N° 1443
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 9 mars 1999.
PROPOSITION DE LOI
tendant à réprimer le fait de chasser sous l'emprise d'un état d'imprégnation alcoolique.

(Renvoyée à la commission de la production et des échanges, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée
par M. Jean-Pierre MICHEL, Mme Gilberte MARIN-MOSKOVITZ, MM. Pierre CARASSUS, Georges SARRE et Gérard SAUMADE,
Députés.

Chasse et pêche.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,
Depuis de nombreuses années, il est interdit de conduire un véhicule automobile sous l'emprise d'un état alcoolique ; en effet, celui-ci diminue les facultés de perception et de réaction et expose le conducteur à des risques d'accidents préjudiciables pour lui-même et autrui.
Le véhicule à moteur étant considéré comme potentiellement dangereux, notamment lorsque celui qui le conduit est sous l'emprise de l'alcool, que dire d'une arme de chasse, dont le but est tout simplement de tuer ? Son maniement, comme celui de toute arme, exige une parfaite maîtrise de soi. L'absorption d'alcool l'altère profondément.
Les tribunaux ont d'ailleurs fréquemment relevé, à l'occasion des enquêtes sur les accidents de chasse, malheureusement trop fréquents, la présence évidente d'imprégnation alcoolique du chasseur auteur de l'accident.
C'est pourquoi nous vous proposons de transposer dans le code rural les dispositions du code la route relatives à la conduite d'un véhicule sous l'emprise d'un état alcoolique.
Ces dispositions ne sont absolument pas destinées à stigmatiser l'ensemble des chasseurs, qui respectent la législation, ont le sens des responsabilités et s'adonnent à leur loisir favori en respectant la nature, l'environnement et leurs semblables.
Elles se veulent éducatives et dissuasives pour ceux qui sont trop insouciants et peuvent devenir, sans l'avoir voulu, des criminels. Elles permettront des actions de prévention et éventuellement de répression.
La bonne application de ce texte dépendra très largement de l'action d'information que devront faire auprès de leurs adhérents les fédérations et associations de chasse.
L'image du chasseur en sortira grandie dans l'opinion publique.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous vous demandons, Mesdames et Messieurs, de bien vouloir adopter cette proposition de loi.

PROPOSITION DE LOI
Article unique

Le paragraphe 1 de la sous-section 3 du chapitre VIII du titre II du livre II du code rural est ainsi rédigé :

" Paragraphe 1
" Répression de la chasse sous l'empire d'un état d'imprégnation alcoolique

" Art. L. 228-4-1. - I. - Toute personne qui aura chassé alors qu'elle se trouvait, même en l'absence de tout signe d'ivresse manifeste, sous l'empire d'un état alcoolique caractérisé par la présence dans le sang d'un taux d'alcool pur égal ou supérieur à 0,80 g 0/00 ou par la présence dans l'air expiré d'un taux d'alcool pur égal ou supérieur à 0,40 mg par litre sera punie d'un emprisonnement de deux ans et d'une amende de 30 000 F, ou de l'une de ces deux peines seulement.
" Les officiers ou agents de la police administrative ou judiciaire soumettront à des épreuves de dépistage de l'imprégnation alcoolique par l'air expiré toute personne impliquée dans un accident de chasse ayant occasionné un dommage corporel. Ils pourront soumettre aux mêmes épreuves toute personne qui sera impliquée dans un accident quelconque de la chasse.
" Lorsque les épreuves de dépistage permettront de présumer l'existence d'un état alcoolique ou lorsque la personne aura refusé de les subir, les officiers ou agents de la police administrative ou judiciaire feront procéder aux vérifications destinées à établir la preuve de l'état alcoolique. Ces vérifications seront faites soit au moyen d'analyses et examens médicaux, cliniques et biologiques, soit au moyen d'un appareil permettant de déterminer le taux d'alcool par l'analyse de l'air expiré à la condition que cet appareil soit conforme à un type homologué.
" Lorsque les vérifications auront été faites au moyen d'analyses et examens médicaux, cliniques et biologiques, un échantillon devra être conservé. Lorsqu'elles auront été faites au moyen d'un appareil permettant de déterminer le taux d'alcool par l'analyse de l'air expiré, un second contrôle pourra être immédiatement effectué, après vérification du bon fonctionnement de l'appareil ; ce contrôle sera de droit lorsqu'il aura été demandé par l'intéressé.
" Toute personne qui aura refusé de se soumettre aux vérifications sera punie des peines prévues au premier alinéa.
" II. - Toute personne qui aura chassé alors qu'elle se trouvait en état d'ivresse manifeste sera punie d'un emprisonnement de deux ans et d'une amende de 30 000 F ou de l'une de ces deux peines seulement.
" Les épreuves de dépistage ainsi que les vérifications effectuées dans les conditions prévues au paragraphe I ci-dessus, ou ces dernières vérifications seulement, seront utilisées à l'égard de l'auteur présumé de l'infraction de chasse en état d'ivresse manifeste.
" III. - Lorsqu'il y aura lieu à l'application des articles 221-6 et 222-19 du code pénal à l'encontre de l'auteur de l'une des infractions visées aux paragraphes I et II ci-dessus, les peines prévues par ces articles seront portées au double.
" Celles prévues par l'article 222-19 du code pénal seront applicables si l'incapacité de travail visée par cet article n'est pas supérieure à trois mois.
" IV. - Un décret en Conseil d'Etat déterminera les conditions dans lesquelles seront effectuées les opérations de dépistage et les vérifications prévues au présent article.
" Art. L. 228-4-2. - Les officiers de police judiciaire, soit sur instruction du procureur de la République, soit à leur initiative, et, sur l'ordre et sous la responsabilité des officiers de police judiciaire, les agents de police judiciaire peuvent, même en l'absence d'infraction préalable ou d'accident, soumettre toute personne qui chasse à des épreuves de dépistage de l'imprégnation alcoolique par l'air expiré.
" Lorsque les épreuves de dépistage permettront de présumer l'existence d'un état alcoolique, les officiers ou agents de police judiciaire feront procéder aux vérifications destinées à établir la preuve de l'état alcoolique au moyen de l'appareil permettant de déterminer le taux d'alcool par l'analyse de l'air expiré mentionné aux troisième et quatrième alinéas du paragraphe I de l'article L. 228-4-1 et dans les conditions prévues par ces dispositions.
" En cas d'impossibilité de subir ces épreuves résultant d'une incapacité physique attestée par le médecin requis, les officiers ou agents de police judiciaire feront procéder aux vérifications destinées à établir la preuve de l'état alcoolique au moyen d'analyses et examens médicaux, cliniques et biologiques dans les conditions prévues par les mêmes alinéas.
" Toute personne qui aura refusé de se soumettre aux vérifications prévues par le présent article sera punie des peines prévues au premier alinéa du paragraphe I de l'article L. 228-4-1.
" Art.L. 228-4-3. - En cas de condamnation pour l'un des délits prévus par l'article L 228-4-1, le tribunal peut prescrire, à titre de peine complémentaire, l'accomplissement d'un travail d'intérêt général selon des modalités prévues à l'article 131-8 du code pénal et selon les conditions prévues aux articles 131-22 à 131-24 du même code et à l'article 20-5 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante.
" Les dispositions de l'alinéa précédent sont également applicables en cas de condamnation pour le délit prévu par l'article L. 228-4-2.
" En cas de condamnation pour l'un des délits prévus aux articles L. 228-4-1 et L.228-4-2, le tribunal peut également prononcer, à titre de peine complémentaire, une amende sous forme de jours-amende dans les conditions fixées aux articles 131-5 et 131-25 du code pénal. "
1443 - Proposition de loi de M. Jean-Pierre MICHEL tendant à réprimer le fait de chasser sous l'emprise d'un état d'imprégnation alcoolique (commission de la production)


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