N° 1804

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 14 septembre 1999.

RAPPORT D'INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l'article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES FINANCES, DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN (1)

Pour un plan d'urgence d'aide à la création
de « très petites entreprises »,

ET PRÉSENTÉ

PAR M. Éric Besson,

Député.

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(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Entreprises

La commission des finances, de l'économie générale et du plan est composée de : MM. Augustin Bonrepaux, président ; Didier Migaud, rapporteur général ; Jean-Pierre Brard, Arthur Dehaine, Yves Tavernier, vice-présidents ; Pierre Bourguignon, Jean-Jacques Jegou, Michel Suchod, secrétaires ; MM.  Maurice Adevah-Poeuf, Philippe Auberger, François d'Aubert, Dominique Baert, Jean-Pierre Balligand, Gérard Bapt, François Baroin, Alain Barrau, Jacques Barrot, Christian Bergelin, Éric Besson, Alain Bocquet, Jean-Michel Boucheron, Michel Bouvard, Mme Nicole Bricq, MM. Christian Cabal, Jérôme Cahuzac, Thierry Carcenac, Gilles Carrez, Henry Chabert, Didier Chouat, Alain Claeys, Charles de Courson, Christian Cuvilliez, Jean-Pierre Delalande, Francis Delattre, Yves Deniaud, Michel Destot, Patrick Devedjian, Laurent Dominati, Raymond Douyère, Tony Dreyfus, Jean-Louis Dumont, Daniel Feurtet, Pierre Forgues, Gérard Fuchs, Gilbert Gantier, Jean de Gaulle, Hervé Gaymard, Jacques Guyard, Pierre Hériaud, Edmond Hervé, Jacques Heuclin, Jean-Louis Idiart, Mme Anne-Marie Idrac, MM. Michel Inchauspé, Jean-Pierre Kucheida, Marc Laffineur, Jean-Marie Le Guen, Guy Lengagne, François Loos, Alain Madelin, Mme Béatrice Marre, MM. Pierre Méhaignerie, Louis Mexandeau, Gilbert Mitterrand, Jean Rigal, Alain Rodet, Nicolas Sarkozy, Gérard Saumade, Philippe Séguin, Jean-Pierre Soisson, Georges Tron, Philippe Vasseur, Jean Vila.

INTRODUCTION 7

CHAPITRE PREMIER : LES ENJEUX COLLECTIFS DE LA CRÉATION DE TRÈS PETITES ENTREPRISES EXIGENT ET JUSTIFIENT UNE INTERVENTION DE L'ÉTAT 11

I.- LES ENJEUX POLITIQUES : DÉMOCRATISER L'ENTREPRENEURIAT ET INSTAURER UN « PARTAGE DU RISQUE » 13

A.-  UN CONSENSUS EN FAVEUR DE LA CRÉATION D'ENTREPRISE 13

B.- LA PRATIQUE : L'INÉGALITÉ D'ACCÈS À LA CRÉATION D'ENTREPRISE 15

1.- Pour devenir chef d'entreprise, mieux vaut être fils de chef d'entreprise. 16

2.- Le risque tant vénéré n'est pas le même pour tous. 16

3.- Tous les porteurs de projets n'ont pas un égal accès aux clés de la création d'entreprise. 17

4.- Démocratiser l'entrepreneuriat et « partager le risque » 18

5 - Vers un modèle européen du « partage du risque ». 20

II.- LES ENJEUX ÉCONOMIQUES : L'OBJECTIF DU RETOUR AUX 200.000 ENTREPRISES CRÉÉES PAR AN 21

A.- LA CRÉATION D'ENTREPRISE : UNE ADAPTATION AUX RÈGLES DU JEU DE LA « NOUVELLE ÉCONOMIE » ? 21

B. - LES TRÈS PETITES ENTREPRISES, MOTEUR DE LA CROISSANCE ET DE L'EMPLOI 22

C. - FIXER UN OBJECTIF QUANTITATIF POUR LA CRÉATION D'ENTREPRISE EN FRANCE 25

D. - COMPLÉTER CETTE APPROCHE PAR UN OBJECTIF QUALITATIF : GARANTIR LA PÉRENNITÉ DE 80 % DES NOUVELLES ENTREPRISES 25

III.- LES ENJEUX SOCIAUX : AIDER TOUS LES CRÉATEURS ... MAIS AUSSI RÉHABILITER LE CHÔMEUR-CRÉATEUR 26

IV. - LA NÉCESSAIRE IMPLICATION DE L'ÉTAT 29

A. - UN ENJEU COLLECTIF AUTANT QU'INDIVIDUEL 29

B. - L'INTERVENTIONNISME DES ÉTATS-UNIS EN FAVEUR DES TPE 30

C. - POUR UNE INTERVENTION ADAPTÉE DE L'ÉTAT 31

Annexe I - L'évolution de la création d'entreprise en France
depuis 10 ans
33

Annexe II - Les mesures de simplification administrative 35

Annexe III - Les mesures d'aide au financement 37

CHAPITRE II : TROIS OUTILS AU SERVICE DE LA CRÉATION D'ENTREPRISE 39

I.- « LA MAISON DE L'ENTREPRENEUR », POUR L'ACCÈS DE TOUS À UN ACCOMPAGNEMENT DE QUALITÉ 40

A.- LES FAIBLESSES DU SYSTÈME FRANÇAIS D'ACCOMPAGNEMENT DE L'ENTREPRENEUR 41

1.- Le foisonnement des initiatives et des structures d'aide à la création d'entreprises. 41

a) L'un d'entre eux mène une action principalement orientée sur l'aide au montage du projet  43

b) Les trois autres s'intéressent davantage au financement du projet 43

2.- Un système globalement peu performant 45

a) Un dispositif peu « lisible » pour le créateur 45

b) Les Chambres de Commerce particulièrement contestées 44

c) La complémentarité insuffisante entre les réseaux 48

d) Une gestion des ressources humaines déficiente 49

e) Un coût croissant 50

II.- LA PROPOSITION : LA « MAISON DE L'ENTREPRENEUR » 52

A.- LA MAISON DE L'ENTREPRENEUR : PARTOUT EN FRANCE, AU SEIN DES CHAMBRES CONSULAIRES 53

B.- LA MAISON DE L'ENTREPRENEUR : UNE MAISON OUVERTE À TOUS LES RÉSEAUX 54

C.- LE LARGE SPECTRE DES FONCTIONS DE LA MAISON DE L'ENTREPRENEUR 56

1.- L'accueil et l'orientation constituent évidemment le socle de la Maison de l'Entrepreneur 56

2.- L'accompagnement amont, ou l'aide au montage de projets 58

3.- Le suivi ou l'accompagnement aval 60

D.- LA CONSTITUTION DU COMITÉ LOCAL DES PARTENAIRES DE L'ENTREPRENEUR 62

E.- LES CONDITIONS DE LA RÉUSSITE DES MAISONS DE L'ENTREPRENEUR 62

F.- DES RAISONS D'ESPÉRER... 65

II.- LE CRÉATEUR D'ENTREPRISE DOIT BÉNÉFICIER D'UN STATUT LUI OFFRANT UN MINIMUM DE SÉCURITÉ 66

A.- ATTÉNUER LA VULNÉRABILITÉ DU CRÉATEUR AU COURS DES DIFFÉRENTES PHASES DE DÉVELOPPEMENT DE LA NOUVELLE ENTREPRISE 67

1.- Au moment de la préparation du projet 67

2.- Sécuriser le créateur au moment du démarrage de l'entreprise 68

a) Le droit existant 69

b) Les améliorations envisageables 70

3.- En cas d'échec de l'entreprise 73

a) Remédier à une trop grande variété de situations au regard de l'assurance chômage 73

b) La question du patrimoine d'affectation 73

B.- GARANTIR UNE COUVERTURE SOCIALE TOUT EN VEILLANT À UNE ÉVOLUTION PROGRESSIVE DES CHARGES AFFÉRENTES 74

1.- Le poids des charges sociales dans la phase de démarrage de l'entreprise nouvelle 74

2.- La recherche d'une plus grande progressivité 76

III.- LEVER LES OBSTACLES À L'ACCÈS AU FINANCEMENT 78

A.- RÉTABLIR LA « SUBVENTION ACCRE » 79

1.- Les termes du débat : avance remboursable ou subvention ? 79

2.- Défendre le principe d'une subvention de 20.000 F pour les personnes les plus démunies 81

B.- INSTITUER UN PRÊT D'HONNEUR ACCESSIBLE À TOUT CRÉATEUR 82

1.- Le constat : les atouts d'une insertion dans le circuit bancaire et d'un apport initial en capital conséquent 82

2.- Une proposition : instituer un prêt d'honneur de 40.000 francs accessible à tout créateur 84

3.- Compléter le dispositif par un crédit bancaire « classique » garanti 85

C.- ENCOURAGER LES PARTICULIERS QUI INVESTISSENT DANS LA CRÉATION D'ENTREPRISE 86

1.- Inciter les particuliers à investir dans une entreprise nouvelle 86

2.- Favoriser l'émergence de « Fonds de capital-risque solidaires » 88

a) L'exemple du Fonds de solidarité des travailleurs du Québec (FTQ) 89

b) Encourager la constitution de Fonds de « capital-risque solidaire » 90

3.- Mettre en place une fiscalité plus favorable à l'implication des investisseurs individuels dans la création d'entreprise 93

D.- FAVORISER L'ESSAIMAGE 94

1.- Un « gisement » de création à explorer 94

2.- Les voies de développement des pratiques d'essaimage « à froid » 95

CONCLUSION 98

EXAMEN EN COMMISSION 101

ANNEXE :

Liste des personnes auditionnées 105

INTRODUCTION

« Tout a été dit, rien n'a été fait ». Visant le soutien à la création d'entreprise, ce jugement abrupt du consultant Bernard Brunhes (1) serait très certainement largement confirmé, si on les interrogeait, par les milliers d'entrepreneurs, accompagnateurs des créateurs, réseaux et observateurs spécialisés, convaincus depuis des années d'avoir identifié et stigmatisé les principaux obstacles ou « verrous » à la création d'entreprises.

Sévère, la formule est aussi partiellement injuste. Depuis la fin des années 70 l'État s'est efforcé d'améliorer l'environnement de l'entrepreneur. Plus près de nous, la loi du 11 février 1994, dite « loi Madelin » comportait des dispositions en faveur, notamment, des entreprises individuelles.

Depuis juin 1997, sous l'impulsion de M. Dominique Strauss-Kahn et de Mme Marylise Lebranchu, le Gouvernement a adopté, on y reviendra, un dispositif important et cohérent de mesures en faveur de la création d'entreprises et notamment en faveur des entreprises innovantes.

Il n'empêche. De façon générale, en matière de création d'entreprises tout a été dit, beaucoup reste à faire, y compris dans le secteur des « nouvelles technologies de l'information et de la communication ».

Et si l'on restreint le champ d'observation pour se focaliser sur la création de ce qu'il est convenu d'appeler les « très petites entreprises » ou les « micro-entreprises », on peut affirmer sans grand risque d'être démenti, que pour les très petites entreprises (TPE), tout a été dit, peu, très peu, trop peu a été fait.

La création de petites entreprises n'est que l'un des maillons de la chaîne de l'entrepreneuriat, suivie, ou précédée, de la création de petites structures innovantes (« start up ») et de PME/PMI « traditionnelles ».

L'ensemble de cette chaîne de la création mérite d'être renforcée : rien ne serait plus absurde que de prétendre, par exemple, opposer l'appui aux entrepreneurs individuels à celui tout aussi indispensable aux entreprises innovantes dont on attend, à juste titre, qu'elles « tirent la croissance et l'emploi » et dont la France continue de manquer malgré le soutien récent dont elles font l'objet.

Reste que le maillon des TPE est non seulement le plus fragile, mais aussi le plus négligé. Disons-le simplement : « l'entrepreneur individuel », le « micro-entrepreneur », parfois le « chômeur-créateur » ne sont guère à la mode.

A l'ère de l'économie mondialisée, des « méga-fusions », de la « création de valeur » ou du « ROE » (Return on Equity), plaider pour un tissu dense de « petits entrepreneurs » pour l'artisan, le commerçant, le prestataire de services à domicile, le consultant, aurait quelque chose d'anachronique, un arrière goût « ringard ».

Pourtant rien n'est plus urgent que de provoquer un grand mouvement en faveur de la création d'entreprises, ce qui revient d'abord à favoriser un grand mouvement en faveur de la création de petites entreprises, urgence que les réseaux associatifs spécialisés dans ce domaine vont jusqu'à qualifier de « grande cause nationale ».

Il en va de la compétitivité de notre économie, de la démocratisation de l'entrepreneuriat, de la solidarité entre les personnes autant qu'entre les territoires.

Ce qui explique sans doute que la création de TPE se retrouve lit d'une confluence originale et parfois paradoxale, soutenue par les tenants des thèses libérales (l'entrepreneur individuel, archétype du « self made-man » à l'américaine, incarnation de la libre entreprise), rejoints aujourd'hui avec force après des détours « alternatifs » ou plus modestement « solidaires » par nombre d'associations dont les préoccupations sont davantage sociales, inspirées de la philosophie et des techniques dites de « l'insertion par l'économique ».

Tout rapport parlementaire entretient avec l'objectivité un rapport singulier, son auteur s'efforçant d'étayer « scientifiquement » une thèse ou un a priori politiques, au demeurant légitimes.

Ce rapport n'échappera pas à la règle ; son auteur croit aux vertus de l'acte de création, s'intéresse aux « entrepreneurs », considère que la valorisation de l'esprit d'entreprise ou de « l'entrepreneuriat » relève de l'intérêt général. Il estime que la création de TPE est aujourd'hui l'un des enjeux d'une économie plus solidaire.

Ce rapport ne sera pour autant pas un « hymne à la création de TPE » ; chacun sait que les entrepreneurs individuels sont souvent (environ un sur deux) des « créateurs contraints », pour reprendre le jargon des spécialistes, conduits à créer pour échapper au chômage ; chacun sait aussi que s'il existe, fort heureusement, quantité de créateurs optant volontairement pour le travail indépendant, d'autres sont poussés dans cette voie par les stratégies de certaines entreprises cherchant à « externaliser » les fonctions et parfois les hommes afin de diminuer leurs charges.

C'est donc avec lucidité qu'on cherchera à montrer que les enjeux politiques, économiques et sociaux de la création de TPE justifient l'action de l'État (première partie).

Ce texte ne visera pas non plus à l'exhaustivité.

La création d'entreprises a suscité nombre de rapports érudits (on citera par exemple l'excellent rapport du Commissariat général du Plan 1996), de colloques ou de propositions (signalons, parmi les dernières en date, celles du CNCE, du « Livre blanc de la création d'entreprise » ou les 39 propositions du collectif « Synergies »).

Si le présent rapport s'en inspire clairement, il ne cherche pas à « trier » parmi la masse de propositions émises et n'estime pas utile d'établir la liste des points d'accord ou de désaccord avec telle ou telle mesure proposée notamment par les spécialistes cités.

On cherchera, plus modestement, à proposer trois actions concrètes et urgentes visant à provoquer, rapidement, un nouvel élan en faveur de la petite entreprise (deuxième partie).

Si (presque) tout a été dit, il faut désormais agir. Vite.

LAISSER CETTE PAGE BLANCHE
SANS NUMÉROTATION

CHAPITRE PREMIER 

LES ENJEUX COLLECTIFS
DE LA CRÉATION DE TRÈS PETITES ENTREPRISES EXIGENT ET JUSTIFIENT UNE INTERVENTION
DE L'ÉTAT

Commençons par un paradoxe inquiétant.

Jamais le désir d'entreprendre n'a été aussi fort : ainsi, interrogés par l'IFOP (2) pour l'APCE, 1,2 million de Français déclaraient en 1998 avoir un projet de création d'entreprise. On sait qu'il convient d'accueillir avec prudence ce type de réponse spontanée, mais l'indicateur est plus intéressant lorsqu'il est mis en perspective et que se dégage une tendance : répondant à la même question en 1992, 700.000 Français seulement y répondaient positivement. Ces chiffres confirment donc les intuitions ou analyses des accompagnateurs de la création d'entreprise et des sociologues : le désir d'entreprendre croît.

Pourtant, depuis 10 ans, le nombre de créations d'entreprises ne cesse de diminuer.

Les tableaux annexés à ce chapitre l'indiquent clairement : nous aurons créé, en 1998, 40.000 entreprises de moins qu'en 1989 ! En 1989, 204.000 entreprises avaient vu le jour ; après dix ans de baisse quasi constante 166.000 naissances seulement étaient enregistrées en 1998.

Pire, si l'on peut dire, cette baisse tendancielle paraît devenir structurelle. La création d'entreprises n'obéit plus, dans la période récente, à la règle selon laquelle ce processus suit l'évolution du taux de croissance de l'économie.

Comme le note justement une revue récente du Secrétariat d'État aux PME (3) « un hiatus s'installe : malgré une reprise forte de la production industrielle, le nombre de créations d'entreprises stagne ou même décroît ».

Un tel constat paraît laisser perplexes les rédacteurs de la revue comme l'indiquent le titre de l'article « Créations d'entreprises : une baisse surprenante » et le sous-titre « Un mouvement difficile à expliquer».

La baisse est-elle si "surprenante" ? Les carences que nous étudierons de l'accompagnement et de l'accès au financement, l'insécurité excessive du statut du créateur ne pourraient-elles contribuer à l'expliquer ?

Toujours est-il que si, en matière de création d'entreprises, il serait excessif de sonner le tocsin, il est largement temps de tirer le signal d'alarme.

Le Gouvernement dirigé par M. Lionel Jospin paraît conscient de la gravité de la situation. On verra, en annexe de ce chapitre, que depuis juin 1997, une action cohérente d'appui à la création d'entreprises a été mise en _uvre, basée sur des simplifications administratives, des aides au financement des projets, et des mesures fiscales en faveur, notamment, des entreprises innovantes.

Toutes ces mesures, aussi nécessaires soient-elles, concernent peu, ou insuffisamment, la création de "toutes petites entreprises".

Comme le note justement un rapport récent du Conseil national du crédit (4): « Les mesures prises, à l'exception d'initiatives mises en place par la SOFARIS, ont été surtout consacrées aux PMI innovantes et beaucoup moins aux PME plus traditionnelles ou appartenant à d'autres secteurs (comme les services ou les BTP) alors que les besoins en fonds propres de ces dernières, tels que les expriment leurs dirigeants, sont plus importants. La mise à niveau en ce qui concerne le financement des entreprises innovantes ayant été réalisée pour l'essentiel, une réorientation en ce sens paraît nécessaire ».

L'un des artisans de ce dispositif, auditionné pour ce rapport, rappelait que les entreprises innovantes ne constituent (malheureusement ?) qu'1 % des créations constatées. Et de conclure sous forme de boutade « il y a sûrement des choses à faire en faveur des autres 99 % ».

Ces « autres 99 % », et notamment celles qui se créent avec au départ moins de 5 salariés (97,4 %) ou moins de 10 salariés (98,7 %) méritent une attention particulière, un plan vigoureux en leur faveur.

Nous verrons dans ce chapitre que les enjeux politiques, économiques et sociaux de la création de TPE justifient, voire exigent, une action forte et appropriée de l'État en leur faveur.

I.- LES ENJEUX POLITIQUES : DÉMOCRATISER L'ENTREPRENEURIAT ET INSTAURER UN
« PARTAGE DU RISQUE »

Il fut un temps où la politique était ambitieuse, voire impérialiste.

Les étudiants de la fin des années soixante-dix, utilisateurs des manuels de la collection « Points-Politique », pouvaient méditer sur l'aphorisme figurant au dos de tous les ouvrages : « Les problèmes politiques sont les problèmes de tout le monde ; les problèmes de tout le monde sont des problèmes politiques ».

La politique est devenue modeste ; elle n'oserait plus revendiquer un tel étendard. On pourrait cependant l'adapter à notre sujet.

Les problèmes de la création d'entreprise sont les problèmes de tout le monde ; les problèmes de la création d'entreprise sont d'abord des problèmes politiques.

1. Un consensus théorique fort est aujourd'hui établi, en dépit de motivations parfois contradictoires, en faveur du soutien à la création d'entreprise.

2. En pratique, l'accès à la création d'entreprise est inégalitaire.

3. Le principal enjeu politique réside donc dans la démocratisation de l'entrepreneuriat et la mise en _uvre d'un partage du risque.

A.-  UN CONSENSUS EN FAVEUR DE LA CRÉATION D'ENTREPRISE

Observons d'abord que - sur le plan des principes - jamais le discours sur l'intérêt de la création d'entreprises n'aura fait l'objet d'un consensus aussi évident.

Certes, les motivations ou les substrats politiques ou idéologiques continuent de diverger.

Les économistes ou politiques d'inspiration libérale célébreront le culte de la « libre entreprise », verront dans l'entrepreneur individuel le symbole d'une société de responsabilité qu'ils opposeront à une société d'assistance et désigneront l'État (ou « l'administration ») comme principal obstacle à la création.

D'autres plaideront, avec la Présidente de l'ADIE, Maria Nowak, pour une « économie sociale de marché » et verront dans « l'initiative économique, notamment celle des exclus » un moyen de « trouver une troisième voie entre le libéralisme sauvage et le socialisme étatique » (5)

Les mêmes (ou d'autres encore, parce que les « réseaux associatifs » de soutien à la création d'entreprises sont aussi divers dans leurs sources d'inspiration idéologique qu'ils le sont dans leur organisation ou leur fonctionnement) verront dans l'accès à l'initiative individuelle l'une des clés d'une « économie solidaire » et d'un développement que Jean-Baptiste de Foucauld ira jusqu'à qualifier de « socialement durable » (6).

Certes encore, il arrive qu'avant d'épouser le même lit et de se mêler en un même fleuve pour demander ensemble un vrai plan de soutien aux créateurs, l'hétérogénéité des sources provoquent de vastes remous dans les zones de confluence de leurs eaux.

Ainsi, par exemple, les participants au colloque organisé par le collectif « Synergies pour la création d'entreprises » en novembre 1998 se souviendront des réactions provoquées dans la salle par le représentant du MEDEF plaçant la volonté de « faire de l'argent » au premier rang des motivations de l'acte d'entreprendre.

La sagesse - ou la simple lucidité - devraient nous conduire à accepter le large spectre des raisons pour lesquelles un individu entreprend.

L'un est un créateur « volontaire », l'autre « contraint », la création d'entreprise n'étant pour le second que le moyen d'échapper au chômage ou à l'exclusion.

Certains créateurs chercheront à assouvir leur besoin d'indépendance (« se mettre à son compte »), leur désir de « faire fortune » (ou, plus souvent, plus simplement « mieux gagner leur vie ») voire leur quête de reconnaissance sociale.

D'autres privilégieront les solidarités locales, la création d'entreprise « pour le compte d'autrui » (pour créer de l'emploi pour d'autres), la réalisation d'un projet collectif (« entreprises collectives », coopératives, etc.).

La création d'entreprises peut être un combat individuel ou collectif contre le sort, la fatalité ou l'indifférence. Elle peut aussi être ludique, spéculative ou « aventurière ».

A titre personnel, chacun est libre de préférer, tel ou tel « segment » des raisons pour lesquels une personne entreprend.

Les organisations politiques peuvent aussi être fondées à estimer plus utile pour la collectivité de renforcer son soutien à telle ou telle catégorie de créateurs.

Il n'en demeure pas moins vrai qu'aujourd'hui l'ampleur de la tâche à accomplir pour mettre en place un plan ambitieux de soutien à la création d'entreprises et le constat de convergence non pas des visions politiques mais des attentes des principaux protagonistes de ce soutien doit conduire l'État à accepter la diversité des motivations à l'acte d'entreprendre et à s'appuyer sur le consensus de principe dont la « cause » de la création d'entreprises fait aujourd'hui l'objet.

B.- LA PRATIQUE : L'INÉGALITÉ D'ACCÈS À LA CRÉATION D'ENTREPRISE

En matière de droits et de libertés, le siècle qui s'achève nous a appris à distinguer droits théoriques et droits concrets, libertés formelles et libertés réelles.

Si le marché et l'appropriation privée des moyens de production ont clairement remporté la compétition qui les aura opposés durant ce même siècle aux systèmes économico-politiques qui prétendaient s'en dispenser ou les remplacer, force est de constater que la « liberté d'entreprendre » qui en est le corollaire, ou plutôt le socle théorique, n'est, elle, qu'une liberté formelle. En France à tout le moins car les États-Unis d'Amérique, que l'on ne cherche pas ici à ériger en « modèle », ont incontestablement eux, sur ce plan, le mérite de la cohérence : la liberté d'entreprendre y est défendue, concrètement mise en _uvre.

Ainsi, comme on le verra plus loin, les porteurs de projets n'ayant pas accès aux systèmes « classiques » de financement, crédit bancaire et capital-risque, se voient proposer des programmes spécifiques de prêts et capital-risque mis en _uvre ou garantis par l'État fédéral. Application de leur conception dite de « discrimination positive » au monde de la création d'entreprises, les Américains s'attachent à aider les femmes, les minorités ethniques, les personnes handicapées à devenir des entrepreneurs. Ils n'hésitent pas, enfin, à réserver une part importante des marchés publics aux PME et même à attribuer directement des marchés à des personnes « économiquement et socialement désavantagées », victimes d'un « préjugé racial, ethnique ou culturel » (programme « 8 (a) » de la Small Business Administration).

En France, la création d'entreprise est un sport à risque, très inégalitaire, où tous les concurrents ne sont pas logés à la même enseigne. Essayons d'illustrer ces inégalités de fait.

1.- POUR DEVENIR CHEF D'ENTREPRISE, MIEUX VAUT ÊTRE FILS DE CHEF D'ENTREPRISE.

Le champ économique reproduit parfaitement ce que Pierre Bourdieu (dans « Les Héritiers ») et d'autres après lui avaient stigmatisé dans la haute fonction publique et plus généralement au sein des « élites » françaises. La France reste une machine à reproduire ses élites, ses catégories sociales, ses privilèges.

Dans le monde de la TPE les avantages et les enjeux ne sont certes pas les mêmes ; qu'un enfant de buraliste ou de plombier devienne buraliste ou plombier ne peut être considéré comme un « privilège » exorbitant.

Mais le fait que 2/3 des créateurs d'entreprises (7) soient issus d'un milieu familial d'entrepreneurs n'en demeure pas moins l'indice d'un jeu partiellement fermé. Ce que ne démentirait pas Laurence Parisot, Présidente de l'IFOP, l'une des femmes chef d'entreprise à juste titre reconnue pour sa réussite qui affirmait (8): « Je suis fille, petite-fille et quatre fois nièce de chefs d'entreprises ».

2.- LE RISQUE TANT VÉNÉRÉ N'EST PAS LE MÊME POUR TOUS.

La France est peuplée d'hommes politiques, dirigeants salariés de grandes entreprises, éditorialistes et commentateurs divers qui n'aiment rien tant que faire l'apologie du « risque » pour les autres tout en ayant passé l'essentiel de leur carrière à la minimiser pour eux-mêmes.

Pour certains, le risque n'est pas seulement « nécessaire », il est devenu « souhaitable » ; ainsi seuls mériteraient d'être aidés ceux qui, au sortir de la redoutable pré-sélection de l'accès à l'information, aux aides, à l'accompagnement seraient prêts à risquer non seulement « leur chemise » mais l'ensemble de leur (souvent maigre) patrimoine, parfois celui de leurs proches.

Drôle de sport que celui de cette ascension escarpée que certains entament en petite tenue sur des simples bicyclettes, d'autres bien protégés sur de solides VTT, d'autres enfin harnachés et casqués sur les motos appropriées, parfois précédés ou suivis de conseils et de guides.

Ainsi, par exemple, le père ou la mère de jeunes enfants risquent plus, dans l'acte de création, que le jeune entrepreneur. Le chômeur en fin de droits qui investit 100.000 francs dans un projet, le salarié qui démissionne et quitte son emploi pour créer son entreprise et ne bénéficiera d'aucune couverture en cas d'échec, le créateur obligé de s'endetter auprès de tous ses proches pour réunir des fonds propres nécessaires encourent, objectivement, des risques élevés, parfois exorbitants.

3.- TOUS LES PORTEURS DE PROJETS N'ONT PAS UN ÉGAL ACCÈS AUX CLÉS DE LA CRÉATION D'ENTREPRISE.

Ainsi et pour nous limiter à trois thèmes qui feront l'objet de propositions dans la seconde partie :

1. L'accès à l'accueil, l'orientation et l'accompagnement de la création d'entreprises, parfois le simple accès à l'information n'est pas égal pour tous. La qualité des réseaux publics, para-publics, privés ou associatifs n'est ni homogène ni certifiée ; le maillage du territoire est incertain, surabondant dans certaines zones, déficient dans d'autres.

La combinaison de ces facteurs rend aléatoire la qualité du service rendu au créateur potentiel ; pour réduire l'aléa, il vaut mieux vivre dans une grande agglomération, posséder les ressources financières nécessaires pour s'entourer de conseils, disposer d'un bagage culturel et d'un réseau personnel susceptible de débroussailler le maquis de l'information. Faut-il préciser que tel n'est pas le profil du créateur-type ?

2. En France, celui ou celle qui prend le risque de créer est pénalisé(e) sur le plan de la couverture sociale (et donc de la solidarité nationale) par rapport à celui ou celle qui n'en prend pas.

3. L'accès au financement pénalise particulièrement les « petits » porteurs de projets.

Tous les spécialistes de la création d'entreprises connaissent les chiffres suivants, largement diffusés : une entreprise sur deux serait créée avec moins de 36.000 francs d'apports ; deux sur trois seraient créées avec moins de 100.000 francs d'apports.

Le chiffre le plus cité, celui de 36.000 francs, a une vertu : celui de rappeler le fait que la création d'entreprises est d'abord celle de petites entreprises. Mais il a une limite : il manque de crédibilité. Il est probable qu'il n'intègre que les apports formellement déclarés par le créateur et ne prend sans doute pas en compte d'autres engagements indispensables à la création.

L'analyse empirique des créations de petites entreprises aidées par une fondation d'entreprise (9) montre que l'apport minimal initial se situe plutôt entre 50.000 et 100.000 francs, chiffre corroboré par beaucoup d'accompagnateurs membres de réseaux associatifs.

Juxtaposons deux données : un créateur sur deux prétendent créer avec moins de 36.000 francs d'apports. 8 % d'entre eux, moins d'un sur dix, auront eu accès au crédit bancaire  (10).

Comment ne pas voir là résumé tout le « mal français » de la création d'entreprises : l'insuffisance de fonds propres ou de quasi fonds propres.

Comment ne pas comprendre qu'ici réside l'une des sources de la fameuse « mortalité » des TPE ?

Comment ne pas déceler que l'inégalité d'accès au financement de la création d'entreprises est l'un des obstacles les plus pénalisants à la diffusion de l'esprit d'entreprise et l'élargissement de la base sociale des créateurs ?

Dans ces conditions, l'enjeu politique principal de la création d'entreprise est bien celui de sa démocratisation, du passage d'une « libre entreprise » théorique à une liberté concrète dont l'exercice est facilité.

4.- DÉMOCRATISER L'ENTREPRENEURIAT ET « PARTAGER LE RISQUE »

Depuis quelques années, de nombreuses voix, ne citons que certaines des plus connues : Maria Nowak (ADIE), Jean-Baptiste de Foucauld (Solidarités Nouvelles face au chômage), Claude Alphandery (France Active) ou Jean-Pierre Worms (France Initiative Réseaux) se sont élevés pour appeler à la naissance d'un véritable « droit à l'initiative économique ».

Pour beaucoup, la création de petites entreprises n'est plus seulement un enjeu économique mais aussi politique et social.

Comment esquisser ce « droit », favoriser l'accès à l'initiative du plus grand nombre ?

Pour certains, il suffirait de valoriser davantage l'entrepreneur, supprimer les obstacles administratifs et baisser les impôts, taxes ou charges qui entravent la « libre entreprise ». On peut certes souscrire en partie à ces remèdes.

Des exonérations partielles ou provisoires de charges ont été mises en _uvre ; elles peuvent être complétées, améliorées notamment dans le sens d'une plus grande progressivité.

De même, en matière administrative, l'État a adopté fin 1997 un vaste plan de mesures de simplification administrative bienvenues (11; mais tous les créateurs citeront spontanément des exemples de ce qui reste à faire dans ce domaine.

La nécessité de « valoriser l'entrepreneur » mérite, elle, qu'on s'arrête davantage. On connaît les « freins culturels », les raisons les plus communément avancées pour expliquer l'insuffisante valorisation dont l'entrepreneur bénéficierait dans notre société : poids de notre héritage judéo-chrétien, rapport ambigu à l'argent et à la réussite individuelle, rôle historique de l'État dans la construction de la Nation française, refus du risque, stigmatisation de l'échec et incapacité à percevoir la part positive de l'échec analysé, etc.

Rien n'est faux. Tout mériterait d'être nuancé, mis en perspective. Mais tel n'est pas l'objet de ce rapport.

Notons cependant que les entrepreneurs portent leur part de responsabilité dans ces blocages culturels dont ils se disent victimes. La plupart des entrepreneurs heureux préfèrent vivre cachés ; ceux que l'on entend et l'on voit passent l'essentiel de leur temps à se plaindre et contribuent peu à la construction du « modèle » qu'ils prétendent par ailleurs appeler de leurs v_ux.

Évoquons enfin la thèse de plus en plus communément admise au point de figurer jusque dans les écrits des tenants de la « troisième voie » puisqu'elle est évoquée dans le texte dit « manifeste Blair-Schroëder » du printemps 1999 : l'objectif serait, ni plus ni moins, de faire des chefs d'entreprise des « héros des temps modernes », à l'instar des acteurs, chanteurs ou sportifs, bénéficiaires de la « société de spectacle ».

La création d'entreprises peut incontestablement être une aventure individuelle ou collective, dont le succès est porteur de valeurs : créativité, effort, persévérance et dont les bienfaits collectifs dépassent l'intérêt propre du créateur. Cela mérite-t-il d'être « glorifié » ?

Ne devons-nous pas aujourd'hui nous fixer pour objectif de banaliser la création d'entreprise, d'en faire l'une des voies naturelles s'offrant à une personne désireuse de s'investir professionnellement ?

Gageons qu'à l'exception de quelques « histoires à succès », réussites exceptionnelles ou exemplaires, qui sans doute justifieront une médiatisation forte, la banalisation de la création sera l'un des indices de la démocratisation de l'entrepreneuriat.

5.- VERS UN MODÈLE EUROPÉEN DU « PARTAGE DU RISQUE ».

La France, comme la plupart des pays européens est confrontée à un dilemme bien analysé par le prix Nobel d'Économie 1998, Amartya Sen (12) qui, après avoir relevé que les Américains n'accepteraient jamais le niveau de chômage que nous avons atteint mais qu'en revanche « la garantie générale des soins de santé indispensables n'est pas une préoccupation première aux États-Unis », constate que « l'idée américaine de responsabilité individuelle » qui paraît se développer dans le monde pose aux Européens des questions spécifiques : « à quelles conditions est-il possible de faire davantage appel en Europe à la responsabilité individuelle ? ». Et Amartya Sen de résumer l'enjeu : « Il faut que l'Europe mesure mieux les exigences réelles de la philosophie de la responsabilité individuelle, vers laquelle elle incline sans bien saisir les conditions sociales qu'elle suppose ».

La création de petites entreprises se trouve au c_ur de cet enjeu ; le culte de la libre entreprise et l'appel à la responsabilité individuelle pour le plus grand profit de la collectivité ne peuvent s'abstraire de l'obligation d'analyse du profil, de la situation professionnelle et des difficultés rencontrées par ceux qui créent.

Comment, dans ces conditions, ne pas souscrire à l'invitation lancée par M. Dominique Strauss-Kahn (13): « Il faut mutualiser le risque qui est pris au bénéfice de la collectivité ; je crois à un modèle européen de prise de risque ».

La diffusion de l'esprit d'entreprise, le soutien accru à la création d'entreprises, la démocratisation de l'entrepreneuriat nous paraissent, compte tenu du contexte culturel français, devoir reposer sur ce concept clé : celui du partage du risque.

Les propositions figurant dans la seconde partie de ce rapport s'inspireront de ce partage du risque entre la collectivité et le créateur.

II.- LES ENJEUX ÉCONOMIQUES : L'OBJECTIF DU RETOUR AUX 200.000 ENTREPRISES CRÉÉES PAR AN

Les enjeux économiques de la création de petites entreprises sont mieux connus et ne feront donc ici l'objet que de coups de projecteur rapides.

A.- LA CRÉATION D'ENTREPRISE : UNE ADAPTATION AUX RÈGLES DU JEU DE LA « NOUVELLE ÉCONOMIE » ?

Née outre-Atlantique, la « nouvelle économie » que l'on nous annonce, au sein de laquelle les services liés aux technologies de l'information et de la communication ainsi que les services aux personnes jouent un rôle majeur, serait porteuse d'un développement accéléré de PME innovantes, de petites entreprises et de travail indépendant.

Si l'on en croit le rapport Boissonnat sur « le travail dans vingt ans », « la structure de l'entreprise du XXIe siècle est "fédérale", adaptable, mobile, légère. Elle produit, distribue, crée de la richesse mais aussi et surtout elle sait anticiper et s'adapter. C'est l'entreprise en "réseau" qui tend à s'imposer à partir des qualités suivantes : rapidité de l'action, adaptabilité à des situations changeantes, souplesse de fonctionnement, habileté dans les relations, dynamisme, intuition, ouverture, imagination et innovation ».

Le développement des transports et des télécommunications tendrait, en effet, à faire passer d'entités économiques concentrées (qui limitent les coûts de transport ou de communication, mais engendrent des coûts de coordination croissants) à des structures plus légères.

La Commission en conclut que « dans l'avenir du travail, il deviendra naturel de passer d'un statut de salarié à un statut d'entrepreneur pour revenir, éventuellement, au statut de salarié ». Ainsi, par exemple, « on verra se multiplier des sous-traitants indépendants qui pourront être des entreprises unipersonnelles à domicile ». Sans être encore réellement engagée dans ce processus, la France n'échappe à la tendance à la réduction de la taille moyenne des entreprises : si en 1975, un salarié sur cinq travaillait dans un établissement de plus de 500 salariés, la proportion n'est plus aujourd'hui que d'un salarié sur dix.

Prenons garde, cependant, à ne pas idéaliser le développement de la petite entreprise ; ainsi le magazine « Alternatives Économiques » (14) relevait à juste titre le principal risque potentiel du développement du travail indépendant, celui du « contournement des règles du jeu social », notamment de celles qui protègent le salarié (SMIC, préavis de licenciement, durée du travail, normes de sécurité, etc).

Pour que le travail indépendant et la petite entreprise puissent valoriser leurs atouts pour le créateur (autonomie) comme pour le système économique (souplesse, proximité du client), l'État et les partenaires sociaux devront veiller à adapter en permanence le droit social et notamment les règles s'appliquant aux « donneurs d'ordre » afin que la « régression sociale » (15) ne soit pas le corollaire structurel de la TPE.

B. - LES TRÈS PETITES ENTREPRISES, MOTEUR DE LA CROISSANCE ET DE L'EMPLOI

La contribution des TPE au dynamisme de notre économie et à la création d'emplois n'est pas toujours appréciée à sa juste valeur.

Les chiffres de l'INSEE sont pourtant éloquents :

· 80 % des entreprises qui se créent chaque année en France n'ont pas de salarié au démarrage. Moins de 1 % comptent plus de 10 salariés au départ.

· 55 % d'entre elles sont créées par des personnes physiques, 45 % par des personnes morales.

· Si la création d'entreprises a concerné, en 1998, 329.162 emplois en intégrant les réactivations et les reprises, l'impact de la création "pure" aura été estimé à 288.888 emplois.

D'où vient, de ce fait, le faible intérêt que l'enjeu économique de la création de TPE paraît susciter ? Avançons quelques tentatives d'explication.

1. Le contenu des prestations offertes par les TPE est souvent mésestimé. Certains continuent, à tort, d'assimiler TPE et "petits boulots". C'est mal connaître, dans le commerce, les services, l'artisanat, le conseil, etc. le professionnalisme des « petits entrepreneurs ».

2. L'innovation serait le monopole de la technologie. On a déjà exprimé le souci de ne pas nier l'apport fondamental pour l'avenir de l'économie française des entreprises utilisant de « nouvelles technologies » et la légitimité de l'action publique en leur faveur. Doit-on pour autant dévaloriser l'innovation sociale, l'innovation dans le secteur des services ?

Prenons l'exemple en apparence banal des services aux personnes âgées. Qui ne voit que l'innovation dont ont fait preuve les entrepreneurs et les associations relevant de « l'économie sociale » a permis d'apporter en une décennie de nouvelles réponses et de nouvelles satisfactions à des besoins anciens ?

Qu'il s'agisse du portage de repas à domicile, du transport et d'accompagnement des personnes âgées, des travaux effectués à l'intérieur de leur domicile, la conception des sorties hors du domicile, pour des formalités administratives, des courses ou des loisirs, qu'il s'agisse encore d'accès à la culture voire aux nouvelles technologies de l'information, d'hygiène, de gymnastique adaptées ou de sécurité (télé-alarme, présence humaine périodique etc), toutes les facettes de la vie d'une personne âgée ont fait l'objet de prestations de plus en plus professionnalisées, personnalisées et qualifiées.

Ainsi, sur ce seul domaine où malgré les progrès enregistrés, il reste tant à faire, quantitativement comme qualitativement pour pouvoir permettre le maintien à domicile des personnes âgées, l'innovation de petites entités, entreprises ou associations auront tout à la fois permis d'améliorer la qualité de vie des personnes concernées et de créer beaucoup d'emplois.

3. On confond trop souvent (petite) taille de départ et potentiel.

Certes, beaucoup d'entrepreneurs individuels choisiront ou seront contraints de ne pas embaucher de premier salarié (notons en passant que l'incitation à l'embauche du premier salarié devrait constituer l'enjeu majeur des réflexions sur l'allégement des charges et des simplifications administratives).

Mais il serait absurde de nier le potentiel de certaines TPE ; sans même faire appel à la désormais célèbre « Apple Story » dont chacun connaît le scénario, le décor (un garage californien) et les héros (deux, deux seulement au départ), il est clair que beaucoup de TPE recèlent un potentiel de croissance et d'emplois, dont il convient de faciliter l'éclosion, l'exemple le plus moderne étant probablement fourni par la multitude de petites entreprises de commerce électronique ou de services liés à "l'économie du Net", qui connaissent et connaîtront, pour certains d'entre elles, une forte expansion.

4. Enfin, concernant l'impact des TPE sur l'emploi, la minoration de leur contribution tient probablement au mythe de leur mortalité supposée quasi automatique.

On verra plus loin qu'il est faux d'affirmer qu'une entreprise sur deux est un échec au terme de cinq ans.

Essayons ici de tordre le cou à l'idée reçue selon laquelle les TPE ne créeraient que des emplois non pérennes voire, pour certains, détruiraient quasiment autant d'emplois qu'elles en créeraient.

L'enquête Sine publiée en janvier 1999 par l'INSEE montre que l'on peut raisonnablement estimer que les entreprises nouvelles qui auront créé 100 emplois en année N en compteront toujours 85 en année N + 3.

Ainsi, dans l'enquête citée, sur 100 emplois initialement créés en 1994, les entreprises nouvelles en auront en 1997 maintenu 55, perdu 45 mais celles qui se seront développées en auront créé 30 au bout de 3 ans, d'où le chiffre de 85 % (55 + 30).

L'impact des nouvelles entreprises sur l'emploi doit donc être considéré comme majeur, ce qui devrait nous alerter davantage sur les conséquences de la baisse continue, en une décennie, du nombre de créations d'entreprises. Ainsi, la Commission « Financement » du CNCE estime dans un rapport interne de 1999 que « depuis 1991, il y a en moyenne 48.000 emplois de moins par an parmi ceux générés, par la création d'entreprise ».

Il est certes difficile d'extrapoler à partir d'un tel chiffre et d'additionner des « manques à gagner ». Il n'empêche. En une décennie, la contribution de la création d'entreprises aurait pu être de 500.000 emplois supplémentaires si la France était restée au niveau d'environ 200.000 entreprises créées par an (chiffre de 1989) au lieu des 160.000 actuelles.

Même simpliste, l'énormité de ce chiffre de 500.000 emplois manquants doit nous servir d'aiguillon, d'incitation à l'action.

C.- FIXER UN OBJECTIF QUANTITATIF POUR LA CRÉATION D'ENTREPRISE EN FRANCE

A la lumière de ces chiffres, la France doit se fixer d'abord un objectif quantitatif : revenir rapidement au niveau des 200.000 créations par an.

Ce chiffre n'a rien de démesurément ambitieux ; c'était celui de la création d'entreprises en France en 1989. Par ailleurs, et comme l'indiquait la Secrétaire d'Etat aux PME, Mme Marylise Lebranchu, dans un discours prononcé devant la CPGME, en octobre 1998 : « rapporté à la population active, le nombre d'entreprises françaises serait de 3,4 millions si notre pays avait la même densité entrepreneuriale que la Grande-Bretagne ».

Comparée aux États-Unis, la France accuse un écart plus important encore puisqu'avec le même ratio entreprises / population, le « stock » d'entreprises françaises devrait être de 4,2 millions, à comparer avec nos 2,3 actuels.

D.- COMPLÉTER CETTE APPROCHE PAR UN OBJECTIF QUALITATIF : GARANTIR LA PÉRENNITE DE 80% DES NOUVELLES ENTREPRISES

La fixation d'un objectif quantitatif (200.000 entreprises par an rapidement dans une première étape) doit s'accompagner d'un effort qualitatif aussi important.

Certains en font, à tort, un objectif unique ; à les entendre plutôt que de favoriser la création d'entreprises nouvelles, mieux vaudrait se consacrer exclusivement à diminuer leur mortalité, à assurer leur pérennité.

Cette préoccupation apparaît en première analyse d'autant plus légitime qu'elle s'appuie sur le chiffre le plus connu, le plus colporté et en définitive le moins cerné de la création d'entreprises : celui selon lequel une entreprise sur deux meurt avant l'âge de cinq ans.

Les conclusions essentielles que l'on en tire mériteraient que l'on se penche davantage sur la statistique. Car si 50 % des entreprises ont cessé leur activité au terme de cinq ans, 20 % seulement l'ont fait en déposant leur bilan. Les autres 30 % regroupent dans une catégorie hétéroclite les cessations volontaires par le créateur, les fusions etc. Faute de précisions complémentaires, il est donc faux d'affirmer qu'une entreprise sur deux échoue avant cinq ans.

Notons, incidemment, qu'il y aurait par ailleurs beaucoup à dire sur « l'échec » de l'entrepreneur en question ; est-on certain que le créateur qui cesse volontairement son activité pour reprendre une activité salariée doit être considéré comme ayant échoué ? Est-on même certain, bien que ce soit plus discutable, qu'un chômeur en fin de droits ayant créé son activité et échouant au bout de 2, 3 ou 4 ans considérera son expérience comme uniquement négative ?

Il n'en demeure pas moins que la pérennisation des entreprises nouvellement créées doit être recherchée parallèlement à la croissance de leur nombre. Toutes les mesures proposées dans la seconde partie de ce rapport vont dans ce sens, qu'il s'agisse de l'accompagnement, de l'accès au financement ou de l'adaptation de la couverture sociale.

La création d'entreprises est un monde hétérogène ; et on a vu que la mortalité infantile est dans ce domaine statistiquement mal appréciée ; la fixation d'un objectif de pérennité est donc particulièrement malaisée.

Risquons-nous cependant à proposer l'objectif suivant : que 4 entreprises sur 5 soient toujours vivantes 5 ans après leur naissance.

III.- LES ENJEUX SOCIAUX : AIDER TOUS LES CRÉATEURS ... MAIS AUSSI RÉHABILITER LE CHÔMEUR-CRÉATEUR

Le soutien à la création de très petites entreprises est aussi un enjeu social.

On a vu précédemment que l'extension du travail indépendant pouvait en partie s'analyser comme une « externalisation » de la part de PME ou de grandes entreprises et que cette extension devait s'accompagner d'une vigilance et d'une adaptation permanente des règles du jeu social afin qu'externalisation ne signifie pas précarisation.

Il nous faut ici évoquer l'autre ambition que doit s'assigner la création de TPE, celle d'apporter sa contribution à la lutte contre le chômage.

En France, le débat sur la relation chômage/création d'entreprise est biaisé par la résonance encore forte de la formule pour le moins maladroite du Premier Ministre en 1980, M. Raymond Barre : « Les chômeurs pourraient essayer de créer leur entreprise au lieu de se borner à toucher des allocations chômage » (ajoutons, pour être juste, que l'on doit à son auteur la mise en place du premier plan d'appui à la création d'entreprise et au chômeur-créateur).

Depuis, beaucoup se sont efforcés de « découpler » chômage et création, pour des raisons distinctes mais finalement convergentes.

Certains refusent à juste titre de faire de la création de son propre emploi par un chômeur la panacée universelle. On ne lutte pas contre un chômage qui touche encore plus de 10 % de la population active avec le seul outil ou la seule incitation à la création de très petites entreprises. Il ne peut non plus s'agir, à travers la promotion de la création d'entreprise de culpabiliser les personnes privées d'emploi en leur « imposant » une création que les statisticiens qualifieront ensuite, à juste titre, de « subie » ou « contrainte ». On ne peut qu'aspirer à une création librement choisie et volontaire. Si le droit au travail est déjà un principe constitutionnel, malheureusement non traduit dans les faits, si l'on peut souhaiter que le « droit à l'initiative » intègre à l'avenir les politiques publiques, il ne saurait être question de transformer un hypothétique droit en devoir. Il n'y a pas et il ne peut y avoir de « devoir de créer » pour quiconque, a fortiori, pour un chômeur.

D'autres, plus préoccupés de « l'image de marque » de la création d'entreprise, sont soucieux de rappeler l'enjeu que représente la création d'entreprises à fort potentiel, créées volontairement et non de façon contrainte par des professionnels qui souvent ne sont pas des chômeurs. Ceux-là craignent que le chômeur-créateur n'altère l'image de la création porteuse de croissance, de progrès et d'emploi.

Soyons, en la matière, plus simple ou moins pudibond.

Nul ne contestera la nécessité de la non-assimilation de la création d'entreprise au chômage. Oui, certaines des plus belles créations d'entreprises sont le fait d'entreprises ou d'individus porteurs d'un savoir-faire ou d'une technologie, épargnés des affres du chômage et apportant une contribution significative à la croissance et l'emploi.

Oui, il faut encourager tous les créateurs d'entreprise et pas seulement les chômeurs, et les propositions de ce rapport, notamment celles qui portent sur l'adaptation de la couverture sociale à la spécificité du créateur d'entreprise, vont en ce sens.

Mais pourquoi, en même temps, ne pas regarder la réalité en face et constater qu'une création d'entreprise sur deux est l'_uvre d'une personne au chômage, que le travail indépendant reste l'une des voies de la réinsertion lorsque les autres se sont révélées infructueuses, que certains individus trouvent, « dos au mur », dans la précarité, l'énergie et la foi nécessaires pour inverser la courbe de leur destin.

Dans une France où selon l'expression consacrée « l'ascenseur social est en panne », où la formation initiale et les diplômes jouissent d'un prestige excessif et où les chômeurs de plus de 45 ans - 45 ans seulement - ont les plus grandes difficultés à réintégrer le marché du travail, faudrait-il à la fois nier ou regretter la contribution de la création de petites entreprises à la lutte contre le chômage et au recouvrement, pour des personnes marginalisées par un système économique, de leur dignité ?

Si l'on doit à juste tire veiller à ne pas prêter à la création de petites entreprises plus de vertu qu'elle n'en peut avoir, s'il est très certainement efficace, d'un point de vue pédagogique, de distinguer le créateur du chômeur, s'il faut encourager celui que, faute de mieux, on qualifiera de « non-chômeur » dans son acte d'entreprendre, refusons la tendance que l'on sent se dessiner qui consisterait à faire du chômeur-créateur le cousin honteux de la famille.

Ne faisons pas non plus de lui l'unique objet du ressentiment des gestionnaires de la dépense publique.

Disons-le tout net : la suppression de la subvention accordée aux chômeurs créateurs bénéficiaires de l'ACCRE par le Gouvernement de M. Alain Juppé fut une faute majeure, quelles que soient les critiques, justifiées, que l'on pouvait porter sur les conditions de son attribution et, partant, les améliorations dont elle aurait pu faire l'objet.

Disons-le tout aussi franchement, cette faute n'a jusqu'ici été que partiellement réparée par le système dit d'avance remboursable dont ne bénéficient que certaines catégories de personnes.

Tous les créateurs ne sont pas, fort heureusement, des chômeurs. _uvrons pour que, de plus en plus nombreuses, des personnes épargnées par le chômage se tournent vers la création d'entreprises.

Mais reconnaissons aussi la noblesse du chômeur-créateur. Elle mérite, il mérite, d'être soutenu(e).

IV. - LA NÉCESSAIRE IMPLICATION DE L'ÉTAT

« Certains prétendent qu'il suffirait que la puissance publique se désengage pour que se libèrent spontanément les initiatives génératrices de richesse. Je crois au contraire qu'une intervention publique forte se justifie dans un domaine où les bénéfices pour la collectivité dépassent les intérêts particuliers ».

Lionel Jospin - Assises de l'innovation, 12 mai 1998

A. - UN ENJEU COLLECTIF AUTANT QU'INDIVIDUEL

La création de TPE se trouve donc au centre d'enjeux collectifs cruciaux ; favoriser l'accès de tous à l'entrepreneuriat, densifier le tissu économique sur le territoire, donner une seconde chance à ceux qui en ont manqué voilà bien des objectifs éminemment politiques.

Ils devraient largement suffire à justifier l'intervention du seul garant de l'intérêt général.

Pourtant, en France et en matière de création d'entreprise, cette intervention ne paraît pas aller de soi et même ceux qui souhaitent des mesures volontaristes ne paraissent pas en saisir la portée politique.

Pour illustrer ces deux thèmes, contentons-nous, au milieu d'un florilège important, de citer deux extraits issus d'un ouvrage par ailleurs fort intéressant, le « Livre blanc de la création d'entreprises » (octobre 1998) où après avoir appelé à un « engagement fort du monde politique en faveur de l'entrepreneur », les rédacteurs du fascicule se livrent au surprenant diagnostic suivant : « L'entrepreneur peut reprendre le devant de la scène : l'économique l'emporte sur les idéaux politiques ». Comme si l'économie pouvait être autre chose que de l'économie politique. Comme si loin de « l'emporter » sur lui, l'économique et en l'espèce le soutien aux entrepreneurs, ne devaient pas d'abord s'appuyer, refléter et être légitimés par un « idéal politique ».

Dans le même ouvrage, le président du CNPF (aujourd'hui MEDEF) affirme, après avoir regretté l'insuffisant succès de « l'aventure entrepreneuriale », que « s'il fallait désigner un des coupables de cette frilosité, l'étatisme serait sans nul doute désigné du doigt ». L'État ne peut être coupable de tout et de son contraire.

En la circonstance, la conviction de votre Rapporteur est bien que l'État doit intervenir pour favoriser la création de petites entreprises.

B. - L'INTERVENTIONNISME DES ÉTATS-UNIS EN FAVEUR DES TPE

Il est amusant de noter que, paradoxalement, ce débat sur la légitimité de l'intervention de l'État en faveur de la création d'entreprise ne se pose pas aux États-Unis pourtant universellement considérés comme le temple de l'économie de marché et de la libre entreprise.

On a déjà souligné plus haut dans ce rapport la cohérence des Américains dans ce domaine.

Rappelons ici que le « Small Business Act » voté le 30 juillet 1953 par le Congrès américain stipule expressément que « le Gouvernement doit aider, conseiller et protéger dans toute la mesure du possible les intérêts de la petite entreprise, afin de préserver l'esprit de libre concurrence, d'assurer qu'une proportion équitable des marchés publics soit passée avec des petites entreprises et de maintenir, en la renforçant, l'Économie de la Nation dans son ensemble ».

Sur ce socle législatif s'est construit progressivement un dispositif puissant dont la « Small Business Administration » est la clé de voûte. Cette agence fédérale directement rattachée au Président des États-Unis, dispose de larges pouvoirs tous justifiés par la défense et la promotion de la petite entreprise. Elle gère pour le compte de l'État de nombreux « programmes » (information, conseils, formation, prêts, programmes spécifiques envers les « minorités », etc.) qui traduisent l'évolution des préoccupations de l'État Fédéral et son souci d'intégrer la création de petites entreprises dans tous ses principaux engagements en faveur du développement économique, de la lutte contre le chômage ou contre les inégalités.

Au sein de la Chambre des Représentants, une commission spéciale (« Committee Small Business ») composée de 70 « administrateurs » salariés nommés à la proportionnelle par les Républicains et par les Démocrates veille en permanence aux intérêts de la petite entreprise et s'efforce d'adapter régulièrement le cadre législatif à ses besoins. Ainsi la Chambre des Représentants aura adopté au cours du premier semestre 1999 pas moins de six textes (« bills ») visant à améliorer le dispositif d'État de soutien aux petites entreprises. Osons donc l'affirmer : en matière de création d'entreprises, les États-Unis sont « interventionnistes », la France ne l'est pas assez.

C. - POUR UNE INTERVENTION ADAPTÉE DE L'ÉTAT

Laissons donc nos pudeurs, nos complexes et nos faux débats : dans le domaine des TPE, l'État doit favoriser l'émergence d'un cadre dans lequel l'intérêt collectif sera d'autant mieux servi que se multiplieront des initiatives pérennes relevant de l'intérêt particulier.

Il doit clairement indiquer comment il entend mettre en _uvre ce « partage du risque » sans lequel il ne peut y avoir de plan ambitieux de soutien à l'entrepreneuriat car, comme le soulignait très précisément le rapport Larrera de Morel  (16) en 1996, « la création d'entreprises est une activité à risques, une activité où le surcroît de risques par rapport à la gestion d'une entreprise ordinaire est durable. Le coût supporté par le créateur du fait de ces risques est supérieur au coût de gestion d'une entreprise normale et le bénéfice qu'il en retire est, dans la quasi totalité des cas, inférieur au bénéfice que la collectivité en retire ».

Mais nous ne sommes plus à l'ère des "grandes projets industriels" portés par l'Etat, conçus et financés par lui comme dans les années soixante et soixante dix. Même si un meilleur accès des PME aux marchés publics est souhaitable, la commande publique ne peut plus, à elle seule, orienter le marché.

Les nouvelles règles du jeu de l'économie mondiale, les caractéristiques des entreprises modernes doivent conduire l'Etat à privilégier ses fonctions de régulation, d'incitation, parfois de correction.

Pour favoriser la création de TPE et la rendre accessible au plus grand nombre, l'État doit s'attaquer aux trois verrous principaux que sont les carences de l'accompagnement, le statut précaire du créateur et les difficultés d'accès au financement.

Il convient donc d'engager d'urgence trois actions convergentes en faveur de la création d'entreprises.

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ANNEXE I

L'ÉVOLUTION DE LA CRÉATION D'ENTREPRISE EN FRANCE DEPUIS 10 ANS

Depuis le début des années 90, la France est marquée par une baisse tendancielle du nombre d'entreprises créées chaque année. Cette diminution, de plus de 40.000, depuis 1990, est retracée dans le tableau ci-après :

Évolution de la création d'entreprises sur les dix dernières années

 

Créations

Réactivations

Reprises

Total

1989

204.344

48.294

55.141

307.779

1990

195.223

51.383

54.921

301.627

1991

178.767

49.485

50.724

278.976

1992

172.696

51.993

49.953

274.642

1993

170.993

54.407

48.117

273.517

1994

183.822

60.700

49.663

294.185

1995

178.989

59.390

46.537

284.916

1996

171.686

57.611

46.034

275.331

1997

167.829

57.866

46.424

272.119

1998

166.190

55.776

44.480

266.446

Evolution
1998 / 1997

- 0,98 %

- 3,61 %

- 4,19 %

- 2,08 %

Source : Secrétariat d'État aux PME, au Commerce et à l'Artisanat

En 1998, la baisse constatée par rapport à 1997 a été d'environ 5.000 entreprises nouvelles en moins, soit une diminution de 2,1 %.

La confirmation de cette tendance dans un contexte de reprise de la production industrielle, soutenue par une forte demande intérieure, laisse interrogateur. Un article, tiré d'une publication récente du Secrétariat d'État aux PME (17) relève qu'en 1997 et 1998, « la nette reprise de la demande intérieure aurait dû entraîner une reprise partielle des créations d'entreprises, qui ne s'est pas produite ».

Au-delà de cette tendance à la baisse, on observe que les « très petites entreprises » (TPE) représentent la majorité des entreprises nouvelles. L'essentiel de la création (99%) se situe, en effet, dans la tranche de entreprises de moins de 10 salariés au démarrage et plus des trois quarts sans aucun salarié, comme l'illustre le tableau ci-après.

Evolution selon la taille du nombre d'entreprises créées entre 1997 et 1998
(nombre de salariés au démarrage)

 

0

1 à 5

salariés

6 à 9 salariés

0 à 9 salariés

10 à 19 salariés

20 à 49 salariés

10 à 49 salariés

50 salariés et plus

TOTAL

1998

203.921

55.589

3.569

263.079

2.350

777

3.127

240

266.446

1997

208.697

55.602

3.546

267.845

2.219

798

3.017

225

271.087

Variation

- 4.776

- 13

+ 23

- 4.766

+ 131

- 21

+ 110

+ 15

- 4.641

Source : Agence pour la création d'entreprises - rapport d'activité 1998

ANNEXE II

LES MESURES DE SIMPLIFICATION ADMINISTRATIVE

Les créateurs déplorent, très fréquemment, la complexité des procédures et la lourdeur des formalités auxquelles ils sont confrontés au moment où ils se lancent dans la création d'une nouvelle entreprise. Il s'agit d'un obstacle important à la création qui a suscité des mesures de simplification dans de nombreux pays comme la Grande-Bretagne où existe une formule originale : la « ready made company ».

Lorsqu'un créateur veut démarrer son entreprise en Grande-Bretagne, il s'adresse à un solicitor ou à un company registration agent qui lui propose une « société sur l'étagère » (off-the-shelf-company), c'est-à-dire une société déjà constituée et inscrite au registre du commerce et des sociétés. Cette société « coquille vide » n'a pas eu d'activité depuis sa création (dormant company) : il suffit donc d'en confier la propriété et le contrôle au créateur, ce qui peut être fait immédiatement. La « ready made company » permet de faire des actes de commerce, sans délai.

En France, le Gouvernement a lancé une série de mesures de simplification des formalités de création dans le but d'améliorer l'environnement du chef d'entreprise. 37 mesures ont ainsi été présentées en conseil des ministres en décembre 1997, complétées par de nouvelles dispositions en novembre 1998.

Relevons, en particulier, la simplification des formalités d'immatriculation pour les activités réglementées et la réduction du délai d'immatriculation des entreprises au registre du commerce et des sociétés (l'immatriculation s'effectue désormais en 24 heures).

L'accent est, par ailleurs, mis sur l'amélioration des relations des entreprises avec les organismes sociaux en renforçant les garanties des entreprises en cas de contrôle de l'URSSAF. Ainsi, le chef d'entreprise doit désormais être préalablement avisé et le droit de réponse du cotisant est porté à 30 jours, comme en procédure fiscale.

Au plan fiscal, le régime de la micro-entreprise a été rendu plus accessible grâce à un relèvement de son seuil d'application : près de 500.000 très petites entreprises sont ainsi dispensées du paiement de la TVA et du dépôt de la déclaration de bénéfices. Par ailleurs, les obligations déclaratives et de paiement de la TVA ont été simplifiées pour les entreprises relevant du régime simplifié d'imposition. Cette mesure permet à près d'un million d'entreprises de ne déposer chaque année qu'une seule déclaration.

ANNEXE III

LES MESURES D'AIDE AU FINANCEMENT

1.- LES DISPOSITIFS MIS EN PLACE

Le Gouvernement s'est attaché à développer des outils d'aide au financement de la création d'entreprise, en direction notamment des petites structures mais aussi de publics moins armés pour s'engager dans la mise en place d'une activité nouvelle.

Sur le premier point, les interventions de la Banque de développement des PME (BDPME) et de la SOFARIS sont aujourd'hui davantage orientées vers les très petites entreprises, grâce à la mise en place de conventions de délégation. Ces conventions ont pour objectif d'inciter les banques à s'intéresser aux petits projets en prévoyant une délégation de la garantie SOFARIS. Rappelons que la BDPME intervient en partenariat avec le système bancaire, soit en partageant le financement mis en place, soit en garantissant partiellement le remboursement de ce financement, soit, encore, en consolidant la structure de bilan de la PME. Le risque se trouve ainsi partiellement mutualisé de sorte que le chef d'entreprise et son banquier restent mobilisés et responsabilisés, tout en étant plus sereins dans leurs projets de développement.

Sur le second point, une avance remboursable a été mise en place, à l'occasion de l'extension du dispositif ACCRE, qui concerne les jeunes de moins de 26 ans, les salariés-repreneurs d'entreprise en difficulté et les allocataires des minima sociaux. L'attribution de cette aide, d'un montant maximal de 40.000 francs, est subordonnée à l'obtention d'un financement complémentaire par un organisme délégataire ou un établissement de crédit dont le montant doit être au minimum égal à la moitié de celui de l'avance remboursable. Elle peut être complétée par le financement partiel soit d'une formation à la création ou à la gestion d'entreprise, soit d'un accompagnement par une structure d'appui. Cette aide est remboursable dans un délai maximal de 5 ans, avec un différé de remboursement de 18 mois à compter de son versement.

2.- LES MESURES FISCALES EN FAVEUR DE LA CRÉATION D'ENTREPRISE

La priorité accordée aux PME-PMI s'est également traduite par des mesures fiscales qui concernent, avant tout, les entreprises innovantes en raison du retard de la France dans ce domaine, mais dont certaines visent, plus largement, les entreprises nouvelles, quel que soit le secteur d'activité.

En matière d'innovation technologique, l'action du Gouvernement mérite d'être brièvement rappelée afin de démontrer l'importance des moyens mis au service d'une priorité clairement affichée.

C'est ainsi, que la réduction d'impôt pour souscription de parts de fonds communs de placement dans l'innovation (FCPI) a été reconduite sur trois ans et que ses conditions d'obtention ont été assouplies, au niveau, notamment, de l'appréciation du caractère innovant de l'entreprise. Par ailleurs, les bons de souscription de parts de créateurs d'entreprise ont été étendus aux sociétés créées depuis moins de 15 ans, au lieu de 7 antérieurement. Enfin, une réduction d'impôt sur le revenu a été instituée pour les produits des contrats d'assurance-vie constitués pour 5 % au moins de placements à risque (parts de FCPR ou FCPI, actions de SCR et de SFI, titres du nouveau marché ou titres non cotés).

Ces mesures se sont accompagnées de dispositions plus générales d'aide au financement des entreprises, résumées dans l'encadré ci-après.

Mesures fiscales d'aide au financement des entreprises

· Aménagement du régime de déduction des pertes en capital subies par les créateurs d'entreprise

Dans le but d'encourager la prise de risque, le régime de déduction des pertes subies par un particulier qui a souscrit au capital d'une société nouvelle, à la suite de la cessation des paiements de cette dernière, a été étendu aux entreprises créées dans le cadre de la reprise d'activités préexistantes par voie d'essaimage. Le délai pouvant s'écouler entre la création et le plan de redressement a, par ailleurs, été porté de 5 à 8 ans.

· Réduction de l'impôt sur le revenu pour les personnes faisant des dons à des associations aidant à la création d'entreprise

Cette mesure vise à augmenter les ressources financières des associations, sans but lucratif, dont l'objet exclusif est d'apporter un financement aux créateurs d'entreprises, en permettant aux particuliers de déduire de leur impôt sur le revenu, la moitié du don effectué en leur faveur, dans la limite de 1,75% de leur revenu imposable.

· Report d'imposition des plus-values de cession de valeurs mobilières en cas de réinvestissement dans des entreprises en création ou créées depuis moins de 15 ans

Cette mesure a pour objectif d'inciter les dirigeants de sociétés à investir dans de nouvelles entreprises en prévoyant de différer l'imposition de la plus-value réalisée lors de la cession de droits sociaux si le produit de la vente des titres est réinvesti, avant la fin de l'année suivante, dans la souscription en numéraire au capital d'une entreprise en création ou ayant moins de 15 ans d'activité.

CHAPITRE II : TROIS OUTILS AU SERVICE
DE LA CRÉATION D'ENTREPRISE

Encourager la création d'entreprise en France suppose un environnement plus favorable à l'initiative. Trois mesures sont suggérées en ce sens : en premier lieu, permettre un accès de tous les porteurs de projets à un accompagnement de qualité ; en second lieu, offrir aux nouveaux entrepreneurs un statut leur assurant un minimum de garanties ; enfin, lever les obstacles à l'accès au financement.

I.- « LA MAISON DE L'ENTREPRENEUR », POUR L'ACCÈS DE TOUS À UN ACCOMPAGNEMENT DE QUALITÉ

Quelles sont, en France, les structures d'appui aux créateurs d'entreprises les plus critiquées ? Les banques et les chambres de commerce.

Quels sont les interlocuteurs auxquels s'adresse le plus naturellement le créateur potentiel ? Les banques et les chambres de commerce.

Combien d'entrepreneurs déclarent avoir bénéficié de l'appui de réseaux d'aide à la création d'entreprises ? Environ 1 sur 10.

En dépit du grand nombre et de la diversité des intervenants, voilà, résumé en trois constats, le sombre diagnostic que l'on peut établir de notre système d'accueil, d'orientation et d'accompagnement du créateur d'entreprise.

Ces carences nous conduisent à préconiser la création non pas d'un « guichet unique » mais d'un « point unique d'entrée », facilitant, coordonnant, harmonisant et qualifiant l'accès de tous à l'information et l'aide à la création d'entreprise.

La « Maison de l'entrepreneur » dont on préconise la création et la multiplication sur le territoire ne sera pas « un immeuble de plus » : elle sera localisée au sein des chambres consulaires, ni un « lieu de plus » : elle devra être, au contraire, le lieu de regroupement de tous ceux qui peuvent aider le créateur.

A.- LES FAIBLESSES DU SYSTÈME FRANÇAIS D'ACCOMPAGNEMENT DE L'ENTREPRENEUR

En dépit d'un apparent foisonnement d'initiatives et de structures le système d'accompagnement de l'entrepreneur se révèle peu performant.

1.- LE FOISONNEMENT DES INITIATIVES ET DES STRUCTURES D'AIDE À LA CRÉATION D'ENTREPRISES.

Le Conseil National de la création d'entreprises (18) (CNCE) estime qu'environ 3000 structures interviennent en soutien des créateurs, chiffre qui n'intègre pas les interventions, par nature ponctuelles, des professions libérales, les experts-comptables par exemple.

Ce chiffre recouvre une très grande diversité, de taille, de statut, d'objectifs et de moyens des intervenants en appui de la création d'entreprise.

Dans la sphère publique, l'accueil et l'orientation du créateur d'entreprise sont de plus en plus intégrés par les structures de développement local ou d'expansion économique dont se dotent les régions, départements, communes (à tout le moins les plus importantes d'entre elles) ou les regroupements inter-communaux.

Établissements publics ne se percevant pas toujours comme tels, les « consulaires » (Chambres de Commerce et d'Industrie, Chambres de Métiers) consacrent une part de leurs activités et de leurs ressources à l'accompagnement du créateur.

Fortes de leurs implantations locales - on compte 161 Chambres de Commerce en France et 106 Chambres de Métiers, les consulaires ont pris, en 1995, une initiative dite réseau « Entreprendre en France ».

La création de ce réseau, en octobre 1995, résulte d'une initiative conjointe de l'Assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie (ACFCI) et de l'Association française des banques (AFB) autour des objectifs suivants : augmenter le flux de créateurs et de repreneurs, favoriser l'émergence de projets de qualité et mettre en _uvre une politique d'appui visant à accroître la pérennité des jeunes entreprises.

Ce réseau regroupe différents partenaires parmi lesquels des chambres consulaires, des établissements de crédit, des organismes de garantie tels que la SOFARIS, des organismes publics (ANVAR, Caisse de dépôts et consignations), des professions libérales (avocats, experts-comptables...).

Localement, les Chambres de Commerce et d'Industrie ont mis en place un « Espace Entreprendre » pour accueillir, informer et orienter le porteur de projet vers les services spécifiques des partenaires du Réseau.

Un « Passeport pour entreprendre » a également été mis en place qui atteste du parcours suivi par le créateur d'entreprise, chaque étape étant validée par la signature de l'un des partenaires du réseau. Il constitue la clé d'accès à l'éventail des services proposés par l'Espace Entreprendre et les partenaires et peut ouvrir l'accès à une garantie préalable s'élevant jusqu'à 70 % du prêt demandé aux banques.

Un rapport récent de l'Inspection générale des Finances sur les chambres de commerce et d'industrie établit un bilan sévère de cette initiative pourtant a priori intéressante en relevant que « moins de 3.000 créateurs bénéficient en 1998 de l'accompagnement personnalisé prévu par le « passeport pour entreprendre » contre 15.000 prévus, ce qui représente une part de marché d'à peine 1,5 % sur les quelques 170.000 créations d `entreprises enregistrées chaque année. [Ces résultats] reflètent crûment l'incapacité du réseau consulaire à se mobiliser autour d'un projet fédérateur, au-delà des efforts de communication déployés en vain ».

La plupart des créateurs auditionnés dans le cadre de ce rapport nous ont confirmé ne pas avoir eu connaissance ou ne pas avoir eu recours à ce dispositif.

Les Chambres de Métiers se présentent à juste titre comme un interlocuteur naturel des entrepreneurs puisque 45 % des créateurs sont des artisans.

Elles accueillent près de 200.000 porteurs de projets par an et leur proposent des demi-journées d'information, des stages de préparation à l'installation (50 000 créateurs ou repreneurs par an) ou des formations « longues » (11 000 par an).

La France connaît, par ailleurs, un net renforcement des réseaux associatifs d'aide à la création d'entreprise.

Beaucoup mériteraient d'être cités ; ainsi par exemple, les R.I.L.E. (Réseaux d'Initiative Locale pour l'Emploi), les C.L.B.E. (Comités Locaux de Bassins d'Emploi) etc.

On se contentera ici de présenter sommairement les quatre réseaux considérés comme les plus importants, dont le professionnalisme est reconnu et dont l'ambition est de parvenir rapidement à un maillage complet du territoire national.

a) L'un d'entre eux mène une action principalement orientée sur l'aide au montage du projet

- Le réseau des Boutiques de gestion

Le réseau des Boutiques de gestion, créé en 1980, fédère 111 points d'accueil et a pour objectif de porter à 150 le nombre de ses implantations d'ici 2005.

Les Boutiques de gestion ont pour mission d'accompagner les créateurs d'entreprises dans toutes les phases de préparation de leur projet et assurer un suivi post-création. Chaque boutique fonctionne avec une équipe de généralistes de la création d'entreprise qui travaillent en liaison étroite avec des spécialistes.

En 1998, le réseau des Boutiques a accueilli environ 31.000 porteurs de projet auxquels il a proposé un premier diagnostic de viabilité du projet. Près de 11.000 d'entre eux ont fait l'objet d'un accompagnement personnalisé tandis que 5.000 entreprises en phase de création ont bénéficié de l'expertise des Boutiques.

b) Les trois autres s'intéressent davantage au financement du projet

France initiative réseau (FIR) et les plates-formes d'initiative locale (PFIL)

France Initiative Réseau est une fédération de réseaux associatifs dont l'objectif est d'organiser une collaboration entre les collectivités, les opérateurs institutionnels et les entreprises pour créer un environnement favorable au développement de l'initiative économique.

Son réseau est constitué de 152 plates-formes d'initiative locale (PFIL) et de 80 en préparation dont le rôle est la mobilisation de fonds pour financer, sous forme de prêts d'honneur, la création d'entreprises ainsi que la mobilisation de compétences économiques locales pour le parrainage des créateurs et l'accompagnement de l'entreprise en création.

Associations régies par la loi de 1901, les PFIL prennent appui sur des institutions déjà existantes qui les hébergent. En 1998, elles ont aidé 2.000 créateurs à l'aide de prêts d'honneur dont le montant moyen s'élève à 47.000 francs.

L'Association pour le droit à l'initiative économique (ADIE)

L'ADIE, créée en 1989, a pour objectif de donner à chacun le droit à l'initiative économique en lui ouvrant l'accès au capital et en lui apportant un soutien professionnel.

Son action repose ainsi sur une assistance au montage de projet, l'octroi d'une aide financière (un prêt d'un montant maximal de 30.000 F qui peut être complété, dans certains cas, par des prêts de matériels ou des prêts d'honneur) et un suivi des entreprises financées.

L'originalité de l'ADIE réside dans la partenariat que l'association est parvenue à développer avec les banques : la banque décaisse les prêts et assure leur gestion mais délègue les fonctions d'accompagnement, d'analyse financière des projets, d'octroi des prêts et de suivi des entreprises. L'esprit de ce partenariat est de faciliter l'insertion des porteurs de projet dans le circuit bancaire et leur permettre d'acquérir l'autonomie financière.

L'ADIE reçoit près de 10.000 demandes de prêts par an et couvre 69 départements. En 1998, le nombre de prêts accordés s'est élevé à 1.629 ce qui porte à près de 6.000, le nombre de prêts accordés par l'ADIE depuis sa création, pour un montant total de 120 millions de francs.

Le « Réseau Entreprendre »

Le « Réseau Entreprendre » est une fédération d'associations de chefs d'entreprises qui a pour objectif de venir en aide aux « petits projets à potentiel ». Son mode d'intervention repose sur une évaluation des projets de création, l'octroi, en cas de validation, d'un prêt d'honneur sans intérêt, une intégration dans les réseaux économiques locaux et un accompagnement sur une durée de 2 ans.

La diversité des réseaux qui se sont développés en France constitue une richesse indéniable dont l'importance a été reconnue par le législateur à deux reprises. La loi du 16 octobre 1997 relative au développement d'activité pour l'emploi des jeunes et la loi du 29 juillet 1998 sur la lutte contre les exclusions ont en effet consacré leur rôle dans l'appui au créateur d'entreprise en subordonnant l'attribution de l'aide qu'elles mettent en place (une avance remboursable) à un accompagnement en aval de la création. A cette fin, ces textes prévoient que la gestion de l'aide est déléguée à ces organismes sélectionnés dans le cadre d'une procédure dite EDEN, qui met malheureusement beaucoup de temps à s'établir concrètement, sans doute du fait de la lourdeur de la procédure d'appel d'offres retenue. Le législateur ne peut que s'étonner et déplorer que plus d'un an après son vote les dispositions d'un texte majeur ne soient toujours pas en vigueur.

2.- UN SYSTÈME GLOBALEMENT PEU PERFORMANT

a) Un dispositif peu « lisible » pour le créateur

Concluant une étude sur le développement économique local en Europe (19), M. Dominique Thierry note « dans aucun pays de l'Union européenne (...) il n'existe un tel enchevêtrement de structures, d'acteurs et d'intervenants, comme celui que l'on connaît en France ».

On ne saurait mieux expliquer la grande perplexité parfois le découragement des créateurs face à cet « enchevêtrement ».

Cette complexité explique sans doute aussi la faible attractivité du système : on estime qu'environ un entrepreneur sur dix seulement est accompagné pendant sa phase de création. Estimation corroborée par la faible somme des prêts accordés (10 000 par an environ) par les principaux réseaux d'appui à la création d'entreprise. On est loin de l'objectif de « 40 % d'entrepreneurs réellement accompagnés » que fixait le Commissariat Général au Plan dans son rapport de 1996.

Interrogés lors de tables rondes organisées pour la préparation de ce rapport, les créateurs se sont quasi-unanimement plaints de l'absence de lisibilité du dispositif.

Si plusieurs indiquent avoir, après tâtonnements successifs, fini par rencontrer une personne ou une structure efficaces, beaucoup expliquent avoir perdu beaucoup de temps à réunir la première information nécessaire, disent avoir été dans un premier temps mal accueillis, mal orientés, mal informés.

b) Les Chambres de Commerce particulièrement contestées

L'hétérogénéité des réseaux d'aide à la création d'entreprise explique le caractère très marqué territorialement des appréciations élogieuses ou négatives portées par les créateurs qui souvent jugent la structure au plan national en fonction de leur expérience locale et des qualités prêtées à l'accompagnant qu'ils ont rencontré.

Difficile dans ces conditions de prétendre refléter « objectivement » l'évaluation des créateurs des performances de tel ou tel réseau.

Force est pourtant de constater que les « consulaires » ont mauvaise presse auprès des créateurs.

Les Chambres de Métiers, globalement reconnues pour leur activité de formation, sont suspectées de malthusianisme. « Les élus des Chambres de Métiers continuent de voir chez le créateur un rival potentiel » affirme un créateur. « Comment voulez-vous demander à un plombier d'aider d'autres plombiers à s'installer ? » s'interroge un autre.

Accusation démentie par les Chambre de Métiers, même si certaines reconnaissent que des tentations malthusiennes ont parfois pu exister « par le passé ». Le changement d'attitude s'expliquerait par l'autonomie croissante, dans l'exercice de leur métier de formateurs et de conseils, des salariés des Chambres vis-à-vis des élus consulaires et par la prise en compte par ces derniers de l'intérêt global de la défense de l'artisanat, secteur caractérisé par un « turn-over » important : beaucoup de cessations et beaucoup de créations chaque année.

Mais ce sont clairement les Chambres de Commerce qui font l'objet des critiques les plus vives de la part des créateurs.

Quelques citations de ces créateurs, extraites d'auditions réalisées pour ce rapport, donnent une idée de ce désamour :

« La CCI n'offre aucun intérêt. L'information est succincte et au niveau du conseil il n'y a rien à attendre » (Lille). « La CCI il ne faut y aller que pour les formalités » (Paris). « Je ne suis même pas allé à la CCI, ça ne sert à rien » (Amiens). « Ceux qui nous ont reçus (en 1995) ne savaient pas ce qu'est une entreprise ; quand j'ai parlé d'Internet et d'Intranet ils ne savaient pas ce que c'était » (Lille). « Je connais personnellement plusieurs porteurs de projets qui ont arrêté tellement ils ont été découragés par les CCI » (Région parisienne). « Même les chefs d'entreprises installés ne croient pas aux Chambres de Commerce ; il n'y a qu'à voir la faible participation aux élections » (Drôme). « Les élus des Chambres de Commerce ne s'intéressent ni aux petites entreprises, ni à la création. Ce sont des notables locaux qui se battent pour leur bout de pouvoir » (Montpellier).

On pourrait prolonger cette litanie.

On pourrait aussi la contester ; l'échantillon des créateurs réunis était-il représentatif, le nombre d'entretiens de votre Rapporteur avec des créateurs (une trentaine) était-il significatif ?

On pourrait, enfin, nuancer le tableau précédemment brossé. Ainsi l'un des créateurs auditionnés, (Jean Emery, Tracetel SA, Châteaufort) a affirmé que l'utilisation du « Passeport » d'Entreprendre en France s'est révélée très intéressante et lui a permis de trouver un « effet de levier » auprès des banques. D'autres ont indiqué savoir que dans telle ou telle ville la CCI était performante. Enfin, nous avons par nous-mêmes constaté en visitant une Chambre « modèle » sur le plan de l'accueil et de l'accompagnement des créateurs, celle de Bobigny, que des dispositifs performants pouvaient être mis en place par les CCI.

Il n'empêche. Les impressions des créateurs paraissent confirmées par le rapport de l'Inspection Générale des Finances déjà cité qui pointe, notamment, la faiblesse des moyens consacrés par les CCI aux services aux entreprises.

Quelques chiffres sur les interventions

des chambres de commerce et d'industrie auprès des entreprises

Le service aux entreprises est l'une des missions où la légitimité de l'intervention de l'institution consulaire ne fait aucun doute. Cette mission recouvre plusieurs types d'activités : formalités aux entreprises, assistance technique, appui à l'international, études et informations économiques et aide à la création d'entreprises. Pourtant, le rapport de l'Inspection générale des Finances souligne que peu de moyens y sont consacrés.

Les dépenses correspondantes s'élèvent en effet à environ 2,5 milliards de francs sur un budget consolidé de 25 milliards de francs. Les moyens humains sont également limités puisque seulement 3.623 personnes interviennent dans ce domaine sur un effectif total de 22.477, soit 16 % de cet effectif. En outre, la plupart des agents n'ont qu'une faible expérience du monde de l'entreprise, liée à l'absence de mobilité. Enfin, à de rares exceptions près, les Chambres ne se sont pas dotées d'outils d'évaluation permettant d'apprécier l'impact de leurs actions.

S'agissant plus précisément du soutien à la création d'entreprises, l'Inspection générale des Finances met l'accent sur la modestie des résultats obtenus par le réseau « Entreprendre en France ». Si 157 « Espaces Entreprendre » ont été mis en place, permettant d'orienter 130.00 porteurs de projets dont 45.000 ont participé à des demi-journées d'information, l'accompagnement proposé dans le cadre des « Passeports Entreprendre en France » n'a bénéficié qu'à 2.630 entrepreneurs en 1997 et 2.809 en 1998. Le rapport relève que « le taux de pérennité à un an de 2.630 entreprises créées (...) est certes élevé - de l'ordre de 85 à 95 % - mais la « part de marché » qu'a acquis « Entreprendre en France » parmi les 168.000 créations enregistrées en 1997 reste négligeable : à peine 1,5 % ».

Disons le tout net, même si cela n'est pas directement l'objet de ce rapport, la réforme des Chambres de Commerce et d'Industrie, souvent évoquée, toujours reportée, ne saurait être plus longtemps différée comme en conviennent d'ailleurs les plus lucides de leurs élus ainsi que leurs dirigeants nationaux.

On pourrait, au passage, s'interroger sur la pertinence du maintien de deux, et même trois chambres économiques, si l'on tient compte des Chambres d'Agriculture. La « spécificité » alléguée des métiers peut-elle continuer à justifier le statu quo actuel dont tous les entrepreneurs connaissent les limites et les ambiguïtés (double affiliation de certaines professions, incertitudes pesant sur l'affiliation de secteurs entiers de l'économie : conseil, services, agro-alimentaire etc.) ?

Le bon sens voudrait que l'on fusionne les Chambres de Commerce et les Chambres de Métiers en une seule Chambre Économique ou, si l'ont tient absolument au bicaméralisme, que la séparation se fasse comme certains de nos partenaires européens par la taille de l'entreprise et non plus en fonction du « métier ».

Une telle proposition ayant, on le sait, toutes les chances de se voir taxer de provocante pour les uns, d'inopportune pour les autres, tant sont grands en la matière le poids des habitudes, les intérêts personnels ou les lobbies locaux, on se bornera, dans le cadre de ce rapport, à proposer une homogénéisation des moyens et méthodes d'accompagnement des créateurs par les structures consulaires.

c) La complémentarité insuffisante entre les réseaux

On a déjà précédemment évoqué « l'enchevêtrement » des acteurs publics, para-publics et privés de la création d'entreprise.

Les réseaux associatifs n'échappent pas à la règle, leur développement apparaissant tantôt nécessaire (lorsque par exemple, telle ou telle partie du territoire n'est pas couverte) tantôt redondant et même concurrentiel.

Les principaux réseaux souffrent d'une absence de « positionnement clair », vis à vis des créateurs, comme des pouvoirs publics.

Certes, officiellement, tout va bien. Les réseaux rechignent à décrire leurs zones d'intersection qui sont aussi des zones de friction, s'efforcent de donner d'eux-mêmes une image de complémentarité et de coopération.

Ainsi, par exemple, le développement de trois des réseaux associatifs parmi les plus reconnus, l'ADIE, FIR, Réseau Entreprendre est supposé harmonieux.

A l'ADIE l'aide aux chômeurs-créateurs, au Réseau Entreprendre l'appui aux petits projets à potentiel (perspective de 10 à 25 salariés), à F.I.R le soutien aux projets intermédiaires.

Mais à voix basse, sur le terrain, les acteurs locaux de ces réseaux reconnaissent frictions et compétition aux zones frontières.

Parfois l'aveu est public. « C'est un peu le Far-West » reconnaît Marc Saint-Olive, animateur du Réseau Entreprendre, en évoquant les modalités de développement des réseaux.

Une note interne de l'Assemblée permanente des Chambres de Métiers (APCM, juin 1999) indique crûment : « il est très dommage de constater une concurrence stérile entre les acteurs qui souhaitent gagner des quasi monopoles et dont les degrés de compétence ne sont plus clairement définis. Le créateur d'entreprise devient alors un enjeu d'une lutte qui ne le concerne pas et qui ne lui apporte rien ».

En supposant excessif le tableau ainsi dressé, ce que ne manqueront pas d'affirmer plusieurs responsables associatifs, il reste que le monde de l'appui au créateur devient mécaniquement concurrentiel : concurrence entre les réseaux associatifs et les professions libérales, concurrence entre les réseaux pour l'obtention des prestations offertes pour les dispositifs publics d'aides aux créateurs ou aux personnes défavorisées ou pour l'octroi de subventions émanant de la sphère publique ou para-publique (Ministères, Délégation à l'Emploi, Collectivités Locales, Caisse des Dépôts et Consignations, etc.), concurrence avivée par la faiblesse criante et structurelle des moyens de fonctionnement dont ils disposent.

Comment ne pas déplorer que cette « course à la subvention », explicable et légitime, accapare une part si importante de l'esprit, de l'énergie et du temps d'accompagnateurs exerçant le plus souvent ce métier par idéal et dont Claude Alphandéry (20) loue à juste titre « l'énergie, la générosité, l'imagination, l'audace » dont ils font souvent preuve.

d) Une gestion des ressources humaines déficiente

Si l'on devait résumer caricaturalement les carences de la gestion des ressources humaines du système global d'accueil et d'accompagnement de la création d'entreprise fruit de la juxtaposition d'entités diverses et disparates, on pourrait affirmer que l'essentiel des personnels affectés à ces missions pourrait relever de l'une ou de l'autre des catégories suivantes : « mal adaptés » à leur métier ou « mal rémunérés ».

Certains réseaux, y compris publics, ne proposent comme interlocuteurs aux créateurs d'entreprise que des personnes mal adaptées à leur métier, ne connaissant guère le monde de l'entreprise et parfois pas du tout, peu ou pas formées à l'évolution des techniques ou des méthodes de l'entreprise, limitées dans leur évolution personnelle par des « carrières » qui ne leur offrent ni mobilité, ni perspectives d'évolution.

D'autres font appel, au contraire, à de jeunes diplômés de l'enseignement supérieur, parfois dotés d'une première et récente expérience professionnelle, bien formés aux exigences de l'accompagnement... mais dans la plupart des cas mal, parfois très mal, rémunérés n'acceptant leur situation que par conviction ou par militantisme.

Comment ne pas déceler là, l'une des principales faiblesses structurelles de la création d'entreprises en France ?

La quatrième puissance économique du monde devra-t-elle durablement faire reposer l'appui indispensable aux créateurs d'entreprises sur des femmes et des hommes mal préparés à ce métier ou espérer que le militantisme continue de compenser les insuffisances de leur rémunération ? On ne saurait s'y résigner.

e) Un coût croissant

« Et pourtant il coûte cher, et son coût va croissant ».

En dépit de ses lacunes, de ses insuffisances, de sa piètre gestion des ressources humaines, le « système français » d'accompagnement des créateurs d'entreprise n'est pas aussi économe qu'on pourrait le supposer.

Voici, résumé par le tableau ci-après, emprunté au Commissariat Général du Plan (1996) l'estimation des coûts des réseaux d'aide à la création d'entreprise.

ESTIMATION RÉALISÉE PAR L'AGENCE NATIONALE POUR LA CRÉATION D'ENTREPRISES DES COÛTS DES RÉSEAUX D'AIDE À LA CRÉATION

(pour les aspects information/premier montage/formation/suivi)

Réseaux

Objet

Résultats

Coût et financement

 

Information/premier montage (330 agents temps plein)

200 000 accueils et entretiens individuels

32 000 créations

120 millions de francs financés surtout par la taxe frais CCI (1)

Chambres

de commerce

et d'industrie

Obligation pour les CCI de proposer des formations aux commerçants

10 000 bénéficiaires escomptés (avant 3 600 par an)

Financement par les bénéficiaires et l'État

(3,5 millions de francs pour l'État)

 

Conseil spécialisé (hébergement, juridique, commercial...)

   
 

Information/premier montage (400 agents temps plein)

200 000 pré-accueils et entretiens individuels

50 000 créations ou reprises

140 millions de francs financés à hauteur de 40 millions de francs par l'État (2)

Chambres

de métiers

Formation

60 000 bénéficiaires

Financement par participants et taxe frais Chambre de métiers

Boutiques

de gestion

Informatique/premier montage

Formation courte et longue, suivi

95 boutiques de gestion et 245 agents temps plein

28 000 bénéficiaires

4 800 bénéficiaires

3 000 bénéficiaires

Budget total de
65 millions de francs

État (4,5 millions)

Collectivités (44 millions)

Bénéficiaires (16,5 millions)

Associations à public spécifique, partenaires privés...

Premier accueil

Entretiens individuels

34 000 bénéficiaires

23 700 bénéficiaires

Budget estimé à 80 millions de francs

Collectivités locales

Premier accueil

Entretiens individuels

Financement de réseaux locaux

26 000 bénéficiaires

15 000 bénéficiaires

Budget estimé à 60 millions de francs

50 millions de francs

ANCE

Centre de ressources et animation des réseaux

Appui aux opérateurs

Animation

650 « Points chance »

(50 % en démarche qualité)

Budget : 42 millions de francs (dont 29 millions de francs du ministère de l'Industrie)

(1) Budget total des CCI : 20 milliards de francs (3,2 milliards consacrés au conseil) dont taxe frais CCI de 5 milliards.

(2) Budget global des CM : 2,3 milliards de francs dont taxe frais CM de 705 millions de francs.

Le coût global est estimé entre 500 à 700 millions de francs (coût moyen estimé à 600 millions de francs) pour : 400 000 accueils, 70 000 formations courtes (ne comprend pas les formations longues du type chômeur créateur faites par d'autres structures que les Boutiques de gestion).

source : Rapport du Commissariat général du Plan - « Évaluation des aides à la création d'entreprise » - 1996

S'il n'a pas été possible d'actualiser ce tableau faute de données précises, il est clair que le résultat serait aujourd'hui bien plus élevé, les budgets de l'État, des collectivités locales ou l'appui de la Caisse des Dépôts et Consignations ayant depuis apporté de nouvelles et légitimes contributions au fonctionnement de ces réseaux, pour assurer leur développement sur le territoire ou pour les associer à des dispositifs précis. Il est donc grand temps de transformer et d'améliorer notre système d'accompagnement du créateur d'entreprise.

II.- LA PROPOSITION : LA « MAISON DE L'ENTREPRENEUR »

L'essentiel de la proposition repose sur la volonté de rendre l'accompagnement du créateur d'entreprise aisément identifiable, facile d'accès, d'un professionnalisme garanti.

Tout créateur potentiel, où qu'il vive sur le territoire français, doit pouvoir accéder facilement et gratuitement aux premières informations, aux premiers conseils. Cette mission de Service Public doit être placée non pas sous la gestion de l'État, mais sous sa coordination.

Le concept de « Maison de l'Entrepreneur » proposé ici ne prétend pas être « révolutionnaire ».

Il s'inscrit dans le prolongement d'expériences intéressantes observées en France ou à l'étranger.

En France, les regroupements des structures d'accompagnements les plus cités par les créateurs sont ceux de Dunkerque, Rennes, Auxerre (« Le Phare » y est, de plus, implanté dans un quartier difficile) ou des départements de l'Aisne et de Franche-Comté.

D'autres mériteraient certainement de l'être.

A l'étranger, nous y reviendrons, votre Rapporteur a pu apprécier aux États-Unis le rôle des Small Business Dévelopment Center (SBDC), chargés d'apporter une assistance spécifique aux entrepreneurs, et au Québec le professionnalisme du « Centre info entrepreneurs » de Montréal, dédié à l'information du créateur et l'originalité de l'approche des SAJE (Services d'Aides aux Jeunes Entrepreneurs).

La « Maison de l'Entrepreneur » trouve aussi des sources d'inspiration dans l'analyse de certaines expériences passées ou actuelles.

Citons notamment l'opération dite « Points Chances » voulue par le Gouvernement de M. Jacques Chirac et mise en _uvre en 1987 et 1988. Basée sur des principes qui faisaient l'unanimité : identifier, labelliser et promouvoir les appuis aux créateurs d'entreprise, l'expérience s'est soldée par un échec retentissant, la labellisation ayant été faite à marche forcée à partir de critères incertains et l'ANCE (aujourd'hui APCE) ne disposant pas des moyens de certifier et d'animer le réseau ainsi constitué.

Il subsiste cependant de nombreux « vestiges » de l'expérience, plusieurs structures d'aide aux créateurs d'entreprises ayant choisi de conserver un logo il est vrai réussi et ayant bénéficié par le passé d'une forte communication.

Il faut aussi citer l'expérience en cours de « l'Espace Entreprendre » des Chambres de Commerce et d'Industrie dont les fondements théoriques sont incontestables mais dont la pratique est malheureusement aléatoire et peu convaincante.

La « Maison de l'Entrepreneur » doit être le lieu de regroupement de toutes les structures d'aide aux créateurs d'entreprise ; afin de faciliter l'accès de tous à l'information et au conseil elle sera implantée dans toutes les chambres consulaires de France ; ses fonctions intégreront l'accompagnement amont et aval du créateur : elle abritera un Comité Local des Partenaires de l'Entrepreneur (CLPE) ; sa mise en place et sa réussite supposent réunies des « conditions de succès » que nous étudierons.

A.- LA MAISON DE L'ENTREPRENEUR : PARTOUT EN FRANCE, AU SEIN DES CHAMBRES CONSULAIRES

L'égalité d'accès à l'information et au conseil doit être garantie par la constitution d'un réseau homogène, clairement identifié et aisément accessible.

C'est pourquoi, en dépit des critiques qui leur sont adressées et qu'on a rappelées, nous proposons de localiser les « Maisons de l'Entrepreneur » au sein de chacune des Chambres de Commerce et d'Industrie et des Chambres de Métiers de France.

Quelles sont les raisons de ce choix ?

1.- Les « Maisons de l'Entrepreneur » doivent être un lieu de services au créateur d'entreprise, un espace qui lui soit spécifiquement dédié et non un nouvel investissement immobilier aussi coûteux que les frais de fonctionnement qui lui seraient ensuite liés.

Force est de constater que les Chambres Consulaires disposent d'une présence effective sur l'ensemble du territoire et d'un patrimoine immobilier qui leur permettrait d'accueillir la « Maison de l'Entrepreneur » à moindre coût.

2.- Les Chambres Consulaires, et notamment les Chambres de Commerce, restent et de loin, en dépit des insatisfactions exprimées par les créateurs quant à la qualité du service rendu, la première destination naturelle du créateur potentiel.

3.- Il faut rappeler ici que les Chambres Consulaires exercent par délégation des missions de service public, financées en grande partie par des prélèvements obligatoires.

On peut donc considérer qu'un service public déficient doit être amendé et amélioré ; il serait surprenant et coûteux de vouloir l'écarter ou le doubler d'un dispositif parallèle qui serait inéluctablement financé pour l'essentiel sur fonds publics.

Nous proposons donc que les textes régissant les Chambres de Commerce et d'Industrie et les Chambres de Métiers comme les conventions qui les lient aux pouvoirs publics rendent obligatoire la mise à disposition de moyens humains et matériels au service des créateurs d'entreprise, clairement identifiables et regroupés sous le nom de « Maison de l'Entrepreneur ».

B.- LA MAISON DE L'ENTREPRENEUR : UNE MAISON OUVERTE À TOUS LES RÉSEAUX

Le créateur entrant dans une « Maison de l'Entrepreneur » doit être accueilli et orienté par du personnel qualifié, salarié des Chambres Consulaires.

Mais il doit aussi pouvoir disposer instantanément de toutes les informations sur les réseaux susceptibles de l'aider au sein du bassin de vie considéré et pouvoir entrer en contact avec eux de façon simple et rapide.

Aussi nous proposons que des structures d'aide aux créateurs et réseaux agréés puissent être logés au sein de la « Maison de l'Entrepreneur ».

Cet agrément pourrait être :

- national : quelques grands réseaux, reconnus pour leur compétence et leur expérience, obtiendraient le droit d'être accueillis, à leur demande (et donc sur une base volontaire et non obligatoire) au sein des « Maisons de l'Entrepreneur ». Le nombre de ces agréments nationaux serait nécessairement limité, l'objectif étant de favoriser leur complémentarité.

A ce jour, il nous semble que les quatre réseaux associatifs précédemment cités (Boutiques de Gestion, ADIE, FIR, Réseau Entreprendre) mériteraient cet agrément national.

On pourrait, après étude, y adjoindre un ou deux autres réseaux à vocation nationale.

- local : le Comité Local des Partenaires de l'Entrepreneur (CLPE) dont on préconisera plus loin la création au sein de la « Maison de l'Entrepreneur » pourrait aussi décider d'agréer des structures locales d'appui aux créateurs et leur donner un accès permanent à la Maison de l'Entrepreneur. Il existe en effet quantité d'initiatives (associations de développement local, clubs de chefs d'entreprise, structures d'aide au financement, etc.) qui, méritant d'être reconnues pour la qualité de travail, ne sont pas affiliées à des réseaux nationaux et ne peuvent donc que faire l'objet d'une appréciation territorialement exercée.

Les associations et structures agréées, nationalement ou localement, obtiendraient donc le droit de siéger au sein des Maisons de l'Entrepreneur, soit si elles le souhaitent et partout où cela est physiquement possible en disposant de bureaux mis à leur disposition gracieusement ou à des conditions particulièrement avantageuses par les Chambres, soit à tout le moins en y tenant régulièrement des permanences connues du public concerné.

On pourrait donc lever relativement facilement le premier obstacle du créateur : celui de la difficulté d'accès à l'information, au conseil et à l'accompagnement.

Au sein de la Maison de l'Entrepreneur, le créateur potentiel pourrait accéder aisément non seulement à l'appui des réseaux déjà cités, mais aussi de tous ceux qui viendraient s'y agréger : modules ou structures de formation, club locaux de chefs d'entreprise, réseaux de « parrains » (le parrainage par des salariés d'entreprises de créateurs doit être encouragé et systématisé), clubs « d'investisseurs providentiels » (ou « Business Angels ») actuellement en émergence en France, sociétés de « capital risque solidaire » mais aussi représentants des administrations et institutions sociales intervenant dans le champ de la création d'entreprise.

En un lieu unique, identifiable aisément partout sur le territoire français, le créateur accéderait aisément à tous les partenaires possibles de son acte de création.

On peut aussi attendre d'un tel regroupement qu'à la concurrence, voire à la rivalité locale entre réseaux, se substituent complémentarité et synergies, les liens humains qui se créeraient inéluctablement entre accompagnateurs facilitant les coopérations entre les structures et créant, pour leurs salariés, des passerelles susceptibles de faciliter la nécessaire mobilité et, peut-être, l'esquisse d'une « gestion de carrière ».

C.- LE LARGE SPECTRE DES FONCTIONS DE LA MAISON DE L'ENTREPRENEUR

1.- L'ACCUEIL ET L'ORIENTATION CONSTITUENT ÉVIDEMMENT LE SOCLE DE LA MAISON DE L'ENTREPRENEUR

Cette mission doit être assurée par des personnes qualifiées, de contact aisé, capables de discerner les attentes du créateur, répondre à ses premières questions puis l'orienter vers les accompagnateurs ou vers les réseaux , le guider dans sa première approche documentaire.

La Maison de l'Entrepreneur doit pouvoir disposer d'outils adaptés. C'est notamment la mission de l'APCE dont, par exemple, le site Internet doit être encore étoffé et adapté à une utilisation locale performante.

Les Maisons de l'Entrepreneur pourraient, à leur grand profit, s'inspirer (en les adaptant bien sûr à leur taille et à leurs moyens) du bel exemple du centre d'information des entrepreneurs de Montréal.

UN EXEMPLE DE CENTRE D'INFORMATION OUVERT
À TOUS LES ENTREPRENEURS :
LE CENTRE « INFO ENTREPRENEURS » DE MONTRÉAL

Le centre « Info entrepreneurs » a été créé en vue de permettre aux PME du Québec d'avoir facilement accès à l'information sur les programmes et services gouvernementaux qui les concernent. Il fait partie du réseau des Centres de services aux entreprises du Canada qui compte actuellement au moins un bureau dans chaque province et territoire.

L'objectif d'un accès simplifié à l'information a été décliné en une double priorité : l'information fournie doit être exhaustive et transmise rapidement aux porteurs de projet et aux entrepreneurs, que les Québécois regroupent au sein de la catégorie des « gens d'affaires ». Dans ce but, les informations recueillies par le centre sont mises à la disposition des entrepreneurs sur différents supports : médias électroniques, télécopieurs, assistance téléphonique... Le principe est qu'une réponse aux questions posées par l'intermédiaire de boîtes vocales, télécopieurs ou autres supports doit être fournie dans un délai maximal d'un jour ouvrable.

Cette action est complétée par la gestion d'un centre de documentation auquel tout créateur a accès et dans lequel il peut être aidé dans ses démarches en sollicitant un agent de recherche. Ce centre dispose de terminaux permettant au créateur d'effectuer ses recherches dans les banques de données électroniques, les CD-ROM appartenant au centre et sur Internet.

Info entrepreneurs met également à la disposition des « gens d'affaires », un centre de consultation qui leur permet de rencontrer un conseiller pour obtenir une explication plus personnalisée et détaillée sur les programmes et services auxquels ils peuvent prétendre.

Une autre initiative originale réside dans le système « Info-fax » qui permet aux « gens d'affaires » d'obtenir par télécopieur, la plupart des renseignements sur les programmes mis en place en faveur des entreprises. Ce système est entièrement automatisé et fonctionne 24 heures sur 24 : le créateur peut ainsi téléphoner et commander à tout moment les informations dont il a besoin.

L'exemple du centre « Info entrepreneurs » témoigne de la nécessité de veiller à un accès simple et rapide à l'information pour les porteurs de projet et, plus généralement, pour tous les entrepreneurs. Il constitue une piste intéressante de réflexion sur ce qui pourrait être mis à disposition des créateurs d'entreprises lors de leur premier accueil dans une structure d'appui.

2.- L'ACCOMPAGNEMENT AMONT, OU L'AIDE AU MONTAGE DE PROJETS

Il s'agit là d'aider le créateur à franchir toutes les étapes qui séparent son projet de départ, le plus souvent imprécis, d'un projet mûr, prêt à être lancé, à l'aider dans l'élaboration de son « plan d'affaires » (pour ne plus dire « business plan », comme nous y invitent les Québécois).

Cette fonction doit être exercée par des femmes et des hommes généralistes, diplômés de l'enseignement supérieur ou ayant acquis par eux-mêmes une solide formation aux fonctions et techniques essentielles du management, disposant d'une expérience préalable en entreprise et actualisant leurs compétences à la fois par une formation continue et des immersions courtes mais régulières dans des entreprises appartenant à différents secteurs d'activité économique.

Le « portrait-robot » de l'accompagnateur idéal ne correspond guère à celui que le créateur peut aujourd'hui rencontrer dans les structures supposées lui apporter un appui qualifié.

On trouvera parfois ce profil dans des réseaux associatifs où de jeunes diplômés à la fibre « militante » assurent avec talent et engagement personnel fort un service difficile.

Force est de constater qu'il est plus rare au sein des Chambres Consulaires, sans qu'il faille incriminer leur personnel. La gestion des ressources humaines consulaires mériterait une profonde réorientation. Suggérons, à ce stade, deux pistes de réflexion dans ce domaine :

1.- L'accompagnement du créateur est un métier difficile et « usant » du fait de l'engagement qu'il requiert en faveur du porteur de projet. Nul ne devrait s'y adonner plus d'une dizaine d'années. Ce qui pose clairement le problème de la gestion de carrière de l'accompagnateur.

2.- La sortie du dispositif d'appui au créateur par un accompagnateur devrait, en l'absence d'opportunités internes au sein des chambres consulaires ou des réseaux, être orientée vers l'entreprise. Les « immersions » en entreprise proposées plus haut devraient faire accéder leurs bénéficiaires à des contacts et des opportunités de carrière. On devrait, aussi, ne serait-ce que pour des raisons symboliques, encourager par une incitation financière appropriée, la création d'entreprises par des accompagnateurs, en leur permettant, au bout de quelques années soit de bâtir leur propre projet, soit même de partir pour s'associer avec l'un des créateurs rencontrés dans le cadre de ses fonctions.

Nous pourrions, enfin, pour ce qui relève de cette fonction d'accompagnement nous inspirer de la méthodologie des « SBDC » américains.

UNE APPROCHE FONDÉE SUR LES INTERACTIONS LOCALES :
LES SMALL BUSINESS DEVELOPMENT CENTER (SBDC)
AUX ÉTATS-UNIS

Contrairement à une idée répandue, les autorités américaines soutiennent de manière importante les petites et moyennes entreprises, grâce à des programmes d'aide au financement mais aussi de conseils et d'assistance technique que gère la légendaire Small Business Administration (SBA).

Parmi les nombreux programmes mis en place, votre Rapporteur s'est intéressé au Small Business Development Center Program dont l'objectif est d'apporter une assistance technique aux petits porteurs de projet ainsi qu'aux entrepreneurs qui, bien que développant une activité, ne peuvent s'offrir les services d'un consultant privé.

Ce programme a permis le développement des Small Business Development Center (SBDC), centres d'assistance de gestion pour les PME, dont la mise en place résulte d'une coopération entre le secteur privé, le milieu universitaire et les autorités fédérales et locales. Chaque État dispose d'au moins un centre, géré par une organisation locale sous la tutelle de la Small Business Administration (SBA), dont l'action est relayée par des centres satellites au sein de l'État. Il existe ainsi 57 centres et 950 points de relais qui accueillent les porteurs de projets et leur proposent des conseils sur les problèmes techniques, financiers ou d'organisation ainsi qu'une aide pour la réalisation d'études de faisabilité ou la participation à des appels d'offres. Les SBDC sont financés à hauteur de 51 % au plus par la SBA, une contribution équivalente devant être recherchée auprès de partenaires locaux.

Votre Rapporteur a eu l'opportunité de rencontrer le responsable du SBDC de Washington ainsi qu'un agent chargé de l'accueil. Il a pu ainsi apprécier la qualité du recrutement du personnel de ces centres, qui proviennent d'associations professionnelles ou de commerce, du secteur bancaire, des chambres de commerce ou encore de l'université.

Il a également constaté la très grande attention portée à la formation du personnel d'accueil qui se caractérise par son professionnalisme. Il faut ajouter qu'en cas de besoin d'expertise spécifique, les chargés d'accueil peuvent avoir recours à des consultants spécialisés dont la rémunération est financée dans le cadre du programme.

Au total, la SBA soutient un million d'entreprises par an, par l'intermédiaire de ses centres et programmes de formation et d'assistance à l'entrepreneuriat, parmi lesquels figurent les SBDC. Votre Rapporteur note avec intérêt que, malgré les restrictions budgétaires qui ont affecté la SBA au cours de ces dernières années, l'objectif est de parvenir, d'ici 2002, à 1,5 million d'entreprises par an.

3.- LE SUIVI OU L'ACCOMPAGNEMENT AVAL

Bien que certains dispositifs publics (EDEN par exemple) ou privés (« parrainages » mis en place par des fondations d'entreprises) l'aient rendu obligatoire ou expérimenté dans quelques cas limités, « l'accompagnement aval » ou le « suivi post-création » demeure l'une des grandes faiblesses de notre système d'accompagnement.

La mise en place d'une vraie fonction d'aide et de suivi du créateur devrait donc être l'un des axes majeurs de la création de Maisons de l'Entrepreneur.

Là encore, la fonction suppose la mise à disposition de personnels qualifiés.

Le profit de « l'accompagnateur aval » se distingue de celui de « l'accompagnateur amont » par sa spécialisation. Une fois son entreprise lancée, le créateur n'a plus besoin d'être soutenu par des généralistes, mais par des spécialistes de domaines précis de la gestion de l'entreprise (commercial, marketing, ressources humaines, etc).

Il ne s'agit évidemment pas de recréer une structure de conseil interne aux Maisons de l'entrepreneur ni de chercher à éviter le recours aux professionnels spécialisés que sont les avocats, les experts-comptables etc.

Il s'agit au contraire, de créer un « premier rideau » d'accompagnateurs spécialisés susceptibles d'orienter ensuite le créateur vers des consultants professionnels exerçant en profession libérale.

Un exemple de ce type, qui paraît donner toute satisfaction aux créateurs, a été mis en _uvre dans la province du Québec.

UNE APPROCHE PROFESSIONNELLE DU CONSEIL AU CRÉATEUR :
LES SERVICES D'AIDE AUX JEUNES ENTREPRENEURS (SAJE) AU QUÉBEC

Les services d'aides aux jeunes entrepreneurs (SAJE) ont été créés au Québec en 1985 dans le but d'aider les jeunes entrepreneurs, de 18 à 35 ans, à créer leur entreprise et assurer sa pérennité.

Constatant un besoin d'aide à la gestion, trois SAJE sur l'île de Montréal ont décidé la mise en place d'un centre de suivi destiné à assister les entreprises en phase de démarrage grâce au transfert de connaissances et d'outils nécessaires à une gestion efficace.

L'action de ce centre repose sur des consultations gratuites réalisées par des conseillers spécialisés dont l'objectif est de permettre au nouvel entrepreneur de prendre en compte tous les aspects de la gestion d'entreprise (comptabilité, gestion des ressources humaines, marketing...). Ces conseillers, dont la moyenne d'âge est relativement jeune, ont bénéficié d'une formation universitaire à laquelle s'ajoute une expérience dans une entreprise privée. Une formation complémentaire leur est par ailleurs dispensée en interne ou à l'extérieur, selon les cas. Leur mobilité est fortement encouragée au bout d'environ cinq années de conseil par le biais de formations dans certains domaines comme le multimédia ou l'international. En outre, leur rémunération est assurée à un niveau adapté à leurs compétences, grâce à la contribution de sources extérieures de financement.

Leur action est clairement distincte de celle des conseillers qui interviennent avant la création, même si un dialogue s'instaure en vue d'assurer un meilleur suivi de la réalisation du plan d'affaires. Alors que les conseillers qui interviennent au moment de la phase de démarrage ont aussi un rôle de contrôle lié au financement accordé, ceux qui proposent un suivi, le font sur demande des entrepreneurs. Ces derniers apprécient l'approche concrète de leurs difficultés qu'ont ces conseillers qui offrent leurs services, directement dans l'entreprise.

Cette expérience montre l'intérêt que présente la distinction entre l'aide au montage de projet, d'une part, et le suivi post-création, d'autre part. Ces deux types de conseil requièrent en effet des approches différentes : généraliste dans le premier cas et plus spécialisée dans le second, même si une certaine polyvalence est toujours nécessaire.

L'exemple des SAJE constitue une bonne illustration du professionnalisme qui est nécessaire en matière d'aide à la création d'entreprise ainsi que de la réflexion que ce type d'intervention doit susciter afin d'être la plus efficace possible.

D.- LA CONSTITUTION DU COMITÉ LOCAL DES PARTENAIRES DE L'ENTREPRENEUR

Nous préconisons la constitution, au sein de chacune des « Maisons de l'Entrepreneur » d'un « Comité Local des Partenaires de l'Entrepreneur »(CLPE).

Composé d'un nombre restreint de membres, (par hypothèse pas plus de 9 car l'expérience prouve qu'au-delà il est très difficile pour ce type de comité d'être efficace et de ses sentir pleinement responsable) représentant pour un tiers l'État (Trésorier payeur général, Direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, etc) pour un tiers les chefs d'entreprises locaux et pour un dernier tiers les structures et réseaux sis au sein de la Maison de l'Entrepreneur, le CLPE aurait notamment pour mission :

- de valider les projets portés par des salariés souhaitant démissionner pour créer leur entreprise et susceptibles de bénéficier de l'assurance - chômage dans un cadre décrit plus loin, (chapitre II, 2ème partie) ;

- de permettre l'octroi de subventions ou de prêts d'honneur dans le cadre de nouveaux dispositifs publics (voir chapitre II, 3ème partie) ;

- de veiller à la coordination de tous les acteurs locaux de la création d'entreprise ;

- de permettre l'auto-évaluation permanente de la « Maison de l'Entrepreneur » et de son efficacité.

E.- LES CONDITIONS DE LA RÉUSSITE DES MAISONS
DE L'ENTREPRENEUR

La mise en place des maisons de l'entrepreneur suppose, au préalable, une connaissance précise des moyens humains et du patrimoine immobilier des chambres ainsi qu'une définition des modalités de leur participation au dispositif d'aide à la création d'entreprises.

1.- La nécessité d'un audit sur les moyens des chambres pouvant être mis au service de la création d'entreprise

L'utilisation des moyens humains et immobiliers des chambres en faveur de la création d'entreprise doit s'appuyer sur un état des lieux précis. C'est pourquoi, nous préconisons la réalisation d'un audit approfondi de leurs ressources humaines et de leur parc immobilier. Cet audit devrait également comprendre une évaluation des expériences existantes de regroupement des structures d'appui dans un même espace afin de mieux apprécier les conditions de réussite d'une mise en commun des moyens en faveur de la création d'entreprise.

2.- Le principe d'une contractualisation entre l'État et les chambres de commerce et d'industrie

Le souci de l'efficacité de la mobilisation de l'institution consulaire en faveur de la création d'entreprises et d'une utilisation rationnelle des deniers publics, rend indispensable la conclusion de conventions entre l'État et les Chambres pour définir précisément les objectifs poursuivis dans le domaine de la création d'entreprises.

Cette suggestion rejoint une préoccupation, plus générale, exprimée dans le rapport de l'IGF afin « d'éviter que des initiatives intempestives des CCI, dans des domaines de compétences qu'elles partagent désormais largement avec les collectivités locales et d'autres organismes parapublics, aboutissent à un gaspillage d'argent public ».

Elle s'inscrit, en outre, dans la logique d'une des principales propositions formulées dans ce rapport qui est de modifier le mécanisme de financement des chambres en réservant le produit de l'impôt additionnel à la taxe professionnelle (21) « au financement des actions conventionnées par le préfet de région ».

3.- Une définition concertée des interventions de chaque acteur au sein des Maisons de l'entrepreneur

Plusieurs pistes ont été évoquées qui devront être examinées, de manière concertée, par les réseaux d'appui et l'institution consulaire afin d'en définir plus précisément le contenu.

L'organisation d'une table ronde apparaît donc souhaitable afin de réfléchir sur ces différentes pistes, en particulier, l'élaboration d'une charte du premier accueil, la composition et l'animation du comité local des partenaires de l'entrepreneur, le coût de fonctionnement et le mode de financement des structures d'aide aux créateurs ou encore l'effort de formation du personnel chargé de l'accueil des porteurs de projets.

Sans préjuger des résultats de cet audit et de cette concertation, il est certain que le renforcement et la professionnalisation de l'accompagnement de la création d'entreprise devra se traduire par le recrutement de personnes qualifiées.

Rappelons, pour mémoire, qu'en 1996 M. Philippe Mathot, député, dans un rapport remis à M. Alain Juppé, Premier Ministre, préconisait le recrutement de 5000 consultants afin de donner aux réseaux d'appui de véritables moyens d'accompagnement des créateurs et éviter ainsi les phénomènes d'encombrement.

La question du financement des partenaires de la création d'entreprises devra être abordée sans détours.

Avançons, à ce stade, comme hypothèse de travail que l'État doit d'abord favoriser l'accès au financement des créateurs, (voir chapitre II, 3ème partie), l'accompagnement centré sur la Maison de l'Entrepreneur relevant davantage de ressources locales (collectivités, entreprises, etc.) et des Chambres Consulaires dans le cadre d'un conventionnement avec l'État, évoqué précédemment.

Pour parachever cette réflexion sur la cohérence du dispositif d'accueil de l'aide aux créateurs, la mise en place d'une procédure d'évaluation régulière s'impose.

A l'heure actuelle, la connaissance de l'univers de la création d'entreprises repose sur le travail de l'Agence pour la création d'entreprises (APCE).

Son rôle est présenté dans les termes suivants par la commission « Accompagnement des créateurs » du CNCE : « L'ex ANCE, l'APCE, a été repositionnée par les pouvoirs publics et a donc abandonné certaines de ses missions opérationnelles afin de développer son observatoire de la création d'entreprises en France, d'élaborer des produits multimédias accessibles aux opérateurs et aux porteurs d'idées et de projets, de promouvoir la création dans toutes les strates de la société française, d'être un creuset d'idées, de produits et de méthodes pour l'État et un centre de ressources pour tous les professionnels de la création et de la reprise d'entreprises, ainsi que pour les créateurs eux-mêmes ».

La mission de l'APCE devra être adaptée en tenant compte de la naissance d'un réseau de Maisons de l'Entrepreneur.

A cet égard, l'exemple de la Small Business Administration est riche d'enseignements. Cet organisme a, en effet, institué une procédure d'évaluation extrêmement rigoureuse des différents programmes qu'elle met en _uvre. Cette procédure permet d'apprécier l'efficacité de chaque action grâce à un bilan coûts / avantages minutieux, réalisé à intervalles réguliers. Les résultats de ces évaluations sont ensuite transmis aux membres du Congrès qui peuvent ainsi réagir très rapidement et proposer des adaptations à ces programmes.

Il est possible de s'inspirer de cette expérience en chargeant l'APCE d'une mission d'évaluation de l'action de différents réseaux d'appui aux créateurs et de l'impact des systèmes d'aides. Cette orientation est, d'ailleurs, prévue dans le cadre du dispositif EDEN, mis en place à titre expérimental.

Prolonger cette mission suppose toutefois que l'APCE dispose de moyens plus importants. Depuis sa réorganisation en 1996, l'Agence fonctionne grâce à une subvention du Ministère chargé de l'Industrie, d'un montant de 19,1 millions de francs, des ressources propres constituées par les ventes d'ouvrages et des prestations de formation et d'ingénierie et des recettes spécifiques allouées pour des opérations déterminées. Ces moyens sont insuffisants pour réaliser un travail d'évaluation, qui nécessite, de surcroît, une présence dans chaque région. L'APCE doit, en effet, pouvoir aider les réseaux d'appui aux créateurs à coordonner leurs actions dans un souci de cohérence et d'efficacité.

Nous préconisons de doter l'APCE de moyens humains et financiers supplémentaires destinés à lui permettre d'assurer le rôle d'une instance d'évaluation du dispositif d'ensemble d'aide à la création d'entreprise.

F.- DES RAISONS D'ESPÉRER...

La simplification, le regroupement et la coopération entre les principales structures d'appui apparaissent aux créateurs comme une nécessité absolue.

Des auditions réalisées dans le cadre de ce rapport, votre Rapporteur a eu le sentiment que les principaux responsables de ces réseaux étaient conscients de la nécessité d'harmoniser et rendre plus lisibles leurs actions.

L'Assemblée Permanente des Chambres de Métiers estimant que « Comme les entreprises privées s'orientent massivement vers le client, l'ensemble des opérateurs publics, semi-publics, associatifs ... doivent s'orienter franchement vers le créateur d'entreprise » et le Président de l'Assemblée des Chambres Françaises de Commerce et d'Industrie (AFCI) ayant déclaré : « Nous sommes fortement engagés dans ce réseau, dans l'intérêt de la création de l'entreprise. Nous souhaitons être un acteur engagé aux côtés des autres. Notre pays souffre d'un manque de mise en réseau de l'ensemble des acteurs. (...) Nous avons des moyens, nous avons des hommes et avons ensemble l'unique projet de faire prospérer la création de l'entreprise » (22).

Rien ne devrait s'opposer à ce que s'engage rapidement la nécessaire concertation.

II.- LE CRÉATEUR D'ENTREPRISE DOIT BÉNÉFICIER D'UN STATUT LUI OFFRANT UN MINIMUM DE SÉCURITÉ

Faut-il ajouter le risque au risque ?

Au risque inhérent à l'acte de création d'entreprise faut-il ajouter celui de se voir dépossédé de ses droits fondamentaux, l'assurance chômage en particulier ?

Parce que le créateur est potentiellement porteur de richesses, pour lui-même comme pour la collectivité, notre système de couverture sociale doit être adapté afin d'encourager le risque maîtrisé, le « partage du risque » évoqué précédemment entre l'entrepreneur et la collectivité.

Certes, des dispositions existent pour faciliter le passage du statut de salarié à celui d'entrepreneur ; ainsi, par exemple, le congé pour création d'entreprise. Mais elles sont peu utilisées, à l'instar de ce congé, peu adapté aux préoccupations et à la situation de l'entrepreneur, qui perd tout revenu, et de l'entreprise, contrainte de remplacer le salarié pendant son absence... au risque de ne plus savoir l'utiliser à son retour.

Notre système de couverture sociale doit principalement se fixer pour objectif d'assurer à l'entrepreneur une sécurité minimale au moment où il est le plus vulnérable.

Les principales mesures proposées devraient permettre :

_ d'autoriser pendant 6 mois après le démarrage de l'entreprise, le cumul des revenus avec le maintien de l'allocation unique dégressive (AUD) ;

_ d'admettre la légitimité de la démission pour création d'entreprise, ouvrant droit à l'assurance chômage ;

_ d'offrir à tous les créateurs une protection sociale en cas d'échec du projet ;

_ d'alléger et rendre plus progressif le paiement des charges au début de l'activité.

On notera avec plaisir l'évolution des partenaires sociaux sur ces sujets ; elle devrait favoriser la création, si possible rapide, d'un cadre social adapté pour les entrepreneurs.

A.- ATTÉNUER LA VULNÉRABILITÉ DU CRÉATEUR AU COURS DES DIFFÉRENTES PHASES DE DÉVELOPPEMENT DE LA NOUVELLE ENTREPRISE

Le créateur d'entreprise se trouve dans une situation particulièrement incertaine et souvent précaire au moment du démarrage de son activité, mais aussi, en cas d'échec de son entreprise. L'incertitude est d'autant plus grande que le bénéfice qu'il peut attendre de certaines prestations, notamment de l'assurance chômage, dépend étroitement de son statut antérieur. A cet égard, il existe une inégalité de traitement assez surprenante selon que le nouvel entrepreneur a été auparavant salarié ou chômeur, ce qui conduit à des situations où le risque est parfois maximal.

Il importe donc de réfléchir à la possibilité d'instaurer une couverture minimale pour le créateur aux différents stades de développement de son entreprise, en prenant en compte les prestations auxquelles il peut prétendre en fonction du statut qui était le sien avant le démarrage de l'entreprise.

1.- AU MOMENT DE LA PRÉPARATION DU PROJET

La phase de préparation du projet de création est une étape essentielle du processus qui doit aboutir à la naissance d'une entreprise nouvelle. C'est au cours de cette période que le porteur de projet étudie les conditions de viabilité économique de son projet et mesure les implications de la concrétisation de son idée sur sa situation personnelle. Cette phase mérite une attention particulière dans la mesure où elle conditionne en grande partie la réussite de l'entreprise.

Un rapport rédigé par le cabinet Arthur Andersen (23) suggère un accompagnement du créateur pendant cette phase de préparation, d'une part, en offrant un réel statut au demandeur d'emploi qui élabore un projet qui le dispense de justifier des actes positifs de recherche d'emploi et lui permette de bénéficier du soutien d'un organisme ; d'autre part, en autorisant le porteur de projet à prospecter légalement sa clientèle et son marché avant le démarrage effectif de son activité.

Une autre suggestion, formulée par l'Inspection générale des Affaires sociales (24) repose sur l'extension du dispositif des chèques-conseil.

Ce dispositif, dont l'accès est réservé aux bénéficiaires de l'ACCRE, permet aux créateurs éligibles de bénéficier de trois chéquiers de six chèques chacun dont l'État prend en charge 75 % de la valeur faciale (100 % pour le premier chéquier attribué aux allocataires du RMI et autres personnes particulièrement défavorisées). Deux de ces chéquiers peuvent être utilisés en amont de la demande d'aide et servir aussi bien à l'élaboration technique du projet d'entreprise et à une première prospection commerciale qu'au montage du dossier.

Malgré leur intérêt, l'usage des chèques-conseil reste limité et ne touche pas ceux qui en auraient le plus besoin. C'est pourquoi, l'IGAS suggère une série d'améliorations du dispositif visant à étendre la gratuité du premier chèque conseil à tous les candidats éligibles à l'ACCRE, ce qui bénéficierait principalement aux chômeurs indemnisés. Il est également proposé de réduire la participation financière personnelle pour l'acquisition des chéquiers non gratuits (ramener le taux de participation de 25 % à 10 % soit 240 francs par chéquier au lieu de 600 francs actuellement) et de prévoir l'attribution d'une autre chéquier gratuit mais strictement réservé aux seuls soutiens d'ordre technique ou commercial trop souvent négligés. L'objectif est d'encourager le créateur dans la recherche de conseils sur le montage de son projet en lui offrant une aide financière incitatrice.

Cette piste de réflexion paraît d'autant plus intéressante que le dispositif actuel a fait ses preuves et que des crédits non négligeables sont disponibles dès à présent.

2.- SÉCURISER LE CRÉATEUR AU MOMENT DU DÉMARRAGE DE L'ENTREPRISE

Une attention plus spécifiquement consacrée à la situation personnelle du créateur doit être apportée au moment du démarrage de son entreprise. Le nouvel entrepreneur prend certes un risque qu'il a lui-même choisi. Pour autant, il est normal qu'il puisse disposer d'un minimum de ressources que ne peut généralement pas lui procurer une activité débutante.

Au Québec, votre Rapporteur a eu connaissance d'un programme, intitulé « Soutien au travailleur autonome » (STA), réservé aux sans-emplois sans condition d'âge, qui leur permet de bénéficier d'un prolongement, pendant une durée d'un an, de leur prestation chômage. Les chômeurs disposent ainsi d'un salaire d'environ 250 dollars canadiens par semaine pendant la période de démarrage de leur entreprise.

Un mécanisme similaire existe en Australie où, depuis 1987, le chômeur créateur d'entreprise bénéficie du maintien de ses allocations chômage pendant les premiers mois de son activité.

Ces exemples montrent l'intérêt que pourrait présenter un dispositif qui apporte au créateur une relative sécurité pendant la phase de transition au cours de laquelle il passe d'un statut à un autre.

a) Le droit existant

En matière de droit social, le changement de condition du porteur de projet prend effet à partir du moment où ce dernier a procédé à son immatriculation au registre du commerce et des sociétés, au répertoire des métiers ou auprès de l'URSSAF pour les professions libérales. Les aides auxquelles il a droit varient dès lors en fonction de la situation qui était la sienne avant cette date, ce qui conduit à des situations assez inégales et parfois décourageantes pour la personne qui a travaillé à élaborer un projet d'entreprise.

A titre d'illustration, une personne titulaire du RMI est autorisée, depuis la loi du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions, à cumuler ses allocations avec les revenus qu'elle perçoit de l'activité qu'elle vient de créer jusqu'à la date de la première révision trimestrielle suivant le démarrage de l'activité professionnelle. Un abattement de 50 % est ensuite applicable pendant une durée d'un an. Les bénéficiaires de l'ACCRE bénéficient d'un régime similaire avec un délai plus favorable puisque le cumul est autorisé jusqu'à la date de la deuxième révision trimestrielle.

S'agissant du chômeur indemnisé, il peut préparer son projet en percevant ses allocations, sa démarche étant considérée comme un acte positif de recherche d'emploi. Une fois son entreprise créée, le versement des allocations est en principe interrompu. Toutefois, le cumul peut être autorisé par la commission paritaire des ASSEDIC, qui examine les demandes au cas par cas.

Le droit existant est encore moins favorable pour le salarié qui a démissionné en vue de créer sa propre entreprise. Ce dernier est, certes, autorisé à préparer son projet pendant la période de préavis à condition qu'il n'empiète pas sur ses horaires de travail et ne cause pas de préjudice à son employeur. Mais, il ne peut prétendre à une indemnité de chômage dans la mesure où il a quitté volontairement sa dernière activité professionnelle. Il devra compter sur ses seules économies pendant la période de démarrage de son entreprise. Il pourra éventuellement être indemnisé à l'issue d'un délai de 4 mois s'il a déposé une demande d'allocation chômage avant la création de l'entreprise (ce qui n'est a priori pas ce qu'il songera à faire s'il décide de monter une entreprise) et si la commission paritaire de l'ASSEDIC a statué favorablement sur son cas.

Ces différences de situations témoignent de la fragilité du créateur au cours de la phase de démarrage de son entreprise. Or, comme le note justement l'APCE dans ses propositions sociales, « si la création d'une entreprise constitue un acte risqué par nature, elle ne doit pas devenir dangereuse pour un salarié prêt à abandonner un emploi stable ».

Dans le même ordre d'idées, l'IGAS relève, dans un rapport précité, que si « les lacunes du système de protection sociale ne sont pas considérées comme un obstacle explicite à la création d'entreprise (...) un aménagement du système actuel peut devenir un facteur incitatif s'il permet, sinon de lever, à tout le moins de réduire certains des obstacles identifiés à la création. Ainsi, l'adaptation de la protection sociale pourrait permettre d'offrir au créateur une sorte de droit au test et de lui attribuer une aide financière capitalisée ».

S'agissant de l'idée d'un « droit au test », il convient de signaler une initiative intéressante : la mise en place de « couveuses ». Les couveuses sont des structures qui cherchent à réduire la prise de risque des créateurs, prioritairement jeunes et demandeurs d'emploi, tout particulièrement au moment du démarrage de l'activité. Leur objectif est d'optimiser les chances de réussite du projet en offrant au créateur un temps d'apprentissage du « métier » d'entrepreneur et en lui permettant de tester la viabilité commerciale de son projet. Un groupe de travail (25) a été mis en place afin d'évaluer le fonctionnement de ces structures, de faire connaître leur expérience et de proposer des mesures destinées à améliorer le statut du créateur qui entre dans une « couveuse ».

Cette initiative répond au souci d'atténuer la vulnérabilité du créateur dans les premiers temps de fonctionnement de son entreprise. Le rapport de l'IGAS suggère d'encourager le développement de cette expérience en prévoyant le maintien de l'allocation unique dégressive (AUD) et l'extension des conventions de coopération aux créateurs qui entrent dans une « couveuse ». Cette suggestion rejoint les pistes envisagées pour sécuriser davantage le salarié démissionnaire et le chômeur qui décident de monter une entreprise.

b) Les améliorations envisageables

Les améliorations qui pourraient être apportées reposent sur l'idée d'assurer un revenu social minimal au nouvel entrepreneur pendant la phase de démarrage de son activité. Il importe que cette sécurité soit apportée à la catégorie de créateur qui en est actuellement totalement dépourvue, à savoir celle des salariés qui démissionnent pour créer une entreprise, qui représente environ 10.000 personnes chaque année (26), mais aussi aux chômeurs.

· Situation du chômeur indemnisé

Dans cette perspective, une piste fréquemment évoquée est le maintien, pendant la période de démarrage, du versement de l'allocation unique dégressive (AUD) au créateur d'entreprise dans la limite des droits ouverts. Ce maintien, déclenché par l'inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers, serait limité à une période déterminée, 6 mois, par exemple. L'IGAS suggère de geler la dégressivité des allocations pendant cette période, sous réserve de prendre en compte cette durée dans la détermination du niveau du reliquat de droits en cas d'échec.

Cette proposition s'inspire du dispositif instauré par la loi du 29 juillet 1998, relative à la lutte contre les exclusions, qui autorise le maintien du versement de minima sociaux au-delà de la date d'inscription au registre du commerce ou au répertoire des métiers.

Une autre piste vise à étendre le bénéfice des conventions de coopération aux créateurs-employeurs sous forme d'une aide en capital dans la limite des droits ouverts.

Les conventions de coopération, mises en place en 1994, permettent à une entreprise qui embauche un chômeur de longue durée (c'est-à-dire indemnisé depuis au moins 8 mois) de percevoir une aide équivalente aux allocations auxquelles il pouvait encore prétendre. Ce dispositif est actuellement suspendu, mais il pourrait être réactivé en le réservant exclusivement aux créateurs d'entreprise, sous réserve d'une vérification préalable du sérieux de leur projet et, éventuellement d'un accompagnement par une structure d'appui. L'aide octroyée consisterait, dans ce schéma, à verser au créateur les sommes équivalent au montant de son allocation-chômage mensuelle pendant 12 mois, dans la limite des droits ouverts. Là encore, la dégressivité de l'allocation serait gelée. Ce dispositif ne serait, toutefois, pas cumulable avec le précédent.

Dans ces deux cas, il importe que le sérieux du projet de création ait au préalable été validé par le Comité Local des Partenaires de l'Entrepreneur, pour pouvoir prétendre à un maintien de l'allocation.

· Situation du salarié qui démissionne pour créer une entreprise

Un dispositif de même nature serait vivement souhaitable pour le salarié qui démissionne, en vue de créer une entreprise.

Cet aménagement suppose que le cas de démission pour création d'entreprise soit considéré comme un motif légitime de démission, ouvrant droit aux ASSEDIC. Un tel aménagement constitue un changement important en matière de droit social et nécessite un encadrement assez strict. C'est pourquoi, une procédure de validation du projet du salarié par le Comité Local des Partenaires de l'Entrepreneur chargé d'apprécier le bien-fondé de la demande, s'impose à nouveau.

Une fois le sérieux du projet de création admis, le salarié démissionnaire pourrait prétendre aux mêmes droits que le chômeur-créateur, c'est-à-dire au maintien, pendant 6 mois, du versement de l'AUD, dans la limite des droits ouverts.

Ces suggestions semblent recueillir un certain consensus de la part de chaque interlocuteur concerné, notamment des partenaires sociaux.

Certes, une réticence de ces derniers a pu se manifester à certaines occasions, comme en témoigne l'échec des négociations sur ce point en 1996. Toutefois, cette attitude ne semble plus être de mise actuellement. Auditionné par votre Rapporteur, le Président de l'UNEDIC, M. Denis Gautier-Sauvagnac, s'exprimant à titre personnel, a en effet déclaré être favorable aux mesures destinées à reconnaître certains droits, dans des conditions à déterminer (validité du projet, etc.) au chômeur qui crée sa propre entreprise ou au salarié qui démissionne pour la même raison. Une procédure type convention de coopération pourrait s'appliquer au cas de ces créateurs.

Ces propos, qui rejoignent des préoccupations auxquelles M. Michel Jalmain, Secrétaire de l'UNEDIC, s'était publiquement déclaré réceptif au nom de la CFDT, sont encourageants et devraient susciter une négociation en vue d'aboutir le plus rapidement possible. L'adoption de ces mesures constituerait en effet un signal fort en confortant l'effort de promotion de l'esprit d'entreprise.

Là encore, de nombreuses autres mesures pourraient être évoquées. Citons, par exemple, le cas du salarié qui démissionne dans le cadre d'une procédure d'essaimage, pour créer une nouvelle entreprise. Ces différentes situations montrent que nous sommes encore loin d'un « statut de l'entrepreneur » dont l'instauration permettrait sans doute d'envisager l'aventure de la création d'entreprise de manière plus sereine.

3.- EN CAS D'ÉCHEC DE L'ENTREPRISE

Si le nouvel entrepreneur se trouve dans une situation de vulnérabilité au moment du démarrage de son activité, il l'est bien davantage en cas d'échec de son entreprise. Là encore, la situation sociale de l'entrepreneur varie en fonction de celle qui était la sienne avant la naissance de l'entreprise.

a) Remédier à une trop grande variété de situations au regard de l'assurance chômage

En cas d'échec, l'entrepreneur qui a été demandeur d'emploi peut se réinscrire au chômage pendant une période démarrant à la date d'ouverture de ses droits et égale à la durée des droits ouverts augmentée de trois ans : il retrouve alors le solde de ses droits.

En revanche, le salarié qui a créé son entreprise après avoir démissionné ne pourra être indemnisé par les ASSEDIC, à moins d'avoir fait l'objet d'une décision favorable de la commission paritaire avant la création de son entreprise, ce qui suppose qu'il ait déposé un dossier à ce moment là. Or, peu d'entrepreneurs, dans ce cas, sont informés de la nécessité de ce dépôt, ce qui limite la portée de cette sécurité.

Dans le même esprit que précédemment, une proposition rassemble un certain consensus : il s'agit, en cas d'échec du projet, d'ouvrir aux démissionnaires les droits à l'allocation unique dégressive, acquis antérieurement à la création. Dans cette hypothèse, l'indemnisation est réputée avoir eu lieu avant la naissance de l'entreprise, ce qui autorise l'entrepreneur à accéder au mécanisme de reprise des droits s'il dispose d'un reliquat. L'IGAS suggère d'encadrer cette possibilité en prévoyant une condition de durée minimale de l'activité prévue de l'ordre de six mois.

Il s'agit, en définitive, de neutraliser la période non salariée dans le calcul des délais de forclusion, ce qui pourrait également bénéficier aux salariés licenciés, qui se sont lancés dans la création d'une entreprise.

b) La question du patrimoine d'affectation

En cas d'échec, l'entrepreneur est également confronté à la question des garanties qui ont été prises au moment de l'octroi de son prêt. Ces garanties portent en effet sur le patrimoine de l'entreprise que rien ne distingue de celui de l'entrepreneur, dans le cas le plus répandu qui est celui de l'entreprise individuelle.

La loi du 11 février 1994 relative à l'initiative et à l'entreprise individuelle prévoit que l'entrepreneur qui sollicite un prêt auprès d'une banque, peut lui proposer un ordre prioritaire de garantie sur ses biens (professionnels et personnels).

Il n'en reste pas moins que l'absence de séparation entre les biens nécessaires à l'activité économique et les biens possédés par l'entrepreneur est source d'insécurité pour ce dernier.

L'APCE suggère ainsi de permettre aux entrepreneurs individuels de distinguer le patrimoine affecté à une activité de leur patrimoine personnel. Cette solution permettrait de distinguer, sur le plan fiscal ? la part des résultats de l'entreprise affectée aux capitaux propres de la part correspondant à la rémunération de l'entrepreneur. Surtout, en cas de difficultés de l'entreprise, elle offrirait une certaine sécurité à l'entrepreneur.

Certes, cette proposition soulève un certain nombre de difficultés juridiques, notamment au regard du droit des tiers sur l'entreprise. Dans l'immédiat, on pourrait cependant s'inspirer d'une préconisation du Conseil national du crédit et du titre visant à promouvoir une « charte banque-entreprise ». Cette charte est une sorte de code de bonne conduite qui définit des engagements du banquier et de l'entrepreneur, destinés à faciliter leurs relations. Au sein de ces engagements pourrait figurer celui de ne faire qu'un usage restreint des prises de garanties sur le domicile familial.

B.- GARANTIR UNE COUVERTURE SOCIALE TOUT EN VEILLANT À UNE ÉVOLUTION PROGRESSIVE DES CHARGES AFFÉRENTES

1.- LE POIDS DES CHARGES SOCIALES DANS LA PHASE DE DÉMARRAGE DE L'ENTREPRISE NOUVELLE

Les créateurs rencontrés ont tous déploré le poids élevé que représentent les charges sociales, au début de leur activité. Leurs revenus sont, en effet, dans la majorité des cas, très faibles. Or, ils doivent, dans le même temps, s'acquitter du paiement de charges sociales, calculées sur une base forfaitaire, et dont le montant est comparativement élevé.

Sur ce point, le Président de l'ACFCI, M. Jean-Paul Noury, observait, lors d'un colloque sur le thème « La création d'entreprises : une affaire d'État ? » (27) : « En tant que praticien, je suis frappé de constater que c'est moins le fiscal que le social qui pose problème aux créateurs d'entreprise. En effet, la fiscalité attend d'abord les bénéfices, et la plupart des créateurs n'en ont pas pendant les trois premières années. En revanche, de nombreux créateurs découvrent l'évolution lourde des charges sociales pendant la deuxième et la troisième années ».

Par ailleurs, une enquête réalisée par l'IFOP (28) pour le compte de l'APCE montrait que les candidats à la création estiment que le poids des charges constitue l'un des principaux freins à la création pour 38 % d'entre eux, après la situation économique (48 %) et la difficulté à obtenir un prêt bancaire (40 %).

Certains dispositifs prennent en compte cette contrainte, mais ils ne concernent que des catégories limitées de créateurs et n'apportent pas de réponse globale.

C'est le cas de l'aide aux chômeurs créateurs ou repreneurs d'entreprises (ACCRE) qui consiste, notamment, depuis le 1er janvier 1997, en une exonération de charges sociales pendant la première année d'activité. Le champ des bénéficiaires de cette exonération a été étendu aux jeunes qui remplissent les conditions pour bénéficier de contrats « emploi-jeune » ainsi qu'aux personnes qui disposent de l'allocation de parent isolé. Cette mesure, qui représente un avantage financier de l'ordre de 20.000 francs annuels, leur permet de bénéficier du maintien de leur couverture sociale pendant la première année de la création de l'entreprise et d'être exonérés totalement des cotisations sociales correspondant à leur nouveau statut social.

Un autre type d'exonération porte sur les cotisations d'assurance-maladie et concerne les commerçants et artisans en zone franche.

Ces mesures présentent le mérite d'éviter le sentiment d'asphyxie des créateurs concernés, au moment du démarrage de l'entreprise, mais elles ne les préparent pas au paiement des charges qui intervient à l'issue de la première année d'activité.

La question du niveau des charges sociales est, en réalité, très délicate. Elle suppose que soit trouvé un équilibre entre deux extrêmes : trop élevées, les charges détruisent leur propre assiette, l'emploi, alors que les prestations qu'elles financent (santé notamment) sont de nature universelle, comme le confirme la mise en place récente d'une « couverture maladie universelle » ; à l'opposé, il est sans doute excessif d'annuler totalement les charges sur les salaires dans la mesure où une partie de ces charges « achètent » des droits futurs (retraite) ou des prestations d'assurance (accidents du travail). L'existence d'un tel équilibre ne dispense cependant pas d'agir sur le niveau des charges pesant sur le créateur, si leur niveau est inadapté.

Une seconde difficulté réside dans les modalités de calcul des cotisations, qui reposent sur des assiettes forfaitaires différentes pour les travailleurs indépendants en début d'activité. A titre d'exemple, les allocations familiales sont calculées sur une base de 38.370 francs, les cotisations d'assurance maladie sur une base de 69.456 francs et celles d'assurance vieillesse sur une assiette de 57.370 francs. En outre, les règles d'exigibilité des cotisations en début d'activité obéissent à des calendriers différents, ce qui ne manque pas d'accroître un sentiment de confusion et d'insécurité chez le créateur.

Ces éléments militent en faveur d'un effort important de simplification et d'allégement des charges, dans la phase de démarrage de l'activité. Il convient d'insister sur la nécessité de l'accompagner de la recherche d'une certaine progressivité ? qui s'avère plus adaptée qu'une exonération totale à la situation de vulnérabilité dans laquelle se trouve le nouvel entrepreneur.

Cette notion de progressivité a récemment été évoquée par Le Président Laurent Fabius (29) lors d'un colloque dans lequel il déclarait : « S'agissant plus particulièrement des jeunes entreprises, les mesures d'allégement ou d'exonération qui existent aujourd'hui sont encore insuffisantes. Un allégement plus global de la charge leur donnerait l'élan nécessaire pour se développer, recruter et investir. Pourquoi ne pas réfléchir à un assujettissement progressif de la pression fiscale et sociale, de la naissance à la cinquième année d'une société, assorti si elle réussit d'un report et d'un étalement de l'allégement obtenu, sur la période suivante de six à dix ans ? Le vent de liberté que ferait souffler une telle mesure serait bien plus fort que ce qu'il coûterait ».

Cette orientation doit guider l'ensemble de la réflexion sur les charges qui pèsent sur le nouvel entrepreneur, y compris les mesures d'exonération. Ainsi, on peut penser préférable de prolonger l'exonération attachée à l'ACCRE, en ne lui donnant plus qu'un caractère partiel mais progressif sur deux ou trois ans (par exemple, une exonération de charges à hauteur de 60% la première année et 30 % l'année suivante avec un rattrapage étalé sur une durée double à partir de la quatrième année).

2.- LA RECHERCHE D'UNE PLUS GRANDE PROGRESSIVITÉ

Les réflexions actuelles portent, à juste titre, sur les voies d'une simplification et d'un allégement des charges de l'entrepreneur dans les premiers mois de démarrage de l'entreprise.

Le rapport de l'IGAS préconise ainsi d'harmoniser à la baisse et de simplifier les assiettes forfaitaires des cotisations sociales exigibles de tous les travailleurs indépendants en début d'activité. Dans cette perspective, il propose de retenir uniformément 800 heures de SMIC (32.176 francs) dans les différentes branches comme assiette forfaitaire pour la première année d'activité. A terme, il suggère d'exclure la première année d'activité du champ d'application de la régularisation et d'étendre à toutes les branches l'utilisation d'une assiette forfaitaire unique (25 % du plafond) pour le calcul provisoire des cotisations de la deuxième année d'activité.

Ces propositions sont intéressantes de par les simplifications qu'elles impliquent et l'allégement qu'elles procurent aux créateurs d'entreprise. Toutefois, elles ne prennent que peu en compte l'idée de progressivité puisqu'aucun étalement sur une durée plus longue n'est envisagé.

L'APCE suit une logique similaire en proposant un allégement des cotisations sociales de créateurs d'entreprises qui s'inscrit cependant davantage dans le temps. L'Agence suggère en effet l'instauration d'un forfait de cotisations sociales unique, pour tous les créateurs, pendant les trois premières années d'activité. Cette mesure s'accompagnerait d'un rattrapage, sur six ans, des cotisations de retraite non versées.

Cette proposition est intéressante dans la mesure où elle met en évidence la nécessité d'un délai supérieur à un an pour toute disposition visant à ne pas fragiliser l'entreprise au démarrage par le paiement de charges sociales d'un montant élevé. Une montée en charge progressive sur trois ans pourrait ainsi être envisagée avec un rattrapage étalé sur une durée deux fois plus longue pour ne pas alourdir le montant du total des charges que devra alors supporter le créateur.

En définitive, il importe que le nouvel entrepreneur n'ait pas de le sentiment de « faire un saut dans le vide », comme l'a justement souligné le Directeur général de l'APCE, M. François Hurel.

III.- LEVER LES OBSTACLES À L'ACCÈS AU FINANCEMENT

Chacun peut en faire l'expérience. Evoquez avec des banquiers ou des spécialistes de la grande ou de la moyenne entreprise les questions du financement de la création d'entreprise.

Dans leur très grande majorité, ils vous affirmeront que c'est un faux problème, que l'argent est disponible mais que nous manquons de projets et de créateurs compétents.

Posez les mêmes questions à des accompagnateurs de créateurs d'entreprise ou à des entrepreneurs ; tous vous décriront les affres de la recherche de financement de départ pour des TPE, vous feront part de leur amertume quant au temps et à l'énergie gaspillés pour accéder à des prêts souvent très faibles et vous citeront nombre d'exemples de créateurs potentiels ayant abandonné face aux difficultés rencontrées dans leurs relations avec des financeurs potentiels.

Une segmentation des projets pourrait nous conduire à considérer que les problèmes d'accès au financement se posent pour les PME traditionnelles lorsqu'elles ont besoin de plus d'un million d'apports (les PMI innovantes disposent, elles, d'un capital-risque aujourd'hui relativement abondant), pour toutes les entreprises dont les investissements de départ sont inférieurs à un million de francs mais se révèlent particulièrement cruciaux pour les TPE.

Nous avons fixé dans une première partie un objectif politique : démocratiser l'entrepreneuriat, élargir la base sociale des créateurs.

Dans le domaine de l'accès au financement, la déclinaison de cet objectif pourrait être la suivante : toute personne démunie de ressources personnelles ayant bâti un projet de création d'entreprise jugé crédible par des personnes qualifiées doit pouvoir accéder aux ressources financières minimales lui permettant d'accéder à l'entrepreneuriat.

C'est pourquoi, les propositions qui suivent s'efforceront d'abord de résoudre l'épineux verrou des 100.000 premiers francs d'apports, les plus difficiles à trouver parce que les offreurs sont rares et prudents.

On s'attachera ensuite à montrer comment les pouvoirs publics peuvent par la politique fiscale, favoriser l'investissement des particuliers, contribuer à l'émergence de « fonds de capital risque solidaire » et encourager l'essaimage.

Afin d'encourager la création de TPE, on plaidera donc pour la mise en place d'une véritable « chaîne de financement » susceptible de remédier aux carences de notre système actuel.

A.- RÉTABLIR LA « SUBVENTION ACCRE »

1.- LES TERMES DU DÉBAT : AVANCE REMBOURSABLE OU SUBVENTION ?

L'ère est aux "avances remboursables"

On leur prête toutes les vertus : leur coût final limité pour le prêteur ; la responsabilisation de l'emprunteur.

Les avances remboursables ont effectivement bien des vertus.

La mode est, de plus, aux avances remboursables conditionnelles.

Le créateur obtiendra A s'il a déjà obtenu B. A est une avance remboursable, B est un prêt bancaire classique.

Comment ne pas s'étonner d'une telle vogue ? Elle aboutit lorsque le dispositif est financé sur fonds publics (État, collectivités locales) à transférer de fait le pouvoir de décision au banquier.

Pour un dispositif conçu pour favoriser l'accès au financement de personnes défavorisées, il revient au banquier, en accordant le prêt B, de déclencher l'octroi de l'avance remboursable A.

Connaissant la propension des banques à prêter de l'argent aux créateurs démunis on peut, au choix, considérer que ces dispositifs ont été conçus par des gestionnaires de la dépense publique avisés et un rien cyniques, convaincus qu'ils ne pouvaient trouver meilleur allié que le banquier pour limiter les dépenses ; ou parier, s'ils ont été conçus de bonne foi, qu'ils devront être rapidement révisés, faute de pouvoir bénéficier réellement à leurs destinataires théoriques.

Notons au passage qu'il ne s'agit pas ici de diaboliser les banques ou les banquiers ; on cherchera au contraire à proposer plus loin des outils pour favoriser le nécessaire rapprochement entre la banque et le créateur, ce que les spécialistes appellent dans leur jargon la « bancarisation » de la création d'entreprise. Mais chacun connaît les préventions des banquiers à l'égard des créateurs d'entreprises, préventions légitimes au demeurant puisque les banques gèrent des dépôts exigibles. Ils ne sont naturellement pas les plus qualifiés pour déclencher l'action publique.

Mais la subvention est, elle, aujourd'hui suspecte.

La suppression par le Gouvernement de M. Alain Juppé de la prime de 32.000 francs accordée aux chômeurs créateurs ou repreneurs d'entreprises paraît avoir sonné le glas de la subvention aux créateurs.

L'ACCRE fut malmenée dès 1995 : après avoir à juste titre limité l'aide aux « candidats à la création d'entreprises les mieux préparés porteurs de projets les plus cohérents et les plus sérieux, tout en considérant les demandeurs d'emploi prioritaires au c_ur du champ du dispositif », la loi de finances rectificative du 4 août 1995 avait, de façon surprenante, limité son bénéfice aux chômeurs de plus de 6 mois d'ancienneté...

Le rapport de M. Philippe Mathot, député, en 1996, annonçait l'hallali, avec une franchise décapante : après avoir noté que « les créateurs de métier sont plus performants que les créateurs contraints » (c'est-à-dire les chômeurs), le rapporteur estimait que la « logique d'efficacité » devait conduire à supprimer l'ACCRE ainsi que « les autres mesures d'aides à logique sociale ». En 1997, la prime de 32.000 francs était supprimée et, depuis lors, la « subvention ACCRE » a été chargée de tous les maux.

La façon dont cette prime était accordée - en pratique de façon quasi automatique, les contrôles amont se révélant inopérants - méritait sans doute de profondes modifications et a très certainement engendré des dérives inacceptables.

Plutôt que de réformer, on a préféré supprimer. Eliminant ainsi l'un des rares outils d'aide à l'initiative des plus démunis, dans une société qui prône la libre entreprise et l'égalité des chances...Aggravant la structure de haut de bilan des petites entreprises françaises dont la faiblesse en fonds propres est bien connue.

La prime ACCRE ne méritait pas tant d'indignité. Un rapport de l'IGAS confirme ce que disent les réseaux d'accompagnement de la création d'entreprises. L'ACCRE a effectivement permis à de nombreux chômeurs de créer leur entreprise. Le rapport relève qu'en 1997, 57 % des bénéficiaires de l'ACCRE en 1994 étaient toujours à la tête de leur entreprise !

2.- DÉFENDRE LE PRINCIPE D'UNE SUBVENTION DE 20.000 FRANCS POUR LES PERSONNES LES PLUS DÉMUNIES

La subvention n'est pas illégitime

Politiquement, une subvention accordée au chômeur-créateur peut être analysée comme l'octroi d'un « capital de substitution, comme il existe des revenus de substitution, à ceux qui en sont dépourvus », pour reprendre l'expression de la Présidente de l'ADIE, Madame Nowak, ou comme la mise en _uvre réelle et non formelle de la liberté d'entreprendre.

De façon plus ambitieuse, Jean-Baptiste de Foucauld n'hésitait pas à plaider (30) pour « un droit à l'initiative pour tous » et pour le « capital-initiative » défini comme le fait « d'offrir à tous (...) une raisonnable somme d'argent pour réaliser un projet ». Ainsi « chacun des membres de la collectivité nationale devrait donc disposer, une fois dans sa vie et au moment choisi par lui d'un "droit de tirage" sur cette même collectivité, pour un montant qu'on pourrait fixer à 30.000 francs » ajoutait l'auteur.

Le « droit à la création d'entreprise », la mise en place d'une « épargne pour création d'entreprise », le cas échéant prélevée sur les salaires, pourraient à l'avenir trouver toute leur place dans une « société d'initiative » soucieuse de garantir une réelle égalité des chances parmi les citoyens.

Pour l'heure, s'autolimitant, votre Rapporteur se bornera à plaider pour le rétablissement d'une prime en faveur des chômeurs-créateurs.

Économiquement, la subvention peut être rationnellement justifiée.

Elle permet de doter en fonds propres des petites structures qui en sont démunies ; or on sait que l'espérance de vie des TPE est étroitement corrélée à leurs fonds propres de départ.

Elle autorise un effet de levier pour le crédit classique : car comme le soulignait M. Michel Freyche, Président de l'Association Française des Banques, lors d'un récent colloque  (31) « lorsqu'on souhaite créer une entreprise, il est indispensable de disposer de fonds propres au départ. Une entreprise reposant uniquement sur les concours bancaires n'a aucune chance de réussir ».

Budgétairement, son coût est limité.

Sans entrer dans les débats sur le fait de savoir comment il convient d'apprécier le coût réel d'une subvention - faut-il ne retenir que son coût direct (le nombre de primes versées à des chômeurs-créateurs) ou défalquer les économies réalisées par le système de couverture sociale lorsque le créateur réussit à pérenniser son entreprise - on se contentera ici de rappeler que pour le budget de l'État les quelques 2 milliards de dépenses consacrées à l'ACCRE "ancienne formule" étaient compensées par le milliard accordé par l'Union européenne (« fonds du FSE »).

Il est donc proposé ici de rétablir une prime de 20.000 francs aux chômeurs-créateurs et aux titulaires des minimas sociaux créateurs d'entreprise.

Cette subvention n'aurait aucun caractère automatique : son octroi serait soumis à l'avis favorable du Comité Local des Partenaires de l'Entrepreneur (CLPE).

Certes, diront les sceptiques, rien n'empêchera le CLPE d'accorder systématiquement un avis favorable et l'ACCRE retrouverait alors ses dérives passées.

Ce serait méconnaître le professionnalisme et le sens des responsabilités des partenaires en question que d'imaginer qu'ils renonceraient ainsi à leur mission de sélection.

Par ailleurs, l'ensemble du dispositif devant être soumis à une évaluation permanente, toute dérive locale serait identifiée et corrigée.

B.- INSTITUER UN PRÊT D'HONNEUR ACCESSIBLE À TOUT CRÉATEUR

1.- LE CONSTAT : LES ATOUTS D'UNE INSERTION DANS LE CIRCUIT BANCAIRE ET D'UN APPORT INITIAL EN CAPITAL CONSÉQUENT

Une étude de l'APCE(32) montre que le taux de survie des entreprises créées avec, dès le départ, un prêt bancaire est, au bout de trois ans et demi, de 55 % contre 41 % pour les entreprises qui n'en ont pas bénéficié.

Cette étude établit, par ailleurs, que le taux de survie des nouvelles entreprises augmente avec le capital initial, surtout à partir de 100.000 francs. Le tableau ci-après illustre ce constat :

Taux de survie des entreprises nouvelles en fonction du montant
du capital investi initialement

 

(en milliers de francs)

   

Capital initial inférieur à 50

Capital compris entre 50 et 99

Capital compris entre 100 et 249

Capital compris entre 250 et 499

Capital initial supérieur à 500


Moyenne

Détenteur de prêt

46,5

45,5

58,5

68

70

55

Non détenteur de prêt

38

41,5

49

57

60

41

Source : Agence pour la création d'entreprise

Pour autant, la création de très petites entreprises bénéficie peu de concours bancaires. Comme le souligne le rapport précité du Conseil national du crédit et du titre, les créateurs apportant moins de 25.000 francs de capital représentent 35 % de l'ensemble des créateurs et seuls 8 % d'entre eux obtiennent un financement bancaire. Le tableau ci-après illustre cette situation.

Financement bancaire des créations en fonction du capital de départ

 

(en  %)

Apport en capital

Moins de 25.000 F

de 25.000 F à 99.000 F

de 100.000 F à 499.000 F

500.000 F et plus

Total

Part des créations

35

42

19

4

100

Pourcentage de créateurs bénéficiaires de prêts bancaires

8

21

42

67

22

Source : Conseil national du crédit et du titre

A ces deux paramètres, s'en ajoute un troisième qui est le rôle des réseaux d'appui au créateur. A cet égard, le rapport du Conseil national du crédit et du titre relève qu'ils sont susceptibles de faciliter l'accès au crédit d'entreprises naissantes par deux canaux : « les aides financières, et notamment les prêts d'honneur, ainsi que le cautionnement parfois apporté par les entrepreneurs « parrains » renforcent la capacité de la jeune firme à mobiliser des concours bancaires ; surtout, les réseaux se livrent à une présélection des projets qui bénéficieront de leur soutien, présélection dont la pertinence des critères au regard de la réalité économique locale conduit souvent à accroître significativement les taux de survie des entreprises éligibles ».

Ce constat est à l'origine du dispositif EDEN (Encouragement au développement d'entreprises nouvelles) qui prévoit une délégation par l'État, à titre expérimental (jusqu'à fin 2000), de l'attribution de l'avance remboursable à des organismes experts tels que des associations de soutien à la création d'entreprises, des sociétés spécialisées dans le conseil ou encore des établissements financiers, locaux ou nationaux. On a déjà évoqué précédemment les retards accumulés dans la mise en place de ce dispositif. Dans son esprit, on note, toutefois, le choix de privilégier l'accompagnement du créateur en subordonnant l'avance remboursable au suivi d'une relation avec une structure d'appui.

La proposition suivante tente d'intégrer ces différents paramètres dans la définition d'une aide financière, exclusivement réservée aux créateurs ou repreneurs d'entreprises, sans distinction fondée sur leur statut antérieur.

2.- UNE PROPOSITION : INSTITUER UN PRÊT D'HONNEUR DE 40.000 FRANCS ACCESSIBLE À TOUT CRÉATEUR

Compte tenu des différents éléments qui viennent d'être abordés, votre Rapporteur propose l'instauration d'un prêt d'honneur, d'un montant de 40.000 francs, auquel pourrait prétendre tout créateur, quel que soit son statut initial. Le bénéfice de ce prêt pourrait donc être cumulé avec celui de la prime de 20.000 francs évoquée supra, par les personnes les plus défavorisées qui souhaitent créer ou reprendre une entreprise.

Cette proposition rejoint, dans son esprit, celle formulée dans le rapport du Commissariat général du Plan qui suggérait la mise en place d'une aide de départ pour tous les créateurs d'entreprise, de l'ordre de 50.000 francs, dans la limite de 50 % des capitaux engagés, et remboursable en cas de survie de l'entreprise, au bout de trois ans.

Votre Rapporteur suggère toutefois que le prêt d'honneur comprenne un taux d'intérêt bonifié afin d'introduire, dès le départ, une logique de financement bancaire. Cet objectif est développé ci-après.

Ce prêt serait remboursable dans les mêmes conditions que l'avance remboursable, à savoir dans un délai maximal de 5 ans, le premier remboursement intervenant au plus tard 18 mois après le versement.

La décision d'octroi du prêt d'honneur serait prise par le « Comité Local des Partenaires de l'Entrepreneur » dont la mission et la composition ont été définies précédemment.

Dans un souci de faciliter l'insertion dans le circuit bancaire, votre Rapporteur préconise, par ailleurs, que le montant du prêt d'honneur soit versé directement à la banque, sur présentation d'un « bon » que lui aura remis le porteur de projet, bénéficiaire du prêt.

Dans ce schéma, le coût de gestion du prêt pour la banque est, dès le départ, réduit grâce à l'absence de risque. Afin d'inciter les banques à participer à ce dispositif, l'État pourrait, cependant, contribuer aux frais de gestion en versant une somme correspondant à une estimation de leur coût de laquelle serait déduite les intérêts de remboursement perçus.

Cette configuration prend en compte deux des paramètres évoqués précédemment, à savoir, d'une part, l'insertion dans le circuit bancaire et, d'autre part, le rôle des réseaux d'appui aux créateurs. Il convient, enfin, de compléter le dispositif de manière à parvenir à un apport initial conséquent.

3.- COMPLÉTER LE DISPOSITIF PAR UN CRÉDIT BANCAIRE « CLASSIQUE » GARANTI

Le dispositif décrit pourrait être utilement complété par le bénéfice d'une garantie publique pour les banques gestionnaires de ces prêts, qui accepteraient de les abonder. Cette garantie, plafonnée à 40.000 francs, permettrait d'atteindre un montant total de 100.000 francs en apports, pour les personnes, au départ écartées du circuit économique, mais dont la qualité du projet leur donnerait accès à la prime de 20.000 francs et au prêt d'honneur de 40.000 francs.

Il s'agit ainsi de favoriser un effet de levier en vue de la mobilisation de financements complémentaires au bénéfice des créateurs. Les banques sont, en effet, incitées à s'impliquer dans ce dispositif dans la mesure où le risque qu'elles prennent est considérablement réduit grâce à l'examen préalable du projet par un organisme d'appui et / ou le Comité local des partenaires de l'Entrepreneur et la mise en _uvre d'une garantie publique, plafonnée à 40.000 francs, pour tout financement complémentaire. En outre, une participation aux frais de gestion est prévue.

Ces propositions cherchent, en définitive, à favoriser la mise en place d'une « chaîne vertueuse du financement » en faveur de la création d'entreprise, et notamment la très petite entreprise, qui permette aux différents acteurs concernés d'entamer un dialogue et une coopération fructueuse. Cette coopération entre le banquier et le créateur devrait mettre fin à l'image du « créateur-braqueur » que ce dernier ressent trop souvent au moment de ses démarches.

C.- ENCOURAGER LES PARTICULIERS QUI INVESTISSENT DANS LA CRÉATION D'ENTREPRISES

1.- INCITER LES PARTICULIERS À INVESTIR DANS UNE ENTREPRISE NOUVELLE

En France, il existe peu de mécanismes fiscaux incitant les particuliers à orienter leur épargne dans la création d'entreprise.

Certes, la loi du 11 février 1994 relative à l'initiative et à l'entreprise individuelle a mis en place un dispositif, dit « dispositif Madelin », destiné à encourager l'investissement en fonds propres des particuliers dans les PME, par le biais d'une réduction d'impôt.

Les particuliers qui apportent des fonds propres au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés non cotées bénéficient d'une réduction d'impôt de 25 %, dans la limite annuelle d'un plafond d'investissement de 37.500 francs pour les contribuables célibataires et de 75.000 francs pour un couple. La réduction d'impôt maximale annuelle est donc égale à 9.375 francs ou à 18.750 francs selon la situation de famille du souscripteur.

Les sociétés bénéficiaires des souscriptions doivent être soumises à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun, exercer une activité industrielle, commerciale ou artisanale et obéir à des conditions particulières de détention du capital (plus de 50% des droits sociaux attachés aux actions ou parts de la société doivent être détenus directement par des personnes physiques).

Le bénéfice de la réduction d'impôt est définitivement acquis si les titres souscrits sont conservés jusqu'à l'expiration de la cinquième année suivant celle au cours de laquelle la souscription a été réalisée.

Ce dispositif a été prorogé jusqu'au 31 décembre 2001 par la loi de finances pour 1999, qui prévoit, par ailleurs, son extension aux sociétés créées par voie d'essaimage.

S'il a le mérite d'exister, ce dispositif souffre néanmoins de certaines limites dans la mesure où il ne bénéficie qu'aux sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés. L'avantage fiscal concerne donc exclusivement les personnes morales, essentiellement des projets connus de l'épargnant, et les augmentations de capital en numéraire de sociétés existantes.

En outre, seules les souscriptions réalisées par des personnes physiques auprès de la société concernée sont éligibles à la réduction d'impôt. Autrement dit, les souscriptions indirectes réalisées par l'intermédiaire d'un organisme de placement collectif (SICAV, fonds communs de placement) ou par société interposée (sociétés de personnes ou de capitaux, sociétés de capital-risque ...) ne peuvent ouvrir droit à déduction. Certes, il existe une exception en faveur des clubs d'investissement constitués entre personnes physiques sous forme d'indivision, comme les CIGALES. Il n'en reste pas moins que cette limite constitue un frein important à la collecte d'une épargne de proximité en faveur de la création d'entreprises.

Enfin, et c'est sa principale limite, ce dispositif est finalement peu connu. Il est fort probable que le gisement potentiel de particuliers qui pourrait être intéressés par cette mesure est bien plus important que le nombre actuel de bénéficiaires (près de 94.000 personnes).

Dans ces conditions, on voit bien l'intérêt que peut présenter un dispositif spécifiquement dédié à la création d'entreprise.

L'objectif poursuivi est d'inciter davantage les particuliers à investir en fonds propres dans des entreprises nouvelles : le dispositif envisagé concerne donc exclusivement la création d'entreprises.

Son principe repose sur les mêmes fondements que le mécanisme mis en place par la loi du 11 février 1994, à savoir une réduction d'impôt d'un même montant (25%), mais avec un plafond plus élevé.

Certes, le plafond actuel n'est pas saturé puisque, d'après le Ministère de l'Économie et des Finances, 18,2% des foyers fiscaux seulement l'atteignent. Toutefois, on peut penser qu'un relèvement de ce plafond aurait un effet d'annonce très favorable, permettant d'inciter un plus grand nombre de particuliers à se mobiliser pour la création d'entreprise.

Un autre argument plaide en faveur de ce relèvement : il s'appuie sur une comparaison avec les avantages fiscaux liés à la souscription, par des personnes physiques, de parts de fonds communs de placement dans l'innovation (FCPI).

Ces fonds correspondent à des fonds communs de placement à risque dont l'actif est constitué pour 60 % au moins de titres de sociétés non cotées considérées comme innovantes.

Les personnes physiques qui investissent dans des FCPI bénéficient également d'une réduction d'impôt, égale à 25 % du montant des versements effectués au cours de l'année. Toutefois, ces versements sont retenus dans la limite annuelle de montants deux fois plus élevés (75.000 F pour les contribuables célibataires et de 150.000 F pour un couple). La réduction d'impôt maximale annuelle est ainsi de 18.750 francs ou 37.500 francs selon la situation familiale du souscripteur.

Or, comme le relève la commission « Financement » du CNCE (33), « un particulier qui, dans une démarche de type « business angel », décide d'investir dans un projet, prend des risques plus importants qu'un titulaire de parts de FCPI dont l'investissement bénéficie à la fois du label ANVAR donné aux entreprises éligibles, de la sélection opérée par les experts gestionnaires du FCPI et de la mutualisation des risques liés à la composition du portefeuille FCPI ».

Dans ces conditions, pourquoi ne pas aligner au même niveau que les FCPI, le plafond de la réduction d'impôt dont bénéficient les personnes physiques qui investissent dans une entreprise nouvelle ?

Cette mesure aurait une vertu simplificatrice. Elle témoignerait, en outre, d'une égale attention apportée à l'innovation technologique et à l'innovation sociale.

Enfin, le dispositif envisagé bénéficierait aux particuliers qui investissent directement mais aussi indirectement, c'est-à-dire par l'intermédiaire d'un fonds gestionnaire, dans une entreprise nouvelle.

Dans le premier cas, seul un apport au capital initial d'une entreprise ouvrirait droit à une réduction d'impôt alors que le dispositif « Madelin » intègre également les augmentations de capital qui concernent, par définition, des sociétés existantes.

Dans le second cas, la réduction d'impôt serait également ouverte aux particuliers qui préfèrent confier leur épargne à un fonds, dont l'activité est exclusivement orientée sur le financement de projets de création, à l'échelle locale. Les contours de ce fonds seraient les suivants.

2.- FAVORISER L'ÉMERGENCE DE « FONDS DE CAPITAL-RISQUE SOLIDAIRES »

La notion d'épargne de proximité recouvre une réalité diverse : elle résulte de la mobilisation d'acteurs locaux qui souhaitent investir dans un projet de création, solidarité locale ou engagement citoyen.

Cette forme d'épargne a connu un développement récent en France, grâce aux mesures prises en faveur des entreprises innovantes. Toutefois, ce développement reste limité à une catégorie précise d'entreprises et ne bénéficie notamment pas aux petites entreprises dont le potentiel de croissance est beaucoup moins important.

Or, la mobilisation de cette épargne apporte une contribution non négligeable au démarrage d'entreprises dans des pays comme les États-Unis ou le Canada, comme l'illustre le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec (FTQ).

a) L'exemple du Fonds de solidarité des travailleurs du Québec (FTQ)

Le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec (FTQ), créé en 1983, dans un contexte de grave récession économique, repose sur l'idée d'associer solidarité et avantages fiscaux dans le but de drainer une épargne de proximité destinée à répondre aux besoins de financement d'entreprises en difficulté, en expansion ou en projet de création. La souscription au FTQ se fait par l'achat d'actions par des particuliers et donne droit à deux crédits d'impôts totalisant 30% du montant investi. Cette souscription peut, dans certains cas, être faite directement par des retenues sur salaire, une fois l'an, lors de la campagne annuelle de souscription. Le salarié souscripteur est informé des droits qui lui sont ouverts grâce à sa contribution ainsi que de l'utilisation qui a été faite des sommes collectées en faveur des entreprises de sa région. Il dispose ainsi d'un retour d'image de l'investissement qu'il a aidé à financer.

L'épargne ainsi collectée a permis au FTQ de réaliser, depuis sa création, un investissement global de 2,2 milliards de dollars canadiens en mobilisant 330.000 actionnaires (pour environ 2.937.000 ménages au Québec). Cet investissement obéit à des contraintes fortes de rentabilité des actionnaires mais vise également à soutenir des projets qui permettent de créer ou de maintenir des emplois.

L'action de Fonds est relayée par des Fonds régionaux de solidarité (FRSTQ) dans chacune des 17 régions administratives du Québec qui associent les régions, le Gouvernement et le milieu syndical.

Votre Rapporteur s'est plus spécifiquement intéressé aux Sociétés locales d'investissement dans le développement de l'emploi (SOLIDE). Ces sociétés, corporations à but non lucratif, ont été créées en 1991, en même temps que SOLIDEQ, une société en commandite, vouée à la promotion du développement économique local.

Les SOLIDE regroupent des partenaires financiers et des responsables sociaux-économiques locaux, pour appuyer des projets de démarrage ou de développement d'entreprises sur le territoire d'une municipalité régionale de comté (MRC).

Une SOLIDE gère donc un fonds d'investissement dont les actions sont étroitement liées aux priorités définies au plan local. Son implantation implique, en effet, que la MRC suscite l'intérêt des acteurs économiques sur son territoire, SOLIDEQ investissant dans la SOLIDE à raison d'un dollar pour chaque dollar investi par les partenaires locaux.

Une SOLIDE fonde ses choix d'investissement sur la viabilité économique du projet présenté, dont l'initiateur doit apporter la preuve. Les autres critères de choix sont présentés de la manière suivante :  « En plus de considérer les retombées économiques en terme d'investissement et de création d'emplois, une SOLIDE ne s'associe qu'à des entrepreneurs qui manifestent, dans leurs relations de travail, une philosophie d'ouverture envers les travailleurs ».

La SOLIDE vise des investissements se situant entre 5.000 et 50.000 dollars. Elle investit sous forme de prêt participatif assorti d'une option d'achat d'actions participantes. De manière exceptionnelle, elle peut consentir des prêts avec ou sans garantie ou des garanties de prêts.

L'exemple des SOLIDE met en évidence l'importance d'une forte implication des acteurs au niveau local pour orienter l'épargne dite de proximité vers le financement en fonds propres de petites et moyennes entreprises. Toutefois, il repose sur une organisation très différente de celle envisagée infra, dans la mesure où la collecte de l'épargne n'est réalisée, au niveau local, qu'indirectement, grâce à l'implication des MRC. Les fonds versés par SOLIDEQ provienne, en effet, des souscriptions d'actions au Fonds de solidarité.

L'expérience québécoise est également instructive sur ce dernier point, en illustrant le bénéfice qui peut résulter d'une communication massive fondée sur un symbole d'épargne utile, économiquement et socialement.

b) Encourager la constitution de Fonds de « capital-risque solidaire »

La mobilisation de l'épargne de proximité pourrait être favorisée par la mise en place de Fonds de « capital-risque solidaire ». Ces Fonds seraient chargés de collecter l'épargne de proximité et de l'utiliser pour le financement de projets de création d'entreprises, en particulier celles de très petite taille. Ils feraient intervenir aussi bien des particuliers, sensibles à la réalisation de projets dans leur proche environnement, les collectivités locales, les banques et les entreprises. Les Fonds de « capital-risque solidaire » serviraient ainsi de cadre à l'expression de la solidarité locale, à travers le soutien à la création d'entreprise par les acteurs du développement économique local.

Dans cette perspective, votre Rapporteur est attaché à la formule de « capital-risque solidaire » qui exprime à la fois la prise de risque qui existe dans tout projet de création mais aussi le soutien manifesté dans un souci de dynamisation du tissu économique local, et non dans l'attente d'un taux de rentabilité élevé, comme cela est le cas pour les entreprises innovantes.

Cette proposition rejoint une préoccupation du Conseil national du crédit et du titre qui préconise la constitution des fonds nationaux et régionaux d'amorçage, avec un abondement des fonds levés par le Fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT). On doit, en effet, rappeler que la DATAR finance certaines actions en faveur des PME et des TPE, au moment de leur création ou de leur premier développement, dans le cadre du Fonds national de développement des entreprises (FNDE). Une aide globale de 10 millions de francs, financée par les crédits du FNADT, a ainsi été accordée aux plates-formes d'initiative locale, qui devrait être augmentée en fin d'année, pour concerner, au total, 45 plates-formes. Il importe également d'ajouter l'intervention de la Caisse de dépôts et consignations en soutien logistique et en refinancement des plates-formes, pour un montant total de 100 millions de francs sur 3 ans.

La constitution de tels Fonds pourrait s'inspirer des Fonds communs de placement à risque (FCPR) (34) afin de garantir une échéance de liquidation des fonds (35) (au plus tard 10 ans, pour que l'épargnant puisse récupérer sa contribution) ainsi qu'une implication des banques (en pratique, les FCPR sont surtout gérées par des filiales d'établissements de crédit).

L'action de chaque Fonds serait circonscrite à une zone géographique délimitée (le département, par exemple), à la fois pour la collecte et l'emploi des capitaux levés. Dans ce but, chaque Fonds devra développer une communication massive fondée sur un symbole d'épargne utile, économiquement et socialement, sur le modèle des actions du Fonds de solidarité des travailleurs du Québec.

L'objectif est d'inciter les particuliers à investir dans la création d'entreprise, dans leur bassin de vie, à la fois grâce à un véritable effort de communication, mais aussi, et surtout, grâce à la réduction d'impôt de 25% à laquelle ils pourront prétendre, au même titre que s'ils investissaient directement dans une entreprise nouvelle.

Afin d'assurer la sécurité de l'épargnant, les engagements de chaque Fonds pourraient être garantis par les collectivités locales. Au préalable, il faut souligner que chaque engagement n'aura été pris qu'après instruction du projet de création par un organisme d'aide au créateur, destiné à valider le sérieux de la démarche et limiter les coûts de gestion liés à l'examen des dossiers. En outre, une garantie supplémentaire est apportée par le mode de gestion du Fonds qui repose sur une société de gestion de portefeuille et une personne morale dépositaire des actifs du Fonds, en pratique, une banque.

S'agissant de la garantie publique, il semble préférable de la confier aux collectivités locales dans la mesure où l'investissement est, dans ce cadre, dispersé. En outre, le projet de loi sur les interventions économiques des collectivités territoriales, qui sera prochainement soumis à la représentation nationale, devrait clarifier les modalités de leurs interventions dans ce domaine en ouvrant à l'ensemble des collectivités la possibilité d'abonder des fonds d'intervention gérés par des établissements de crédit.

Certes, les investissements financés par un « Fonds de capital-risque solidaire » seront, par définition, des investissements de petite taille. Le dispositif qui vient d'être décrit peut paraître, comparativement, assez lourd en termes de gestion. Toutefois, en l'absence de structures dédiées à cet usage, son principe reste intéressant, sous réserve de certaines adaptations réglementaires.

Les seules possibilités existants à l'heure actuelle résident, en effet, dans les clubs d'investissements, peu développés en France et dont le statut juridique est incertain. Une mesure alternative serait donc de clarifier leur situation et de mieux faire connaître leur mode d'intervention. Une autre piste à explorer est l'intermédiation par les sociétés de capital risque (SCR) régional qui pourraient intervenir plus spécifiquement dans la création d'entreprise et bénéficier, à ce titre, d'une réduction d'impôt identique à celle applicable aux investissements directs en fonds propres dans une entreprise naissante. Cependant, là encore, une simplification du régime de ces sociétés serait nécessaire afin de définir les critères d'éligibilité pour les SCR intervenant spécifiquement dans la création d'entreprises.

En définitive, les conditions de mise en _uvre de telles structures méritent, sans aucun doute, un examen approfondi. Il n'en reste pas moins que leur mise en place, sous une forme adaptée, permettant à la fois une mobilisation de l'épargne de proximité et une sécurité de l'épargnant, offrirait une possibilité, jusqu'à présent peu développée, de participation de particuliers à la réalisation de projets d'entreprises au plan local.

3.- METTRE EN PLACE UNE FISCALITÉ PLUS FAVORABLE À L'IMPLICATION DES INVESTISSEURS INDIVIDUELS DANS LA CRÉATION D'ENTREPRISE

Lors de son déplacement aux États-Unis, votre Rapporteur a été frappé par l'importance des fonds mobilisés pour la création d'entreprises, en provenance des investisseurs individuels. D'après l'étude internationale de l'APCE (36), ces derniers apportent « dix à vingt fois plus de fonds (environ 20 milliards de dollars US par an) que les sociétés de capital-risque (2 à 2,5 milliards de dollars) ». Cette forte contribution s'explique, en partie, par une fiscalité avantageuse, le « Research Development Limited Partnership », qui permet à l'investisseur de déduire de ses revenus imposables la quasi-totalité de son investissement.

Cette situation conduit à réfléchir sur les moyens de sensibiliser les personnes disposant d'un patrimoine important à la création d'entreprise et de les inciter à investir dans ce domaine. Une telle incitation pourrait passer par un aménagement de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF).

Cet aménagement prendrait la forme d'une exonération du montant de l'investissement réalisé en faveur d'une entreprise en création, à hauteur d'un certain plafond, sur le modèle de celle applicable aux biens professionnels, qui ne sont pas pris en compte dans l'assiette de l'ISF.

Le Code général des impôts prévoit que « les biens nécessaires à l'exercice, à titre principal, tant par leur propriétaire que par le conjoint de celui-ci, d'une profession industrielle, commerciale, artisanale ou agricole sont considérés comme des biens professionnels » (article 885 N). Les titres de sociétés soumises à l'impôt sur le revenu peuvent entrer dans cette catégorie - et bénéficier d'une exonération de l'ISF - dès lors que le redevable de l'ISF possède au moins 25 % des titres de la société dont il est dirigeant. Si ce seuil n'est pas atteint, l'exonération demeure lorsque la valeur brute des titres excède 75% de la valeur brute du patrimoine imposable du redevable, y compris les titres en cause.

L'investissement en fonds propres dans une entreprise nouvelle pourrait bénéficier du même type d'exonération, à hauteur d'un montant d'un million de francs, par exemple. Toutefois, afin de garantir que l'investissement réalisé favorise la création de TPE, l'exonération serait réservée aux sommes apportées lors de la constitution d'une société de moins de 50 salariés, à hauteur de 100.000 francs et dans la limite d'un montant maximal d'un million de francs pour chaque souscripteur.

Cette exonération pourrait également s'appliquer, dans les mêmes conditions, aux sommes faisant l'objet d'un prêt lors de la constitution d'une entreprise individuelle.

Afin d'éviter un contournement de la mesure, les titres émis en contrepartie de l'apport devront être conservés pendant une durée déterminée (5 ans, par exemple) et les sommes investies rester indisponibles pendant une durée identique.

De plus, l'encours des apports ou des prêts ne devra pas excéder un million de francs par foyer fiscal, pour ne pas inciter les redevables de l'ISF susceptibles de bénéficier d'une exonération, à effectuer, chaque année, le même type d'investissement.

Une telle mesure, dont les modalités d'application restent à définir précisément, permettrait d'intéresser les détenteurs de fortes capacités d'épargne à la création d'entreprise, ce qui est très rarement le cas en France, contrairement à d'autres pays.

D.- FAVORISER L'ESSAIMAGE

1.- UN « GISEMENT » DE CRÉATION À EXPLORER

L'essaimage peut être défini comme toute action visant à aider un salarié à conduire un projet personnel de création ou de reprise d'entreprise, dans le cadre d'un partenariat avec sa société d'origine. Ce partenariat peut revêtir des formes variées qui vont de l'appui technique à une aide financière, voire à des transferts de brevet ou d'activité.

On distingue généralement l'essaimage « à chaud », lorsque l'entreprise développe cette approche afin de gérer un sureffectif, de l'essaimage « à froid » qui résulte d'une démarche volontariste, en dehors de toute contrainte de la part de l'entreprise initiatrice. A cet égard, une étude des Réseaux pour le développement de l'entreprise  (37) note que « parce que l'essaimage a été englué dans les plans sociaux, son image positive n'a pas été mise en valeur. L'essaimage peut cependant apparaître comme un « levier » à la création de nouvelles entreprises. Il n'est plus alors entendu comme outil de gestion, prévisionnelle ou non, des ressources humaines. Il est aussi une source de développement personnel pour les salariés d'entreprises qui ont des projets de création (...) ».

La commission « Essaimage » du CNCE estime à 20.000 par an, le nombre d'entreprises nouvelles générées par des pratiques d'essaimage. Sur ces 20.000 entreprises créées, 5.000 résultent d'un essaimage dit « à froid », chiffre très faible en comparaison des 170.000 entreprises qui naissent, chaque année, en France.

La commission du CNCE note, par ailleurs, que le taux de réussite des entreprises issues d'un essaimage est généralement supérieur à la moyenne nationale (de 70 à 90 % selon les cas).

Ce rapide aperçu donne une image du gisement qui peut être exploité afin d'augmenter le nombre d'entreprises créées, chaque année, en France.

2.- LES VOIES DE DÉVELOPPEMENT DES PRATIQUES D'ESSAIMAGE « À FROID »

Le développement de l'essaimage suppose une forte mobilisation des différents acteurs concernés ainsi que certaines garanties offertes au salarié concerné, qui ont été évoquées supra.

En termes de financement, la mise en place d'une aide destinée aux salariés « essaimés » sur le même principe que l'ACCRE « ancienne version » est préconisée par le rapport précité des RDE. Favorable à cette orientation, votre Rapporteur estime qu'elle est satisfaite par les propositions précédentes.

Pour encourager plus spécifiquement l'essaimage, il considère qu'un mécanisme incitatif en faveur des entreprises qui développent de telles pratiques devrait être institué. A l'heure actuelle, les aides que ces dernières versent aux salariés sont rarement déductibles de leurs résultats tandis qu'elles représentent un produit imposable pour les bénéficiaires. Ainsi, « lorsqu'une entreprise accompagne ses salariés créateurs d'entreprise, notamment par une aide financière, celle-ci est normalement chargée et imposable de sorte que pour 100.000 francs versés, le salarié dispose de 60.000 francs nets qui coûtent 150.000 francs à l'entreprise » (38). Une telle situation n'est pas de nature à inciter les entreprises à développer des pratiques d'essaimage lorsqu'elles ne s'y sentent pas contraintes.

C'est pourquoi, votre Rapporteur préconise, dans la suite des propositions formulées par la commission du CNCE, d'offrir aux entreprises « essaimeuses » la possibilité de déduire de leurs bénéfices imposables les sommes qu'elles mettent à la disposition des créateurs d'entreprises, qu'il s'agisse ou non de salariés de l'entreprise. Cette possibilité serait ouverte que l'aide soit versée sous forme de donation (à hauteur de 100.000 francs au plus et dans la limite de 50 % des besoins de financement de la nouvelle entreprise et de 50 % des bénéfices de l'entreprise essaimeuse) ou qu'elle consiste en une souscription au capital de l'entreprise créée (à hauteur de 200.000 francs par projet et dans la limite d'une participation maximale de 30 % du capital). Dans les deux cas, il importe que l'entreprise créée soit réellement indépendante et non une simple filiale de l'entreprise essaimeuse, ce qui explique les limitations apportées au mécanisme.

Ces orientations doivent permettre d'appuyer les efforts des entreprises en faveur de la création de nouvelles activités et mettre fin à l'image d'une pratique assimilable, selon les termes du rapport des RDE, à une « voie de secours » mais bien plutôt comme un « processus de création d'entreprise générateur de nouvelles richesses » (39)

CONCLUSION

Ce rapport s'est voulu synthétique et n'a donc pas prétention à l'exhaustivité.

Privilégiant volontairement quelques pistes d'action jugées essentielles susceptibles d'entrer rapidement dans les faits et plaidant pour un « plan d'urgence » en faveur de la création de petites entreprises, l'auteur de ce rapport a conscience de ne pas avoir abordé d'autres leviers, les uns techniques ou réglementaires, les autres relevant davantage d'une action à long terme, afin d'améliorer l'environnement de la création d'entreprise et mieux diffuser l'esprit d'entreprise.

Parmi ces leviers, deux méritent d'être cités ici :

1 - L'implication du système scolaire et universitaire dans la préparation à l'entrepreneuriat. Les faiblesses françaises sont connues : très peu de diplômés de l'enseignement supérieur se tournent vers la création d'entreprise.

En dépit d'initiatives anciennes (HEC - Entrepreneurs) ou récentes, un hiatus immense continue d'exister entre les futurs diplômés et la création d'entreprise.

C'est donc à profit que l'on suivra les recommandations de M. Testard-Vaillant, auditionné pour ce rapport aux États-Unis, visant à « mettre en place et dans les plus brefs délais des formations spécifiquement destinée aux étudiants (ou aux enseignants-chercheurs) souhaitant créer une entreprise. Elles devraient en particulier couvrir les points suivants : élaboration d'un « business plan », connaissance de la législation en vigueur concernant la création d'entreprise, le recrutement de personnel, la fiscalité des entreprises, etc. »

Sans doute la question doit-elle être abordée en amont de l'enseignement supérieur, dès l'école, comme le plaide inlassablement M. Patrick Fauconnier, journaliste et observateur avisé de l'entrepreneuriat, qui s'indigne du peu de cas fait des qualités d'initiative et de comportement dans le cursus scolaire et prône la création d'un « livret d'initiative personnelle » à l'instar du fameux livret scolaire.

2 - L'innovation socio-économique par le secteur dit de « l'économie sociale » mériterait, elle aussi, des développements et un traitement spécifiques, bien qu'elle ne se situe pas directement dans le champ du sujet traité ici, celui du travail indépendant ou de la petite entreprise.

M. Hugues Sibille, délégué interministériel à l'innovation sociale et à l'économie sociale, après avoir estimé que « l'innovation technologique bénéficie d'un bien plus large soutien que l'initiative économique (entrepreneurship) et le partenariat de projet (partnership) » appelle à la création d'une « agence de valorisation des innovations sociales » en provenance, notamment du secteur associatif local.

Cette proposition mérite l'attention, d'autant que les frontières entre l'économie « classique » et l'économie « sociale » ne sont plus étanches et que les initiatives locales sont souvent, dans les deux cas, portées par les mêmes réseaux ou par des réseaux proches dans leurs valeurs et leurs méthodes.

Un plan global en faveur de la création de petites entreprises suppose, sur le plan politique :

_ un engagement personnel du Premier Ministre et du Gouvernement. Cette exigence, très souvent rappelée et demandée par les structures et réseaux d'appui aux créateurs, apparaît légitime.

Seul cet engagement peut déclencher la mobilisation de l'État, des partenaires sociaux, des élus locaux, des investisseurs potentiels en faveur d'une inversion nette et durable de la courbe aujourd'hui déclinante des créations d'entreprise.

_ une implication pérenne du Parlement ; au nom du collectif « Synergies pour la création d'entreprise », son délégué général, M. Henri Amouroux demande que « se crée un groupe parlementaire sur la création d'entreprise au sein de l'Assemblée nationale pour :

. promouvoir l'idée de la création d'entreprise comme vecteur de création d'emploi, d'innovation technico-économique et de cohésion sociale.

. construire et maintenir un courant d'échange entre les parlementaires et les acteurs de la création d'entreprises.

. diffuser analyses, réflexions et propositions au sein du Parlement.

. agir pour améliorer l'environnement juridique, fiscal et financier de la création d'entreprises. »

Convaincu de la justesse de cette proposition, votre Rapporteur déposera une demande de création d'un groupe d'études au sein de l'Assemblée nationale.

L'adoption rapide de certaines des mesures préconisées visant à lever les verrous les plus évidents à la création d'entreprise, la forte mobilisation des pouvoirs publics appuyant tous ceux qui localement oeuvrent, le plus souvent dans l'anonymat, au service de ce qu'ils estiment être une « cause » devrait permettre à terme, qu'elle soit aujourd'hui « volontaire » ou « subie », à la création d'entreprise de n'être plus, selon la jolie formule de Mme Marylise Lebranchu qu'« un projet individuel exaltant et socialement utile ».

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa séance du mardi 14 septembre 1999, la commission des Finances a examiné, en application de l'article 145 du Règlement de l'Assemblée nationale, le présent rapport d'information intitulé « Pour un plan d'urgence d'aide à la création de très petites entreprises ».

Après l'exposé du Rapporteur, une discussion s'est engagée.

M. Dominique Baert a souligné l'intérêt du rapport, notamment ses deux grandes idées : d'une part favoriser la création d'entreprise et d'autre part favoriser les plus petites d'entre elles. Les entreprises de zéro à neuf salariés constituent en effet la très grande majorité des entreprises alors que la densité des très petites entreprises est moins forte en France qu'à l'étranger. Dans le cadre de la politique de la ville, il convient de favoriser leur création en ayant à l'esprit que celle-ci peut favoriser l'emploi au c_ur des quartiers défavorisés. La politique en faveur des très petites entreprises doit comporter trois axes. En premier lieu, il convient de simplifier les procédures de création. L'idée des « maisons de l'entrepreneur », conçues comme des centres uniques, mérite d'être mise en _uvre à cette fin bien qu'elle puisse conduire à des problèmes de transfert de compétences, notamment de celles qui relèvent des greffes des tribunaux de commerce. Le tutorat doit accompagner la création des entreprises. Le deuxième axe de la politique en faveur de la création d'entreprises doit être d'alléger les conditions de gestion des très petites unités. La loi de finances pour 1999 a ainsi aménagé le régime fiscal de la micro-entreprise, afin de simplifier les obligations fiscales et comptables de très petites entreprises. Il faut poursuivre dans cette voie et faciliter l'embauche du premier salarié qui constitue un seuil psychologique important. Enfin, le troisième axe est de ne pas abandonner les petites entreprises dont la taille augmente. Le passage de neuf à dix salariés constitue un seuil financier important et s'avère en effet délicat pour nombre d'entre elles. Il est donc indispensable de lisser les différents seuils sociaux et financiers.

M. Jean-Jacques Jegou a considéré que l'exercice qui consiste à commenter un rapport à peine disponible était évidemment difficile et il a souhaité que les rapports puissent être distribués à l'avance. Pour d'aborder un tel sujet il convient de balayer toute idéologie. Les ultra-libéraux ne sont pas toujours des créateurs d'entreprises, loin s'en faut. A gauche, une évolution semble se dessiner ; d'ailleurs le Premier ministre a fait observer que tout ne peut être décidé par des lois. En France, c'est surtout et d'abord la culture d'entreprise qui fait défaut. Ainsi, il n'y a qu'1 à 2 % des élèves diplômés des grandes écoles de commerce qui créent des entreprises. Pourtant créer une très petite entreprise n'est nullement « ringard ». C'est toute une politique de formation et toute une culture qu'il convient de revoir pour aller à l'encontre de cette idée. Il faut donc valoriser l'idée d'entreprendre, encourager le parrainage et le tutorat, ainsi que le temps de travail partagé entre plusieurs entreprises. La difficulté de la mise en _uvre des mesures en faveur de la création d'entreprise réside en outre dans l'identification de projets pertinents. L'ACCRE n'a que très peu aidé à créer une véritable entreprise, mais souvent à assumer quelques investissements. Elle a suscité de nombreux espoirs qui, malheureusement, ont été souvent déçus. L'objectif de dégager les 100.000 premiers francs d'apports pour la création des entreprises est pertinent. Mais les outils fiscaux ne sont, bien entendu, pas à négliger. Des aides fiscales orientant l'épargne de proximité vers la création d'entreprises sont à développer. Enfin, les plans d'affaires et la recherche d'investisseurs providentiels -qui font souvent preuve d'un réel dynamisme- peuvent utilement compléter ces mécanismes.

M. Michel Destot a estimé que trois conditions étaient nécessaires à la réussite de la création d'entreprise :

- une volonté du porteur de projet ;

- des modalités de financement adaptées ;

- et la capacité de sélectionner de véritables entrepreneurs, puisque de nombreux projets étaient voués à l'échec dès le départ en raison de la personnalité de leur animateur, ce qui devait encourager la réflexion sur les dispositifs de formation et de sélection. Il convient aussi d'adapter le dispositif d'aide à la dimension et au potentiel de croissance du projet d'entreprise et savoir différencier les actions en fonction de ces critères. On peut ainsi s'interroger sur la composition des conseils d'administration. Il y a enfin un clivage entre les institutions relevant de la sphère économique et financière comme les Directions Régionales de l'Industrie, de la Recherche et de l'Environnement (DRIRE) ou l'ANVAR et ceux appartenant aux sphères sociale et de l'insertion professionnelle, dont les moyens d'action sont moins importants. Le rôle et les moyens de l'État doivent être indéniablement revus.

M. François Baroin a indiqué qu'il ne fallait pas mélanger les très petites entreprises et les PME classiques. Dans ce domaine l'idéologie n'est pas de mise, même si l'on peut se demander si le rôle de l'État n'est pas de lever les obstacles à la création d'entreprise plutôt que de mettre en place des structures plus ou moins redondantes. Par ailleurs, l'État entend-t-il se substituer aux collectivités territoriales défaillantes dans ce domaine ou à d'autres acteurs ? L'exemple des plates-formes d'initiative locale vaut-il constat général de la carence des chambres de commerce et d'industrie dans le dispositif de soutien ?

En réponse aux différents intervenants, M. Éric Besson, rapporteur, a remarqué que le transfert de certaines formalités des préfectures vers les centres de formalités des entreprises présents dans les chambres de commerce et d'industrie était également préconisé dans un récent rapport de l'Inspection générale des Finances. Cette proposition va dans le sens d'un regroupement des initiatives en faveur de la création d'entreprises au sein des maisons de l'entrepreneur. L'accompagnement de la création d'entreprise présente des faiblesses en France, tant en amont, c'est-à-dire lors de l'accueil du porteur de projet, qu'en aval, où il était quasiment inexistant, à la différence du Québec où ont lieu des expériences intéressantes, comme celles du tutorat.

Si l'on peut identifier de nombreux points d'accord avec M. Jean-Jacques Jegou, car dans l'action immédiate il convient effectivement de dépasser les clivages politiques, il n'en reste pas moins que des enjeux politiques surgissent parfois sur ce thème, comme par exemple dans la distinction entre la liberté formelle d'entreprendre et la liberté réelle, qui implique de reconnaître ce droit à chacun, quel que soit l'état de ses finances.

La sphère économique est en effet distincte de l'économie sociale qui relève d'un autre débat et dont la valeur n'est pas mise en cause. Si les mesures présentées dans le rapport ne sont pas radicalement originales pour la plupart d'entre elles, en revanche leur mise en _uvre constituerait une réelle innovation. S'agissant de l'ACCRE, si des dérives ont été constatées en raison notamment du caractère quasi automatique de son octroi, il serait excessif de charger ce mécanisme de tous les maux puisque, selon une étude de l'INSEE, 57 % des chômeurs bénéficiaires de cette aide au premier trimestre 1994 étaient toujours à la tête de leur entreprise à la fin de 1997.

Les investisseurs providentiels doivent être organisés et encouragés, notamment par le biais d'un aménagement de l'ISF en leur faveur. La sélection des chefs d'entreprise est un travail difficile mais il convient de favoriser l'adéquation maximale entre un homme et un projet sans se prononcer sur les qualités intrinsèques de l'individu. Ceci est la base de l'aide au montage d'entreprise, qui pose la question des moyens des chambres de commerce.

Au sein des très petites entreprises, il faut distinguer les véritables innovateurs de ceux qui interviennent dans un secteur technologiquement évolué comme celui du commerce électronique, sans pour autant faire appel à une technologie innovante. S'agissant des plates-formes, il n'est pas question d'empiler les strates des dispositifs d'aide mais simplement d'agréer quatre ou cinq réseaux nationaux dont font partie les plates-formes d'initiative locale, afin de permettre de les identifier clairement dans les « maisons de l'entrepreneur ».

Après que le Président Augustin Bonrepaux ait souhaité que le rapport d'information soit suivi d'effets concrets, la Commission a autorisé, conformément à l'article 145 du Règlement, sa publication.

A N N E X E

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LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

· Ministère de l'Économie, des Finances et de l'Industrie

- M. Frédéric Lavenir, Directeur-adjoint du cabinet du Ministre

- M. Stéphane Austry, Conseiller technique, cabinet du Ministre

- M. Mathieu Pigasse, Conseiller technique, cabinet du Ministre

· Secrétariat d'État à l'Industrie

- M. Jérôme Delpech, Directeur-adjoint du cabinet du Secrétaire d'État

· Secrétariat d'État aux PME, au Commerce et à l'Artisanat

- M. Nicolas Lefebvre, Directeur du cabinet de la Secrétaire d'État

- M. Claude Forget, Conseiller technique, cabinet de la Secrétaire d'État

- Mme Maïté Errecart, Conseiller technique, cabinet de la Secrétaire d'État

· Ministère de l'Emploi et de la Solidarité

- M. Nicolas Veron, Conseiller technique, cabinet de la Ministre

· Ministère de la Fonction publique, de la réforme de l'État et de la décentralisation

- Daniel Buna, Conseiller technique, cabinet du Ministre

· Délégation interministérielle à l'innovation sociale et à l'économie sociale

- M. Hugues Sibille, Délégué

· Comité interministériel pour les questions de coopération économique européenne (SGCI)

- M. Michel Guillbaud, Chef du secteur concurrence et aides d'État

- M. Paul Renaud,Conseiller chargé des politiques régionales

· Conseil national de la création d'entreprises

- M. Didier Kling, Président de la commission « Financement »

· Délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale (DATAR)

- Mme Paulette Pommier

· Agence nationale pour l'emploi (ANPE)

- M. Michel Bernard, Directeur général

- M. Jaeckle, Chargé de mission

· Agence nationale de valorisation de la recherche (ANVAR)

- M. Philippe Jurgensen, Président-directeur général

- M. Thomas Defaye

- M. Philippe Follenfant

· Caisse des dépôts et consignations

- M. Albert Ollivier, Directeur du programme PME

· Conseil supérieur de l'Ordre des experts comptables

- M. Dominique Ledouble, Président

- M. Coudenc

· Conseil national du crédit et du titre

- M. Henri Guillaume

· Agence pour la création d'entreprises (APCE)

- M. François Hurel, Directeur général

- Mme Perrine Danmanville 

- M. Jean-Luc Massol

· Union interprofessionnelle pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC)

- M. Denis Gautier-Sauvagnac, Président

- M. Jean-Pierre Revoil, Directeur général adjoint

· Association des Chambres françaises de commerce et d'industrie (ACFCI)

- M. François Duvergé, Directeur général

- M. Henry Pironin

- M. Gabriel Benoin

· Association permanente des Chambre des métiers (APCM)

- M. Philippe Ribeyron, Directeur du développement économique

· Banque de développement des PME (BDPME)

- M. Luc Matray, Directeur des partenariats

· Institut de financement du cinéma et des industries culturelles

- M. Bertrand Larrera de Morel

· France Initiative Réseau (FIR)

- M. Jean-Pierre Worms, Président

- M. Gaudot, Directeur général

· Association pour le droit à l'initiative économique (ADIE)

- Mme Maria Nowak, Présidente

· Réseau des Boutiques de gestion

- M. Marc Méry, Secrétaire général

· Réseau Entreprendre

- M. Marc Saint Olive, délégué général

· Fédération des clubs CIGALES (clubs d'investisseurs pour la gestion alternative et locale de l'épargne)

- M. Jacques Dugherra, secrétaire général

· Inspection générale des Finances

- M. Philippe Mareine, Inspecteur général des Finances

· M. Patrick Fauconnier, journaliste

· Épargne, financement, information pour les créateurs d'entreprise et d'activité (Eficéa)

- M. Cyril Quertier

· Synergies

- Mme Myriam Arles

· Prismes 95

- M. Christian Tubeuf

· Fondation Charles Léopold Meyer

- M. Philippe Amouroux, délégué général

· AFIC

- Mme Marie Annick Peninon-Bernard

· Personnes présentes au cours de la visite de la Chambre de commerce et d'industrie de Bobigny :

- M. Georges Guilbert (CCIP)

- M. Christophe Mercadier (CCIP)

- M. Pierre-Yves Tual (CCIP)

- Mme Laurence Lacaume (CCIP)

- M. Michel Koehl (CCIP)

- M. Charles Vavassori (AFB)

- Mme Nathalie Verdeille (Service économique de la mairie de Montreuil)

- Mme Marie-José Herbere (Service économique de la mairie de Rosny-sous-Bois)

- Mme Marina Duhourcq (France Télécom)

- M. Michel Lucas (Ordre des experts comptables)

- Mme Laurence Lebot (Société Exipro)

- M. Stephan Forest (Société Exipro)

- M. Claude Michel (Star Box)

- MM. Laval et Rogez (Groupe Mederic)

· Personnes présentes lors de la table ronde organisée à l'Assemblée nationale :

- M. Stéphane Gornes (Saveurs à la carte)

- Mme Dominique Rinaldi, Mme Claire Lanneau, M. Christophe Semanaz (Allo Assistance Baby Chou)

- M. Jean Emery (Tracetel S.A.)

- M. Alexandre Suquet (Normandie Service Interim)

- M. Jérôme Frizzera (Magique Emilie)

- Mme Olga Faure Olory (L'agrandi)

- M. Michel Bertholon (Association ANEF, Restaurant Aeronef-Service Traiteur)

- M. Dominique Lebailly (Alter)

- M. Jean-Dominique Paoli (Vidéonet)

- Mme Monique Bartzen (BL Santé)

- M. Pierre Douay (Image partage)

- M. Benoît Thieffry (Urbilog)

· Personnes rencontrées au cours du déplacement en Grande Bretagne (Londres) :

Ambassade de France à Londres

- M. Philippe O'Quin, Ministre conseiller pour les Affaires économiques et commerciales

- M. Bernard Bedas, Conseiller pour les Affaires sociales

- M. Henri Gibert, Conseiller pour la Science et la technologie

- Mme Laurence Colchester, attachée économique

Department of Trade and Industry

- MM. Jim Law, Roh Hathlia, Business Link Directorate

- M. Callum Johnston, Small and Medium Enterprise Policy Directorate

- M. Andrew Steele, Regional Assistance Directorate

- M. Trevor Raggatt, Mme Jane Law, Company Law

- M. Chris Simpson, Department for Education and Employment

- M. Gérard Ocquidant, UK Resident Group Executive, Mazars & Guérard

- M. Stephen Alambritis, Head of Press and Parliamentary Affairs, Federation of Small Businesses

- M. Richard Street, Executive Director, Business Division, The Prince's Trust

· Personnes rencontrées au cours du déplacement au Canada (Montréal) :

- Mme Françoise Le Bihan, Consule Générale de France

Fonds de solidarité des travailleurs du Québec

- M. Michel Coulombe, adjoint au premier vice-président exécutif et chef des investissements

- M. Jean-René Laforest, directeur général de Solideq

- Mme Marie-Noëlle Perrier, assistante

- M. Mustapha Magar, analyste de la SOLIDE

- Mme Danielle Blanchard, directrice générale du Fonds régional de solidarité de l'île de Montréal

- Mme Nancy Neamtan, Regroupement pour la relance économique et sociale du sud-ouest (RESO)

- M. Jacques Pelland, Président-directeur général du Centre d'entreprise et d'innovation de Montréal

- Mme Christiane Morin, directrice du Centre de suivi d'entreprises SAJE

- Mme Michelle Secour, présidente de la société Frëtt-Design

- M. Pierre Hubert, président de la société Autovue

- M. Denis Beaudry, directeur de Polyvalor

- M. Iraj Najafi, président de la société Luminon

- M. Jean-Charles Jouvet, conseiller, Regroupement pour la relance économique et sociale du sud-ouest (RESO)

- M. Claude Martel, président d'Inno-Centre

· Personnes rencontrées au cours du déplacement aux Etats-Unis (Washington) :

- M. Harry Katrichis, Chief Counselor, House Committee on Small Business

- M. William Gust, Anthem Capital, L.P. (Baltimore, MD), small business investiment company (SBIC)

- M. Maxine Lunn, Managing Director, Technology Company Assistance, Center for Innovative Technology (CIT)

- M. Matthias Duys, Virginia Economic Development Partnership (VEPD)

- M. Scott Mauger, chef de programme au département de politique scientifique, American Association for the advancement of science (AAAS)

- Mme Erika Fisher, Director, International Visitors Program, Small Business Administration (SBA)

- M. Edward Sybert, Director, Technology Advanced Program (TAP), Centre incubateur de l'Université du Maryland

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N° 1804.- RAPPORT D'INFORMATION de M. Eric BESSON, présenté en application de l'article 145 du Règlement par la commission des finances, Pour un plan d'urgence d'aide à la création de « très petites entreprises ».

() Bernard Brunhes - Eurothérapies de l'Emploi - Presses de la Fondation nationale des sciences politiques - 1999

() Sondage réalisé par l'IFOP pour le compte de l'APCE - mars 1998

() Entreprises en bref - juin 1999

() «Le financement de l'entreprise » - Conseil national du crédit et du titre - avril 1999

() Maria Nowak - Le Monde - 20 janvier 1998.

() Jean - Baptiste de Foucauld, Denis Piveteau - « Une société en quête de sens » - Éditions Odile Jacob - 1995

() Agence pour la création d'entreprise - rapport sur le profil des entrepreneurs

() « L'Expansion » - n° 538 - 5 décembre 1996

() Fondation Vivendi

() Rapport du Conseil national du crédit et du titre - « Le financement de l'entreprise » - avril 1999.

( ) Inspirées de l'excellent rapport du député Dominique Baert.

() M. Amartya Sen - Article paru dans la revue internationale du Travail (n° 136, 1997) et reproduit par « Alternatives Économiques » n° 165, décembre 1998

() M. Dominique Strauss-Kahn - « Challenges » - mai 1999

() « Alternatives Économiques » - n° 162 - septembre 1998

() « Alternatives économiques » - n°162 - septembre 1998

() « Evaluation des aides à la création d'entreprises » - Commissariat général du Plan - 1996

() « Entreprises en bref » - juin 1999

() Commission du CNCE (accompagnement des créateurs d'entreprise) - rapport d'étape - février 1999.

( ) « Leçons européennes » - Revue « Développement et emploi » - mars 1998.

() Vivre et Résister - Éditions Descartes et Cie, 1999.

() L'IATP, versé par les entreprises, représente environ 6 milliards de francs par an

() Colloque « La création d'entreprises : une affaire d'État ? » - novembre 1998

() « Du créateur d'entreprise au créateur d'emplois : la dynamique du succès » - janvier 1998

() « Propositions pour l'aide aux créateurs d'entreprises » - février 1999

() Groupe de travail coordonné par la Fondation pour le Progrès de l'Homme Charles Léopold Mayer et Eficea (Epargne, financement, information pour les créateurs d'entreprise et d'activité)

() D'après une estimation de l'Inspection générale des Affaires sociales

() Colloque organisé et présidé par Jean-Marie Bockel, député du Haut-Rhin - novembre 1998

() Sondage réalisé par l'IFOP pour le compte de l'APCE en mars 1998

() Colloque précité

() Une société en quête de sens - Editions Odile Jacob - 1995

() Colloque : « La création d'entreprise : une affaire d'État ? » - novembre 1998.

() « Profil et taux de survie des détenteurs et des non-détenteurs de prêts bancaires en création pure » - Observatoire APCE - mai 1999

() Rapport sur l'épargne de proximité - 1999

() Rappelons que les FCPR n'ont pas la personnalité morale, doivent être représentés par une société de gestion, ne sont pas assujettis au formalisme des assemblées et conseils des sociétés anonymes mais doivent être pourvus d'un commissaire aux comptes. En outre, ils peuvent, dans certaines conditions, faire l'objet d'un démarchage ou d'une publicité.

() A cet égard, il convient de préciser que le capital d'un investisseur n'est pas obligatoirement libéré en totalité dès l'origine du fonds : il peut n'être appelé qu'au fur et à mesure des opportunités d'investissement.

() « Création d'entreprise : étude internationale » - APCE - mai 1999

() « Les conditions de développement de l'essaimage » - rapport final des Réseaux pour le développement de l'entreprise (RDE) - avril 1998

() Exemple tiré du rapport de la commission « Essaimage » du CNCE

() « Les conditions de développement de l'essaimage » - rapport final des Réseaux pour le développement de l'entreprise (RDE) - avril 1998