Accueil > Archives de la XIème législature

graphique
graphique

N° 1000

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 23 juin 1998.

RAPPORT D'INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l'article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES FINANCES, DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN
sur la
fiscalité écologique

PRÉSENTÉ

PAR Mme NICOLE BRICQ,

Députée.

--

Impôts et taxes.

SOMMAIRE

____

Pages

___

INTRODUCTION 7

I.- L'ENVIRONNEMENT : UNE CONTRAINTE FORTE POUR LES POUVOIRS PUBLICS 9

A.- UNE OBLIGATION DE RÉSULTAT 9

1.- Une obligation morale 9

2.- Une obligation politique 11

3.- Une obligation juridique 15

4.- Une obligation économique 17

B.- UNE UTILISATION PRAGMATIQUE DE L'INSTRUMENT FISCAL 24

1.- La légitimité de l'instrument fiscal 24

2.- Les spécificités de la fiscalité environnementale 28

3.- Le principe pollueur-payeur 31

4.- La réforme fiscale environnementale 33

II.-  UNE RÉFORME DE LA FISCALITÉ AU SERVICE DE L'ENVIRONNEMENT 43

A.- L'AIR : LUTTER DURABLEMENT CONTRE LA POLLUTION ATMOSPHÉRIQUE 43

1.- Une volonté de contenir la pollution atmosphérique 43

2.- La fiscalité contre la qualité de l'air 52

3.- Conforter le droit de chacun à respirer un air non pollué 60

· Orientation n° 1 : Rééquilibrer la fiscalité sur les carburants 62

- Réduire l'écart de taxation entre le gazole et le supercarburant sans plomb 62

- Préserver les usages professionnels 66

· Orientation n° 2 : Favoriser un renouvellement propre du parc automobile 71

- Ne plus avantager les véhicules anciens 71

- Encourager l'utilisation des carburants et des véhicules propres 74

· Orientation n° 3 : Faciliter le déplacement urbain 79

- Soutenir les efforts des collectivités locales en matière de transports en commun 81

- Développer les transports en commun 82

- Encourager le covoiturage 83

B.- L'EAU : POUR UNE GESTION TRANSPARENTE ET INCITATIVE 84

1.- Les conséquences de l'augmentation du prix de l'eau 84

2.- La nécessaire réforme des agences de l'eau 90

· Orientation n° 1 : Vers une tarification de l'eau plus juste et plus responsabilisante 98

- Individualiser la mesure de la consommation 98

- Changer le mode de tarification 99

· Orientation n° 2 : Rénover le dispositif des agences de l'eau 100

- Légitimer les redevances 100

- Instituer une redevance de prévention des inondations et une taxe sur les granulats alluvionnaires 104

- Faciliter les travaux sur les berges des cours d'eau 105

- Démocratiser la composition des agences et des comités 107

C.- LES DÉCHETS : FAVORISER LA PRÉVENTION, LA COLLECTE SÉLECTIVE ET LA VALORISATION 108

1.- Les déchets et les valorisations 108

2.- La collecte et le traitement des déchets ménagers 112

3.- Un service public en mutation 113

4.- Des propositions pour 2002 117

· Orientation n° 1 : Renforcer l'application du principe pollueur-payeur 119

- Accentuer la prévention 119

- Faire participer les émetteurs de publicités et de journaux gratuits aux coûts de l'élimination des déchets 121

- Rendre plus incitatif le financement de la collecte et du traitement 122

· Orientation n° 2 : Soutenir les investissements 127

- Financer les centres de stockage de déchets ultimes 127

- Baisser la TVA sur la collecte (sélective) et le traitement (avec valorisation) des déchets ménagers 129

- Permettre la récupération de la TVA sur les investissements en matière de traitement des déchets 131

D.- LES SOLS : PRÉSERVER LES ESPACES FRAGILES 134

1.- Réexaminer l'imposition foncière 134

- Conditionner l'exonération des espaces boisés 138

2.- Favoriser la protection du territoire 139

- Exonérer les espaces naturels protégés 141

- Financer les espaces naturels sensibles 143

- Encourager la conservation des espaces naturels 143

3.- Contenir la pollution des sols 144

- Relever la fiscalité sur les engrais et les produits phytosanitaires 145

- Soumettre les élevages industriels hors sol au droit commun des installations classées 146

E.- LE BRUIT : PROTÉGER LES POPULATIONS 148

1.- Les insuffisances de la lutte contre le bruit des transports terrestres 148

- Financer la résorption des points noirs du bruit 150

2.- Atténuer le bruit des transports aériens 151

- Améliorer l'aide aux riverains 154

CONCLUSION 155

- Renforcer l'expertise en matière d'environnement 155

- Systématiser les études d'impact environnementales 156

RAPPEL DES PROPOSITIONS ET RECOMMANDATIONS 157

LISTE DES PERSONNES RENCONTRÉES 163

EXAMEN EN COMMISSION 167

ANNEXE : COMPARAISON DES TAXES D'ENVIRONNEMENT DANS LES PRINCIPAUX PAYS DE L'OCDE 175

INTRODUCTION

L'environnement est désormais l'une des préoccupations essentielles des Français. Les menaces qui pèsent sur la planète, en termes de changement climatique, de qualité des ressources en eau, de préservation des espaces ou de gestion des déchets, imposent effectivement aux pouvoirs publics de réagir.

Le rôle que l'Etat peut remplir pour la défense de l'environnement se situe à différents niveaux. Les problèmes transfrontaliers exigent une action concertée de la communauté internationale. Les engagements pris en matière de lutte contre le changement climatique lors de la récente conférence de Kyoto sont, à cet égard, significatifs. Le développement de la réglementation communautaire est également décisif : il est à l'origine, en France, d'un important travail législatif et d'une forte augmentation des investissements dans les secteurs concernés.

Pourtant, l'action des pouvoirs publics à l'échelon national reste légitime, d'autant que les inégalités sociales recoupent les inégalités environnementales, et efficace, ce qui justifie une évaluation des différents " outils " dont ils disposent pour protéger le cadre de vie des citoyens.

La fiscalité n'est que l'un d'entre eux, mais elle offre de nombreux avantages, même si la maîtrise des problèmes environnementaux passe souvent par une utilisation conjointe et souple de plusieurs instruments.

Historiquement, la France a cependant toujours privilégié l'usage de la réglementation et sa fiscalité ne tient pas compte de ses effets éventuels sur les écosystèmes. Certes, depuis plusieurs années, l'usage de la fiscalité pour servir des objectifs environnementaux n'est plus un tabou : la taxe parafiscale sur la pollution atmosphérique, la taxe sur le traitement et le stockage des déchets ou la taxe sur le décollage des aéronefs, par exemple, illustrent cette tendance. Mais les réformes qui sont intervenues récemment se sont trop souvent traduites par des mesures ponctuelles, sans cohérence d'ensemble. Si de nombreux pays, comme les Pays-Bas, le Danemark et la Suède, ont déjà dépassé, en matière de réforme fiscale environnementale, le stade des pétitions de principe, la France est largement restée à l'écart de cette démarche.

Le présent rapport a l'ambition, précisément, de proposer les orientations d'une réforme destinée à intégrer dans la fiscalité française le souci environnemental. Les propositions de votre Rapporteur porteront sur les cinq thèmes suivants, qui sont prioritaires et qui peuvent faire l'objet d'une approche fiscale : l'air, l'eau, les déchets, les sols et le bruit.

Contrairement à une idée largement répandue, la réforme fiscale environnementale qu'il est proposé de mettre en oeuvre ne se résume pas à la création de nouvelles écotaxes. Des mesures de ce type ne seront proposées que pour remédier à des problèmes environnementaux spécifiques, comme la pollution des eaux à partir des terres agricoles du fait de l'utilisation d'engrais et de produits phytosanitaires, voire pour financer des dépenses d'intérêt général pour la collectivité et pour l'environnement, comme les transports en commun par exemple. D'ailleurs, votre Rapporteur se devait de tenir compte des engagements du Gouvernement et de la majorité parlementaire de ne pas accroître le niveau général des prélèvements obligatoires, afin de préserver la demande, la consommation, la croissance et l'emploi. Quant à l'écotaxe globale, dont il est parfois question au niveau européen comme support d'une réforme fiscale d'ensemble, elle s'inscrit dans une réflexion plus vaste : elle dépasse la perspective du présent rapport, même s'il en sera beaucoup question, car votre Rapporteur approuve cette démarche et souhaite que le Gouvernement la soutienne dans le cadre des négociations en cours, au sein de l'Union européenne notamment. La France se doit de relancer le processus relatif à la taxation des énergies qui permettra, à terme, de diminuer les charges qui pèsent sur le travail.

Dans l'immédiat, le plus urgent, et le plus réaliste à court terme, était de réexaminer le droit existant de façon à rendre le système fiscal plus respectueux de l'environnement, en supprimant ou en restructurant les taxes qui sont à l'origine de distorsions dans ce domaine.

Votre Rapporteur s'est efforcé, dans la mesure du possible, de ne pas quitter le champ de la fiscalité et de ne pas empiéter sur les deux autres " chantiers " ouverts par la Commission des finances de l'Assemblée nationale : la fiscalité du patrimoine et la fiscalité locale. Il s'agissait d'un défi qui ne pouvait être qu'en partie atteint : l'environnement ne saurait faire l'objet d'une approche exclusivement fiscale, indépendamment de toute autre considération, et la fiscalité locale notamment recoupe largement le domaine de la fiscalité environnementale. Votre Rapporteur ne s'est pas interdit, dans certains cas, sur des sujets non-fiscaux ou dépassant le champ strict de la fiscalité environnementale, de formuler des recommandations.

I.- L'ENVIRONNEMENT :

UNE CONTRAINTE FORTE POUR LES POUVOIRS PUBLICS

A.- UNE OBLIGATION DE RÉSULTAT

1.- Une obligation morale

Si le développement économique est un facteur de progrès, les bénéfices matériels de la croissance s'accompagnent néanmoins d'une accentuation des écarts entre pays riches et pays pauvres, et d'une consommation accrue des ressources du globe : eaux douces, océans, réserves énergétiques, espaces littoraux, air non pollué...

L'espèce humaine doit faire face à deux défis. En premier lieu, la croissance économique rapide de certains pays en développement, au demeurant souhaitable, aura des conséquences majeures, au siècle prochain, sur l'état de la planète. En second lieu, le passage d'un milliard d'habitants au début du XXe siècle à 10 ou 12 milliards d'ici la fin du XXIe siècle est un sujet d'inquiétude pour les scientifiques. La conjugaison de ces deux facteurs fait qu'il ne sera plus possible, demain, de vivre sur la terre avec le même mode de vie que celui des 750 millions d'habitants actuels des pays industrialisés, faute d'eau, d'énergie et d'espace.

Parmi l'ensemble des défis environnementaux, les problèmes atmosphériques sont souvent considérés comme les plus préoccupants. D'ores et déjà, la question du changement climatique est posée. La progression des émissions de gaz issues d'activités humaines est à l'origine d'une modification de la composition gazeuse de l'atmosphère, qui a des conséquences sur la température et les climats : pluies acides, réchauffement atmosphérique par effet de serre et amincissement de la couche d'ozone stratosphérique en sont les signes les plus manifestes.

Le phénomène de l'effet de serre est lié à la présence croissante dans l'atmosphère de dioxyde de carbone (CO2) provenant de la production d'énergie à partir de combustibles fossiles, de méthane (CH4) issu essentiellement des activités agricoles modernes, de protoxyde d'azote (N20) et de chlorofluorocarbones (CFC). En soi, l'effet de serre est un phénomène normal et nécessaire : il désigne un ensemble de gaz et de vapeurs qui retient une partie du rayonnement thermique que la planète renvoie vers l'atmosphère sous l'effet des rayons solaires, ce qui assure une température sur terre bien supérieure à celle qui régnerait en son absence. Mais si les gaz issus des activités de l'homme renforcent de façon excessive cette couverture naturelle, la terre se réchauffe, comme le constatent aujourd'hui les scientifiques. Beaucoup d'études montrent que la température moyenne a déjà augmenté depuis le début du siècle (entre +0,5 °C et +1,5 °C). Il en va de même du niveau des mers (de 5 à 20 centimètres selon les lieux). Les prévisions climatiques sont incertaines, en raison de la complexité des phénomènes en cause : la hausse pourrait être de 2 °C d'ici 2100 si la concentration des gaz à effet de serre doublait (la tendance actuelle pourrait conduire à un triplement). Un tel réchauffement serait potentiellement redoutable, notamment pour les pays de l'hémisphère sud : élévation du niveau moyen des océans de 50 centimètres, perturbation du régime des pluies, inondations, sécheresses, modification des écosystèmes... La limitation des gaz à effet de serre, qui constituait l'objet de la conférence de Kyoto en décembre dernier, est indispensable.

La dégradation de la couche d'ozone est également très débattue. A haute altitude, l'ozone est non seulement naturellement présent mais vital : il agit comme un filtre qui absorbe le rayonnement ultraviolet solaire et préserve la biosphère. Mais depuis quelques décennies, les scientifiques observent une dégradation de la couche d'ozone, qui est imputée aux chlorofluorocarbures (CFC), composés artificiels dont la production a commencé dès les années 1930, notamment comme gaz propulseurs, frigorigènes, agents moussants ou nettoyants. Des " trous " ont été observés au-dessus de l'Antarctique. La zone dégradée occupait, semble-t-il, en 1995, une superficie record de 10 millions de km². En parallèle, la couche d'ozone s'appauvrit dans la plus grande partie du globe. Les effets de cette diminution peuvent être catastrophiques sur la santé humaine (cancers de la peau, cataractes...) et les écosystèmes. Si la mobilisation de la communauté internationale a déjà permis une réduction drastique des substances qui sont à l'origine de cette dégradation, plusieurs décennies seront sans doute nécessaires pour que les niveaux d'ozone dans la stratosphère soient rétablis.

En parallèle, une augmentation de l'ozone est observée à basse altitude (troposphère) : les concentrations au-dessus de l'Europe seraient trois à quatre fois supérieures à celles de l'ère préindustrielle. Loin de compenser la diminution de l'ozone stratosphérique, ce phénomène, dans lequel le trafic automobile a une responsabilité importante, et qui est à l'origine des pics de pollution en milieu urbain, pose des problèmes pour la santé humaine et la végétation, et participe à l'effet de serre.

La pollution acide est due, quant à elle, aux émissions atmosphériques de dioxyde de soufre (SO2), d'oxydes d'azote (NO et NO2), d'ammoniac (NH3) et d'acide chlorhydrique (HCl). Les écosystèmes peuvent être gravement affectés par ces retombées qui sont susceptibles de toucher des zones très éloignées des sources d'émission. Le secteur des transports est la principale source des émissions d'oxydes d'azote.

Le dioxyde de soufre, les particules en suspension, le plomb, les oxydes d'azote et le monoxyde de carbone sont à l'origine de pollutions de proximité qui ont une part de responsabilité dans les phénomènes globaux.

La question de l'eau est également un enjeu majeur. Les océans ne sont pas à l'abri de la dégradation de l'environnement : des phénomènes de contamination chimique ou microbiologique sont régulièrement constatés, et la surexploitation menace la biodiversité de certains espaces maritimes. En Europe, les mers les plus touchées sont la mer du Nord, les mers ibériques, la mer méditerranée, la mer Noire et la mer Baltique. Les littoraux ne sont pas épargnés. La qualité des nappes souterraines est menacée par des concentrations élevées de nitrates et de pesticides issus des activités agricoles. Dans un proche avenir, des pénuries d'eau pourraient survenir.

Il n'est pas question, bien sûr, de faire le tour des défis environnementaux auxquels l'homme est confronté. Ainsi, le problème des déchets est une question tout aussi fondamentale : la production totale de déchets aurait augmenté de 10%, en Europe, entre 1990 et 1995, même si une partie de cette progression s'explique par une amélioration des contrôles. La préservation des sols, des zones humides, des paysages et de la biodiversité, par exemple, sont également des enjeux majeurs.

Les ressources de la planète sont un patrimoine commun de l'humanité et celui-ci est en danger. Vis-à-vis de leurs citoyens, et des générations futures, les pouvoirs publics ont le devoir d'agir. Cette obligation est d'ailleurs également politique : les Français réclament une action résolue dans ce domaine.

2.- Une obligation politique

La préoccupation des Français pour l'environnement ne s'est pas démentie depuis l'émergence, dans les années 1960, de la " sensibilité écologique ", et la candidature de René Dumont, en 1974, aux élections présidentielles. Certes, cette demande peut prendre des formes très diverses : critique de la société de consommation et de la pollution qu'elle engendre, revendication d'un mode d'existence incompatible avec le productivisme, contestation antinucléaire... Aujourd'hui, la défense du cadre de vie quotidien semble l'emporter. Mais en tout état de cause, si le souci de protection de l'environnement peut être influencé par la conjoncture, il n'est pas l'effet d'une mode (1).

Trois questions relatives à l'opinion des français sont particulièrement intéressantes dans le cadre du présent rapport : leur jugement sur l'état de l'environnement, leurs attentes vis-à-vis des pouvoirs publics, et les " sacrifices " qu'ils sont prêts à consentir pour protéger l'environnement. A cet égard, l'une des sources d'information les plus complètes est sans doute le rapport réalisé par le CREDOC à partir des questions posées par l'IFEN et EDF dans l'enquête annuelle " Conditions de vie et aspirations des Français ". Les résultats présentés ci-après émanent essentiellement de cette source (2).

·   Tout d'abord, les jugements sur l'état de l'environnement sont fortement liés à l'éloignement de la zone géographique désignée : 52% des personnes interrogées considèrent que l'état de l'environnement est " excellent " ou " bon " dans leur région (" moyen " 35,8%), 34% dans leur pays (" moyen " 52,7%), 21% dans l'Union européenne (" moyen " 60,2%) et 6% seulement dans le monde (" moyen " 41,6%, " mauvais " 38,3%, " très mauvais " 12,3%). Autrement dit, les problèmes sont ailleurs. De façon plus ou moins marquée, cette tendance peut être constatée dans tous les pays de l'Union européenne.

Pour autant, dans l'enquête réalisée l'année précédente (vague de janvier 1996), 65,3% des personnes interrogées considéraient que l'état de l'environnement en France s'est dégradé depuis 20 ans.

Pour 40% des personnes interrogées, les générations futures seront les principales " victimes " de la dégradation de l'environnement (39% citent " les hommes qui vivent aujourd'hui sur la terre ").

Les pollutions qui sont jugées les plus préoccupantes sont celles de l'air, puis de l'eau. Parmi les nuisances de proximité, 44% des personnes interrogées citent l'aéroport comme l'installation la plus gênante pour les riverains, devant la centrale nucléaire (15,9%), la décharge d'ordures ménagères (15,5%), l'usine chimique (11,3%) et l'autoroute (8,4%).

·   L'opinion des Français sur l'efficacité de l'action des pouvoirs publics en matière d'environnement, qu'il s'agisse de l'Etat ou des collectivités locales, semble s'améliorer, mais une majorité d'entre eux continue de penser qu'ils ne s'en occupent pas suffisamment.

Leurs attentes sont fortement centrées sur la réduction de la pollution de l'air et de l'eau, qui sont leurs préoccupations majeures.

Près de quatre Français sur dix souhaitent que l'Etat intervienne en premier lieu pour lutter contre la pollution de l'atmosphère, et 60% placent cette demande parmi les deux actions qu'ils jugent prioritaires. Ces résultats sont d'ailleurs en progression constante.

La lutte contre la pollution de l'eau, des rivières et des lacs arrive en deuxième position (12% de citation comme première priorité, et 40% parmi les deux actions prioritaires).

Viennent ensuite, dans un ordre décroissant :

- le développement de nouvelles technologies respectueuses de l'environnement (8,7%, et 20%) ;

- la lutte contre les risques de l'industrie nucléaire (8,3%, et 19,9%) ;

- l'élimination et le tri des déchets (8,1%, et 19,9%) ;

- la sauvegarde des plantes et des animaux (9,3%, et 16,5%) ;

- la protection des paysages (7,4%, et 13,4%) ;

La lutte contre le bruit arrive en dernière position (7,0%, et 12,1%). Certaines enquêtes montrent néanmoins qu'il s'agit d'une gêne importante, notamment en milieu urbain, mais les bruits de voisinage occupent la place la plus significative et les Français semblent considérer que ce domaine ne relève pas principalement de l'Etat.

Parmi les actions nécessaires pour lutter contre la pollution de l'air dans les grandes villes, 32,8% des personnes interrogées préconisent en première réponse une augmentation " considérable " des transports publics. 24% évoquent l'interdiction des centres villes aux voitures. Curieusement, le choix de la solution prioritaire ne semble guère lié au lieu d'habitation. En revanche, le fait de détenir ou non une automobile a une influence sur le caractère plus ou moins contraignant des solutions envisagées.

·   Le troisième point porte sur ce à quoi les Français sont prêts pour protéger l'environnement.

De façon générale, on soulignera qu'au début de 1997, 62,4% des personnes interrogées répondaient " non " à la question : " êtes-vous prêts à accepter un ralentissement économique ? ". Néanmoins, 37,7% répondaient " oui ", ce qui est tout de même significatif. En revanche, 96,8% des personnes interrogées répondaient non à l'éventualité d'une augmentation du chômage.

Face à une liste d'actions susceptibles d'être menées pour protéger l'environnement, les Français citent l'élimination et le tri des déchets comme étant celle à laquelle ils croient pouvoir contribuer le plus (41%).

Par ailleurs, 52% des personnes interrogées se déclarent prêtes à payer 10% plus cher des produits qui préservent l'environnement.

Il reste que, comme on pouvait s'y attendre, les sacrifices les plus coûteux en argent sont souvent les moins populaires. La hausse des taxes, même affectées à la protection de l'environnement, n'a jamais fait l'unanimité. Pourtant, là aussi, les opinions évoluent. 29% des personnes interrogées seulement se disaient prêtes, en 1990, à " payer plus de taxes affectées directement à la défense de l'environnement ". Ils étaient 42% fin 1993 (3). La dernière enquête d'Eurobaromètre semble confirmer cette évolution, bien que les questions soient différentes (4). Trois types de mesures fiscales ont été proposées simultanément à des citoyens des quinze pays de l'Union européenne : une discrimination fiscale positive au profit des produits et procédés respectueux de l'environnement, une taxation hybride (hausse pour les produits qui ont un impact négatif sur l'environnement, baisse pour les produits " vertueux "), ou une discrimination négative : le taux de réponses positives est de 88% pour la première proposition, 79% pour la seconde, 74% pour la troisième. La France fait partie des pays dans lesquels la proposition d'éco-taxes frappant les produits et procédés nuisibles à l'environnement progresse (75% de réponses positives en 1997, soit + 3 points par rapport à 1995).

3.- Une obligation juridique

De façon croissante, la protection de l'environnement devient également une obligation juridique, compte tenu des engagements internationaux pris par la France dans ce domaine. Les problèmes globaux exigent, en effet, une approche internationale : l'air ou les espaces maritimes, par exemple, ignorent les frontières.

Le droit communautaire occupe ici une place essentielle. Les directives représentent la forme juridique la plus fréquemment employée : plus de 150 directives seraient en vigueur en matière d'environnement et il serait vain d'en dresser la liste. Les directives relatives à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine, au traitement des eaux résiduaires urbaines, à l'incinération, la mise en décharge ou le recyclage, ou à la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages, par exemple, sont des textes très importants, auxquels il sera bien sûr fait référence dans la suite du présent rapport. La pollution atmosphérique est également largement traitée par le droit communautaire à travers, en particulier, un encadrement strict de certaines émissions polluantes. Des textes majeurs sont d'ailleurs en cours d'examen en ce qui concerne l'énergie et les transports, avec des implications fortes en matière d'environnement. On pensera, en particulier, à la directive sur la taxation des produits énergétiques, et aux suites du programme Auto-oil sur les carburants et les rejets des moteurs.

De nombreux engagements internationaux (hors Union européenne) ont par ailleurs une portée juridique dans le domaine de l'environnement. On ne compte plus les traités, conventions, protocoles, déclarations ou accords par lesquels la France s'est engagée, avec d'autres pays, sur des objectifs environnementaux communs, souvent sous la forme d'une valeur cible, individuelle (protocole d'Oslo sur le soufre en 1994 : objectifs de réduction par pays, en fonction d'un échéancier précis) ou commune aux parties (protocole d'Helsinki, en 1985, portant réduction des émissions d'oxyde de soufre de 30% en 1993 par rapport au niveau de 1980).

On distingue, le plus souvent, les accords régionaux (par exemple la Convention de protection de l'Atlantique du Nord-Est), et les accords internationaux pris, en particulier, dans le cadre des Nations Unies.

Par le nombre des parties qu'elle réunit (170 pays), la Convention cadre des Nations Unies sur le changement climatique occupe une place particulière. Le protocole signé, le 11 décembre dernier, à Kyoto, au Japon, a renforcé le contenu juridique des engagements précédemment adoptés. Tous les pays dits de l'annexe 1 de la Convention, c'est-à-dire " industrialisés " ou " en transition vers une économie de marché " (OCDE, Europe de l'Est et ex-URSS), se sont engagés sur des objectifs précis de réduction des gaz à effet de serre, d'ici 2008-2012, de 5% en moyenne par rapport aux niveaux de 1990 (5).

Ces objectifs s'échelonnent entre -8% et +10% : -8% pour l'Union européenne, -7% pour les Etats-Unis, stabilisation pour la Russie, +10% pour l'Islande. S'agissant de l'Union européenne, on rappellera que l'engagement a été pris conjointement par les Etats membres et que les objectifs par pays ont été fixés, à l'intérieur de la " bulle ", par le Conseil environnement du 17 juin 1998 : le principe d'une fourchette allant d'une réduction de 28% (Luxembourg) à une stabilisation (France) voire à une autorisation de hausse des émissions (Portugal et Grèce) de gaz à effet de serre a été retenu.

Ces engagements sont importants et représentent de véritables défis pour les pays concernés. Ainsi, pour l'Union européenne, certaines projections aboutissent, à partir des tendances actuelles, et sur la base d'hypothèses relativement optimistes, à une augmentation de 8% des émissions de dioxyde de carbone entre 1990 et 2010 : le contraste est frappant par rapport à l'objectif de réduction de 8% et il témoigne de l'ampleur des mesures qui seront nécessaires pour respecter les accords de Kyoto. Pourtant, il n'est même pas certain qu'une diminution de 5% des gaz à effet de serre suffira à garantir que les augmentations de températures ne dépasseront pas 0,1° C, et que le niveau de la mer ne s'élèvera pas de plus de 2 centimètres, par décennie (limites provisoires supposées pour la durabilité).

La conférence dite des " parties ", prévue à Buenos Aires en novembre prochain, devra préciser les outils économiques à mettre en place. Le débat sur les quotas d'émission, qui sont peut-être un instrument de flexibilité nécessaire au niveau mondial, et l'approche fiscale, qui reste pertinente, au moins à une échelle régionale, ne fait que commencer.

Ainsi, un nombre croissant d'engagements internationaux a trait à l'environnement. Bien sûr, la portée juridique de ces engagements est très variable :

- certains accords fixent des orientations (" Les Etats signataires s'efforceront de... " : voir par exemple la Convention de Vienne sur la protection de la couche d'ozone) et n'imposent pas de mesures spécifiques ;

- les dispositions conventionnelles ont une portée juridique plus précise, car elles créent des droits ou des obligations : certaines peuvent avoir un caractère " auto-exécutoire ".

En tout état de cause, l'évolution est claire, et même si certains accords ne sont pas juridiquement contraignants, ils engagent les Etats signataires politiquement et moralement. Par ailleurs, l'implication croissante de l'Union européenne en matière d'environnement impose une contrainte forte aux Etats membres, puisque de façon générale, le droit communautaire prime sur le droit national, même si les directives n'imposent qu'une obligation de résultat, à la différence des règlements, qui sont d'application directe.

4.- Une obligation économique

La protection de l'environnement peut également être une chance sur le plan économique.

Le lien entre croissance et environnement a pourtant fait l'objet de nombreuses controverses. Plusieurs écoles se sont opposées et on rappellera brièvement ci-après les termes d'un débat qui s'est quelque peu apaisé.

·   Selon une première thèse, il n'y a pas de lien significatif entre la croissance économique et l'état de l'environnement. Dans certains cas, on constate effectivement un découplage : en matière de pollution atmosphérique par exemple, les émissions d'origine industrielle sont en diminution, en France, depuis le début des années 1980, indépendamment du niveau de la croissance, même si ce progrès est annulé par la hausse des nuisances dues au transport. On peut néanmoins considérer qu'il ne s'agit que d'un phénomène particulier et d'ailleurs, plus personne ne songe réellement à nier l'existence d'un lien entre croissance économique et environnement.

·   La seconde école met en avant le concept de complémentarité : la croissance économique dégage des ressources qui sont nécessaires à la lutte contre la pollution, et la hausse de l'investissement accélère l'introduction de techniques moins polluantes. Là réside sans doute l'explication du découplage précédemment évoqué en matière de pollution atmosphérique. Pour autant, l'expérience ne permet pas de valider cette représentation optimiste. D'ailleurs, si des catastrophes environnementales ou des menaces de grande ampleur peuvent conduire à des décisions politiques importantes, la croissance économique ne se traduit guère par une hausse du pourcentage des budgets publics consacré à l'environnement. Le manque de conscience environnementale parmi les élites et/ou les décideurs, les pesanteurs administratives et le poids des acquis conduisent souvent à confiner les politiques publiques menées dans ce domaine à une approche curative, et à laisser aux générations futures la charge de régler une grande partie des problèmes.

·   La troisième thèse, qui était celle des premiers défenseurs de l'environnement, revient à considérer qu'il y a antinomie entre croissance et protection de l'environnement. Cette affirmation comporte elle-même deux volets : la croissance économique détériore l'environnement ; la protection de l'environnement freine la croissance.

Chacune de ces thèses a ses arguments et ses éléments de validation empirique. Mais aucune n'est pleinement satisfaisante :

- on peut écarter d'emblée la thèse selon laquelle environnement et économie sont deux entités distinctes ;

- on doit par ailleurs refuser les raisonnements qui, considérant que la croissance s'accompagne d'une utilisation accrue de matières premières et d'énergie et que cette utilisation cause des dégâts écologiques, ont pu conduire à l'apologie d'une " croissance zéro ". Un tel scénario laisse implicitement penser que le développement, l'émancipation, le progrès, seraient encadrés, en quelque sorte, par des règles " naturelles " : il s'agit en fait d'agir sur la réalité pour les rendre supportables.

Indirectement, on rejoint ainsi la quatrième école qui se distingue dans le débat entre économistes et écologistes : celle de l'intégration. Pour ses défenseurs, la politique de croissance ne doit plus se focaliser sur le seul objectif quantitatif d'augmentation du PIB, mais doit prendre en compte une dimension qualitative en intégrant une exigence de respect de l'environnement. C'est le sens du concept de " développement (écologiquement) durable ", autour duquel un consensus doit pouvoir se dégager : l'économie doit être développée au bénéfice des générations présentes mais sans que le coût pour les générations futures soit inacceptable. L'article 2 du traité instituant la Communauté européenne évoque ainsi " une croissance durable et non inflationniste respectant l'environnement ". Lors du sommet de Rio de 1992, les nations se sont retrouvées autour de ce concept, qui est inscrit à l'article 2 du protocole de Kyoto à la Convention sur les changements climatiques. Dans cette perspective, la croissance est l'objectif mais pas " à n'importe quel prix " : les utilités résultant de la hausse du PIB doivent être comparées aux désutilités qualitatives, présentes et futures, de cette évolution (6).

L'un des exemples les plus pertinents pour illustrer le concept de développement durable est celui de l'agriculture. Si la production agricole des pays de l'OCDE peut sans doute être maintenue au niveau actuel, il est moins certain que cette tendance puisse se poursuivre indéfiniment sans nuire au capital naturel que sont les sols, l'eau, la diversité biologique et les paysages. La réforme des politiques agricoles doit prendre en compte la pérennité de cette activité. En ce sens, une production toujours plus intensive compromet cet objectif (7).

Néanmoins, l'équilibre nécessaire pour une croissance durable n'est pas spontané :

- il ne saurait résulter d'une politique de l'environnement reposant principalement sur l'autodiscipline et l'autocontrôle : l'existence d'un régulateur, qui soit à même de faire prévaloir des intérêts collectifs sur les intérêts particuliers, est indispensable. Au niveau national, c'est le rôle de l'Etat. La volonté politique est essentielle ;

- mais, dans une économie de marché, la régulation par les prix est également indispensable : si l'activité économique a un impact inacceptable sur l'environnement, cela signifie que les prix des produits et des technologies ne reflètent pas l'utilisation des ressources naturelles par le système économique. Autrement dit, en ne donnant pas de prix à des actifs naturels qui font pourtant l'objet de demandes concurrentes, ou en ignorant les coûts indirects des activités de production et de consommation, les systèmes de prix ne jouent pas la fonction de régulation qui est la leur. L'objectif doit donc être d'intégrer progressivement les effets sur l'environnement dans les décisions des agents économiques, à travers une " internalisation des externalités " (8).

La conciliation de la sphère de l'économie et de l'environnement semble d'autant plus réalisable que la défense de l'environnement peut permettre d'enrichir le contenu en emploi de la croissance.

·   En premier lieu, le " marché de l'environnement " peut être à l'origine de créations d'emplois. Le bilan est néanmoins controversé, car les politiques de l'environnement n'ont pas que des effets positifs sur l'emploi (9).

Du côté des conséquences négatives, il est indéniable que les industries polluantes subissent les effets de leur ajustement aux réglementations environnementales. Le risque d'affaiblissement ou de délocalisation des industries nationales est donc parfois évoqué. Par ailleurs, les entreprises peuvent avoir tendance à reporter leurs autres investissements lorsqu'un investissement environnemental est nécessaire.

Ceci explique pourquoi l'harmonisation des politiques environnementales doit être une priorité au sein de l'Union européenne, afin qu'elles ne servent pas de prétexte à des pratiques commerciales déloyales et anticoncurrentielles. Mais quoi qu'il en soit, la plupart des études montrent que les politiques de l'environnement créent plus d'emplois qu'elles n'en détruisent :

- les effets d'ajustement sont compensés par la demande en biens d'environnement qui est créée par ailleurs, notamment dans le secteur des éco-industries (production de biens et services visant à mesurer, prévenir, limiter ou corriger les atteintes à l'environnement) ;

- de plus, la dépense publique en matière d'environnement est jugée vertueuse : l'effet multiplicateur est élevé car ce secteur fait appel à une main d'oeuvre relativement abondante.

Une observation fine du marché de l'emploi dans le domaine de l'environnement reste encore difficile. Elle fait apparaître des métiers " écartelés " entre faibles et hautes qualifications et conduit à distinguer les professions de l'environnement d'une part, et les emplois de l'environnement d'autre part :

- les professions de l'environnement désignent les activités rétribuées requérant une qualification environnementale spécifique. Elles peuvent s'exercer, le cas échéant, dans des entreprises appartenant à des secteurs ne relevant pas directement de l'environnement. Spécialisation et formation sont deux exigences pour ce segment fortement demandeur en universitaires de niveau bac + 5, en techniciens et en ingénieurs. Le nombre de ces " professionnels " était évalué, en 1992, entre 30.000 et 60.000 ;

- la connaissance des emplois est plus approximative. Leur nombre est estimé, en France, à 280.000, et à plus de 400.000 en tenant compte des emplois indirects. On désigne ainsi les postes de travail situés dans des structures ayant pour activité principale l'environnement. Le secteur des éco-industries représenterait environ 110.000 emplois directs. Les qualifications demandées peuvent être éloignées du domaine de l'environnement, et les offres concernent principalement des postes peu qualifiés. La majorité d'entre eux se situent dans les domaines de l'eau (35%) et des déchets (40%, notamment dans la collecte sélective et la récupération), ce qui témoigne de l'impact potentiel des législations sur l'emploi (lois sur l'eau et les déchets de 1992, et directives européennes).

Le total de ces emplois serait en progression depuis 1987 : + 4.000 par an environ.

·   La défense de l'environnement peut également enrichir le contenu en emploi de la croissance en offrant une nouvelle assiette pour le financement de la protection sociale, qui repose aujourd'hui largement sur le travail (10).

De nombreux économistes ont, en effet, défendu l'idée d'une réforme environnementale de la fiscalité qui présente des avantages en termes aussi bien d'environnement que d'emploi (théorie du double dividende). Cette démarche repose sur un certain nombre de postulats et d'enchaînements que l'on présentera ci-après.

L'idée de base est que les sociétés modernes engendrent des demandes croissantes et légitimes, notamment en matière de protection sociale. Néanmoins, le financement de la protection sociale repose en grande partie sur l'emploi : dans un contexte de chômage élevé lié en partie au coût du travail, ces demandes sont donc difficiles à satisfaire. Dès lors, la seule façon de dépasser ce paradoxe consiste à modifier l'assiette des prélèvements obligatoires. C'est ce raisonnement qui a conduit, par exemple, à la création de la cotisation sociale généralisée (CSG).

Mais dès la fin des années 1980, cette démarche a rejoint le débat sur la lutte contre l'effet de serre, à travers un projet consistant à taxer certaines émissions polluantes (pour obtenir un premier dividende environnemental) et en contrepartie, à réduire les charges qui pèsent sur le travail (en visant un second dividende, à savoir la baisse du chômage), le tout à prélèvements constants.

L'idée n'a rien de théorique. En 1993, la Commission européenne avait proposé d'instituer une taxe mixte énergie-CO2 qui aurait permis, dans le même temps, de réduire les charges qui pèsent sur le travail. L'opposition de plusieurs Etats membres, dont la France, par souci de préserver le nucléaire, mais aussi, pour d'autres raisons, de l'Espagne, du Portugal, de la Grèce et du Royaume-Uni, a conduit, en 1994, au retrait de ce projet.

Suite à cet échec, la Commission a présenté, le 12 mars 1997, une nouvelle proposition de directive, " restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques ". Ce texte propose de relever les taux minimums de taxation prévus pour les huiles minérales et de les élargir à l'ensemble des produits énergétiques (y compris le charbon, le gaz naturel et l'électricité). Il vise, bien sûr, à mettre fin à la concurrence entre les Etats membres qui résulte des différences de structures et de taux en matière de fiscalité. Pourtant, un double dividende est toujours recherché. La taxation des sources énergétiques a une portée environnementale, la production et la consommation d'énergie constituant l'une des principales sources de pollution. Mais elle doit aussi permettre aux Etats membres de disposer de recettes fiscales supplémentaires qui leur donnent les moyens de réduire en parallèle les impôts et les charges qui pèsent sur le travail. En application du principe de subsidiarité, la responsabilité de ce choix politique incombe néanmoins aux Etats membres.

La concrétisation et l'importance du double dividende ne font pas l'unanimité. Si tout le monde s'entend pour considérer que les écotaxes sont un moyen de minimiser les coûts globaux de la protection environnementale, la possibilité d'obtenir un bénéfice fort à la fois en termes d'environnement, de croissance et d'emploi est plus débattue. Les risques de distorsions entre les industries, l'absence d'effet sur le coût global moyen de production, et la crainte des délocalisations, sont souvent évoqués.

Certains arguments sont incontestables, notamment l'introduction d'une distorsion sur le marché des biens finaux, puisqu'il s'agit là du fondement même du dividende environnemental. D'autres le sont moins et, finalement, plusieurs points peuvent être considérés comme des acquis :

- l'ampleur du double dividende est proportionnelle à l'aptitude des allégements de charges à générer des emplois ;

- il suppose que les écotaxes soient d'un montant non négligeable et que la baisse des charges qui pèsent sur le travail soit effective ;

- l'importance des résultats à attendre de cette réforme ne doit pas être surestimée : il ne s'agit pas d'une solution structurelle à long terme au problème du chômage. Les travaux de modélisation réalisés jusqu'à présent montrent que le double dividende est positif mais d'ampleur limitée. Certaines évaluations ont tout de même conclu, pour la France, à un ordre de grandeur compris entre 150.000 et 400.000 emplois nouveaux ;

- certains secteurs gagneront à cette réforme (transports collectifs, petites surfaces, entreprises " intensives en main d'oeuvre ", etc.), d'autres y perdront. Il sera sans doute nécessaire d'envisager des dispositions particulières pour les secteurs d'activité exposés à la concurrence internationale qui, à défaut, seraient fortement menacés. Néanmoins, la mesure des effets sectoriels implique de prendre en compte la baisse des charges sociales qui est le second volet de la réforme ;

- la dimension des écotaxes dépasse le cadre national. Les risques de distorsions et de délocalisations seraient réels en cas d'application unilatérale ;

- le débat n'est pas achevé. Bien au contraire, la persistance d'un niveau élevé de prélèvements sur le travail conjugué à un fort taux de chômage, et les engagements contraignants pris à Kyoto en matière de limitation des émissions de gaz à effet de serre à l'horizon 2012, constituent deux éléments qui plaident en faveur d'un suivi étroit de ce dossier.

Pour autant, la perspective évoquée ci-dessus constituerait un changement important de politique fiscale. L'enjeu se situe, au minimum, à l'échelle de l'Union européenne. L'ambition du présent rapport est plus modeste : il ne porte pas sur la mise en place d'une écotaxe globale, mais propose simplement, et c'est déjà beaucoup, de réexaminer et de restructurer le droit existant dans un sens plus favorable à l'environnement.

B.- UNE UTILISATION PRAGMATIQUE DE L'INSTRUMENT FISCAL

1.- La légitimité de l'instrument fiscal

La protection de l'environnement est de plus en plus nécessaire et les Français attendent des pouvoirs publics qu'ils oeuvrent dans ce sens.

L'intervention de l'Etat ne résoudra certes pas tous les problèmes. L'attitude de la société civile et son degré de citoyenneté environnementale seront, à cet égard, essentiels. Mais l'Etat a effectivement le devoir d'intervenir pour faire valoir les intérêts de la collectivité, pour arbitrer des conflits que le marché ne résout pas de façon satisfaisante et pour inciter, voire contraindre, les entreprises et les consommateurs à modifier leurs comportements ou à assumer le coût de leurs nuisances.

L'Etat dispose, à cet égard, de plusieurs types d'instruments.

On distingue, en premier lieu, des formules souples, contractuelles, comme les " contrats de branches " ou les " actions volontaires ", qui sont généralement négociés entre des groupes industriels et les pouvoirs publics. Cette approche, qui a été largement utilisée dans certains pays, comme le Canada au cours des années 1970 pour renforcer sa sécurité énergétique après le choc pétrolier (11), présente l'avantage de susciter, de la part des participants, un degré élevé d'engagement. Elle est néanmoins d'autant plus difficile à mettre en oeuvre que le nombre des acteurs est important, ce qui rend l'instrument moins adapté pour les pollutions diffuses. Elle suppose également un respect volontaire des engagements et une bonne information de l'ensemble des acteurs (12).

La labellisation repose également, d'une certaine façon, sur une démarche volontaire, mais de la part des consommateurs. L'efficacité de l'instrument repose largement sur la participation des citoyens. L'engouement actuel, en France, pour les produits " bio ", témoigne d'une évolution des mentalités qui peut accroître l'efficacité de cet instrument. Les labels AOC (appellation d'origine contrôlée) et AB (agriculture biologique) favorisent une filière agricole plus respectueuse de l'environnement et potentiellement prometteuse en termes d'aménagement du territoire.

Au cours des années 1980, les Etats ont cependant privilégié, de façon générale, la révision et l'extension des réglementations existantes, en imposant des limites quantitatives à certaines émissions ou à l'utilisation de biens déterminés. Qu'il s'agisse de protéger des espaces, d'interdire des comportements comme certains rejets toxiques dans les cours d'eau, ou d'imposer des normes ou des obligations, en matière d'élimination des déchets ou de circulation en cas de " pic de pollution " par exemple, la réglementation joue un rôle essentiel, voire irremplaçable lorsqu'une situation donnée impose une réponse urgente et radicale. Cette formule est également largement utilisée, au niveau communautaire, en particulier dans le domaine de l'eau ou des déchets.

Les inconvénients de l'approche réglementaire sont cependant bien connus : au-delà de son caractère " autoritaire ", voire brutal, la réglementation est à l'origine de distorsions entre les agents, les coûts d'adaptation pouvant être différents. De plus, elle s'applique souvent de façon générale et uniforme, ce qui, en particulier dans le domaine de l'environnement, n'est pas toujours justifié, les pollutions pouvant avoir des effets très différents selon les milieux. Certains soulignent par ailleurs que l'utilisation de normes environnementales peut servir d'alibis à des pratiques protectionnistes et ainsi entraîner des distorsions dans les échanges.

Dans les années 1980, les pays industrialisés ont pris conscience, progressivement, des mérites d'une approche fondée sur des instruments dits " économiques ", qui s'appuient sur les mécanismes du marché.

Les systèmes de consignation, qui sont notamment appliqués pour les récipients de boissons, s'inscrivent dans ce cadre.

Les aides financières sont également utilisées dans de nombreux pays de l'OCDE, que ce soit sous forme de subventions, d'avantages fiscaux ou d'amortissements accélérés.

Viennent ensuite les permis négociables, qui s'articulent en principe avec des objectifs quantitatifs fixés par les pouvoirs publics : un plafond de pollution est déterminé (ce qui relève au demeurant d'une approche réglementaire) et à l'intérieur de cette " enveloppe ", des " droits à polluer " sont soit distribués aux acteurs en fonction de leurs émissions, soit vendus. Dès lors, une entreprise ne peut s'installer dans la zone concernée, ou y étendre son activité, qu'à la condition de ne pas accroître la charge de pollution totale, ce qui lui impose de développer des technologies propres ou d'acheter des " droits " à d'autres entreprises qui acceptent de réduire leurs émissions.

Les permis négociables ont pour ambition de concilier développement économique et protection de l'environnement : ils ont été expérimentés, en particulier, aux Etats-Unis. Les difficultés d'une telle formule sont cependant réelles, en particulier, au niveau des critères de distribution des permis initiaux, et du contrôle des permis détenus. L'existence d'un marché important, tant du côté de l'offre que de la demande, est également nécessaire, mais au niveau international se pose le problème de l'absence de régulateur central.

Il reste les redevances et les taxes, qui peuvent frapper aussi bien des émissions polluantes (pollution de l'air, de l'eau, bruit, etc.) que l'utilisation de certaines infrastructures ou services (en matière de collecte et de traitement des déchets par exemple), voire des produits directement (engrais, pesticides, piles, etc.).

L'utilisation de la fiscalité présente de nombreux avantages.

On observera, en premier lieu, que la fiscalité permet de viser plusieurs objectifs : créer des incitations, dégager des moyens financiers, ou les deux à la fois. La redevance, quant à elle, s'analyse comme une contrepartie à un service rendu. Ainsi, la vocation de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) est essentiellement budgétaire. En l'état actuel des choses, les redevances des agences de l'eau sont également avant tout une source de financement pour des programmes de lutte antipollution. La taxe sur le traitement et le stockage des déchets est à la frontière du financement et de l'incitation. La redevance spéciale et la redevance générale d'enlèvement des ordures ménagères sont dans une logique de service rendu.

La fiscalité présente surtout deux avantages majeurs. Elle est plus juste, car elle impose aux agents les mêmes coûts de dépollution, qui sont en outre supportés par les pollueurs. Elle permet par ailleurs aux acteurs de procéder à des arbitrages, entre le paiement de la taxe ou de la redevance et la réduction de leurs pollutions. Dans ce sens, elle a un effet d'autorégulation, les agents économiques étant libres de choisir la manière de s'adapter aux signaux du marché.

Dès lors, même dans l'hypothèse où la fiscalité ne vise qu'un dividende environnemental, sans prétendre dans le même temps contribuer à la résorption du chômage (double dividende), son usage est souvent plus satisfaisant que celui des autres instruments des politiques environnementales.

La principale difficulté soulevée par l'usage de la fiscalité réside dans la fixation du montant de la taxe, qui ne doit être ni trop élevé ni trop faible pour que l'instrument soit efficace. De plus, la souplesse de l'instrument doit être relativisée : l'inertie et la sédimentation sont aussi deux tendances lourdes des politiques fiscales. Enfin, l'instrument fiscal n'est pas adapté à toutes les situations. Ainsi, il est parfois difficile de taxer directement les émissions polluantes, notamment quand elles ne sont pas quantifiables ou lorsque leur auteur n'est pas directement identifiable (pollutions agricoles des sols et de l'eau par exemple, liées à une utilisation excessive d'engrais ou de produits phytosanitaires).

De façon générale, il est plus pertinent de viser un objectif d'internalisation des coûts externes. Ainsi, dans le domaine des déchets ménagers, la logique voudrait que le prix du produit acheté par un consommateur intègre déjà le coût de son traitement futur (stockage, recyclage, etc.). De ce point de vue, l'instrument fiscal doit parfois s'effacer au profit de mécanismes du type de celui mis en place par le " décret emballages " du 1er avril 1992, qui impose aux producteurs ou aux importateurs de produits qui sont commercialisés dans des emballages de contribuer ou de pourvoir à l'élimination de ces déchets (" prise en charge des coûts de l'aval par l'amont ").

Le débat relatif au choix des instruments traverse donc tout le champ de l'environnement (eau, déchets, énergie, transports, etc.). Chacun d'entre eux présente des forces et des faiblesses et la maîtrise des problèmes d'environnement passe souvent par une intégration cohérente et pragmatique de plusieurs instruments. Il est possible, par exemple, de conjuguer taxes et subventions, de vendre ou de distribuer gratuitement les permis négociables dès lors que l'Etat en a le contrôle, ou d'appuyer un dispositif fiscal sur une approche réglementaire. Il faut également favoriser une internalisation progressive des coûts externes (13).

Il reste que, de façon générale, les instruments économiques, qui utilisent les mécanismes du marché, sont préférables aux instruments réglementaires. Pour autant, il convient d'éviter tout amalgame : ces instruments " ont recours à la main invisible pour lui faire faire ce qu'elle sait le mieux faire : susciter des comportements efficaces, mais elle travaille dans un cadre et au service d'objectifs déterminés par l'intérêt public " (14).

Par ailleurs, dans le cadre d'une approche économique, l'instrument fiscal, qui se situe à mi-chemin entre la réglementation et la régulation par le marché, offre de nombreux avantages : souplesse, respect de la liberté des agents, et internalisation par les prix de certaines externalités.

L'intervention des pouvoirs publics, dans le domaine de l'environnement, par le biais de la fiscalité, est donc, dans certains cas, légitime. Mais l'instrument fiscal à vocation environnementale présente des particularités par rapport à la fiscalité traditionnelle.

2.- Les spécificités de la fiscalité environnementale

Les principes budgétaires français sont parfois inadaptés pour la mise en oeuvre d'une fiscalité à vocation environnementale. Deux règles constituent à cet égard des carcans excessivement rigides : l'annualité, et la non-affectation. Il est d'ailleurs significatif qu'elles soient toutes les deux largement contournées : de nombreuses taxes et redevances environnementales sont affectées et s'inscrivent dans une perspective pluriannuelle.

·   Incontestablement, une fiscalité environnementale, surtout lorsqu'elle recherche un effet incitatif, doit s'inscrire dans un cadre pluriannuel qui s'articule avec une programmation des actions et des objectifs. L'exemple des redevances perçues par les agences de l'eau, dont le montant est fixé dans le cadre d'un programme quinquennal d'intervention, est le plus significatif. Ce besoin de programmation pluriannuelle peut prendre d'autres formes : ainsi, le montant de la taxe de mise en décharge des déchets ménagers, créée par la loi du 13 juillet 1992, a été rendu progressif par la loi du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement, de façon à soutenir l'objectif de suppression, d'ici 2002, des décharges (hors déchets ultimes) : 25 francs par tonne de déchets réceptionnés au 1er janvier 1995, 30 francs au 1er janvier 1996, 35 francs au 1er janvier 1997 et 40 francs au 1er janvier 1998.

Bien sûr, la nécessité d'une perspective de moyen terme ne se limite pas à la fiscalité environnementale : c'est l'action publique en général qui a besoin d'un élargissement de son horizon temporel. Le rapport déposé par le Gouvernement pour le dernier débat d'orientation budgétaire indique d'ailleurs que " la France devrait s'engager dans un processus de programmation pluriannuelle, à l'instar de ses partenaires, afin de renforcer la cohérence de l'action publique " (15).

·   La question de l'affectation est plus difficile à trancher et il est sans doute préférable de ne l'envisager qu'avec prudence.

On rappellera tout d'abord qu'une taxe est dite affectée quand elle est utilisée pour financer directement des activités spécifiques. A l'inverse, une taxe est non-affectée lorsque son produit est versé au budget général, ce qui n'exclut pas qu'il soit finalement utilisé pour des usages environnementaux.

En pratique, de nombreuses taxes et redevances environnementales sont, en France, affectées. C'est le cas, en particulier, des redevances des agences de l'eau, mais cette solution a également été retenue dans les domaines de l'air, des déchets ou du bruit, l'ADEME assurant la gestion des trois taxes correspondantes. Toutefois, la TIPP, qui représente 55% du total des recettes engendrées par ces taxes et redevances, n'est pas affectée.

Les avantages de l'affectation sont évidents. La taxe affectée est mieux acceptée, l'assujetti pouvant percevoir son utilité immédiate. Elle traduit souvent l'application du principe pollueur-payeur, et elle garantit la pérennité des actions qui sont financées par son intermédiaire, au-delà même des régulations budgétaires qui peuvent intervenir, le cas échéant, en cours d'exercice.

Mais l'affectation a également des inconvénients. D'un point de vue économique, elle conduit à encadrer le niveau des interventions en fonction des recettes qui peuvent être perçues, ou vice versa : dans les deux cas, l'optimum est loin d'être assuré. D'autant que le retour du produit des taxes au secteur pollueur peut accroître artificiellement le revenu de ce secteur ou annuler les effets de la taxe (16). Ceux qui acquittent une taxe affectée peuvent être enclins à la confondre avec l'acquisition d'un " droit à polluer ". Certains aspects du fonctionnement des agences de l'eau illustrent de façon éloquente ces effets pervers et les dangers potentiels de l'affectation, la revendication du juste retour pouvant conduire jusqu'à une logique de mutualisation (pollueurs-sociétaires) dont il sera question dans la seconde partie du présent rapport. De façon plus générale, on peut considérer que le financement par le budget général dans le cadre de l'application du principe d'universalité est un fondement important pour une démocratie où le pouvoir politique a la charge de procéder à des arbitrages en fonction des priorités qu'il définit.

Le principe d'affectation mériterait donc d'être " revisité ", au cas par cas. On peut penser qu'il n'était pas opportun de le retenir en ce qui concerne la taxe sur la pollution atmosphérique. En revanche, il semble adapté pour la taxe sur le bruit des aéronefs.

·   Il reste à s'interroger sur le but que doit se fixer une fiscalité environnementale.

S'il s'agit de rechercher un effet incitatif et de réduire des atteintes à l'environnement, alors, en théorie, la taxe ne doit pas être affectée, son assiette doit être étroite, ciblée sur les pollueurs, son taux élevé, de façon à être effectivement dissuasif. Son existence peut être provisoire, l'objectif poursuivi étant de réduire progressivement les émissions polluantes ou l'utilisation des produits polluants qui constituent son assiette.

S'il s'agit de dégager des ressources, alors, au contraire, l'assiette doit être large et le taux peu élevé.

Ces deux logiques ne sont pas incompatibles. La première correspond sans doute davantage à une fiscalité environnementale au sens strict, mais on peut concevoir que, dans ce domaine également, une taxe soit prélevée pour financer des actions qui sont développées par ailleurs.

Ainsi, par exemple, la taxe sur les passagers maritimes embarqués à destination d'espaces naturels n'est pas destinée à avoir une portée incitative : si elle peut contribuer à la sensibilisation du public sur la fragilité de certaines zones protégées, elle est avant tout une source de financement pour compenser des charges particulières.

Toutes ces questions doivent donc être abordées avec pragmatisme : annualité, affectation, assiette large ou étroite, taux faible ou élevé, tout dépend du but recherché. Certes, on peut penser que la bonne fiscalité écologique doit s'inscrire dans une perspective pluriannuelle, que la voie de l'affectation a sans doute été trop utilisée en France, et qu'un effet incitatif doit être privilégié. Mais l'essentiel réside dans la cohérence des instruments par rapport aux objectifs.

3.- Le principe pollueur-payeur

Le principe selon lequel le pollueur (ou l'utilisateur) doit être le payeur a également, en matière d'environnement, une valeur forte. Il semble juste et, de surcroît, efficace. En effet, si la vocation de la fiscalité environnementale est de changer des comportements et d'orienter des choix, le meilleur moyen d'y parvenir est de s'adresser directement aux pollueurs. A défaut de portée incitative, cela permet au moins de faire supporter au pollueur une partie du coût induit par son attitude ou son activité.

C'est pourquoi le principe pollueur-payeur fait souvent figure de dogme. Recommandé par l'OCDE dès les années 1970, il s'est imposé au niveau communautaire : l'article 130 R du traité instituant la Communauté européenne stipule que la politique de la Communauté dans le domaine de l'environnement est fondée " sur les principes de précaution et d'action préventive, sur le principe de la correction, par priorité à la source, des atteintes à l'environnement et sur le principe du pollueur-payeur ".

Dans certains pays européens, le principe pollueur-payeur a acquis une valeur juridique. En France, il figure explicitement dans l'article premier de la loi du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement. Il a par ailleurs trouvé de nombreuses applications concrètes : taxes sur les pollutions atmosphériques, sur le décollage des aéronefs, sur les déchets, sur les véhicules et les carburants, etc.

Pourtant, on constate, bien souvent, que ce principe n'est pas appliqué, voire qu'il n'est pas applicable.

Ainsi, le non-assujettissement, partiel ou total, des agriculteurs aux redevances de prélèvement et de pollution des agences de l'eau et, partant, leur non-contribution aux programmes d'amélioration et d'aménagement de la ressource, constitue une exception flagrante au principe pollueur-payeur.

De même, la prise en compte de l'ensemble des externalités négatives induites par le transport routier de marchandises conduirait sans doute, si la logique du principe pollueur-payeur était menée à son terme, à doubler voire à tripler le poids de la fiscalité qui pèse sur ce secteur d'activité, ce qui n'est pas possible, ni d'un point de vue social, ni d'un point de vue économique.

Enoncé de façon brutale, le principe pollueur-payeur paraît rigide. Les exceptions à la règle ont été et demeurent nombreuses, ne serait-ce que pour laisser aux pollueurs le temps de s'adapter et de réduire leurs nuisances ou de changer leurs comportements.

Mais surtout, ce principe ne doit pas être considéré comme une règle absolue, car il peut entrer en conflit avec d'autres objectifs tout aussi fondamentaux, notamment le principe d'équité qui veut que l'on tienne également compte de la condition sociale des assujettis.

Autrement dit, on peut se demander s'il n'est pas normal qu'un pollueur qui dispose de moyens financiers élevés paye davantage qu'un pollueur dont les revenus sont modestes, et ce même si le coût induit par les nuisances qu'ils produisent est identique.

Ce débat peut avoir des conséquences très concrètes et même influer sur le choix des instruments fiscaux à utiliser. S'agissant, par exemple, du choix entre la taxe ou la redevance d'enlèvement des ordures ménagères, il est clair que la redevance semble plus juste, car elle correspond à un service rendu et donc au principe pollueur-payeur. Elle responsabilise les ménages et les incite à réduire la quantité d'ordures qu'ils produisent. Mais la taxe sur les ordures ménagères est en grande partie calculée sur la valeur locative du bâti foncier : elle intègre donc une dimension sociale, conformément au principe d'équité.

En outre, le principe pollueur-payeur peut avoir des effets pervers, en incitant les pollueurs à dissimuler leurs déchets par exemple.

Enfin, le principe pollueur-payeur est souvent associé à l'affectation de la taxe, et celle-ci ne présente pas que des avantages (voir les agences de l'eau).

Encore une fois, le pragmatisme, la cohérence des instruments par rapport aux objectifs, et le souci d'efficacité doivent donc prévaloir. C'est à la lumière de ces orientations que l'on doit examiner les réponses que la fiscalité française propose en matière d'environnement.

4.- La réforme fiscale environnementale

Le terme d'" écotaxe " est souvent utilisé pour désigner, de façon générale, un prélèvement fiscal qui concourt ou qui est susceptible de concourir à l'amélioration de l'environnement. Cependant, cette notion recouvre des réalités diverses que l'Institut français de l'environnement, dans une étude réalisée en 1997 sur le cas de la France, portant sur les recettes perçues en 1995, a clairement distinguées (17).

Reprenant les recommandations de l'Office statistique européen (Eurostat) et de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), l'IFEN considère qu'une taxe est dite " liée à l'environnement " si son assiette a un impact négatif sur l'environnement, quelles que soient les motivations qui ont été à l'origine de sa création.

·   On distingue, en premier lieu, les taxes sur les émissions et les produits polluants, que l'on peut considérer comme les taxes environnementales au sens strict.

Elles sont assises sur une pollution, soit directement au niveau des émissions (eau, air, bruit), soit indirectement.

Dans cet ensemble, l'IFEN retient les dix taxes présentées ci-après.

TAXES SUR LES ÉMISSIONS ET LES PRODUITS POLLUANTS

(en millions de francs)

Montant perçu
en 1995

Redevance pour détérioration de la qualité de l'eau due aux usages domestiques ou assimilés de l'eau


6.021

Redevance pour détérioration de la qualité de l'eau due aux usages non domestiques de l'eau


1.018

Taxe parafiscale sur la pollution atmosphérique

119

Taxe pour atténuation des nuisances phoniques

38

Sous total des taxes environnementales sur les émissions

7.196

Taxe sur le stockage des déchets ménagers et assimilés

555

Taxe sur le traitement et l'élimination des déchets industriels spéciaux

46

Taxe parafiscale sur les huiles de base

128

Taxe sur les défrichements

31

Versement pour dépassement du plafond légal de densité

687

Participation en cas de dépassement du coefficient d'occupation des sols

254

Sous total des autres taxes environnementales au sens strict

1.701

Total des taxes environnementales au sens strict

8.897

Source : IFEN.

De 1985 à 1995, le nombre de ces taxes a doublé et le montant de leurs recettes a été multiplié par 3,6, pour atteindre près de 9 milliards de francs. Les redevances relatives à la pollution de l'eau représentent 80% de ce total, suivies par les déchets (8%), l'occupation des sols (8%), la pollution de l'air (1,4%) et le bruit (0,4%). Seules les taxes liées à l'occupation des sols ne sont pas affectées.

·   Le deuxième ensemble est constitué par les redevances environnementales, dont le montant total atteignait 27,5 milliards de francs en 1995. Ces redevances concernent trois domaines, à savoir la gestion des eaux usées (la redevance d'assainissement représente l'essentiel de cet ensemble), la gestion des déchets et la prévention contre les risques technologiques. On observera néanmoins que s'agissant de la gestion des déchets, l'IFEN ne retient pas la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, qui est pourtant le principal mode de financement de ce service. En effet, reposant sur la valeur du foncier bâti et non sur la quantité de déchets produits par les contribuables, elle n'a pas été considérée comme une redevance environnementale.

REDEVANCES ENVIRONNEMENTALES

(en millions de francs)

Montant perçu
en 1995

Redevance d'assainissement

25.050

Redevance d'enlèvement des ordures ménagères

1.359

Taxe de balayage

377

Redevance pour enlèvement des déchets des terrains spécialement aménagés (campings)


nd

Redevance spéciale pour l'enlèvement des déchets industriels et commerciaux

nd

Taxe unique pour autorisation des installations classées pour la protection de l'environnement


16

Taxe pour déclaration des installations classées pour la protection de l'environnement

0

Redevance annuelle sur les installations classées pour la protection de l'environnement


54

Redevance sur les installations nucléaires de base

613

Redevance sur les raffineries de pétrole

1

Total

27.470

Source : IFEN.

·   Les taxes sur l'énergie et les transports constituent le troisième sous-ensemble. L'énergie et les transports contribuant beaucoup à la pollution, l'OCDE recommande en effet, pour les comparaisons internationales, de prendre en compte toutes les taxes s'y rapportant. L'IFEN souligne néanmoins, avec raison, que dans leur grande majorité, ces taxes ont été instaurées pour des motifs autres que l'environnement, même si elles tendent à prendre en compte, de façon croissante, des préoccupations environnementales. On distingue :

- les taxes sur les transports (34,1 milliards de francs en 1995), dont la dimension environnementale est contestable, car elles sont basées sur la possession d'un véhicule (vignette et carte grise) et non sur son usage ;

- les taxes sur l'énergie (153 milliards de francs, dont 144 milliards de francs au titre de la TIPP, hors TVA).

Ces données doivent cependant être actualisées. Le tableau ci-après récapitule l'ensemble des taxes et des redevances que le ministère de l'économie et des finances considère comme liées à l'environnement (recettes 1996, 1997 et, le cas échéant, prévisions pour 1998).

TAXES ET REDEVANCES LIÉES À L'ENVIRONNEMENT

(en millions de francs)

Thème

Taxes et redevances

Bénéficiaires

Recette 1996

Recette 1997

Prévision 1998

Air

Taxe sur la pollution atmosphérique

ADEME

120

190

194

Bruit

Taxe sur le bruit (décollage des aéronefs de plus de deux tonnes)

ADEME

48

46

nd

Déchet

Taxe sur le stockage des déchets ménagers et assimilés

ADEME

806

863

nd

Energie/hydrocarbure

Taxe sur les huiles de base

ADEME

112

117

117

Eau

Redevance d'écrêtement des crues et prélèvements de pollution industrielle et domestique

Agence financière de bassin


11.405


10.214


nd

Energie/hydrocarbure

Redevance due par les titulaires de titres d'exploitation de mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux

CANSSM

56

51

nd

Déchet

Taxe sur les pâtes, papiers et cartons

Centre technique de l'industrie des papiers, cartons et celluloses - Association Forêt-cellulose



64



63



68

Environnement
taxes locales

Taxe foncière sur les propriétés bâties (hors TEOM)

Collectivités locales (hors part Etat)


76.859


80.927


nd

Environnement
taxes locales

Taxe foncière sur les propriétés non bâties (hors taxes annexes)

Collectivités locales (hors part Etat)


5.198


5.231


nd

Déchet

Redevance spéciale pour enlèvement des déchets de terrains spécialement aménagés

Communes

nd

nd

nd

Déchet

Taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM)

Communes

15.634

16.705

nd

Déchet

Redevance générale d'enlèvement des ordures ménagères (REOM)

Communes

1.400

1.800

nd

Déchet

Taxe de balayage

Communes

377

378

nd

Energie/électricité

Taxe locale sur l'électricité

Communes

5.093

4.958

nd

Energie/électricité

Imposition forfaitaire annuelle sur les pylônes

Communes

655

710

nd

Energie/électricité

Taxe sur l'énergie hydraulique

Communes

1,4

1,1

nd

Environnement
taxes locales

Taxe sur les véhicules publicitaires

Communes

ns

nd

nd

Environnement
taxes locales

Taxe locale d'équipement

Communes

2.053

nd

nd

Environnement
taxes locales

Taxe de séjour et taxe de séjour forfaitaire

Communes

547

nd

nd

Environnement
taxes locales

Taxe communale sur les affiches publicitaires

Communes

92

nd

nd

TAXES ET REDEVANCES LIÉES À L'ENVIRONNEMENT (SUITE)

(en millions de francs)

Thème

Taxes et redevances

Bénéficiaires

Recette 1996

Recette 1997

Prévision 1998

Environnement
taxes locales

Taxe de défrichement des surfaces en nature de bois ou forêts

Communes

33

nd

nd

Transport

Versement destiné aux transports en commun

Communes

20.560

nd

nd

Transport

Produits du versement de transport

Communes

1.108

nd

nd

Transport

Taxe sur les permis de conduire

Communes

3.503
en 1995

nd

nd

Transport

Taxe de mise en circulation et d'immatriculation des véhicules (cartes grises)

Communes

198
en 1995

nd

nd

Energie/mines

Redevance des mines

Communes

190

181

nd

Environnement
taxes locales

Taxe sur les emplacements publicitaires fixes

Communes, départements


142


nd


nd

Environnement
chasse pêche

Taxe piscicole (art. 414 du code rural)

Conseil supérieur de la pêche


257


263


nd

Transport

Taxe sur les transports pour le compte de la collectivité Corse

Corse

113

120

nd

Energie/hydrocarbure

Taxe pour le Comité professionnel des stocks stratégiques pétroliers

CPSSP

1,4

2,3

nd

Energie/électricité

Taxe locale sur l'électricité

Départements

2.600

2.536

nd

Energie/électricité

Taxe sur l'énergie hydraulique

Départements

1,4

1,2

nd

Energie/hydrocarbure

Taxe spéciale sur les carburants (DOM)

Départements

2.474

2.566

nd

Energie/mines

Redevance des mines

Départements

173

159

nd

Environnement
taxes locales

Taxe départementale des espaces naturels sensibles

Départements

471

nd

nd

Environnement
taxes locales

Taxe pour le financement des conseils d'architecture, d'urbanisme et d'environnement

Départements

225

nd

nd

Environnement
taxes locales

Taxe pour les conseils d'architecture, d'urbanisme et d'environnement

Départements

174

nd

nd

Environnement
taxes locales

Taxe additionnelle à la taxe de séjour

Départements

13

nd

nd

Transport

Taxe différentielle sur les véhicules à moteur (vignette)

Départements

13.949

nd

nd

Environnement

Redevance sur certains établissements industriels classés

DRIRE

TAXES ET REDEVANCES LIÉES À L'ENVIRONNEMENT (SUITE)

(en millions de francs)

Thème

Taxes et redevances

Bénéficiaires

Recette 1996

Recette 1997

Prévision 1998

Environnement

Taxe unique à la création d'installations classées

DRIRE

Déchet

Cotisation aux organismes agréés pour la collecte des déchets ménagers

Eco-emballages, Adelphe
Cyclamed

560

nd

nd

Environnement

Taxe spéciale d'équipement

EP de la Basse-Seine
EP de la métropole lorraine
EP du Nord-Pas-de-Calais

40
50
30

40
50
30

nd

Environnement

Contribution aux dépenses d'équipement

Etablissements publics d'aménagement


nd


nd


nd

Energie/hydrocarbure

Taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP)

Etat

148.384

150.753

nd

Energie/hydrocarbure

TVA sur les produits pétroliers et l'énergie

Etat

37.010

40.088

nd

Energie/hydrocarbure

Taxe intérieure sur le gaz naturel

Etat

823

891

nd

Energie/hydrocarbure

Redevance due par les titulaires de titres d'exploitation de mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux

Etat

83

106

nd

Energie/hydrocarbure

Prélèvement sur les entreprises de production pétrolière

Etat

47

43

nd

Energie/hydrocarbure

Autorisation de stockage souterrain de gaz combustible

Etat

5

3

nd

Energie/hydrocarbure

Autorisation de stockage souterrain d'hydrocarbures liquides ou liquéfiés

Etat

0,4

0,8

nd

Environnement

Redevances sanitaires d'abattage et de découpage

Etat

384

399

nd

Environnement

Redevances pour frais de contrôle de la production, du transport et de la distribution du gaz

Etat

2

nd

nd

Environnement

Redevances pour frais de contrôle des distributions d'énergie électrique et des concessions de force hydraulique

Etat

0,6

nd

nd

Environnement

Frais de contrôle des établissements classés pour la protection de l'environnement

Etat

0,1

nd

nd

Environnement
chasse pêche

Timbre sur les permis de chasser

Etat

97

95

nd

Transport

Taxe sur les véhicules des sociétés (TVS)

Etat

2.891

2.901

nd

Transport

Timbre de contrat de transport

Etat

510

567

nd

TAXES ET REDEVANCES LIÉES À L'ENVIRONNEMENT (SUITE)

(en millions de francs)

Thème

Taxes et redevances

Bénéficiaires

Recette 1996

Recette 1997

Prévision 1998

Transport

Taxe spéciale sur certains véhicules routiers (taxe à l'essieu)

Etat

465

474

nd

Energie/électricité

Contribution annuelle des distributeurs d'énergie électrique en basse tension

Fonds d'amortissement des charges d'électri-
fication



1.777



1.873



nd

Energie/électricité

Taxe sur les titulaires d'ouvrages hydroélectriques concédés

Fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables



772



nd



nd

Transport

Taxe sur les concessionnaires d'autoroutes

Fonds d'investissements des transports terrestres et des voies navigables



1.937



nd



nd

Transport

Taxe sur les primes d'assurance

Fonds de garantie automobile et chasse


280


180


nd

Energie/hydrocarbure

Taxe pour le fonds de soutien aux hydrocarbures

Fonds de soutien aux hydrocarbures ou assi-
milés



180



181



nd

Environnement

Taxe forestière

Fonds forestier national

276

nd

nd

Environnement
taxes locales

Taxe de défrichement des surfaces en nature de bois ou de forêts

Fonds forestier national

26

nd

nd

Eau

Redevance sur les consommations d'eau

Fond national pour le développement des ad-
ductions d'eau



475



nd



nd

Environnement

Taxe sur les bureaux en Ile-de-France

Fonds pour l'aména-
gement de la région Ile-de-France



1.593



nd



nd

Energie/hydrocarbure

Taxe perçue sur certains produits pétroliers et sur le gaz naturel

Institut français du pétrole


1.210


1.205


nd

Environnement
chasse pêche

Redevances cynégétiques

Office national de la chasse


461


465


nd

TAXES ET REDEVANCES LIÉES À L'ENVIRONNEMENT (SUITE)

(en millions de francs)

Thème

Taxes et redevances

Bénéficiaires

Recette 1996

Recette 1997

Prévision 1998

Environnement/chasse pêche

Taxe sur les locations de droits de chasse

Office national des forêts

24

24

nd

Transport

Taxe sur les passagers maritimes embarqués à destination d'espaces naturels

Parc national de port-Cros, Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres, ONF




1




5




nd

Transport

Taxe différentielle sur les véhicules à moteur (vignette)

Région Corse

48

48

nd

Transport

Taxe de mise en circulation et d'immatriculation des véhicules (cartes grises)

Régions

8.072

nd

nd

Transport

Taxe sur les permis de conduire

Régions

290

nd

nd

Energie/hydrocarbure

Taxe sur certaines huiles minérales

Taxe pour le Comité professionnel de distri-
bution des carburants



52



43



55

Eau

Taxe hydraulique (taxe sur les titulaires d'ouvrages de prise d'eau, rejet d'eau ou autres ouvrages hydrauliques destinés à prélever ou à évacuer des volumes d'eau - LF 91 - art. 124)

Voies navigables de France


528


526


nd

Source : Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

Cet " inventaire " révèle assurément une grande diversité :

- on distingue des taxes et des redevances, ces dernières étant des paiements en contrepartie d'un service rendu ;

- la majeure partie de cette fiscalité est perçue au profit des communes. Si l'on tient compte de la TIPP, l'essentiel du produit va au budget de l'Etat. Le nombre des taxes affectées, à l'ADEME en particulier, est significatif ;

- certaines taxes s'inscrivent dans une logique de financement, d'autres cherchent davantage à réduire des atteintes à l'environnement.

Mais cette diversité n'est pas en soi critiquable.

L'existence de taxes, d'une part, et de redevances, d'autre part, peut correspondre à des différences de situations voire, dans certains cas, à une volonté de privilégier soit le principe d'équité, soit le principe pollueur-payeur.

L'affectation dépend également du but recherché. La taxe sur le bruit, par exemple, a vocation à financer des aides aux riverains des aéroports.

Enfin, les motivations et, partant, la structure de cette fiscalité, peuvent varier. La fiscalité environnementale n'a pas, par définition, une vocation incitative : on peut concevoir qu'elle puise sa légitimité dans une volonté de lutter contre les pollutions, mais elle peut également combiner cette orientation avec la nécessité de dégager des recettes pour financer des actions en faveur de l'environnement, soit directement, soit au travers du budget de l'Etat. Ces deux approches sont complémentaires et c'est au cas par cas qu'il convient de privilégier l'une ou l'autre. Or, selon celle que l'on retient, l'instrument fiscal doit avoir, comme on l'a vu, une structure différente en termes de taux et d'assiette.

L'essentiel est donc ailleurs. Les questions qu'il convient de poser sont les suivantes :

- quel est l'objectif assigné à la taxe ou à la redevance ?

- l'instrument est-il conçu de façon à atteindre cet objectif ?

- n'y a-t-il pas d'autres instruments à mettre en place pour soutenir les actions entreprises ?

- certaines dispositions fiscales n'ont-elles pas, par ailleurs, des incidences négatives sur l'objectif visé et sur l'environnement en général ?

C'est sur cette base que votre Rapporteur a examiné la fiscalité française. Il ressort de cet examen qu'une réforme est aujourd'hui indispensable. Les taxes et redevances ne sont pas suffisamment incitatives, même si, encore une fois, elles n'ont pas toujours vocation à l'être : c'est particulièrement vrai en ce qui concerne la politique de l'eau, la pollution atmosphérique ou la prévention contre certains risques technologiques ou environnementaux. De plus, on observe une tendance à la superposition, voire à la sédimentation, de mesures ponctuelles, ce qui témoigne d'une insuffisance de réflexion globale. De façon générale, il apparaît que la France ne se donne pas les moyens, sur le plan fiscal, de ses objectifs environnementaux, voire, dans certains cas, que la fiscalité constitue un obstacle à leur réalisation.

Il faut aujourd'hui repenser la fiscalité française en tenant compte de cette nouvelle perspective qui s'impose de plus en plus aux pouvoirs publics : la défense de l'environnement. Cette démarche doit être guidée par un triple souci de pragmatisme, de cohérence et d'efficacité.

La réforme fiscale environnementale comprend deux volets.

Le premier conduit à envisager, au cas par cas, la création de nouvelles écotaxes, pour lutter contre des pollutions spécifiques. Il ne s'agit cependant que d'un aspect du sujet.

En effet, surtout dans le cas français, le plus important est d'identifier et de supprimer, ou de restructurer, les taxes existantes qui ont des effets préjudiciables sur l'environnement (dégradation des zones humides ou surexploitation des forêts par exemple). Le rapport de l'OCDE sur les écotaxes ne disait pas autre chose en indiquant que la réforme environnementale de la fiscalité, c'est avant tout " l'intégration du souci environnemental dans la conception des systèmes fiscaux " (18).

II.- UNE RÉFORME DE LA FISCALITÉ AU SERVICE

DE L'ENVIRONNEMENT

A.- L'AIR : LUTTER DURABLEMENT CONTRE

LA POLLUTION ATMOSPHÉRIQUE

La pollution atmosphérique est la préoccupation majeure des Français en matière d'environnement : c'est dans ce domaine qu'ils attendent en priorité une intervention de l'Etat. Son caractère diffus impose cependant de distinguer plusieurs niveaux d'intervention. L'échelle globale, ou planétaire, est nécessaire pour lutter contre le changement climatique et la destruction de la couche d'ozone stratosphérique par exemple. L'échelle régionale peut être pertinente pour traiter de problèmes tels que la pollution acide ou l'ozone troposphérique. L'échelle locale, ou urbaine, est adaptée pour les pollutions de proximité qui ont un impact direct sur l'air respiré.

L'Etat peut intervenir sur les substances responsables des pollutions de proximité : ozone, dioxyde de soufre et particules en suspension, plomb, oxydes d'azote, monoxyde de carbone, etc. Ces polluants sont émis, principalement, par les activités industrielles (sources fixes) et par les transports (sources mobiles). Il dispose de nombreux moyens d'action : non seulement la réglementation occupe ici une place importante mais, comme on l'a vu, les trois quarts des recettes des taxes liées à l'environnement proviennent de l'énergie et des transports.

Pourtant, dans ce domaine, la fiscalité ne favorise pas toujours les solutions les plus performantes. On constate même, dans certains cas, des logiques contraires à la protection de l'environnement.

1.- Une volonté de contenir la pollution atmosphérique

Depuis le début de la présente décennie, de nombreuses initiatives ont été prises pour agir sur la qualité de l'air, en particulier en milieu urbain.

·   En 1996, la pollution de l'air a figuré à l'ordre du jour du Parlement, quatre ans après l'eau, les déchets et le bruit : la loi sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie du 30 décembre 1996 s'est substituée à la loi du 2 août 1961 sur la lutte contre les pollutions atmosphériques, et a transposé en droit français la directive cadre communautaire n° 96/62/CE. Elle a accentué, en matière de surveillance et d'information, une évolution engagée par la directive 92/72 du 21 septembre 1992 relative à la pollution de l'air par l'ozone et le décret n° 96-335 du 18 avril 1996.

Son article premier fixe un objectif : " la mise en oeuvre du droit reconnu à chacun à respirer un air qui ne nuise pas à sa santé ". L'Etat et ses établissements publics, les collectivités territoriales et leurs établissements publics, ainsi que les personnes privées, doivent concourir à sa réalisation. Parmi les mesures mises en oeuvre, on retiendra notamment :

- l'extension à tout le territoire d'un dispositif de surveillance de la qualité de l'air et de ses effets sur la santé et l'environnement, au 1er janvier 1997 dans les agglomérations de plus de 250.000 habitants, au 1er janvier 1998 dans les agglomérations de 100.000 à 250.000 habitants, et au 1er janvier 2000 dans l'ensemble du territoire (article 3) ;

- la reconnaissance d'un droit à l'information sur la qualité de l'air et ses effets sur la santé et l'environnement (article 4) ;

- la mise en place de plans régionaux pour la qualité de l'air (titre II) (19) ;

- la mise en place de plans de protection de l'atmosphère pour les agglomérations de plus de 250.000 habitants ainsi que dans les zones où les valeurs limites (niveau maximal de concentration de substances polluantes dans l'atmosphère - dioxyde d'azote et ozone - fixé sur la base des connaissances scientifiques) sont dépassées ou risquent de l'être (titre III) ;

- la mise en place de plans de déplacements urbains, destinés à définir et à coordonner l'organisation des différents modes de transport. La diminution du trafic automobile et le développement des transports collectifs, de l'usage de la bicyclette, de la marche à pied et du covoiturage, constituent les principales orientations (titre V) ;

- des mesures d'urgence lorsque les seuils d'alerte sont atteints ou risquent de l'être, qui peuvent aller jusqu'à la restriction ou la suspension des activités concourant aux pointes de pollution, y compris la circulation des véhicules. En cas de restriction de la circulation des véhicules, les transports en commun sont gratuits (titre IV).

La loi sur l'air a donc cherché à contenir la pollution atmosphérique due aux industriels d'une part, et au secteur des transports d'autre part. Dans ces deux domaines, la fiscalité est un bon instrument.

·   S'agissant des industriels, le principal instrument est la taxe parafiscale sur la pollution atmosphérique, créée par le décret n° 85-582 du 7 juin 1985. Assise sur la quantité de polluants émise au cours de l'année précédant celle de son recouvrement, elle est désormais perçue au profit de l'ADEME. Reconduite pour cinq ans en 1990, elle a été de nouveau prolongée et surtout remaniée par le décret n° 95-515 du 3 mai 1995, qui a élargi son assiette aux composés organiques volatils et a augmenté son taux, pour tous les polluants taxés, de 150 francs à 180 francs la tonne (20). La nouvelle taxe est entrée en vigueur en 1996.

Les assujettis à la taxe sont :

- les exploitants d'une installation de combustion d'une puissance totale supérieure à 20 MW thermiques ;

- les exploitants d'une unité d'incinération d'ordures ménagères (UIOM) de plus de 3 tonnes/heure (21) ;

- les exploitants d'une installation classée soumise à autorisation émettant plus de 150 tonnes par an soit de composés soufrés, d'oxydes d'azote, d'acide chlorhydrique, d'hydrocarbures non méthaniques ou de solvants et autres composés organiques volatils.

Tout assujetti peut déduire de la taxe les cotisations ou dons versés au profit d'une association de gestion des réseaux de mesure de la pollution atmosphérique (dans la limite de 25% de la taxe due si celle-ci est supérieure à 2 millions de francs et de 500.000 francs dans le cas contraire). Le produit de la taxe est affecté à la lutte contre la pollution atmosphérique. Il contribue au financement de la surveillance de la qualité de l'air et permet, surtout, sur décision d'un comité de gestion auquel participent les industriels assujettis à la taxe, présidé par le ministre de l'environnement et dont le secrétariat est assuré par l'ADEME, d'accorder des aides, sous forme de subventions :

- pour des projets de développement et de mise au point de techniques de prévention, de réduction ou de mesure des pollutions atmosphériques : l'aide est modulable en fonction du caractère innovateur du projet et peut représenter jusqu'à 40% de son coût ;

- pour des projets d'équipement visant à prévenir ou à réduire les pollutions atmosphériques : l'aide est fonction du caractère innovant ou de l'effort supplémentaire réalisé par rapport aux réglementations françaises ou européennes. Les aides à l'équipement, qui doivent représenter au moins 60% du montant brut de la taxe, sont réservées aux exploitants d'installations assujettis à la taxe parafiscale.

Cette taxe touche 1.454 installations, ce qui montre qu'elle ne s'applique qu'aux gros équipements de combustion (22). Son produit s'est élevé à 146 millions de francs en 1996 et à 187 millions de francs en 1997. Pour 1998, le produit brut devrait être de 235 millions de francs, et le produit net de 198 millions de francs, la différence correspondant aux cotisations versées aux réseaux de surveillance (- 48 millions de francs) et à des produits financiers (+ 11 millions de francs).

La nécessité de dégager des moyens supplémentaires pour financer l'équipement des réseaux de surveillance de la qualité de l'air, qui a pris du retard par rapport au calendrier fixé par la loi du 30 décembre 1996 en raison d'une insuffisance des crédits, a conduit à envisager une nouvelle majoration du tarif de la taxe.

Depuis le 1er janvier 1998, en application de l'arrêté du 8 décembre 1997, ce tarif est fixé comme suit :

- composés soufrés (SOx, H2S, exprimés en équivalent SO2) : 180 francs la tonne ;

- oxydes d'azote (NOx, N2O, exprimés en équivalent NO2) : 250 francs la tonne ;

- acide chlorhydrique (HCl) : 180 francs la tonne ;

- hydrocarbures non méthaniques (COV) : 250 francs la tonne.

Le tarif applicable aux poussières est resté fixé à zéro franc.

Cette augmentation devrait permettre de dégager une quarantaine de millions de francs supplémentaires à compter de 1999.

Le régime de cette taxe doit être réexaminé. Une plus grande différenciation des taux en fonction de la nocivité des pollutions émises serait souhaitable. Par ailleurs, tout en restant dans des limites économiquement supportables, leur niveau pourrait être revalorisé de façon substantielle. L'assiette pourrait être élargie et certaines poussières effectivement taxées. Enfin, le choix de la parafiscalité, le principe de l'affectation, la gestion par l'ADEME et la règle du " retour financier " vers les secteurs contributeurs, ne sont pas pertinents. En définitive, la taxe sur la pollution atmosphérique doit être perçue au profit du budget de l'Etat et devenir un instrument véritablement incitatif, qui, tout en respectant la liberté des acteurs économiques, exerce une influence forte sur les comportements, de façon à agir durablement sur la qualité de l'air.

Il convient également de régler le contentieux qui oppose, depuis 1990, l'Union des industries chimiques (UIC) et l'ADEME. L'article 3 du décret du 11 mai 1990, qui prévoit que le fait générateur de la taxe est l'émission dans l'atmosphère d'un polluant, renvoie à une annexe la liste de ces polluants. Dans cette liste figurent l'oxyde d'azote et " les autres composants azotés ", catégorie à laquelle appartient le protoxyde d'azote (N2O). Depuis 1991, l'UIC incite ses adhérents à ne pas payer la taxe sur les émissions de N2O au motif qu'il ne s'agit pas d'un polluant au sens de la loi du 2 août 1961 précitée. Deux arrêts récents de la Cour administrative d'appel de Paris viennent de lui donner raison (23). Dès lors, une modification des décrets de 1990 et de 1995, ainsi qu'une mesure de validation législative, semblent souhaitables et urgentes. Les sommes dues sont en effet importantes : près de 70 millions de francs sur six ans. Surtout, quels que soient les arguments juridiques, il est établi que le protoxyde d'azote a des effets sur la santé et la qualité de l'environnement en participant à la hausse de la concentration dans l'atmosphère des gaz à effet de serre, ce qui légitime son assujettissement à la taxe (24).

graphique
  1. Proposition : Faire de la taxe sur la pollution atmosphérique un instrument véritablement incitatif, au moyen, le cas échéant, d'une forte revalorisation des taux, ainsi que d'une plus grande différenciation selon la nocivité des pollutions atmosphériques, d'un élargissement de l'assiette et d'une remise en cause du régime de la parafiscalité, du principe de l'affectation, de la gestion par l'ADEME et de la règle du " retour financier " vers les secteurs contributeurs. Valider législativement la taxation du protoxyde d'azote (N2O) en tant que polluant au sens de la loi du 2 août 1961 et modifier en conséquence les décrets du 11 mai 1990 et du 3 mai 1995.

·   Néanmoins, la voiture particulière est la cause principale de la pollution de l'air des agglomérations.

Dans une étude de février 1994, l'IFEN montrait que depuis le début des années 1980, les émissions des principaux polluants de l'air ont diminué. Mais cette évolution témoigne des efforts de l'industrie et du secteur résidentiel, car dans le même temps, la part des émissions polluantes dues au transport s'est fortement accrue : +23% pour le dioxyde de soufre, +27% pour l'oxyde d'azote, +90% pour les poussières. En outre, le transport est à l'origine de 90% des émissions de plomb, mais aussi du tiers des émissions de dioxyde de carbone (gaz carbonique) (25). L'utilisation du pot catalytique et de l'essence sans plomb n'ont pas suffi pour réduire ces pollutions, le nombre de véhicules circulant en agglomération ne cessant de croître. En outre, même si les moteurs sont désormais conçus pour consommer moins de carburants, ce progrès est contrarié par l'utilisation croissante de l'automobile sur de petits parcours en sites urbains (26).

Les engagements pris par l'Union européenne dans la convention de Kyoto (réduction de 8% d'ici 2008-2012 des émissions de CO2 et de cinq autres gaz dangereux qui sont à l'origine du réchauffement de la planète) impliquent une modification radicale des habitudes en la matière. Ceci sera particulièrement vrai pour la France : la place importante du nucléaire, qui n'est pas source de pollution en matière de CO2, lui imposera d'agir en priorité sur les transports pour stabiliser ses émissions de gaz à effet de serre (objectif fixé par le Conseil environnement du 17 juin 1998).

·   La mise en oeuvre, le 1er octobre 1997, de la première mesure de limitation de la circulation dans l'agglomération parisienne, a eu un impact important sur l'opinion publique.

·   L'annonce, le 11 février dernier, de l'entrée en vigueur, le 1er août 1998, de la " pastille verte ", est également importante. Celle-ci devrait être attribuée à environ un tiers du parc automobile français, à savoir les voitures équipées d'un pot catalytique (obligatoire depuis le 1er janvier 1993 pour les véhicules à essence, mais depuis le 1er janvier 1997 seulement pour les véhicules diesel), ainsi que les véhicules propres (GPL, GNV, électricité). La détention de cette vignette permettra au propriétaire du véhicule de circuler en cas de très forte pollution. Toutefois, le principe de la circulation alternée lors des pics de pollution de niveau 3 est maintenu : dans ces situations, seront donc autorisées à circuler les voitures dotées de la pastille verte mais également celles emportant au moins trois passagers, ainsi que la moitié du reste du parc automobile.

·   Votre Rapporteur tient également à saluer une initiative prise récemment par la Société des a1utoroutes Paris-Normandie (SAPN), en concertation avec le ministère des transports : la gratuité du péage est accordée sur l'autoroute A14, les jours ouvrés non fériés de 6 heures à 21 heures, dans la limite d'un aller-retour quotidien, aux véhicules légers abritant trois personnes au moins, dans le cadre de déplacements domicile-travail. A l'heure actuelle, la SAPN a délivré environ 800 cartes magnétiques de covoiturage et la fréquentation journalière est de l'ordre de 150 véhicules. Cette formule s'inscrit parfaitement dans le sens des objectifs consacrés par la loi du 30 décembre 1996.

De même, certaines entreprises ont mis en place des incitations destinées à promouvoir le covoiturage auprès de leurs employés (27).

Ces initiatives mériteraient d'être encouragées.

·   De très nombreuses mesures fiscales ont été adoptées, au cours de la période récente, pour favoriser le développement des carburants et des véhicules propres.

Le premier axe porte sur une politique de moindre taxation de l'essence sans plomb : le différentiel est de l'ordre de 30 centimes par litre par rapport au supercarburant plombé, ce qui fait plus que compenser le surcoût à la production de ce carburant (10 centimes par litre environ). Ce prix incitatif, ainsi que la généralisation progressive des pots catalytiques, qui sont incompatibles avec l'essence plombée, expliquent la progression du supercarburant sans plomb (de 41% des ventes d'essence en 1993 à 56% en 1996) et la diminution des émissions de plomb particulaire en zone urbaine.

Par ailleurs, l'article 20 de la loi de finances pour 1996 a baissé, de un franc par litre environ, le taux de la TIPP applicable au GPL et au GNV, qui est passé de 245,67 francs à 74,34 francs pour 100 kg.

La loi sur l'air du 30 décembre 1996 a également prévu des mesures favorables, en théorie, au développement des carburants propres :

- obligation pour l'Etat, les établissements publics et les collectivités territoriales, de transformer au moins 20% de leurs flottes de véhicules de moins de 3,5 tonnes, dans un délai de deux ans, en véhicules propres (électricité, GPL, GNV) (article 24-III) ;

- obligation pour l'Etat, les établissements publics et les collectivités territoriales, d'utiliser, dans certains périmètres urbains, des véhicules fonctionnant au moyen de carburants dont le taux minimum d'oxygène a été relevé (article 24-III). L'article 21-III prévoit également qu'au 1er janvier 2000, le gazole, l'essence et les supercarburants de façon générale devront comporter un taux minimal d'oxygène ;

- remboursement de la TIPP/TICGN, pour les véhicules fonctionnant au GPL/GNV, dans la limite de 12.000 litres par véhicule et par an pour les exploitants de réseaux de transport public en commun de voyageurs, et de 6.500 litres par an pour les taxis (article 26) ;

- remboursement du coût des équipements permettant de réduire les émissions polluantes, pour les exploitants de réseaux de transport public en commun de voyageurs, à hauteur de la moitié du prix d'acquisition et dans la limite de 8.000 francs par véhicule de transport en commun (article 27) ;

- exonération totale de la taxe sur les véhicules de société pour les véhicules fonctionnant à l'électricité, au GPL et au GNV, et à hauteur d'un quart pour les véhicules qui fonctionnent alternativement au supercarburant et au GPL (article 28) ;

- amortissement exceptionnel, sur douze mois, des véhicules de société fonctionnant exclusivement au GNV ou au GPL, ainsi que des accumulateurs et des équipements spécifiques nécessaires aux véhicules utilisant l'énergie électrique, le GNV ou le GPL (article 29).

L'article 15 de la loi de finances pour 1998 :

- a supprimé la déductibilité, jusqu'alors autorisée à hauteur de 50%, de la TVA ayant grevé la consommation de gazole pour les véhicules des entreprises ;

- a autorisé une déduction totale de la TVA afférente à la consommation de GPL, de GNV et d'électricité pour ces mêmes véhicules.

L'article 16 de la loi de finances pour 1998 a de nouveau réduit, de 8% environ, le taux de la TIPP applicable au GPL et au GNV, qui est désormais fixé à 70 francs pour 100 kg.

L'article 98 de la loi de finances pour 1998 a autorisé les conseils généraux à exonérer de vignette tous les véhicules fonctionnant au moyen de l'énergie électrique, du GNV ou du GPL.

L'article 62 de la loi adoptée définitivement par l'Assemblée nationale le 3 juin 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier a réformé le mode de calcul de la puissance administrative des véhicules particuliers, qui détermine leur puissance fiscale et donc le tarif de la vignette, de la carte grise et de la taxe sur les véhicules des sociétés. La nouvelle formule intègre les émissions de dioxyde de carbone (CO2), afin de participer à la lutte contre l'effet de serre. Pour les véhicules qui fonctionnent alternativement au moyen de supercarburants et de GPL, le calcul se fait sur la base d'un fonctionnement au GPL.

Comme on le verra, la portée de ces initiatives est en réalité très inégale. Néanmoins, certaines ont eu des effets favorables. Ainsi, le nombre des stations qui délivrent du GPL, qui était tombé à 600 environ en 1995, est remonté à un millier aujourd'hui. Quant au GPL lui-même, les ventes sont en forte progression : 21.174 tonnes en 1995, 36.413 tonnes en 1996 et près de 85.000 tonnes en 1997.

MISES À LA CONSOMMATION DE GPL-CARBURANT

(en tonnes)

Janv.

Fév.

Mars

Avril

Mai

Juin

Juil.

Août

Sept.

Oct.

Nov.

Déc.

Cumul

1995

1.470

1.079

1.448

1.358

1.623

2.080

3.114

3.425

1.855

1.569

1.234

920

21.174

1996

1.578

1.316

1.833

1.869

2.778

2.637

5.447

4.268

3.721

3.774

2.962

4.232

36.413

1997

4.182

4.238

5.164

6.191

6.157

6.554

10.096

8.903

8.353

7.830

7.200

9.693

84.561


Source : Direction générale des douanes et droits indirects.

2.- La fiscalité contre la qualité de l'air

Les mesures précitées vont dans le sens d'une meilleure protection de la qualité de l'air. De ce point de vue, elles méritent d'être saluées. Malheureusement, leur portée est amoindrie par un certain nombre de contradictions et d'incohérences.

·   Il convient de souligner, en premier lieu, que contrairement à ce qui est souvent affirmé, le transport routier de marchandises et l'automobile ne sont pas des secteurs surtaxés.

Incontestablement, les taxes assises sur les transports constituent une source de recettes très importante. On distingue généralement :

- les taxes liées à l'acquisition d'un véhicule : TVA et taxe sur les cartes grises ;

- les taxes liées à la possession d'un véhicule : vignette, taxe sur les véhicules des sociétés, taxe à l'essieu, taxe sur les assurances automobiles ;

- les taxes liées à l'usage des véhicules : taxe sur les permis de conduire et surtout taxe intérieure sur les produits pétroliers.

Notre collègue M. Gérard Fuchs, dans son rapport sur l'automobile, évaluait le total des recettes fiscales liées à l'automobile à 284,9 milliards de francs en 1996. En 1997, ce produit serait supérieur à 300 milliards de francs. L'usage de l'automobile génère également des recettes non fiscales liées, en particulier, aux péages d'autoroutes et au stationnement payant. De plus, les chiffres précités ne prennent en compte ni les ventes de poids lourds, ni les ventes de véhicules d'occasion, ni les ventes de pièces et d'équipements automobiles (28). Par ailleurs, l'article 31 de la loi de finances pour 1998 a revalorisé le tarif de la taxe sur les véhicules des sociétés. L'article 87 de la loi précitée portant diverses dispositions d'ordre économique et financier a relevé celui de la taxe à l'essieu et a étendu son champ aux 12-16 tonnes, en remplacement il est vrai de la vignette.

Néanmoins, plusieurs travaux ont été réalisés pour comparer ce que coûte la route à la société (coûts d'infrastructure ou de congestion, coûts d'insécurité, coûts d'environnement local -bruit et pollution des villes notamment- et global -effet de serre-) et ce qu'elle rapporte à travers la fiscalité supportée par ses usagers.

La prise en compte des coûts externes est parfaitement légitime car à défaut, comme l'indique le récent rapport d'évaluation de la politique française de maîtrise de l'énergie, " le volume des transports augmente au-delà de leur utilité économique et sociale réelle. Une sous-tarification des transports a des effets importants sur la consommation de carburant et sur l'usage des transports publics " (29).

Un groupe de travail du Commissariat général du Plan sur le choix des investissements, présidé par M. Marcel Boiteux, soulignait que " même si les évaluations actuellement disponibles sont assez grossières, il convient de les intégrer au plus tôt au calcul économique classique, car ne procéder à aucune évaluation monétaire laisserait la place à l'arbitraire et à la subjectivité, ou reviendrait à compter pour zéro les conséquences sur l'environnement " (30).

On regrettera d'autant plus que certains travaux n'aient pas été publiés, en pensant notamment au rapport dit " rapport Brossier ", du Conseil général des ponts-et-chaussées. Ses conclusions sont néanmoins reprises dans le rapport précité sur l'évaluation de la politique française de maîtrise de l'énergie (pages 193-194). Le trafic des automobiles à essence en dehors des zones urbaines semble sur-tarifé, particulièrement sur autoroute. En revanche, trois segments sont fortement sous-tarifés : l'ensemble des trafics urbains, les automobiles à moteur diesel que ce soit à l'intérieur ou à l'extérieur des zones urbaines, ainsi que le transport routier de marchandises en général. L'étude que l'OCDE a consacrée, en 1994, au cas de la France, parvenait aux mêmes conclusions (31). Dans le cas des transports routiers de marchandises, l'équilibre des coûts et des recettes exigerait un doublement de la taxe sur le gazole ; la mobilité urbaine impliquerait une majoration plus forte encore.

Ce constat ne doit pas conduire à négliger l'importance des transports et de la mobilité. Le transport routier assure 70% du trafic de marchandises en Europe : il est un facteur incontournable de l'économie française, même s'il est nécessaire, comme le souligne le ministère des transports, de réorienter progressivement les transports à travers un développement de l'intermodalité et une amélioration de l'efficacité du mode ferroviaire (32) : ce souhait est d'ailleurs partagé par votre Rapporteur et les exercices budgétaires à venir devront intégrer cette priorité. L'automobiliste, quant à lui, est parfois contraint d'utiliser son véhicule : la décroissance du prix des terrains quand on s'éloigne du centre des villes favorise un urbanisme diffus et parfois un déplacement de certaines activités vers des zones qui ne sont pas toujours desservies par les transports en commun (33). De plus, il existe une forte aspiration à la mobilité, synonyme d'indépendance et de progrès, qui doit être respectée.

Dès lors, le subventionnement de la mobilité n'est pas condamnable en soi. En revanche, il est important que les modalités de cette subvention favorisent le développement des solutions les plus performantes, en particulier au regard de l'environnement. Ce n'est pas le cas.

·   On observe, à cet égard, que les mesures fiscales prises ces dernières années pour les carburants et les véhicules propres ne sont pas à l'abri d'un certain nombre d'incohérences.

De façon générale, on peut s'interroger sur l'efficacité d'une politique qui repose sur une succession de mesures dans le temps : concentrées sur un seul texte, leur impact aurait sans doute été beaucoup plus fort.

En outre, le " message " adressé par les pouvoirs publics a été brouillé par certaines décisions récentes. Ainsi, en 1994 et en 1995, les plus fortes augmentations de la TIPP ont porté sur le supercarburant sans plomb, alors qu'à l'inverse le gazole a bénéficié d'un traitement privilégié qui a encore accru l'écart de taxation en sa faveur :

- le 11 janvier 1994 : +8,16 centimes pour le gazole, contre +11,38 centimes pour le supercarburant sans plomb ;

- le 11 janvier 1995 : +27,73 centimes pour le supercarburant sans plomb, contre +20,51 centimes pour le supercarburant plombé et à peine +3,57 centimes pour le gazole.

Par ailleurs, les mesures précitées, notamment celles prévues par la loi sur l'air du 30 décembre 1996, n'ont pas toujours été efficaces. On retiendra à cet égard quelques exemples significatifs :

- l'abattement sur la taxe sur les véhicules de sociétés a été limité à 25% pour les véhicules fonctionnant alternativement au supercarburant et au GPL, ce qui n'est pas suffisamment incitatif ;

- le quota annuel de 6.500 litres de GPL/GNV défiscalisé pour les taxis n'est pas attractif dès lors qu'ils disposent par ailleurs de 5.000 litres de gazole défiscalisé : le gazole reste moins cher et les 5.000 litres semblent largement suffisants pour la majeure partie d'entre eux ;

- l'affirmation d'une volonté de développer les transports en commun est louable, mais elle ne s'accompagne pas des financements nécessaires à sa concrétisation. Il s'agit pourtant d'une condition pour que l'usage de la voiture particulière recule effectivement.

Au demeurant, de nombreuses dispositions de la loi sur l'air sont privées d'effet par l'absence de décrets d'application. C'est le cas, par exemple, des articles 21-III et 24-III relatifs au taux d'oxygène dans les carburants, qui visaient à favoriser la filière des biocarburants en général et du diester en particulier.

·   Enfin, la fiscalité française sur les transports routiers n'est pas toujours de nature à favoriser le développement des solutions les plus performantes pour la protection de l'environnement, bien au contraire. Trois exemples, d'inégale importance, méritent d'être cités.

On observera tout d'abord que la TVA est perçue, sur les moyens de transport, au taux normal de 20,6%, indépendamment de la nature ou de la consommation des véhicules, ce qui ne permet pas de stimuler et d'orienter le renouvellement du parc, alors même que les véhicules récents sont moins polluants.

Par ailleurs, les tarifs de la vignette, de la carte grise et de la taxe sur les véhicules des sociétés comportent des abattements qui favorisent la détention de véhicules anciens et donc plus polluants.

Mais le débat principal porte, bien sûr, sur les avantages fiscaux accordés au gazole par rapport à l'essence.

Ainsi, l'article 265 sexies du code des douanes dispose que " le taux de la TIPP perçue sur les carburants utilisés par les chauffeurs de taxi est réduit de 100% dans la limite de 5.000 litres par an pour chaque véhicule ".

Jusqu'à la loi de finances pour 1998, la TVA ayant grevé la consommation de produits pétroliers n'était déductible qu'en ce qui concerne le gazole.

Jusqu'à la loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier adoptée définitivement par l'Assemblée nationale le 3 juin 1998, la puissance administrative des véhicules, qui sert de base aux tarifs de la taxe sur les véhicules de société, de la vignette et de la carte grise, comportait un avantage spécifique pour les moteurs diesels (abattement de 30%), ce qui conduisait à une diminution sensible de leur puissance fiscale par rapport aux moteurs à essence de même cylindrée.

Mais le débat principal porte sur la TIPP. Son tarif est actuellement de 384,23 francs par hectolitre pour le supercarburant sans plomb, et de 240,79 francs pour le gazole. Comme le montre le tableau présenté ci-après, cette différence, de 1,43 franc par litre, est l'une des plus élevées d'Europe.

ECART DE LA TIPP ENTRE LE SUPERCARBURANT
ET LE GAZOLE
(février 1998)

PAYS

Écart sans plomb/gazole

FINLANDE

1,67

PAYS-BAS

1,54

FRANCE

1,43

BELGIQUE

1,42

PORTUGAL

1,33

ALLEMAGNE

1,20

SUÈDE

0,96

DANEMARK

0,95

ITALIE

0,93

AUTRICHE

0,82

GRÈCE

0,67

ESPAGNE

0,66

LUXEMBOURG

0,62

IRLANDE

0,33

ROYAUME-UNI

0

MOYENNE UNION EUROPÉENNE

0,97

Source : Direction générale des douanes et des droits indirects.

Cet avantage fiscal est à l'origine d'une diésélisation accélérée du parc automobile français.

·   Au 1er janvier 1998, la part du diesel dans l'ensemble du parc automobile français a atteint 38,1%.

ÉVOLUTION DE LA PART DU DIESEL
DANS LE PARC AUTOMOBILE FRANÇAIS

(en %, au 1er janvier de chaque année)

1980

1985

1990

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

8,4

12,5

20,4

25

27,6

30,1

32,8

35

36,6

38,1

Source : Ministère de l'équipement, des transports et du logement.

Le tableau ci-après présente la répartition des véhicules diesel.

PART DU DIESEL DANS LE PARC AUTOMOBILE FRANÇAIS
(au 1er janvier 1998)

Nombre total de véhicules
(en milliers)

Nombre de véhicules diesel
(en milliers)

Part du diesel
(en %)

Voiture particulières

25.930

7.983

30,8

Véhicules utilitaires légers

4.720

3.306

70,0

Véhicules industriels

617

617

100,0

Total

31.267

11.906

38,1

Source : Ministère de l'équipement, des transports et du logement.

Cette diésélisation est donc forte et régulière. Elle touche tous les segments du marché. Les véhicules lourds (plus de 5 tonnes) ont toujours été intégralement diésélisés. La motorisation diesel progresse fortement dans la catégorie des véhicules légers (moins de 5 tonnes). Cette évolution est particulièrement marquée dans la catégorie des petits utilitaires (moins de 2,5 tonnes).

PARC DE VÉHICULES UTILITAIRES LÉGERS DE MOINS DE 2,5 TONNES

1970

1980

1990

1995

1998

Millions de véhicules

0,9

1,4

3,1

3,3

3,4

Part diesel

4,5 %

8,9 %

35,7 %

54,8 %

61,1 %

Source : Ministère de l'équipement, des transports et du logement.

La France est un des pays d'Europe où le taux de diésélisation est le plus élevé dans les nouvelles immatriculations.

ÉVOLUTION DE LA PART DU DIESEL EN EUROPE EN % DES IMMATRICULATIONS DE VOITURES PARTICULIÈRES NEUVES

1986

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

France

15,7

33

38,4

39

45,5

47,6

46,5

39,2

41,8

Allemagne

27,1

9,8

11,8

14,8

14,6

16,6

14,5

15,0

14,9

Italie

24,7

7,8

6,1

7,8

8,7

9,1

9,5

16,3

17,5

Royaume-Uni

4,1

6,4

8,7

12,5

19

23

20,2

17,8

16,1

Espagne

15,1

14,2

12,8

16,6

23,2

27,5

33,6

37,5

42,2

Europe (17 pays)

16,9

13,9

14,7

17,1

20

22,6

22

22,3

22,3

Source : Comité des constructeurs français d'automobiles.

Bien sûr, cette évolution se répercute sur la consommation des différents carburants routiers. Depuis 1984, la consommation de gazole a doublé et cette croissance ne s'est pas démentie sur une période plus récente.

ÉVOLUTION DES CONSOMMATIONS DE CARBURANTS

(en millions d'hectolitres)

Produits

1993

1994

1995

1996

1997

1998 (1)

Super plombé

133,8

120,5

102,3

87,3

75,2

63,8

Super sans plomb

90,4

100,9

103,2

111,0

117,6

124,6

Total supers

224,2

221,4

205,5

198,3

192,8

188,4

Gazole

240,2

258,2

267,2

273,4

281,3

292

Total carburants

464,4

479,6

472,7

471,7

474,1

480,4

(1) Prévisions

Source : Direction générale des douanes et des droits indirects.

Dès lors, on est en droit de se demander si cet écart de taxation au profit du diesel a une justification. Il est en réalité préjudiciable, pour des raisons environnementales, industrielles et budgétaires.

Au total, on aboutit à un double constat. La fiscalité ne favorise pas le renouvellement du parc automobile et subventionne les véhicules anciens qui sont pourtant plus polluants. Elle encourage, sans aucune justification, le diesel, au détriment de l'essence.

Le paradoxe est complet. Il est temps, désormais, que les questions environnementales conditionnent les choix en matière de développement des moyens de transports, que des financements spécifiques soient prévus et que la fiscalité soit adaptée à ce nouvel impératif. Le problème n'est plus de s'attaquer aux conséquences de la pollution atmosphérique, comme l'a fait la loi sur l'air, notamment, ou de mettre en place une circulation alternée quelques jours par an, mais de concevoir une politique plus ambitieuse qui garantisse une diminution durable de la pollution atmosphérique et qui permette à la France de respecter ses engagements internationaux.

3.- Conforter le droit de chacun à respirer

un air non pollué

La nécessité d'une régulation publique pour lutter contre la pollution atmosphérique et l'efficacité, dans ce domaine, de l'usage de l'instrument fiscal pour favoriser les choix les plus efficients, ne font aucun doute. D'ailleurs, les engagements pris par la France, que ce soit sur le soufre, avec la convention d'Oslo en 1994, ou en matière de changement climatique, à Kyoto en 1997 et lors du Conseil environnement du 17 juin 1998, imposent une action énergique.

De ce point de vue, une fiscalité environnementale doit favoriser toutes les sources d'énergie susceptibles de contribuer à la lutte contre l'effet de serre. Le bois de chauffage répond à ce critère. De fait, ce combustible bénéficie du taux réduit de la TVA (article 278 bis, bis, du code général des impôts), mais sous réserve qu'il soit destiné à un usage domestique. Cette limite a fait l'objet de nombreuses controverses au sein des deux assemblées parlementaires (34) et une instruction administrative du 31 mars 1998 à finalement défini l'usage domestique de façon extensive (35) : est considéré comme destiné à usage domestique le bois utilisé pour le chauffage de locaux à usage total ou principal d'habitation ou de locaux affectés à un usage collectif autre que professionnel, commercial, ou industriel. La notion de locaux à usage d'habitation comprend non seulement les maisons individuelles et les immeubles collectifs d'habitation, mais également les locaux qui servent à l'hébergement ou à l'accueil de personnes, même à titre temporaire. Sont par exemple concernés les maisons de retraite, les hôpitaux, les cliniques, les résidences universitaires, les foyers de travailleurs, les résidences de vacances, les hôtels. Par ailleurs, sont considérés comme locaux à usage collectif les bâtiments publics, les locaux abritant des établissements d'enseignement et les piscines. 

Si cette définition constitue un progrès, il reste que le taux réduit ne s'applique pas au bois livré à une entreprise qui l'utilise pour produire et revendre de la chaleur, notamment pour le chauffage de locaux à usage d'habitation : sont visées les livraisons de bois de chauffage à un exploitant de chauffage, et les livraisons de bois aux exploitants de réseaux de chaleur. L'instruction précise en effet que " dans ces deux situations, les entreprises ne destinent pas le bois de chauffage qu'elles achètent à des fins de chauffage domestique, mais le brûlent en vue de produire et de vendre de l'énergie calorifique ". Dès lors, cette activité (vente de chaleur, et non de bois) doit être soumise au taux normal, en application de la directive communautaire 92/77 du 19 octobre 1992. Pourtant, cette extension serait utile pour le développement de la filière bois-énergie : la référence à l'usage domestique et l'exclusion des réseaux de chaleur devraient être supprimées. Il est paradoxal que le droit communautaire s'oppose à des évolutions susceptibles de contribuer à la lutte contre l'effet de serre. Si tel est le cas, le Gouvernement français doit _uvrer pour un ajustement de la législation.

De même, il conviendrait de reconsidérer l'exonération de TIPP dont bénéficie le kérosène consommé par les avions, qui est également très polluant : de nouveau, le droit communautaire fait obstacle à cette évolution, ce qu'on ne peut que regretter (36).

Il est clair, néanmoins, que l'essentiel des efforts de la France devra porter sur les transports terrestres, domaine dans lequel, comme on l'a vu, la consommation d'énergie fossile, qui est à l'origine de l'augmentation de la concentration de l'atmosphère en gaz à effet de serre, continue de progresser. Ici, la législation communautaire jouera un rôle déterminant. Il conviendra, en particulier, de suivre avec attention l'évolution des deux projets de directives sur les normes applicables aux carburants et aux rejets des moteurs (objectif de réduction des concentrations de polluants dans l'air en milieu urbain de 60% à 70% d'ici 2010), qui ont été élaborés, en 1996, par la Commission européenne, sur la base des conclusions du programme Auto-oil. La position retenue par le Conseil environnement de juin 1997 a été fortement durcie, en février 1998, par le Parlement européen, qui a décidé, s'agissant des carburants, de renforcer les spécifications prévues pour l'an 2000 et de fixer dès à présent des normes rigoureuses pour 2005, notamment en ce qui concerne les taux de soufre, et en particulier pour le gazole. Ces projets sont actuellement en phase de conciliation Parlement-Conseil-Commission. Les observations des professionnels sur le coût de cette évolution (12 milliards d'euros pour le texte initial de la Commission, 20 milliards d'euros pour le texte de compromis proposé par le Conseil, 50 milliards d'euros, semble-t-il, pour le texte du Parlement européen) devront être prises en considération, mais en tout état de cause, l'action sur la qualité des carburants est essentielle, même s'il s'agit d'une solution de moyen terme.

Au plan national également, les recommandations ne manquent pas, au point que certains préconisent parfois l'interdiction pure et simple de l'automobile en milieu urbain. D'autres, comme M. Yves Martin, président de la section technique du Conseil général des mines au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, recommandent la mise en place d'un péage urbain, qui pourrait financer un fort développement des transports collectifs. Cette approche relève de la même logique que celle ayant conduit, il n'y a pas si longtemps, au stationnement payant. Une telle proposition, jugée farfelue il y a quelques années, mérite aujourd'hui une attention particulière, même si certaines expériences récentes, à Lyon en particulier, incitent à la prudence.

En matière de fiscalité, l'idée de moduler la TVA selon les types de véhicules et leur consommation est parfois évoquée. Certains proposent par ailleurs d'appliquer aux places de parking une taxe additionnelle à la taxe foncière afin de financer, par exemple, les transports en commun, sur la base du principe pollueur-payeur.

Votre Rapporteur a souhaité retenir une approche non pas modeste, bien au contraire, mais susceptible d'être mise en pratique et comprise par les français. Elle repose sur trois axes autour desquels s'articuleront un certain nombre de propositions : supprimer les dispositions qui vont à l'encontre des objectifs affichés en matière de lutte contre la pollution atmosphérique, encourager le développement ciblé de véhicules et de carburants propres, accroître le financement des transports en commun.

ORIENTATION N° 1 :

RÉÉQUILIBRER LA FISCALITÉ SUR LES CARBURANTS

RÉDUIRE L'ÉCART DE TAXATION ENTRE LE GAZOLE ET LE SUPERCARBURANT SANS PLOMB

L'avantage fiscal que la France accorde au gazole (1,43 franc par litre, alors que la moyenne européenne est de 0,97 franc) est à l'origine de la très forte diésélisation du parc automobile français que l'on a constatée.

En principe, tout avantage fiscal doit reposer sur un motif d'intérêt public et il convient donc de rechercher la justification de celui dont bénéficie le gazole.

·   Du point de vue de l'environnement, le diesel n'est pas plus propre que les autres carburants, bien au contraire.

Certes, le gazole émet des quantités plus faibles de monoxyde de carbone (CO) que l'essence. De ce point de vue, sa responsabilité est moindre au niveau du renforcement de l'effet de serre et des modifications du climat.

M. Alain Morcheoine, directeur du département des transports à l'ADEME, a cependant nuancé cette affirmation devant la mission d'information commune de l'Assemblée nationale sur l'automobile : les acheteurs de diesel choisissent en général des voitures plus puissantes, et se mettent à rouler davantage que lorsqu'ils possédaient une voiture à essence, ce qui diminue les gains évoqués précédemment (37).

De plus, l'avantage est aux supercarburants en ce qui concerne les oxydes d'azote (NOx), qui contribuent à l'augmentation du niveau moyen d'ozone dans les basses couches de l'atmosphère (pics de pollution, surtout au printemps et en été, avec des effets sur l'homme -irritation des yeux et des voies respiratoires- et sur la végétation).

Ce sont sans doute les particules qui permettent de départager les performances des moteurs essence et diesel au regard de la pollution. Plusieurs études ont souligné le rôle nocif sur la santé des particules émises par les véhicules diesel. L'avis rendu, en septembre dernier, par le Comité de la prévention et de la précaution, est sans ambiguïté :

- les particules en suspension posent un problème en termes de santé publique ;

- plus elles sont fines, plus leur degré de pénétration et de rétention dans les poumons est important ;

- on peut attribuer aux particules fines une part de responsabilité dans la survenue d'une vaste gamme d'effets sanitaires, dont certains sont sérieux ;

- or, ce sont les particules émises par les véhicules à moteur diesel qui se caractérisent par une taille très fine.

En conclusion, le Comité recommandait que soient engagés " des efforts soutenus pour la réduction des principales sources d'émission des particules fines, notamment les émissions issues de la motorisation de type diesel en milieu urbain ".

Bien sûr, il convient de prendre en compte les progrès que la motorisation diesel est susceptible de réaliser dans les années qui viennent. D'ores et déjà, l'équipement des véhicules diesel par un pot catalytique a été rendu obligatoire, le 1er janvier 1997. Selon PSA Peugeot Citroën, les ingénieurs travaillent actuellement sur des " pièges " à oxydes d'azote et sur des filtres à particules, et la nouvelle génération de moteurs diesel HDI, qui utilise la technologie de l'injection directe à très haute pression, permettra de réduire de 20% la consommation, de 40% les émissions de monoxyde de carbone, de 50% les hydrocarbures imbrûlés et de 60% les particules polluantes. Cette technologie devrait équiper, dès l'automne prochain, les Xantia et les 406, après quoi 22 applications seront lancées en un an. Mais des progrès technologiques sont également attendus du côté du moteur à essence (injection directe et combustion en mélange pauvre), notamment en ce qui concerne les rejets de CO2.

Finalement, comme l'indiquait, en 1996, le rapport du Gouvernement au Parlement sur l'utilisation du gazole, les effets respectifs des deux types de véhicules sur la santé et l'environnement ne justifient pas aujourd'hui l'existence d'avantages fiscaux pour la motorisation diesel ".

·   Le développement de l'utilisation du gazole pose également un réel problème à l'industrie française du raffinage, comme le soulignait clairement le rapport précité sur l'utilisation du gazole : " L'industrie du raffinage ne peut que séparer dans certaines proportions les produits pétroliers préexistant dans les pétroles bruts mais on ne sait pas transformer de l'essence en gazole et inversement. Tant que la demande de produits se trouve dans la plage de flexibilité de l'industrie du raffinage, il n'y a pas de problèmes particuliers. Mais dès qu'on sort de la plage de flexibilité de l'industrie, les raffineries ne peuvent pas adapter leur production à la demande. C'est ce qui se passe en France du fait du développement rapide du marché du gazole ". Cette divergence croissante entre la demande de carburant et les capacités de l'industrie française du raffinage se traduit par l'obligation d'importer du gazole et d'exporter, à bas prix, le surplus d'essence, d'où un affaiblissement de ce secteur économique : " des fermetures de raffineries, qui pourraient être évitées si le marché se rééquilibrait, sont prévisibles si cette tendance se prolonge. La sécurité de nos approvisionnements en serait alors affectée de façon permanente ".

·   Enfin, la croissance de l'utilisation du carburant le moins taxé pèse sur le rendement de la fiscalité pétrolière. Il résulte de l'évolution de la consommation " une augmentation de la part des recettes de TIPP liées à la consommation de gazole et un ralentissement de la croissance du produit total de la TIPP en dépit des augmentations de taux intervenues depuis 1993 " (38). Par rapport à un niveau de diésélisation conforme à la moyenne européenne, la perte de recettes annuelle dépasserait déjà 7 milliards de francs, et elle pourrait atteindre 20 milliards de francs dans cinq ans si la tendance se prolongeait.

La justification d'un rééquilibrage ne fait donc aucun doute (39). Il reste à en définir les modalités. Deux raisons au moins plaident en faveur d'un rattrapage progressif :

- la nécessité de ne pas déstabiliser l'industrie automobile française qui, bien sûr, est très présente sur le marché du diesel ;

- le souci de préserver les ménages d'une hausse excessive de la fiscalité à l'heure où le maintien de leur pouvoir d'achat est une condition pour la poursuite de la croissance.

Dès lors, l'objectif retenu par M. Gérard Fuchs, au nom de la mission d'information commune sur la situation de l'industrie automobile, paraît raisonnable : tendre, dans un premier temps, vers l'écart moyen européen des deux fiscalités (0,97 franc par litre). Cette proposition prend en compte les aspects sociaux et industriels de la question.

Votre Rapporteur suggère que cette évolution soit programmée sur une période de cinq ans au maximum et qu'elle s'accompagne d'un gel, en valeur absolue, de la TIPP sur le supercarburant sans plomb. Le coût de la non-indexation du supercarburant sans plomb sur l'inflation serait compensé par une majoration supplémentaire du gazole. En revanche, le supercarburant plombé, en principe interdit à partir du 1er janvier 2000 (programme Auto-oil), augmenterait au même rythme que le gazole.

Ces deux évolutions sont liées : hausse du gazole, et gel du supercarburant. La réforme sera favorable aux propriétaires de véhicules à essence. Elle sera neutre pour les ménages qui possèdent deux véhicules, dont un qui fonctionne au gazole et l'autre à l'essence.

Au total, la proposition de votre Rapporteur conduirait à une augmentation des taxes sur le gazole d'environ 13 centimes par an, au titre du rattrapage : cette évolution aurait un impact budgétaire d'environ 3,5 milliards de francs, qui pourrait financer, notamment, le développement de l'intermodalité en matière de transports. En contrepartie, la pression fiscale diminuerait sur le supercarburant sans plomb.

graphique
  2. Proposition : ramener le différentiel de taxation entre le gazole et le supercarburant sans plomb à la moyenne européenne en cinq ans, au moyen d'une augmentation de la TIPP sur le gazole et d'un gel de la pression fiscale sur le supercarburant sans plomb. Prévoir la même augmentation pour le supercarburant plombé que pour le gazole.

PRÉSERVER LES USAGES PROFESSIONNELS

Un certain nombre d'arguments plaident néanmoins pour que le relèvement des taxes sur le gazole s'accompagne de dispositions particulières pour le transport public de marchandises, surtout si le rééquilibrage est programmé sur une période assez brève comme cinq ans.

·   On observera, en premier lieu, que les transporteurs routiers, à la différence des particuliers, n'ont guère le choix de leur carburant. Les possibilités de substitution sont, dans leur cas, beaucoup plus limitées. Par ailleurs, le gazole est un carburant adapté pour les poids lourds, ainsi que pour les " gros rouleurs " : c'est principalement en milieu urbain et pour de petites distances que son utilisation est néfaste.

·   En second lieu, les carburants représentent plus de 15% des charges d'exploitation des transporteurs routiers. La situation économique difficile de ce secteur d'activité doit être prise en compte.

· ·   Enfin, le problème doit être envisagé dans son contexte européen. Le gazole n'est pas moins taxé en France que dans les autres pays européens, bien au contraire.

TIPP SUR LE GAZOLE DANS L'UNION EUROPÉENNE
(octobre 1997)

Pays

Gazole
(Ecu/hl)

1er

Royaume-uni

54,78

2ème

Italie

39,02

3ème

Suède

36,96

4ème

France

35,25

5ème

Irlande

34,86

6ème

Pays Bas

34,26

Moyenne

32,58

7ème

Allemagne

31,85

8ème

Danemark

30,81

9ème

Belgique

29,17

10ème

Autriche

29,09

11ème

Finlande

28,49

12ème

Portugal

27,66

13ème

Espagne

26,38

14ème

Luxembourg

25,43

15ème

Grèce

24,66

Dès lors, une majoration de la fiscalité sur ce carburant accentuerait une distorsion de concurrence qui pénalise déjà les professionnels français par rapport à leurs concurrents étrangers.

De plus, les transporteurs routiers disposent de capacités de stockage qui leur permettent, en cas de déplacement international, de " faire le plein " dans le pays de leur choix, et toute hausse excessive de la pression fiscale risquerait donc de se traduire par un déplacement de la consommation.

Certes, la fiscalité applicable aux carburants est soumise au respect de normes européennes. La TIPP relève, en effet, au niveau communautaire, du régime des accises, qui est encadré, en particulier, par deux directives : la directive n° 92/81 modifiée du Conseil du 19 octobre 1992 relative à l'harmonisation des structures des droits d'accises sur les huiles minérales, et la directive n° 92/82 modifiée du Conseil du 19 octobre 1992, relative au rapprochement des taux d'accises sur les huiles minérales.

Mais tous les pays de l'Union européenne respectent l'ensemble des taux minima fixés par la directive n° 92/82, qui n'ont donc plus aucune portée et n'empêchent pas certains Etats de pratiquer un " dumping fiscal " qui favorise leurs transporteurs et incite les professionnels étrangers à se ravitailler sur leur territoire. La Commission européenne l'avait d'ailleurs constaté, dès 1995, en procédant, conformément à l'article 10 de la directive n° 92/82, à un réexamen des taux minima applicables aux huiles minérales. Dans son rapport, elle confirmait que " pour l'essence (au plomb et sans plomb), même dans les Etats membres où la taxation est moins lourde, les taux applicables sont maintenant supérieurs d'environ 20% aux taux minimums. Bien que les taux applicables au gazole aient eux aussi été fortement majorés, l'écart entre les taux minimums et les taux nationaux les plus bas est légèrement moindre ".

Il est donc urgent d'obtenir un relèvement des minima communautaires. Certes, ceci permettrait à la France de résoudre un problème qui lui est propre : l'écart anormal entre essence et gazole. Mais l'enjeu réel est plus vaste. Comme on l'a vu, le transport routier de marchandises est largement sous-tarifé, en France et en Europe. La France, pays de transit, est particulièrement victime de ce subventionnement. Dès lors, elle est en droit de réclamer de ses partenaires un relèvement des minima sur le gazole. C'est d'ailleurs ce qu'indique le rapport d'évaluation de la politique française de maîtrise de l'énergie : " la France a tout intérêt à plaider vigoureusement pour une bonne tarification des transports en Europe aussi bien pour promouvoir une politique optimisée de protection de l'environnement et de maîtrise de l'énergie que pour éviter de supporter les coûts d'un transit routier inutilement développé " (40).

En 1995, la Commission s'était engagée à faire de nouvelles propositions avant la fin de 1996. L'obligation de réviser le dispositif d'imposition des huiles minérales a alors rejoint le souci de dépasser l'échec du projet de taxe mixte CO2/énergie (" taxation des consommations d'énergie et des émissions contribuant à l'effet de serre ", 1992), soumis en 1995 au Parlement européen, et retiré de l'ordre du jour au début de l'année 1996, faute de position commune entre les quinze Etats membres.

La Commission a donc présenté, en mars 1997, une nouvelle proposition de directive du Conseil " restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques ", qui étend le système de taux d'imposition minimum actuellement en vigueur pour les huiles minérales à tous les produits énergétiques (charbon, gaz naturel, électricité...). Cette proposition est motivée par une volonté de réduire les distorsions de concurrence entre les différentes formes d'énergie et entre les Etats membres pour favoriser le bon fonctionnement du marché unique. Elle vise également à leur fournir des recettes fiscales supplémentaires afin de réduire parallèlement les impôts et les charges qui pèsent sur le travail (premier dividende), et sa portée environnementale est évidente (second dividende), la production et la consommation d'énergie constituant l'une des principales sources de pollution.

Certes, ce projet pose un certain nombre de problèmes. Ainsi, le seuil proposé pour le GPL obligerait la France à relever son niveau de taxation. La question de la taxation de l'électricité soulève également des controverses. Son examen semble bloqué. Mais il est essentiel que la France oeuvre pour la relance des négociations et plaide, dans ce cadre, en faveur d'un fort relèvement des minima sur le gazole (41).

La proposition de directive préconise, de fait, pour le gazole, une augmentation progressive :

- 310 écus par 1.000 litres au 1er janvier 1998 ;

- 343 écus au 1er janvier 2000 ;

- 393 écus au 1er janvier 2002 (42).

On rappellera qu'en octobre 1997, le niveau de taxation, en France, était de 352,5 écus. Cette proposition, qui est un progrès même si on peut juger insuffisant le relèvement prévu, aurait donc pour principal effet d'obliger des Etats comme la Grèce, le Luxembourg et l'Espagne à relever leurs tarifs, et donc de réduire les distorsions de concurrence et de permettre une tarification plus équilibrée du transport de marchandises.

D'ici là, il est clair que la France ne pourra pas majorer seule sa fiscalité sur le gazole, compte tenu de la concurrence de plus en plus vive qui s'exerce, en Europe, dans le transport routier. Il convient donc de prévoir des dispositions particulières, mais temporaires, pour ce secteur d'activité. L'article 8-4 de la directive n° 92/81 prévoit cette possibilité : " Le Conseil, statuant à l'unanimité sur proposition de la Commission, peut autoriser un Etat membre à introduire des exonérations ou des réductions supplémentaires pour des raisons de politiques spécifiques. Tout Etat membre souhaitant introduire une telle mesure en informe la Commission et lui communique également toutes les informations pertinentes ou nécessaires. La Commission informe les autres Etats membres de la mesure proposée dans un délai d'un mois. Le Conseil est réputé avoir autorisé l'exonération ou la réduction proposée si, dans un délai de deux mois à compter de la date à laquelle les autres Etats membres ont été informés conformément au deuxième alinéa, ni la Commission ni aucun Etat membre n'a demandé que cette question soit examinée par le Conseil " (43).

Cette disposition a d'ailleurs été mise en oeuvre par les Pays-Bas, qui ont obtenu l'autorisation d'instituer un carburant professionnel.

La France doit faire de même et demander une dérogation, qui peut être obtenue rapidement.

Deux solutions sont souvent évoquées :

- la création d'un carburant " dédié ", c'est-à-dire réservé aux véhicules de plus de 3,5 tonnes (44) et servi dans des pompes spécifiques. Ce gazole professionnel ferait l'objet d'un marquage de couleur qui permettrait de détecter les fraudes éventuelles. C'est la solution préconisée par M. Gérard Fuchs dans son rapport sur l'automobile ;

- la mise en place d'un système assurant un remboursement partiel de la fiscalité sur le gazole pour certains utilisateurs, qui serait égal à la différence entre le niveau de la TIPP applicable aux particuliers et aux véhicules utilitaires légers, et celui retenu pour le trafic professionnel.

Une troisième solution est parfois évoquée : la mise en place d'un fonds de compensation, qui serait abondé par le produit de la hausse du gazole appliquée aux transporteurs routiers. Ce fonds financerait des actions dans ce secteur d'activité (sécurité routière, amélioration des conditions de travail, etc.). Cette formule permettrait de faire l'économie d'une demande de dérogation au niveau communautaire.

La solution du carburant professionnel semble dégager le plus large accord, même si la plus séduisante est celle du fonds de compensation. Le principe du remboursement, qui est déjà pratiqué pour les taxis, est sans doute la formule la plus simple et la plus opérationnelle. Elle présente en outre l'avantage de ne pas rendre irréversible une différenciation tarifaire dont le principe et l'ampleur n'ont qu'une vocation transitoire, dans l'attente d'un relèvement des minima communautaires. Il est cependant important que le tarif applicable au carburant routier, qui correspondrait, dans un premier temps, au taux actuellement en vigueur, soit revalorisé, chaque année, dans une proportion au moins égale à l'indice des prix à la consommation.

graphique
  3. Proposition : mettre en place, dans l'attente d'un relèvement significatif des minima communautaires, un système de remboursement partiel de la fiscalité sur le gazole pour les véhicules de plus de 3,5 tonnes. Compenser, au moyen de ce dispositif, la différence entre un taux de TIPP correspondant au minimum au taux actuel, relevé chaque année dans une proportion au moins égale à l'indice des prix à la consommation, et le taux applicable pour l'ensemble du parc automobile.

ORIENTATION N° 2 :

FAVORISER UN RENOUVELLEMENT PROPRE DU PARC AUTOMOBILE

NE PLUS AVANTAGER LES VÉHICULES ANCIENS

Le caractère polluant des véhicules s'accroît avec leur ancienneté. L'amélioration des moteurs, le pot catalytique, et la baisse de la consommation moyenne, ont déjà réduit la nocivité des moyens de transport. Cette évolution devrait se poursuivre, sous l'effet, notamment, du renforcement des normes communautaires (programme Auto-oil).

Dès lors, tout ce qui peut accélérer le renouvellement du parc automobile est favorable à l'environnement. Mais l'orientation actuelle n'est pas très encourageante. Le parc automobile circulant en France s'élevait à 31,267 millions de véhicules au 1er janvier 1998, dont 25,930 millions de voitures particulières. Depuis la crise économique des années 1992-1993, le rajeunissement du parc s'est interrompu sous l'effet de l'effondrement du marché des véhicules neufs. Ce mouvement n'a été qu'atténué par les primes gouvernementales à l'achat d'un véhicule neuf, mises en place entre 1994 et 1996. L'âge moyen des véhicules, qui était de 5,8 ans en 1990, est désormais proche de 7 ans. Comme le montre le tableau ci-après, les véhicules des années 1988 à 1991, période de forte croissance des immatriculations, pèsent sur la structure du parc en circulation.

ESTIMATION DU PARC DE VOITURES PARTICULIÈRES EN CIRCULATION PAR ANNÉE DE PREMIÈRE IMMATRICULATION

(Age au 1er janvier 1998)

Année

Parc de voitures particulières

de 1ère immat.

Age

en milliers

en %

Age

en milliers

en %

1997

de 0 à 1 an

1.740

6,7 %

moins de 1 an

1.740

6,7 %

1996

de 1 à 2 ans

2.224

8,6 %

moins de 2 ans

3.964

15,3 %

1995

de 2 à 3 ans

2.046

7,9 %

moins de 3 ans

6.010

23,2 %

1994

de 3 à 4 ans

2.061

7,9 %

moins de 4 ans

8.071

31,1 %

1993

de 4 à 5 ans

1.786

6,9 %

moins de 5 ans

9.857

38,0 %

1992

de 5 à 6 ans

2.101

8,1 %

moins de 6 ans

11.958

46,1 %

1991

de 6 à 7 ans

1.915

7,4 %

moins de 7 ans

13.874

53,5 %

1990

de 7 à 8 ans

2.072

8,0 %

moins de 8 ans

15.946

61,5 %

1989

de 8 à 9 ans

1.926

7,4 %

moins de 9 ans

17.873

68,9 %

1988

de 9 à 10 ans

1.740

6,7 %

moins de 10 ans

19.612

75,6 %

1987

de 10 à 11 ans

1.467

5,7 %

moins de 11 ans

21.079

81,3 %

1986

de 11 à 12 ans

1.224

4,7 %

moins de 12 ans

22.303

86,0 %

1985

de 12 à 13 ans

964

3,7 %

moins de 13 ans

23.268

89,7 %

1984

de 13 à 14 ans

775

3,0 %

moins de 14 ans

24.043

92,7 %

1983

de 14 à 15 ans

593

2,3 %

moins de 15 ans

24.636

95,0 %

avant 82

15 ans et +

1.294

5,0 %

Total

25.930

100,0 %

Age moyen du parc au 1er janvier 1998 : 7 années.

Source : Comité des constructeurs français d'automobiles.

Dans ces conditions, toute disposition qui favorise la détention d'un véhicule ancien est contraire aux objectifs environnementaux.

·   Comme on l'a vu, le tarif de la vignette est dégressif en fonction de l'âge du véhicule. Conformément à l'article 1599 G du code général des impôts, il est réduit de moitié pour les véhicules ayant plus de cinq ans, mais moins de vingt ans d'âge ; pour les véhicules ayant plus de vingt ans, mais moins de vingt-cinq ans d'âge, le coefficient applicable est de 0,4 ; au-delà de vingt-cinq ans d'âge, les véhicules ne sont plus soumis à la vignette.

·   Les taux de la carte grise sont quant à eux réduits de moitié pour les véhicules ayant plus de dix ans d'âge (article 1599 sexdecies-I-3 du code général des impôts).

·   Enfin, les véhicules dont la date de première mise en circulation remonte à plus de dix ans au premier jour de la période d'imposition sont exonérés de la taxe sur les véhicules des sociétés (article 310 D de l'annexe II au code général des impôts).

Pour l'avenir, il convient de supprimer ces abattements successifs qui ont un impact environnemental négatif, tout en les maintenant pour les véhicules qui en bénéficient déjà.

Cette mesure aurait un impact budgétaire important. Pour la vignette uniquement, dont le produit est perçu au profit des départements, le gain induit par un recul progressif de la limite de 5 ans serait de 770 millions de francs la première année, et de 6,3 milliards de francs la quinzième année. Votre Rapporteur considère que ce produit pourrait être affecté au financement d'une politique plus ambitieuse en matière de transports en commun locaux (voir la proposition n° 12).

graphique
  4. Proposition : reculer d'un an chaque année le seuil d'ancienneté des véhicules ouvrant droit à des abattements en matière de vignette, de carte grise et de taxe sur les véhicules des sociétés. Affecter le produit ainsi dégagé au financement des transports collectifs locaux (proposition n° 12).

ENCOURAGER L'UTILISATION DES CARBURANTS ET DES VÉHICULES PROPRES

Toute mesure susceptible de favoriser le renouvellement du parc est donc positive du point de vue de l'environnement, car les véhicules neufs polluent beaucoup moins que les véhicules anciens. Mais il est encore plus efficace d'orienter la demande vers des véhicules propres.

Les idées ne manquent pas. Ainsi, la TVA est souvent citée comme un levier puissant, et la proposition d'une baisse de taux ciblée sur les véhicules propres ou à faible consommation est séduisante. Elle se heurte néanmoins à des obstacles juridiques, compte tenu de la rigueur des normes européennes qui encadrent le régime de la TVA.

D'autres mesures sont envisageables, mais des choix doivent être opérés au préalable, car les dispositions adoptées récemment n'ont pas été accompagnées d'une réflexion sur l'énergie et les utilisations à privilégier.

·   Le GPL, mélange de propane et de butane, qui est attrayant grâce à ses performances environnementales (ni soufre, ni plomb, ni benzène, une forte baisse des émissions de CO, d'hydrocarbures, de NOx, absence de particules), est la solution idéale pour les véhicules légers, notamment en milieu urbain, mais pas pour les poids lourds. Les taxis sont une cible très intéressante : le Japon et la Corée du Sud sont des exemples à cet égard.

·   Le gaz naturel pour véhicules est une solution pour certaines flottes captives. Le GNV peut alimenter des voitures particulières mais son utilisation semble surtout adaptée aux véhicules de marchandises (notamment les utilitaires urbains) et aux véhicules de transport de voyageurs (autobus). Le développement de l'utilisation du GNV permettra de limiter les émissions de CO2 et donc de lutter contre l'effet de serre.

Le GPL et le GNV ont bénéficié, comme on l'a vu, de nombreux avantages fiscaux, ainsi que d'une baisse de la TIPP, qui ont contribué à la progression de la consommation. Pourtant, la France reste en retard par rapport à d'autres pays, dont l'Italie et les Pays-Bas.

MARCHÉS DU GPL
(novembre 1996)

Pays

Consommation 1996
(en KT.)

Véhicules
(en milliers)

Stations-services

Japon

1.758.000

295.000

1.921

Corée du Sud

1.581.000

306.000

502

Mexique

1.255.000

317.000

1.500

Italie

1.178.000

1.024.000

1.900

USA

1.126.000

388.000

3.300

Australie

1.143.000

423.000

2.450

Pays-Bas

734.000

427.000

2.000

Canada

673.000

145.000

5.000

CEI

350.000

538.000

1.000

Thaïlande

115.000

8.200

92

France

45.000

45.000

800

Autres

727.000

374.000

2.300

Monde

10.685.000

4.290.200

22.765

Source : Comité français du butane et du propane.

Ainsi, s'il est vrai que l'offre de GPL atteindrait des limites si son développement était excessif, le tableau ci-dessus montre qu'il reste à la France une marge de progression considérable.

·   Les biocarburants sont obtenus à partir de matières premières végétales : il s'agit du diester (huiles végétales extraites de plantes oléagineuses : colza, tournesol, soja et maïs), qui peut être substitué ou incorporé au gazole, et du bioéthanol, obtenu à partir de céréales et de betteraves et incorporé (à hauteur de 15% au maximum) aux supercarburants. Ces produits bénéficient d'un régime de défiscalisation partielle, qui a d'ailleurs été conforté par l'article 25 de la loi de finances rectificative pour 1997.

·   L'aquazole, mis au point par le groupe pétrolier Elf, est un mélange émulsionné eau (13%) - gazole (84%) - additifs organiques (3%). Ce produit permettrait de réduire les émissions de Nox (-20 à -30%), de particules solides (-35 à -55%), de CO (-30%, mais avec une légère augmentation au ralenti), ainsi que l'opacité des fumées (-50 à -70%). Il fait l'objet d'une utilisation expérimentale à Lyon, Villefranche-sur-Saône et surtout à Chambéry. Les résultats sont jugés très concluants : les autorisations seront donc prorogées mais sur la base de quantités beaucoup plus importantes (2000 m3) compte tenu de l'implication probable de la RATP.

L'utilisation de l'aquazole entraîne cependant un surcoût (35 centimes au litre environ), qui est par ailleurs accentué en raison d'un régime fiscal défavorable : la TIPP est en effet appliquée sur l'ensemble du carburant, y compris la part d'eau, ce qui représente un nouveau surcoût d'environ 30 centimes par litre.

·   A très long terme, certains considèrent que l'avenir appartient au véhicule électrique, qui utilise l'énergie la moins polluante et la moins bruyante. Le secrétaire d'Etat à l'industrie, M. Christian Pierret, s'était exprimé dans ce sens devant la mission d'information commune sur l'automobile. Néanmoins, ce type de motorisation se heurte aujourd'hui à des difficultés financières mais aussi techniques, en raison du volume et du poids des accumulateurs d'énergie qui sont beaucoup trop importants par rapport aux performances et à l'autonomie des véhicules.

Dès lors, des mesures doivent être envisagées pour développer ces types de motorisation là où ils sont les plus efficaces.

S'agissant des carburants et plus particulièrement du GPL et du GNV, il convient de poursuivre les efforts engagés et pour qu'aucun signal " négatif " ne vienne perturber cette orientation, votre Rapporteur recommande une mesure claire et aisément compréhensible pour l'opinion publique : le gel de la TIPP applicable au GPL et au GNV. On observera d'ailleurs que la baisse des taxes sur le GPL et le GNV, en favorisant ce type de motorisation, s'est traduite par une hausse des recettes de TIPP, qui sont passées, pour le GPL, de 28 millions de francs en 1996 à 64 millions de francs en 1997.

graphique
 5. Proposition : geler le taux de la TIPP applicable au GPL et au GNV.

Il convient également de reconsidérer le régime fiscal appliqué à l'aquazole qui, comme on l'a vu, pénalise le développement de ce carburant dont l'utilisation semble pourtant prometteuse.

graphique
  6. Proposition : modifier le régime fiscal appliqué à l'aquazole en exonérant de TIPP la part d'eau de ce carburant.

S'agissant des véhicules légers, la solution la plus performante est aujourd'hui le GPL et votre Rapporteur formule trois propositions pour encourager son utilisation.

La première proposition consiste à étendre aux véhicules fonctionnant en bicarburation les dispositions particulières prévues pour les véhicules fonctionnant exclusivement au GPL, à savoir, en application des articles 28 et 29 de la loi sur l'air, l'exonération totale de la taxe sur les véhicules des sociétés et l'amortissement exceptionnel sur 12 mois.

En effet, la bicarburation (ou carburation alternée) est indispensable au développement de cette filière. En cas de " panne sèche " avec un véhicule GPL monocarburation, le seul recours est la dépanneuse, ce qui est très handicapant, y compris pour des véhicules de flottes captives. Le cas échéant, cette mesure peut être accordée pour une durée limitée. On pourrait également envisager, en ce qui concerne la taxe sur les véhicules de société, qu'elle ne concerne que les véhicules de 7 CV fiscaux et moins (45). En tout état de cause, son coût serait modeste, bien que votre Rapporteur n'ait pu obtenir d'évaluation précise.

graphique
  7. Proposition : étendre aux véhicules fonctionnant en bi-carburation les dispositions particulières prévues pour les véhicules fonctionnant exclusivement au GPL (exonération totale de la taxe sur les véhicules des sociétés et amortissement exceptionnel sur 12 mois).

La seconde proposition tend à donner une portée à l'article 26 de la loi sur l'air qui a ouvert, au profit des taxis, un droit au remboursement de la TIPP sur une enveloppe annuelle de 6.500 litres de GPL. Comme on l'a vu, cette mesure n'a pas eu d'effet, les taxis bénéficiant par ailleurs de 5.000 litres de gazole défiscalisé. Certaines expériences ont ouvert la voie : ainsi, l'entreprise Total a mis en oeuvre une opération de partenariat avec les taxis G7, dont quelques véhicules fonctionnent désormais au GPL : sa filiale TotalGaz supporte le surcoût de l'opération (différence de prix hors taxes des carburants et équipement des véhicules) : cette initiative très positive n'en est pas moins significative des limites de la disposition votée dans le cadre de la loi sur l'air. Le seuil de 5.000 litres applicable au gazole pourrait donc être diminué progressivement, chaque baisse ne s'appliquant qu'aux nouvelles immatriculations.

graphique
  8. Proposition : abaisser de 1.000 litres par an, pour les nouvelles immatriculations, le quota annuel de gazole défiscalisé dont bénéficient les taxis.

La troisième proposition consiste à instaurer une prime d'Etat pour tout achat d'un véhicule léger neuf fonctionnant au GPL. Son montant serait de 5.000 francs, ce qui correspond à environ la moitié du surcoût pour ce type d'équipement. Cette prime pourrait être majorée de 50% pour les taxis. Le coût de cette mesure serait modeste. On rappellera que le nombre de véhicules en circulation fonctionnant au GPL, au GNV ou à l'électricité est inférieur à 75.000 au total.

  9. Recommandation :

graphique
instaurer une prime d'Etat de 5.000 francs pour tout achat de véhicule neuf fonctionnant au GPL (7.500 francs pour les taxis).

Ces mesures, pour être pleinement efficaces, devront être mises en oeuvre simultanément.

Il reste que l'essor du GPL semble " bridé " par des difficultés de ravitaillement. Le nombre de stations-service distribuant ce carburant est en forte progression mais il ne serait pas appelé à dépasser les 2.000 unités en 2002, sur un réseau total de 17.000 points de vente. Les règles relatives aux installations de gaz combustibles liquéfiés, qui sont très strictes en termes de distances minimales d'éloignement (par rapport aux sources de distribution des autres carburants mais aussi par rapport aux habitations, bureaux, voies de communication, établissements scolaires, etc.), limitent les possibilités d'implantation dans les centres urbains.

Néanmoins, compte tenu des résultats d'une étude de sécurité réalisée récemment, le ministère de l'environnement serait sur le point d'alléger ces contraintes.

Par ailleurs, le Comité professionnel de la distribution de carburants (CPDC) pourrait sans doute jouer un rôle dans le développement du réseau des stations GPL.

Le CPDC est chargé de mettre en oeuvre les programmes d'action destinés à l'aménagement du réseau de distribution des carburants, à l'amélioration de sa productivité, à la modernisation de ses conditions de commercialisation et de gestion. Dans ce cadre, il peut prendre en charge une partie des investissements rendus nécessaires par des normes environnementales. Ce taux de prise en charge pourrait être relevé, notamment en ce qui concerne la fraction de l'investissement nécessaire à la vente du GPL qui n'est pas couverte par la société distributrice. Le CPDC dispose, semble-t-il, des moyens nécessaires à cette orientation. On rappellera qu'il perçoit le produit d'une taxe parafiscale sur certaines huiles minérales, dont le montant s'est élevé à 52,6 millions de francs en 1996. De plus, ses interventions, et donc ses dépenses, ont été interrompues pendant plus d'un an suite à des difficultés liées au renouvellement de son conseil d'administration. Enfin, une partie de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat devrait lui être affectée, ce qui augmentera ses ressources (46).

  10. Recommandation :

graphique
accroître le taux de prise en charge, par le Comité professionnel de la distribution des carburants (CPDC), des investissements rendus nécessaires, au niveau du réseau de distribution, par des normes environnementales, en particulier pour la vente de GPL.

ORIENTATION N° 3 :

FACILITER LE DÉPLACEMENT URBAIN

Les pics de pollution, la circulation alternée, l'introduction de la pastille verte, ont sensibilisé l'opinion publique à la question de la pollution atmosphérique, notamment en milieu urbain, et à la thématique des transports en commun. Les Français considèrent que le développement des transports collectifs est le meilleur moyen pour lutter contre la pollution de l'air et améliorer la qualité de la vie en milieu urbain.

Un bus pollue, en moyenne, dix à vingt fois moins qu'une voiture par voyageur transporté. Selon l'ADEME, le déplacement d'une personne

en voiture particulière produit 60% de CO2 en plus, treize fois plus de CO, et cinq fois plus d'hydrocarbures imbrûlés qu'un déplacement en autobus.

La loi sur l'air a fixé comme orientation aux plans de déplacements urbains, dont l'élaboration est obligatoire d'ici décembre 1998, de réduire la place de la voiture en ville au profit des transports en commun. Mais, dans les faits, la situation n'est pas satisfaisante : la durée de vie des bus tend à s'allonger (de 12 à 15 ans), et les transports publics sont souvent considérés comme des pollueurs dans le centre des villes. Cette évolution s'explique par les difficultés financières rencontrées par les collectivités locales. Le vieillissement du parc se traduit par des taux de pollution supérieurs. La pénurie et les dégradations entraînent une baisse de fréquentation des transports en commun, ce qui accroît le taux de pollution par passager.

Il est essentiel, aujourd'hui, que soit définie une véritable politique de développement des transports collectifs. La réalisation des schémas régionaux de déplacement et des plans de déplacements urbains sera un progrès. L'Etat, quant à lui, se doit de renforcer, dans ce domaine, la politique contractuelle qu'il mène avec les agglomérations, dans le cadre des contrats de plan Etat-région. Mais la relance d'une dynamique de l'offre en transports collectifs passe essentiellement par la recherche de ressources financières nouvelles. Le versement transport, qui est la principale ressource des transports publics urbains avec la contribution des collectivités locales, semble avoir atteint ses limites (47). Les recettes tarifaires et commerciales n'offrent plus guère de marge de manoeuvre.

Les projets, pourtant, existent. En matière de transports en commun en sites propres (tramway, bus, etc.), le groupement des autorités responsables de transport (GART) a ainsi recensé, pour les dix prochaines années, 90 projets, représentant, en termes de financement, 90 milliards de francs. 57 projets, rassemblant 34 agglomérations et représentant environ 57 milliards de francs, sont situés en province, mais une quinzaine seulement de ces agglomérations seraient susceptibles d'engager les travaux d'ici l'an 2000. Le GART indique que la participation de l'Etat aux transports collectifs en site propre de province n'atteint aujourd'hui que 16% en moyenne de l'investissement total réalisé et considère que seule une augmentation significative de cette participation financière pourrait accélérer la prise de décision au plan local.

Incontestablement, la participation de l'Etat aux transports collectifs, qui ne concerne que les investissements (les taux de subvention sont compris entre 20% et 40% des dépenses d'infrastructures et d'équipement) (48), doit augmenter, pour inciter les collectivités territoriales, qui ont la responsabilité de l'organisation des transports publics locaux, à réaliser leurs projets. De ce point de vue, l'orientation du ministère des transports, qui entend redéployer des crédits du budget des routes vers celui des transports collectifs urbains, est bonne, bien qu'elle reste à préciser.

Cela étant, l'Etat doit également orienter les choix et soutenir les collectivités locales qui réalisent des efforts particuliers. L'exemple du district urbain de la Cluse de Chambéry est de ce point de vue éloquent. Celui-ci a engagé trois initiatives autour de bus fonctionnant à l'électricité (location longue durée de trois minibus électriques), au GNV (deux autobus, avec un objectif à l'horizon 2000 de dix autobus utilisant cette énergie), et à l'aquazole, qui a été étendu à la majorité du parc. Une telle politique mériterait un soutien particulier de la part des pouvoirs publics.

L'idée d'affecter au financement des transports en commun une taxe additionnelle sur les places de parking, une part de la taxe sur les concessionnaires d'autoroutes qui alimente le Fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables (FITTVN), une surtaxe sur les carburants, ou une fraction de la TIPP, est souvent évoquée. Ces propositions seraient cohérentes, l'automobile ayant une responsabilité dans le coût des transports collectifs urbains (congestion du trafic, pollution, sous-tarification qui conditionne les recettes des transports collectifs, etc.). Néanmoins, votre Rapporteur privilégiera d'autres orientations.

SOUTENIR LES EFFORTS DES COLLECTIVITES LOCALES

EN MATIÈRE DE TRANSPORTS EN COMMUN

La première consiste à intégrer, dans les dotations de l'Etat aux collectivités locales, un critère environnemental, c'est-à-dire, en l'occurrence, les efforts réalisés en matière de transports collectifs (taux d'investissement par habitant), en tenant compte, en particulier, des surcoûts supportés en raison du recours à des procédés " propres " (bus GNV, électriques, etc.). La DSU pourrait être l'instrument adéquat : l'effort en matière de transports serait ajouté aux critères entrant dans la composition de l'indice synthétique (potentiel fiscal, nombre de bénéficiaires de l'aide au logement, nombre de logements sociaux et revenu moyen par habitant) qui préside à l'éligibilité à la dotation et à la répartition des crédits entre les collectivités locales. Cette réflexion devra trouver un prolongement dans le cadre du futur projet de loi sur l'intercommunalité, les transports étant souvent de la compétence des groupements de communes.

  11. Recommandation :

graphique
intégrer, dans les dotations de l'Etat aux collectivités locales, un critère environnemental : les efforts consentis en matière de transports collectifs, en tenant compte des surcoûts liés au recours à des procédés " propres ".

DÉVELOPPER LES TRANSPORTS EN COMMUN

Il conviendrait par ailleurs de dégager de nouvelles recettes pour abonder un Fonds d'investissement pour les transports collectifs locaux.

Ce Fonds pourrait être doté du produit dégagé par la suppression progressive des abattements sur la vignette, la carte grise et la taxe sur les véhicules des sociétés (proposition n° 4).

Cette orientation serait parfaitement cohérente au regard du principe pollueur-payeur, dans la mesure où elle revient à financer le développement des transports en commun à partir d'une recette dégagée sur les véhicules les plus polluants.

On ajoutera que la détention d'un véhicule ancien n'est pas toujours liée à des raisons sociales : dans les centres urbains notamment, où le problème de la pollution liée à l'usage de l'automobile est le plus grave et le développement des transports en commun indispensable, il s'agit souvent d'un second véhicule.

Les recettes ainsi dégagées seraient importantes, la mise en oeuvre de la proposition n° 4 devant avoir un rendement budgétaire de plusieurs milliards de francs.

graphique
  12. Proposition : créer un Fonds d'investissement pour les transports collectifs locaux, doté du produit de la suppression progressive des abattements sur la vignette, la carte grise et la taxe sur les véhicules des sociétés (proposition n° 4).

ENCOURAGER LE COVOITURAGE

Le développement du covoiturage fait partie des orientations assignées aux plans de déplacements urbains, prévus par la loi sur l'air du 30 décembre 1996, en vue de réduire le trafic automobile et d'accroître la fluidité de la circulation, ce qui est également favorable aux transports en commun.

La mise en place par les entreprises de dispositifs destinés à promouvoir le covoiturage auprès de leurs employés est essentielle pour le succès de cette pratique. Il convient donc de prévoir des mesures incitatives, afin de soutenir des efforts que le législateur s'est contenté d'appeler de ses voeux en 1996. A cet égard, le versement transport semble être l'instrument adapté. Il pourrait être modulé pour les entreprises dont les salariés pratiquent le covoiturage, ce qui leur permettrait en retour de mettre en place des incitations destinées à les y encourager (par exemple en prenant en charge certains frais comme les vidanges ou les contrôles antipollution).

Les initiatives prises par la Société des autoroutes Paris-Normandie et par quelques entreprises montrent que le covoiturage peut parfaitement être identifié et répertorié.

L'enjeu financier serait modeste (le coût serait de l'ordre de 600 francs par pratiquant et par an) et il n'y a aucun risque de déstabilisation du versement transport.

Votre Rapporteur observera néanmoins que la pastille verte aurait pu être attribuée aux covoitureurs.

  13. Proposition :

graphique
prévoir une adaptation du versement transport pour soutenir les entreprises qui encouragent leurs employés à pratiquer le covoiturage.

B.- L'EAU : POUR UNE GESTION TRANSPARENTE ET INCITATIVE

La loi du 3 janvier 1992 affirme que l'eau fait partie " du patrimoine commun de la Nation ", et que sa protection, sa mise en valeur et son développement, sont " d'intérêt général " (49). Pourtant, les Français s'interrogent sur sa gestion qualitative et quantitative, ainsi que sur son prix, qui a fortement augmenté au cours des dernières années : la réglementation a été considérablement renforcée et les investissements ont progressé en conséquence. La dépense nationale consacrée à la gestion des eaux usées représentait 56,2 milliards de francs en 1995 (968 francs par habitant) (50).

L'efficacité de la politique de l'eau et la tarification de la ressource doivent être améliorées.

1.- Les conséquences de l'augmentation du prix de l'eau

Le prix du mètre cube d'eau est passé de 7 francs en 1988 à 17 francs en 1997. La consommation moyenne étant de 120 mètres cubes, l'usager verse environ 2.000 francs par an pour le service de l'eau.

Cette augmentation explique que les consommateurs soient de plus en plus sensibles au prix de l'eau, au point que certains ont été jusqu'à évoquer un mécontentement diffus, voire une " grogne des usagers ".

Dans ce contexte, il est essentiel de cerner les facteurs de cette évolution et de se demander si le manque d'incitations à l'efficacité économique ne porte pas une part de responsabilité. La multiplicité des prestations, des modes de gestion et des prélèvements sur la ressource ne facilitent pas la réponse.

·   Le premier paramètre à prendre en compte est lié à la nature du service fourni : alimentation (production et distribution), assainissement (collecte, transport et épuration des eaux usées), lutte contre la pollution et protection de la ressource (redevances des agences).

·   Le second paramètre tient au mode de gestion du service. La responsabilité en incombe aux communes mais l'intercommunalité est, dans ce domaine, très développée. Chaque structure peut gérer directement le service ou en déléguer tout ou partie à un organisme extérieur, public ou privé.

Pour 36.400 communes, il existe environ 15.500 services de distribution d'eau potable, dont 13.500 services isolés et 2.000 syndicats intercommunaux. La part de ces services qui est gérée en régie s'élève à 43% (49% en 1985). Elle représente 20 à 22% de la population, et moins de 19% des volumes d'eau vendus.

La question du choix entre gestion directe et gestion déléguée implique cependant, pour l'eau comme pour les déchets, de distinguer la collecte et le traitement : les deux tiers des services de collecte des eaux usées sont gérés directement, contre un tiers seulement pour les services de traitement.

·   Le prix de la facture finale est donc lié à ces choix et résulte de l'addition de plusieurs composantes qui n'évoluent pas de la même façon :

- la TVA est perçue au taux réduit (5,5%). Elle s'applique à l'ensemble des éléments qui composent la facture d'eau ;

- une redevance est perçue au profit du Fonds national pour le développement des adductions d'eau (FNDAE). L'article 37 de la loi de finances pour 1996 a porté son tarif à 14 centimes par mètre cube. Ce prélèvement est en fait régulièrement majoré, mais sa part dans le prix total de l'eau reste marginale (51) ;

- les redevances de prélèvement et de pollution perçues par les agences de l'eau représentent environ 15% du prix. Elles sont également en forte augmentation, en particulier depuis le VIème programme quinquennal d'intervention (1992-1996) ;

- la part correspondant à la fourniture de l'eau potable et à l'assainissement est à l'origine de l'essentiel de la facture, mais dans cet ensemble, la première composante (la distribution) diminue, en proportion, alors que la seconde progresse.

graphique

La hausse du prix de l'eau est donc imputable, pour l'essentiel, aux coûts d'assainissement et d'épuration des eaux usées, qui représentaient 26% du prix en 1985, 33% en 1995, et peut être plus de 60% en 2005. Cette évolution traduit une meilleure prise en compte de la protection de l'environnement.

La réglementation a en effet été fortement durcie dans ce domaine. L'eau en général, et l'assainissement en particulier, ont constitué un terrain de prédilection pour les directives européennes puisque pas moins de neuf textes sont applicables en la matière (52).

·   La directive 80/778/CEE relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine a fixé des paramètres de qualité qui doivent être respectés sur le territoire des Etats membres. Tous n'ont bien sûr pas la même importance sur le plan sanitaire.

On rappellera que le critère d'admissibilité de la teneur en plomb dans l'eau potable fait actuellement l'objet d'une proposition de directive, qui a donné lieu à un accord au Conseil environnement d'octobre 1997 et qui a été examinée par le Parlement européen en seconde lecture en mai dernier. Ce texte tend à renforcer la norme de teneur en plomb à un horizon de cinq ans (25 microgrammes par litre) et quinze ans (10 microgrammes par litre). Cette mesure pourrait entraîner un coût de mise en oeuvre très élevé : le chiffre de 120 milliards de francs est parfois évoqué pour la France, en prenant en compte, toutefois, le remplacement des canalisations privatives pour l'eau potable au domicile des particuliers (90 milliards de francs).

·   La directive 91/271/CEE du 21 mai 1991 relative au traitement des eaux résiduaires urbaines impose aux agglomérations de plus de 2.000 habitants, d'ici au 31 décembre 2005, en fonction d'un échéancier précis lié à leur taille et à la sensibilité des milieux récepteurs, de s'équiper en systèmes de collecte et d'épuration des eaux usées. La loi sur l'eau du 3 janvier 1992 a transposé cette directive en droit français, en élargissant le rôle des communes, qui sont désormais responsables de la totalité des dépenses en matière d'eaux usées (collecte, transport, traitement, élimination des boues, contrôle des systèmes non collectifs) et non plus seulement du fonctionnement et de l'entretien des stations d'épuration. La loi dispose que l'ensemble des eaux usées doit être traité. Dans ce but, les communes doivent définir les zones relevant de l'assainissement collectif et de l'assainissement autonome, et déterminer celles où les eaux pluviales sont stockées et traitées.

Ces objectifs imposent aux collectivités un effort financier important, mais on ne peut qu'être frappé par le caractère approximatif des évaluations. Le montant des investissements pourrait s'avérer bien supérieur aux 75,5 milliards de francs initialement avancés (dont 51,6 milliards de francs pour les réseaux de collecte et 23,9 milliards de francs pour les stations d'épuration).

Cette hausse des investissements dans le secteur de l'eau s'est déjà traduite, comme on l'a vu, par une augmentation des prix, d'environ 9% par an depuis 1991. Et cette tendance devrait se prolonger jusqu'en 2001, bien qu'à un rythme plus modéré, d'environ 5% par an. D'une certaine façon, cette évolution, que l'on retrouve dans la plupart des pays industrialisés, confère au prix de l'eau une fonction incitative, la consommation étant orientée à la baisse depuis le début de la présente décennie (53).

Le renforcement des normes de qualité, qui est favorable à la protection de la santé des Français et à une meilleure gestion de la ressource, n'est pas en cause. Mais la montée des investissements et, partant, celle du prix de l'eau, imposent aux pouvoirs publics plusieurs obligations.

·   Une grande partie des réformes nécessaires dans le domaine de la vérité et du niveau des prix dépasse largement la problématique du présent rapport. Elles ont trait à la transparence, à la concurrence, et à la nécessité de rééquilibrer les relations entre les collectivités locales et les opérateurs de l'eau à travers une régulation publique renforcée.

A cet égard, plusieurs dispositions législatives ont été adoptées dans un passé récent. En particulier, la loi du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques, dite " loi Sapin ", a imposé un minimum de transparence et de mise en concurrence.

Néanmoins, comme le note le Commissariat général du Plan dans sa récente " évaluation du dispositif des agences de l'eau ", " la situation du marché de l'eau est aujourd'hui très éloignée du schéma de concurrence pure et parfaite (...). Le marché de l'eau présente une structure oligopolistique, avec des tendances monopolistiques marquées sur certaines parties du territoire ". Cette situation s'exerce sans doute au désavantage des consommateurs sur le terrain du prix payé (54).

·   Au-delà, on note que depuis le début de la présente décennie, plusieurs mesures ont été mises en oeuvre de façon à favoriser la " vérité " des prix et à évoluer vers une tarification économique :

- l'article 13-II de la loi sur l'eau du 3 janvier 1992 dispose qu'à compter du 3 janvier 1994, toute facture d'eau devra comprendre un montant calculé en fonction du volume réellement consommé par l'abonné. Cette mesure, qui a mis fin à la tarification forfaitaire, va incontestablement dans le bon sens. Il est néanmoins prévu que la part proportionnelle peut être complétée par " un montant calculé indépendamment de ce volume, compte tenu des charges fixes du service et des caractéristiques du branchement " ;

- l'instruction budgétaire et comptable M 49 du 10 novembre 1992 a également constitué un élément de clarification et de vérité des prix, sa finalité étant de garantir un financement du service par l'usager, en fonction de la valeur réelle du service qui lui est rendu. Les services de distribution d'eau et d'assainissement ayant un caractère industriel et commercial sont soumis, comme les autres services de ce type, aux règles de l'équilibre budgétaire et de l'individualisation dans un budget annexe. Il ne peut y avoir de transfert entre ce service public et le budget de la collectivité, sous réserve des dérogations prévues à l'article L. 322-5 du code des communes (contraintes particulières, investissements importants, etc.) ;

- l'article 73 de la loi du 2 février 1995 a imposé au gestionnaire du service (régie ou société délégataire) de présenter chaque année au conseil municipal un rapport sur le prix et la qualité du service d'eau potable.

Ces mesures ont parfois été présentées comme ayant contribué au renchérissement de l'eau. Mais il semble que ces accusations soient largement infondées, sauf peut-être pour les petites collectivités qui ont cependant fait l'objet, depuis, de dispositions particulières (55). En tout état de cause, la mise en place de règles de gestion allant dans le sens de la vérité des prix était tout à fait nécessaire.

Dans ces conditions, on ne peut que se féliciter de l'annonce, par le Gouvernement, le 20 mai dernier, de la création d'un Haut Conseil du service public de l'eau et de l'assainissement, placé auprès des ministres de l'environnement et de l'économie, qui aura pour missions principales de veiller à la transparence dans ce secteur, de suivre l'évolution du prix de l'eau, de renforcer le contrôle public sur les relations entre les collectivités locales et les sociétés privées, d'assurer une médiation si nécessaire et, le cas échéant, de saisir le Conseil de la concurrence et les chambres régionales des comptes en cas de présomption de pratiques illicites. Cette initiative va incontestablement dans le bon sens, même s'il aurait été préférable de s'engager plus résolument encore dans le sens de la mise en place d'une véritable Autorité chargée d'une mission de régulation des prix.

Il n'en est pas moins souhaitable de modifier le mode de facturation de l'eau, de façon à mettre en place des mécanismes plus incitatifs et d'influer sur les comportements des consommateurs. Les propositions de votre Rapporteur iront dans ce sens, même si la problématique posée peut dépasser, parfois, le strict champ de la fiscalité.

En tout état de cause, la hausse du prix de l'eau impose également aux pouvoirs publics de s'interroger sur l'efficacité des aides qui sont gérées, en particulier, par les agences de bassin. Tel était le sens de la mission confiée, en 1996, par le précédent Gouvernement, au Commissariat général du Plan, au moment même où la Cour des comptes rendait un rapport assez critique sur le fonctionnement de ces agences (56). Certes, la part des redevances dans le prix de l'eau reste modeste. Mais le système n'est guère orienté vers la recherche de l'efficacité économique.

2.- La nécessaire réforme des agences de l'eau

Les agences de l'eau sont le vecteur de la politique française en matière de gestion de la ressource et de lutte contre sa pollution.

Leur création remonte à la loi du 16 décembre 1964 relative au régime et à la répartition des eaux et à la lutte contre leur pollution :

- son article 13 a institué les comités de bassin, parfois qualifié de " parlements de l'eau ", qui réunissent des représentants des collectivités locales et des usagers, ainsi que des représentants désignés par l'Etat, notamment parmi les milieux socioprofessionnels ;

- son article 14 a créé les agences financières de bassin (57), établissements publics administratifs, décentralisés, sous tutelle de l'Etat, dotés de la personnalité civile et de l'autonomie financière. Au nombre de six, elles couvrent l'ensemble du territoire métropolitain (58). Leur mission est de contribuer à la réalisation de travaux visant à améliorer la qualité de l'eau ou à accroître sa disponibilité, en apportant une aide financière, sous forme de subventions et de prêts, aux maîtres d'ouvrage. L'essentiel des aides est consacré aux investissements destinés à réduire les rejets polluants ou à les épurer.

L'originalité du dispositif réside dans son mode de financement. De façon à couvrir les dépenses prévues dans le cadre d'un programme quinquennal d'intervention élaboré par l'agence, voté par le comité et approuvé par le Premier ministre, " l'agence établit et perçoit sur les personnes publiques ou privées des redevances, dans la mesure où ces personnes publiques ou privées rendent nécessaire ou utile l'intervention de l'agence ou dans la mesure où elles y trouvent leur intérêt. L'assiette et le taux de ces redevances sont fixés sur avis conforme du comité de bassin ".

Les agences perçoivent, pour l'essentiel, deux types de redevances :

- une redevance " pollution ", assise sur la pollution émise par chaque pollueur. Pour la pollution domestique et la pollution industrielle collectée dans les réseaux d'eaux usées domestiques, les redevances sont calculées à partir d'une estimation des quantités de polluants émises par habitant ;

- une redevance " prélèvement ", assise pour chaque utilisateur sur la quantité d'eau qu'il prélève et qu'il consomme, et qui apparaît davantage comme la contrepartie d'un service rendu.

Le décret du 14 septembre 1966 prévoyait également une redevance pour modification du régime des eaux, mais celle-ci n'a jamais vu le jour.

Sont actuellement soumis aux redevances :

- les établissements industriels ayant leurs propres dispositifs de rejet ;

- les ménages, ainsi que les établissements industriels dont les rejets sont collectés dans les réseaux d'eaux usées domestiques.

Les agriculteurs bénéficient d'un régime particulier, en contradiction avec le principe pollueur-payeur (voir infra).

Les agences disposent de deux autres sources de revenus, beaucoup plus limitées : leurs réserves en trésorerie et les remboursements des prêts et avances.

Les moyens ainsi dégagés sont particulièrement importants : ils avoisinent, pour le VIIprogramme (1997-2001), les 10 milliards de francs par an.

ÉVOLUTION DES REDEVANCES, DES TRAVAUX AIDÉS
ET DES AIDES DES AGENCES DE L'EAU

(en milliards de francs)

IIIe programme (1977-1981)

IVe programme (1982-1986)

Ve programme (1987-1991)

VIe programme (1992-1996)

VIIe programme (1997-2001)

Redevances

14,3

14,6

21,1

40,1

50,9

Aides

14,3

16,3

22,3

40,7

57,0

Travaux aidés

35,8

35,8

52,2

93,6

105,0

Source : Direction de l'eau, in : Rapport du Commissariat général du Plan sur l'" évaluation du dispositif des agences de l'eau ", page 40.

Comme le montre ce tableau, le VIe programme s'est traduit par une très forte augmentation des redevances, liée, en particulier, à la montée des normes et des réglementations d'origine communautaire et donc à une croissance des investissements en matière de traitement des eaux usées.

Deux textes importants ont été adoptés, en effet, au cours de l'élaboration du VIe programme :

- la directive 91/271/CEE du 21 mai 1991 relative au traitement des eaux urbaines résiduaires, qui impose, comme on l'a vu, la construction et la rénovation de stations d'épuration et d'ouvrages de collecte pour toutes les collectivités locales supérieures à 2.000 équivalents-habitants ;

- la directive 91/676/CEE du 12 décembre 1991 relative à la protection des eaux contre la pollution par les nitrates d'origine agricole, qui a donné lieu à la mise en place d'un " programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole " (PMPOA) à l'attention des éleveurs (59).

Le total des besoins nécessaires au respect des directives européennes s'élèverait à plus de 100 milliards de francs sur la durée du VIIprogramme d'intervention, qui est entré en vigueur le 1er janvier 1997 avec pour objectifs prioritaires :

- la poursuite des actions précédemment entreprises pour appliquer les engagements européens de la France (eau potable, assainissement) ;

- le développement de l'aide technique et financière nécessaire au bon fonctionnement des stations d'épuration ;

- le renforcement des efforts en faveur du secteur rural par des actions concertées visant à améliorer l'assainissement et la qualité bactériologique de l'eau distribuée, à réduire la pollution diffuse due aux nitrates et aux produits phytosanitaires (élevages, grandes cultures), à mettre en conformité les périmètres de protection des captages d'eau potable, à améliorer la qualité du milieu naturel aquatique et à soutenir l'assainissement autonome.

A l'occasion de l'élaboration du VIIe programme, il a été décidé que les agences de l'eau contribueraient, dès 1997, à la mise en oeuvre du programme décennal de prévention des inondations, sous la forme d'un fonds de concours de 110 millions de francs par an abondant le budget du ministère de l'environnement. Ce fonds finance la restauration des rivières et des zones naturelles d'expansion des crues.

Depuis leur création et jusqu'en 1996, les agences ont alloué des aides pour un montant global de 89 milliards de francs. Cet apport a servi au financement de travaux pour l'amélioration de la qualité des eaux à hauteur de 72 milliards de francs, et pour l'aménagement des ressources en eau pour 17 milliards de francs.

La décentralisation et la programmation de la politique de l'eau, ainsi que le poids des comités de bassin, ont été renforcés par la loi du 3 janvier 1992 qui a prévu la mise en place, dans un délai de cinq ans :

- d'un schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) au niveau de chaque bassin ou groupement de bassins (article 3), afin de fixer, pour quinze ans environ, " les orientations fondamentales d'une gestion équilibrée de la ressource en eau ". Les six SDAGE ont été élaborés par les comités de bassin, puis adoptés définitivement et approuvés par les préfets coordonnateurs de bassin au deuxième semestre de 1996 ;

- d'un schéma d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE), qui fixe les objectifs dans un groupement de sous-bassins ou dans un sous-bassin correspondant à une unité hydrographique ou à un système aquifère. Le SAGE est soumis à l'avis des conseils généraux, des conseils régionaux et du comité de bassin, et approuvé par arrêté préfectoral. Pour faciliter la réalisation de ces objectifs, l'article 7 de la loi du 3 janvier 1992 prévoit que les collectivités locales intéressées et leurs groupements exerçant des compétences en ce qui concerne les travaux, ouvrages ou installations présentant un caractère d'intérêt général ou d'urgence, dans le cadre du SAGE, s'il existe, peuvent s'associer dans un établissement public appelé " communauté locale de l'eau ".

La politique de l'eau doit bien sûr beaucoup aux agences qui sont souvent citées, à l'étranger, comme un exemple en la matière (60).

·   Ce dispositif constitue d'abord un instrument économique de politique de l'environnement dans un pays qui a souvent privilégié les outils réglementaires.

·   La perception des redevances a contribué à la pérennité du financement d'une politique de l'eau par ailleurs fortement structurée par la programmation quinquennale.

·   Enfin, le Commissariat général du Plan souligne, dans son rapport, que cette catégorie d'établissement public a permis " une coordination à la fois plus proche des contraintes de terrain et des contraintes écologiques et offrant un lieu de rencontre de tous les acteurs publics et privés concernés par l'eau " (61). Dès lors, le caractère collégial de la gestion des agences a sans doute permis d'éviter bien des conflits : " L'agence est le lieu où se construit une politique de l'eau consensuelle et globale au niveau du bassin " (62).

Pourtant, le jugement porté sur le fonctionnement des agences par le Commissariat général du Plan, qui recoupe largement celui de la Cour des comptes, est sévère.

·   Si l'efficacité consiste à réaliser une action au moindre coût, alors, selon le Commissariat général du Plan, tel n'est pas l'objectif des agences. Leur préoccupation est de réaliser les programmes sans s'interroger sur les moyens : " il suffirait, en somme, de savoir que l'on va dans la bonne direction ".

·   Ce n'est pas le principe pollueur-payeur, mais le principe pollueur-sociétaire, qui structure le dispositif. Le système des agences de l'eau apparaît en effet, tant pour le Commissariat général du Plan que pour la Cour des comptes, comme une mutuelle à deux niveaux :

- au premier niveau, la seule fonction des redevances semble être de collecter des recettes pour équilibrer un programme pluriannuel d'intervention, ce qui explique que leur assiette soit large et leurs taux peu élevés. Elles n'ont pas de portée incitative sur le plan économique ou environnemental. Elles apparaissent d'abord comme des cotisations qui ouvrent droit à des subventions ou à des prêts ;

- au second niveau, chaque catégorie d'assujetti fonctionne comme une sous-mutuelle. Entre acteurs d'une même catégorie, chacun cherche à " récupérer sa mise " : les intervenants parlent d'ailleurs de " juste retour ".

Le tableau ci-après est significatif : il témoigne de cette logique de mutualisation et montre, dans le même temps, que tous les sociétaires ne sont pas placés sur un pied d'égalité.

TAUX DE RETOUR POUR LE VIe PROGRAMME

Redevances

Aides

Ratio aides/redevances

Collectivités

29.645

35.232

119 %

Industries

6.684

7.317

109 %

Agriculture

245

1.076

439 %

Total

36.574

43.625

119 %

Source : Commissariat général du Plan, " évaluation du dispositif des agences de l'eau ", page 103.

·   Le régime réservé aux agriculteurs, que ce tableau met en lumière, suffit d'ailleurs à démontrer à quel point le système des redevances est éloigné du principe pollueur-payeur.

On observera tout d'abord que l'agriculture est un important utilisateur d'eau : environ 5 milliards de m3 par an, soit 12% de la consommation nationale et 30% hors nucléaire, essentiellement en eaux superficielles. En particulier, 3 milliards de m3 seraient consacrés à l'irrigation.

Pourtant, certains irrigants sont encore exonérés de redevance prélèvement.

La redevance pollution, quant à elle, laisse de côté la pollution par les nitrates engendrée par les grandes cultures. Elle ne s'applique qu'aux élevages, mais depuis une date récente : cette évolution passe en effet par le programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole (PMPOA) conclu en octobre 1993. Le dispositif prévoit une aide (à la charge de l'Etat, des collectivités territoriales et des agences de l'eau) aux investissements jugés nécessaires à une maîtrise des pollutions d'origine agricole, à travers une prime d'épuration qui vient en diminution de la redevance brute payée par les agriculteurs. Toutefois, la perception de la redevance nette sera progressive, son intégralité ne devant être perçue qu'en 2002. Surtout, un protocole, conclu le 8 octobre 1993 entre les ministères de l'agriculture et de l'environnement et la profession (entériné par un nouvel arrêté du 22 décembre 1994), a accordé un moratoire aux éleveurs jusqu'en 1998.

En théorie, les éleveurs qui n'ont pas engagé de programme de dépollution devraient donc être assujettis à la redevance à compter de l'année prochaine.

Le rapport du Commissariat général du Plan conclut qu'" en définitive, les agriculteurs reçoivent aujourd'hui des aides pour mettre leurs élevages en conformité, aides qui sont financées pour un tiers par les agences de l'eau, ce qui leur permettra ensuite, en vertu du principe non-pollueur non-payeur, de ne pas avoir à acquitter de redevance pollution " (63).

RÉPARTITION DES REDEVANCES PAR NATURE
POUR LE VIème PROGRAMME

Redevance pollution

Redevance ressource

Total

Part de la redevance pollution

Collectivités

24.899

4.746

29.645

84 %

Industries

4.998

1.686

6.684

75 %

Agriculture

0

245

245

0 %

Total

29.897

6.677

36.574

82 %

Source : Commissariat général du Plan, " évaluation du dispositif des agences de l'eau ", page 104.

En définitive, le Commissariat général du Plan montre que les villes payent pour les campagnes et de façon générale, les particuliers pour les industriels, et ces deux catégories pour les agriculteurs. La Cour des comptes va jusqu'à évoquer " une politique délibérée " visant à ne pas trop augmenter les charges des industriels et des agriculteurs.

·   Enfin, la Cour des comptes et le Commissariat général du Plan abordent la question, désormais bien connue, de l'inconstitutionnalité du système des redevances.

Dans un rapport d'information présenté en 1990 (n° 1358) sur le financement à long terme de la politique de l'eau, notre collègue M. Yves Tavernier avait déjà souligné que la constitutionnalité de l'article 14 de la loi du 16 décembre 1964 était tout à fait contestable, dans la mesure où l'article 34 de la Constitution dispose que c'est à la loi qu'il revient de fixer les règles concernant " l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures ".

La conclusion du Commissariat général du Plan est donc assez critique : " d'un côté, le dispositif des agences de l'eau n'apparaît guère organisé pour parvenir à ses objectifs au moindre coût. De l'autre, les mêmes agences remplissent, dans la politique de l'eau, d'indiscutables fonctions de dialogue et de facilitation " (64). Dès lors, la question qu'il faut se poser est effectivement la suivante : dans quel sens faut-il les réorienter ?

Les propositions que votre Rapporteur sera amené à formuler reposeront sur le postulat suivant : le dispositif des agences de l'eau est utile et doit être préservé, mais il a vieilli et il est temps, aujourd'hui, de revoir son régime juridique et de le réorienter dans un sens plus conforme au principe pollueur-payeur et au principe d'égalité.

ORIENTATION N° 1 :

VERS UNE TARIFICATION DE L'EAU PLUS JUSTE

ET PLUS RESPONSABILISANTE

INDIVIDUALISER LA MESURE DE LA CONSOMMATION

Le mode de tarification de l'eau, en France, n'est pas satisfaisant. Deux objectifs doivent guider la réforme dans ce domaine : rendre le système plus incitatif d'une part, et plus juste d'autre part.

Aucun de ces deux objectifs ne pourra être atteint si les usagers résidant en immeubles collectifs n'ont pas les moyens de connaître leur volume de consommation et de souscrire leur propre contrat de fourniture d'eau. Par définition, ceci suppose qu'ils disposent de compteurs individuels, ce qui n'est pas toujours le cas.

Tous les rapports consacrés à la gestion de l'eau recommandent l'installation de compteurs individuels qui ont pour effet de faire payer à chacun ce qu'il consomme et de surcroît, d'inciter à économiser, ou tout au moins à ne pas gaspiller, une ressource qui ne peut plus être considérée comme gratuite et non limitée (65).

Il est temps, aujourd'hui, d'aborder le problème de façon plus directive.

·   Pour les immeubles à construire, les compteurs individuels peuvent être rendus obligatoires. Cette disposition ne pose pas de problème particulier : il s'agirait d'une nouvelle spécification du code de la construction et de l'habitation (voir les articles R. 111 et suivants).

·   Pour les immeubles existants, il conviendrait, au minimum, de modifier les règles relatives à la majorité requise pour décider de l'installation des compteurs individuels. Actuellement, en l'absence d'obligation prévue par la loi, cette installation entre dans la catégorie des " travaux d'amélioration ", soumis à la règle dite de la double majorité : majorité des membres du syndicat représentant au moins les 2/3 des voix (ou, à défaut d'approbation dans ces conditions lors d'une première assemblée générale, majorité des membres du syndicat représentant les 2/3 des voix des copropriétaires présents ou représentés lors d'une nouvelle assemblée générale). Toutefois, conformément à l'article 25 de la loi du 10 juillet 1965 modifiée fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, un certain nombre de travaux ne sont soumis qu'à la majorité des voix des copropriétaires : il s'agit, en particulier, des travaux destinés à économiser l'énergie. Les travaux destinés à économiser la ressource en eau et notamment l'installation de compteurs individuels pourraient être également visés par cette disposition.

On observera par ailleurs qu'en application d'une jurisprudence récente du Conseil d'Etat, il est désormais établi que dès lors que des compteurs individuels existent, l'exploitant ne peut refuser de souscrire des abonnements individuels (66).

graphique
  14. Recommandation : rendre obligatoires les compteurs d'eau individuels dans les immeubles à construire. Soumettre leur installation à la simple majorité des voix des copropriétaires dans les immeubles existants.

CHANGER LE MODE DE TARIFICATION

Le même souci d'incitation à une consommation raisonnable conjugué avec une volonté de justice sociale doit par ailleurs conduire à une réforme du mode de tarification de l'eau, avec deux orientations :

- il serait souhaitable que la tarification de l'eau ne soit pas proportionnelle mais progressive, même de façon légère, en fonction de la consommation. Cette mesure pénaliserait les utilisations importantes, voire excessives, et inciterait à des comportements plus mesurés. Bien sûr, il conviendra de tenir compte du nombre de personnes résidant dans chaque logement ;

- la nécessité de maintenir quoiqu'il arrive un approvisionnement minimum en eau pour les familles en difficulté justifierait la mise en place d'une sorte de franchise, en rendant gratuits les premiers litres d'eau consommés.

Cette mesure a été instaurée en Belgique (région flamande) : en application de l'article 34 du décret du 20 décembre 1996 modifiant la loi sur l'eau du 14 août 1933, tous les distributeurs d'eau de cette région sont tenus " de livrer gratuitement à partir du 1er janvier 1997 à chaque ménage abonné qui est raccordé à leur réseau public d'eau une quantité annuelle d'eau de 15 m3 par personne domiciliée le 1er janvier de l'année en question à l'adresse de raccordement au réseau public d'eau ". A titre de comparaison, on précisera que la consommation d'eau potable est, en France, de l'ordre de 55 à 60 m3 par an et par habitant. Le décret précité, qui prévoit que les données relatives au nombre de personnes par logement doivent être communiquées aux distributeurs par les communes, et le cas échéant de façon spontanée par les ménages abonnés eux-mêmes, est donc d'application simple.

Votre Rapporteur souhaite que ces deux orientations soient mises en oeuvre simultanément, car elles permettent de concilier une tarification économique et incitative de l'eau avec l'équité et la justice sociale.

graphique
  15. Recommandation : mettre en place une tarification progressive de l'eau, accompagnée d'une gratuité pour les 15 premiers m3 d'eau potable livrés chaque année par personne domiciliée à l'adresse de raccordement.

ORIENTATION N° 2 :

RÉNOVER LE DISPOSITIF DES AGENCES DE L'EAU

LÉGITIMER LES REDEVANCES

La politique de l'eau est appelée à connaître, dans les années qui viennent, des développements importants. Ce mouvement est déjà en cours et il ne fait aucun doute que les agences de l'eau joueront dans ce cadre un rôle essentiel.

Pourtant, si le dispositif des agences de l'eau doit être préservé, le temps est venu de le rénover pour lui permettre de faire face dans de bonnes conditions à ces nouveaux défis.

Cette orientation passe par une clarification du régime des redevances de bassin.

En 1982, le Conseil constitutionnel, saisi par le Premier ministre d'une demande tendant à l'appréciation de la nature juridique de certaines dispositions de la loi du 16 décembre 1964, a considéré que ces redevances n'étaient ni des taxes parafiscales, ni des rémunérations pour services rendus : " elles doivent être rangées parmi les impositions de toute nature dont l'article 34 de la Constitution réserve au législateur le soin de fixer les règles concernant l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement " (67).

Le Conseil d'Etat a par la suite repris cette position (68).

De nombreux parlementaires ont, depuis, réclamé une remise à plat de ce régime dont la constitutionnalité est effectivement contestable. La Cour des comptes et le Commissariat général du Plan se sont également prononcé dans ce sens dans leurs rapports sur les agences de l'eau.

Une " régularisation " des redevances implique une modification de l'article 14 de la loi du 16 décembre 1964, afin que les modalités de leur fixation figurent dans la loi.

Pour autant, il convient de préserver, et même de renforcer, la possibilité de moduler l'assiette et le taux des redevances en fonction des spécificités des bassins, voire des sous-bassins.

Tout l'enjeu réside dans la façon de concilier ces deux objectifs apparemment contradictoires. Le Parlement doit réinvestir le champ de sa compétence. Mais les acteurs locaux doivent conserver une partie de leur autonomie. Dès lors, est-il possible de confier à un établissement public (les agences de l'eau) le soin de fixer le régime d'un impôt (les redevances) et jusqu'à quel point cette délégation est-elle souhaitable ?

Le Conseil constitutionnel a indiqué, dans une décision de 1987, que la loi ne doit pas nécessairement fixer elle-même le taux de chaque impôt. Mais " il appartient au législateur de déterminer les limites à l'intérieur desquelles un établissement public à caractère administratif est habilité à arrêter le taux d'une imposition établie en vue de pourvoir à ses dépenses " (69).

Dans le cas des agences de l'eau, ces limites sont manifestement dépassées :

- leurs conseils d'administration fixent l'assiette et le taux des redevances ;

- les modalités d'application et notamment la désignation des assujettis sont renvoyées à un décret.

Votre Rapporteur demande que le montant exact des redevances soit certes arrêté par les conseils d'administration des agences, mais dans des limites votées par le Parlement. Sur ce sujet, on ne peut que se féliciter que le Gouvernement se soit déjà engagé, le 20 mai dernier, à mettre en oeuvre cette intervention du Parlement et on peut admettre, le cas échéant, que la procédure n'intervienne que tous les cinq ans, dans le cadre d'une approbation quinquennale du programme des agences. Néanmoins, le renvoi aux agences ne doit pas être excessif : les fourchettes qui seront fixées par le législateur devront être étroites. De plus, il ne semble pas souhaitable d'attendre 2001 et le début du VIIIème programme pour mettre en oeuvre cette réforme.

Il reviendra au législateur d'apprécier s'il convient d'aller plus loin. Des dispositions pourraient utilement figurer dans la loi afin d'assurer une meilleure information des responsables des agences et des comités de bassin quant à l'impact de leurs décisions sur la facture d'eau acquittée par les consommateurs. De même, il pourrait être opportun de préciser le mode de calcul des redevances et, en particulier, de la redevance sur les pollutions domestiques, qui est non seulement complexe mais injuste. On rappellera, par exemple, qu'actuellement, les communes de moins de 400 habitants n'y sont pas assujetties. Finalement, on peut se demander si la mise en place d'une redevance sur les pollutions domestiques proportionnelle à la consommation ne serait pas la meilleure solution. La redevance de prélèvement devrait quant à elle être réexaminée, en vue, notamment, de contenir l'extension des zones irriguées, tout en tenant compte des nécessités locales : il n'est pas admissible que certains irrigants puissent être encore totalement exonérés de redevance prélèvement.

Cela étant, l'essentiel sera que le législateur détermine les grandes orientations qui permettront de rendre le système équitable entre les différentes catégories d'assujettis, d'une part, et efficace, d'autre part, grâce à une plus grande différenciation géographique des redevances. Ces objectifs peuvent être atteints en inscrivant dans le nouvel article de loi les deux principes suivants :

le principe pollueur-payeur. Cette affirmation rendra nécessaire l'assujettissement des irrigants aux redevances de prélèvement, et des agriculteurs en général aux redevances de pollution, le cas échéant de façon progressive et modulée : leur participation aux programmes d'amélioration et d'aménagement de la ressource serait parfaitement justifiée. De même, le principe pollueur-payeur imposera de rééquilibrer le mode de calcul de la redevance pollution qui, notamment par le jeu des coefficients de collecte, favorise les industriels au détriment des collectivités locales et des usagers domestiques ;

un avis conforme des communautés locales de l'eau, lorsque celles-ci ont été créées sur le fondement de l'article 7 de la loi du 3 janvier 1992, sur les décisions relatives aux redevances, prises, dans leur zone de compétence, par les conseils d'administration des agences. Cet avis conforme constituera un encouragement à la création de ces nouveaux établissements publics, qui n'ont toujours pas été mis en place, et surtout favorisera une différenciation plus fine des redevances, à un niveau inférieur au bassin. Cette orientation est souhaitable pour que les redevances reflètent davantage les conditions locales d'exploitation de la ressource.

graphique
  16. Proposition : confier au législateur le soin d'encadrer, dans des limites assez strictes, le taux des redevances perçues par les agences de l'eau, et de fixer les règles relatives à leur assiette et à leur recouvrement, le cas échéant dans le cadre d'une approbation quinquennale des programmes d'intervention. Inscrire dans le nouvel article de loi le principe pollueur-payeur, de façon à assujettir l'ensemble des irrigants aux redevances de prélèvement, et les agriculteurs en général aux redevances de pollution. Prévoir un avis conforme des communautés locales de l'eau, lorsque celles-ci ont été créées, sur les décisions relatives aux redevances, prises, dans leur zone de compétence, par les conseils d'administration des agences.

INSTITUER UNE REDEVANCE DE PRÉVENTION DES INONDATIONS ET UNE TAXE SUR LES GRANULATS ALLUVIONNAIRES

La ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement a annoncé, en Conseil des ministres, le 20 mai dernier, qu'une extension du principe pollueur-payeur à la prévention des inondations était étudiée.

Une taxe ou une redevance pourrait être mise en place. Quatre faits générateurs seraient retenus :

- l'extraction de matériaux dans le lit majeur des cours d'eau et dans les nappes alluviales ;

- la modification des conditions du ruissellement et en particulier l'imperméabilisation de surfaces importantes ;

- la modification du régime hydraulique ;

- la réduction des zones naturellement inondables et des zones humides.

Le produit de cette taxe ou redevance pourrait s'élever à 290 millions de francs et permettrait aux agences de participer au financement de la restauration des cours d'eau et des milieux aquatiques. A terme, le fonds de concours auquel contribuent les agences, depuis 1997, à hauteur de 110 millions de francs par an, pour la mise en oeuvre du programme de prévention des inondations, sera supprimé.

Ces orientations sont très satisfaisantes mais votre Rapporteur formulera plusieurs observations.

Le calendrier annoncé est là encore assez lent et il conviendrait d'accélérer la mise en oeuvre de cette réforme.

On rappellera que l'existence d'une redevance sur la modification du régime des eaux était déjà prévue par le décret du 14 septembre 1966, mais aucune disposition réglementaire n'a jamais défini la procédure nécessaire pour en fixer l'assiette. Cette carence a d'ailleurs entraîné l'annulation par le Conseil d'Etat, dans un arrêt du 2 mars 1994, des " redevances granulats " mises en place par certaines agences. Pourtant, l'extraction de granulats peut avoir des effets très perturbants dans certaines vallées alluviales (problèmes de protection des aquifères, disparition de milieux sensibles, dégradation des lits des cours d'eau, etc.), et justifier une intervention pour régulariser des cours d'eau. Le Conseil général des mines a recommandé, dans un avis rendu en novembre dernier, que la création de cette redevance intervienne " à très bref délai ".

Le Conseil général des mines a également suggéré la mise en place d'une taxe nettement plus importante sur ces matériaux (à terme : 10 francs à 20 francs par tonne), au niveau des régions, " dans un délai n'excédant pas un an ". Cette proposition ne doit pas être oubliée, même s'il est préférable que la création de cette taxe soit facultative, sur décision des conseils régionaux.

graphique
  17. Proposition : instituer une redevance de prévention des inondations, et autoriser les conseils régionaux à percevoir une taxe supplémentaire sur l'extraction de matériaux dans le lit des cours d'eau et dans les nappes alluviales.

FACILITER LES TRAVAUX SUR LES BERGES DES COURS D'EAU

Certains travaux effectués sur les berges des cours d'eau, par les collectivités locales notamment, se heurtent par ailleurs à une difficulté portant sur l'accès au Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA).

Le régime de l'accès au FCTVA est dominé par plusieurs principes fondamentaux dont l'un est relatif à la patrimonialité des opérations : ne sont éligibles que les dépenses d'investissement ayant supporté la TVA et réalisées par les collectivités propriétaires (70). Dès lors, les dépenses réalisées sur des immobilisations dont elles n'ont pas la propriété sont inéligibles.

Cette règle pose un problème particulier en ce qui concerne les travaux effectués sur les berges des cours d'eau : la défaillance des propriétaires, qui est fréquente, peut obliger les collectivités locales, notamment pour des raisons de sécurité, à se substituer à eux : dans cette hypothèse, elles sont assujetties à la TVA sans possibilité de récupération.

Cette situation, préjudiciable à l'entretien des berges des cours d'eau, est désormais bien connue : la Commission des finances de l'Assemblée nationale a adopté à plusieurs reprises des amendements destinés à y mettre fin (71).

Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 1998, le secrétaire d'état au budget avait indiqué qu'une réflexion allait être conduite sur les relations entre l'Etat et les collectivités locales et qu'à cette occasion, " le problème des berges de rivière pourra être examiné ". Le Rapporteur général du budget avait souhaité que le Gouvernement fasse " des propositions plus positives en 1998 " (72).

Votre Rapporteur considère qu'il s'agit effectivement d'un problème réel et sérieux.

La dérogation aux règles du FCTVA ne devra être mise en oeuvre que si les propriétaires sont réellement défaillants, car il ne s'agit pas de les décharger de leurs obligations.

En revanche, le dispositif devra concerner les cours d'eau domaniaux et non domaniaux, puisque le propriétaire défaillant est parfois l'Etat lui-même.

Le coût de cette mesure serait de l'ordre de 80 millions de francs.

A terme, on peut néanmoins se demander si cette réforme ne devra pas être élargie à l'ensemble des investissements exposés sur des biens appartenant à des tiers non bénéficiaires, en pensant en particulier aux travaux des terrains qui menacent de s'affaisser en zone de montagne ou sur le littoral.

graphique
  18. Proposition : rendre éligibles au Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) les investissements réalisés par un bénéficiaire du fonds dans le cadre de travaux destinés à l'aménagement hydraulique d'un cours d'eau, domanial ou non domanial, dès lors qu'ils présentent un caractère d'urgence et que les propriétaires se révèlent défaillants. A terme, étendre cette mesure à l'ensemble des investissements exposés dans les mêmes conditions sur des biens appartenant à des tiers non bénéficiaires.

DÉMOCRATISER LA COMPOSITION DES AGENCES ET DES COMITÉS

Il convient, enfin, de s'interroger sur la composition des conseils d'administration des agences de l'eau et des comités de bassin qui, comme on l'a vu, associent :

- des représentants des collectivités locales ;

- des représentants des usagers ;

- des personnes compétentes ;

- des représentants de l'Etat ;

- des représentants des milieux socioprofessionnels.

Le Gouvernement a récemment annoncé que des représentants des associations de protection de la nature et des associations de consommateurs, ainsi que des éleveurs, dès lors qu'ils seront assujettis aux redevances, pourront être présents dans les conseils d'administration des agences.

Votre Rapporteur approuve cette orientation. Néanmoins, au regard de l'importance financière des décisions prises par les agences et par les comités, et en vertu du principe selon lequel l'impôt est normalement levé par les élus, il serait également souhaitable de renforcer la place de ces derniers, qui devrait être prépondérante au sein des conseils. On pensera, en particulier, aux agglomérations urbaines, qui sont sous-représentées, comme l'a observé la Cour des comptes. Le cas échéant, le nombre des représentants de l'Etat pourrait également être augmenté. En revanche, celui des milieux socio-économiques devra rester constant.

graphique
  19. Recommandation : renforcer la place des associations de protection de la nature et de consommateurs, ainsi que des élus, dans les conseils d'administration des agences de l'eau et dans les comités de bassin. Accroître, en particulier, le nombre des représentants des agglomérations urbaines.

C.- LES DÉCHETS : FAVORISER LA PRÉVENTION,

LA COLLECTE SÉLECTIVE ET LA VALORISATION

Si la plus grosse part de la dépense nationale consacrée à la protection de l'environnement a trait à la gestion des eaux usées, c'est pour la collecte et le traitement des déchets que l'augmentation est la plus forte : +10% par an, en moyenne, depuis 1990.

D'une part, la hausse des quantités de déchets, qui traduit en partie une évolution des styles et des modes de vie, est régulière. L'ADEME évalue aujourd'hui la quantité annuelle de déchets ménagers et municipaux par habitant à 400 kg environ, contre 340 kg en 1989 (73).

D'autre part, la réglementation s'est considérablement renforcée, sous l'effet d'un durcissement des normes communautaires. Les directives sur l'incinération, la mise en décharge ou le recyclage des emballages ont imposé des objectifs ambitieux, transposés en droit national notamment par la loi du 13 juillet 1992, modifiée par la loi du 2 février 1995. La mise en place de la taxe sur le traitement et le stockage des déchets a illustré la volonté des pouvoirs publics d'articuler la nouvelle politique de valorisation avec une utilisation de l'instrument fiscal.

L'enjeu est majeur, puisque les prévisions relatives aux investissements nécessaires pour atteindre l'objectif " zéro décharge en 2002 " (hors déchets ultimes) aboutissent à des estimations de l'ordre de 60 milliards de francs.

1.- Les déchets et les valorisations

La notion de " déchet " recouvre en fait des réalités diverses.

Les déchets des ménages, au sens strict, recouvrent les ordures ménagères stricto sensu, et les encombrants ménagers.

Au sens traditionnel néanmoins, les ordures ménagères englobent l'ensemble des ordures collectées régulièrement par les services municipaux, y compris les déchets industriels banals (DIB) collectés avec les déchets des ménages (déchets des commerces, des bureaux ou des administrations) (74). Mais la plus grande part des déchets industriels banals est collectée de façon spécifique.

Les déchets de la collectivité comprennent les déchets verts, les déchets de voirie et des marchés, les boues des stations d'épuration et les boues de curage des égouts.

Les déchets ménagers et assimilés représentent la somme des déchets de la collectivité, des déchets des ménages et des déchets industriels banals.

DÉFINITION DES DÉCHETS MÉNAGERS ET ASSIMILÉS

Déchets de la collectivité
22,5 Mt

Déchets des ménages
24,5 Mt

DIB
100 Mt *

Déchets verts
3 Mt

Ordures ménagères

Déchets de voirie
et des marchés
0,5 Mt

Encombrants

(sens strict)
20 Mt

DIB collectés avec les déchets

DIB collectés de manière

Boues des stations d'épuration
9 Mt

ménagers
4,5 Mt

Fraction concernée

Fraction collectée

des ménages
5 Mt **

spécifique
95 Mt

Boues de curage des égouts

par la collecte sélective 1,5 Mt ***

par les services municipaux 18,5 Mt

10 Mt

Ordures ménagères (sens traditionnel) : 25 Mt

Déchets municipaux : 52 Mt

Déchets ménagers et assimilés (selon la loi de 1992) : 147 Mt

* Déchets industriels banals : une estimation de la production nationale annuelle de DIB a été effectuée récemment par l'ADEME. Verre, métaux, plastique, caoutchouc, textiles, papiers, cartons, bois, cuir, mélange : 46 Mt, déchets de chantier du bâtiment : 9 Mt, déchets organiques des industries agricoles et agro-alimentaires : 43 Mt. Soit, au total, environ 100 millions de tonnes.

** La part des déchets non strictement ménagers, en provenance des commerces, bureaux et petites industries, qui est collectée avec les ordures ménagères n'est pas connue avec précision. Elle a été estimée par l'ADEME à 5 Mt.

*** La fraction concernée par les collectes sélectives a été estimée à partir des chiffres communiqués par les différents organismes chargés de la collecte (verre, papiers-cartons, métaux - non compris les métaux récupérés en cours de traitement - et plastiques).

Source : ADEME.

Au-delà des déchets ménagers et assimilés, on distingue d'autres catégories de déchets, qui relèvent néanmoins d'une problématique différente.

Ainsi, les déchets industriels spéciaux (DIS), qui contiennent des éléments polluants en proportion plus ou moins grande et nécessitent des traitements particuliers, doivent être pris en charge, en principe, par ceux qui les produisent. L'IFEN estimait leur quantité annuelle à 7 millions de tonnes au début des années 90, avec une tendance à la baisse qui aurait pour corollaire une augmentation de leur toxicité.

Les déchets inertes (déblais, gravats, etc.), parfois appelés déchets de chantier, représenteraient plus de 100 millions de tonnes par an.

Les déchets et sous-produits de l'agriculture et des industries agro-alimentaires représenteraient 400 millions de tonnes, la plus grande part étant composée par les déjections des élevages.

Au total, la France produirait donc plus de 600 millions de tonnes de déchets chaque année, soit 11 tonnes par habitant.

Une autre notion doit être définie : celle du " déchet ultime ". Au sens de la loi du 13 juillet 1992, est ultime " un déchet, résultant ou non du traitement d'un déchet, qui n'est plus susceptible d'être traité dans les conditions techniques et économiques du moment, notamment par extraction de la part valorisable ou par réduction de son caractère polluant ou dangereux ". Cette définition confère à la notion de déchet ultime un caractère évolutif.

On distingue enfin, mais relevant cette fois d'une problématique radicalement différente, les déchets radioactifs, qui sont classés en trois catégories :

- catégorie A : déchets faiblement radioactifs et de durée de vie courte (disparition de la moitié de la radioactivité en moins de 30 ans) ;

- catégorie B : déchets de faible et moyenne activité contenant des radioéléments à durée de vie longue ;

- catégorie C : déchets de haute activité.

Alors que le stockage des déchets de catégorie A peut être réalisé en surface, celui des déchets des catégories B et C est envisagé en couches géologiques profondes. L'article premier de la loi du 30 décembre 1991 relative aux recherches sur la gestion des déchets radioactifs dispose néanmoins que " la gestion des déchets radioactifs à haute activité et à vie longue doit être assurée dans le respect de la protection de la nature, de l'environnement et de la santé, en prenant en considération les droits des générations futures ". Les déchets de catégorie C constituent, en fait, les seuls véritables déchets ultimes, dans la mesure où ils n'ont pas de valeur énergétique.

Le cycle des déchets ménagers et assimilés comporte, schématiquement, trois étapes :

- la première phase correspond à la fabrication du futur déchet. Les emballages représentent 40% des déchets ménagers ;

- la deuxième phase est celle de la collecte des déchets, qui peut être simple, sans opération intermédiaire de tri, ou sélective, avec un tri préalable par les usagers ;

- la troisième étape est celle du traitement des déchets.

Le traitement des déchets comprend différentes filières.

La première est celle de l'élimination, soit par stockage (61% des déchets, en masse, en 1993) (75), soit par incinération (9% des déchets).

La deuxième est la valorisation, qui peut faire intervenir plusieurs procédés :

- le recyclage, le réemploi ou la réutilisation (valorisation-matière) ;

- la valorisation énergétique, qui consiste à utiliser les calories contenues dans les déchets en récupérant l'énergie produite lors de l'incinération (25% des déchets) ;

- le compostage (valorisation biologique), ou " processus microbiologique de dégradation de la matière organique non synthétique en présence d'oxygène ", qui permet également une valorisation de déchets d'origines diverses : papiers, cartons et déchets verts (5% des déchets).

En ce qui concerne les déchets industriels spéciaux traités " en externe " par les entreprises, 46% seraient incinérés, 36% stockés en décharges de classe I, et 17% traités par des procédés physico-chimiques.

Des déchets radioactifs seraient présents sur 1.096 sites en France, avec des niveaux de radioactivité très différents, d'après l'inventaire publié en 1995 par l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs.

2.- La collecte et le traitement des déchets ménagers

Le service de la collecte et du traitement des déchets ménagers relève de la compétence normale et obligatoire des communes (ou des groupements de communes). Elles disposent, traditionnellement, de quatre possibilités de financement.

·   Le service peut être pris en charge, en premier lieu, par le budget général de la collectivité, et financé par des recettes fiscales ordinaires.

·   La collectivité peut instituer une taxe d'enlèvement des ordures ménagères (articles 1520 à 1526 du code général des impôts). Il s'agit d'une imposition additionnelle à la taxe foncière sur les propriétés bâties (76).

·   Les communes, les établissements publics de coopération intercommunale ou les établissements publics locaux qui assurent l'enlèvement des ordures, déchets et résidus peuvent également instituer une redevance dite " générale ", créée en 1974, calculée en fonction de l'importance du service rendu (article L. 2333-76 du code général des collectivités territoriales). L'institution de cette redevance entraîne la suppression de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (77).

·   Depuis le 1er janvier 1993, les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale qui n'ont pas institué la redevance générale précitée doivent créer une redevance dite " spéciale ", afin d'assurer l'élimination des déchets industriels banals (78). La redevance spéciale est calculée en fonction de l'importance du service rendu, mais elle peut toutefois être établie de façon forfaitaire pour l'élimination des petites quantités de déchets. Les personnes assujetties à la redevance spéciale peuvent être exonérées de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères.

On observera que le choix du mode de financement a des conséquences en matière de TVA. En effet, l'article 260 A du code général des impôts dispose que les collectivités locales, leurs groupements ou leurs établissements publics peuvent être assujettis à la TVA au titre des opérations relatives à l'enlèvement et au traitement des ordures, déchets et résidus, lorsque ce service donne lieu au paiement de la redevance pour service rendu. Dans cette hypothèse, les recettes procurées par la redevance peuvent être soumises à la TVA et les investissements correspondants ouvrir droit à déduction par la voie fiscale. A défaut, les opérations sont hors du champ de la TVA et la récupération de la taxe sur les investissements ne peut intervenir que par le biais du FCTVA (79).

3.- Un service public en mutation

La nature de ce service et, partant, son mode de gestion, ont été bouleversés par l'évolution récente de la réglementation. Sous l'impulsion des orientations communautaires (80), la législation nationale a mis l'accent, en particulier, sur la gestion des déchets et leur valorisation.

De ce point de vue, il n'est sans doute pas inutile de rappeler les quatre objectifs retenus par la loi du 13 juillet 1992 :

- prévenir ou réduire la production et la nocivité des déchets, notamment en agissant sur la fabrication et sur la distribution des produits ;

- organiser le transport des déchets et le limiter en distance et en volume ;

- valoriser les déchets par réemploi, recyclage ou toute autre action visant à obtenir à partir des déchets des matériaux réutilisables ou de l'énergie ;

- assurer l'information du public sur les effets pour l'environnement et la santé publique des opérations de production et d'élimination des déchets.

La loi du 13 juillet 1992 fixe, surtout, l'objectif national autour duquel la filière de la gestion des déchets devra se réorganiser : à compter du 1er juillet 2002, les installations d'élimination des déchets par stockage ne seront autorisées à accueillir que des déchets ultimes.

Dès lors, tous les déchets devront être valorisés " selon les techniques les plus appropriées du moment ".

Pour atteindre les objectifs fixés en matière de développement des filières de traitement (incinération et recyclage), la loi du 13 juillet 1992 prévoyait :

- un renforcement des conditions d'autorisation et de contrôle des sites de stockage ;

- la mise en place, avant le 4 février 1996, de plans départementaux ou interdépartementaux d'élimination des déchets, en concertation entre les élus et l'Etat. Ces plans, dont l'élaboration ne va pas sans mal puisque soixante-dix neuf d'entre eux seulement ont été adoptés définitivement à ce jour, sont destinés à recenser les quantités de déchets, à fixer les proportions qui devront être recyclées, valorisées, détruites et stockées à un horizon de 5 à 10 ans, à organiser le transport et à prévoir les installations nouvelles nécessaires à ces objectifs (81). En parallèle, des plans régionaux d'élimination des déchets industriels spéciaux devront être élaborés ;

- le financement d'une politique d'aide aux collectivités pour les nouvelles installations de collecte et de traitement des déchets.

Dès l'adoption de la loi, il était clair que l'objectif de suppression d'ici 2002 des décharges de déchets non ultimes allait déplacer le centre de gravité du service de la collecte vers le traitement. Cette nouvelle politique impliquait la mise en place d'instruments de financement.

·   L'un de ces instruments existait déjà depuis quelques semaines : le décret du 1er avril 1992, dit " décret emballages ", avait en effet pour objet d'organiser la récupération et la valorisation des emballages, qui représentent, comme on l'a vu, environ 40% des ordures ménagères (82).

Le mécanisme mis en place repose sur le principe suivant : tout producteur (83) ou importateur dont les produits sont commercialisés dans des emballages (84) ou, si le producteur ou l'importateur ne peuvent être identifiés, la personne responsable de la première mise sur le marché de ces produits, est tenue de contribuer ou de pourvoir à l'élimination de l'ensemble de ses déchets d'emballage. Ils disposent, pour cela, de deux possibilités :

- recourir, par contrat, pour l'élimination de leurs emballages usagés, à un organisme ou à une entreprise auquel ils versent une contribution. Cet organisme ou entreprise est agréé, pour un délai maximum de six ans renouvelable, par décision conjointe des ministres chargés de l'environnement, de l'économie, de l'industrie, de l'agriculture et des collectivités locales (85). L'agrément est assorti d'un cahier des charges dans lequel l'organisme ou l'entreprise mentionne ses objectifs, les contributions financières qu'il perçoit, et les versements que lui-même opère pour assurer aux collectivités territoriales le remboursement du surcoût susceptible de résulter pour celles-ci, en termes de fonctionnement, de la collecte séparative et du tri des déchets d'emballage ménager (" soutien à la tonne triée "). En 1996, le montant perçu par les organismes agréés au titre des cotisations versées par les 8.700 entreprises adhérentes était de 560 millions de francs ;

- pourvoir elles-mêmes à l'élimination des déchets résultant de l'abandon des emballages qu'elles utilisent, et dans cette hypothèse, établir un dispositif de consignation, ou organiser des emplacements spécifiquement destinés au dépôt des emballages.

Dans le cadre de la mission confiée à Eco-Emballages, un objectif de valorisation de 75% a été retenu pour cinq filières : verre, papier-carton, acier, aluminium et plastique, toujours à l'échéance 2002 (86).

·   Surtout, la loi du 13 juillet 1992 (article 8) a institué, jusqu'au 30 juin 2002, date prévue pour la limitation de la mise en décharge aux seuls déchets ultimes, un second instrument, à savoir une taxe sur le traitement et le stockage des déchets, dont l'assiette et le taux ont été modifiés par la loi du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement.

Cette taxe est acquittée par les exploitants de décharges de déchets ménagers et assimilés et par tout exploitant d'une installation collective d'élimination de déchets industriels spéciaux. Initialement fixé à 20 francs par tonne de déchets réceptionnés, son tarif a été modifié par la loi du 2 février 1995 et porté à 25 francs au 1er janvier 1995, 30 francs au 1er janvier 1996, 35 francs au 1er janvier 1997, et 40 francs à partir du 1er janvier 1998. Parallèlement, le montant minimal de la taxe a été abaissé de 5.000 francs à 2.000 francs par installation et par an. Le produit est affecté à l'ADEME et, en son sein, à un fonds de modernisation de la gestion des déchets (FMGD), qui est divisé en deux sections :

- la première concerne les déchets ménagers et assimilés. Le produit de la taxe est destiné, en particulier, à soutenir le développement de techniques de traitement innovantes, à financer une part des investissements et à aider les communes d'accueil des nouvelles installations ;

- la deuxième concerne les déchets industriels spéciaux. Le produit de la taxe sur les DIS, qui a été mise en place par la loi du 2 février 1995, est destiné à participer au financement du traitement et de la réhabilitation des sites pollués " orphelins ", lorsque cette aide est devenue nécessaire du fait de la défaillance de l'exploitant ou du détenteur.

4.- Des propositions pour 2002

Les évolutions de la réglementation sur la collecte et l'élimination des déchets ménagers et assimilés font apparaître deux orientations :

- réduire la production de déchets en responsabilisant les conditionneurs et les citoyens. Le dispositif mis en place par le décret du 1er avril 1992, ainsi que la création, par la loi du 13 juillet de la même année, de la redevance spéciale, qui applique le principe pollueur-payeur et la tarification pour service rendu, s'inscrivent dans cette perspective ;

- développer la valorisation " matière " et thermique des déchets.

Cette politique a déjà permis d'obtenir des résultats, même si les données manquent pour les mesurer avec précision. La production d'ordures ménagères continue d'augmenter (+2% par an entre 1993 et 1995). Mais on constate une progression de la part de l'incinération (avec récupération d'énergie) et surtout du tri sélectif. En revanche, la part relative de la mise en décharge diminue (-1,5% par an entre 1993 et 1995, contre -0,7% par an de 1989 à 1995).

ÉVOLUTION DU TRAITEMENT DES ORDURES MÉNAGÈRES DE 1989 À 1995

Type de traitement

Quantité d'ordures ménagères reçues (kt)

Pourcentage d'ordures ménagères reçues

1989

1993

1995

1989

1993

1995

Tri

0

15

385

0

0,1

1,7

Traitements biologiques

1.401

1.536

1.788

7,8

7,2

8,1

Traitements thermiques

7.566

9.777

10.369

42,3

45,8

46,8

Mise en décharge > 3.000 t/an

8.928

10.025

9.593

49,9

47

43,4

Total

17.895

21.353

22.135

100

100

100

Transit

1.810

3.886

3.787

10,1

18,2

17

Source : ADEME

Une évolution similaire peut être observée pour les déchets industriels banals.

L'IFEN et l'ADEME, enfin, signalent une évolution des priorités d'investissement vers la collecte sélective et le traitement, au détriment de l'eau potable.

Tout ceci traduit, sans aucun doute, un mouvement qui va dans le sens des objectifs fixés par la loi du 13 juillet 1992. Certes, le respect de la date butoir du 30 juin 2002 est loin d'être assuré. Mais plutôt que de plaider pour un report de l'échéance, il convient de mobiliser davantage de moyens pour faciliter la mise en oeuvre des objectifs initiaux, dont le bien fondé ne fait aucun doute (87).

A mi-chemin de l'échéance, il convenait cependant, sans aucun doute, de rééquilibrer les plans départementaux d'élimination des déchets ménagers et assimilés. La ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement a récemment indiqué ses orientations, dans une circulaire du 28 avril 1998 adressée aux préfets.

En premier lieu, l'échéance du 1er juillet 2002 est réaffirmée. Cela étant, le déchet ultime doit être entendu comme la fraction non " récupérable " des déchets, et non comme le seul résidu de l'incinération. La définition précise de cette notion sera fonction des conditions locales, mais il convient d'ores et déjà de restreindre progressivement la mise en décharge d'ordures brutes, c'est-à-dire de déchets n'ayant pas subi au minimum une extraction, par collectes séparatives ou par tris :

- des matériaux (verre, papiers-cartons, plastiques...) en vue de leur recyclage ;

- de leur fraction fermentescible ou biodégradable en vue de leur traitement biologique (compostage, méthanisation) ou de l'épandage agricole ;

- des produits usagés faisant l'objet d'une élimination dédiée (véhicules hors d'usage, huiles de vidange, vêtements, piles et accumulateurs...).

L'objectif est qu'à terme, la moitié de la production de déchets dont l'élimination est de la responsabilité des collectivités locales soit collectée pour récupérer des matériaux en vue de leur réutilisation, de leur recyclage, de leur traitement biologique ou de l'épandage agricole.

Il s'agit donc de favoriser le développement du tri sélectif et de la valorisation-matière et organique, en limitant le recours à l'incinération et au stockage (88).

Votre Rapporteur approuve cette orientation, tout en observant que la " condamnation " de l'incinération ne doit pas conduire à jeter un anathème systématique sur la valorisation énergétique, qui fait partie des quatre objectifs de la loi du 13 juillet 1992 et qui est indispensable à une gestion équilibrée des déchets, même s'il est exact que les projets devront désormais être mieux dimensionnés. Par ailleurs, ces principes se limiteront à des voeux s'ils ne sont pas accompagnés des moyens nécessaires à leur réalisation. Il s'agit, en particulier, d'infléchir la fiscalité sur les déchets, de façon à développer le principe pollueur-payeur et la réduction de la production des déchets à la source, et à soutenir davantage les investissements nécessaires, notamment en matière de tri sélectif et de valorisation.

ORIENTATION N° 1 :

RENFORCER L'APPLICATION DU PRINCIPE POLLUEUR-PAYEUR

ACCENTUER LA PRÉVENTION

La prévention et le principe de réduction à la source des atteintes à l'environnement doivent être considérés comme des priorités, car " le déchet le plus facile à éliminer est celui qui n'a pas été produit ". L'article premier de la loi du 13 juillet 1992 retient d'ailleurs, parmi ses objectifs, le fait " de prévenir ou réduire la production et la nocivité des déchets, notamment en agissant sur la fabrication et sur la distribution des produits ".

De plus, si l'utilisation de l'instrument fiscal dans le domaine des déchets conserve aujourd'hui une certaine légitimité, il convient de réfléchir à l'après 2002 : une internalisation progressive des coûts externes doit être recherchée, pour que la charge financière que représente le traitement d'un déchet soit incorporée au prix du produit acheté par le consommateur.

Ce double objectif était, précisément, celui qui sous-tendait la solution mise en oeuvre par le décret du 1er avril 1992. Ce mécanisme doit être revu de façon à accentuer les efforts demandés aux conditionneurs en matière de recyclage des emballages.

graphique
De ce point de vue, plusieurs orientations peuvent être défendues.

·   La première consisterait à augmenter, en amont, la contribution due aux sociétés agréées par les producteurs d'emballages, ou à la moduler en fonction du poids, de la nocivité et de la recyclabilité des produits.

·   La deuxième, qui est liée à la précédente, consisterait à accroître, en aval, les soutiens accordés par ces sociétés aux collectivités locales en fonction des quantités et de la nature des déchets triés, ces interventions n'étant pas actuellement suffisantes, semble-t-il, pour compenser le surcoût de la collecte sélective.

Des consultations sont en cours : elles devraient conduire, assez rapidement, avec un effet rétroactif au 1er janvier 1998, à une révision des conditions de soutien financier aux collectivités locales et, à terme, à une nouvelle structure tarifaire pour le barème des contributeurs (89).

Mais il serait également souhaitable de mettre l'accent sur la prévention, à travers des mécanismes incitatifs. Il conviendrait qu'une concertation s'engage entre les conditionneurs et les pouvoirs publics de façon à élaborer des contrats de progrès qui fixeraient des objectifs précis, non plus seulement de valorisation, mais également de réduction des quantités d'emballages utilisés.

graphique
  20. Recommandation : mettre en place des contrats de progrès au terme desquels les producteurs ou les importateurs dont les produits sont commercialisés dans des emballages s'engageraient sur des objectifs précis de prévention (réduction à la source des quantités d'emballages) et de valorisation.

Il convient également d'étendre le " mécanisme Eco-Emballages " à d'autres filières. L'objectif serait de mettre en place, sur le même modèle, à l'horizon 2002, des filières économiquement viables de recyclage ou de valorisation pour les différents produits " en fin de vie " : la viabilité de ces filières ne pouvant être assurée par la seule valeur marchande des matières premières secondaires triées à partir des déchets, une extension du mécanisme mis en place par le décret du 1er avril 1992 serait souhaitable, notamment pour certains déchets de l'automobile, ainsi que pour les déchets électriques ou électroniques.

S'agissant des produits distribués dans les boîtes aux lettres, une solution alternative existe, avec la taxe sur certaines dépenses de publicité créée par la dernière loi de finances.

graphique
  21. Recommandation : étendre le dispositif mis en place par le décret du 1er avril 1992 pour les emballages à d'autres produits " en fin de vie " (déchets de l'automobile, déchets électriques ou électroniques, etc.).

FAIRE PARTICIPER LES ÉMETTEURS DE PUBLICITÉS ET DE JOURNAUX GRATUITS AUX COÛTS DE L'ÉLIMINATION DES DÉCHETS

Les publicités et les journaux gratuits distribués, notamment, dans les boîtes aux lettres, constituent une part importante des quantités de déchets produits chaque année. Il serait légitime de faire participer ceux qui les émettent aux coûts qu'ils font supporter à la collectivité (90). A cet égard, on rappellera que l'article 23 de la loi de finances pour 1998 a créé une taxe sur certaines dépenses de publicité, dont le taux est fixé à 1% du montant hors TVA de ces dépenses.

Cette taxe est due par toute personne assujettie à la TVA dont le chiffre d'affaires de l'année civile précédente est supérieur à 5 millions de francs hors TVA. Elle est assise sur les dépenses ayant pour objet :

- la réalisation ou la distribution d'imprimés publicitaires ;

- les annonces et insertions dans les journaux mis gratuitement à la disposition du public.

Les dépenses afférentes à la réalisation ou à la distribution de catalogues adressés, destinés à des opérations de vente par correspondance ou à distance, sont exonérées.

Cette taxe n'a pas été mise en place dans un but environnemental : son fondement est d'être un instrument de péréquation qui compense le déplacement du marché publicitaire de la presse générale vers ces nouveaux supports. Son produit est d'ailleurs affecté à un Fonds de modernisation de la presse quotidienne et assimilée d'information politique et générale, créé par l'article 62 de cette même loi de finances pour 1998. Néanmoins, la prise en compte de l'environnement aurait permis de viser une sorte de " double dividende ", qui peut être atteint de deux façons différentes :

- en exonérant de la taxe les publicités réalisées sur des supports recyclés : la taxe serait ainsi à la fois un mode de financement et un instrument incitatif ;

- en affectant la moitié de son produit à des aides aux collectivités locales pour compenser le surcoût qu'elles subissent en cas de collecte séparative et de tri des déchets, sur le modèle du " soutien à la tonne triée " versé par Eco-Emballages.

Dans les deux cas, il convient de veiller à ce qu'une telle mesure ne réduise pas le produit de la taxe et, partant, le montant des aides versées à la presse. Une hausse de son taux pourrait donc être envisagée.

graphique
  22. Proposition : exonérer de la taxe sur certaines dépenses de publicité les prestations réalisées sur des supports recyclés, ou affecter la moitié de son produit à des aides aux collectivités locales pour compenser le surcoût qu'elles subissent en cas de collecte séparative et de tri des déchets. Le cas échéant, augmenter le taux de cette taxe.

RENDRE PLUS INCITATIF LE FINANCEMENT

DE LA COLLECTE ET DU TRAITEMENT

Les modifications qui ont été récemment introduites dans le domaine du financement de la collecte et du traitement des déchets ménagers, en particulier par la loi du 13 juillet 1992, vont dans le sens d'une affirmation du principe pollueur-payeur.

Pourtant, la redevance pour service rendu ne parvient pas à s'imposer, comme le montre le tableau ci-après.

RÉPARTITION ENTRE LA TAXE ET LA REDEVANCE D'ENLÈVEMENT
DES ORDURES MÉNAGÈRES

Nombre

Population

(milliers)

1996

1997

1996

1997

Redevance pour enlèvement des ordures ménagères

Communes (à compte propre ou vers syndicats)

Groupements à fiscalité propre

Ensemble

12.007

145

12.033

197

6.917

1.496

8.413

6.757

1.858

8.615

Taxe pour enlèvement des ordures ménagères

Communes (à compte propre ou vers syndicats)

Groupements à fiscalité propre

Ensemble

13.666

245

12.937

315

37.397

7.923

45.320

36.514

9.395

45.909

Source : Direction générale des impôts - Direction générale des collectivités locales.

Ces données doivent être complétées par les informations suivantes :

- les communes ou leurs syndicats ont perçu, en 1997, 13,6 milliards de francs au titre de la taxe et 1,4 milliard de francs au titre de la redevance ;

- les groupements à fiscalité propre ont perçu 3,1 milliards de francs au titre de la taxe et 0,4 milliard de francs au titre de la redevance ;

- aucune commune de plus de 20.000 habitants n'a recours à la redevance générale.

Quant à la redevance spéciale, son utilisation reste limitée, bien qu'elle soit obligatoire en cas de financement par la taxe ou par le budget général. Il semble néanmoins que de nombreuses collectivités soient en train de l'instaurer.

Cette situation est regrettable. Certes, la taxe intègre une dimension sociale, dans la mesure où elle est assise sur la valeur du foncier bâti. De plus, il existe une certaine corrélation (positive) entre la taille d'un logement et l'assiette de la taxe d'une part, ainsi qu'entre la taille du logement et la quantité des déchets que ses occupants produisent. Mais cela ne fait pas de la taxe une redevance pour service rendu.

La redevance pour service rendu, elle, applique le principe pollueur-payeur. Sa mise en place confère au service d'élimination des déchets la nature de service public industriel et commercial. Elle permet une tarification proportionnelle au service rendu. Ce mode d'organisation et de financement est le plus transparent et le plus efficace.

Cela étant, il faut d'abord souligner que l'organisation et le financement du service des déchets ménagers sont devenus aujourd'hui particulièrement complexes. Les raisons de cette situation sont connues (91) :

- l'objectif de suppression d'ici 2002 des décharges de déchets ménagers et l'obligation de traitement qui en résulte imposent aux communes des investissements considérables, de l'ordre de 60 milliards de francs ;

- dès lors, le service de l'élimination des déchets ménagers tend à se fractionner entre la collecte d'un côté, et le traitement de l'autre, avec des enjeux financiers très différents (92) ;

- de ce fait, les périmètres d'organisation de ces services ne coïncident plus : si une zone de 1.500 à 10.000 habitants peut être envisagée pour une collecte et une mise en décharge, le coût des installations de traitement fait qu'elles ne peuvent être réalisées que sur des zones d'au moins 10.000 habitants. L'organisation commune de la collecte et du traitement peut donc être envisagée en agglomération, beaucoup plus difficilement en zone rurale ;

- l'exercice de la compétence en matière d'élimination des ordures ménagères est ainsi devenu un enjeu majeur pour l'intercommunalité. Les communes, rurales notamment, décident en général de transférer cette compétence à des groupements. Mais ces transferts sont le plus souvent partiels. De plus, ils concernent parfois plusieurs groupements de communes, avec des périmètres différents pour la collecte et le traitement par exemple. Certains de ces groupements sont dotés d'une fiscalité propre, d'autres pas. La plus grande diversité et la plus grande complexité règnent, et, en matière de perception de la taxe ou de la redevance, les règles normalement applicables ne sont d'ailleurs pas toujours respectées.

La conclusion est évidente : l'opacité l'emporte et l'usager n'est plus en mesure de faire le lien entre le montant de la contribution qui lui est demandée et le coût réel de l'élimination des ordures qu'il produit. Les inconvénients de cette situation sont d'autant plus grands que le montant des investissements s'accroît.

Dès lors, il paraît urgent de revoir l'organisation et le financement du service de l'élimination des ordures ménagères. Les orientations à suivre sont connues : simplification des périmètres des groupements dans ce domaine et fractionnement en plusieurs parts de la taxe ou de la redevance en cas de fractionnement du service public lui-même.

Bien sûr, cette problématique relève davantage de la fiscalité locale, et du projet de loi en préparation sur l'intercommunalité, que de la fiscalité environnementale. Mais seules ces réformes permettront de développer le système de la redevance et d'affirmer le lien entre le service rendu et sa tarification, y compris en cas de financement par la voie fiscale.

graphique
  23. Proposition : clarifier les règles d'organisation du service de l'élimination des ordures ménagères. Fractionner en plusieurs parts son mode de financement en cas de transfert de compétence afin que chaque collectivité ou groupement de communes lève la part correspondant à sa compétence.

Dans l'immédiat, d'autres avancées sont néanmoins possibles, bien que leur portée soit plus limitée, pour tendre vers une meilleure prise en compte du principe pollueur-payeur et de la notion de service rendu, y compris à travers la taxe d'enlèvement des ordures ménagères.

On observera tout d'abord que les termes de taxe ou de redevance pour " l'enlèvement " des ordures ménagères ne sont pas adaptés. Comme l'observait M. Ambroise Guellec dans son rapport sur les déchets, cette rédaction semble indiquer que ces impositions ne financent que le service de la collecte, alors que la taxe comme la redevance portent sur l'intégralité du service, donc sur la collecte et le traitement (93). Il serait plus juste de parler de taxe ou de redevance pour " l'élimination et la valorisation " des ordures ménagères ; cette proposition peut sembler anecdotique, mais elle va dans le sens d'une plus grande transparence, pour permettre aux usagers de faire le lien entre la contribution et le service rendu.

Sur le fond, le principe pollueur-payeur suppose que chaque contribuable qui produit des déchets pris en charge par la collectivité soit assujetti à la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (ou à la redevance). Cette règle doit conduire à reconsidérer les dispositions qui dispensent certaines personnes de participer au financement de ce service public, ce qui ne les incite pas à la prévention, au tri et à la récupération, alors même qu'elles génèrent des quantités importantes de déchets assimilés aux déchets ménagers. Les locaux concernés sont ceux qui sont exonérés de taxe foncière (par exemple ceux dont l'Etat est propriétaire), ainsi que les usines et les locaux sans caractère industriel ou commercial loués par l'Etat et les collectivités locales. Dans certains cas, un mode de taxation spécifique, déconnecté du foncier bâti et ajusté au service rendu, devra être étudié.

graphique
  24. Proposition : généraliser le financement du service public d'élimination des déchets, en reconsidérant les cas d'exonération prévus à l'article 1521 du code général des impôts (locaux sans caractère industriel ou commercial possédés ou loués par l'Etat et les collectivités locales, usines, etc.).

Les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale doivent cependant conserver la possibilité d'exonérer de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères les assujettis à la redevance spéciale. Mais dans certains cas ou dans certaines zones, il serait souhaitable que cette exonération puisse n'être que partielle, notamment en raison des fortes variations qui caractérisent les valeurs locatives.

graphique
  25. Proposition : permettre aux communes de n'exonérer qu'en partie de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères les assujettis à la redevance spéciale.

Une modification de l'assiette de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères pourrait également être étudiée : ainsi, certains évoquent parfois la possibilité de substituer le critère du nombre de mètres carrés pondéré à celui du revenu net foncier, ce qui semble effectivement plus juste et surtout plus proche du service rendu. En l'absence de simulation, votre Rapporteur ne formulera pas de proposition à cet égard (94).

Quant au système de la redevance pour service rendu, dont on a vu qu'il ne parvenait pas à s'imposer, il apparaît qu'au-delà de la complexité des structures et des modes de gestion, qui ne favorise pas sa mise en place, les collectivités locales n'ont pas toujours les compétences et les moyens pour opter en sa faveur. Ce système implique en effet que soient déterminés une assiette et plus généralement des principes d'imposition (volume, poids, distance, etc.), ainsi que des règles de facturation complexes. Le recouvrement est par ailleurs à la charge de la collectivité.

Bien sûr, on ne saurait oublier que le passage à un système de redevance soulève également, voire surtout, des difficultés politiques, liées en particulier aux transferts de charge que ce changement entraîne. Mais les difficultés pratiques ne doivent pas être négligées et il conviendrait de permettre aux collectivités locales de confier, par convention, aux services du Trésor, la gestion de l'ensemble des opérations afférentes à la redevance.

graphique
  26. Proposition : permettre aux collectivités locales de confier, par convention, aux services du Trésor, la charge des opérations relatives à la perception de la redevance spéciale et de la redevance générale d'enlèvement des ordures ménagères.

ORIENTATION N° 2 :

SOUTENIR LES INVESTISSEMENTS

FINANCER LES CENTRES DE STOCKAGE DE DÉCHETS ULTIMES

Selon l'ADEME, les simulations de perception de la taxe sur le traitement et le stockage des déchets permettent d'envisager une enveloppe d'aide aux équipements, sur la période couverte (1993-2002), de près de 5 milliards de francs. Les deux tiers de cette somme concernent les déchets municipaux : 1,4 milliard de francs ayant été distribué (fin 1997), environ 2 milliards de francs resteraient disponibles.

En face, le rythme des investissements est inférieur à ce qui avait été prévu lors de la mise en place de la taxe. Six ans après la loi du 13 juillet 1992 et à quatre ans de l'échéance 2002, les collectivités ou leurs prestataires ont investi 13 milliards de francs (hors matériel roulant), alors que l'ADEME en prévoyait plus de 25 milliards de francs. De plus, loin de constater une montée en puissance des investissements, l'ADEME note, au contraire, une chute régulière, même si une analyse plus fine montre que ce sont les gros investissements qui diminuent (projets d'incinération), alors que les projets en amont de l'incinération (collecte sélective, compostage, tri, etc.) et les études augmentent (95). Les projections réalisées à partir des plans départementaux sont de 39 milliards de francs seulement, hors remise en état des décharges et hors centres de stockage, soit un montant très inférieur aux prévisions d'investissement initiales. Dès lors, même en retenant des hypothèses optimistes quant à leur rythme de réalisation, " l'enveloppe à dépenser " ne serait pas épuisée à l'issue de la période considérée : 400 millions de francs resteraient disponibles si 75% des investissements restants étaient réalisés d'ici 2002, plus de 1 milliard de francs si ce taux n'était que de 50%, ce qui semble plus probable.

Ces données permettent d'aboutir à une première conclusion : il ne semble pas utile, dans l'immédiat, de relever le tarif de la taxe sur le traitement et le stockage des déchets, d'autant qu'il se répercute sur le montant de la fiscalité locale ou de la redevance spécifique. On ne peut cependant pas écarter cette éventualité pour l'après 2002, lorsque le stockage des déchets ménagers ne concernera plus que les déchets ultimes. Dans l'immédiat, il conviendrait plutôt de s'interroger sur les conditions dans lesquelles les déchets sont éliminés " en interne " par les entreprises elles-mêmes. Par ailleurs, il faut se demander comment soutenir davantage les investissements pour stimuler la réalisation des projets. Deux pistes sont souvent évoquées.

·   La première consiste à augmenter le niveau des aides aux équipements accordées par le FMGD, pour soutenir plus efficacement les projets qui recourent à la collecte sélective et au tri.

En fait, cette orientation a d'ores et déjà été mise en oeuvre. Par une décision du conseil d'administration du FMGD du 7 janvier 1998, le taux des aides accordées aux investissements en amont de l'incinération (collectes séparatives, compostage, déchetteries, centres de transfert et centres de tri), soit le volet le plus important du Fonds, a été porté de 20% ou 30%, selon les cas, à 50%. Cette modification est intervenue de façon rétroactive, au 1er janvier 1997. Les simulations réalisées à cette occasion montrent que cette mesure devrait permettre de rapprocher le montant des aides qui seront distribuées de l'enveloppe disponible (dans une hypothèse de réalisation des investissements de 50 % d'ici 2002).

·   Une seconde piste mérite sans doute d'être étudiée : l'élargissement du champ d'intervention du FMGD.

Comme on l'a vu, ce champ est actuellement défini par l'article 22-3 de la loi du 15 juillet 1975 modifiée, qui dispose que le FMGD a pour objet d'apporter des aides à l'investissement des équipements de traitement et de soutenir les communes qui accueillent ces installations. Il est souhaitable que le FMGD puisse également intervenir, de manière analogue, pour les centres de stockage de déchets ultimes (aide à l'équipement et aide aux communes d'accueil).

graphique
  27. Proposition : étendre les aides (à l'équipement et aux communes d'accueil) du Fonds de modernisation de la gestion des déchets (FMGD) aux centres de stockage.

BAISSER LA TVA SUR LA COLLECTE (SÉLECTIVE) ET LE TRAITEMENT (AVEC VALORISATION) DES DÉCHETS MÉNAGERS

La collecte et le traitement des déchets ménagers constituent le seul service public local à être encore soumis au taux normal de la TVA (20,6%).

Ce régime est pour le moins paradoxal au regard de l'objectif que la loi du 13 juillet 1992 a fixé aux communes et à leurs groupements, à savoir, comme on l'a vu, la suppression des décharges de déchets ménagers au 1er juillet 2002 (hors déchets ultimes). Cette contrainte représente un effort d'investissement considérable, dont on vient de voir qu'il peinait à se développer, car souvent les collectivités locales n'ont pas les moyens de faire face aux dépenses nécessaires. Une baisse du taux de TVA faciliterait leur réalisation.

On observera, en premier lieu, que cette mesure serait parfaitement conforme au droit communautaire : l'annexe H à la sixième directive laisse en effet aux Etats membres la faculté de soumettre au taux réduit " les services fournis dans le cadre de l'enlèvement des ordures ménagères et du traitement des déchets ".

Dans l'hypothèse d'un financement fiscal du service de collecte et de traitement des déchets, une baisse du taux de TVA aurait pour conséquence de réduire, pour la commune ou le groupement, le coût des prestations, ce qui se répercuterait, indirectement, soit sur le niveau des investissements, soit sur le montant des impôts locaux.

Lorsque le service est exercé directement par les communes dans des conditions industrielles et commerciales, ces collectivités peuvent opter pour l'assujettissement à la TVA, puisque ce service donne lieu au paiement de la redevance d'enlèvement des ordures ménagères (article 260 A du code général des impôts). L'usager pourrait donc bénéficier directement de la baisse de taux.

La mise en oeuvre de cette mesure fait néanmoins apparaître deux contraintes opposées :

- elle est indispensable pour que puissent se développer les investissements nécessaires à la réalisation des objectifs environnementaux fixés par le législateur ;

- mais elle se traduirait par un coût non négligeable pour le budget de l'Etat, même si les évaluations ont considérablement varié : 600 millions de francs dans un premier temps, 900 millions de francs il y a un an, 1,3 milliard de francs aujourd'hui. Toutefois, la baisse de taux devrait se traduire par une augmentation de l'assiette (hausse des investissements).

Il convient de concilier ces deux contraintes. Votre Rapporteur propose, le cas échéant, que la mesure n'entre en vigueur que de façon progressive, en réservant son bénéfice, dans un premier temps, aux services de collecte sélective et de traitement des déchets en vue d'une valorisation. Cette mesure aurait l'avantage de soutenir les collectivités qui font des efforts dans ce sens et de compenser une partie des surcoûts induits par la sélection et la valorisation.

L'ADEME a en effet estimé que :

- la collecte simple, sans opération intermédiaire de tri, a un coût de 200 francs à 400 francs la tonne. La collecte sélective a un coût compris entre 500 francs et 2.000 francs la tonne, avec une compensation partielle du fait des ressources tirées de la vente de déchets valorisables, de l'aide à la tonne récupérée apportée par les sociétés agréées et de l'aide à l'investissement versée par l'ADEME via le FMGD ;

- le traitement a un coût de 300 francs la tonne pour la mise en décharge (interdite à compter de 2002). Ce coût est de 300 francs à 400 francs la tonne pour le compostage et de 400 francs à 600 francs la tonne pour l'incinération (sous réserve des ressources retirées du recyclage-matière ou de la vente de matériaux, de compost ou d'énergie).

Cette mesure favoriserait, bien sûr, la réalisation de l'objectif désormais affiché d'une priorité à la valorisation-matière, par rapport à l'incinération, qui suppose un fort développement du tri sélectif.

graphique
  28. Proposition : soumettre au taux réduit de la TVA les prestations d'enlèvement et de traitement des déchets ménagers effectuées dans le cadre du service public local. Le cas échéant, limiter cette mesure, dans un premier temps, aux prestations de collecte sélective et de traitement des déchets en vue d'une valorisation.

PERMETTRE LA RÉCUPERATION DE LA TVA

SUR LES INVESTISSEMENTS EN MATIÈRE DE TRAITEMENT DES DÉCHETS

Le Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) a pour objet d'assurer aux collectivités locales et à certains organismes locaux la compensation, à un taux forfaitaire, de la TVA qu'ils acquittent sur une partie de leurs dépenses d'investissement. Les articles L. 1615-1 et suivants du code général des collectivités territoriales indiquent néanmoins que la récupération par la voie du FCTVA n'est pas cumulable avec une récupération par la voie fiscale.

L'article 2 du décret n° 89-645 du 6 septembre 1989 prévoit que " ne figurent pas au nombre des dépenses réelles d'investissement ouvrant droit aux attributions du FCTVA (...) les dépenses concernant les immobilisations utilisées pour la réalisation d'opérations soumises à la TVA ".

Cette règle a, dans le domaine du traitement des déchets, des conséquences paradoxales.

Ainsi, la construction d'une décharge ou d'une usine d'incinération sans récupération d'énergie ouvre droit au FCTVA, dans la mesure ou ces immobilisations ne donnent pas lieu à des opérations soumises à la TVA.

En revanche, les collectivités qui investissent dans des installations de traitement des déchets sont dans une situation différente, ces immobilisations ayant pour partie une finalité commerciale (ventes de matériaux, de compost ou d'énergie) qui donne lieu à un assujettissement partiel à la TVA. Dans ce cas, elles n'ont de droit à récupération, par la voie fiscale, qu'au prorata de la part de leurs recettes commerciales dans le total de leurs recettes. En revanche, elles ne bénéficient pas du FCTVA.

Dès lors, la fiscalité favorise les solutions les moins performantes du point de vue de l'environnement !

Ce paradoxe a conduit à assouplir le principe initial, en admettant que " dans la mesure où ils ne sont utilisés qu'à titre accessoire pour les besoins d'une activité imposable à la TVA, les investissements " mixtes " des collectivités locales utilisés à la fois pour des opérations financées directement par des impôts ou des taxes et des opérations imposables à la taxe peuvent bénéficier d'une attribution du FCTVA à hauteur de la fraction pour laquelle la TVA n'a pas été déduite fiscalement. Il en est ainsi pour une usine d'incinération des ordures ménagères comprenant une unité de valorisation énergétique " (circulaire du 23 septembre 1994).

Par la suite, le traitement des déchets étant souvent confié à une structure intercommunale, il a été précisé que ce principe était également applicable pour la construction d'une usine d'incinération des ordures ménagères par un groupement de communes (circulaire du 2 février 1996).

La difficulté réside, bien entendu, dans la détermination du pourcentage de chiffre d'affaires au-delà duquel une activité n'est plus considérée comme " accessoire ". Aucun seuil n'est prévu par la réglementation.

·   Cette incertitude n'est pas admissible. Le refus de fixer un seuil précis serait justifié par une volonté de tenir compte de la déconcentration du FCTVA et des spécificités locales. Des seuils de 15%, 20%, voire 25%, seraient parfois admis. Mais on perçoit bien que cette incertitude peut être source d'arbitraire et il conviendrait, au minimum, qu'une circulaire établisse clairement les critères retenus par les services fiscaux.

graphique
  29. Proposition : publier une circulaire qui établisse clairement les règles de remboursement par le FCTVA de la taxe ayant grevé les dépenses d'investissement des collectivités locales donnant partiellement lieu à la réalisation d'opérations soumises à la TVA.

·   En tout état de cause, la règle applicable aux investissements " mixtes " n'a pas lieu d'être en ce qui concerne les investissements dans des équipements de traitement des déchets. La valorisation doit être maximale, conformément aux objectifs de la loi du 13 juillet 1992 : s'il semble que l'éligibilité au FCTVA soit appréciée au regard des recettes de valorisation correspondant à la première année de fonctionnement de l'installation, il est néanmoins étrange d'inciter les collectivités à ne pas dépasser un certain taux de recettes, fut-il de 15%, de 20% ou même de 30% !

En fait, il semble que le refus d'élargir l'accès au FCTVA soit plus une question de principe. La seule limite qui peut être sérieusement invoquée est budgétaire : le coût direct de cette mesure serait compris entre 300 millions de francs et 500 millions de francs (96). Il serait cependant compensé en partie par les rentrées fiscales induites par le développement des investissements. En tout état de cause, cette dépense apparaît nécessaire au regard des contraintes et des objectifs de la loi du 13 juillet 1992. Néanmoins, ceci conduit votre Rapporteur à formuler une proposition identique à celle retenue pour la baisse de la TVA sur la collecte et le traitement des déchets : réserver le bénéfice de l'éligibilité intégrale au FCTVA, dans un premier temps, aux communes qui pratiquent le tri sélectif.

graphique
  30. Proposition : permettre aux collectivités locales et à leurs groupements de bénéficier d'une attribution du FCTVA, au titre de leurs investissements dans des équipements de traitement des déchets, à hauteur de la fraction pour laquelle la TVA n'a pas été déduite fiscalement, quel que soit le montant des recettes de valorisation auxquels donnent lieu ces installations. Le cas échéant, limiter cette mesure, dans un premier temps, aux collectivités qui pratiquent le tri sélectif.

D.- LES SOLS : PRÉSERVER LES ESPACES FRAGILES

La préservation des sols et des espaces naturels sensibles est largement abordée, en France, par le biais de la réglementation, qui est souvent, dans cette perspective, l'instrument le mieux adapté. Toutefois, le régime fiscal applicable aux propriétés foncières de manière générale, et aux espaces protégés en particulier, est révélateur de l'absence de prise en compte, par la fiscalité, des contraintes environnementales. Votre Rapporteur a donc souhaité procéder à un réexamen de ce régime. La question des pollutions d'origine agricole sera également traitée dans le cadre de ce chapitre.

1.- Réexaminer l'imposition foncière

La taxe foncière, qui comprend une part communale, une part départementale et une part régionale, est due par tout propriétaire (personne physique ou morale) d'un immeuble bâti ou non bâti. On distingue, en fait, deux sortes d'" impôts fonciers ", qui ont leur réglementation propre, même s'il existe, sur plusieurs points, des dispositions communes.

·   La taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) s'applique à toutes les constructions sises en France. Il s'agit, en particulier, des constructions fixées au sol de façon définitive et se définissant comme des " bâtiments " (locaux d'habitation ou commerciaux, usines, maisons, etc.), des sols sur lesquels sont érigées les constructions et ceux qui en sont dépendants, des terrains affectés à un usage industriel ou commercial, des ouvrages en maçonnerie constituant de réelles constructions et des installations de stockage.

La loi prévoit néanmoins plusieurs exonérations définitives, au profit, notamment, des propriétés publiques (de l'Etat, des départements, des communes et de certains établissements et organismes publics) affectées à un service public ou d'utilité générale et non productives de revenus, des ouvrages établis pour la distribution de l'eau potable et appartenant à des communes rurales ou à des syndicats de communes, et des bâtiments ruraux à usage agricole (sauf la maison d'habitation).

La loi prévoit également des exonérations temporaires en faveur, notamment, des constructions nouvelles :

- exonération de longue durée (15 ans) en faveur de certains logements sociaux affectés à l'habitation principale ;

- exonération de courte durée (2 ans) pour les immeubles à usage d'habitation autres que les logements bénéficiant de l'exonération de longue durée, ainsi que pour les immeubles non destinés à un usage d'habitation (immeubles à usage industriel, commercial, professionnel, etc.).

La taxe est due, en principe, par le propriétaire de l'immeuble au 1er janvier de l'année d'imposition. Son montant est égal au revenu net cadastral, multiplié par le taux fixé par les assemblées locales. Le revenu net cadastral est égal à la valeur locative cadastrale de l'immeuble diminuée d'un abattement forfaitaire de 50% destiné à tenir compte des frais de gestion, d'assurances, d'amortissement, d'entretien et de réparation.

·   La taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFPNB) est due à raison des terrains non construits sis en France.

Les propriétés assujetties sont les terres rurales (pâtures, bois, etc.), les terrains à bâtir, les carrières et les mines, les étangs et marais.

Des exonérations permanentes sont également prévues pour :

- les propriétés publiques (de l'Etat, des régions, des départements, des communes et de certains établissements et organismes publics) affectées à un service public ou d'utilité générale et improductives de revenus ;

- les voies publiques ;

- les fleuves et rivières ;

- les chemins des associations foncières de remembrement ;

- les sols et terrains passibles de la TFPB ;

- les propriétés agricoles (terres, prés et prairies naturels, herbages et pâturages, vergers et cultures fruitières, vignes, bois, landes, marais, lacs, étangs, etc.) pour les parts régionales (depuis 1993) et départementale (mise en oeuvre progressive entre 1993 et 1996).

Sont également exonérés, mais pour une durée de trente ans, les terrains ensemencés, plantés ou replantés en bois. Il s'agit de la principale exonération temporaire.

Le redevable de la taxe est, en principe, le propriétaire des immeubles non bâtis au 1er janvier de l'année d'imposition. La base d'imposition est la même que celle des propriétés bâties : le revenu net cadastral, qui est égal à la valeur locative diminuée d'un abattement forfaitaire de 20% (au lieu de 50% pour le foncier bâti). Le montant de la taxe est égal à ce revenu net cadastral multiplié par les taux fixés par les assemblées territoriales.

Le produit de ces deux taxes n'est pas comparable :

- celui de la taxe foncière sur les propriétés bâties s'est élevé à 80.927 millions de francs en 1997 (97);

- celui de la taxe foncière sur les propriétés non bâties, qui diminue régulièrement, notamment du fait de l'exonération progressive des terres agricoles, s'est élevé à 5.231 millions de francs en 1997 (98). Il s'agit néanmoins d'une ressource importante pour certaines communes rurales.

Pourtant, paradoxalement, la fiscalité française est plutôt défavorable au non bâti, et, dans certains cas, à l'environnement, au point que l'idée de supprimer la TFPNB est parfois évoquée. On observera, en particulier :

- que les bases d'imposition de la TFPNB sont déconnectées de la réalité économique et sans rapport avec les revenus effectivement dégagés par les terrains, qui sont parfois modestes, d'autant que la diversité des taux entre les communes est plus marquée que pour la TFPB. Cette surimposition a sans doute favorisé une moindre utilisation du facteur terre et donc une intensification de l'agriculture et un développement des cultures hors sols ;

- qu'aucune exonération ou abattement n'est prévu sur la valeur locative cadastrale pour des motifs de préservation ou d'entretien biologique du milieu naturel. En outre, l'abattement pour frais d'entretien et de gestion est limité à 20% pour la TFPNB, contre 50% pour la TFPB, ce qui est révélateur d'une méconnaissance des charges induites par certains espaces non bâtis. Ce pourcentage de 20% ne peut compenser les frais d'entretien écologique et encore moins de restauration des espaces non bâtis, en particulier pour les zones humides ;

- que certaines exonérations ont des effets négatifs sur l'environnement. On rappellera, en particulier, l'exonération, heureusement supprimée en 1991, en cas de dessèchement des marais : cette disposition a favorisé la régression des zones humides, espaces de transition entre la terre et l'eau, qui jouent un rôle épurateur (dénitrification) et régulateur de crues essentiel et qui comptent parmi les écosystèmes les plus productifs au monde, mais qui sont parmi les milieux les plus dégradés et menacés (99). Aujourd'hui, il conviendrait de reconsidérer l'exonération trentenaire des espaces boisés.

De plus, la fiscalité locale directe est plus favorable à la mise en valeur économique des espaces naturels qu'à leur conservation et à leur gestion écologique. Cette situation a été analysée avec pertinence par M. Guillaume Sainteny dans un ouvrage consacré à la fiscalité des espaces naturels. Il souligne que la fiscalité sur le non bâti ne se limite d'ailleurs pas à la TFPNB et que d'autres impositions ont des effets négatifs sur le patrimoine naturel. Ainsi, en matière d'imposition du capital, les bois, forêts et parts de groupement forestier sont exonérés, à hauteur des trois quarts de leur valeur, s'ils sont soumis à un engagement d'exploitation, ce qui avantage de nouveau la gestion sylvicole des forêts au détriment de leur gestion biologique ou paysagère (100).

Au total, on peut parler d'une surimposition du foncier non bâti, qui peut aboutir, parfois, à une rentabilité nulle ou négative pour des patrimoines dont le taux de rendement est souvent peu élevé.

Les propositions de réformes ne manquent pas. Certains suggèrent, par exemple, de relever l'abattement sur la valeur locative cadastrale pour frais d'entretien du patrimoine, applicable en matière de TFPNB (20%) jusqu'au niveau prévu pour la TFPB (50%), en particulier lorsque cela correspond à des frais d'entretien de la valeur écologique d'un milieu naturel. Il est parfois demandé que les frais de réparation ou d'entretien des espaces naturels d'intérêt exceptionnel ou découlant d'une servitude d'environnement soient déductibles du revenu global pour l'impôt sur le revenu.

Plusieurs considérations incitent néanmoins votre Rapporteur à faire preuve de prudence. Certaines mesures parfois évoquées seraient extrêmement coûteuses. De plus, la réforme annoncée de la taxe d'habitation et de la taxe professionnelle épuisent sans doute, dans l'immédiat, les possibilités de réforme de grande ampleur en matière de fiscalité locale.

Votre Rapporteur retiendra donc deux orientations prioritaires.

CONDITIONNER L'EXONÉRATION DES ESPACES BOISÉS

La première consiste à reconsidérer les dispositions qui encouragent l'exploitation des terres boisées sans prendre en compte l'équilibre des espèces. Comme on l'a vu, les règles applicables aux forêts, en matière d'impôt de solidarité sur la fortune, en font partie. Mais on évoquera surtout l'article 1395-1° du code général des impôts, qui dispose que " les terrains ensemencés, plantés ou replantés en bois " sont exonérés de la TFPNB " pendant les trente premières années du semis, de la plantation ou de la replantation ".

Cette disposition soulève un certain nombre de problèmes qui ont été évoqués, à l'Assemblée nationale, le 2 avril dernier, au cours de l'examen du projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier (101). Si cette exonération est parfois utile, le reboisement prend dans certaines régions des proportions trop importantes et surtout, s'effectue sans qu'il soit tenu compte de l'intérêt écologique des plantations. La rapidité de la croissance de l'espèce est privilégiée (peupliers, eucalyptus, pins, etc.) sur sa valeur biologique.

Par ailleurs, l'exonération en cas de nouvelle plantation dans les zones humides n'a aucune justification.

Il est donc souhaitable d'autoriser les collectivités locales à assujettir à la TFPNB les terrains ensemencés, plantés ou replantés en bois, afin qu'elles puissent protéger certains espaces et conditionner l'exonération à la plantation d'un type particulier d'arbres.

graphique
  31. Proposition : autoriser les collectivités locales à conditionner ou à moduler l'exonération trentenaire de taxe foncière sur les propriétés non bâties des terrains ensemencés, plantés ou replantés en bois (article 1395-1° du code général des impôts), en fonction des espèces (feuillues ou résineuses) et des espaces concernés.

Les autres propositions que votre Rapporteur souhaite formuler en matière de TFPNB concernent spécifiquement les espaces naturels protégés.

2.- Favoriser la protection du territoire

En 1996, l'IFEN dénombrait, en France, plus de cinquante dispositifs de protection d'espaces naturels, dont une dizaine est souvent utilisée. Plus de dix espaces protégés seraient créés chaque année, depuis 1984 (102).

·   Parmi les protections réglementaires, on citera, en premier lieu, les parcs nationaux (1960), qui protègent des territoires exceptionnels en leurs zones centrales tout en favorisant le développement économique, culturel et social de leurs zones périphériques. Les réserves naturelles (1976) protègent des zones dont le milieu naturel ou les espèces présentent une " importance exceptionnelle ". Les arrêtés de biotope (1977) conservent les habitats d'espèces protégées. Les réserves naturelles volontaires sont accordées pour six ans, renouvelables sur demande, à un propriétaire soucieux de protéger le patrimoine naturel de son territoire.

·   Parmi les protections contractuelles, les parcs naturels régionaux (1967) occupent une place particulière. Conçus comme des outils d'aménagement et de revitalisation rurale, ils jouent néanmoins un rôle croissant dans le maintien de la diversité des milieux, des habitats et des espèces. Leur mission de protection de l'environnement s'affirme : elle constitue désormais l'objectif principal des chartes par lesquelles les collectivités locales s'engagent pour une durée de dix ans renouvelables (103).

·   Parmi les protections internationales, on distingue les zones de protection spéciale (1979), délimitées au titre de la " directive Oiseaux " (n° 79/409/CEE, du 2 avril 1979) qui préconise la préservation, la création et l'entretien d'habitats d'oiseaux sauvages menacés. La convention internationale de Ramsar (signée le 2 février 1971 et ratifiée par la France le 1er octobre 1986) vise à protéger les zones humides désignées par les Etats (Camargue, Brenne, marais du Cotentin...). Les réserves biogénétiques du Conseil de l'Europe (1976) doivent faire progresser l'inventaire de la richesse et de la diversité biologique en Europe.

L'IFEN a rapproché la localisation des espaces protégés avec la cartographie des 14.755 zones naturelles d'intérêt floristique et faunistique (ZNIEFF), dont l'inventaire a été entrepris au cours des années 1980 en vue de recenser les milieux remarquables du patrimoine français, et qui couvrent environ 24,5% du territoire national : 97% des zones centrales des parcs nationaux et des réserves biogénétiques, 90% des réserves naturelles, 80% des arrêtés de biotope, 77% des zones de protection spéciale, 74% des réserves naturelles volontaires et 60% des zones Ramsar sont comprises dans des ZNIEFF. Même dans les parcs naturels régionaux, dont les objectifs associent, comme on l'a vu, environnement et développement, plus de 40% des territoires sont compris dans l'inventaire. La convergence est donc forte.

Malgré la multiplicité des modes de protection des différents pays européens, le constat d'une dégradation des milieux naturels a conduit à l'élaboration de la directive n° 92/43/CEE sur " la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages ", ou directive " habitats ", adoptée le 21 mai 1992, et entrée en vigueur en France le 6 juin 1994. La directive énumère les habitats naturels et les espèces d'intérêt communautaire. Chacun des Etats membres doit dresser une liste des sites qui les abritent. A terme, ces sites, dénommés zones de protection spéciale, constitueront un réseau européen : Natura 2000 (104).

La France dispose d'un patrimoine biologique exceptionnel, sans doute le plus riche d'Europe, et de nombreux outils réglementaires de protection juridique des espaces. Pourtant, l'IFEN considérait, dans l'étude précitée, que " cet effort important n'apparaît pas suffisant pour assurer la protection du patrimoine naturel ". Au demeurant, les espaces protégés sont largement négligés par la fiscalité française qui les soumet, pour l'essentiel, aux règles de droit commun, sans tenir compte des contraintes et des servitudes qu'entraîne la réglementation pour les propriétaires des terrains (interdiction, le cas échéant, et selon la nature de l'espace protégé, de la chasse, de la pêche, des activités industrielles et commerciales, des travaux publics et privés, de l'extraction des matériaux, de l'utilisation des eaux, de la circulation du public, réglementation des activités agricoles, pastorales ou forestières, etc.).

Dans ce domaine également, les suggestions ne manquent pas. Dans un souci d'efficacité, votre Rapporteur retiendra trois mesures qui lui semblent importantes.

EXONÉRER LES ESPACES NATURELS PROTÉGÉS

La fiscalité doit désormais tenir compte de l'intérêt patrimonial de certains espaces et des contraintes environnementales qui leur sont associées.

Il serait donc justifié, tout d'abord, d'exonérer les principales zones de protection de la taxe foncière sur les propriétés non bâties, ce qui aurait pour effet d'amoindrir les résistances à leur égard, ainsi que les tentations d'en modifier l'usage. Cette exonération pourrait s'appliquer, en particulier, aux zones centrales des parcs nationaux, aux réserves naturelles et aux zones de protection spéciale (Natura 2000). Il serait également souhaitable que le dispositif englobe les zones humides identifiées au plan national, afin d'inverser une tendance à la régression constatée et dénoncée depuis des années (105). En tout état de cause, ce champ d'application devra être précisé, le régime d'exonération exigeant une délimitation rigoureuse, parcelle par parcelle. On rappellera, en outre, que de nombreuses exonérations s'appliquent déjà à ces espaces, en particulier au profit des terres agricoles (pour les parts régionale et départementale) et des propriétés publiques improductives de revenus.

La perte de recettes pour les collectivités locales devra être compensée par l'Etat, compte tenu de l'importance de la taxe sur le foncier non bâti dans les ressources de certaines communes, et des impératifs de la politique d'aménagement du territoire.

La direction de la prévision a réalisé des simulations, dans un rapport de novembre 1997 consacré à la fiscalité des espaces naturels. Le coût budgétaire de l'exonération est évalué de la façon suivante :

- parcs naturels régionaux : environ 360 millions de francs ;

- zones humides d'importance nationale : environ 160 millions de francs ;

- zones Natura 2000 : environ 100 millions de francs (pour 2,5% du territoire national) ;

- principales réserves naturelles (plus de 1.000 hectares) : environ 25 millions de francs ;

- principaux sites classés récents (depuis 1993 et plus de 1.000 hectares) : environ 15 millions de francs.

Ces données ne doivent cependant pas être additionnées, car certaines zones peuvent se retrouver dans différentes catégories. Ce sont avant tout des ordres de grandeur.

On observera que ce coût pourrait être compensé, indirectement, par les mesures proposées par ailleurs en matière de tarification de la ressource en eau à usage agricole, ou de taxation des engrais et des produits phytosanitaires.

Néanmoins, il convient de souligner, comme le fait la direction de la prévision, que la fiscalité sur le foncier non bâti n'est pas, en général, le facteur essentiel de la fragilisation ou de la transformation des espaces naturels sensibles, car la structure des aides agricoles joue un rôle beaucoup plus décisif : le montant de la TFPNB est de l'ordre de 100 francs à 200 francs à l'hectare, alors que certaines aides de la PAC peuvent atteindre 2.500 francs à 3.000 francs à l'hectare. Dès lors, la question doit être articulée avec un approfondissement de la réforme de la politique agricole, dans le sens d'une intégration croissante des objectifs environnementaux dans l'attribution des aides.

La mesure proposée constituerait néanmoins un premier pas dans le sens d'une prise en compte par la fiscalité des contraintes environnementales liées à l'entretien des espaces sensibles.

graphique
  32. Proposition : exonérer de taxe foncière sur les propriétés non bâties les parcelles situées à l'intérieur d'un espace naturel protégé.

FINANCER LES ESPACES NATURELS SENSIBLES

La seconde mesure consiste à étendre le mécanisme de la taxe départementale des espaces naturels sensibles (TDENS).

On rappellera que depuis 1985, les départements peuvent décider d'instituer cette taxe qui est prélevée sur l'ensemble des constructions sises sur leur territoire (106). Son taux, qui est plafonné (107), est fixé par le conseil général. Son produit (471 millions de francs en 1997) est affecté à la mise en _uvre d'une politique de protection des espaces naturels sensibles (acquisition, aménagement et entretien de terrains, de sentiers ou de chemins, etc.).

Il serait souhaitable de rendre la perception de cette taxe obligatoire, en instituant un taux plancher assez bas (de l'ordre de 0,5%).

graphique
  33. Proposition : favoriser le développement d'une politique de protection des espaces naturels sensibles au moyen d'une généralisation de la taxe départementale instituée à cet effet.

ENCOURAGER LA CONSERVATION DES ESPACES NATURELS

Enfin, il conviendrait d'étendre certaines dispositions applicables au Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres, établissement public administratif créé en 1975 afin d'acquérir des sites naturels menacés de dégradation et d'en assurer la conservation. Les dons et legs faits à son profit sont exonérés des droits de mutation à titre gratuit et les transactions ne sont pas soumises aux droits d'enregistrement (articles 795-12° et 1041 du code général des impôts). Le Conservatoire du littoral bénéficie également du régime de la dation en paiement (article 1716 bis du code général des impôts). Après acquisition, le terrain, devenu domaine propre du Conservatoire, est géré par les collectivités locales ou les associations concernées. Cette gestion repose, le cas échéant, sur une limitation de l'accès au public, la mise en _uvre d'aménagements paysagers et la restauration des milieux naturels.

Certaines associations, qui exercent un rôle similaire en matière de protection des espaces naturels, devraient pouvoir bénéficier de ce dispositif (à l'exclusion, peut-être, de la dation en paiement). On pensera, en particulier, aux conservatoires régionaux d'espaces naturels, qui ont pour objectif la sauvegarde des sites naturels et la préservation de la biodiversité. Le cas échéant, cette mesure peut être limitée aux conservatoires reconnus d'utilité publique, comme par exemple le conservatoire des sites alsaciens.

graphique
  34. Proposition : étendre le dispositif d'allégement fiscal conçu pour le Conservatoire du littoral (exonération des droits de succession et d'enregistrement) aux conservatoires régionaux d'espaces naturels reconnus d'utilité publique.

3.- Contenir la pollution des sols

Une action en faveur de la protection des espaces naturels n'a cependant pas de sens si elle ne s'accompagne pas d'une politique destinée à contenir la dégradation et la pollution des sols.

Les activités susceptibles d'être concernées sont multiples. On évoquera, en premier lieu, les pollutions émises par les installations industrielles, ou par les entrepôts de produits toxiques, qui peuvent être à l'origine d'une contamination du sol, du sous-sol et/ou des eaux souterraines. Mais ce domaine relève très largement de la réglementation.

En revanche, les pollutions diffuses d'origine agricole deviennent préoccupantes et peuvent faire l'objet d'une approche fiscale, en particulier en ce qui concerne l'utilisation d'engrais et de produits phytosanitaires (pollution des eaux à partir des terres agricoles).

RELEVER LA FISCALITÉ SUR LES ENGRAIS ET LES PRODUITS PHYTOSANITAIRES

·   Les pollutions diffuses sont liées à un apport excessif d'éléments fertilisants d'origine organique (effluents d'élevage) ou minérale (engrais).

La question des déjections animales qui accompagnent les élevages intensifs est réelle : un épandage excessif se traduit par des apports d'azote ou de phosphore supérieurs à la capacité d'épuration des sols et des cultures. Le problème des engrais résulte d'apports non raisonnés qui dépassent les besoins de la plante et provoquent une surfertilisation. Dès lors que la capacité de fixation par le sol et la végétation est dépassée, ces éléments fertilisants sont entraînés dans les eaux souterraines (par infiltration) ou dans les eaux de surface (par ruissellement). Les zones vulnérables, définies conformément à la directive 91/676 " Nitrates " du 7 novembre 1991, sont étendues, en particulier dans les régions d'élevage et d'agriculture intensifs (Ouest, bassin parisien, vallée du Rhône, une partie des régions Poitou-Charentes et Midi-Pyrénées) : 25% des points de prélèvements d'eau ont une teneur moyenne en nitrates supérieure à 40 mg/l (seuil de menace), 12% ont une teneur supérieure à 50 mg/l (seuil de pollution).

·   L'utilisation de produits phytosanitaires ou pesticides s'est également généralisée pour lutter contre les parasites (champignons, insectes, mauvaises herbes, etc.) qui menacent les cultures et les récoltes. L'intensité de cette utilisation menace la qualité des ressources en eau, voire la santé humaine : selon l'IFEN, des campagnes d'essai auraient révélé des résultats inquiétants en Bretagne et dans la région Centre, la concentration des eaux souterraines et superficielles en produits phytosanitaires excédant largement les normes européennes (directive 80/778/CEE).

Cette situation doit conduire à une concertation accrue avec la profession agricole, afin de développer des actions de sensibilisation et de conseil pour encourager le développement de pratiques raisonnées en matière de fertilisation et d'utilisation de produits phytosanitaires. Pour autant, le coût collectif élevé de ces pollutions incite à aborder également la question par le biais de la fiscalité, par application du principe pollueur-payeur. Fort logiquement, il est souvent proposé d'instituer une taxe sur les engrais, d'une part, et sur les produits phytosanitaires, d'autre part. Les suggestions reposent parfois sur des modalités différentes :

- une première " école " considère que les caractéristiques du sol et du sous-sol, ainsi que les conditions météorologiques, ayant une grande influence sur le transfert des produits vers les eaux, une approche fiscale doit tenir compte de ces facteurs ;

- d'autres jugent qu'une telle différenciation serait beaucoup trop complexe et que la taxation ne peut être que forfaitaire. Dès lors, deux hypothèses sont envisagées : une taxation dite " au sac ", sur les achats d'engrais ou de produits phytosanitaires, ou une taxation en amont, sur la production et l'importation de ces produits, qui présenterait l'avantage de limiter le nombre des assujettis.

Votre Rapporteur considère qu'effectivement, une taxation variable en fonction de l'utilisation des produits (lieu, date, quantité, etc.) serait justifiée, mais qu'elle conduirait à des coûts administratifs prohibitifs et à des risques de fraude significatifs. Une taxation forfaitaire, sur la production et l'importation, est donc préférable.

On observera néanmoins qu'il serait également possible de reconsidérer le régime de TVA dont bénéficient ces produits, à savoir le taux réduit (5,5%), en application de l'article 278 bis-5° du code général des impôts : la dépense fiscale associée à cette disposition s'est élevée à 400 millions de francs pour 1997. Mais cette mesure ne pèserait pas sur les utilisateurs d'engrais et de produits phytosanitaires qui bénéficient, pour la plupart, d'un droit à déduction en matière de TVA.

graphique
  35. Proposition : instituer une taxe sur la production et l'importation d'engrais et de produits phytosanitaires.

SOUMETTRE LES ÉLEVAGES INDUSTRIELS HORS SOL

AU DROIT COMMUN DES INSTALLATIONS CLASSÉES

Une seconde mesure, qui concernerait, pour l'essentiel, les élevages industriels hors sol, semble également souhaitable. La loi du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement soumet les établissements industriels et commerciaux et les établissements publics à caractère industriel ou commercial, dont certaines installations sont classées dès lors qu'elles peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature et de l'environnement, soit pour la conservation des sites et des monuments, à :

- une taxe unique, perçue lors de toute autorisation et s'élevant à 12.000 francs pour les établissements dont une installation au moins est soumise à autorisation, 2.400 francs pour les artisans n'employant pas plus de deux salariés, et 5.780 francs pour les autres entreprises inscrites au répertoire des métiers ;

- une redevance annuelle, perçue sur ceux desdits établissements qui, en raison de la nature ou du volume de leurs activités, font courir des risques particuliers à l'environnement et requièrent de ce fait des contrôles approfondis et périodiques. Le taux de base de la redevance est de 1.500 francs, auquel s'applique un coefficient multiplicateur compris entre 1 et 10 selon les activités. Les entreprises inscrites au répertoire des métiers en sont néanmoins exonérées.

Ce régime est justifié par l'existence d'une autorisation administrative délivrée par les directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement (DRIRE) et les directions départementales des affaires sanitaires et sociales (DDASS), et par les contrôles fréquents réalisés par les inspecteurs des installations classées.

Il convient aujourd'hui d'aligner les installations classées agricoles soumises à autorisation (élevages industriels, de porcs, de lapins, de vaches laitières, etc.), qui sont souvent très polluantes, sur le régime de droit commun des installations classées industrielles et commerciales, au moins en ce qui concerne la taxe unique. Pour éviter de pénaliser les petites exploitations familiales, on peut envisager d'exonérer, le cas échéant, les exploitants n'employant pas plus de deux employés et les groupements agricoles d'exploitation en commun (GAEC) de deux personnes au plus (108).

De façon plus générale, il conviendrait de relever les taux de la taxe unique et de la redevance, qui n'ont pas été revalorisés depuis 1993.

graphique
  36. Proposition : aligner les installations classées agricoles sur le régime de droit commun des installations classées industrielles et commerciales, et revaloriser les taux de la taxe unique et de la redevance annuelle.

E.- LE BRUIT : PROTÉGER LES POPULATIONS

La question du bruit n'a pas encore trouvé de réponse appropriée de la part des pouvoirs publics. Pourtant, il est désormais bien établi que les nuisances sonores ont des effets négatifs sur la santé : perturbation du sommeil, fatigue, dépression, surmenage, baisse de productivité, etc.

On distingue, traditionnellement, les bruits de voisinage et les bruits des transports (terrestres et aériens).

En matière de bruit de voisinage, l'action la plus efficace repose sur les normes d'isolation acoustique, qui ont été renforcées pour les nouvelles constructions. Pour les logements anciens, on rappellera que les dépenses d'isolation phonique entrent désormais dans le champ de la réduction d'impôt pour travaux de grosses réparations. Certains considèrent qu'il serait possible d'aller plus loin et préconisent la réalisation d'un " diagnostic de bruit " pour toute transaction immobilière, mais les méthodes restent à définir et le problème de l'accès aux locaux est réel. Toujours dans le domaine des bruits de voisinage, le Gouvernement a annoncé qu'un décret sera publié prochainement pour fixer un niveau sonore que les discothèques et lieux assimilés ne pourront dépasser (109). Le rôle des pouvoirs publics est également important pour arbitrer les conflits ou pour sanctionner les excès.

Pour autant, il ne sera question, dans le cadre du présent rapport, que des bruits des transports. Si l'action de l'Etat est légitime en matière de bruit de voisinage, celle-ci ne peut reposer qu'à la marge sur l'usage de la fiscalité. Par ailleurs, il convient de rappeler qu'il s'agit avant tout d'un problème de proximité et de comportement. Les réponses relèvent d'abord de la société elle-même et, à défaut, de l'élu local plus que de l'Etat central.

1.- Les insuffisances de la lutte contre le bruit

des transports terrestres

La mise en place d'une politique de suppression des points noirs du bruit des transports terrestres (routier et ferroviaire) remonte au début de la précédente décennie. Dès 1982, un rapport du Conseil général des ponts et chaussées (rapport Batsch) définissait les axes d'une action de rattrapage pour la durée du IXème plan : 1,2 milliard de francs furent effectivement consacrés, entre 1984 et 1989, pour la protection de 40.000 logements, dont 35.000 environ exposés à plus de 75 décibels.

Dans le cadre du programme de relance pour la ville engagé en 1993, 365 millions de francs furent consacrés à la lutte contre le bruit, dont plus de 300 millions de francs pour la route (165 millions de francs pour la couverture de l'A1 en direction du Stade de France) et environ 50 millions de francs pour les transports ferroviaires.

Ces programmes sont loin d'être négligeables. Mais, faute d'avoir été intégrés dans une démarche cohérente et globale, ils n'ont permis de traiter que les cas les plus graves, au coup par coup.

La loi du 31 décembre 1992 entendait remédier à ce défaut. Elle cherche à mettre fin à la création des points noirs du bruit en agissant sur les règles d'urbanisme (article 13). Par ailleurs, son article 15 dispose que " dans un délai d'un an à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement présentera au Parlement un rapport établissant l'état des nuisances sonores résultant du transport routier et ferroviaire et les conditions de leur réduction. Ce rapport comportera une évaluation des travaux nécessaires à la résorption des points noirs et à la réduction de ces nuisances à un niveau sonore diurne moyen inférieur à soixante décibels. Il présentera, en outre, les différents modes de financement envisageables pour permettre la réalisation de ces travaux dans un délai de dix ans ".

Ce rapport a été remis au Premier ministre en 1995 par M. Bernard Serrou, député (110). Il propose un scénario minimal, mais d'urgence, visant la résorption des points noirs sur le réseau national, et fixe le seuil d'intervention à 70 décibels (111). 182.000 logements, correspondant à 1.600 points noirs, dont 127.534 pour le réseau routier et 55.000 pour le réseau ferroviaire, seraient à traiter. Le coût moyen des mesures de protection (mise en service de déviations, réalisation d'écrans acoustiques, travaux de protection de façades) étant de 48.000 francs par logement, le coût du programme serait de 9 milliards de francs (1991).

FINANCER LA RÉSORPTION DES POINTS NOIRS DU BRUIT

Un milliard de francs par an serait donc nécessaire mais, depuis 1995, ce sont à peine 100 millions de francs (tous financements confondus) qui sont consacrés annuellement à ce programme. Au rythme actuel, il faudrait près d'un siècle, et non pas huit ou dix ans, pour arriver au terme de ce qui n'est, pourtant, qu'un programme d'urgence (112).

Le problème de la résorption des points noirs du bruit des transports terrestres est donc clairement une question de moyens financiers. Mais compte tenu des montants nécessaires, on peut se demander si une approche budgétaire classique ne devrait pas laisser la place à un mode de financement spécifique, fondé sur le principe pollueur-payeur.

M. Bernard Serrou semblait privilégier l'institution d'une taxe sur les carburants, ou, à défaut, la mise en place d'un montage financier impliquant les collectivités locales à hauteur de 50%.

M. Jean-Pierre Gualezzi, dans son récent rapport sur le bruit présenté au nom du Conseil économique et social (113), recommande également d'affecter à ce programme une nouvelle taxe, qui serait créée sur le modèle de la taxe sur le bruit des transports aériens. Il suggère même d'instituer des redevances sur l'ensemble des responsables du bruit (avions, hélicoptères, véhicules de transports terrestres, machines, télévisions, radios, etc.), au profit d'une agence, construite sur le modèle des agences de l'eau, qui financerait des recherches pour rendre ces appareils moins bruyants (114).

Pour sa part, votre Rapporteur rappellera l'importance du programme de résorption des points noirs du bruit, en soulignant que cette nuisance est socialement très inégalitaire, les personnes les plus modestes étant proportionnellement beaucoup plus touchées. Par ailleurs, l'idée d'un financement affecté doit effectivement être étudiée et, si cette perspective devait prévaloir, il serait juste que celui-ci provienne d'un prélèvement lié à l'usage de l'automobile, à travers, par exemple, une taxe additionnelle à la vignette. Cette formule aurait néanmoins l'inconvénient de ne pas toucher les poids lourds qui sont assujettis à la taxe à l'essieu alors qu'ils sont souvent mis en cause en matière de bruit : le principe pollueur-payeur inciterait donc à rechercher une solution alternative, par exemple au niveau des taxes sur les carburants (TIPP). Le problème doit aussi être envisagé dans les contrats de plan Etat-régions : une partie significative des crédits consacrés à la route dans les CPER devrait être dirigée vers la résorption des points noirs du bruit.

Lors de la communication qu'elle a présentée, le 4 mars dernier, au Conseil des ministres, sur la question du bruit, la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement a annoncé qu'elle confiait à M. Claude Lamure, ingénieur général des ponts et chaussées, la réalisation d'un nouveau rapport sur la résorption des points noirs du bruit (le rapport Serrou devant être actualisé), ainsi que la charge de définir un programme financier ambitieux de rattrapage. Ce rapport devra être présenté avant la fin de l'année au Parlement. L'objectif est de mener à bien le rattrapage sur la durée des deux prochains contrats de plan Etat-régions.

graphique
  37. Proposition : réaliser, dans un délai de dix ans, le programme de résorption des points noirs du bruit, en portant les efforts en priorité sur les nuisances susceptibles de gêner le sommeil des riverains. Le cas échéant, mettre en place un mode de financement spécifique.

2.- Atténuer le bruit des transports aériens

Le bruit des transports aériens peut constituer une source de nuisances importante pour les populations implantées aux abords des aéroports. M. Jean-Pierre Gualezzi, dans son rapport sur le bruit dans la ville, estime que 500.000 riverains sont gênés aux abords des aéroports, dont près de 300.000 en Ile-de-France (115).

·   La réduction du bruit engendré par les transports aériens repose, en premier lieu, sur une réduction à la source, par divers moyens :

- meilleure organisation de la circulation aérienne dans les phases d'arrivée et de départ, en termes de tracé et de pente ;

- meilleure organisation de la circulation aérienne dans le temps, par un encadrement des horaires de fonctionnement des aéroports pouvant aller jusqu'à un couvre-feu partiel, voire total, comme à Orly entre minuit et six heures (sous réserve de dérogations) (116) ;

- élimination progressive des appareils les plus bruyants. Les avions les plus anciens, dits du premier chapitre, selon les normes de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI), sont retirés du service depuis 1989. S'agissant des avions du chapitre 2, qui ont été conçus, généralement, entre 1970 et 1977, leur adjonction à une flotte européenne a été proscrite dès 1990 et un arrêté en date du 13 décembre 1993 impose leur retrait progressif, jusqu'au 1er avril 2002. Les avions du chapitre 3 sont les plus récents, et les moins bruyants.

Par ailleurs, afin de limiter le nombre de personnes exposées aux nuisances sonores des avions, l'implantation des constructions dans les zones proches des aérodromes a été réglementée. Les plans d'exposition au bruit (PEB), instaurés par la loi du 11 juillet 1985, qui sont annexés aux plans d'occupation des sols des communes concernées, encadrent les possibilités de construction et déterminent des normes d'isolation acoustique. Environ 200 aéroports nationaux sont concernés.

L'application de ces règles a été régulièrement réaffirmée par le ministre des transports (117). Les sanctions administratives ont d'ailleurs été renforcées, à compter du 1er janvier dernier, par le décret n° 97-534 du 27 mai 1997, qui a porté les amendes prévues, en cas d'infraction, de 250 francs au maximum à des montants pouvant aller jusqu'à 10.000 francs pour une personne physique et 50.000 francs pour une personne morale.

La réglementation doit sans doute être harmonisée et renforcée au niveau européen. Tel est l'objectif du Gouvernement français. Le texte de la contribution française à la rencontre informelle des ministres des transports et de l'environnement qui s'est tenue à Chester le 26 avril 1998 indique qu'" il est nécessaire d'accélérer le renouvellement des avions anciens du chapitre 2 (...). Au-delà, il paraît nécessaire de définir un cadre européen pour les restrictions d'accès sur les aéroports ". Mais il est également précisé qu'" une harmonisation par le haut des taxes visant à remédier aux nuisances doit à notre sens être recherchée ". Il s'agit là du second volet de la lutte contre le bruit des transports aériens.

·   La loi du 31 décembre 1992 relative à la lutte contre le bruit a, en effet, institué une taxe pour la mise en oeuvre des dispositions nécessaires à l'atténuation des nuisances sonores au voisinage des aérodromes (chapitre II, articles 16 à 20). Son objet est d'aider les riverains des grands aéroports à réaliser des travaux d'isolation acoustique destinés à atténuer les nuisances qu'ils subissent :

- la taxe est due par les exploitants d'aéronefs (à l'exception de ceux qui appartiennent à l'Etat), ou, à défaut, par leur propriétaire, à l'occasion de tout décollage, sur certains aéroports (Paris-Orly, Paris-Charles de Gaulle, Lyon-Satolas, Marseille-Provence, Nice-Côte d'Azur et Toulouse-Blagnac, ainsi que, depuis le début de cette année, Mulhouse-Bâle, Bordeaux-Mérignac et Strasbourg-Entzheim), d'un appareil de plus de deux tonnes. Son taux est modulé selon l'aéroport, le groupe acoustique de l'avion, sa masse et l'heure de décollage (articles 16 et 17) ;

- son produit est affecté à l'ADEME (article 18) ;

- un plan de gêne sonore (PGS) est réalisé, pour les aérodromes précités, afin d'identifier le champ des nuisances et de définir les riverains pouvant prétendre à l'aide (article 19) (118).

Les dispositions de la loi du 31 décembre 1992 ont été modifiées par l'article 103 de la loi de finances pour 1998, qui a étendu l'aide aux riverains à trois aéroports supplémentaires et prévoit une majoration progressive du taux de la taxe : le coût moyen pour les compagnies aériennes devrait être porté, d'ici à 1999, de 50 centimes à un franc par passager environ. Selon l'ADEME, le produit annuel de la taxe devrait donc passer de 45 millions de francs à plus de 90 millions de francs.

Dans son rapport précité, M. Jean-Pierre Gualezzi formule, au nom du Conseil économique et social, plusieurs observations. Tout en reconnaissant que ce dispositif place la France en bonne position par rapport aux autres pays européens, il fait observer, à titre de comparaison, que le montant de la taxe sur le bruit acquittée aux Pays-Bas représente 12 francs par passager. Il souligne, par ailleurs, que les aéroports militaires, mais également les héliports, notamment celui d'Issy-les-Moulineaux, ne sont pas soumis à la taxe sur les nuisances sonores.

Pourtant, les besoins existent. On peut penser, en particulier, qu'il serait souhaitable, au moins sur deux points, de modifier le décret n° 94-503 du 20 juin 1994, qui encadre le régime des aides aux riverains.

AMÉLIORER L'AIDE AUX RIVERAINS

Le premier point concerne le taux de prise en charge des frais liés aux travaux d'insonorisation, qui est actuellement de 80% (100% quand les bénéficiaires sont des personnes recevant l'allocation complémentaire du fonds national de solidarité ou de certaines formes d'aide sociale). Le second point concerne la règle d'antériorité : les opérations d'insonorisation n'ouvrent droit à une aide que si elles concernent des locaux ou des établissements situés dans le champ des plans de gêne sonore, dont l'autorisation de construire, et le cas échéant la dernière mutation à titre onéreux, est antérieure à la date de publication du premier plan d'exposition au bruit, qui est comprise entre 1974 et 1977 selon les aérodromes.

Il serait souhaitable que ces règles soient assouplies et le Gouvernement s'y est d'ailleurs déjà engagé. En septembre 1997, à l'occasion de l'extension de l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle, le ministre de l'équipement, des transports et du logement a en effet annoncé plusieurs évolutions, dont certaines devraient faire l'objet, très prochainement, d'un décret en Conseil d'Etat. Le pourcentage des travaux restant à la charge des propriétaires devrait être abaissé à 10% pour les ménages non assujettis à l'impôt sur le revenu trois ans de suite. Par ailleurs, la règle d'antériorité ne devrait plus s'appliquer aux logements ayant fait l'objet d'une mutation à titre onéreux postérieurement à la date de publication du premier PEB. Une révision du périmètre des plans de gêne sonore, dans un sens plus favorable aux riverains et plus cohérent par rapport au zonage du plan d'exposition au bruit, est également en cours. Un projet de loi portant création d'une autorité indépendante de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires devrait même être présenté au Parlement.

Lors du Conseil des ministres du 4 mars 1998, la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement a, par ailleurs, annoncé la mise en oeuvre d'une étude conjointe avec le ministère de la défense à propos de " la situation particulière des aéroports militaires et des diverses mesures, y compris d'insonorisation des logements et équipements publics, permettant de réduire les nuisances subies par leurs riverains " (119).

graphique
  38. Proposition : étendre l'aide à l'insonorisation des logements aux riverains des aérodromes militaires et des héliports. Accroître le taux de prise en charge des travaux pour les personnes à revenus modestes et limiter le critère d'antériorité à la date de construction du logement.

CONCLUSION

Si le système fiscal a pour objectifs de financer les politiques publiques et de permettre à l'Etat d'assurer sa mission en matière de redistribution, il doit également intégrer une dimension environnementale, afin de prévenir et de réduire des nuisances et des pollutions qui sont de surcroît socialement très inégalitaires. Le présent rapport avait pour ambition, précisément, de rechercher les moyens d'assurer une certaine cohérence entre la fiscalité et les priorités environnementales.

Dans l'avenir, il conviendra que les choix qui sont à l'origine de la définition et de la mise en oeuvre des politiques publiques prennent en compte leurs conséquences sur l'environnement. Or, de toute évidence, il existe en France, au niveau de l'évaluation de l'impact des politiques publiques sur l'environnement, une grande insuffisance.

RENFORCER L'EXPERTISE EN M ATIÈRE D'ENVIRONNEMENT

On peut regretter, en premier lieu, que les activités du Commissariat général du Plan ne soient pas davantage orientées vers cette évaluation de l'adéquation entre les politiques publiques et les objectifs environnementaux. Le Commissariat général du Plan a, d'une manière générale, une mission permanente de réflexion prospective sur les questions de moyen et long termes, ainsi qu'une capacité d'expertise que le Gouvernement peut utiliser pour analyser l'efficacité des politiques publiques. Dans cette double perspective, les questions environnementales entrent parfaitement dans ses attributions. Ainsi, les propositions formulées par le présent rapport au sujet des aides dans le domaine de l'eau s'appuient en partie sur une étude récente du Commissariat général du Plan (120). L'utilité de cet organisme pour éclairer les décisions des responsables politiques n'est donc plus à démontrer. Ce constat est bien sûr important à un moment où le Commissariat général du Plan se trouve à la croisée des chemins et mène une réflexion, tant sur ses missions que sur son avenir : l'institution est utile, fixons-lui des orientations.

graphique
  39. Recommandation : confier au Commissariat général du Plan une mission permanente d'évaluation de l'impact des politiques publiques sur l'environnement.

SYSTÉMATISER LES ÉTUDES D'IMPACT ENVIRONNEMENTALES

Chaque décision doit par ailleurs s'accompagner d'un bilan coût-avantages, afin de s'assurer que les aspects positifs l'emportent sur les éventuels inconvénients. Cette réflexion, qui curieusement n'allait pas de soi, progresse. Une circulaire de M. Lionel Jospin, Premier ministre, du 26 janvier 1998, a rendu obligatoires les études d'impact pour les projets de loi et de décret en Conseil d'Etat, pérennisant ainsi une tentative engagée à titre expérimental par le précédent Gouvernement (circulaire de M. Alain Juppé, Premier ministre, en date du 21 novembre 1995). Depuis le 1er février 1998, l'étude d'impact est obligatoire pour les projets de loi (article par article pour les lois de finances), les projets d'ordonnance et les projets de décret en Conseil d'Etat ayant un caractère réglementaire. Son objet est d'évaluer a priori " les effets administratifs, juridiques, sociaux, économiques et budgétaires des mesures envisagées ". La version finale de l'étude d'impact des projets de loi est transmise au Parlement. Certes, les études d'impact prévues par la circulaire du 26 janvier dernier couvrent les conséquences environnementales des mesures proposées. Mais on peut regretter que la notion d'environnement ne soit pas explicitement évoquée et on recommandera un ajustement de ce texte afin qu'une rubrique, ou tout au moins une attention particulière, soit consacrée à ce sujet, pour assurer une prise en compte systématique des éventuels effets des propositions de décisions sur l'environnement, en particulier dans le domaine de la fiscalité. On rappellera que cette demande rejoint une préoccupation régulièrement exprimée, depuis plusieurs années, par l'Assemblée nationale, et en particulier par sa Commission des finances (121).

graphique
  40. Recommandation : assurer une prise en compte systématique de l'environnement dans les études d'impact des projets de loi et de décret.

Quarante propositions et recommandations, tel est donc le programme de la réforme ambitieuse dont la France a besoin pour concilier croissance économique, fiscalité, environnement et cadre de vie. L'enjeu sous-jacent, c'est le développement durable, qui doit constituer l'objectif de notre pays et au-delà, de la communauté internationale.

RAPPEL DES PROPOSITIONS ET RECOMMANDATIONS

(Les propositions que votre Rapporteur considère comme prioritaires sont identifiées

par le signe : è)

Pages

---

A.- L'AIR

graphique
è

graphique
  1. Proposition : Faire de la taxe sur la pollution atmosphérique un instrument véritablement incitatif, au moyen, le cas échéant, d'une forte revalorisation des taux, ainsi que d'une plus grande différenciation selon la nocivité des pollutions atmosphériques, d'un élargissement de l'assiette et d'une remise en cause du régime de la parafiscalité, du principe de l'affectation, de la gestion par l'ADEME et de la règle du " retour financier " vers les secteurs contributeurs. Valider législativement la taxation du protoxyde d'azote (N2O) en tant que polluant au sens de la loi du 2 août 1961 et modifier en conséquence les décrets du 11 mai 1990 et du 3 mai 1995 48

graphique
è

graphique
  2. Proposition : ramener le différentiel de taxation entre le gazole et le supercarburant sans plomb à la moyenne européenne en cinq ans, au moyen d'une augmentation de la TIPP sur le gazole et d'un gel de la pression fiscale sur le supercarburant sans plomb. Prévoir la même augmentation pour le supercarburant plombé que pour le gazole 66

graphique
è

graphique
  3. Proposition : mettre en place, dans l'attente d'un relèvement significatif des minima communautaires, un système de remboursement partiel de la fiscalité sur le gazole pour les véhicules de plus de 3,5 tonnes. Compenser, au moyen de ce dispositif, la différence entre un taux de TIPP correspondant au minimum au taux actuel, relevé chaque année dans une proportion au moins égale à l'indice des prix à la consommation, et le taux applicable pour l'ensemble du parc automobile 71

graphique
è

graphique
  4. Proposition : reculer d'un an chaque année le seuil d'ancienneté des véhicules ouvrant droit à des abattements en matière de vignette, de carte grise et de taxe sur les véhicules des sociétés. Affecter le produit ainsi dégagé au financement des transports collectifs locaux (proposition n° 12) 73

graphique
  5. Proposition : geler le taux de la TIPP applicable au GPL et au GNV 76

graphique
  6. Proposition : modifier le régime fiscal appliqué à l'aquazole en exonérant de TIPP la part d'eau de ce carburant 76

graphique
è

graphique
  7. Proposition : étendre aux véhicules fonctionnant en bi-carburation les dispositions particulières prévues pour les véhicules fonctionnant exclusivement au GPL (exonération totale de la taxe sur les véhicules des sociétés et amortissement exceptionnel sur 12 mois) 77

graphique
  8. Proposition : abaisser de 1.000 litres par an, pour les nouvelles immatriculations, le quota annuel de gazole défiscalisé dont bénéficient les taxis 78

  9. Recommandation :

graphique
instaurer une prime d'Etat de 5.000 francs pour tout achat de véhicule neuf fonctionnant au GPL (7.500 francs pour les taxis) 78

 10. Recommandation :

graphique
accroître le taux de prise en charge, par le Comité professionnel de la distribution des carburants (CPDC), des investissements rendus nécessaires, au niveau du réseau de distribution, par des normes environnementales, en particulier pour la vente de GPL 79

 11. Recommandation :

graphique
intégrer, dans les dotations de l'Etat aux collectivités locales, un critère environnemental : les efforts consentis en matière de transports collectifs, en tenant compte des surcoûts liés au recours à des procédés " propres ". 82

graphique
è

 12. Proposition :

graphique
créer un Fonds d'investissement pour les transports collectifs locaux, doté du produit de la suppression progressive des abattements sur la vignette, la carte grise et la taxe sur les véhicules des sociétés (proposition n° 4) 82

 13. Proposition :

graphique
prévoir une adaptation du versement transport pour soutenir les entreprises qui encouragent leurs employés à pratiquer le covoiturage 83

B.- L'EAU

graphique
 14. Recommandation : rendre obligatoires les compteurs d'eau individuels dans les immeubles à construire. Soumettre leur installation à la simple majorité des voix des copropriétaires dans les immeubles existants 99

graphique
 15. Recommandation : mettre en place une tarification progressive de l'eau, accompagnée d'une gratuité pour les 15 premiers m3 d'eau potable livrés chaque année par personne domiciliée à l'adresse de raccordement 100

graphique
è

graphique
 16. Proposition : confier au législateur le soin d'encadrer, dans des limites assez strictes, le taux des redevances perçues par les agences de l'eau, et de fixer les règles relatives à leur assiette et à leur recouvrement, le cas échéant dans le cadre d'une approbation quinquennale des programmes d'intervention. Inscrire dans le nouvel article de loi le principe pollueur-payeur, de façon à assujettir l'ensemble des irrigants aux redevances de prélèvement, et les agriculteurs en général aux redevances de pollution. Prévoir un avis conforme des communautés locales de l'eau, lorsque celles-ci ont été créées, sur les décisions relatives aux redevances, prises, dans leur zone de compétence, par les conseils d'administration des agences 103

graphique
è

graphique
 17. Proposition : instituer une redevance de prévention des inondations, et autoriser les conseils régionaux à percevoir une taxe supplémentaire sur l'extraction de matériaux dans le lit des cours d'eau et dans les nappes alluviales 105

graphique
 18. Proposition : rendre éligibles au Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) les investissements réalisés par un bénéficiaire du fonds dans le cadre de travaux destinés à l'aménagement hydraulique d'un cours d'eau, domanial ou non domanial, dès lors qu'ils présentent un caractère d'urgence et que les propriétaires se révèlent défaillants. A terme, étendre cette mesure à l'ensemble des investissements exposés dans les mêmes conditions sur des biens appartenant à des tiers non bénéficiaires 106

graphique
 19. Recommandation : renforcer la place des associations de protection de la nature et de consommateurs, ainsi que des élus, dans les conseils d'administration des agences de l'eau et dans les comités de bassin. Accroître, en particulier, le nombre des représentants des agglomérations urbaines 107

C.- LES DÉCHETS

graphique
  20. Recommandation : mettre en place des contrats de progrès au terme desquels les producteurs ou les importateurs dont les produits sont commercialisés dans des emballages s'engageraient sur des objectifs précis de prévention (réduction à la source des quantités d'emballages) et de valorisation 120

graphique
  21. Recommandation : étendre le dispositif mis en place par le décret du 1er avril 1992 pour les emballages à d'autres produits " en fin de vie " (déchets de l'automobile, déchets électriques ou électroniques, etc.) 121

graphique
  22. Proposition : exonérer de la taxe sur certaines dépenses de publicité les prestations réalisées sur des supports recyclés, ou affecter la moitié de son produit à des aides aux collectivités locales pour compenser le surcoût qu'elles subissent en cas de collecte séparative et de tri des déchets. Le cas échéant, augmenter le taux de cette taxe. 122

graphique
  23. Proposition : clarifier les règles d'organisation du service de l'élimination des ordures ménagères. Fractionner en plusieurs parts son mode de financement en cas de transfert de compétence afin que chaque collectivité ou groupement de communes lève la part correspondant à sa compétence 125

graphique
  24. Proposition : généraliser le financement du service public d'élimination des déchets, en reconsidérant les cas d'exonération prévus à l'article 1521 du code général des impôts (locaux sans caractère industriel ou commercial possédés ou loués par l'Etat et les collectivités locales, usines, etc.). 126

graphique
  25. Proposition : permettre aux communes de n'exonérer qu'en partie de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères les assujettis à la redevance spéciale. 126

graphique
è

graphique
  26. Proposition : permettre aux collectivités locales de confier, par convention, aux services du Trésor, la charge des opérations relatives à la perception de la redevance spéciale et de la redevance générale d'enlèvement des ordures ménagères 127

graphique
  27. Proposition : étendre les aides (à l'équipement et aux communes d'accueil) du Fonds de modernisation de la gestion des déchets (FMGD) aux centres de stockage. 129

graphique
è

graphique
  28. Proposition : soumettre au taux réduit de la TVA les prestations d'enlèvement et de traitement des déchets ménagers effectuées dans le cadre du service public local. Le cas échéant, limiter cette mesure, dans un premier temps, aux prestations de collecte sélective et de traitement des déchets en vue d'une valorisation 131

graphique
  29. Proposition : publier une circulaire qui établisse clairement les règles de remboursement par le FCTVA de la taxe ayant grevé les dépenses d'investissement des collectivités locales donnant partiellement lieu à la réalisation d'opérations soumises à la TVA 132

graphique
  30. Proposition : permettre aux collectivités locales et à leurs groupements de bénéficier d'une attribution du FCTVA, au titre de leurs investissements dans des équipements de traitement des déchets, à hauteur de la fraction pour laquelle la TVA n'a pas été déduite fiscalement, quel que soit le montant des recettes de valorisation auxquels donnent lieu ces installations. Le cas échéant, limiter cette mesure, dans un premier temps, aux collectivités qui pratiquent le tri sélectif 133

D.- LES SOLS

graphique
  31. Proposition : autoriser les collectivités locales à conditionner ou à moduler l'exonération trentenaire de taxe foncière sur les propriétés non bâties des terrains ensemencés, plantés ou replantés en bois (article 1395-1° du code général des impôts), en fonction des espèces (feuillues ou résineuses) et des espaces concernés 139

graphique
  32. Proposition : exonérer de taxe foncière sur les propriétés non bâties les parcelles situées à l'intérieur d'un espace naturel protégé 143

graphique
  33. Proposition : favoriser le développement d'une politique de protection des espaces naturels sensibles au moyen d'une généralisation de la taxe départementale instituée à cet effet 143

graphique
  34. Proposition : étendre le dispositif d'allégement fiscal conçu pour le Conservatoire du littoral (exonération des droits de succession et d'enregistrement) aux conservatoires régionaux d'espaces naturels reconnus d'utilité publique 144

graphique
è

graphique
  35. Proposition : instituer une taxe sur la production et l'importation d'engrais et de produits phytosanitaires 146

graphique
è

graphique
  36. Proposition : aligner les installations classées agricoles sur le régime de droit commun des installations classées industrielles et commerciales, et revaloriser les taux de la taxe unique et de la redevance annuelle 147

E.- LE BRUIT

graphique
  37. Proposition : réaliser, dans un délai de dix ans, le programme de résorption des points noirs du bruit, en portant les efforts en priorité sur les nuisances susceptibles de gêner le sommeil des riverains. Le cas échéant, mettre en place un mode de financement spécifique 151

graphique
  38. Proposition : étendre l'aide à l'insonorisation des logements aux riverains des aérodromes militaires et des héliports. Accroître le taux de prise en charge des travaux pour les personnes à revenus modestes et limiter le critère d'antériorité à la date de construction du logement 154

CONCLUSION

graphique
  39. Recommandation : confier au Commissariat général du Plan une mission permanente d'évaluation de l'impact des politiques publiques sur l'environnement 155

graphique
  40. Recommandation : assurer une prise en compte systématique de l'environnement dans les études d'impact des projets de loi et de décret 156

LISTE DES PERSONNES RENCONTRÉES

Le 3 décembre 1997

MM. Daniel Versane, directeur adjoint de Vivendi, Marc Reneaume, directeur des services publics à la CGEA (pôle propreté), et Mme Marie-Thérèse Suart-Fioravante, chargée des relations institutionnelles.

Le 10 décembre 1997

M. Jean-Luc Trancart, directeur de la clientèle à la Lyonnaise des eaux, Mme Valérie Alain, chargée des relations institutionnelles, MM. Jacques Pétry, président de la SITA (pôle déchets) et Dominique Pin, directeur général.

Le 15 mars 1998

M. Stéphane Austry, conseiller technique au cabinet du ministre de de l'économie, des finances et de l'industrie.

Le 18 mars 1998

M. Alain Lipietz, économiste au Centre d'études prospectives d'économie et mathématiques appliquées à la planification (CEPREMAP) et membre du Conseil d'analyse économique.

Le 1er avril 1998

M. Jean-Pierre Brard, député.

Le 2 avril 1998

M. Jean-Charles Hourcade, directeur du Centre international de recherche sur l'environnement et le développement (CIRED), École des Hautes Études en Sciences Sociales.

Le 2 avril 1998

M. Patrick Legrand, directeur de la mission " Environnement-Santé ", ancien président de France-Nature-Environnement, chercheur à l'Institut national de la recherche agronomique (INRA).

Le 3 avril 1998

Mme Sylvie Caudal, professeur agrégée (Institut de droit de l'environnement).

Le 8 avril 1998

M. Dominique Bureau, économiste, membre du Conseil d'analyse économique.

Le 8 avril 1998

MM. Philippe Chollet, Directeur de la stratégie de PSA-Peugeot-Citroën, et Hervé Pichon, chargé des relations institutionnelles.

Le 8 avril 1998

Mme Caroline London, avocate et fiscaliste de l'environnement au cabinet Brizay-London-Paris.

Le 8 avril 1998

M. Xavier Delache, économiste, adjoint au chef de service Économie et concurrence à l'Autorité de régulation des télécommunications.

Le 9 avril 1998

MM. Arnaud Colson, président de l'Union nationale des industries de carrières et matériaux de construction (UNICEM) Ile-de-France, Ivan Bonnefon, délégué général, et Mme Virginie de Villepin, chargée des relations institutionnelles.

Le 15 avril 1998

M. Yves Martin, ingénieur des mines, président de la section technique du Conseil général des mines.

Le 15 avril 1998

M. Dominique Jourdain, avocat, président des Eco-maires.

Le 19 avril 1998

M. Thierry Wahl, conseiller pour les affaires économiques et budgétaires au cabinet de la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Le 21 avril 1998

Mme Anne Bolliet, directrice adjointe du cabinet du ministre de l'équipement, des transports et du logement, MM. Jean-Yves Perrot, directeur des Affaires économiques et internationales, et Jean Guillot, adjoint au directeur de la Direction des transports terrestres.

Le 22 avril 1998

Mme Bettina Laville, conseillère pour l'aménagement du territoire et de l'environnement au cabinet du Premier ministre.

Le 28 avril 1998

Mme Pascale Pécheur, secrétaire générale du Groupement des autorités responsables de transport (GART).

Le 28 avril 1998

M. Jean-Paul Deneuville, délégué général à la Fédération nationale des transporteurs routiers, et Mme Laurence Delchiaro, responsable de la communication.

Le 30 avril 1998

M. Michel Suchod, député.

Le 4 mai 1998

M. Jean-Pierre Gualezzi, conseiller économique au Conseil économique et social, et Mme Marielle Larrieu, administrateur à la section du cadre de vie.

Le 5 mai 1998

MM. Michel Bouvard et Charles de Courson, députés.

Le 6 mai 1998

MM. Paul Deffontaine, président du Cercle national du recyclage, et

Rémi Lantreibecq, délégué général.

Le 6 mai 1998

M. Pierre Radane, président de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME).

Le 13 mai 1998

M. Patrick Février, adjoint au directeur de la Direction de l'eau au ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Le 13 mai 1998

Mme Liliane Elsen, secrétaire nationale de France-Nature-Environnement.

Le 13 mai 1998

M. Pierre Duquesne, conseiller pour les affaires économiques et financières au cabinet du Premier ministre, Mme Florence Parly, conseiller pour les affaires budgétaires, MM. Jean Bensaïd et Pierre Guelman, conseillers techniques.

Le 14 mai 1998

M. Guillaume Sainteny, maître de conférence à l'Institut d'études politiques de Paris.

Le 20 mai 1998

M. Guy Hascoët, député.

Le 29 mai 1998

MM. Joseph Daniel, directeur des relations institutionnelles à Total, et Guy Zahan, chargé des relations avec le Parlement.

Le 3 juin 1998

M. Xavier Matharan, avocat.

Le 11 juin 1998

M. Alexandre Tessier, directeur de l'Association française des entreprises privées (AFEP).

Le 11 juin 1998

M. Armand Lepas, directeur des affaires économiques générales au Conseil national du patronat français (CNPF), et Mme Anne Mounolou, chef du service des études législatives.

Le 12 juin 1998

M. François Lucas, conseiller technique au cabinet du ministre de l'intérieur.

Le 17 juin 1998

M. Philippe Tillous-Borde, directeur général de la Sofiprotéol, société financière pour les bio-carburants.

Le 18 juin 1998

M. Claude Lamure, ingénieur général des Ponts et Chaussées.

ANNEXE :

COMPARAISON DES TAXES D'ENVIRONNEMENT DANS LES PRINCIPAUX PAYS DE L'OCDE

APERÇU DES TAXES ET REDEVANCES LIÉES À L'ENVIRONNEMENT DANS LES PRINCIPAUX PAYS DE L'OCDE *
(au 1er mars 1997)

Mesures fiscales appliquées à des fins environnementales

Australie

Autriche

Belgique

Canada

Danemark

Finlande

France

Allemagne

Italie

Japon

Luxem-bourg

Pays-Bas

Norvège

Portugal

Espagne

Suède

Suisse

Royaume
Uni

Etats-Unis

Carburants :

Essence au plomb/sans plomb (différenciation)

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

Essence (différenciation selon la qualité)

l

l

Gazole (différenciation selon la qualité)

l

l

l

l

Contenu en carbone/énergie

l

l

l

l

l

Teneur en soufre

l

l

l

Autres droits d'accises (autres que la TVA)

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

Autres produits énergétiques :

Autres droits indirects

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

Contenu en carbone/énergie

l

l

l

l

l

l

l

Teneur en soufre

l

l

l

l

l

l

NOx

l

l

Taxation des véhicules :

Ventes /droits d'accises/droits d'immatriculation modulés (automobiles)


l


l


l


l


l


l


l


l


l


l


l


l


l

Taxe routière/taxe d'immatriculation modulées (automobiles)


l


l


l


l


l


l


l


l


l


l


l


l

Intrants agricoles :

Engrais

l

l

Pesticides

l

l

l

l

Autres biens :

Piles et batteries

l

l

l

l

l

Sacs en plastique

l

Sacs en papier

l

Récipients jetables

l

l

l

l

l

Pneus

l

l

l

l

CFCs et/ou halons

l

l

l

Appareils photo jetables

l

Redevance sur lubrifiants

l

l

l

Redevance de pollution par les hydrocarbures

l

l

l

Solvants

l

Vaisselle jetable

l

.../...

APERÇU DES TAXES ET REDEVANCES LIÉES À L'ENVIRONNEMENT DANS LES PRINCIPAUX PAYS DE L'OCDE (suite) *
(au 1er mars 1997)

Mesures fiscales appliquées à des fins environnementales

Australie

Autriche

Belgique

Canada

Danemark

Finlande

France

Allemagne

Italie

Japon

Luxem-bourg

Pays-
Bas

Norvège

Portugal

Espagne

Suède

Suisse

Royaume
Uni

Etats-Unis

Dispositions de la fiscalité directe :

Investissements dans l'environnement/
amortissement accéléré


l


l


l


l


l


l


l


l


l


l


l


l

Voiture de fonction intégrée dans le revenu imposable


l


l


l

Frais de transport domicile-travail payés par l'employeur, inclus dans le revenu imposable


l


l


l


l


l


l


l


l


l


l

Parking gratuit, inclu dans le revenu imposable

l

l

Frais de transport domicile-travail déductibles du revenu imposable s'il y a utilisation des transports en commun



l

Transport aérien :

Redevances sur le bruit

l

l

l

l

l

l

l

l

l

Autres taxes

l

l

l

l

l

l

Taxes et redevances sur l'eau :

Eau (consommation)

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

Redevances pour l'évacuation des eaux usées

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

Eaux usées

l

l

l

l

l

l

l

l

Lisier

l

Redevances pour l'élimination et la gestion des déchets :

Déchets municipaux

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

Élimination des déchets

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

Déchets dangereux

l

l

l

l

l

l

l

l

Mise en décharge

l

l

l

l


* Ce tableau n'inclut pas les taxes et redevances perçues au niveau de l'état (fédéré) ou de la région. Les différentes structures administratives empêchent une comparaison internationale complète.


Source : OCDE

ANNEXE :

COMPARAISON DES TAXES D'ENVIRONNEMENT DANS LES PRINCIPAUX PAYS DE L'OCDE

APERÇU DES TAXES ET REDEVANCES LIÉES À L'ENVIRONNEMENT DANS LES PRINCIPAUX PAYS DE L'OCDE *
(au 1er mars 1997)

Mesures fiscales appliquées à des fins environnementales

Australie

Autriche

Belgique

Canada

Danemark

Finlande

France

Allemagne

Italie

Japon

Luxem-bourg

Pays-Bas

Norvège

Portugal

Espagne

Suède

Suisse

Royaume
Uni

Etats-Unis

Carburants :

Essence au plomb/sans plomb (différenciation)

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

Essence (différenciation selon la qualité)

l

l

Gazole (différenciation selon la qualité)

l

l

l

l

Contenu en carbone/énergie

l

l

l

l

l

Teneur en soufre

l

l

l

Autres droits d'accises (autres que la TVA)

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

Autres produits énergétiques :

Autres droits indirects

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

Contenu en carbone/énergie

l

l

l

l

l

l

l

Teneur en soufre

l

l

l

l

l

l

NOx

l

l

Taxation des véhicules :

Ventes /droits d'accises/droits d'immatriculation modulés (automobiles)


l


l


l


l


l


l


l


l


l


l


l


l


l

Taxe routière/taxe d'immatriculation modulées (automobiles)


l


l


l


l


l


l


l


l


l


l


l


l

Intrants agricoles :

Engrais

l

l

Pesticides

l

l

l

l

Autres biens :

Piles et batteries

l

l

l

l

l

Sacs en plastique

l

Sacs en papier

l

Récipients jetables

l

l

l

l

l

Pneus

l

l

l

l

CFCs et/ou halons

l

l

l

Appareils photo jetables

l

Redevance sur lubrifiants

l

l

l

Redevance de pollution par les hydrocarbures

l

l

l

Solvants

l

Vaisselle jetable

l

.../...

APERÇU DES TAXES ET REDEVANCES LIÉES À L'ENVIRONNEMENT DANS LES PRINCIPAUX PAYS DE L'OCDE (suite) *
(au 1er mars 1997)

Mesures fiscales appliquées à des fins environnementales

Australie

Autriche

Belgique

Canada

Danemark

Finlande

France

Allemagne

Italie

Japon

Luxem-bourg

Pays-
Bas

Norvège

Portugal

Espagne

Suède

Suisse

Royaume
Uni

Etats-Unis

Dispositions de la fiscalité directe :

Investissements dans l'environnement/
amortissement accéléré


l


l


l


l


l


l


l


l


l


l


l


l

Voiture de fonction intégrée dans le revenu imposable


l


l


l

Frais de transport domicile-travail payés par l'employeur, inclus dans le revenu imposable


l


l


l


l


l


l


l


l


l


l

Parking gratuit, inclu dans le revenu imposable

l

l

Frais de transport domicile-travail déductibles du revenu imposable s'il y a utilisation des transports en commun



l

Transport aérien :

Redevances sur le bruit

l

l

l

l

l

l

l

l

l

Autres taxes

l

l

l

l

l

l

Taxes et redevances sur l'eau :

Eau (consommation)

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

Redevances pour l'évacuation des eaux usées

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

Eaux usées

l

l

l

l

l

l

l

l

Lisier

l

Redevances pour l'élimination et la gestion des déchets :

Déchets municipaux

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

Élimination des déchets

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

l

Déchets dangereux

l

l

l

l

l

l

l

l

Mise en décharge

l

l

l

l


* Ce tableau n'inclut pas les taxes et redevances perçues au niveau de l'état (fédéré) ou de la région. Les différentes structures administratives empêchent une comparaison internationale complète.


Source : OCDE

_________

N° 1000.- Rapport d'information de Mme Nicole Brick, déposé en application de l'article 145 du Règlement par la commission des finances, sur la fiscalité écologique.

_________

1 ) Voir le livre de Michelle Dobré, L'opinion publique et l'environnement, IFEN, Les dossiers de l'environnement, 1995.

2 ) Voir Etudes et Travaux n° 15, Novembre 1997, IFEN, Les Français et l'environnement, " vague " de début 1997 (échantillon de 2.005 individus âgés de 18 ans et plus).

3 ) Michelle Dobré, L'opinion publique et l'environnement, op. cit., pages 47-49.

4 ) Eurobaromètre (Commission européenne, DG 24, Bruxelles), Les citoyens face aux problèmes d'environnement, 1997.

5 ) Six gaz sont pris en considération : dioxyde de carbone (CO2), méthane (CH4), oxyde nitreux (N20), hydrofluorocarbones (HFC), hydrocarbures perfluorés (PFC) et hexafluorure de soufre (SF6).

6 ) Sur le lien entre croissance économique et environnement, et les différentes thèses en présence, les contributions sont nombreuses. On peut se reporter, en particulier, au rapport de l'atelier " Environnement, économie et croissance " (octobre 1993) de la commission " environnement, qualité de vie, croissance " du XIème plan, Commissariat général du plan, La Découverte/La Documentation française, Paris, 1993. Certains articles étrangers ont été traduits et reproduits dans la sélection de Problèmes économiques. Voir notamment : David Pearce, " Toward the sustainable economy : environment and economics ", The royal bank of Scotland review, decembre 1991 (in : Problèmes économiques, n° 2278, 3 juin 1992), et Rolf-Ulrich Sprenger, " Umweltschutz und Wirtschaftswachstum, zum für und wider der zentralen thesen in einer kontroverse ohne ende ", Gewerkschaftliche Monatshefte, août 1994 (in : Problèmes économiques, n° 2407, 18 janvier 1995).

7 ) Léo Maier et Ronald Steenblik, " Vers une agriculture durable ", L'Observateur de l'OCDE, n° 196, octobre-novembre 1995.

8 ) Le concept d'externalité désigne tout effet indirect induit par les activités de production ou de consommation de certains agents sur le bien-être d'autres agents. Le qualificatif indirect signifie que l'effet n'agit pas par l'intermédiaire d'un système de prix et n'est pas intégré aux décisions de celui qui le génère. Une externalité traduit donc un phénomène qui échappe au fonctionnement du marché, ce qui est souvent le cas dans le domaine de l'environnement. Voir Philippe Bauduin, " La prise en compte des externalités environnementales ", La revue de l'énergie, avril 1995, in : Problèmes économiques, n° 2451, 20 décembre 1995.

9 ) Voir l'analyse réalisée par M. Jérôme Roch, " Environnement et emploi : vers une observation statistique des emplois dans le domaine de l'environnement ", IFEN, Note de méthode n° 5, janvier 1996. On se reportera également aux données de l'environnement, publiées par l'IFEN, et notamment les numéros 10 (" Environnement : quelles formations pour quels emplois ? ", décembre 1994) et 32 (" Les marchés de l'environnement créent plus d'emplois que de métiers ", octobre 1997).

10 ) Sur cette question, on pourra se reporter aux travaux du Conseil d'analyse économique (CAE), et notamment aux études conduites par MM. Alain Lipietz, Dominique Bureau et Jean-Charles Hourcade, dont une synthèse est présentée dans La lettre du CAE n° 5 (mai 1998).

11 ) L'un des plus anciens programmes volontaires relatifs à l'énergie est en effet le " Programme d'économie d'énergie dans l'industrie canadienne ", qui engage 700 entreprises à améliorer et à surveiller le rendement énergétique dans l'ensemble des industries manufacturières et minières.

12 ) Pour une étude approfondie des actions volontaires, on pourra se reporter à la contribution de Lee Solsbery et Peter Wiederkehr, " Energie : actions volontaires contre le CO2 ", L'Observateur de l'OCDE, n° 196, octobre-novembre 1995. Les auteurs constatent que cette formule est encore utilisée, souvent en complément d'autres mesures, mais regrettent qu'elle ne le soit pas davantage, notamment dans le domaine de la réduction des gaz à effet de serre.

13 ) Sur l'étude des différents instruments et de leur complémentarité, on se reportera, en particulier, à la contribution de Xavier Delache et Sylviane Gastaldo, " Les instruments des politiques d'environnement ", Economie et Statistique, n° 258-259, octobre-novembre 1992. Voir également le rapport de l'atelier " Environnement, économie et croissance " de la Commission " Environnement, qualité de vie, croissance " du XIème Plan (octobre 1993), ainsi que l'article de M. Philippe Bauduin publié dans La revue de l'énergie d'avril 1995, " La prise en compte des externalités environnementales ", op. cit.

14 ) Claude Henry, " Le principe pollueur-payeur, vingt ans après ", Insee Méthodes n° 39-40, page 13.

15 ) Rapport sur l'évolution de l'économie nationale et des finances publiques déposé par le Gouvernement pour le débat d'orientation budgétaire, mai 1998, page 52.

16 ) Voir Xavier Delache et Sylviane Gastaldo, " Les instruments des politiques d'environnement ", op. cit., pages 27-34.

17 ) IFEN, " Les taxes liées à l'environnement, l'énergie et les transports ", Etudes et travaux, n° 14, novembre 1997. Une étude moins détaillée a été publiée dans Les données de l'environnement (n° 33, décembre 1997).

18 ) OCDE, "Ecotaxes et réforme fiscale verte ", Paris, 1997, page 8.

19 ) Pour les conditions d'application des articles 3 et 4, on se reportera au décret n° 98-360 du 6 mai 1998. Le régime d'agrément des organismes de surveillance de la qualité de l'air a été fixé par le décret n° 98-361 du même jour. S'agissant du titre II, voir le décret n° 98-362 du 6 mai 1998 relatif aux plans régionaux pour la qualité de l'air.

20 ) Le décret n° 80-854 du 30 octobre 1980 qui régit le dispositif général de la parafiscalité prévoit notamment la limitation à 5 ans de la durée de vie des taxes parafiscales.

21 ) Seules les UIOM existantes sont susceptibles d'être aidées au titre de la taxe parafiscale sur la pollution atmosphérique. Les installations nouvelles peuvent également être aidées mais au titre du fonds de modernisation de la gestion des déchets.

22 ) Le secteur de la chimie, qui est le plus gros émetteur de NOx et de COV, est le principal assujetti. Il est suivi par le secteur du raffinage, qui produit en particulier du SO2. Les unités d'incinération d'ordures ménagères sont à l'origine des plus grosses émissions de HCl, mais ne sont que le cinquième assujetti. EDF-GDF est le troisième assujetti, la métallurgie-sidérurgie le quatrième.

23 ) Cour administrative d'appel de Paris, Société Hydro Agri France, 2 avril 1998, N° 95PA03779 et n° 95PA02857.

24 ) On rappellera qu'une telle validation ne peut être mise en oeuvre que sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée et qu'elle ne s'appliquerait donc pas aux arrêts précités de la Cour administrative d'appel de Paris. Les deux autres conditions nécessaires à sa mise en oeuvre, conformément à la jurisprudence du Conseil constitutionnel dans ce domaine, seraient remplies : non-rétroactivité de la loi pénale et motif d'intérêt général.

25 ) Les oxydes d'azote (NOx) interviennent dans la pollution acide ainsi que dans les phénomènes de formation/disparition de l'ozone. Étant liés à la pollution automobile, ils sont souvent traités conjointement avec le monoxyde de carbone (CO), dont la teneur croissante dans l'atmosphère participe à l'effet de serre et au réchauffement du climat. Le plomb automobile, quant à lui, peut être dommageable pour la santé humaine par accumulation dans les tissus corporels et lésions du système nerveux central. Enfin, le dioxyde de soufre (SO2) et les particules sont fréquemment associés, car ils sont souvent issus des mêmes sources d'émission (procédés industriels et surtout transports routiers). Ils ont des effets sur la santé de l'homme (altération des fonctions respiratoires et maladies cardio-vasculaires). Certaines de ces émissions sont régies par des normes européennes (directive 80/779/CEE pour les particules en suspension, directive 85/210/CEE pour la teneur en plomb dans l'essence, directive 85/203/CEE pour les oxydes d'azote).

26 ) IFEN, Les données de l'environnement, n° 2, février 1994.

27 ) C'est le cas, en particulier, de Disneyland Paris, qui a mis en place des mesures destinées à encourager ses employés à pratiquer le covoiturage (vidanges, contrôles antipollution, lavages...).

28 ) " Un contrat automobile pour le développement et l'emploi ", Rapport d'information, Assemblée nationale, n° 530 (première partie) présenté par M. Gérard Fuchs au nom de la mission d'information commune sur la situation et les perspectives de l'industrie automobile en France et en Europe, 12 décembre 1997, page 43.

29 ) " La maîtrise de l'énergie : rapport d'évaluation ", La Documentation française, 1998, page 192.

30 ) " Transports : pour un meilleur choix des investissements ", groupe de travail présidé par M. Marcel Boiteux, Commissariat général du Plan, novembre 1994, La documentation française, page 45.

31 ) " La fiscalité et l'environnement : le cas de la France ", Documents OCDE, 1994, pages 16-17.

32 ) On ajoutera que le projet de loi pour l'aménagement durable du territoire propose une évolution profonde en matière d'infrastructures, en remplaçant les anciens schémas directeurs uni-modaux par deux schémas de services, l'un pour les voyageurs, l'autre pour les marchandises. Ces schémas se voient fixer des objectifs environnementaux et doivent concourir au rééquilibrage des parts modales, en faveur des modes les moins polluants.

33 ) Entre 1975 et 1990, la population urbaine a progressé de 9,1%. Au cours de la dernière décennie seulement, l'habitat et les activités humaines ont augmenté leur surface d'environ 500 km2 chaque année. L'extension rapide des grandes banlieues a provoqué un allongement et une multiplication des déplacements domicile-travail. Selon une enquête de l'Ifop, 54% des Français s'estimaient contraints, en 1994, de recourir à leur automobile. Une étude de la Sofres de 1997 aboutit au même résultat en ce qui concerne le pourcentage d'automobilistes qui ont recours à leur véhicule tous les jours (53,6%) et le taux d'utilisation pour les trajets domicile-travail (54,2%).

34 ) On se reportera en particulier au rapport n° 528 présenté par M. Didier Migaud, Rapporteur général, sur le projet de loi de finances pour 1998 (nouvelle lecture), pages 34-40.

35 ) Instruction du 31 mars 1998, 3 C-1-98, B.O.I. n° 82 du 29 avril 1998.

36 ) Article 8 de la directive n° 92/81 modifiée du Conseil du 19 octobre 1992 relative à l'harmonisation des structures des droits d'accises sur les huiles minérales.

37 ) Rapport d'information n° 530, op. cit., page 197.

38 ) Rapport du Gouvernement précité, page 60.

39 ) On ne compte plus les études parlementaires qui réclament ce rééquilibrage. Tel est le cas, comme on l'a vu, du rapport de la mission d'information commune créée à l'Assermblée nationale sur la situation de l'automobile. La dernière prise de position dans ce sens est celle de la Commission d'enquête du Sénat sur la politique énergétique de la France (rapport n° 439, mai 1998).

40 ) " La maîtrise de l'énergie : rapport d'évaluation ", op. cit., page 195.

41 ) M. Alain Barrau, Rapporteur au titre de la Délégation pour l'Union européenne, souhaite également, dans son récent rapport " Après l'euro, l'emploi " (N° 904, 14 mai 1998), " que le Gouvernement français apporte son soutien au principe d'une taxation minimale de l'ensemble des produits énergétiques ". Sur ce sujet, la position française semble d'ailleurs assez claire. La contribution française à la rencontre informelle des ministres des transports et de l'environnement qui s'est tenue à Chester le 26 avril dernier indique que " la fixation de minima pour les accises est indispensable pour éviter des distorsions de concurrence et des effets pervers sur les politiques d'économie d'énergie. (...) Nous souhaitons donc vivement qu'aboutissent les travaux en cours sur la directive sur la taxation des produits énergétiques ". La France insiste également sur la nécessité d'harmoniser les réglementations sociales et considère que la possibilité d'instaurer un mécanisme approprié pour les usages professionnels devrait même être subordonnée à la mise en oeuvre de progrès dans ce domaine.

42 ) Le taux proposé pour 2002 est un objectif qui doit être confirmé dans son caractère contraignant par un rapport ultérieur et une proposition de la Commission.

43 ) La proposition de directive restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques prévoit d'élargir cette possibilité en permettant aux Etats membres de différencier, sans autorisation préalable s'ils respectent les minima communautaires, le taux de taxation applicable à un produit, en fonction de sa qualité ou de son usage.

44 ) La limite de 3,5 tonnes (PTAC) est en effet le seuil qui différencie les camions des autres véhicules. Il constitue la limite entre les permis B et C. Il correspond également à la définition des véhicules utilitaires en matière de carte grise (article 1599 sexdecies-I-2-1° du code général des impôts).

45 ) On rappellera que le tarif de la taxe sur les véhicules des sociétés est fixé, depuis l'article 31 de la loi de finances pour 1998, à 6.800 francs pour les véhicules de 7 CV fiscaux et moins, et à 14.800 francs pour les véhicules de 8 CV fiscaux et plus.

46 ) Sur le CPDC, la taxe parafiscale sur certaines huiles minérales et la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat, voir les décrets du 19 mars 1991 (n° 91-284 et 91-285), du 5 mars 1997 (97-201), du 28 mai 1997 (97-557) et du 2 mars 1998 (98-132).

47 ) Le versement transport s'élève à environ 21 milliards de francs sur l'ensemble du territoire français, dont 11,6 milliards de francs pour l'Ile-de-France. La très grande majorité des autorités organisatrices de transport l'ont instauré, et plus de la moitié d'entre elles sont déjà au taux maximum, notamment dans les agglomérations de plus de 100.000 habitants.

48 ) Voir la circulaire relative aux aides de l'Etat aux transports collectifs de province publiée au Bulletin officiel du ministère de l'équipement, des transports et du tourisme du 10 janvier 1995 sous le n° 94-91.

49 ) Loi sur l'eau du 3 janvier 1992, qui tranpose notamment en droit français la directive européenne du 21 mai 1991 sur les eaux résiduaires urbaines.

50 ) IFEN, Les données de l'environnement, numéro 27, janvier 1997. La dépense nationale recouvre l'ensemble des dépenses réalisées en France par les ménages, les entreprises et les administrations publiques. La gestion des eaux usées, qui arrive en première position devant les déchets, comprend l'ensemble des activités liées aux réseaux d'assainissement, aux installations de traitement, à l'assainissement autonome, aux mesures et contrôles ainsi qu'à la réduction à la source de la pollution des eaux, à l'exclusion du secteur de l'alimentation en eau potable.

51 ) Le FNDAE est également alimenté par un prélèvement sur le produit du Pari mutuel urbain (PMU). Il finance des travaux dans le domaine de l'eau et de l'assainissement au profit des communes rurales.

52 ) Des normes européennes ont également été adoptées en ce qui concerne la qualité des eaux de baignade, des cours d'eau et des eaux marines, qui ne sont cependant pas étudiées dans le cadre du présent rapport.

53 ) La demande en eau potable, qui avait régulièrement augmenté au cours des années soixante-dix, a ralenti dans la décennie suivante, et diminue depuis 1989. Bien sûr, l'augmentation du prix de l'eau n'est pas la seule explication : la réduction des pertes en distribution, des équipements ménagers plus économiques, un recyclage croissant, participent également à cette évolution. Voir Les données de l'environnement, IFEN, numéro 36, avril 1998, " L'eau potable ne coule pas que de source ".

54 ) Commissariat général du Plan, " Evaluation du dispositif des agences de l'eau ", Rapport au Gouvernement, la Documentation française, 1997, pages 136-137. La Compagnie générale des eaux occuperait la moitié du secteur privé et plus de 40% de l'ensemble des abonnés, la Lyonnaise des eaux détiendrait 25% du marché intérieur, la Société d'aménagement urbain et rural (SAUR), surtout présente dans les petites communes du grand Ouest, interviendrait dans 15,9% des communes, soit 10% de la population et 8,2% des volumes d'eau facturés, et la Compagnie internationale de services et d'environnement (CISE) compterait pour 7,7% des communes et 4,4% des volumes distribués.

55 ) La date d'entrée en vigueur de l'instruction M 49 a été reportée au 1er janvier 1996 pour les communes de 500 à 5.000 habitants et au 1er janvier 1997 pour les communes de moins de 500 habitants. Surtout, l'article 75 de la loi du 12 avril 1996 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier a considérablement assoupli l'interdiction du financement par le budget communal pour les communes de moins de 3000 habitants, qui peuvent prendre en charge des dépenses dont la nature n'est plus limitée aux seuls investissements importants, sans être soumises aux obligations de délibération motivée et de production de justificatifs. L'article 84 de la loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, adoptée définitivement par l'Assemblée nationale le 3 juin 1998, permet enfin aux communes de moins de 500 habitants de déroger à l'obligation d'établir un budget annexe pour les services d'eau et d'assainissement gérés en régie.

56 ) Rapport de la Cour des comptes sur les agences de bassin (1988-1994), 9 octobre 1996. Rapport du Commissariat général du Plan, " Evaluation du dispositif des agences de l'eau ", 1997, op. cit.

57 ) Par arrêté du 14 novembre 1991 modifiant l'arrêté du 14 septembre 1966, le nom " agence de l'eau " a remplacé celui d'" agence financière de bassin ".

58 ) Le décret n° 66-700 du 14 septembre 1966 définit les six agences de bassin, à savoir, dans l'ordre d'importance financière, Seine-Normandie, Rhône-Méditerranée-Corse, Rhin-Meuse, Loire-Bretagne, Adour-Garonne et Artois-Picardie.

59 ) Les activités agricoles sont en grande partie à l'origine de la pollution des eaux par les matières azotées et phosphorées (émissions de nitrates et phosphates). Les sources ponctuelles correspondent à des rejets directs dans l'eau. Mais le problème le plus important et le plus complexe à résoudre est celui des pollutions diffuses, qui se produisent à partir des terres agricoles et qui sont liées à un apport trop important d'éléments fertilisants d'origine minérale (engrais) ou organique (effluents d'élevage). Cette question sera abordée dans le chapitre du présent rapport consacré à la pollution des sols.

60 ) Il est d'ailleurs significatif de constater que la Commission européenne a présenté une proposition de directive du Conseil instituant un cadre pour l'action communautaire dans le domaine de l'eau (voir la proposition modifiée du 26 novembre 1997, COM (97) 49 final) qui tend à généraliser le principe d'une gestion intégrée de l'eau par bassins hydrographiques. Si certains aspects de cette proposition de directive sont contestables, il n'en reste pas moins qu'elle conforte l'approche française de la politique de l'eau et le système des agences. Sur cette proposition de directive, on peut se référer, en particulier, au rapport de Mme Béatrice Marre présenté au nom de la Délégation pour l'Union européenne (" L'Europe de l'eau : une nouvelle approche ", n° 739), et au rapport de M. Daniel Marcovitch présenté au nom de la Commission de la production et des échanges (n° 926).

61 ) Commissariat général du Plan, op. cit., page 35.

62 ) Commissariat général du Plan, op. cit., page 147.

63 ) Commissariat général du Plan, op. cit., page 106.

64 ) Commissariat général du Plan, op. cit., page 149.

65 ) Voir notamment le rapport d'information n°  2342 présenté par M. Ambroise Guellec au nom de la Commission de la production de l'Assemblée nationale, " Le prix de l'eau : de l'explosion à la maîtrise ", 8 novembre 1995, page 60.

66 ) Conseil d'Etat, 14 janvier 1998, Commune de Toulon contre Compagnie des eaux et de l'ozone, requêtes 160138 et 160432.

67 ) Décision du 23 juin 1982 n° 82-124 L.

68 ) S.A. Etablissements Outters, 20 novembre 1985.

69 ) Décision n° 87-239 DC du 30 décembre 1987 : censure d'une disposition donnant à un établissement public, en l'occurrence les chambres de commerce et d'industrie, le pouvoir de fixer, sans limites, le taux d'une taxe additionnelle à la taxe professionnelle pour pourvoir à ses dépenses.

70 ) Articles L.1615-2 du code général des collectivités territoriales et 2-3 du décret n° 89-6345 du 6 septembre 1989 modifiés.

71 ) Le dernier amendement a été adopté dans le cadre de l'examen du projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier. Voir le rapport de nouvelle lecture n° 903, pages 82-85.

72 ) Assemblée nationale, 3ème séance du 17 octobre 1997, Journal officiel page 4328.

73 ) Si l'on s'en tient à une définition stricte des ordures ménagères, le chiffre de 400 kg est ramené à 337 kg. Voir infra.

74 ) Les DIB sont des déchets non toxiques, solides à l'état brut (plastiques, emballages carton, verre, etc.), dont le traitement peut être réalisé dans les mêmes installations que les ordures ménagères.

75 ) On distingue trois catégories de décharge :

- décharge de classe I : recevant les déchets industriels spéciaux ;

- décharge de classe II : recevant les déchets ménagers et assimilés ;

- décharge de classe III : recevant les gravats et les déblais (inertes).

76 ) La taxe d'enlèvement des ordures ménagères peut coexister avec la redevance sur les terrains de camping ou aménagés pour le stationnement des caravanes prévue par l'article L. 2333-77 du code général des collectivités territoriales. Pour les exploitants de ces terrains, la redevance se substitue alors à la taxe.

77 ) L'institution de cette redevance entraîne également, le cas échéant, la suppression de la redevance sur les terrains de camping.

78 ) Cette obligation, qui résulte de l'article 2 de la loi du 13 juillet 1992 relative à l'élimination des déchets, est destinée à responsabiliser les administrations, le commerce et l'artisanat à la question des déchets, en les intégrant dans le service public d'élimination des déchets, et en les faisant participer à son financement.

79 ) On rappellera que le FCTVA permet le remboursement de la TVA grevant les investissements (donc hors fonctionnement), avec un décalage de deux années. De ce point de vue, l'option en faveur de l'assujettissement à la TVA présente des avantages certains, tels que des délais de remboursement très courts et la déduction de la taxe grevant les dépenses de fonctionnement.

80 ) Directives sur l'incinération, la mise en décharge ou le recyclage des emballages.

81 ) Au 28 avril 1998, 79 plans avaient été adoptés par arrêté préfectoral (dont un couvrant deux départements). 5 plans départementaux restaient encore à élaborer, les autres étant en phase d'enquête publique ou de réexamen.

82 ) Décret n° 92-377 du 1er avril 1992 portant application pour les déchets résultant de l'abandon des emballages de la loi n° 75-633 du 15 juillet 1975 modifiée relative à l'élimination des déchets et à la récupération des matériaux.

83 ) On entend, par producteur, quiconque, à titre professionnel, emballe ou fait emballer ses produits en vue de leur mise sur le marché.

84 ) On entend, par emballage, toute forme de contenants ou de supports destinés à contenir un produit, en faciliter le transport ou la présentation à la vente. Ne sont visés, dans ce cadre, que les produits consommés ou utilisés par les ménages.

85 ) Eco-Emballages et, s'agissant du verre, Adelphe, ont été respectivement agréées par arrêtés ministériels du 12 novembre 1992 et du 5 février 1993.

86 ) Le dispositif mis en place par le décret du 1er avril 1992, conjugué avec l'échéance 2002 fixée par la loi du 13 juillet de la même année, répondent aux objectifs de la directive 94/62/CEE du 20 décembre 1994, qui prévoit notamment que :

- entre 50% et 65% en poids des déchets d'emballage doivent être valorisés ;

- entre 25% et 45% en poids de l'ensemble des matériaux d'emballage entrant dans les déchets d'emballages doivent être recyclés, avec un minimum de 15% en poids pour chaque matériau d'emballage. Les filières concernées sont le verre, les plastiques, le papier-carton, les métaux et le bois d'emballage.

87 ) Dans son rapport d'information n° 3380 présenté au nom de la Commission de la production et des échanges de l'Assemblée nationale, " Déchets ménagers : pour un retour à la raison ", le 25 février 1997, M. Ambroise Guellec considérait ainsi que l'échéance du 1er juillet 2002 était " une utopie " relevant davantage de " l'effet d'affichage " (page 37), mais plaidait pour une amplification des moyens car " les principes énoncés et le cadre tracé par la loi du 13 juillet 1992 sont bons " (page 67).

88 ) La ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement a repris ces principes, à l'Assemblée nationale, le 6 mai dernier : les plans départementaux de traitement des ordures ménagères " accordent une part trop faible au tri, à la valorisation-matière et au compostage, et plus faible encore -proche de zéro-, à la possibilité de stockage des déchets non bruts dans des décharges contrôlées -certains avaient pensé, à tort, que la loi criait haro sur toutes les décharges, quelles qu'elles soient. Il s'agit, en fait, de limiter la part de l'incinération ".

89 ) Voir la réponse de la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement à une question relative au coût de gestion des déchets d'emballage, Sénat, séance du 28 mai 1998, Journal officiel pages 2579-2580.

90 ) L'association AMORCE évalue le poids des publicités et journaux gratuits déposés dans les boîtes aux lettres entre 40 et 50 kg par an en zone urbaine. La Communauté urbaine de Lille estime que la distribution d'une publicité de 100 grammes dans les 400.000 boîtes aux lettres de son territoire lui occasionne une dépense obligatoire de 34.000 francs.

91 ) Voir le pré-rapport relatif à l'intercommunalité, DGCL, 1996, pages 54-69.

92 ) La collecte elle-même peut être simple ou sélective. Le traitement peut s'effectuer au travers de trois filières : mise en décharge, compostage, incinération. Chacun de ces choix entraîne des coûts très différents.

93 ) Rapport d'information n° 3380 présenté au nom de la Commission de la production de l'Assemblée nationale, op. cit.

94 ) Une proposition allant dans ce sens avait été examinée au Sénat, lors de la séance du 8 décembre 1997 : amendement n° II-121, Journal officiel page 5012.

95 ) J.L. Bergey, " Les évolutions dans les déchets : conséquences techniques et financières ", Techniques et sciences municipales, numéro 12, décembre 1997, page 43.

96 ) Il s'agit d'une estimation, qui doit être " maniée avec prudence " : elle repose sur des estimations de projets de créations et extensions d'unités d'incinération des ordures ménagères ainsi que d'unités de compostage et de collecte sélective extraites d'un bilan réalisé par l'ADEME en 1997 à partir de 47 plans départementaux d'élimination des déchets.

97 ) Hors frais d'assiette et de recouvrement (4.308 millions de francs), et frais de dégrèvement et d'admission en non valeur (3.812 millions de francs).

98 ) Hors taxes additionnelles (1.621 millions de francs, pour frais de chambre d'agriculture d'une part, et au titre du BAPSA d'autre part), frais d'assiette et de recouvrement (303 millions de francs) et frais de dégrèvement et d'admission en non valeur (262 millions de francs).

99 ) La responsabilité première de la régression des zones humides incombe néanmoins, bien sûr, aux politiques agricoles et d'équipement.

100 ) Guillaume Sainteny, La fiscalité des espaces naturels, 1993.

101 ) Voir l'amendement n° 149 présenté par M. Maurice Adevah-P_uf, Assemblée nationale, deuxième séance du 2 avril 1998, Journal officiel pages 2468-2469.

102 ) IFEN, " La diversité des espaces protégés en France ", Les données de l'environnement, n° 21, avril 1996.

103 ) Voir le rapport n° 415 (1997-1998) présenté par M. Gérard Larcher au nom de la Commission des affaires économiques du Sénat : " Les territoires urbains et paysagers ", pages 48-59.

104 ) La mise en _uvre de la directive du 21 mai 1992 a suscité des inquiétudes. En particulier, des élus ont dénoncé l'absence d'information sur les contreparties financières nécessaires à leur collectivité, dont une partie du territoire est susceptible d'être privée de possibilité d'aménagement ou d'exploitation agricole, forestière ou touristique. Il conviendra d'amplifier la concertation et de répondre aux questions posées, afin que la France soit enfin à même de présenter sa liste nationale de propositions : le retard pris lui vaut d'ores et déjà de faire l'objet d'un recours devant la Cour de justice des Communautés européennes par la Commission, avec six autres Etats membres. Sur la position du Gouvernement, on peut se reporter à la réponse de la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement à une question posée par le sénateur Jean-Paul Amoudry (Sénat, séance du 15 mai 1998, Journal officiel pages 2315-2316).

105 ) La préservation des zones humides est un des objectifs de la gestion équilibrée de la ressource en eau qui constitue l'objet de la loi du 3 janvier 1992. Leur évaluation, entreprise en 1993, et le plan national mis en place le 22 mars 1995, sont destinés à mettre fin à leur régression, mais il est particulièrement important d'aider les proprétaires et les exploitants à les maintenir en l'état. En France, les principales zones humides (hors vasières, milieux marins, cours d'eau et grands lacs) représentent environ 1,5 million d'hectares, soit 3% du territoire.

106 ) De nombreuses exonérations sont néanmoins prévues : bâtiments, installations et travaux divers à usage agricole et forestier, locaux artisanaux et industriels dans les communes de moins de 2.000 habitants, logements sociaux, etc.

107 ) Le taux de la taxe est limité, pour les constructions, reconstructions et agrandissements, à 2% de la valeur de l'ensemble immobilier déterminée forfaitairement comme en matière de taxe locale d'équipement. Il est limité à 10 francs par m2 de terrain pour les installations et travaux divers, cette limite étant revalorisée chaque année en fonction de l'indice du coût de la construction.

108 ) Cette proposition a déjà été présentée par votre Rapporteur à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 1998. Voir Assemblée nationale, troisième séance du 17 octobre 1997, amendement n° 436, Journal officiel page 4314.

109 ) Des dispositions ont également été annoncées en ce qui concerne les concerts et les manifestations de plein air, les sports mécaniques, les ball-traps, stands de tirs et parcours de tirs.

110 ) Rapport de M. Bernard Serrou, parlementaire en mission, sur la protection des riverains contre le bruit des transports terrestres (15 avril 1995).

111 ) Le niveau de 70 décibels constitue réellement le seuil d'intolérabilité du bruit.

112 ) On rappellera en effet que la loi du 31 décembre 1992 retenait comme objectif un seuil de 60 décibels.

113 ) Jean-Pierre Gualezzi, " Le bruit dans la ville ", Avis et rapports du Conseil économique et social, Les éditions des Journaux officiels, 1998.

114 ) Jean-Pierre Gualezzi, op. cit., page 266.

115 ) Jean-Pierre Gualezzi, op. cit., page 88.

116 ) L'arrêté du 17 décembre 1997 (Journal officiel du 21 décembre 1997) prévoit l'interdiction, à compter du 1er janvier 1998, des essais de moteurs, la nuit, de 22 heures à 6 heures, sans dérogation possible entre 23 heures et 5 heures, et l'interdiction des avions les plus bruyants (chapitre 2) de 23 heures 30 à 6 heures.

117 ) Conférence de presse du 23 septembre 1997 sur l'avenir de Roissy. Voir également les débats du Sénat, séance du 28 avril 1998, Journal officiel pages 1909-1912.

118 ) Voir le décret n° 94-503 du 20 juin 1994.

119 ) Un montant annuel de 10 millions de francs serait nécessaire.

120 ) " Evaluation du dispositif des agences de l'eau ", op. cit.

121 ) Voir les rapports d'information présentés au nom de la Commission des finances, de l'économie générale et du Plan de l'Assemblée nationale par M. Michel Barnier (n° 1227, du 11 avril 1990, sur la politique de l'environnement, propositions 22 à 25), puis par M. Jean-Pierre Brard (" Vers un PIB vert ? Pour la prise en " comptes " de l'environnement ", n° 1912, du 25 janvier 1995, proposition n° 4). Voir également l'amendement n° 118 présenté par M. Jean-Pierre Brard sur le projet de loi n° 727 portant diverses dispositions d'ordre économique et social et son examen à l'Assemblée nationale au cours de la deuxième séance du jeudi 2 avril 1998 (Journal officiel page 2490).

__________________

N° 1000.- Rapport d'information de Mme Nicole Brick, déposé en application de l'article 145 du Règlement par la commission des finances, sur la fiscalité écologique.