No 3405
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 21 novembre 2001.
PROPOSITION DE LOI
modifiant les conditions de représentativité des organisations signataires
des conventions et accords collectifs d'entreprise.

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, à défaut de constitution
d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée
par M. Gilles de ROBIEN,
Député.

Entreprises.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,
Le droit syndical, reconnu par la loi du 21 mars 1884, a été consacré dans le Préambule de la Constitution de 1946, auquel fait expressément référence la Constitution du 4 octobre 1958 : « tout homme peut défendre ses droits et intérêts par l'action syndicale et l'adhésion au syndicat de son choix ».
Cependant, dans les faits, l'octroi de droits exclusifs à cinq syndicats considérés comme les plus représentatifs a généré des effets pervers en permettant à ces organisations syndicales et aux sections qui leur sont affiliées de bénéficier d'une présomption irréfragable de représentativité, même lorsqu'en réalité elles sont minoritaires dans l'entreprise.
De ce fait, de nombreux accords sont signés par des organisations syndicales qui sont minoritaires dans l'entreprise contre l'avis des majoritaires. Mais on observe aussi des pratiques indignes d'une démocratie sociale avec de grandes centrales refusant de prendre leurs responsabilités et se défaussant sur ces syndicats minoritaires pour faire passer des accords sans en accepter la paternité.
Aujourd'hui, face à la crise de la représentation syndicale et à la montée en puissance des accords d'entreprise, notamment dérogatoires, il apparaît nécessaire d'adapter les règles de représentativité des syndicats signataires de ces accords.
Déjà, en 1982, était créé un droit d'opposition aux accords dérogatoires réservé aux organisations syndicales non signataires de l'accord et ayant recueilli les voix de plus de la moitié des électeurs inscrits lors des dernières élections professionnelles (article L. 132-26 du code du travail).
La reconnaissance du fait majoritaire a encore progressé avec le vote de la loi du 19 janvier 2000. Son article 19 conditionne l'octroi des allégements de charges dans le cadre de la réduction du temps de travail à la signature d'un accord par une ou des organisations syndicales représentatives dans l'entreprise ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés lors des dernières élections professionnelles. La démarche est désormais constructive et ne se résume pas à un simple droit d'opposition. En outre, en choisissant le critère de la majorité des suffrages exprimés, cette disposition tient compte de la faible participation aux élections professionnelles et donc de la difficulté à réunir une majorité d'inscrits : elle réduit ainsi les risques de blocage et favorise la formation du consensus le plus large possible au sein de l'entreprise.
Il convient cependant aujourd'hui d'aller plus loin et de généraliser un tel dispositif à tous les accords d'entreprise afin d'empêcher que des syndicats minoritaires ne continuent de conclure des accords contraires à la volonté de la majorité des salariés.
Il convient aussi d'encourager l'esprit de responsabilité syndical en incitant les grandes centrales à assumer franchement leur rôle de « bâtisseurs » de la norme sociale et à signer des accords plutôt que de se cantonner parfois dans des oppositions de pure forme.
L'adoption d'une telle mesure signifierait par ailleurs la fin d'un droit d'opposition, qui, tout en constituant une avancée sur le plan théorique, demeurait peu utilisé, non seulement en raison du contraignant critère de la majorité des inscrits, mais également de son assimilation à une démarche négative de rejet.
Pour une meilleure protection des droits et de la volonté des salariés, pour une plus grande légitimité des accords signés au sein de l'entreprise, pour une plus importante participation des salariés aux élections professionnelles et dans un souci de cohérence avec le dispositif déjà introduit dans la loi du 19 janvier 2000, il vous est demandé d'adopter la proposition de loi suivante.

PROPOSITION DE LOI
Article premier

L'article L. 132-19 du code du travail, est compété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Toutefois, pour entrer en vigueur, une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement, un avenant ou une annexe doivent être signés par une ou des organisations syndicales représentatives dans l'entreprise ou l'établissement ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés lors des dernières élections au comité d'entreprise, ou à défaut des délégués du personnel. »
« Lorsque le texte en négociation ne concerne qu'une catégorie professionnelle déterminée, relevant d'un collège électoral défini à l'article L. 433-2, il doit être signé par une ou des organisations qui ont recueilli la majorité des suffrages exprimés au sein dudit collège lors des dernières élections au comité d'entreprise, ou, à défaut, des délégués du personnel ».

Article 2

L'article L. 132-26 du code du travail est supprimé.
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3405 - Proposition de loi de M. Gilles de Robien modifiant les conditions de représentativité des organisations signataires des conventions et accords collectifs d'entreprise (commission des affaires culturelles)


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