateur. Voyez, il n'y a donc aucune raison de refuser l'inscription des dates dans la loi : ce serait une obstination inconcevable.

    Venons-en aux périodes de chasse elles-mêmes. Je le rappelle tout d'abord, la directive européenne n'impose aucune date et en laisse la fixation aux Etats-membres. Son objectif, la conservation des espèces, ne peut être atteint que par les plans de gestion que nous préconisons et qu'a prévus le Sénat ; elle ne dépend en rien des prélèvements effectués en février ou en juillet-août. J'en veux pour preuve le fait qu'avant 1946, la chasse aux oiseaux migrateurs se pratiquait toute l'année. A partir de 1946, les chasseurs -ce fut leur décision- l'ont réduite du 14 juillet au 31 mai ; à partir de 1952, du 14 juillet au 31 mars, sauf pour les avrillots ; enfin en 1971 ils l'ont réduite à sept mois et demi. Or, à ces époques, les chasseurs étaient plus nombreux qu'aujourd'hui, aussi adroits, et consacraient plus de temps à leur sport. Pourtant la majorité des espèces est toujours en bon état de conservation, si ce n'est en progression. Reconnaissez cette évidence : seuls les plans de gestion permettent la conservation des espèces ; à la Commission d'accepter les dérogations que nous déciderons, sur des bases argumentées, telles qu'elles sont présentées dans le mémoire du Gouvernement en date du 25 octobre 1999. Ce document prouve que la loi de 1998 était cohérente et adaptée, et méritait d'être défendue.

    De plus, aujourd'hui, dans l'excellent amendement Sicre et dans le texte du Sénat, les périodes de chasse ont encore été revues à la baisse pour tenir compte des dernières études scientifiques, et l'échelonnement proposé -que vous acceptez, si j'en crois votre projet de décret- écarte tout risque de confusion. Ces dates peuvent être acceptées par l'Europe. Pour qu'elles le soient, le Gouvernement doit fournir un rapport attestant la conformité de cette loi à la directive. Ceci n'a pas été fait dans les délais impartis pour les lois de 1994 et 1998 : c'est ce qui vous est reproché et qui risquerait d'entraîner la condamnation de la France. Mais, comme notre collègue Sicre le rappelait le 13 juin, M. le Premier ministre s'est engagé à ouvrir des discussions avec la Communauté européenne, ce qui nous conforte dans notre position. Comment l'Europe, après intervention du Premier ministre, pourrait-elle accepter la chasse de certaines espèces jusqu'au 28 février en Espagne et en Belgique, et seulement jusqu'au 31 janvier en France ?

    Enfin, le calendrier d'ouverture tel que le propose le Sénat, permet un seuil de protection de 99 % des jeunes volants. Le calendrier des clôtures, échelonné du 31 janvier au 28 février selon les espèces, évite tout risque de confusion ; il est conforme aux dates de migration reconnues scientifiquement et exposées dans l'avis motivé de la Commission européenne. Il serait incompréhensible de le refuser.

    C'est aujourd'hui le jour de la dernière chance. C'est aujourd'hui que le vote est important, ce n'était pas en deuxième lecture -et nous avons pu constater le comportement changeant de certains collègues, qui semblent renier leur parole (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Sur beaucoup de points nous avons fait d'énormes concessions.

    Faites de même sur les trois points que je viens d'évoquer : nous pourrons alors rétablir un climat apaisé (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

    Mme Catala remplace M. Forni au fauteuil présidentiel.

    PRÉSIDENCE de Mme Nicole CATALA

    vice-présidente

    Mme Marie-Hélène Aubert - Nous sommes assez choqués, mais non surpris, par le texte que nous a retourné le Sénat après sa deuxième lecture. Je sais qu'il n'y a pas encore de sénateurs Verts, mais la raison et le bon sens n'ont pas de couleur politique... Le texte présenté par Mme la ministre représentait un compromis entre les extrémistes des deux bords et les protecteurs de la nature modérés. Malheureusement, depuis son premier examen par notre assemblée, ce texte, malgré d'indéniables avancées, n'a fait que se dégrader sous la pression de ceux qui ont préféré sacrifier la conservation de la faune à des intérêts électoraux à court terme.

    Pourtant, légiférer sur la chasse, c'est traiter de la conservation du patrimoine naturel des générations futures, ce qui exige de prendre en compte le long terme.

    Nous tenons aussi à saluer le courage politique du rapporteur François Patriat qui s'est dépensé sans compter pour défendre une chasse moderne et raisonnable (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV et sur quelques bancs du groupe socialiste).

    En première lecture, nous avons voté ce projet, espérant que certains retours en arrière étaient dus à une sorte d'emballement, et qu'en deuxième lecture la raison pourrait l'emporter. Comme cela n'a pas été le cas, nous nous sommes abstenus lors de la deuxième lecture.

    Ces derniers jours d'ultimes négociations auxquelles nous n'avons pas été associés auraient porté notamment sur les dates d'ouverture et de clôture de la chasse pour certaines espèces.

    Pourtant, la directive européenne sur la protection des oiseaux pose deux principes de bon sens : pas de chasse pendant les périodes de nidification et de migration de retour. Personne n'a remis en cause ces principes, même ceux qui parlent de renégocier la directive, et qui veulent simplement élargir les possibilités de dérogations. Ce sont donc bien des principes de bon sens. Or les dates de migration et de nidification ne se négocient pas entre les partis politiques. Ce sont les oiseaux qui décident, et les scientifiques qui peuvent nous communiquer leurs observations. Madame la ministre, le Premier ministre et vous-même avez demandé aux plus grands spécialistes français de vous présenter une synthèse des connaissances dans ce domaine. Vous aurez tout notre soutien pour que les résultats de ce rapport servent de base à votre projet de décret.

    Mes chers collègues, même si certains d'entre vous sont emportés par la passion, soyez réalistes et pragmatiques. Le Conseil d'Etat a rendu une série d'arrêts qui interdisent au Gouvernement d'ouvrir la chasse au gibier migrateur avant le premier septembre et de la fermer après le 31 janvier, et qui disent que la loi votée en juillet 1998 ne peut être appliquée.

    Pourquoi perdre tant d'énergie à essayer de mettre des dates dans la loi ou à tenter d'obliger la ministre à prendre des engagements que le Conseil d'Etat censurera ?

    Enfin, n'oublions pas que nous sommes soumis à des règles internationales. Demain matin, la Cour de justice des Communautés va examiner un recours de la Commission européenne contre la France à ce sujet. Dans deux jours, la France va assurer la présidence de l'Union européenne. Ne serait-il pas temps que la représentation nationale montre sa volonté de respecter les textes européens, au lieu de donner l'image consternante d'une bande de Gaulois se chamaillant entre eux ? (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

    En ce qui concerne le droit de non-chasse, nous allons devoir justifier auprès du Conseil de l'Europe que nous avons respecté le jugement de la Cour européenne des droits de l'homme. Êtes-vous certains que les nombreuses restrictions apportées à ce droit seront acceptées par le Conseil de l'Europe ?

    Ce dont la chasse a besoin, c'est de paix. Ce que demande le chasseur, ce sont des règles claires et du gibier qui se renouvelle sans recours aux élevages. Ce qu'il veut enfin, c'est vivre en bonne intelligence avec les autres usagers de la nature. Madame la ministre a offert la possibilité, aux chasseurs comme aux protecteurs de la nature, de trouver un terrain d'entente. L'intransigeance de certains fait que, maintenant, la porte des contentieux risque de s'ouvrir de nouveau.

    Certains d'entre vous ont reproché aux associations leur usage du recours judiciaire. Mais quelle alternative leur laissez-vous ? Ici, elles peinent à être écoutées. Au Sénat, elles n'ont même pas été entendues, alors qu'elles ont obtenu le soutien de près de deux millions de personnes dans une pétition remise au Président de l'Assemblée nationale.

    Pour notre part, notre position est claire : nous souhaitons une chasse apaisée qui prenne en compte les impératifs biologiques. Nous avons évité le pire. Malgré ces acquis essentiels que constitue une loi enfin conforme à la directive européenne, grâce aux efforts de Dominique Voynet, trop de modifications sont intervenues depuis le dépôt de ce texte. C'est pourquoi les députés Verts s'abstiendront (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RCV).

    La discussion générale est close.

    Mme la Présidente - L'Assemblée nationale et le Sénat n'ayant pu parvenir à un texte commun, j'invite l'Assemblée à se prononcer sur le dernier texte voté par elle. Elle ne peut reprendre que les amendements adoptés par le Sénat.

    M. le Rapporteur - Je remercie l'ensemble de nos collègues qui ont décidé de soutenir ce texte.

    Je veux aussi répondre à M. de Courson, qui m'a mis en cause personnellement (Interruptions sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL). Vous avez dit que j'étais le fidèle rapporteur de Mme la ministre, que je suivrais idéologiquement... Pourtant, nous sommes aujourd'hui loin du texte d'origine.

    Sur la chasse de nuit, la chasse à la passée, le rôle des fédérations, celui de l'ONC, la définition de l'acte de chasse, je pense avoir _uvré, avec d'autres, pour que nous allions bien au-delà de ce qui semblait possible au départ.

    Dans votre première intervention sur ce texte, Monsieur de Courson, vous aviez dit à Mme la ministre que la chasse, c'était comme l'amour : il faut l'avoir connue pour en parler. J'ai le sentiment que vous ne connaissez ni l'une, ni l'autre (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV ; vives protestations sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL).

    M. Lucien Degauchy - C'est ignoble.

    M. le Rapporteur - L'amendement 12 de la commission vise à améliorer la définition de l'acte de chasse.

    Mme la Ministre - Sagesse.

    L'amendement 12, mis aux voix, est adopté.

    M. Charles de Courson - Mon amendement 1 corrigé vise à accorder un tiers des sièges du conseil d'administration de l'ONC à l'Etat, un tiers aux chasseurs et un tiers aux représentants des organisations agricoles, forestières et de la propriété privée.

    Il vise aussi à garantir que les fédérations recevront des fonds publics.

    M. le Rapporteur - Avis défavorable. Nous avons accepté en deuxième lecture que les représentants de l'Etat et ceux des chasseurs ne contrôlent ensemble que trois cinquièmes, et non deux tiers, des sièges.

    L'amendement 1 corrigé, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

    M. Antoine Carré - Mon amendement 2 vise à clarifier les missions des fédérations départementales de chasseurs.

    M. le Rapporteur - Avis défavorable.

    Mme la Ministre - Même avis.

    Mme la Présidente - Je demande à MM. André et Dosière, secrétaires, de m'aider à décompter les voix.

    L'amendement 2, mis aux voix, n'est pas adopté.

    M. Charles de Courson - Les fédérations sont, conformément à la jurisprudence du Conseil constitutionnel, des associations de droit privé. Elles relèvent donc d'un contrôle a posteriori. Tel est le sens de notre amendement 3.

    M. Maxime Gremetz - L'amendement 7 est identique. Mais je souhaiterais surtout obtenir des réponses aux questions que nous avons posées (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Car j'aime bien tenir les engagements que j'ai pris, mais encore faut-il que la réciproque soit vraie. Or je ne sais rien... Nous attendons des réponses avant de nous déterminer.

    M. le Rapporteur - Le Sénat a choisi de mettre en place un contrôle a posteriori des fédérations, alors que l'Assemblée nationale a décidé de maintenir le contrôle a priori actuellement en vigueur, en le transférant toutefois aux préfets. Oui, les fédérations sont des associations de droit privé, Monsieur de Courson, mais elles sont investies de missions de service public. Y adhérer et y cotiser constitue une obligation pour tous les chasseurs, ce qui justifie pleinement un contrôle. Je m'étonne qu'un membre de la Cour des comptes s'y oppose (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

    Mme la Ministre - Cet amendement va me permettre de répondre aux inquiétudes exprimées par MM. Carré, de Courson et Gremetz.

    Il ne serait pas bon que perdure le climat de suspicion généralisée consécutif à la publication du rapport de la Cour des comptes. Mais ce n'est pas en cassant le thermomètre que l'on fait tomber la fièvre, ni en supprimant le contrôle que l'on dissipera les soupçons. C'est en clarifiant les missions et les moyens de l'Office et des fédérations.

    Le système en vigueur actuellement est celui de la validation du budget des fédérations. Il s'agit de vérifier que les fédérations utilisent l'argent qui leur est confié pour assumer leurs missions de service public, lesquelles justifient le caractère obligatoire des cotisations. Cette vérification me paraît normale, elle n'a rien de stigmatisant, ni d'exorbitant du droit commun. Restons en donc à ces validations a priori ! Par conséquent, avis défavorable sur ces amendements.

    La rigueur et la transparence, Monsieur Gremetz, sont de nature à dissiper la suspicion généralisée dont il a été question et les inquiétudes de ceux de nos concitoyens qui ne sont pas convaincus que les fédérations fonctionnent comme elles le doivent. C'est pourquoi je vous invite à retirer votre amendement (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

    Car face à vos inquiétudes, il en existe d'autres, et si vous vous interrogez sur un climat exagérément suspicieux à l'égard des fédérations, d'autres ailleurs doutent de l'effectivité du contrôle. Je pourrais moi aussi vous citer des courriers en ce sens mais je ne crois pas que cela apporte grand chose à la discussion.

    Enfin, je vous rassure, je n'ai pas répondu tout à l'heure aux orateurs de la discussion générale, mais je le ferai amendement par amendement.

    Mme la Présidente - Sur le vote des amendements 3 et 7, je suis saisie par le groupe RPR d'une demande de scrutin public.

    M. Alain Bocquet - Avant le scrutin, je demande une suspension de séance (Vives protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

    La séance, suspendue à 18 heures 10 est reprise à 18 heures 15.

    Mme Marie-Hélène Aubert - Nous sommes défavorables à cet amendement car pour nous un contrôle a priori et a posteriori est nécessaire. J'en prends pour preuve la revue « La Sauvagine » de juin 2000, qui fait état de subventions accordées par la fédération des chasseurs de gibier d'eau de l'Eure à la manifestation d'Abbeville et au CPNT, avec lequel elle dit travailler en étroite collaboration.

    Ce contrôle est donc une mesure de salubrité publique.

    Mme la Ministre - Je me rends compte que j'aurais dû répondre de façon plus précise aux points évoqués dans la discussion générale (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Je voudrais d'abord remercier votre rapporteur : je mesure, compte tenu des pressions auxquelles il a été exposé, la sagesse et la force mentale dont il a dû faire preuve depuis un an (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV).

    Je reste convaincue que ce texte est un bon compromis car il n'y a pas de solution durable qui ne prenne en compte et les impératifs de protection des espèces et les aspirations des chasseurs et les attentes des non-chasseurs. Il s'agit donc de traiter l'ensemble des problèmes, de transcrire la directive communautaire dans le droit national, de rendre la loi Verdeille compatible avec les libertés fondamentales, d'assurer le respect des autres usagers des espaces naturels, de clarifier les responsabilités des institutions, de contrôler ce qui doit l'être sans entretenir un climat de suspicion. Chacun peut y trouver son compte. Les associations de protection de la nature apprécieront la transcription du droit communautaire, qui mettra fin aux contentieux (Interruptions et claquements de pupitre sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL), et le respect des dates proposées par les scientifiques. Nous avons utilisé les marges de man_uvre laissées par la directive, comme l'ont fait tous les autres Etats de l'Union. Ces marges de man_uvre, ce sont le recours à des moratoires pour les espèces en mauvais état de conservation et la possibilité de dérogations pour les espèces en bon état de conservation.

    Mon approche de ces questions n'est pas idéologique, mais pragmatique (« C'est vrai ! » sur les bancs du groupe socialiste ; protestations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF) J'ai annoncé, lors de la nouvelle lecture, que les dates seraient fixées espèce par espèce dans le décret d'application. Il convient de tenir compte des situations locales, c'est pourquoi le décret fixera des dates-limites pour l'ouverture et la clôture de la chasse, les dates applicables à chaque département étant arrêtées après concertation locale.

    J'assume le fait qu'il y ait changement par rapport au projet initial de décret (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) : à quoi servirait la concertation s'il fallait coller à des positions idéologiques ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

    L'ouverture de la chasse pour le groupe des canards rallidés et foulques pourra se faire le 10 août et pour les espèces en bon état de conservation, la date de fermeture pourra être reculée jusqu'au 20 février. Pour les oies, les râles d'eau, les macreuses, j'ai entendu vos demandes mais j'ai aussi vérifié espèce par espèce ce qu'il était possible de faire : je rappelle qu'on ne négocie pas les dérogations avec la Commission, on les annonce et la Commission décide ou non de les contester selon qu'elles sont conformes ou non à l'esprit de la directive.

    En ce qui concerne la chasse de nuit, vos arguments ne m'ont pas convaincue. La solution proposée par le Gouvernement était de suspendre l'interdiction pendant une durée limitée. Vous avez préféré légaliser cette pratique dans les départements où elle est traditionnelle. Nous avons donc dressé une liste des départements concernés, relativement limitée, et prévu la possibilité d'y ajouter certains cantons d'autres départements. Cette solution, déjà votée en nouvelle lecture, permet de résoudre le problème que vous avez cité, Monsieur Lemoine, vous le savez très bien (Interruptions sur les bancs du groupe UDF et du groupe du RPR). Pour certains cantons, nous sommes tous d'accord, pour d'autres la discussion doit se poursuivre. J'ai pris note de la demande de M. François Dosé, je l'examinerai.

    Concernant la chasse à la passée, la durée retenue est très longue et elle a interpellé la Commission. Il faudra justifier notre position sur la base d'éléments objectifs et donc suivre de près les prélèvements opérés.

    Si nous avons mis en place un contrôle financier des fédérations de chasse, nous les avons aussi consolidées dans leurs missions et fait en sorte qu'elles représentent effectivement les intérêts des chasseurs. Je me réjouis que les amendements votés ce matin par votre commission respectent cet équilibre (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV et du groupe socialiste).

    M. Maxime Gremetz - Je remercie la ministre de sa réponse relative aux cantons des sept départements dont la situation est à examiner, et sur la prise en compte, dans le décret à venir, des demandes formulées. Dans ces conditions, nous retirons l'amendement 7. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; vives exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

    Mme la Présidente - Reste donc à nous prononcer par scrutin public sur l'amendement 3.

    A la majorité de 271 voix contre 241 sur 513 votants et 512 suffrages exprimés, l'amendement 3 n'est pas adopté. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV)

    M. Charles de Courson - Notre amendement 4 tend à supprimer le contrôle économique et financier de l'Etat sur les fédérations. Le texte qui l'a institué est un décret de 1955, qui ne s'applique pas aux fédérations. Revenons donc au texte adopté par le Sénat. Ce contrôle économique, exercé par le ministre des finances, peut conduire à ce qu'une personne vienne dans une fédération faire des contrôles sur place. C'est absurde !

    M. le Rapporteur - En quoi ce contrôle est-il absurde, dès lors que l'adhésion est obligatoire ? Les compétences étendues que nous avons accordées aux fédérations appellent en contrepartie de pouvoir les contrôler.

    Mme la Ministre - Même avis.

    L'amendement 4, mis aux voix, n'est pas adopté.

    M. le Rapporteur - L'amendement 13 tend à régulariser la situation de la fédération de Paris.

    L'amendement 13, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

    M. Germain Gengenwin - L'amendement 17 tend à supprimer l'amendement de M. Jung adopté par inadvertance au cours de la précédente lecture. Cette disposition permettait à certaines communes, dans le régime du droit local d'Alsace-Moselle, de ne pas mettre en adjudication certains lots. C'est remettre en cause la communalisation du droit de chasse en Alsace-Moselle, qui existe à la satisfaction générale depuis 1881, et que la loi de juin 1996 a modifiée avec l'accord de tous.

    M. le Rapporteur - Il s'agit de revenir sur l'amendement de M. Jung, qui a pour origine un différend entre les fédérations de chasseurs et la ville de Strasbourg et ses forêts urbaines. L'amendement Jung ne s'appliquera pas à toutes les communes dans le droit local. Il est de nature à donner satisfaction à l'ensemble des populations et ne menace pas les ressources des communes qui ne souhaiteraient pas en passer par là.

    Mme la Ministre - Avis défavorable.

    L'amendement 17, mis aux voix, n'est pas adopté.

    Mme la Ministre - L'article 26 laisse à l'ONC la responsabilité d'indemniser les dégâts de grand gibier jusqu'au 31 décembre 2000 et la confie ultérieurement aux fédérations. Il importe donc de maintenir les ressources de l'établissement pour faire face aux dépenses mises à sa charge pour l'exercice en cours. Il est donc proposé, par l'amendement 16, de reporter à la loi de finances pour 2001 la fixation des redevances cynégétiques pour l'année 2001.

    M. le Rapporteur - Avis favorable.

    L'amendement 16, mis aux voix, est adopté.

    Mme la Présidente - Sur les amendements 5 et 8, qui sont identiques et que nous allons examiner, je suis saisie par le groupe UDF d'une demande de scrutin public.

    M. Jean-Claude Lemoine - Nous reprenons, dans notre amendement 5, les dates indiquées par M. Sicre en deuxième lecture, et adoptées par le Sénat. Ces dates échelonnées évitent toute confusion, sont certainement conformes à la directive européenne à condition que le Gouvernement accepte de les défendre, et correspondent aux dernières connaissances scientifiques sur la préservation des espèces.

    M. Maxime Gremetz - Nous avons repris dans notre amendement 8 les dispositions de l'amendement de M. Sicre sur les dates d'ouverture et de fermeture. Mais la réponse apportée à l'instant par Mme la ministre au sujet du décret à élaborer nous conduit à retirer notre amendement (Vives exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL ; applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

    M. le Rapporteur - Nous avons débattu de cette question à trois reprises. Avis à nouveau défavorable.

    Mme la Ministre - Rejet.

    A la majorité de 273 voix contre 239 sur 512 votants et 512 suffrages exprimés, l'amendement 5 n'est pas adopté (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

    Mme la Présidente - Les amendements 9 et 18 sont identiques. M. Gremetz va défendre le 9.

    Plusieurs députés RPR, UDF et DL - Il va le retirer !

    M. Maxime Gremetz - Je vais vous décevoir ! (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) Cet amendement, particulièrement important, a été adopté par la commission unanime. Je respecte le consensus, moi ! (Mêmes mouvements)

    M. Charles de Courson - Même arguments pour l'amendement 18.

    M. le Rapporteur - La commission n'a examiné que l'amendement 9, auquel elle a donné un avis favorable, afin d'éviter une législation trop tatillonne sur les 30 mètres de part et d'autre des nappes d'eau.

    Mme la Ministre - Nous étions parvenus à une rédaction satisfaisante de l'article 10 quater relatif aux zones humides. Je souhaite que nous en restions là, et je suis opposée aux amendements. Mais les parlementaires sont souverains.

    Les amendements 9 et 18, mis aux voix, sont adoptés.

    M. Maxime Gremetz - Notre amendement 10, qui reprend une disposition adoptée à l'unanimité par le Sénat, a trait au jour de non-chasse. Il dit : « Pour favoriser une gestion durable de la faune sauvage, le représentant de l'Etat dans le département, sur proposition de la fédération départementale des chasseurs et après avis du conseil départemental de la chasse et de la faune sauvage, suspend l'exercice de la chasse à tir du gibier sédentaire une journée par semaine ». Cette formulation éviterait de soumettre la chasse aux oiseaux migrateurs au jour de non-chasse, ce qui est logique puisqu'elle a lieu la nuit.

    Malheureusement, le Sénat a omis de supprimer la disposition adoptée par notre Assemblée et à laquelle celle-ci aurait dû se substituer. Or, les deux sont incompatibles. Dans ces conditions, que faire ?

    M. le Rapporteur - La commission a repoussé l'amendement. Compte tenu de la position prise par le Sénat, s'il était adopté, il y aurait désormais non pas un, mais deux jours de non-chasse ! Je pense que ce n'est pas ce que vous souhaitez. Je suggère donc que l'amendement soit retiré ou, à défaut, repoussé.

    M. Maxime Gremetz - Je le retire (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste ; protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

    M. Jacques Blanc - Je le reprends, car c'est le seul moyen de permettre aux fédérations de choisir le jour de non-chasse au lieu de leur imposer le mercredi.

    Mme la Ministre - Avis défavorable.

    L'amendement 10, mis aux voix, n'est pas adopté.

    M. Jean-Claude Lemoine - Notre amendement 6 tend à rétablir l'équité et l'égalité entre les chasseurs en légalisant la chasse de nuit dans les 28 départements où elle est traditionnelle.

    Cela dit, Mme la ministre a ironisé tout à l'heure lorsque j'ai parlé de l'Ille-et-Vilaine. Je l'invite à venir sur le terrain. Elle constatera que, selon les heures et les marées, personne n'est capable de retrouver le lit du Couesnon, de la Sélune ou de la Sée, ni même les limites départementales ou cantonales.

    M. Maxime Gremetz - Notre amendement 11 est identique au 6. Cela dit, je tiens à rappeler à nos collègues de droite un fait rare en politique : lorsque je prends un engagement et lorsque je signe un engagement politique, je le respecte.

    Je retire notre amendement (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste ; exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

    M. Forni remplace Mme Catala au fauteuil présidentiel.

    PRÉSIDENCE de M. Raymond FORNI

    M. le Rapporteur - La ministre s'est engagée, le 13 juin, à faire figurer dans un décret les cantons des sept départements où la chasse de nuit au gibier d'eau est traditionnelle et qui ne figurent pas dans la liste des vingt-et-un départements retenus. Dans ces conditions, je vous propose de repousser cet amendement.

    L'amendement 6, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

    M. le Rapporteur - L'amendement 14 est de coordination.

    L'amendement 14, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

    M. Antoine Carré - Notre amendement 19 tend à réprimer le braconnage des gens du voyage, en autorisant les garde-chasse ou les gendarmes à saisir leurs armes ou leurs véhicules.

    M. le Rapporteur - La commission avait déjà repoussé, en deuxième lecture, cet amendement excessif. Je vous propose de le repousser à nouveau.

    L'amendement 19, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

    M. le Rapporteur - L'amendement 15 est de coordination.

    L'amendement 15, accepté par le Gouvernement, est adopté.

    M. le Président - Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que le vote sur l'ensemble du projet de loi, tel qu'il résulte du texte voté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, modifié par les amendements qui viennent d'être adoptés, aurait lieu par scrutin public, en application de l'article 65-1 du Règlement.

    Nous en venons aux explications de vote.

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    EXPLICATIONS DE VOTE.

    M. Jacques Rebillard - Près d'un an après la nomination par Lionel Jospin de François Patriat comme rapporteur d'une mission sur la chasse, nous voici au terme du débat sur ce projet.

    Alors, près d'un an de discussion pour rien ? Je ne le pense pas puisque la pratique de la chasse a été légitimée et reconnue par le premier article de cette loi. Faut-il réduire le débat aux dates d'ouverture et de fermeture de la chasse au gibier d'eau, au jour de non-chasse ou encore à la chasse de nuit ? L'avenir de cette pratique ancestrale me semble davantage lié à la place que notre société fera au développement des espèces sauvages.

    En tant que parlementaires, nous comprenons les craintes des chasseurs vis-à-vis de la tendance bruxelloise à vouloir tout régenter, de la sensibilité accrue de l'opinion publique à la protection de la faune et de la flore, des territoires ruraux en voie de désertification, des cultures et savoir-faire menacés par l'uniformisation des comportements.

    Ces périls appellent une réaction. Faut-il pour autant se comporter comme dans une forteresse assiégée ? La recherche de compromis est la seule voie possible, celle de la sagesse et de la survie de la chasse.

    Cela dit, les chasseurs ont-ils bien communiqué ? Les défilés armes à la main dans les rues de Paris ou les coups de main dans les déchetteries ne sont pas le meilleur moyen de rallier l'opinion publique.

    Les chasseurs ont la sympathie des radicaux de gauche et du Mouvement des citoyens. Les traditions du Sud-Ouest ne sont-elles pas radicales et cynégétiques ? C'est bien parce que nous aimons la chasse que nous voulons lui donner un cadre protecteur.

    Ce débat aurait pu être une occasion de rapprocher pratiques cynégétiques et protection de l'environnement. Il n'aura été, trop souvent, qu'une caricature de l'opposition entre les chasseurs et les Verts. Il faut sortir de ces débats dont la France a le secret : se diviser alors que bien d'autres sujets, dont le droit au travail, mériteraient pareille mobilisation (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV).

    Ce projet a permis de progresser, en particulier sur les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse au gibier migrateur, qui seront fixées par décret. Les propositions de Mme la ministre nous paraissent tout à fait acceptables.

    Le texte que nous allons voter étend aussi la durée de la passée et légalise la chasse de nuit dans 21 départements, tout en créant un jour de non-chasse.

    Il clarifie les missions de l'Office national de la chasse et des fédérations départementales. Le contrôle financier, dont l'exercice est confié aux préfets, ne veut pas dire étatisation. Du reste, les chambres consulaires y sont également soumises. Comme toute mission régalienne, la police de la chasse incombera à l'Etat et sera confiée aux agents d'un établissement public, l'Office national de la chasse.

    Comme il faut savoir terminer une grève, il faut savoir voter une loi, même si elle n'est pas parfaite. Le mérite de François Patriat et du Gouvernement restera en tout cas d'avoir cherché un compromis. Les députés radicaux et citoyens voteront ce texte, qui marque le début d'une dynamique entre les chasseurs et la société. Il est vain de chercher à prolonger ce débat. Soyons tous citoyens ! Le vrai enjeu est aujourd'hui de rendre aux territoires ruraux leur capacité d'hospitalité vis-à-vis de la faune sauvage et du gibier. Nous attendons des chasseurs qu'ils s'impliquent dans les contrats territoriaux d'exploitation, qu'ils s'engagent plus fortement dans le développement des jachères cynégétiques, qu'ils acceptent de coopérer dans les réseaux Natura 2000 (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Il restera enfin à inventer des lieux de dialogue entre chasseurs et écologistes (Mêmes mouvements). Monsieur Jacob, vous ressemblez à un chien de meute ! (Mêmes mouvements)

    La loi d'orientation agricole a élargi la composition des commissions départementales d'orientation agricole aux associations de consommateurs et de protection de la nature. Pourquoi ne pas s'en inspirer pour créer des commissions départementales d'orientation cynégétique, qui réuniraient notamment chasseurs et écologistes ? Le débat n'est donc pas clos : souhaitons qu'il se poursuive sereinement. Les députés radicaux et citoyens sont prêts à le favoriser en votant cette loi ; quant à nos collègues Verts, ils s'abstiendront (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RCV).

    M. le Président - J'invite nos collègues à éviter de tenir des propos à la limite de l'acceptable.

    Mme Nicole Ameline - A l'issue de cette troisième lecture, malgré les propositions raisonnables du Sénat et de l'opposition -qu'il s'agisse des dates d'ouverture et de fermeture, du jour de non-chasse, du fonctionnement des fédérations-, vous n'avez pas pu, Madame la ministre, parvenir à un texte équilibré, comme vous en aviez pris l'engagement ; et l'on peut légitimement s'interroger sur vos intentions réelles. Vous n'avez pas su écouter les chasseurs, le monde rural, l'opposition, et dépasser l'opposition manichéenne et stérile entre chasseurs et écologistes. Votre démarche ne correspond pas à une vision moderne de la société. En choisissant une méthode qui privilégiait l'intransigeance idéologique sur l'esprit de responsabilité et de liberté, la réglementation sur la négociation, vous avez fait en sorte que les positions restent poussées à l'extrême, alors que seules des solutions consensuelles permettraient un exercice durable et harmonieux de la chasse. Vous n'avez pas su faire admettre l'idée que notre avenir sera européen et décentralisé, qu'il doit trouver place dans une Europe subsidiaire. L'Europe ne se construira pas sur l'uniformité, mais sur la diversité et la subsidiarité (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et sur quelques bancs du groupe du RPR).

    D'autre part vous avez sous-estimé la force et la modernité des territoires ruraux. La modernité n'est pas seulement urbaine -erreur du XXe siècle dont nous percevons les fâcheuses conséquences. Nous soutenons dans ce débat une certaine idée de la tradition rurale, mais aussi la vocation d'avenir de ces territoires. La politique n'est pas l'art de gérer les crises et d'élaborer de mauvais compromis. Votre responsabilité aurait été de conduire un débat objectif et de l'inscrire dans un vrai projet de société. Cette société, nous la voulons plus libre, plus responsable. C'est pourquoi notre groupe votera résolument contre ce projet (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF).

    M. Christian Bataille - Ce débat a bien montré quel est le rôle du législateur. En effet, au fil des trois lectures, nous avons sans cesse amélioré le texte initial, dans un dialogue constant sur tous les bancs de la majorité. J'en profite pour saluer le rôle joué par notre rapporteur qui, à partir d'un travail personnel -le « rapport Patriat »-, a su introduire certaines idées nouvelles dans le texte du Gouvernement, pour parvenir à la version actuelle. Quant à vous, Madame la ministre, vous avez su, quand c'était nécessaire, démontrer votre capacité de dialogue, et prendre en compte les v_ux exprimés de l'intérieur de la majorité (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

    Nous aboutissons ainsi à un texte d'équilibre, qui préserve les intérêts des chasseurs, mais tenant compte aussi de la masse immense des non-chasseurs, de sorte qu'il n'est totalement satisfaisant pour personne. Il ne traduit pas la volonté de satisfaire les extrémistes d'un bord ou de l'autre. Aujourd'hui encore nous notons d'ultimes améliorations, qu'il s'agisse des départements et cantons où la chasse de nuit sera autorisée ou du calendrier, et notamment de la possibilité de chasser certaines espèces jusqu'au 20 février. Enfin, point non négligeable, et je me tourne ici vers l'opposition : nous allons voter un texte conforme à la directive européenne, et donc en accord avec la politique prônée tout au long de la semaine par le Président de la République lui-même (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). Il faut saluer cette modernisation de notre législation sur la chasse, que le groupe socialiste votera résolument (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs groupe RCV).

    M. Charles de Courson - Le groupe UDF votera contre ce texte pour deux raisons. La première est de forme. Vous avez, Madame la ministre, une culture d'opposition des Français entre eux. Vous avez poussé les anti-chasseurs contre les chasseurs, et vos amis ont fait de même, en particulier M. Mamère. Vous en paierez le prix, car un ministre de la République qui oppose les Français entre eux en supporte toujours les conséquences ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL) La vérité est que vous n'aimez ni la chasse, ni les chasseurs, et que votre texte ne comporte aucune ouverture. Vous le savez : il est inapplicable.

    La seconde raison de notre rejet est une raison de fond. Tout d'abord, si nous adoptons ce texte, les fédérations seront placées sous un contrôle étatique renforcé, avec atteinte à la liberté d'association (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL). D'autre part, nous aurons des dates inadaptées. Enfin, vous entendez compléter la liste des départements où sera autorisée la chasse de nuit, non par la loi, mais par le décret. On verra se multiplier les contentieux devant les tribunaux administratifs. Contrairement à ce que vous pensez, nous n'allons pas vers un texte d'apaisement, mais vers un merdier qui va submerger la France ! (Applaudissements vifs et prolongés sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL)

    M. Maxime Gremetz - (Exclamations et rires sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Voulez-vous que je dise tous ceux d'entre vous qui n'étaient pas là, à sept heures du matin, pour voter sur ce texte ? Vous êtres vigoureux à cette heure, mais quand il s'agit de passer la nuit à défendre la chasse, il n'y a plus personne !

    Depuis le début de cette discussion, les députés communistes ont eu un but et un seul : défendre un droit républicain issu de la Révolution française, le droit de chasse et un droit compatible avec la régulation des espèces et la protection de la nature. C'est à quoi nous avons voulu travailler en participant activement au débat.

    Je l'ai dit, car les jeux politiciens sur la chasse et les chasseurs ne font que leur nuire (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur quelques bancs du groupe socialiste), nous avons obtenu des avancées importantes. C'est, pour la première fois dans notre histoire, la légalisation de la chasse de nuit. C'est la chasse à la passée. C'est la modernisation et la démocratisation des organisations de chasseurs.

    Et aujourd'hui encore Mme la ministre a accepté des avancées nouvelles. Je sais, connaissant sa sensibilité, qu'elle n'a pas fait tout à fait ce qu'elle souhaitait, et je l'en remercie d'autant plus (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

    La chasse de nuit est légalisée dans sept départements de plus que prévu initialement. La période de chasse est prolongée jusqu'au 20 février pour certaines espèces. Ce sont là des avancées.

    Cette loi, d'ailleurs, n'est qu'une étape. Ce n'est pas la loi que nous voulions. (« Ah ! » sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Nous devrons aller plus loin. Nous sommes cohérents. En première lecture, estimant que des avancées devaient être faites, nous nous sommes abstenus. En deuxième lecture, nous avons voté contre le texte, les avancées attendues n'étant pas venues. Aujourd'hui que ces avancées sont obtenues, nous revenons à notre position initiale et nous nous abstenons. Cela, c'est de la cohérence ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste ; protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

    M. Jean-Claude Lemoine - De nouveau, les pressions exercées par le Gouvernement sur sa majorité l'emportent sur la raison. Vous nous présentez un projet inacceptable, qui va révolter les chasseurs, mais aussi tous les ruraux.

    Sous couvert de démocratisation, vous étatisez toutes les structures, dont vous avez programmé la disparition. Vous avez écarté la voie législative pour la fixation du calendrier. Vous allez imposer des dates encore plus restrictives que chez nos voisins européens, en vue de satisfaire une frange de votre majorité.

    En violation du principe d'égalité, vous traitez différemment les propriétaires de gabions d'un département à l'autre.

    Nous attendions un sursaut de raison ; nous ne trouvons que lâcheté et sectarisme (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV). Vous voulez supprimer ce loisir. Le groupe RPR votera contre ce projet inique, qui risque de mettre le feu à nos campagne (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

    A la majorité de 269 voix contre 255 sur 560 votants et 524 suffrages exprimés, l'ensemble du projet est adopté. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV ; huées sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

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    MODIFICATION DE L'ORDRE DU JOUR PRIORITAIRE

    M. le Président - J'ai reçu de M. le ministre des relations avec le Parlement une lettre fixant comme suit l'ordre du jour prioritaire :

    JEUDI 29 JUIN, le matin :

        _ suite de la nouvelle lecture du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains ;

    l'après-midi :

        _ suite de la nouvelle lecture du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains ;

        _ seconde lecture de la proposition de loi tendant à préciser la définition des délits non intentionnels ;

    le soir :

        _ suite de la nouvelle lecture du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains.

    Eventuellement, VENDREDI 30 JUIN, le matin, l'après-midi et le soir :

        _ suite de la nouvelle lecture du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains.

    L'ordre du jour prioritaire est ainsi modifié.

    Prochaine séance ce soir à 21 heures 45.

    La séance est levée à 19 heures 20.

                      Le Directeur du service
                      des comptes rendus analytiques,

                      Jacques BOUFFIER


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