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N° 2137

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 3 février 2000.

RAPPORT D'INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l'article 146 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES FINANCES, DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN (1)

sur

les moyens et la réforme de la Justice,

ET PRÉSENTÉ

PAR M. Patrick DEVEDJIAN,

Député.

ANNEXES

L I S T E D E S A N N E X E S

I. Liste des personnes auditionnées

II. Synthèse des propositions du rapport de M. Jean-Marie Coulon sur la procédure civile (janvier 1987)

III. Synthèse des propositions de la commission de réflexion sur la justice (juillet 1997)

IV. Propositions du rapport de M. Henri Nallet sur les réseaux pluridisciplinaires et les professions du droit

V. Propositions du rapport sur les réponses à la délinquance des mineurs (avril 1998)

VI. Propositions de la commission sur la réforme du droit de la famille (septembre 1999)

VII. Synthèse du rapport sur la magistrature « hors les murs »  - Analyse de la mobilité extra-professionnelle des magistrats (avril 1998)

VIII. Propositions du rapport d'enquête sur le fonctionnement du dispositif de protection des majeurs (juillet 1998)

IX. Propositions du groupe « recherches, confrontations et projets sur les mesures et sanctions pénales » (février 1999)

X. Fiche d'évaluation des magistrats

XI. Carte administrative et judiciaire métropolitaine

XII. Carte judiciaire du ressort de la cour d'appel de Douai

ANNEXE I

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Conseil supérieur de la magistrature

* Mme Marthe CORONT-DUCLUZEAU, secrétaire administrative du Conseil supérieur de la magistrature

* Mme Agnès LALARDRIE, secrétaire générale du Procureur général près la Cour de cassation

* M. Nicolas BENAL, ancien secrétaire général de la première présidence de la Cour de cassation

Ministère de la Justice

* M. Jean-Louis NADAL, inspecteur général des services judiciaires

* M. François FELTZ, doyen de l'inspection générale des services judiciaires

* M. Bernard de GOUTTES, directeur des services judiciaires

* M. Flavien ERRERA, chargé de mission sur la carte judiciaire

* M. Jean-Marie PAULOT, directeur de l'administration générale et de l'équipement

* M. René ELADARI, délégué général au programme pluriannuel d'équipement

Cour d'appel de Paris

* M. Jean-Marie COULON, premier président

* Mme Claire FAVRE, ancienne première présidente par intérim, présidente de chambre

* M. Alexandre BENMAKHLOUF, procureur général

* M. Henri-Charles ÉGRET, coordonnateur du service administratif régional

Tribunal de grande instance de Paris

* M. Jean-Pierre DINTILHAC, procureur de la République

Cour d'appel de Douai

* M. Jean-Paul COLLOMP, premier président

* M. Jean-Amédée LATHOUD, procureur général

Organisations professionnelles et organismes de recherche

* M. Dominique-Henri MATAGRIN, président de l'Association professionnelle des magistrats

* Mme Anne CRENIER-VADANO, présidente du Syndicat de la magistrature, M. Gilles SAINATI, secrétaire général

* Mme Christiane BERKANI, secrétaire générale de l'Union syndicale des magistrats, et M. François LEPLAT, conseiller national

* M. Antoine GARAPON, secrétaire général de l'Institut des hautes études de la justice

* Mme Élisabeth MOIRON BRAUD, membre du Conseil de l'Ordre des avocats

* M. Antoine GENTY, membre du Conseil de l'Ordre des avocats

* M. Michel BEAUSSIER, membre du Conseil de l'Ordre des avocats

* M. Jean REPIQUET, Barreau de Paris, liaison avec le CNB

* Mme Danielle MONTEAUX, Barreau de Paris, relations avec le Parlement et les Pouvoirs Publics

ANNEXE II

SYNTHÈSE DES PROPOSITIONS SUR LA PROCÉDURE CIVILE

(JANVIER 1997)

Rapport au garde des sceaux, ministre de la justice,
de M. Jean-Marie Coulon, président du tribunal de grande instance de Nanterre

A.- ORGANISATION JUDICIAIRE

1.- Élévation du taux de ressort à 30.000 F et du taux de compétence à 50.000 F.

2- Regroupement du contentieux des baux commerciaux devant le tribunal de grande instance.

3.- Spécialisation de certains tribunaux de grande instance et de certaines cours d'appel en matière de droit des marques.

4.- Institution du juge unique devant le tribunal de grande instance.

5.- Renforcement de la collégialité en appel.

B.- REPRÉSENTATION ET AIDE JURIDICTIONNELLE

6.- Adaptation des règles d'assistance et de représentation devant le tribunal d'instance.

7.- Modification des conditions de représentation devant le tribunal de commerce.

8.- Extension du principe de la représentation obligatoire devant les chambres sociales de la cour d'appel et de la Cour de cassation.

9.- Élargissement des pouvoirs du président du bureau d'aide juridictionnelle statuant seul.

10.- Organisation de la délégation des pouvoirs du président au sein du bureau d'aide juridictionnelle.

11.- Clarification du régime applicable à la procédure de retrait de l'aide juridictionnelle.

C.- MODES ALTERNATIFS DE RÈGLEMENT DES CONFLITS

12.- Distinction entre le retrait du rôle (prononcé à la demande des parties en pourparlers ou en cours de transaction), et la radiation (dont le caractère sanctionnateur serait renforcé).

13.- Aménagement d'une procédure sur requête devant le président du tribunal de grande instance afin de conférer force exécutoire à la transaction intervenue en dehors de toute instance de fond.

14.- Octroi du bénéfice de l'aide juridictionnelle à l'auxiliaire de justice qui parvient à la conclusion d'une transaction entre les parties en dehors de tout procès.

15.- En cas d'extinction de l'instance du fait d'une conciliation, allocation à l'avocat d'une rétribution au titre de l'aide juridictionnelle modulable pouvant aller jusqu'à l'allocation d'un taux plein.

D.- UN TRAITEMENT OPTIMISÉ DES CONTENTIEUX DE MASSE

16.- Suppression de la procédure d'injonction de faire.

17.- Introduction de la procédure d'injonction de payer devant le tribunal de grande instance.

18.- Allégement de la procédure de divorce par consentement mutuel.

E.- LE TRAITEMENT DE L'URGENCE

19.- Faculté pour le juge saisi d'une procédure de référé de fixer une date d'audience pour trancher le litige au fond.

20.- Traitement de l'appel de l'ordonnance de référé selon une procédure inspirée de la procédure à jour fixe devant la cour d'appel.

21.- Renforcement de l'effectivité de l'article 910 du nouveau code de procédure civile.

F.- UNE MEILLEURE INSTRUCTION DU PROCÈS PAR UNE PLUS GRANDE FORMALISATION DES ÉCRITURES

22.- Renforcement de l'exigence de formalisation des écritures : motivation en fait et en droit de l'assignation, et exposé des faits, moyens de preuve et de la règle de droit à l'appui de chacune des prétentions formulées dans les conclusions des parties.

23.- Obligation de récapituler les prétentions et moyens présentés par les parties au-delà d'un jeu de conclusion.

24.- Annexion d'un bordereau récapitulatif des pièces justificatives à chacune des écritures des parties.

25.- Reconnaissance d'une compétence de principe au magistrat de la mise en état pour statuer sur l'ensemble des exceptions de procédure.

26.- Adaptation des règles de la procédure de mise en état devant le tribunal de grande instance à l'institution du juge unique.

27.- Assignation devant le juge aux affaires familiales.

28.- Saisine de la cour d'appel par déclaration d'appel valant demande d'enrôlement.

29.- Défaut de conclusions dans le délai imparti sanctionné par la caducité de l'appel.

30.- Pouvoir du juge d'appel de relever d'office l'irrecevabilité des demandes nouvelles.

31.- Interdiction des nouveaux moyens et des nouvelles pièces dans les procédures d'appel sur renvoi de cassation.

32.- Développement de l'institution du juge chargé du contrôle des expertises.

33.- Meilleure maîtrise des délais et du régime financier des expertises judiciaires.

G.- LE JUGEMENT ET SON EXÉCUTION

34.- Allégement de la rédaction des jugements :

- faculté pour le juge d'exposer les prétentions et moyens des parties par référence aux écritures ;

- possibilité de répondre succinctement aux moyens qui sont écartés.

35.- Exécution immédiate des jugements rendus en première instance sauf exceptions légales et pouvoir du juge de l'écarter d'office ou à la demande des parties.

36.- Élargissement des causes de suspension de la décision exécutoire rendue en première instance par le premier président de la cour d'appel.

ANNEXE III

SYNTHÈSE DES PROPOSITIONS
DE LA COMMISSION DE RÉFLEXION SUR LA JUSTICE

(JUILLET 1997)

1.- POUR UNE POLITIQUE D'ACTION PUBLIQUE : TRANSPARENCE ET CONCERTATION

La recherche et la définition des conditions dans lesquelles l'application de la loi doit être engagée de manière coordonnée entre plusieurs autorités, compte tenu des circonstances et dans le respect de l'égalité entre les citoyens, constituent la politique d'action publique dont le principe est inscrit dans la loi.

En conséquence :

· le garde des sceaux conserve la responsabilité de cette politique et fixe publiquement les orientations générales ;

· le procureur général, dans un ressort élargi et homogène, anime et coordonne, compte tenu des réalités régionales ;

· le procureur de la République, dans un ressort départemental et en liaison avec les organismes de concertation, la met en _uvre localement.

La politique nationale se nourrit des informations venues des parquets et parquets généraux à l'occasion d'affaires particulières et par un rapport annuel alimentant un débat devant le Parlement à l'initiative du garde des sceaux.

Le principe de l'opportunité des poursuites s'applique dans le cadre d'une politique publique respectant l'égalité entre les citoyens. Il exclut toute décision prise par amitié, inimité ou intérêt.

Dans le cadre de la politique d'action publique, le garde des sceaux dialogue avec les procureurs généraux.

Il ne peut en aucun cas leur adresser des instructions de quelque nature que ce soit dans des affaires particulières.

Il dispose d'un droit propre de saisine de toute juridiction et de présentation d'observations par l'entremise d'un magistrat de la chancellerie ou d'un avocat.

Les classements sans suite sont motivés et notifiés. Contre ces classements et les refus d'étendre la saisine d'un juge d'instruction, un recours est ouvert, sauf aux personnes pouvant se constituer parties civiles, devant une commission comprenant des magistrats des trois plus hautes juridictions par l'intermédiaire du procureur général près la Cour de cassation.

2.- POUR UNE ÉVOLUTION DU STATUT DES MAGISTRATS - INDÉPENDANCE ET RESPONSABILITÉ

Les membres du parquet sont des magistrats inclus dans une hiérarchie.

Leur nomination intervient sur proposition du garde des sceaux et exige un avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature.

Les magistrats du parquet peuvent être mutés dans l'intérêt du service, sur avis conforme du Conseil.

Ces magistrats dont la parole est libre peuvent demander, pour des raisons de conscience, à être déchargés d'un dossier qui leur a été attribué dans le cadre du service qui leur a été confié.

Le Conseil supérieur de la magistrature comprend majoritairement des non-magistrats. Les magistrats sont élus dans des conditions permettant une représentation aussi large que possible.

Le Conseil supérieur de la magistrature est présidé par le Président de la République qui n'a pas voix délibérative mais peut demander de nouvelles propositions.

Le garde des sceaux n'en fait pas partie mais présente ses avis et propositions.

Le Conseil supérieur de la magistrature se réunit en trois formations : plénière, pour les magistrats du siège, pour les magistrats du parquet. Chaque formation peut être saisie de demande d'avis par le Président de la République.

Le Conseil supérieur de la magistrature, saisi par le garde des sceaux ou un chef de cour, statue disciplinairement dans les mêmes conditions pour tous les magistrats.

Il tient compte, le cas échéant, lors de promotions éventuelles, des décisions de justice ayant constaté la faute personnelle d'un magistrat.

Une réflexion doit être ouverte sur la spécificité de la fonction de jugement.

3.- RÉFORMES DE PROCÉDURE PÉNALE : PRIMAUTÉ DU JUDICIAIRE ET DROITS DE LA DÉFENSE

L'avocat doit intervenir à la première heure de la garde à vue puis à nouveau en cas de prolongation. Les interrogatoires pendant cette période sont enregistrés.

S'il n'est pas souhaitable d'ouvrir le droit à appel des décisions de mises en examen, du moins cette décision ne doit-elle intervenir que si la procédure de témoin assisté, qui doit être élargie, ne peut être utilisée.

La détention est décidée par une collégialité ne comprenant pas le juge d'instruction. Des limitations aux cas de mise en détention doivent être envisagées. Les chambres d'accusation doivent avoir les moyens d'exercer effectivement leurs pouvoirs. Les décisions d'indemnisation d'une détention doivent être motivées.

À terme, les missions d'enquête et juridictionnelles seront séparées.

La durée d'une information doit se heurter à des dates butoirs.

Les noms des mis en cause ne doivent pas être divulgués en cours d'enquête et de garde à vue.

Le principe de la publicité d'audiences en cours d'instruction doit être admis, sauf exception, en cas de décision :

· sur la détention ;

· sur la régularité de la procédure ;

· sur la durée de la procédure ;

· sur un refus d'accomplir certains actes.

La publication de l'image de personnes menottées ou entravées est prohibée.

Pour donner à la justice les moyens de son action, il faut renforcer le contrôle de la police judiciaire par les magistrats. Il est prévu :

· la présence dans chaque ministère concerné de magistrats de haut rang ;

· une prestation de serment des officiers de police judiciaire ;

· une inspection des missions de police judiciaire dirigée par un magistrat ;

· la compétence de la chambre d'accusation en matière disciplinaire.

4.- LA LIBERTÉ D'INFORMATION : PRÉSOMPTION D'INNOCENCE ET DROIT DES CITOYENS À L'INFORMATION

Il ne doit être dérogé à la liberté d'information, droit des citoyens, qu'exceptionnellement. Toutefois, la responsabilité pénale des entreprises de presse peut être recherchée. De même, les sondages sur la culpabilité sont prohibés.

La réparation des atteintes à la présomption d'innocence peut se faire par la voie civile, en étendant le champ d'application de l'article 9.1 du code civil, au besoin à l'initiative du parquet, et en accordant des facilités de preuve en matière de radio et de télévision.

Une meilleure information sur la vie judiciaire passe par des débats publics en cours d'instruction et par la création de cellules de communication.

La commission recommande :

· aux responsables de presse d'élaborer une charte rédactionnelle par entreprise ;

· la création d'une instance de réflexion et de coordination permettant un examen des situations litigieuses rencontrées ;

· la rédaction d'une grande loi sur la presse mettant en application le principe tel qu'il est énoncé par la Convention européenne des droits de l'homme.

ANNEXE IV

PROPOSITIONS DU RAPPORT SUR LES RÉSEAUX PLURIDISCIPLINAIRES ET LES PROFESSIONS DU DROIT

(JUILLET 1999)

Rapport au garde des sceaux, ministre de la justice,
de M. Henri Nallet, parlementaire en mission

· Définition législative des réseaux pluridisciplinaires fondée sur la liberté d'association ;

· création d'un comité national de déontologie des réseaux interprofessionnels ;

· obligation de transparence des réseaux à l'égard du comité national de déontologie, des ordres et des clients ;

· notification des accords et conventions passés entre les professionnels des réseaux au comité national de déontologie ;

· nullité de tout accord ou convention non déclarés ;

· élargissement du pouvoir de vérification des ordres professionnels sur les réseaux ;

· consécration de l'indépendance des avocats et des commissaires aux comptes par :

_ la mise en place d'un régime d'incompatibilité par nature de missions ;

_ l'interdiction du partage des honoraires ;

· respect des déontologies réciproques en matière de conflit d'intérêt, de secret professionnel et de publicité par :

_ la publication des normes de choix des clients ;

_ la réaffirmation du caractère absolu du secret de l'avocat ;

_ l'alignement de la publicité sur les règles auxquelles sont soumis les avocats ;

· encouragement aux structures sociétales d'exercice par :

_ la création de holdings ;

_ l'ouverture des sociétés en participation aux personnes morales ;

_ l'ouverture du capital des sociétés d'avocat par des certificats d'investissement ;

_ des mesures fiscales facilitant le regroupement des structures ;

_ le passage plus facile à l'impôt sur les sociétés ;

_ le développement du partenariat par la suppression de la prestation compensatrice prévue par la loi du 31 décembre 1990 ;

· ouverture du barreau aux juristes d'entreprise.

ANNEXE V

PROPOSITIONS DU RAPPORT SUR LES RÉPONSES
À LA DÉLINQUANCE DES MINEURS

(AVRIL 1998)

Rapport au Premier ministre de la mission interministérielle sur la prévention et le traitement de la délinquance des mineurs dirigée par Mme Christine Lazerges et M. Jean-Pierre Balduyck, parlementaires en mission

· Doter le budget du ministère de la justice de crédits budgétaires bien supérieurs ;

· réformer la carte judiciaire ;

· doter le ministère de la justice d'un outil statistique permettant une évaluation complète de l'activité des juridictions pour mineurs ;

· valoriser la justice des mineurs par une dissociation accrue du grade et de la fonction ;

· faire informer les enfants dès l'école élémentaire, par des assistants de justice, des principes de base de l'ordonnance du 2 février 1945 concernant la responsabilité pénale des mineurs ;

· effectuer un bilan de l'application de la loi du 1er juillet 1996 dans le cadre d'une évaluation globale du traitement des procédures en temps réel concernant les mineurs ;

· étendre le domaine d'indemnisation des commissions d'indemnisation des victimes d'infractions pénales aux destructions, dégradations ou détériorations de véhicules ;

· remplacer le terme de « classement sans suite » par celui de « suspension des poursuites sous conditions » dès lors qu'une réponse est apportée par le parquet à un acte de délinquance commis par un mineur ; procéder à un comptage statistique distinct ;

· coordonner les interventions des magistrats du siège et du parquet en ce qui concerne l'audiencement des affaires ; diminuer les délais d'audiencement ;

· renforcer, après évaluation des besoins, certains parquets des mineurs ; se doter à cet effet d'éléments de mesure de leur activité ; répondre rapidement aux vacances de postes de substituts des mineurs ;

· généraliser les « délégués du procureur » qui doivent être mieux recrutés et formés et dont les conditions de rémunération doivent être précisées ;

· généraliser les conventions entre les parquets, qui du fait de l'absence d'un tribunal pour enfants dans leur ressort, n'ont pas compétence pour les affaires des mineurs et ceux qui ont une compétence exclusive ;

· constituer des parquets de mineurs dans toutes les juridictions dans un délai de 18 mois ;

· mettre en cohérence l'action des parquets d'un même ressort au niveau du parquet général ;

· mettre en place une permanence de jour spécialisée pour les mineurs pour chaque parquet ;

· désigner les magistrats du parquet spécialement chargés des mineurs compte tenu de l'intérêt qu'ils portent aux questions de l'enfance et de leurs aptitudes ;

· répondre à tous les actes de délinquance commis par des mineurs portés à la connaissance des parquets ;

· recourir plus largement aux mesures de médiation et de réparation pénales ;

· mettre en _uvre une politique volontariste d'habilitation d'associations dont l'un des objets serait d'exécuter des mesures de réparation ;

· ouvrir aux mineurs délinquants la faculté d'être assistés par un conseil lors d'une action préjuridictionnelle ; faciliter la conclusion de conventions entre les ordres d'avocats et les juridictions sur ce point ;

· ouvrir parallèlement le bénéfice de l'aide juridictionnelle dès l'intervention des parquets ;

· encourager la création de maisons de la justice et du droit dans les quartiers en difficulté pour en tripler le nombre dans un délai de trois ans ;

· favoriser les échanges avec les partenaires des parquets pour que ceux-ci soient sensibilisés à leurs priorités et afin que ces derniers ne soient sollicités qu'à bon escient ;

· maintenir un équilibre entre les missions du siège et du parquet et institutionnaliser au sein de chaque tribunal pour enfants un organe de concertation pour veiller au maintien de cet équilibre, organiser l'audiencement, évaluer les flux et communiquer sur le fonctionnement de la justice pénale des mineurs ;

· expliquer aux forces de l'ordre les décisions prises par les juges des enfants particulièrement lorsqu'un mineur revient dans son quartier après avoir fait l'objet d'un déferrement ; inciter les juges des enfants à se rendre dans les commissariats de police et les brigades de gendarmerie pour expliquer leur activité ; mettre au point des formations communes entre les magistrats du siège et les agents des forces de sécurité ;

· augmenter sensiblement le nombre de juges des enfants et de greffiers ;

· réexaminer la carte des tribunaux pour enfants dans le sens de leur regroupement ;

· rendre obligatoire pour les juges des enfants la tenue d'audiences civiles et pénales dans les tribunaux d'instance du ressort et dégager les moyens à cette fin ;

· revoir les conditions de nomination des juges des enfants afin que ne puissent être nommés à ces fonctions que des magistrats particulièrement compétents et motivés et que la rotation des postes permette une durée d'exercice professionnel raisonnable ;

· désigner le juge d'instruction chargé des affaires de mineurs compte tenu de l'intérêt qu'il porte aux questions de l'enfance et de ses aptitudes ; éviter les rotations trop rapides ;

· nommer des vice-présidents chargés des fonctions de juge des enfants qui aient exercé auparavant les fonctions de juge des enfants ;

· désigner le magistrat délégué à la protection de l'enfance compte tenu de l'intérêt qu'il porte aux questions de l'enfance et de ses aptitudes ;

· affecter dans les juridictions pour mineurs des assistants de justice ;

· affecter dans les juridictions pour mineurs des emplois-jeunes, ces derniers devant être financés à 100 % par l'État ; généraliser les conventions entre l'Éducation nationale et la justice pour mettre à la disposition des juridictions pour mineurs des emplois-jeunes ;

· inciter la protection judiciaire de la jeunesse et le secteur privé habilité à proposer un plus grand nombre de mesures de réparation, ces dernières devant être requises par les parquets ;

· inciter les juges des enfants à trouver des postes de travail d'intérêt général qui rendent plus visible l'action de la justice des mineurs et envisager que des peines de travail d'intérêt général soient exécutées au sein de l'institution policière ;

· proposer des formations regroupant magistrats du siège, du parquet, gendarmes et policiers spécialisés, travailleurs sociaux ; diffuser un guide méthodologique des potentialités offertes par les textes à tous les magistrats du siège spécialisés ;

· établir des conventions entre les juridictions pour mineurs et les services éducatifs concernant les conditions précises dans lesquelles les mesures décidées par les juges sont prises en charge : présence des services éducatifs à l'audience, délais de mise en _uvre de la mesure, compte rendu au juge ;

· réactiver l'institution des « délégués bénévoles à la liberté surveillée » ;

· généraliser à toutes les juridictions pour mineurs l'institution d'un « tableau de bord » dans chaque cabinet de juge des enfants ;

· institutionnaliser le rôle de coordination et de représentation d'un magistrat dans chaque tribunal pour enfants ;

· inscrire dans le code de l'organisation judiciaire l'obligation pour chaque tribunal pour enfants d'établir un rapport annuel sur son activité ;

· conférer au magistrat délégué à la protection de l'enfance à la cour d'appel un rôle de coordination et de contrôle dans le fonctionnement des juridictions pour mineurs ;

· décharger la protection judiciaire de la jeunesse de l'exécution des décisions des juges des enfants prises au titre de l'assistance éducative pour les mineurs de moins de 13 ans ;

· élargir la gamme des réponses éducatives par la mise en _uvre d'un dispositif départemental Protection judiciaire de la jeunesse/secteur privé habilité ;

· proposer dans chaque département des mesures de réparation qui pourront être mises en _uvre tant par la Protection judiciaire de la jeunesse que par le secteur privé habilité ;

· créer à l'initiative de la Protection judiciaire de la jeunesse des « classes ouvertes » dans chaque département ;

· mettre en place un dispositif départemental d'accueil d'urgence ;

· créer au plan national une vingtaine d'internats, gérés soit par la protection judiciaire de la jeunesse, soit par le secteur privé habilité, et implantés par priorité dans les départements les plus sensibles ;

· maintenir les foyers d'hébergement, mais les renforcer dans le sens d'une présence éducative soutenue auprès des jeunes ;

· développer les solutions d'éloignement et de rupture : unités à encadrement éducatif renforcé, familles d'accueil et lieux de vie ;

· augmenter d'une manière très significative les crédits et les postes budgétaires de la protection judiciaire de la jeunesse ;

· déconcentrer la gestion des personnels ;

· donner plus de souplesse dans la gestion et le recrutement des personnels ; encourager l'affectation des agents par fiche de poste ; recherche de la mixité des équipes ; promouvoir le recours à des contractuels ; aménager des passerelles entre la protection judiciaire de la jeunesse et d'autres administrations, pour favoriser la mobilité des éducateurs ; créer des équipes « d'éducateurs placés » au sein des directions régionales de la protection judiciaire de la jeunesse ;

· réserver le recrutement des personnels éducatifs de la protection judiciaire de la jeunesse aux détenteurs d'un diplôme de travail social ;

· refondre profondément la carte pénitentiaire ; installer progressivement et systématiquement dans chaque maison d'arrêt, des petits quartiers de 20 à 25 places, réservés au mineurs et aux jeunes majeurs ayant commencé l'exécution de leur peine pendant leur minorité ;

· adapter dans les quartiers de mineurs le régime de détention et les règles relatives à l'individualisation des peines ; intégrer des quartiers de mineurs dans tous les établissements du programme « 4.000 » ;

· fermer le centre de jeunes détenus de Fleury-Mérogis aux mineurs et le transformer en établissement exclusivement réservé aux jeunes majeurs de 18 à 21 ans ; interdire immédiatement le recours au quartier disciplinaire des adultes pour l'exécution des sanctions des mineurs et jeunes majeurs ;

· développer le régime de la semi-liberté ;

· expérimenter le recours à l'exécution de la peine sous le régime du placement sous surveillance électronique ;

· modifier le code de procédure pénale pour que le juge des enfants soit saisi pour avis pour l'exécution d'une peine n'excédant pas un an, dès lors qu'elle est prononcée par une juridiction spéciale pour mineurs ;

· donner la possibilité au juge de l'application des peines de saisir le service éducatif auprès du tribunal pour assurer le suivi d'un mineur dans le cadre de la libération conditionnelle ;

· affecter sur des postes fixes au sein des quartiers des mineurs des surveillants volontaires, motivés, ayant reçu une formation complémentaire ;

· concrétiser la mission globale de réinsertion de l'administration pénitentiaire en prévoyant de nouveaux postes d'enseignants, en développant des activités physiques et sportives, avec la possibilité de stages sportifs en extérieur, et en renforçant l'intervention de l'inter-secteur de psychiatrie.

ANNEXE VI

PROPOSITIONS DE LA COMMISSION
SUR LA RÉFORME DU DROIT DE LA FAMILLE

(SEPTEMBRE 1999)

Propositions pour un droit adapté aux réalités et
aux aspirations de notre temps

Rapport au garde des sceaux, ministre de la justice,
du groupe de travail présidé par Mme Françoise Dekeuwer-Deffossez,
Professeur à l'Université de Lille II

Le rapport Rénover le droit de la famille : propositions pour un droit adapté aux réalités et aux aspirations de notre temps a été officiellement remis mardi 14 septembre 1999 à Élisabeth Guigou, ministre de la justice, par madame le professeur Françoise Dekeuwer-Defossez.

Ce rapport est le résultat du travail mené par le groupe de travail installé à la Chancellerie par le garde des sceaux le 31 août 1998.

FILIATION

PRINCIPES GÉNÉRAUX

Abandonner les notions de filiation légitime et naturelle pour achever l'égalité des filiations. Conserver la présomption de paternité du mari qui donne un sens au mariage. Supprimer les inégalités successorales touchant l'enfant adultérin. Inscrire dans le code civil la possibilité de reconnaître l'enfant avant la naissance. Supprimer la possibilité pour les parents de demander le secret de leur identité lors de la remise de l'enfant aux services sociaux, lorsque la filiation de l'enfant est déjà établie à leur égard. Harmoniser les délais et la limitation des titulaires des actions relatives à l'établissement ou à la contestation d'une filiation autour de leurs objectifs respectifs. Réduire dans un but de simplification le nombre des actions judiciaires relatives à la filiation. Maintenir l'interdiction de contester la filiation des enfants nés de tiers donneur grâce à une assistance médicale à la procréation et fonder la filiation sur l'engagement à la procréation médicalement assistée. Maintenir, dans des conditions étroites, une action permettant, sans établir la filiation, d'obtenir des ressources pour l'enfant.

MATERNITÉ

Admettre l'établissement de la filiation maternelle par la seule indication du nom de la mère dans l'acte de naissance de l'enfant. Conserver le principe selon lequel l'indication du nom de la mère dans l'acte de naissance est une faculté et non une obligation. Conserver la possibilité d'entrer anonymement dans un établissement médical pour y accoucher. Abolir l'interdiction d'établir judiciairement la maternité en cas d'accouchement anonyme. Organiser clairement une voie concurrente à l'accouchement anonyme qui permette la conservation de l'identité de la femme dans la confidentialité. Favoriser une mise en _uvre réversible du droit à la discrétion de la femme qui accouche.

PATERNITÉ

Conserver la reconnaissance comme mode d'établissement volontaire de la filiation hors mariage. Libérer l'établissement forcé de la paternité des dernières restrictions, en conservant celles-ci seulement lorsque l'homme poursuivi est décédé.

CONTESTATION DE LA FILIATION

Réduire les délais de contestation d'une filiation au nom de la vérité à cinq ans en cas de possession d'état conforme au titre légal et à dix ans dans les autres cas. Réserver la possibilité de contester une filiation à des personnes précises dès lors que l'enfant bénéficie d'une possession conforme à son titre.

LE NOM

Conserver la transmission du nom du père comme dénominateur commun des filiations établies conjointement par les parents. Conserver la possibilité de porter à titre d'usage un double nom, non transmissible, composé de l'addition du nom des deux parents et inscrire cette possibilité dans le code civil. Donner la possibilité aux parents et à l'enfant de changer de nom sous contrôle judiciaire pour prendre le nom du parent qui ne lui a pas transmis le sien. En cas de changement dans la filiation, autoriser l'enfant, sous contrôle du juge, à conserver le nom qu'il portait précédemment.

AUTORITÉ PARENTALE

PRINCIPES GÉNÉRAUX

Conserver le terme d'autorité parentale. Souligner le caractère intangible de l'autorité parentale en affirmant que « hors disposition légale ou décision judiciaire, nul ne peut faire obstacle à l'exercice par les père et mère de leurs devoirs de parents, ni les dispenser de leur accomplissement ». Reconstruire les règles de l'autorité parentale à partir des principes d'égalité entre enfants et coparentalité. Dans toutes les familles construites hors mariage : poser le principe que les père et mère exercent en commun l'autorité parentale dès lors que la filiation a été établie dans l'année de la naissance. Construire un droit commun de la séparation en regroupant au titre de l'autorité parentale toutes les dispositions relatives à l'autorité parentale dans les familles désunies.

AUTORITÉ PARENTALE ET SÉPARATION

Poser le principe que chacun des parents doit respecter les liens de l'enfant avec l'autre parent. Inscrire dans les textes que quelles que soient les modalités d'exercice de l'autorité parentale, chacun des père et mère doit maintenir des relations personnelles avec l'enfant. Affirmer que « le divorce n'emporte par lui-même aucun effet sur les droits et devoirs des parents à l'égard de leurs enfants, ni sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale ». Dans tous les cas de séparation (en particulier, quel que soit le type de divorce), permettre aux père et mère de soumettre à l'homologation du juge aux affaires familiales une convention organisant les modalités d'exercice de l'autorité parentale. Supprimer le caractère obligatoire de la mention d'une résidence habituelle et permettre un partage de l'hébergement. Assurer le respect de l'autorité parentale par les tiers, notamment à l'égard du parent qui ne vit pas quotidiennement avec l'enfant. Garantir le droit de l'enfant à conserver des relations personnelles avec ses deux parents en prévoyant que tout changement de résidence de l'enfant qui entraîne un réaménagement des relations entre l'enfant et l'un de ses parents, nécessite l'accord des père et mère. Prévoir qu'en cas de violation manifeste et réitérée par un des parents des droits et devoirs de l'autre parent, le juge peut ordonner une rencontre entre les père et mère en présence d'un médiateur.

LES TIERS ET L'AUTORITÉ PARENTALE

Réaffirmer l'importance des relations personnelles entre l'enfant et ses grands-parents en en faisant un droit à l'enfant. Affirmer le droit de l'enfant à des relations personnelles avec ses frères et s_urs. Reformuler les textes de façon positive pour permettre à l'enfant de conserver, dans son intérêt, des relations personnelles avec certains de ses proches (notamment avec le beau-parent). Construire un statut du tiers chargé de prendre l'enfant en charge. Favoriser la collaboration entre parents et tiers en créant un système de mandat permettant au tiers (notamment au beau père) de passer tel acte ou telle catégorie d'actes. Elargir les possibilités de prise en charge de l'enfant par un tiers (beau-parent ou grand-parent notamment) en cas de décès d'un des parents. Donner au tiers à qui l'enfant a été confié la possibilité de demander au juge aux affaires familiales les pouvoirs nécessaires pour accomplir sa mission. Assouplir les règles de la délégation volontaire et de la délégation « forcée » de l'autorité parentale. Favoriser une collaboration entre les parents et le tiers auquel l'autorité parentale a été déléguée en permettant au juge d'aménager un partage entre eux de cette autorité.

LES DROITS DE L'ENFANT

Poser en principe que les père et mère associent l'enfant aux décisions qui le concernent, en considération de son âge et de son degré de maturité. Supprimer le critère de discernement et affirmer la possibilité d'une audition de l'enfant quel que soit son âge. Reconnaître à l'enfant de plus de treize ans le droit d'être entendu dans toute procédure qui le concerne. Mieux encadrer procéduralement l'audition de l'enfant. Donner au ministère public le pouvoir de demander l'émancipation de l'enfant. Revaloriser le rôle du Parquet en matière de protection civile de l'enfant.

LE MARIAGE

Fixer à dix-huit ans, pour les femmes comme pour les hommes, l'âge requis par la loi pour se marier. Simplifier les règles organisant le consentement de la famille au mariage des époux mineurs. Réserver au ministère public le droit de faire opposition au mariage. Actualiser le droit des nullités du mariage.

LE DIVORCE

PRINCIPES GÉNÉRAUX

Ne pas adopter, tout au moins sans réflexion complémentaire, de procédure de divorce sans contrôle judiciaire. Créer un tronc commun procédural retardant après l'audience de conciliation l'énoncé de la cause du divorce afin de favoriser l'acceptation d'un divorce sans torts. Permettre aux époux, à tous les stades de la procédure, de saisir le juge de leur accord sur le principe d'un divorce sans torts. Permettre à tout moment aux époux de saisir le juge aux affaires familiales de leur accord, complet ou non, sur les différents aspects du divorce, et notamment sur la prestation compensatoire. Inciter les juges aux affaires familiales à proposer le recours à la médiation familiale lorsque les époux sont en conflit au sujet des enfants.

LES DIFFÉRENTES PROCÉDURES

Autoriser les époux à demander le divorce, s'ils le souhaitent, par requête conjointe plutôt que par assignation dans tous les cas de divorce. Supprimer les mesures urgentes non contradictoires.

Le divorce sur requête conjointe

N'imposer qu'une seule comparution devant le juge aux affaires familiales dans les divorces sur requête conjointe, lorsque les accords des époux sont libres, complets et équilibrés.

Le divorce sur demande acceptée

Réaménager la procédure de divorce demandé et accepté afin de la rendre attractive et sans risque.

Le divorce pour rupture de la vie commune

Réduire à trois ans le délai au terme duquel la séparation de fait des époux ou l'altération des facultés mentales justifie le prononcé du divorce. Rééquilibrer les conséquences du divorce pour rupture de la vie commune, afin qu'il ne soit pas pénalisant pour le demandeur, tout en tenant compte de ce qu'il est imposé par un époux à l'autre.

Le divorce pour faute

Conserver le divorce pour faute, en supprimant les avantages financiers liés à la notion de « torts exclusifs ». Donner au juge les moyens de protéger l'époux(se) et les enfants contre la violence de l'autre conjoint, le cas échéant en interdisant à ce dernier de paraître au domicile commun, même en dehors de toute procédure de divorce. Réaffirmer le droit pour un époux de quitter le domicile commun en cas de violence conjugale sans attendre la requête en divorce.

LES EFFETS PATRIMONIAUX DU DIVORCE

Clarifier les relations patrimoniales des époux pendant l'instance en divorce : mettre fin à la solidarité ménagère ; préciser les conditions financières de l'occupation du logement commun ; fixer à la date de l'ordonnance de non-conciliation la date des effets pécuniaires du divorce entre les époux. Réputer éteinte toute créance entre époux non réclamée au moment du divorce. Enfermer la liquidation des intérêts patrimoniaux des époux dans le délai d'un an après le divorce, pouvant être porté à trois ans par décision du juge aux affaires familiales. Procéder à une étude complète des incidences des règles fiscales actuelles, et les repenser dans un esprit de souplesse et d'équité envers les époux divorçants.

LA PRESTATION COMPENSATOIRE

Imposer à la prestation compensatoire la forme d'un capital, sauf décision spécialement motivée lorsque le créancier n'a aucune source de revenus. Intégrer le versement de la prestation compensatoire à la liquidation du régime matrimonial. Permettre la révision à la baisse des prestations compensatoires sous forme de rente viagère en cas de modification notable de la situation respective des parties. Déduire de plein droit le montant de la pension de réversion de la rente de prestation compensatoire au décès du débiteur. Prélever le solde sur les biens de la succession. Exiger des époux des propositions concrètes au regard du partage des biens et de la prestation compensatoire dès l'introduction de l'instance.

LA PROTECTION PATRIMONIALE DU CONJOINT

Les droits du conjoint survivant

Reconnaître au conjoint des droits en propriété dans la succession en concours avec les père et mère du défunt, et avant ses frères et s_urs. Reconnaître au conjoint survivant un usufruit portant sur la totalité des biens successoraux. Ouvrir à tous les descendants du défunt la faculté d'exiger leur part de réserve en pleine propriété, sous condition de faire abandon au profit du conjoint de leurs droits dans la quotité disponible. Consacrer le droit du conjoint survivant au maintien de son logement. Affirmer que le devoir de secours entre époux survit à la charge de la succession au profit du conjoint qui se trouve dans le besoin à la suite du décès.

LES DONATIONS ENTRE ÉPOUX

Déclarer irrévocables les donations de biens présents entre époux, même dans le cadre du divorce. Valider la pratique des donations de biens à venir entre époux. Décider que seront révoquées de plein droit par le divorce toutes les dispositions à cause de mort entre époux. Soumettre au droit commun les donations déguisées entre époux. Abroger les présomptions d'interposition de personnes.

LE CHANGEMENT DE RÉGIME MATRIMONIAL

Supprimer le contrôle judiciaire sur le changement de régime matrimonial.

L'OBLIGATION ALIMENTAIRE

Créer un titre IX bis dans le livre Ier du code civil, consacré aux « obligations nées de la parenté et de l'alliance », reprenant l'ensemble des dispositions relatives aux obligations alimentaires et à l'obligation parentale d'entretien. Encourager la fixation amiable du montant de l'obligation parentale d'entretien dans le cadre d'une convention judiciairement homologuée ou en dehors de toute procédure judiciaire. Mettre en place un groupe de travail chargé de réfléchir à l'élaboration de barèmes indicatifs pour le calcul du montant de l'obligation parentale d'entretien.

LA PROCÉDURE DEVANT LE JUGE AUX AFFAIRES FAMILIALES

Unifier et simplifier les procédures devant le juge aux affaires familiales. Concilier efficacité et équité dans les procédures d'urgence. Organiser la participation personnelle des parties au débat judiciaire.

LE RESPECT DES OBLIGATIONS FAMILIALES

Développer la médiation familiale avant toute saisine du juge. Permettre au juge aux affaires familiales d'ordonner une mesure d'investigation d'orientation éducative lorsque la situation familiale est susceptible de mettre en danger la santé, la sécurité ou la moralité de l'enfant Exploiter toutes les ressources des sanctions civiles, en particulier pécuniaires. Imposer une rencontre entre les parents en présence d'un médiateur lorsqu'un conflit aigu et récurrent ne peut être résolu autrement. Utiliser pleinement les sanctions alternatives à l'emprisonnement en matière de délits familiaux. Maintenir l'incrimination d'abandon pécuniaire de famille et son caractère de délit intentionnel. Incriminer le fait pour un parent, de transférer son domicile en emmenant un enfant résidant avec lui sans en avoir au préalable averti l'autre parent exerçant conjointement l'autorité parentale.

ANNEXE VII

SYNTHÈSE DU RAPPORT SUR LA MAGISTRATURE
« HORS LES MURS »

Analyse de la mobilité extra-professionnelle des magistrats

(AVRIL 1998)

Rapport au garde des sceaux, ministre de la justice,
par Mme Anne Boigeol

Par rapport aux autres corps de l'État, qui ont construit une partie de leur pouvoir sur leur capacité à se déployer à l'extérieur, les magistrats sont peu nombreux à franchir leurs frontières professionnelles pour aller exercer d'autres fonctions, « hors les murs » de l'institution judiciaire. Et pourtant cette mobilité, analysée principalement à partir des détachements, s'est tendanciellement développée, et surtout diversifiée, depuis la seconde guerre mondiale, plus particulièrement depuis la Vème République. Au cours de cette période les détachements « traditionnels » vers les colonies, puis dans le cadre de la coopération, ont progressivement disparu au profit de mobilités plus variées, allant de l'exercice de fonctions de conseillers dans des administrations, des organisations internationales, et même des entreprises privées, à celles de sous-préfet. Si l'essentiel des mobilités se fait sur des postes juridiques, certaines d'entre elles, plus récentes, concernent des positions plus généralistes.

Le phénomène est d'autant plus intéressant que la mobilité est étrangère à l'habitus professionnel, la magistrature ayant construit son autonomie sur une culture de fermeture relative. Non seulement elle est restée méfiante à l'égard de l'intrusion de tout corps étranger, ce qui ne la différencie pas vraiment des autres corps de l'État, mais surtout elle est restée très réticente à ce que ses membres quittent provisoirement l'univers bien délimité des juridictions pour aller se confronter à d'autres mondes.

Dans ces conditions, il n'est pas surprenant que les magistrats mobiles ne soient pas tout à fait représentatifs de la magistrature dans son ensemble. Ils ont une trajectoire un peu différente de celle de la majorité des magistrats issus de la filière classique études de droit-ENM-magistrature. Ils ont parfois exercé d'autres fonctions avant de devenir magistrat, ou encore diversifié leurs études, en imaginant d'autres horizons professionnels. Ils ont donc déjà, au départ, c'est du moins le cas d'un certain nombre d'entre eux, une ouverture, contrainte ou voulue, qui peut les prédisposer à tenter d'autres aventures. Mais les magistrats mobiles ont également d'autres caractéristiques qui contribuent à en faire un groupe un peu particulier. La plupart des mobilités ayant lieu à Paris, ce sont principalement des magistrats parisiens qui sont concernés, ce qui contribue à la non-intégration de ces pratiques par un corps, majoritairement provincial. Plus encore, les magistrats mobiles sont, en grande majorité, des hommes ; dans une magistrature féminisée et largement provinciale, la mobilité apparaît comme relevant davantage de stratégies de distinction d'individus ou de groupes particuliers que d'une action collective du corps.

La mobilité n'étant pas une pratique qui concerne l'ensemble de la magistrature ce sont souvent des filières particulières qui y conduisent. Il y a, bien sûr, la filière des magistrats de l'administration centrale de la justice (MAJC), ces derniers, surtout s'ils appartiennent à certains bureaux, constitue une pépinière de magistrats mobiles potentiels, dans la mesure où ils sont souvent directement en contact avec les administrations ou institutions désireuses de s'adjoindre la compétence d'un magistrat. Mais il y a aussi la filière de l'engagement syndical ou politique au sens large qui permet, notamment à des magistrats de province, d'acquérir une visibilité particulière et de s'insérer, le cas échéant, dans un réseau de mobilité. Il y a aussi les filières des spécialités juridiques potentiellement porteuses de mobilité : droit des affaires, droit communautaire, droits de l'homme, spécialités recherchées dans la communauté des juristes, ou dans le monde de la régulation économique.

L'analyse des différents lieux de mobilité fait apparaître l'importance de la mobilité de proximité. Beaucoup de magistrats ne partent pas très loin. Outre les MACJ, nombre de détachements se font dans des cercles relativement proches de l'institution judiciaire, École nationale de la magistrature, ministère de la justice, tribunaux administratifs, tribunaux militaires, etc. Ces mobilités sont plutôt des mobilités de début de carrière et des premières mobilités comme le sont, en général, les mobilités dans les administrations. Les mobilités politiques, ou encore les mobilités dans le secteur économique se font à des stades plus avancés de la carrière. La mobilité des magistrats se présente ainsi avec une structure bimodale. Une majorité de mobilités se font dans le premier tiers de la carrière, ce qui signifie à un niveau hiérarchique relativement peu élevé, ce sont les MACJ, et certaines mobilités de proximité ou dans les administrations nationales ou même internationale. Puis, il y a une mobilité à des postes plus élevés qui concerne à la fois des détachements dans des organismes prestigieux, des détachements au ministère de la justice comme directeurs ou sous-directeurs, et des mobilités vers le secteur économique ou dans des hautes autorités administratives indépendantes.

L'analyse des carrières conduit à renforcer la thèse de la mobilité comme stratégie de distinction et de repositionnement social d'une fraction de la magistrature. Même s'il est très difficile d'identifier précisément l'effet propre de la mobilité dans la réussite d'une carrière - et si les statistiques peuvent recouvrir des situations très hétérogènes - l'analyse statistique montre que les carrières des magistrats mobiles sont loin d'être médiocres. Et d'ailleurs nombre de magistrats de la Cour de cassation ont eu au moins une mobilité au cours de leur carrière, ce qui ne les a pas empêchés de parvenir à la plus haute juridiction. En fait tout dépend des mobilités concernées, et surtout, de la manière dont elles sont gérées par rapport au corps. Les mobilités peuvent être d'autant mieux intégrées dans la carrière qu'elles sont relativement proches de l'institution et ne durent pas trop longtemps. Le retour dans la magistrature se fera d'autant mieux qu'il sera préparé et que le magistrat mobile saura montrer, en adoptant un profil plutôt bas, qu'il a toujours l'esprit magistrat. Ultérieurement, sa mobilité pourra être capitalisée.

Le relatif développement des pratiques de mobilité s'explique d'abord par l'accroissement de la place du droit et de la justice dans la société, auquel s'ajoute le contexte particulier de mise en cause de la responsabilité pénale de chefs d'entreprises, de hauts fonctionnaires... La fonction juridique, que ce soit dans les administrations, dans les entreprises, ou dans les institutions internationales, se transforme sensiblement, ce qui nécessite certains ajustements des compétences professionnelles.

Dans les administrations, les besoins juridiques se sont diversifiés, le droit public n'étant plus seul en cause. Si des magistrats sont sollicités dans certains ministères, c'est parce que les administrateurs civils n'ont pas forcément la compétence juridique qui leur permette de faire face aux problèmes qui se posent aujourd'hui aux administrations. Un certain nombre de magistrats mobiles estiment d'ailleurs que les magistrats, « qui ont fait un cursus juridique complet », sont les mieux placés, en tous cas mieux placés que les énarques, pour diriger des services juridiques. Les magistrats sont sollicités en raison de leurs compétences juridiques, générales ou spécialisées et, de plus en plus souvent, en raison de leur compétence judiciaire. Ainsi les magistrats ne s'occupent pas seulement d'activité législative et réglementaire mais aussi d'évaluation du risque juridique et judiciaire, voire de prévention du risque juridique ou judiciaire, du moins dans certains ministères, particulièrement exposés.

Dans le secteur économique, c'est bien l'importance croissante du droit dans la régulation, la nécessité de garantir le bon fonctionnement des mécanismes du marché qui ont conduit à la fois à une spécialisation des magistrats dans ce domaine et au développement de certaines mobilités. Des magistrats sont ainsi recherchés en raison de leur compétence particulière en droit boursier, ou en droit des sociétés, ou encore en droit financier, et sont chargés de rappeler la règle, d'évaluer le risque juridique associé à des opérations. Plus récemment, c'est la mise en cause de la responsabilité pénale des chefs d'entreprise, qui a conduit ces derniers à rechercher la compétence particulière de magistrats. Ni leurs avocats, ni leurs services juridiques n'ont su les mettre à l'abri de la curiosité de certains juges d'instructions et même de leur mise en examen. Alors qui de mieux placé qu'un magistrat pour prévenir les ennuis judiciaires des PDG ? Ils ont parfois été recrutés par des chasseurs de tête, ce qui illustre parfaitement l'entrée des magistrats dans le marché du droit : le produit « magistrat » commence à être recherché sur le marché des services juridiques.

Ainsi la présence des magistrats « hors les murs », qui traduit une évolution sensible de la place du droit et de la justice est aussi liée à une conjoncture particulière, caractérisée par un certain « activisme judiciaire ». L'activité de certains juges d'instruction a pour conséquence imprévue de créer des possibilités de mobilité pour les magistrats !

La redéfinition des besoins juridiques qui s'opère aujourd'hui contribue à ouvrir quelque peu le marché du droit, même dans des espaces traditionnellement protégés. Ainsi, par exemple, s'il semble y avoir un consensus sur la nécessité de développer et de réorganiser la fonction juridique au sein des administrations, la question est posée de savoir qui est le mieux placé pour exercer ces fonctions. Si les magistrats, du moins certains d'entre eux, estiment avoir une compétence particulière pour assurer la fonction juridique de l'État, d'autres corps peuvent avoir les mêmes prétentions.

Mais si la mobilité des magistrats s'est développée, c'est aussi parce qu'elle permet à une fraction de la magistrature de sortir, de montrer que les magistrats de l'ordre judiciaire ont une compétence qu'ils peuvent faire valoir ailleurs, dans d'autres organisations, dans d'autres fonctions. C'est également parce qu'il y a une volonté de ne pas laisser les corps spécialistes de l'essaimage monopoliser les postes pour lesquels les magistrats prétendent eux aussi, et davantage que par le passé, avoir la compétence. Certaines de ces mobilités, par les différentes formes de capitaux qu'elles permettent d'accumuler, sont considérées comme une exceptionnelle occasion de repositionnement social pour un corps qui s'est longtemps considéré comme déclassé. On voit ainsi s'amorcer, dans certains organismes européens, le principe de l'alternance entre un magistrat de l'ordre judiciaire et un magistrat du Conseil d'État, principe qui, même s'il est parfois difficile à faire respecter, n'en constitue pas moins le signe d'une réévaluation importante pour l'ordre judiciaire. De même dans l'espace économique, la nomination de magistrats à des postes (certes encore peu nombreux) traditionnellement monopolisés par les grands corps illustre également que le magistrat - pas n'importe quel magistrat - devient un produit prisé dans le domaine de la régulation juridique de l'économie.

Cependant ces stratégies ne concernent qu'un nombre pour le moins restreint et même minime de magistrats. Ceux-ci vont s'efforcer de montrer que leurs pratiques de mobilité rejoignent l'intérêt collectif, estimant que la mobilité, « c'est le prestige du corps à l'extérieur de l'institution ». Ils se considèrent souvent comme des missi dominici de la justice, faisant connaître le droit, la justice et la magistrature en dehors de l'institution. De plus, un certain nombre d'entre eux sont directement utiles à la magistrature dans son ensemble puisqu'ils constituent des relais importants pour la formation des magistrats. Convaincus de leur utilité pour l'institution, les magistrats mobiles déplorent que le ministère de la justice ne les soutienne pas, en ayant une politique de mobilité suffisamment affirmée.

Mais le bénéfice collectif des mobilités ne paraît pas toujours reconnu par la magistrature dans son ensemble. Les magistrats sont d'autant plus enclins à souligner l'intérêt individuel des magistrats mobiles qu'ils voient un certain nombre d'entre eux se positionner sur des trajectoires sociales ascendantes qui les éloignent de plus en plus de leur corps d'origine alors qu'eux-mêmes travaillent dans des conditions parfois très difficiles. Ce qui est parfaitement intégré dans les grands corps, à savoir la dialectique subtile entre intérêt individuel et intérêt collectif, ne l'est guère pour la magistrature. Il y a même parfois processus de disqualification réciproque, les magistrats mobiles dénonçant la « culture de fermeture » des magistrats en juridiction, affichant leur « mépris des castes et joutes locales », et les magistrats des juridictions stigmatisant les magistrats mobiles comme des « planqués », qui font la « juridiction buissonnière », et ne « pensent qu'à l'argent » !

Au-delà de sa difficile intégration par le corps, le développement de la mobilité des magistrats, paraît contraint non seulement par les problèmes organisationnels que posent ces pratiques mais aussi par la nécessité de ne pas nuire aux intérêts spécifiques de la magistrature, notamment à son indépendance, qu'elle cherche constamment à renforcer. Certaines mobilités, en particulier celles qui impliquent un fort engagement partisan à l'égard d'un parti politique, de l'État, d'entreprises, peuvent conduire à des confusions de rôle ; elles peuvent aussi contribuer à brouiller « l'apparence d'impartialité du juge », lors de son retour en juridiction. La mobilité des magistrats n'est pas tout à fait équivalente à celle des autres corps et requiert, par conséquent, certaines précautions qui peuvent se traduire, notamment, par des « investissements de forme » adéquats.

ANNEXE VIII

PROPOSITIONS DU RAPPORT D'ENQUÊTE SUR LE FONCTIONNEMENT DU DISPOSITIF DE PROTECTION
DES MAJEURS

(JUILLET 1998)

Rapport au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, au garde des sceaux, ministre de la justice, et au ministre de l'emploi et de la solidarité,
établi par l'inspection générale des finances (Jean-Baptiste de Foucauld, Alexandre Joly), l'inspection générale des services judiciaires (Blandine Froment, Pierre Lavigne,
Bernard Seltensperger) et l'inspection générale des affaires sociales (Michel Tremois,
Brigitte Gresy, Pierre Trouillet)

I.- UN DISPOSITIF PLUS COHÉRENT ET PLUS LISIBLE

A.- AMÉNAGER LES CRITÈRES D'ATTRIBUTION DES MESURES

1.- ÉLARGISSEMENT DE LA DÉFINITION DU CERCLE FAMILIAL

· l'élargissement des personnes habilitées à présenter des requêtes auprès du juge des tutelles aux parents jusqu'au 6ème degré (en ligne directe ou par alliance), et à toute personne « proche » de la personne à protéger (concubin notamment, mais pas exclusivement) ;

· extension des catégories de personnes pouvant être désignées comme administrateur légal de la personne mise sous tutelle, le proche devant pouvoir remplir ce rôle chaque fois que possible.

2.- RÉVISION DES CRITÈRES DE LA VACANCE

La vacance devrait pouvoir être constatée par le juge dans trois cas strictement définis.

3.- INVERSION DU CRITÈRE PATRIMONIAL ACTUELLEMENT EN VIGUEUR

La mesure aurait a priori vocation à être exercée sous la forme d'une gérance de tutelle en cas de patrimoine ou de revenus importants.

B.- DÉFINIR UN JEU COHÉRENT DE MESURES ET MIEUX
PRÉCISER LES RÔLES DE CHACUN

1.- UNE SEULE LOI, DÉFINISSANT UN JEU DE MESURES ADAPTÉES À LA VARIÉTÉ DES SITUATIONS, ET UN PRESCRIPTEUR UNIQUE

a) Un jeu de mesures intégrées dans le code civil

Le dispositif s'articulerait autour de quatre mesures dont une provisoire.

La sauvegarde de justice, mesure provisoire d'une durée maximale d'un an que peut décider le juge des tutelles au début ou au cours de l'instruction, resterait inchangée.

Instituer une sauvegarde de justice sui generis qui pourrait ne pas être le préalable automatique d'une procédure conduisant à un jugement de placement sous tutelle ou curatelle.

Les mesures pérennes comprendraient pour leur part trois mesures graduées :

· une mesure de gestion sociale succéderait à l'actuelle tutelle aux prestations sociales adultes ;

· le régime de la curatelle continuerait à s'accompagner d'une incapacité partielle (simple assistance du majeur). La souplesse du dispositif, qui permet de choisir entre curatelle simple et une curatelle renforcée, rend inutile une réforme ;

· enfin, la mission propose de maintenir tels quels les critères tendant à l'organisation du placement d'un majeur sous tutelle, sauf à profiter d'une nouvelle rédaction du dispositif législatif pour les réunir dans un même texte alors qu'ils sont disséminés actuellement dans les articles 488, 490 et 492 du code civil.

b) Un examen systématique des mesures au bout de quatre ans

L'obligation d'examiner la nécessité du maintien de la mesure, quelle qu'elle soit, pourrait avoir lieu tous les quatre ans, étant admis qu'une mainlevée ou une modification de la mesure dans le sens de l'allégement ou de l'aggravation resterait possible à tout instant.

2.- PRÉCISER LE RÔLE DES DIFFÉRENTS GESTIONNAIRES

· les qualifications professionnelles requises des gérants de tutelle et des tuteurs d'État seraient harmonisées, étant par ailleurs admis que les familles devraient également bénéficier d'un soutien et d'une formation appropriés si elles en ressentent le besoin ;

· les modalités de dévolution des mesures seraient modifiées. Quand la vacance de la famille a été clairement établie, deux situations seraient possibles :

- si le majeur dispose d'un revenu ou d'un patrimoine suffisant, il relève de la gérance de tutelle et ne bénéficie d'aucun financement public ;

- si, à l'inverse, le majeur ne dispose pas d'un patrimoine ou d'un revenu important, c'est une mesure d'État avec financement public différentiel qui intervient ; elle est en principe exercée par une association agréée - dont c'est la vocation naturelle - ou par un établissement public ou participant au service public hospitalier (PSPH). Par symétrie, elle peut également l'être par une personne privée agréée en cas de besoin ;

- il conviendrait enfin d'aligner les pouvoirs des tuteurs d'État sur ceux des gérants de tutelle ;

- en ce qui concerne les établissements hospitaliers, il serait préférable qu'ils soient destinataires directs des mesures afin qu'ils disposent clairement d'un pouvoir d'organisation et de contrôle de leurs agents.

C.- REFONDRE LES MÉCANISMES DE FINANCEMENT

1.- UNE MESURE UNIQUE PAYÉE 820 FRANCS PAR MOIS POUR LES MESURES D'ÉTAT ET DE GESTION SOCIALE

a) Une mesure financièrement neutre pour les associations

· un forfait de 820 francs par mois, quelle que soit la mesure ;

· une architecture des prélèvements rebâtie.

Le principe du financement différentiel serait étendu à la mesure de gestion des prestations sociales, avec les taux en vigueur depuis l'arrêté du 23 avril 1998. Il serait donc demandé une contribution identique au majeur protégé, quelle que soit la nature de la mesure dont il serait bénéficiaire. L'assiette demeurerait celle prévue par l'arrêté du 15 janvier 1990 et le prélèvement continuerait de s'appliquer au premier franc.

Toutefois, le mode de calcul de la participation de l'État serait revu. La subvention serait en effet éclatée en deux parts distinctes.

b) Des transferts de charges maîtrisés

On pourrait concevoir que, dans le cadre de sa politique d'action sociale, la Caisse nationale d'allocations familiales (CNAF) prenne en charge une partie du prélèvement supplémentaire pour les revenus les plus bas. Tout en conservant les mêmes principes et le même rendement, on pourrait également imaginer une substitution des assiettes, en passant du revenu au patrimoine (ou un complément, par prélèvement sur le capital).

2.- RÉVISER LES MÉCANISMES D'INDEXATION

Un alignement de fait sur les prix à la consommation semble plus adapté que l'actualisation sur le glissement vieillesse technicité (GVT), solde qui prévaut à l'heure actuelle.

3.- HARMONISER LE FINANCEMENT DE LA GÉRANCE DE TUTELLE

· pour minimiser les distorsions de financement, le prélèvement sur les ressources du majeur aux fins de rémunération du gérant de tutelle serait aligné sur celui des mesures d'État et de gestion sociale. Le principe d'une rémunération proportionnelle au revenu, mais plafonnée, serait généralisé ;

· ces émoluments pourraient être rabattus par les juges des tutelles en cas d'insuffisance des prestations fournies par les gérants.

4.- RÉFLÉCHIR AUX MOYENS PERMETTANT D'UNIFIER LA GESTION DU DISPOSITIF

Deux solutions sont envisageables : selon la première, afin d'assurer une unité de mise en _uvre de la politique de protection des majeurs, l'État pourrait s'engager dans une démarche contractuelle avec la CNAF sur une durée de cinq ans. L'économie générale de cette démarche serait de transférer la gestion budgétaire du dispositif à la CNAF, dans le cadre d'une enveloppe globale arrêtant la participation de l'État. Celle-ci pourrait s'élever à 470 millions de francs par an ; une autre formule serait de confier la gestion budgétaire globale du dispositif aux directions départementales des affaires sanitaires et sociales (DDASS).

II.- UN DISPOSITIF MIEUX RÉGULÉ

A.- RESPONSABILISER ET COORDONNER LES ACTEURS

1.- DES ACTIONS PLUS RESPONSABLES

a) Faire contribuer les familles qui se désistent par commodité

Le mécanisme consisterait à récupérer une partie des frais engagés par l'État ou les organismes sociaux au titre du financement des mesures de tutelle par le truchement d'une taxe additionnelle à l'impôt sur le revenu prélevée sur les conjoints, concubins, ascendants, descendants et éventuellement les collatéraux.

b) Instaurer un mécanisme de récupération sur succession

Les dépenses engagées par l'État et les organismes sociaux pourraient venir en déduction de l'actif successoral.

c) Mieux associer les majeurs aux décisions qui les concernent

Les majeurs seraient consultés obligatoirement avant toute décision importante quand leur état le leur permettrait et il serait tenu compte de leur avis dans toute la mesure du possible.

2.- ASSURER UNE COORDINATION PLUS EFFICACE DES ACTEURS

a) Mieux coordonner l'action des juges des tutelles

Confier à un magistrat, qui pourrait être choisi au sein des conseillers à la cour d'appel, une mission de coordination des juges des tutelles, dans le respect de leur indépendance.

b) Réformer l'actuelle commission départementale des tutelles aux prestations sociales en élargissant son champ à l'ensemble des mesures d'État

Cette commission, dont la présidence serait exercée par le préfet ou son représentant, regrouperait :

· pour la sphère judiciaire, outre le juge des enfants, le conseiller à la cour d'appel chargé de la coordination des juges des tutelles, un juge des tutelles désigné par le premier président, les présidents des tribunaux de grande instance du département et les procureurs près desdits tribunaux ;

· pour la sphère administrative, le préfet, la DDASS, le directeur de la caisse d'allocations familiales et un représentant du conseil général ;

· pour la sphère des gestionnaires des mesures, un représentant des gérants de tutelle, un représentant des associations et un représentant des établissements.

c) Un contrôle commun des listes des gérants et associations

· Prévoir l'avis obligatoire des juges des tutelles et du préfet pour la constitution des listes des personnes physiques et morales agréées pour exercer les mesures de tutelle ;

· prévoir l'avis des juges des tutelles et de la DDASS préalablement à l'actualisation annuelle des listes par le procureur de la République.

d) Institutionnaliser les échanges d'information

Dans cette perspective, les directions départementales des affaires sanitaires et sociales ainsi que les caisses d'allocations familiales devraient communiquer aux juges des tutelles et au parquet un état mensuel des stocks de mesures financées, ventilé association par association. De leur côté, les juges des tutelles tiendraient un état des mesures confiées aux gérants de tutelle privés et le communiqueraient aux organismes sociaux et au parquet.

B.- REVOIR LES PROCÉDURES POUR MIEUX RÉGULER LES FLUX D'ENTRÉE

1.- UNE RÉGULATION PLUS STRICTE DES FLUX D'ENTRÉE

a) Durcir les exigences en matière de signalement

· L'auteur du signalement devrait se voir imposer par la loi l'accomplissement de formalités précises, telles que, notamment, la description de la situation (médicale, personnelle, familiale et sociale) de la personne à protéger, l'énumération de ses proches parents et l'énonciation des raisons autres que médicales justifiant la mesure de protection ;

· il conviendrait également d'imposer à l'auteur du signalement d'aviser de sa démarche les membres de l'entourage familial dont il connaîtrait l'existence.

b) Le parquet pourrait jouer un rôle de régulation majeur

· Seul le parquet est en situation théorique de mettre en _uvre une politique qui soit à la fois cohérente et homogène ;

· l'élaboration d'une politique des tutelles par les parquets suppose avant tout qu'ils deviennent destinataires de l'ensemble des signalements ;

· il faudrait également conférer expressément un caractère exceptionnel à la saisine d'office par le juge des tutelles ;

· attribuer au ministère public le pouvoir de prendre certaines mesures urgentes, en particulier le placement du majeur sous sauvegarde de justice avec éventuellement la désignation d'un mandataire spécial mais pendant une durée limitée.

2.- DES PROCÉDURES D'INSTRUCTION MIEUX FORMALISÉES

a) Améliorer le contenu du certificat médical établi par le médecin spécialiste

Le juge devrait pouvoir s'appuyer sur des certificats médicaux circonstanciés et précisant d'une part, les conséquences de l'altération des facultés personnelles du majeur sur la vie civile, d'autre part, les éléments rendant nécessaire l'instauration d'une mesure de protection. Face aux disparités qu'elle a constatées au regard de l'application de ces exigences, la mission propose de les inclure dans l'article 493-1 du code civil.

b) Renforcer la fonction de l'audience

· L'audition de la personne à protéger pourrait être rendue obligatoire ;

· en second lieu, la présence du ministère public, exceptionnelle dans la pratique, permettrait de devenir une obligation.

III.- UN DISPOSITIF MIEUX CONTRÔLÉ

A.- RÉORGANISER LES PROCÉDURES DE CONTRÔLE

1.- INSTAURATION D'UNE OBLIGATION DE DÉPÔT DES EXCÉDENTS COURANTS À LA CAISSE DES DÉPÔTS ET CONSIGNATIONS

Les comptes de dépôt des associations et des gérants de tutelle privés pourraient être centralisés à la Caisse des dépôts et consignations.

2.- MISE EN PLACE OBLIGATOIRE D'UN COMPTE DE RÉPARTITION QUI ASSURE LA RÉMUNÉRATION DES SOMMES PLACÉES AU SEUL BÉNÉFICE DES MAJEURS

Les avoirs courants des majeurs protégés seraient suivis dans la comptabilité des associations et des gérants de tutelle privés au moyen d'un compte de répartition analogue à celui des mandataires de justice.

3.- APPROFONDIR LE CONTRÔLE DES COMPTES

Mettre à disposition des greffiers en chef des agents du Trésor public ou de la Banque de France pour assurer ce contrôle sous leur autorité. Ceci supposerait bien entendu :

· d'une part, que des épreuves types soient élaborées de telle sorte que les contrôles opérés présentent une certaine homogénéité ;

· d'autre part, que les greffes des tribunaux d'instance soient en mesure d'assurer un suivi informatique des dossiers gérés.

B.- RENFORCER LES EXIGENCES DE QUALITÉ

1.- RÉGLEMENTER L'ACCÈS AUX MÉTIERS LIÉS À LA PROTECTION DES MAJEURS

a) Définir les compétences propres au métier de tuteur

· Harmoniser les compétences requises pour accéder au métier de tuteur ;

· aligner les exigences de qualification, aujourd'hui formulées séparément ;

· développer une formation continue de qualité.

b) Revoir les procédures d'agrément et d'habilitation

Un système à deux niveaux serait mis en place :

· l'habilitation individuelle des délégués à la tutelle ;

· l'agrément par le parquet des structures gestionnaires.

2.- INTRODUIRE DES NORMES DE QUALITÉ

· généraliser une démarche de reporting ;

· associer des sanctions à de mauvais résultats qualitatifs :

- le retrait de l'agrément par le parquet (non-renouvellement de l'inscription sur la liste des gérants de tutelle ;

- réduction des financements accordés, sur décision motivée de la commission départementale.

3.- INFORMER ET SOUTENIR LES TUTEURS FAMILIAUX

ANNEXE IX

PROPOSITIONS DU GROUPE « RECHERCHES, CONFRONTATIONS ET PROJETS SUR LES MESURES ET SANCTIONS PÉNALES » (1)

(FÉVRIER 1999)

Quinze propositions pour ouvrir le débat

sur la réforme des modalités de mise en _uvre des mesures et sanctions privatives de liberté

Préambule

a. Depuis l'abolition de la peine de mort, le droit pénal a évolué et la prison, dans sa fonction d'élimination, a incontestablement gagné dans les esprits : réforme des réductions de peines supplémentaires, extension progressive du domaine et de la durée de la période de sûreté jusqu'à la peine perpétuelle incompressible décidée en 1994 ; chacune de ces réformes, et singulièrement la dernière, tire argument de l'absence de toute possibilité d'individualisation postérieure au jugement de condamnation pour asseoir le caractère protecteur du système. L'enfermement semble être la garantie de la collectivité contre la délinquance.

b. Le nouveau code pénal est venu confirmer cette évolution. Malgré certaines mesures de défiance à l'égard de la prison (nécessité de motiver les peines d'emprisonnement notamment), force est de constater qu'elle y a étendu son empire. Ainsi, outre la création d'une peine de réclusion criminelle de 30 ans et l'augmentation du maximum correctionnel de 5 à 10 ans, on peut regretter que les délits d'atteinte aux biens de faible gravité restent sanctionnés par des maxima totalement déconnectés de la réalité et de la pratique des tribunaux. Ainsi, par exemple, le vol simple (souvent le vol à l'étalage) est-il sanctionné par trois ans d'emprisonnement.

c. Or, il est vain, voire contre-productif du point de vue de la tranquillité et de la sécurité publique, de mettre à disposition des juges des peines maximales déconnectées de la pratique et de la gravité de l'acte. Nous croyons, au contraire, qu'il faut des peines adaptées, proportionnées à la gravité de l'atteinte portée à la collectivité, des peines effectivement prononcées et suivies d'une exécution rapide, parfois immédiate, transparente, efficace pour prévenir la récidive et réparer le trouble individuel et collectif causé par l'infraction.

d. Le nouveau code pénal se veut lisible et explicite. Pourtant, il ne dit rien sur le sens de l'exécution de la peine, et ne fait qu'accroître la complexité du droit de l'application des peines. Il faut donc en déduire que la phase d'exécution et d'individualisation de la peine n'a pas été considérée comme déterminante à l'occasion d'un travail de refondation du droit pénal.

e. Enfin, il convient d'admettre que le droit de l'application des peines, fondé sur des mesures qualifiées d'administration judiciaire, est aujourd'hui inadapté à l'exigence d'une justice pénale efficace. Il faut réformer l'exécution des peines privatives de liberté et élaborer un véritable « code de l'application des peines ». Cette avancée est possible et nécessaire aujourd'hui, alors que deux réformes récentes (la mesure de surveillance électronique et le suivi socio-judiciaire) ont introduit des brèches dans la logique du droit de l'application des peines créant un embryon de tribunal de l'application des peines.

f. Le système pénal produit les sanctions les plus attentatoires aux droits fondamentaux : privation de certains droits (liberté d'aller et venir, intimité de la vie privée...), forte réduction de certains autres droits (liberté d'expression, vie de famille...). Pour des raisons de principe, de cohérence et d'efficacité, la collectivité doit mieux garantir le respect des droits du détenu. En effet, la condition de ce dernier le rend objectivement très vulnérable : sa liberté physique est très réduite, il est isolé et il a une mauvaise connaissance des procédures. Or s'il dispose de nombreuses possibilités de recours administratifs (saisine du directeur de l'administration pénitentiaire, des magistrats, recours administratifs gracieux et contentieux), ces possibilités ont leurs limites : éloignement des autorités saisies et/ou absence de connaissance ou d'intérêt pour les questions liées à la détention ; longueur des procédures, complexité ou méconnaissance du droit par les détenus ; absence de débat contradictoire. Il faut renforcer les systèmes de protection du droit des détenus.

Proposition 1 - Il est essentiel de définir clairement dans la loi :

- le rôle de la juridiction de jugement qui statue sur l'imputabilité et le degré de responsabilité, définit la nature et la durée de la peine ;

- le sens de l'exécution de la peine qu'il convient de distinguer du sens de la peine ;

- le rôle de l'autorité qui applique la peine (adaptation, individualisation).

Proposition 2 - Repenser les procédures d'aménagement des peines dans leur ensemble, en assurant une cohérence autour du principe suivant : la peine privative de liberté, fixée lors du jugement, est incompressible et inextensible dans sa durée (la fin de peine est fixée une fois pour toute), mais ses modalités d'exécution évoluent avec le temps, de la détention permanente à la prise en charge totale en milieu ouvert en passant par les intermédiaires que sont les permissions de sortir, l'affectation en chantier extérieur, la semi-liberté, le contrôle électronique, ces différentes modalités d'exécution de la peine pouvant être considérées comme des mesures probatoires à la liberté conditionnelle.

Développée dans toute sa logique, une telle position amène à remettre en cause le principe même des périodes de sûreté, voire celui de l'existence, dans notre code pénal, d'une peine privative de liberté à vie.

Proposition 3 - Dans cette perspective, le pouvoir exécutif devrait renoncer au recours annuel à la grâce collective, réservant l'utilisation de cette procédure à des situations exceptionnelles dans la vie de la Nation. Nous sommes évidemment conscients de la nécessité de définir des modalités transitoires avant un tel abandon de fait. Ne devrait-il pas en être de même pour les amnisties ? Développer une politique d'aménagement des peines cohérente, et surtout lisible pour l'ensemble des citoyens, nécessite d'abandonner toute pratique créant la confusion entre aménagement des peines raisonné, individualisé, motivé et un quelconque laxisme judiciaire.

Proposition 4 - Il conviendrait de remplacer les différentes réductions de peine, par des réductions du délai imposé au détenu pour qu'il puisse bénéficier des mesures d'aménagement de la peine.

Proposition 5 - Affirmer la ferme volonté de développer le recours aux mesures d'aménagement, qui représentent des alternatives à l'enfermement. La sortie en fin de peine non précédée de telles mesures d'aménagement devrait être l'exception. Ces procédures de sortie programmées, aidées, contrôlées de façon plus ou moins contraignante selon les cas, devraient, au contraire, concerner le plus grand nombre des condamnés détenus.

Proposition 6 - Simplifier la procédure et rapprocher l'instance de décision de la personne détenue en créant une juridiction unique pour l'application des peines. Celle-ci serait compétente quelle que soit la durée de la peine prononcée : en effet le pouvoir exécutif ne doit pas avoir à assumer la responsabilité d'une décision individuelle qui relève, par nature, du processus d'une décision judiciaire.

Proposition 7 - Cette juridiction pourrait comprendre des assesseurs non professionnels, qualifiés dans le domaine de l'exécution des peines, de l'insertion sociale ou de l'aide aux victimes qui siégeraient aux côtés de magistrats professionnels.

Proposition 8 - Passer du régime de faveurs au statut en droit. Pour toute mesure d'aménagement de la peine :

- permettre au détenu de prendre la parole dans le cadre d'un débat contradictoire où il peut s'exprimer, assumer ses projets et ses responsabilités, participer aux débats et en comprendre les enjeux, obtenir des explications sur la décision ;

- donner la possibilité au détenu de contester les décisions, au moins celles qui lui font grief (décision de retrait de droit).

Proposition 9 - La loi devrait préciser les critères d'octroi des différentes mesures d'aménagement et les harmoniser. Parler, par exemple, de « gages sérieux de réadaptation sociale » n'est pas suffisant. Cela amène, dans la pratique, les commissions d'application des peines à exiger, pour la libération conditionnelle, des conditions qui, de toute évidence, ne peuvent pas être remplies par nombre de détenus du fait de la précarité de leur situation socio-économique. Ainsi exiger du condamné un emploi à sa sortie de prison peut s'avérer tout à fait irréaliste. Les critères d'octroi des mesures d'aménagement devraient être liés au projet d'exécution des peines, projet contractuel et individualisé qui devrait systématiquement intégrer une phase d'exùcution en milieu ouvert.

Proposition 10 - Pour des raisons de cohérence et de simplification du droit, il conviendrait d'aligner l'ensemble des mesures d'aménagement des peines sur un même délai d'octroi pour tous les condamnés : la mi-peine et/ou le reliquat de peine d'un an.

Proposition 11 - Pour favoriser la réinsertion des anciens détenus, il convient de lutter contre toutes les formes de discrimination à l'embauche dont ils peuvent être victimes. L'État se devrait d'être exemplaire en la matière et ouvrir la fonction publique aux personnes ayant exécuté leur peine.

Proposition 12 - Trouver des modalités d'expression, sur la vie quotidienne en détention, sur les conditions de travail, etc., permettant à la parole du détenu d'être légitime et responsable.

Proposition 13 - Ne plus accepter la précarité matérielle en détention qui aggrave la situation de dénuement moral et social du détenu et le placer à la merci de ses codétenus (fonds alimenté par les frais d'entretien payés par la population pénale et pour cela relancer la réforme du pécule ou crédits pénitentiaires conséquents pour satisfaire les besoins élémentaires de la population incarcérée).

Proposition 14 - Créer une instance nationale permanente et indépendante : la Commission nationale sur l'exécution des mesures et sanctions pénales.

· outil d'investigation de ce qui se passe en amont de la décision de justice (modalités d'interpellation, gardes à vue, etc.). Beaucoup des effets pervers des décisions de justice sont liés à la façon dont la chaîne pénale est approvisionnée en amont ;

· instance de veille sur la bonne application des règles en matière d'aménagement des peines, et de repérages d'effets pervers éventuels du développement de la libération conditionnelle sur le quantum des peines prononcées ;

· cette instance pourra contrôler des conditions de détention de manière inopinée et aléatoire et connaître des plaintes des détenus quant à la violation de leurs droits. Cette commission se rendrait sur place pour entendre les personnes détenues dont le grief aura été considéré comme sérieux. Sans préjuger de la bonne ou mauvaise foi des détenus, du bon ou mauvais fonctionnement de l'administration, il s'agit là d'une procédure de médiation de nature à casser l'affrontement détenu/système coercitif ;

· chargée d'informer la représentation nationale et l'ensemble des citoyens sur les questions de sa compétence, la commission devrait, chaque année, remettre un rapport au Parlement. Elle serait obligatoirement impliquée dans tout débat parlementaire pouvant entraîner une modification du code pénal ou du code de procédure pénale ;

· sans préjuger de sa composition précise et des modes de désignation de ses membres, on devrait y trouver des élus, magistrats, fonctionnaires pénitentiaires, avocats, représentants d'associations impliquées dans l'exécution des mesures et sanctions pénales, des représentants des associations d'aide aux victimes et des chercheurs ;

· le Conseil de l'Europe devrait favoriser le développement d'instances de ce type dans les différents États membres.

Proposition 15 - Tout ce qui pourra être fait en faveur des victimes des délits et des crimes permettra à la société dans son ensemble, de porter un regard plus pacifié sur la question de l'exécution des peines. Aussi nous paraît-il important d'améliorer l'aide aux victimes d'infractions et de revoir, en particulier, les conditions concrètes de leur indemnisation. L'État devrait systématiquement verser aux victimes les indemnités qui leur sont accordées par la justice, à charge pour lui de se retourner ensuite vers les condamnés.

ANNEXE X

FICHE D'ÉVALUATION DES MAGISTRATS

Pour des raisons techniques, cette annexe n'a pas été reproduite dans le document mis en ligne.

ANNEXE XI

CARTE ADMINISTRATIVE ET JUDICIAIRE MÉTROPOLITAINE

graphique

ANNEXE XII

CARTE JUDICIAIRE DU RESSORT
DE LA COUR D'APPEL DE DOUAI

Pour des raisons techniques, cette annexe n'a pas été reproduite dans le document mis en ligne.

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N° 2137.- Rapport d'information de M. Patrick Devedjian , déposé en application de l'article 146 du Règlement par la commission des finances, sur les moyens et la réforme de la justice (annexes).

() Ce groupe est composé de : Frédéric Blettery (conseiller d'insertion et de probation), Philippe Coimbessie (sociologue), Martine Herzog-Evans (juriste), Annie Kensey (démographe), André Kuhn (criminologue, Lausanne), Charlotte Trabut (magistrat), Hilde Tubex (criminologue, Bruxelles), Pascal Remillieux (juriste) et Pierre Tournier (démographe).


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