N° 2664
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 18 octobre 2000.
PROPOSITION DE LOI
relative à la revalorisation des retraites et des pensions
des
anciens combattants de l'outre-mer.

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée
par M. François ROCHEBLOINE,
Député.

Anciens combattants et victimes de guerre.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,
Au cours des combats qu'a dû mener la France au xxe siècle, plus de 1,4 million de soldats sont venus d'Afrique, du Maghreb, d'Indochine ou d'autres pays pour combattre au sein de nos armées.
La juste reconnaissance des services rendus à la Nation par les anciens combattants de l'outre-mer constitue un devoir moral auquel, jusqu'à présent, aucun des gouvernements qui se sont succédés à la tête de notre pays depuis 1960 n'a su répondre de façon satisfaisante.
Depuis les mesures de " cristallisation " intervenues en 1959 et en 1960, et étendues en 1979 au Sénégal, au Gabon, au Tchad et à la République centrafricaine, l'ensemble des avantages servis au titre du code des pensions civiles et militaires de retraite et du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ont été calculés sur la base des tarifs en vigueur aux dates d'indépendance des Etats concernés.
A l'heure actuelle, environ 39 000 anciens combattants et ayants cause subissent la cristallisation de leurs pensions.
Même s'il est à l'honneur de la France d'avoir maintenu ces pensions alors que d'autres pays ont choisi de les supprimer pour les ressortissants de leurs anciennes colonies, la situation actuelle, résultant de la cristallisation, n'est nullement satisfaisante.
Le gel des tarifs a pour conséquence des niveaux de retraite très bas et, en outre, très disparates suivant les pays en termes de pouvoir d'achat. Ainsi, la retraite militaire, destinée à ceux qui ont passé quinze ans dans l'armée, représente seulement 673 F pour un ancien combattant guinéen, et à peine 400 F s'il est originaire de Tunisie ou du Maroc. La valeur du point de pension est très variable suivant les pays : 45,05 F à Djibouti, 27,97 F au Sénégal, 12,88 F en Guinée, 7,77 F au Maroc et en Tunisie, et 3,14 F dans l'ex-Indochine (80,62 F en France) (1). Cette diversité tient aux dates différentes d'accession à l'indépendance mais aussi aux revalorisations ponctuelles intervenues depuis lors de manière distincte suivant les pays.
Par ailleurs, une interprétation administrative de la cristallisation s'est opposée jusqu'à présent à la prise en compte de droits nouveaux, qu'il s'agisse de la réversion d'une pension d'invalidité ou de la reconnaissance de l'aggravation d'une invalidité. Cette interprétation a été infirmée par la jurisprudence de la commission spéciale de cassation des pensions, adjointe au Conseil d'Etat, qui a jugé que le droit à réversion des veuves restait ouvert, ainsi que le droit à révision pour aggravation. Un avis rendu par le Conseil d'Etat, publié au Journal officiel du 1er janvier 2000, a par ailleurs confirmé que la retraite du combattant était due aux ressortissants des pays concernés remplissant les conditions requises, atteignant l'âge de soixante-cinq ans.
Le souci de justice et de clarification impose à présent un réexamen d'ensemble de la question des pensions servies aux anciens combattants de l'outre-mer et une orientation courageuse vers la décristallisation de ces pensions.
Le secrétaire d'Etat aux anciens combattants déclarait d'ailleurs le 14 juillet 1999 " qu'il ne perdait pas de vue la nécessité de relever les pensions des soldats français de notre ex-empire, honteusement bloquées depuis des décennies ".
Cette démarche doit prendre en compte la diversité des bases juridiques à l'origine des mesures de cristallisation, les spécificités propres à chaque pays, notamment en matière de pouvoir d'achat, et les différents types de pensions concernées. Il convient également de définir les modalités de mise en _uvre de la revalorisation, notamment dans le temps.
Il convient par ailleurs de préciser l'impact financier de cette mesure : les estimations actuellement disponibles font état d'un coût de l'ordre d'un milliard de francs pour la décristallisation complète des pensions militaires d'invalidité et de 3,5 milliards de francs en englobant les pensions de retraite.
La décision politique attendue doit s'appuyer sur la nécessaire concertation entre les parties concernées et sur une réflexion approfondie permettant de définir les mesures précises de remise à niveau des pensions et leur calendrier de mise en _uvre.
C'est dans ce but que la présente proposition de loi prévoit la création d'une instance, composée de représentants de l'ensemble des parties intéressées, qui sera chargée de proposer au Gouvernement les mesures de nature à assurer dans les meilleurs délais possibles la revalorisation des retraites et des pensions servies aux anciens combattants de l'outre-mer.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Il est institué une commission d'étude de la revalorisation des pensions auprès du Premier ministre chargée de proposer les mesures d'ordre législatif et réglementaire permettant la revalorisation des rentes, des retraites et des pensions des anciens combattants de l'outre-mer.
Cette commission comprend des représentants des associations d'anciens combattants et des administrations concernées, deux députés et deux sénateurs.
Elle remettra ses propositions sous la forme d'un rapport au Premier ministre dans un délai de quatre mois suivant son installation. Ce rapport sera transmis au Parlement.

Article 2

Les conditions d'application de l'article 1er seront précisées par décret.
2664 - Proposition de loi de M. François Rochebloine relative à la revalorisation des retraites et des pensions des anciens combattants de l'outre-mer (commission des affaires culturelles).


© Assemblée nationale