N° 2156
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 9 février 2000.
PROPOSITION DE LOI
tendant à renforcer notre dispositif légal de lutte contre les sectes.

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée

par MM. Éric DOLIGÉ, Jean-Claude ABRIOUX, Bernard ACCOYER, Philippe AUBERGER, Jean AUCLAIR, Gautier AUDINOT, Mmes Martine AURILLAC, Sylvia BASSOT, MM. Jean-Louis BERNARD, Léon BERTRAND, Mme Marie-Thérèse BOISSEAU, MM. Michel BOUVARD, Philippe BRIAND, Christian CABAL, Jean CHARROPPIN, Philippe CHAULET, Jean-Marc CHAVANNE, Jean-François CHOSSY, Francis DELATTRE, Patrick DELNATTE, Léonce DEPREZ, Franck DHERSIN, Dominique DORD, Guy DRUT, Jean-Michel DUBERNARD, Christian ESTROSI, Jean-Claude ÉTIENNE, Jean-Michel FERRAND, Yves FROMION, Robert GALLEY, René GALY-DEJEAN, Gilbert GANTIER, Henri de GASTINES, Jacques GODFRAIN, Jean-Claude GUIBAL, Lucien GUICHON, Michel HERBILLON, Didier JULIA, Aimé KERGUERIS, Robert LAMY, Marc LAFFINEUR, Jean-Claude LEMOINE, Jean MARSAUDON, Mme Jacqueline MATHIEU-OBADIA, MM. Christian MARTIN, Patrice MARTIN-LALANDE, Gilbert MEYER, Pierre MICAUX, Jean-Claude MIGNON, Charles MIOSSEC, Pierre MORANGE, Jacques MYARD, Jean-Marc NUDANT, Paul PATRIARCHE, Jacques PÉLISSARD, Bernard PERRUT, Didier QUENTIN, Jean-Bernard RAIMOND, Jean-Luc REITZER, Jean ROATTA, JoËl SARLOT, Bernard SCHREINER, Michel TERROT, Anicet TURINAY, Jean UEBERSCHLAG, Léon VACHET, Michel VOISIN, Jean-Jacques WEBER et Pierre-André WILTZER,

Députés.

Droits de l'homme et libertés publiques.

EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Depuis plusieurs années, notre pays comme d'autres doit faire face à une montée inquiétante des phénomènes sectaires.
Le drame de l'ordre du temple solaire a montré à quels extrêmes pouvaient aboutir de tels processus et la difficulté pour les responsables publics quels qu'ils soient de les appréhender.
Parallèlement, il convient de souligner que ces phénomènes sont en constante progression et que surtout leur méthode de pénétration de notre société, ainsi que les procédés qu'elles utilisent pour influencer et escroquer des personnes en recherche de repères dans un monde en constant mouvement ne cessent de se diversifier et de se renouveler.
Par ailleurs, de récentes affaires judiciaires ont montré que si de telles organisations utilisent pleinement les rouages de notre appareil judiciaire, celui-ci, ainsi d'ailleurs que notre administration, ont du mal à pleinement les appréhender et les réprimer.
S'il ne s'agit en aucun cas de remettre en cause la liberté d'association et les droits de la défense, auxquels nous sommes tous attachés, il convient aujourd'hui de donner à notre appareil répressif les moyens de lutter efficacement contre les mouvances sectaires.
Certes, de nombreuses propositions ont été faites depuis les travaux des commissions d'enquête sur les sectes, avec la mise en place de l'observatoire des sectes, remplacé par la mission interministérielle de lutte contre les sectes. Cependant, il apparaît aujourd'hui nécessaire de renforcer notre législation en matière de répression de ces phénomènes et surtout d'éviter que malgré de multiples condamnations pénales de dirigeants de sectes, ces organisations se réinstallent sans difficulté et reprennent leur activité répréhensible.
Aussi, afin de protéger nos concitoyens et de les informer pleinement, la présente proposition de loi a pour but de donner la possibilité au tribunal saisi d'une affaire mettant en cause de façon manifeste une organisation sectaire de prononcer la dissolution de cette association comme peine complémentaire. Par ailleurs, une publication de la décision de justice de dissolution sera effectuée au tribunal et une cellule de surveillance des associations dissoutes sera mise en place au niveau de chaque préfecture.
Il convient de signaler que ce dispositif n'est pas contraire à la liberté d'association et au respect des droits de la défense. L'organisation en cause a en effet la possibilité d'user des voies de recours ouvertes à tout citoyen vis-à-vis d'une décision de justice et donc de faire pleinement valoir son argumentation. Par ailleurs, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante de nos tribunaux tant judiciaires qu'administratifs, une atteinte à l'ordre public peut justifier des restrictions à l'exercice d'une liberté publique.
Aussi, afin de permettre à nos tribunaux de mieux faire respecter la loi républicaine, de protéger les victimes et de lutter contre les sectes, il vous est proposé d'adopter la présente proposition de loi.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

L'article L. 131-10 du code pénal est complété par les mots :
" , dissolution d'une association lorsque elle-même en tant que personne morale ou ses dirigeants ou responsables de fait ont été condamnés à titre définitif au titre des articles 221-1 à 7, 222-1 à 122-21, 222-22 à 222-32, 223-1 à 223-9, 223-13 à 223-15, 224-1 à 224-5, 225-5 à 225-16 ; 226-1 à 226-6 ; 226-10, 226-11, 227-1 à 227-28-1, 331-1, 311-3, 311-4, 311-16, 312-l à 312-12, 3112-15, 313-1 à 313-4, 313-9 à 314-2 du code pénal ainsi que les articles 376 et 517 du code de la santé publique ".

Article 2

Lorsqu'une décision de justice devenue définitive est assortie de la peine complémentaire définie au précédent alinéa, elle fait l'objet d'une publication au sein du tribunal ou de la juridiction ayant rendu la décision.

Article 3

Il est institué, au sein de chaque préfecture, une cellule de surveillance des organisations dissoutes composée de membres de l'administration, d'élus locaux, de magistrats et de représentants de associations de lutte contre les sectes.
Cette cellule est chargée de surveiller toute reconstitution d'organisations dissoutes et de saisir la justice en cas de non-respect des décisions de justice.

Article 4

Un décret en conseil d'Etat précise les modalités d'application de la présente loi, notamment dans son article 3.


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