No 2945
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 27 mars 2001.
PROPOSITION DE LOI

tendant à permettre au bailleur d'avoir recours aux amendes à l'encontre du locataire ne respectant pas certaines de ses obligations.
(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée

par MM. Jean TIBERI, Jean-Claude ABRIOUX, Mme Martine AURILLAC, MM. Léon BERTRAND, Henry CHABERT, Lucien DEGAUCHY, Patrick DELNATTE, Jean-Pierre DUPONT, Roland FRANCISCI, Didier JULIA, Jacques KOSSOWSKI, Pierre LASBORDES, Thierry MARIANI, Franck MARLIN, Mme Jacqueline MATHIEU-OBADIA, MM. Gilbert MEYER, Didier QUENTIN et Léon VACHET.

Députés.

Baux.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,
La délinquance sur tout le territoire national, et en particulier à Paris, a une nouvelle fois enregistré une hausse très significative. Ces dernières années, parallèlement à l'augmentation générale des actes d'incivilité, chacun a pu malheureusement constater la dégradation des rapports locatifs en premier lieu dans les grands ensembles immobiliers à caractère social, mais aussi dans tous les autres types de groupes d'immeubles. Les troubles dont sont victimes les citoyens sont ceux liés au bruit, à la dégradation volontaire des immeubles et du matériel d'usage ainsi que le stationnement dans les parties communes des immeubles de groupes de personnes dont la présence prolongée revêt parfois un caractère d'intimidation qui peut conduire à divers actes de petite délinquance, qualifiés d'incivilités. La République reconnaît à tous les citoyens le droit de vivre en sûreté et donc celui de jouir du logement qu'elle loue ou possède sans être exposée aux  incivilités» et aux nuisances occasionnées par d'autres occupants. Les organismes bailleurs sont démunis pour combattre cette situation.
L'article 27 de la loi n° 82-526 du 22 juin 1982 relative aux droits et obligations des locataires et des bailleurs supprime la possibilité pour le bailleur de percevoir des amendes en cas d'infraction aux clauses d'un contrat de location ou d'un règlement intérieur d'immeuble.
Cette interdiction a été reconduite par les lois successives du 23 décembre 1986 et du 6 juillet 1989 régissant les rapports entre bailleurs et locataires.
Depuis, les troubles de jouissance occasionnés par certains locataires d'immeubles collectifs n'ont cessé de se multiplier. Il s'agit principalement de dégradations et salissures des parties communes, commises par un petit nombre de personnes mais causant des désagréments pour l'ensemble des occupants. Or, à une époque où la qualité du cadre de vie et l'environnement sont des préoccupations majeures, ces problèmes quotidiens deviennent de moins en moins supportables.
Face à cette situation, le bailleur ne dispose pas des moyens juridiques propres à lui permettre de satisfaire à l'obligation de résultat qui lui est imposée par l'article 1719 du code civil et la jurisprudence de faire jouir paisiblement le preneur de la chose louée.
En effet, le bailleur n'a pas un pouvoir réel de surveillance, de contrôle et de sanction sur le locataire. Les procédures juridiques existantes sont peu dissuasives et souvent inefficaces car inadaptées à la nature des nuisances. L'unique sanction est l'éviction du gêneur, par :
- le congé pour motifs sérieux et légitimes à la fin d'un bail ou bien;
- la résiliation judiciaire en cours de bail.
Cette sanction est cependant extrêmement difficile à obtenir car les manquements aux termes du bail doivent être soit extrêmement graves, soit suffisamment répétés.
De plus, elle ne fait que déplacer le problème : le locataire ainsi évincé reproduira très certainement ailleurs le même comportement irrespectueux.
La présente proposition de loi a donc un double objet :
- affirmer le droit de vivre en sûreté et en sécurité, tant à l'intérieur des logements que dans les parties communes des immeubles collectifs;
- rétablir la possibilité pour le bailleur de percevoir des amendes, en cas d'infractions aux clauses du contrat de location ou du règlement intérieur de l'immeuble.
Cette solution présente un caractère dissuasif marqué ainsi que l'avantage d'être mieux proportionnée à la gravité des manquements constatés, en responsabilisant à nouveau le locataire dans l'entière exécution de ses obligations.
Le montant maximum proposé pour les amendes est aligné sur celui des infractions au règlement sanitaire départemental (contravention de troisième classe).
Enfin, le produit des amendes sera affecté à l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (ANAH), comme le prévoyait l'article 65 de loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948.
Telles sont les raisons pour lesquelles il vous est proposé, Mesdames, Messieurs, d'adopter la présente proposition de loi.

PROPOSITION DE LOI
Article 1er

Tout locataire d'un ensemble d'habitations a le droit de vivre en sûreté et en sécurité, tant dans son logement que dans les parties communes.

Article 2

L'avant-dernier alinéa (i) de l'article 4 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est supprimé.

Article 3

L'article 7 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
 Toute infraction aux clauses du contrat de location ou du règlement intérieur à l'immeuble, commise par le locataire, peut donner lieu à la perception par le bailleur d'une amende civile dont le montant ne peut excéder 3000 F, sans préjudice des dommages-intérêts qui peuvent être accordés au bailleur.
 Le produit des amendes sera versé à l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (ANAH). »
N°2945-Proposition de loi de M.Tiberi tendant à permettre au bailleur d'avoir recours aux amendes à l'encontre du locataire ne respectant pas certaines de ses obligations.(commission des lois)


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