N° 2645
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 18 octobre 2000.
PROPOSITION DE LOI
relative à la protection et à la conservation
des
documents de l'Etat.

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles30 et 31 du Règlement.)

présentée

par MM. Claude BILLARD, François ASENSI, Gilbert BIESSY, Bernard BIRSINGER, Alain BOCQUET, Patrick BRAOUEZEC, Jean-Pierre BRARD, Jacques BRUNHES, Patrice CARVALHO, Alain CLARY, Christian CUVILLIEZ, René DUTIN, Daniel FEURTET, Mme Jacqueline FRAYSSE, MM. André GERIN, Pierre GOLDBERG, Maxime GREMETZ, Georges HAGE, Guy HERMIER, Robert HUE, Mmes Muguette JACQUAINT, Janine JAMBU, MM. André LAJOINIE, Jean-Claude LEFORT, Patrick LEROY, Félix LEYZOUR, François LIBERTI, Patrick MALAVIEILLE, Roger MEÏ, Ernest MOUTOUSSAMY, Bernard OUTIN, Daniel PAUL, Jean-Claude SANDRIER, Michel VAXÈS et Jean VILA (1),

Députés.

Archives et bibliothèques.
(1) Constituant le groupe communiste et apparentés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,
Notre patrimoine culturel écrit est gravement menacé.
Dans les bibliothèques françaises, des centaines de milliers de livres, de périodiques, d'estampes, de manuscrits divers, de partitions musicales se dégradent progressivement à cause de l'acidification du papier utilisé.
Jusqu'au xixe siècle, le papier était exclusivement fabriqué à partir de chiffons qui lui procuraient une bonne résistance au vieillissement naturel. A partir de la seconde moitié du xixe siècle, l'accès à la culture s'élargissant, le développement des publications a provoqué une demande accrue de papier élaboré à partir d'autres matières.
C'est ainsi qu'avec les progrès de la chimie le bois est devenu la principale matière première utilisée pour fabriquer du papier. Les fibres cellulaires du bois sont moins résistantes que celles du coton et entraînent un jaunissement du papier qui devient cassant, se désagrège et tombe en poussière. C'est cette acidification qui met en péril environ 25 millions de volume imprimés, soit à peu près le quart de notre patrimoine écrit.
Certes, il est possible aujourd'hui d'appliquer aux ouvrages dégradés par l'acidification un traitement qui n'oblige pas à dérelier les livres. Mais ce traitement est insuffisant pour enrayer radicalement ce phénomène naturel. La désacidification a pour but de neutraliser les acides qui détruisent le papier et en complément les recherches actuelles sont orientées vers les techniques de renforcement mécanique.
Plusieurs installations de traitement existent en France et dans le monde mais leurs capacités restent insuffisantes au regard des besoins. Ainsi, certains procédés concernant la seule désacidification (c'est le cas en France dans le centre de Sablé-sur-Sarthe et de la Bibliothèque nationale), d'autres comme la British Library en Grande-Bretagne, utilisent désacidification et renforcement des ouvrages.
Il est pourtant indispensable, pour la protection future du patrimoine, non seulement de guérir mais de prévenir. L'urgence nous invite à cesser d'imprimer sur papier acide condamné à l'autodestruction.
Une solution existe : l'utilisation du "papier permanent", seul capable de résister au vieillissement et de garantir la pérennité des _uvres et des documents. Le " papier permanent " est commercialisé depuis maintenant près de vingt ans tant en France qu'à l'étranger, par des industriels qui savent fabriquer un papier répondant aux exigences des normes internationales et qui offre les meilleures chances de durée de vie.
Mais du fait d'une faible demande, il est très peu utilisé en France. A l'instar de pays comme les Etats-Unis, qui ont adopté des lois ou des réglementations faisant obligation d'utiliser du " papier permanent " pour l'impression des documents officiels, une telle disposition permettrait d'éviter la dispiration d'une partie considérable de notre patrimoine culturel.
C'est la raison pour laquelle, sous le bénéfice de ces observations, nous vous demandons d'adopter la proposition de loi suivante.

PROPOSITION DE LOI
Article 1er

L'article 4 de la loi n° 79-18 du 3 janvier 1979 est complété par l'alinéa suivant :
"Les documents d'Etat qui doivent être conservés sont imprimés sur papier permanent."

Article 2

Les charges supplémentaires pour le budget de l'Etat qui résultent de l'application de la présente loi sont compensées par une majoration, à due concurrence, des droits de consommation sur le tabac prévus aux articles 575 et 575A du code général des impôts.
2645 - Proposition de loi de M. Claude Billard relative à la protection et à la conservation des documents de l'Etat (commission des lois).


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