N° 2893
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 30 janvier 2001.
PROPOSITION DE LOI
relative à la chasse dans les zones périurbaines
des départements du
Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle.
(Renvoyée à la commission de la production et des échanges, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée
par M. Armand JUNG,
Député.

Chasse et pêche.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,
La chasse dans les trois départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle est régie par des dispositions issues d'une loi du 7 février 1881 maintenues en vigueur après la Première Guerre mondiale à la suite d'un référendum des communes intéressées.
Modernisés en 1996 ces textes sont aujourd'hui codifiés aux articles L. 429 -1 et suivants du code de l'environnement.
Deux principes peuvent résumer ce régime local. Un principe de gestion communautaire du territoire par les communes qui se combine avec le principe d'une location tous les neuf ans par adjudication ou appel d'offres. Les principales exceptions à la communalisation concernent les propriétaires de 25 hectares de terrains d'un seul tenant et les terrains de l'Etat. Une exception existe au principe de mise en concurrence, la commune pouvant, si elle le souhaite, traiter de gré à gré avec le locataire sortant.
Cependant ce droit très marqué par le ruralisme de la société de la fin du siècle dernier, s'applique de façon uniforme à toutes les communes quelle qu'ait été leur évolution urbanistique et démographique depuis lors.
Si la coexistence de la chasse et des activités non appropriatives de la nature sont très largement moins aigus que dans d'autres régions, ceux-ci ont pu ponctuellement apparaître dans les zones périurbaines des grandes villes, notamment pour des questions de sécurité dans des zones proches des habitations voire enclavées.
Les communes qui ont décidé de ne plus louer la chasse sur leur ban pour ces raisons ont été assignées devant les tribunaux alors que d'autres, usant d'expédients, ont soit interdit la chasse par arrêté de police, soit exclu certaines parties de leur territoire du bail de chasse.
Lors des débats relatifs à la loi chasse du 26 juillet 2000 vous aviez, sur ma proposition, adopté un amendement qui permettait aux communes périurbaines des départements concernés de ne pas mettre en location la chasse sur leur ban communal. Cet amendement très ponctuel n'avait pas pour but de toucher aux principes de ce régime local défendu tant par les chasseurs que par les associations de protection de la nature.
Le Conseil constitutionnel, par décision n° 2000-434 DC du 20 juillet 2000, a annulé cette disposition qui figurait à l'article 14 XI du texte adopté en estimant que celle-ci avait pour effet de priver les propriétaires de terrains d'une contenance de vingt-cinq hectares au moins, de leur droit de chasse, sans que ni les termes de la disposition critiquée, ni les débats parlementaires ne précisent les motifs d'intérêt général justifiant une telle privation.
J'ai donc l'honneur de vous proposer une disposition qui, tout en poursuivant le même but, prend en compte aussi bien la jurisprudence de la Haute Juridiction que celle de la Cour européenne des droits de l'homme.
Elle exclut donc de son champ d'application les terrains des propriétaires réservataires de l'article L. 429-4 du code de l'environnement. En effet, dans sa décision précitée, le Conseil constitutionnel a estimé que l'inclusion dans le périmètre concerné par l'amendement, les terrains réservés par leur propriétaire en application de l'article L. 229-4 du code rural aujourd'hui codifié au code de l'environnement, pouvait être considérée comme une privation du droit de chasse qui n'était pas fondée sur des motifs d'intérêt général.
Par conséquent la présente proposition de loi intègre cette analyse.
Par ailleurs, outre la motivation de l'intérêt général, liée particulièrement aux impératifs de sécurité publique, il vous est proposé à l'article 2 de la présente proposition, d'affermir la constitutionnalité du texte, en prévoyant de façon précise les modalités d'une juste et préalable indemnisation des autres propriétaires concernés, compatible tant avec les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 qu'avec la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 modifiée, notamment compte tenu de l'application qu'en fait la Cour européenne des droits de l'homme (arrêt Chassagnou du 29 avril 1999).
Le texte qui vous est proposé institue également une indemnisation des propriétaires concernés tout en préservant les intérêts des agriculteurs dont les cultures pourraient être victimes de dégâts de sanglier.
Cette adaptation ponctuelle du droit local aux exigences de la société urbaine moderne reste souhaitable et à maints égards attendue : c'est la raison pour laquelle il vous est demandé, Mesdames et Messieurs, d'adopter la présente proposition de loi.

PROPOSITION DE LOI
Article 1er

L'article L. 429-7 du code de l'environnement est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
" III.-Dans les communes des agglomérations urbaines de plus de 15000 habitants, dont la liste est arrêtée dans les conditions de l'article L. 429-18, le conseil municipal peut tous les 9 ans, décider de ne pas mettre en location la chasse sur un ou plusieurs lots de son ban. Cette délibération fixe les conditions de gestion de la faune sauvage et de régulation des espèces susceptibles de causer des dégâts aux cultures, compte tenu notamment des impératifs de sécurité publique et de coexistence avec des activités non appropriatives de la nature, après avis de la commission consultative de la chasse prévue à l'article L. 429-5 et du conseil départemental de la chasse et de la faune sauvage. "

Article 2

L'article L. 429-13 du code de l'environnement est complété par un alinéa ainsi rédigé :
" Dans les communes visées au III de l'article L. 429-7, les propriétaires ont droit, s'ils en font la demande, à une juste et préalable indemnité. A défaut d'accord amiable, celle-ci est fixée par le juge conformément aux articles L. 13-1 à L. 13-28 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique. "

Article 3

L'article L. 429-32 du code de l'environnement est complété par un alinéa ainsi rédigé :
" Dans les territoires visés au III de l'article L. 429-7, les communes se substituent au Syndicat général des chasseurs en forêt pour l'indemnisation des dégâts de sangliers dans les mêmes conditions que celui-ci. "

Article 4

I. - La perte de recettes et les charges éventuelles pour les budgets de collectivités locales résultant de l'application des articles précédents sont compensées par un relèvement, à due concurrence, de la dotation globale de fonctionnement.
II. - La charge nouvelle pour le budget de l'Etat est compensée par le relèvement, à due concurrence, des tarifs prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
2893 - Proposition de loi de M. Armand Jung relative à la chasse dans les zones périurbaines
des départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle (commission de la production)


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