N° 2714
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 15 novembre 2000.
PROPOSITION DE LOI
tendant à renforcer la répression
contre les
atteintes au respect dû aux morts.

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée

par M. Yves NICOLIN, Mme Sylvia BASSOT, MM. Jean-Louis BERNARD, Claude BIRRAUX, Roland BLUM, Dominique BUSSEREAU, Dominique CAILLAUD, Antoine CARRÉ, Jean-François CHOSSY, Georges COLOMBIER, Dominique DORD, Charles EHRMANN, Nicolas FORISSIER, Jean-Pierre FOUCHER, Gilbert GANTIER, Claude GATIGNOL, Pierre HELLIER, Michel HERBILLON, Pierre HÉRIAUD, Francis HILLMEYER, François LÉOTARD, Maurice LEROY, Maurice LIGOT, Michel MEYLAN, Pierre MICAUX, Jean ROATTA, Gilles de ROBIEN, Jean-Pierre SOISSON, Gérard VOISIN et Michel VOISIN,

Députés.

Droit pénal.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,
Depuis le IVe millénaire avant notre ère jusqu'aux temps modernes, de l'Asie à l'Amérique du Sud, les sépultures bâties par les hommes pour accueillir leurs défunts revêtent un caractère sacré. Il s'agit d'honorer à la fois leur propre histoire et ceux qui assureront l'intercession entre le monde des vivants et leur(s) divinité(s).
C'est la raison pour laquelle notre système juridique assure à la dépouille mortelle, objet de copropriété familiale ayant un caractère inviolable et sacré, ainsi qu'à ses accessoires, une protection spécifique.
Or, malheureusement, depuis une dizaine d'années, une nouvelle forme de vandalisme se développe dans plusieurs de nos régions : la profanation des cimetières.
De la douloureuse affaire survenue à Carpentras en 1991 jusqu'à la récente profanation de 236 tombes dans le cimetière Saint-Claude à Roanne au cours d'une beuverie, les actes portant atteinte à des sépultures se multiplient, sans d'ailleurs qu'il y ait toujours de motif religieux, ethnique ou politique.
Cette recrudescence impose au législateur d'émettre un signal fort en matière de répression des atteintes à la dignité de la personne humaine, et en particulier des atteintes au respect dû aux morts.
Notre droit civil considère que si après la mort le rapport d'affectation du corps humain à la personne (lui empruntant son régime juridique) a disparu, des raisons d'ordre public et de dignité humaine commandent de le protéger. L'article 16-2 du code civil prévoit donc la protection du "corps" et de ses " éléments ", c'est-à-dire aussi bien le corps-personne (vivant) que le corps-objet (mort) contre les atteintes illicites. Dans cet esprit, la sépulture est l'accessoire du cadavre dont elle s'inspire du régime juridique pour en assurer la protection.
Au plan pénal, le législateur avait renforcé en 1994 la répression du délit de violation de sépulture, l'amende encourue ayant été portée à 100000 F, élargi son champ d'application à la violation ou profanation de monuments édifiés à la mémoire des morts, et créé de nouvelles infractions en matière d'atteinte au respect dû aux morts.
Ainsi, l'article 225-17 du nouveau code punit d'un an d'emprisonnement et de 100 000 F d'amende toute atteinte à l'intégrité du cadavre. Lorsque cette infraction accompagne la violation ou la profanation de tombeaux, de sépultures ou de monuments édifiés à la mémoire des morts, les peines encourues sont portées à deux ans pour l'emprisonnement et 200000 F pour l'amende. La loi du 6 août 1995 a d'ailleurs exclu cette infraction du bénéfice de l'amnistie.
En outre, lorsque l'atteinte à l'intégrité du cadavre, ou la violation ou profanation de tombeau, de sépulture ou de monument aux morts a été commise à raison de l'appartenance ou de la non-appartenance, vraie ou supposée, des personnes décédées à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, les peines sont portées à trois ans d'emprisonnement et 300000 F d'amende, et lorsque les deux infractions ont été commises simultanément, à cinq ans d'emprisonnement et 500000 F d'amende.
Il est ici proposé d'aggraver les sanctions encourues en les portant :
- à trois ans d'emprisonnement et 300000 F d'amende pour le fait de porter atteinte à l'intégrité du cadavre, aux tombeaux, sépultures et monuments édifiés à la mémoire les morts, d'une part ;
- à quatre ans d'emprisonnement et 400000 F d'amende lorsque ces faits sont cumulés ou lorsqu'ils ont été commis à raison de l'appartenance ou de la non-appartenance, réelle ou supposée, des personnes décédées à une ethnie, une nation ou une religion déterminée, d'autre part.
Compte tenu du caractère particulièrement odieux de la profanation de toute tombe quelle qu'elle soit, dans quelque cimetière que ce soit, et étant donné la multiplication des profanations en France, notre droit pénal doit édicter des sanctions de nature à les prévenir, notamment par une peine plus forte promise aux auteurs de ces actes de vandalisme d'autant plus intolérables qu'ils portent atteinte à la mémoire et au sacré.
Telles sont les raisons pour lesquelles il vous est proposé, Mesdames, Messieurs, d'adopter la présente proposition de loi.

PROPOSITION DE LOI
Article 1er

L'article 225-17 du code pénal est ainsi modifié :
1° Dans les premier et deuxième alinéas, les mots : " d'un an d'emprisonnement et de 100000 F d'amende " sont remplacés par les mots : " de trois ans d'emprisonnement et de 300000 F d'amende ".
2° Dans le dernier alinéa, les mots: " à deux ans d'emprisonnement et à 200000 F d'amende " sont remplacés par les mots: " à quatre ans d'emprisonnement et à 400000 F d'amende ".

Article 2

Dans l'article 225-18 du code précité, les mots : " à trois ans d'emprisonnement et à 300000 F d'amende " sont remplacés par les mots : " à quatre ans d'emprisonnement et à 400000 F d'amende ".
2714 - Proposition de loi de tendant à renforcer la répression contre les atteintes au respect dû aux morts.(commission des lois)


© Assemblée nationale