N° 2555
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 26 juillet 2000.

PROPOSITION DE LOI
visant à instaurer une indemnisation spéciale des victimes
de la marée noire consécutive au
naufrage de l'Erika.

(Renvoyée à la commission de la production et des échanges, à défaut de constitution
d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée
par M. François GOULARD,

Député.

Déchets, pollution et nuisances.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,
La pollution maritime consécutive au naufrage de l'Erika a des conséquences catastrophiques pour le littoral atlantique et en particulier pour les départements du Finistère, du Morbihan, de Loire-Atlantique et de Vendée. L'économie locale est durement touchée : les professions de la pêche, de la conchyliculture ont été les premières atteintes. Tous les professionnels du tourisme ont vu et verront leur chiffre d'affaires baisser. Les collectivités locales ont engagé des dépenses considérables pour le nettoyage des côtes. Le montant global estimé des préjudices économiques subis se chiffre en milliards de francs.
Cette catastrophe n'est pas imputable à la seule fatalité. Elle n'a pas pour origine un phénomène de la nature. Elle résulte de fautes humaines, nombreuses, certaines identifiées, d'autres plus diffuses.
Dans un cadre juridique ordinaire, les victimes de cette catastrophe auraient pu faire reconnaître leur droit à indemnisation devant les juridictions compétentes.
Dans le cas d'une pollution maritime accidentelle, leur situation est malheureusement différente. Aux termes de conventions internationales signées et ratifiées par notre pays, la responsabilité de l'armateur du navire ayant fait naufrage est limitée. Celle de l'affréteur du navire est exclue. Un mécanisme d'indemnisation amiable existe, le FIPOL, qui a ses règles propres, dont certaines sont contestables, mais qui a surtout un plafond, de l'ordre de un milliard deux cents millions de francs : ce plafond est évidemment insuffisant et conduira à des taux d'indemnisation de l'ordre de 50%.
Nous nous trouvons donc face à un problème simple : peut-on admettre que des milliers de Français soient lourdement pénalisés par une catastrophe contre les responsables de laquelle ils sont démunis de voie de recours ? L'Etat doit-il rester indifférent à une telle iniquité ? N'est-ce pas un cas où la solidarité nationale doit jouer ?
L'Etat, au demeurant, n'est pas étranger à la situation dans laquelle se trouvent les victimes de la marée noire. C'est l'Etat qui a négocié, signé et ratifié les conventions internationales organisant le régime spécial de responsabilité dans le cas des pollutions maritimes accidentelles. C'est l'Etat qui a la responsabilité du contrôle du respect des réglementations en matière de sécurité maritime. Sans parler d'une carence grave de l'autorité publique susceptible d'engager juridiquement la responsabilité de l'Etat, chacun admet qu'il y a, dans l'exercice du contrôle de la sécurité maritime, un certain nombre de défaillances, que les pouvoirs publics annoncent d'ailleurs eux-mêmes vouloir corriger.
Dans ces conditions, et en faisant d'abord prévaloir l'argument de la solidarité nationale, il paraît juste que l'Etat vienne financièrement au secours des victimes de cette catastrophe.
C'est l'objet de cette proposition de loi, dont le dispositif vise principalement à pallier l'insuffisance de l'indemnisation du FIPOL.
Tel est l'objet de la présente proposition de loi que nous vous demandons, Mesdames et Messieurs, de bien vouloir adopter.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

L'Etat compensera intégralement les pertes économiques subies par toute personne, physique ou morale, privée ou publique, du fait de la pollution maritime accidentelle consécutive au naufrage de l'Erika survenu le 12 décembre 1999 au large des côtes du Finistère, compte tenu des indemnisations obtenues avant la fin de l'année 2000.
Dans le cas d'indemnisations obtenues ultérieurement, l'Etat sera subrogé dans les droits des victimes.

Article 2

Un décret en Conseil d'Etat précisera les conditions d'application des dispositions ci-dessus.

Article 3

Les charges nouvelles ainsi créées pour le budget de l'Etat sont compensées, à due concurrence, par le relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575A du code général des impôts.
2555 - Proposition de loi de M. François Goulard visant à instaurer une indemnisation spéciale des victimes de la marée noire consécutive au naufrage de l'Erika (commission des affaires culturelles).


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