Volume 4

ALÉA SÉCHERESSE 113

1. LE CONSTAT DE SÉCHERESSE 113

1.1. Les départements sinistrés 113

1.2. Les constructions sinistrées et les sols d'assise 116

1.3. Coût des sinistres 117

2. LES SOLS ET LEUR SUSCEPTIBILITÉ AU PHÉNOMENE DE RETRAIT/GONFLEMENT DÛ AUX VARIATIONS DE TENEUR EN EAU 118

3. LES DÉSORDRES DANS LES CONSTRUCTIONS 119

4. LES REMÈDES EXISTENT, MAIS IL FAUT INFORMER DAVANTAGE 122

4.1. Remèdes : recommandations pour les constructions individuelles 122

4.2. Quelle information préventive ? 124

5. CONCLUSION 125

ALÉA INCENDIES DE FORÊT 125

1. LES MOYENS DE CONNAISSANCE 125

1.1. L'étude des phénomènes 125

1.2. L'étude de l'aléa 125

2. LES MOYENS DE MAÎTRISE 125

2.1. La cartographie 125

2.2. Le débroussaillement 125

2.3. Les autres moyens 125

2.4. Le Conservatoire de la Forêt méditerranéenne 125

3. LA PRÉVENTION 125

3.1. La surveillance 125

3.2. Les Comités Communaux Feux de Forêts 125

3.3. L'Entente Interdépartementale 125

3.4. Les espaces sensibles 125

4. LA GESTION DE CRISE 125

4.1. Les gestions étrangères 125

4.2. La gestion en France 125

5. LA RECONSTRUCTION 125

6. CONCLUSION 125

ALÉA SÉCHERESSE

Lorsque l'on parle de sécheresse, cela évoque immédiatement les grandes régions désertiques. Il ne faut pourtant pas aller aussi loin, les régions méditerranéennes connaissent périodiquement des situations désertiques.

Ainsi, à Murcie, en Espagne, la quantité d'eau est à peine supérieure à celle reçue dans le désert. On peut constater que lorsque le niveau des eaux baisse, le terrain argileux, comportant gravier et sable devient plus compact, et un mouvement différentiel se crée : ouverture de failles, inclinaisons. Les propositions de l'Institut Technologique Géo-Minier d'Espagne sont de faire des fondations jusqu'à la couche stable entre 15 et 30 m de profondeur et sur pilotis ; c'est un très gros travail, y compris au niveau du zonage.

Votre Rapporteur ayant eu à connaître les désagréments de cet aléa dans sa circonscription, il s'est tourné naturellement vers l'un des grands spécialistes de ce désordre, Pierre MOUROUX, qui, avec ses collègues P. MARGRON et J.C. PINTE, est l'auteur d'un traité publié dès 1988 aux éditions du BRGM sur « La construction économique sur sols gonflants ».

1. LE CONSTAT DE SÉCHERESSE

Un certain déficit hydrique pendant l'année 1976 avait déjà permis de constater des désordres touchant essentiellement des constructions individuelles fondées sur certains sols argileux, par tassement plus ou moins différentiel des fondations.

Mais c'est surtout pendant les années 1989 à 1992, puis 1995 à 1997, que la sécheresse est apparue exceptionnelle, non seulement par l'importance du déficit pluviométrique par rapport aux moyennes de référence, mais aussi et surtout par sa durée.

Pendant ces périodes, la pluviométrie efficace a été très inférieure à la normale (55 à 85 %).

1.1. Les départements sinistrés

Selon les rapports de la Caisse Centrale de Réassurance, le nombre de communes et de départements sinistrés est donné par le tableau suivant :

Date

Communes sinistrées

Départements sinistrés

31/12/1992

3 085

49

07/03/1997

3 786

68

18/09/1998

4 893

75

Communes et départements sinistrés

    Départements

Nombre total de communes

Nbre de communes sinistrées

Taux de sinistralité (%)

    Bouches-du-Rhône

119

40

34

    Charente-Maritime

472

162

34

    Cher

290

115

40

    Dordogne

557

312

56

    Haute-Garonne

588

424

72

    Gers

463

435

94

    Gironde

542

161

30

    Indre

247

170

69

    Indre-et-Loire

277

179

65

    Loir-et-Cher

291

171

59

    Loiret

334

197

59

    Lot

340

85

25

    Lot-et-Garonne

317

88

28

    Maine-et-Loire

364

96

26

    Nord

652

235

36

    Sarthe

375

101

27

    Seine-Marne

514

180

35

    Yvelines

262

132

51

    Deux-Sèvres

308

133

43

    Tarn-et-Garonne

195

142

73

    Vendée

283

73

26

    Vienne

281

145

51

    Essonne

196

105

54

    Hauts-de-Seine

36

12

33

    Seine-Saint-Denis

40

33

83

    Val-de-Marne

47

41

87

    Val-d'Oise

185

56

30

    Total :

8 575

4 023

47

Les 27 départements les plus affectés

(cumul des sinistres après l'arrêté ministériel du 18.09.98)

Il faut bien voir cependant qu'à la date du 18 septembre 1998, seuls 13 départements présentent un taux de sinistralité (rapport du nombre de communes sinistrées au nombre total de communes du département) supérieur à 50 % et que 14 autres ont un taux de sinistralité compris entre 25 et 50 %.

Dans ces 27 départements, plus de 4 000 communes ont été touchées, soit 82 % de l'ensemble des communes sinistrées, et le taux de sinistralité approche les 50 % (1 commune sur 2).

1.2. Les constructions sinistrées et les sols d'assise

Des enquêtes ont été réalisées par l'Agence Qualité Construction (1990) et le CEBTP (1991) ; elles ont porté respectivement sur 356 et 412 constructions sinistrées.

Même s'il ne s'agit pas d'enquêtes exhaustives, les résultats se recoupent et peuvent être considérés comme représentatifs. Ces enquêtes montrent finalement que l'exemple-type de la construction sinistrée par la sécheresse est :

    ù une maison individuelle ;

    ù à simple rez-de-chaussée et avec dallage sur terre plein ;

    ù fondée sur semelles continues, peu ou non armées, peu profondes (40 à 80 cm) et reposant sur un sol argileux ;

    ù avec une structure en maçonnerie, sans chaînage horizontal.

On peut faire un autre constat important, les enquêtes ayant montré que la sécheresse a souvent été le révélateur d'insuffisances ou d'anomalies de conception ou de construction, telles la profondeur des fondations insuffisantes ou des constructions fondées à différents niveaux sans précautions spéciales.

    Caractéristiques des désordres

    Proportion affectée

    maisons individuelles :

 

    R + O

    70 %

    R + 1

    25 %

    avec dallages sur terre-plein

    68 %

    vide sanitaire

    18 %

    profondeur des fondations :

 

    40 à 80 cm

    70 %

    80 à 150 cm

    15 %

    sol de fondation argileux

    97 %

    végétation proche

    17 % (dont 6 % facteur de désordre)

    âge de la construction :

 

    < 10 ans

    37 %

    > 10 ans

    62 %

    Fissurations traversantes > 10 mm

    58 %

    Réparation

 

    par reprise en sous-_uvre

    80 % (dont plots ou micropieux 71 %)

    coût moyen :

 

    reprise en sous-_uvre

    100 000 F (jusqu'à 500 000 F)

Effets de la sécheresse sur les constructions

(Enquête CEBTP-AQC 1991 sur 768 cas)

1.3. Coût des sinistres

A la fin de l'année 1996, les coûts cumulés avaient été évalués de l'ordre de 4 à 5 milliards de francs.

Actuellement, la Caisse Centrale de Réassurance les estime à plus de 10 milliards de francs. Rappelons que le coût de la catastrophe de Nîmes a été de plus de 4 milliards de francs.

L'analyse des coûts des travaux de reprise en sous-_uvre montre que 71 % de ces travaux concernent des plots ou des micropieux et que pour ces derniers, le coût moyen est de l'ordre de 150 000 F. Cette solution par micropieux est donc chère et n'apparaît pas toujours comme la mieux adaptée, pour certains experts.

2. LES SOLS ET LEUR SUSCEPTIBILITÉ AU PHÉNOMENE DE RETRAIT/GONFLEMENT DÛ AUX VARIATIONS DE TENEUR EN EAU

Dans les départements sinistrés, seules les constructions fondées sur certains sols argileux ont été affectées.

Il existe ainsi une très bonne correspondance entre la carte des départements sinistrés et la carte géologique à 1/1 000 000 du BRGM, indiquant les formations argileuses ; en particulier dans les 2 bassins aquitain et parisien, ainsi que dans le sud-est de la France.

Ces argiles contiennent une proportion importante de certains minéraux argileux, en particulier la montmorillonite ; ce sont des sols qui collent aux mains et qui sont souvent dénommés « argiles », « glaises », « marnes » ou même « limons ».

Lorsqu'on soumet ces sols à des cycles d'humidification-séchage et donc à des variations de teneur en eau, on observe des phénomènes de gonflement et de retrait, plus ou moins importants selon la nature de l'argile et son état initial ; dans les cas les plus défavorables, on a pu constater des variations de volume de 20 à 30 %, conduisant à des soulèvements et des tassements de fondation qui peuvent atteindre plusieurs centimètres, avec toutes les conséquences que l'on peut imaginer sur les constructions légères comme les maisons individuelles (voir ci-après).

La reconnaissance de ces argiles, de leur action néfaste ainsi que des dispositions constructives à adopter, doivent cependant être considérées comme une tâche des plus courantes pour un ingénieur géotechnicien qualifié et averti de la présence de ces argiles dans sa région.

3. LES DÉSORDRES DANS LES CONSTRUCTIONS

Ces désordres ont été bien décrits dans le guide de prévention « Sécheresse et Construction » édité par le ministère de l'Environnement, en 1993.

Pendant la sécheresse, les mouvements du sol qui sont à l'origine des désordres aux constructions sont dus essentiellement aux diminutions de teneur en eau. Plus exactement, ce sont les tassements différentiels du sol qui provoquent ces désordres. Les variations de teneur en eau ne sont en effet généralement pas uniformes :

    ù d'une part, la seule présence du bâtiment modifie les conditions d'équilibre hydrique des sols, entre la partie centrale (teneur en eau sensiblement constante) et la périphérie du bâtiment ;

    ù d'autre part, de nombreux autres facteurs sont susceptibles de modifier les conditions d'équilibre hydriques des sols :

    · hétérogénéités diverses (nature des sols, géométrie des couches),

    · végétation,

    · circulation d'eau,

    · drains, fossés, fuite de réseaux, etc.

Par ailleurs, au retour des précipitations, les sols se réhumidifient, ils gonflent et des soulèvements différentiels peuvent être à l'origine de nouveaux désordres. D'une manière générale, les désordres peuvent concerner :

Le gros _uvre :

    ù fissuration des structures dont l'ouverture peut atteindre plusieurs centimètres ;

    ù déversement des structures ;

    ù désencastrement des éléments de charpente ou de chaînage ;

    ù dislocation des cloisons.

Le second _uvre :

    ù distorsion des ouvertures (portes et fenêtres) ;

    ù décollement de tous les éléments composites et en particulier les dallages ;

    ù dommages à toutes canalisations.

Les aménagements extérieurs :

4. LES REMÈDES EXISTENT, MAIS IL FAUT INFORMER DAVANTAGE

Tout sinistre est dû :

    ù à la présence de sols susceptibles de subir des phénomènes de retrait-gonflement importants par cycle de séchage-humidification et donc par variation de teneur en eau : ces sols sont composés essentiellement de certains types d'argile.

    ù au phénomène de sécheresse prolongée, comme cela s'est produit au cours de la période 1989-1998 et comme cela a pu se produire 2 ou 3 fois au cours du 20ème siècle.

C'est l'ensemble de ces deux causes qui constitue l'aléa « tassements dus à la sécheresse ».

Par ailleurs, il faut insister sur le fait que cet aléa touche essentiellement les maisons individuelles. Beaucoup de constructions de ce type ont pu être réhabilitées, suite aux divers arrêtés de catastrophes naturelles.

Mais une prévention efficace pour les siècles à venir ne peut passer que par une information systématique des maîtres d'ouvrages et propriétaires potentiels. Ces derniers hésitent souvent à faire appel à un géotechnicien compétent. La Puissance Publique devra donc se doter de moyens importants, à toutes les échelles, pour faire connaître la possibilité d'un sinistre en un lieu donné et inciter les propriétaires à utiliser les services des géotechniciens.

Cette mise en relation propriétaires-géotechniciens n'est pas facile à entretenir, mais c'est à ce prix que les effets sur les futures constructions lors d'une prochaine sécheresse prolongée se traduiront par des coûts beaucoup moins élevés que pour la période 1989-1998.

4.1. Remèdes : recommandations pour les constructions individuelles

D'une manière générale, et en particulier si l'on désire construire dans l'une des communes sinistrées des départements concernés, il est recommandé d'effectuer une étude géotechnique appropriée, par un géotechnicien compétent et averti de la présence de sols argileux dans la région où il exerce. Cette étude doit comprendre :

    ù un examen préalable du site ;

    ù une analyse et une synthèse des documents existants ;

    ù des reconnaissances éventuelles, avec l'interprétation des résultats ;

    ù des recommandations concernant :

    · les fondations,

    · les dispositions à envisager :

      ¬ structure rigide,

      ¬ vide sanitaire,

      ¬ membrane périphérique étanche, afin de limiter toute variation de teneur en eau,

      ¬ drainage,

      ¬ végétation située loin des fondations,

      ¬ conception des canalisations enterrées.

Un schéma-type de ces dispositions est présenté sur la figure ci-dessous, à titre seulement indicatif.

(1)  Contrepente, revêtement étanche

(4)  Elagage

(2)  Vide sanitaire + chaînage bas

(5)  Chaînage haut et angles

(3)  Ecran anti-racines

(6)  Profondeur des fondations : Pm>pm>1 m

Schéma-type des dispositions à prendre, en présence de certains sols argileux :
à préciser par un géotechnicien compétent

(d'après M. TOULEMONT et P. MOUROUX et al.)

4.2. Quelle information préventive ?

L'une des solutions les plus efficaces pour faire connaître et appliquer les mesures techniques de prévention qui s'imposent, consiste, pour la Puissance Publique, à faire réaliser des plans de prévention des risques naturels (PPR) en commençant par les quelques 4 000 à 5 000 communes les plus exposées (décret du 5 octobre 1995).

Ces PPR peuvent être simplement et rapidement établis, avec un règlement approprié à une échelle de 1/5 000 à 1/10 000, à un coût relativement réduit en raison du nombre de données techniques disponibles.

graphique

Démarche d'évaluation de l'aléa « Tassements dus à la sécheresse »

(d'après M. TOULEMONT)

Dans ce schéma, il faut bien voir cependant qu'un soin tout particulier doit être porté aux communes sans sinistres reconnus pendant la décennie 1989-1999, mais qui posséderaient des zones argileuses de superficie importante et sur lesquelles aucune construction n'a encore été édifiée.

5. CONCLUSION

C'est la raison pour laquelle une démarche non réglementaire, à l'échelle départementale avec la précision de la carte géologique à 1/50 000, pourrait être réalisée, par exemple par des organismes comme le BRGM ou les CETE pour cartographier toutes les zones argileuses, a priori suspectes de susceptibilité aux phénomènes de retrait-gonflement. Un catalogue départemental indiquant ces zones argileuses et les limites des communes sinistrées dans la période 1989-1998 pourrait ainsi être publié et mis à disposition de tous les acteurs de l'Aménagement du territoire et de la Construction.

Par ailleurs, une carte à 1/1 000 000 ou 1/1 500 000, indiquant également les mêmes informations avec quelques explications sur l'aléa (origines / désordres / coût) permettrait de garder la mémoire du phénomène, à l'échelle nationale.

ALÉA INCENDIES DE FORÊT

Le dernier rapport parlementaire s'étant préoccupé des incendies de forêt est celui de notre collègue Jean-Claude GAUDIN et il remonte à 1980. Bien des choses se sont produites depuis mais l'impact de quelques grands feux est toujours très fort. Ceci est également lié à l'importance de cet aléa. L'aléa « incendies de forêt » concerne, en effet, dans notre pays environ 7 millions d'hectares, soit globalement environ 13 % du territoire national.

Les grands espaces forestiers comprennent :

    ù le sud-est pour 4,2 millions d'hectares de forêt méditerranéenne et formations subforestières,

    ù le sud-ouest pour 1,7 million d'hectares de forêt aquitaine,

    ù le centre-ouest pour 1 million d'hectare répartis entre les régions Centre, Poitou Charente et Bretagne.

Cet aléa se distingue des autres à plusieurs titres :

    ù le territoire, théâtre de l'aléa est à la fois générateur et victime, il fournit le combustible et se détruit. A ce titre, il faut évoquer ici non seulement la vulnérabilité des biens et des personnes, mais aussi celle du patrimoine naturel constitué par ces espaces ;

    ù l'origine anthropique est, sous nos latitudes, déterminante pour le déclenchement des feux : imprudence, malveillance, trains, lignes électriques, dépôt d'ordures, représentent plus de 2/3 des causes élucidées de feux en zone méditerranéenne ;

    ù la notion de « bassin de risques » s'applique mal -sauf à une très vaste échelle- pour distinguer l'occurrence de l'aléa. Tout le territoire est concerné. En revanche, elle est utile pour caractériser le phénomène, sa prévision, sa prévention et l'organisation de la lutte ;

    ù l'aléa n'a pas des caractéristiques stables dans le temps (à l'échelle d'une génération) du fait des changements dans l'occupation de l'espace ;

    ù le niveau de risque dépend de la date du dernier sinistre (quantité de biomasse) et la lutte intervient directement sur l'évolution du phénomène physique (les secours éteignent le feu) ;

    ù enfin, les moyens de maîtrise des crises (sécurité civile) sont considérablement plus importants que ceux de la prévention.

1. LES MOYENS DE CONNAISSANCE

1.1. L'étude des phénomènes

L'étude des phénomènes porte sur les conditions d'éclosion et de propagation du feu, en fonction des données physiques du milieu naturel (pente, relief, vent, réserve en eau) mais aussi biologiques (couvert végétal, nature, inflammabilité et combustibilité, stress hydrique...).

Les travaux conduits depuis une vingtaine d'années ont permis :

    ù de définir les « indices de risques météorologiques » intégrant vent, réserve en eau, puis humidité de l'air. Ces indices sont largement utilisés dans la prévision temporelle (mise à jour journalière) et spatiale (définition de plus de 90 zones dans le sud-est), conduite par la météorologie nationale ;

    ù de mieux connaître la sensibilité au feu (pyrolyse et combustion d'espèces et de formations végétales diverses (travaux INRA, station de sylviculture d'Avignon et CEMAGREF).

Néanmoins, trois points faibles apparaissent pour la recherche :

    ù l'absence de présentation synthétique des résultats peut parfois laisser craindre que les mêmes études ou recherches soient conduites en parallèle ou successivement, notamment sur les facteurs du milieu où peu de « choses claires » sont explicitées ; il faut d'ailleurs souligner l'impossibilité de vérifier expérimentalement l'efficacité des recherches par référence à des témoins car le feu ne passe qu'une fois... Ceci explique pour une part la multiplicité des approches ;

    ù il y a un déficit certain de connaissances sur la simulation de la propagation des incendies et la modélisation des moyens de lutte ;

    ù l'évaluation des conséquences écologiques et physiques des incendies est encore peu abordée.

Dès lors, les axes d'effort en matière de recherche pourraient porter, après un bilan inter-organismes des acquis sur :

    ù l'état hydrique de la végétation, utilisation de la télédétection et la description des formations selon leur sensibilité au feu ;

    ù la modélisation physique des interactions vent/relief (aérologie) pour la modélisation de la propagation du feu ;

    ù une recherche de classification des événements (grands feux).

1.2. L'étude de l'aléa

L'étude de l'aléa, sur le plan statistique, dispose d'un bon outil avec l'inventaire « Prométhée », qui rassemble les données depuis 1973 sur les 15 départements de l'entente méditerranéenne ; exploité sur 6 départements, par le ministère de l'Agriculture et de la Pêche (16 000 feux de forêt, 62 000 feux ruraux et urbains), il met en évidence en particulier :

    ù la concentration des feux sur la zone littorale et périurbaine, la faible durée de la période critique (3 à 4 jours « assurent » 60 % des dégâts) ; il faut immédiatement préciser que, chaque année, 20 à 30 jours sont à risque, pouvant générer des grands feux et que le dispositif d'intervention est nécessairement permanent sur toute la période estivale au moins ; c'est une idée dangereuse de penser pouvoir le mobiliser de façon discontinue ;

    ù l'existence de seuils pour le développement des grands feux (vent > 65 km/h, réserve en eau < 40 mm), la faible inflammabilité des taillis et futaies, et la forte combustibilité des peuplements structurés à plusieurs étages...

Ces résultats et données permettent une bonne cartographie statistique des événements et de leur caractéristique.

En revanche, la cartographie des sensibilités au feu a donné lieu à plusieurs tentatives à différentes échelles avec les cartes CNABRL, la cartographie « zone rouge » des années 70, la cartographie d'application de la loi de 1987. Il ne semble pas qu'il y ait de normes en la matière.

Il est à noter que, pour le territoire non méditerranéen, les services du ministère de l'Agriculture et de la Pêche (DDAF) et la Sécurité civile (SDIS) réalisent une enquête statistique destinée à identifier et décrire tous les feux éclos. Le questionnaire renseigné est cohérent avec le minimum d'informations sur les feux de forêt proposé aussi bien par la Commission des communautés européennes que par la FAO.

Parmi les axes d'effort, notons l'utilité d'assurer la pérennité du dispositif Prométhée, et son exploitation complète (cartographie ?), mais aussi de développer le caractère opératoire de la cartographie des facteurs du milieu après une synthèse des modes de cartographies existantes ; à cette occasion, pourrait être mises en valeur les possibilités techniques récentes (interprétation d'images satellitaires) et utilisées pleinement les enquêtes décennales de l'lFN.

La vulnérabilité est appréciée par quelques signaux :

    ù chaque année, des victimes professionnelles succombent dans la lutte contre le feu. Par contre, cette lutte ne fait plus de victime civile ;

    ù chaque année, plus de 5 000 feux parcourent 40 000 ha environ. Ceci place la France dans un bon rang parmi ses voisins, plus vulnérables (plus de 200 000 ha en Espagne, l00 000 en Italie...) et la surface moyenne des feux (8 ha) diminue constamment ;

    ù mais, outre le dévouement des pompiers, cette lutte coûte cher (plus de 700 millions de francs/an pour l'Etat, pour la seule zone méditerranéenne).

L'évaluation des dommages matériels et patrimoniaux est sommaire et les travaux d'approche comparée des coûts de la prévention pour l'aménagement d'une part, par la surveillance et la lutte d'autre part, encore peu développés.

Une liaison est nécessaire avec les pays de l'Arc Méditerranéen.

2. LES MOYENS DE MAÎTRISE

Outre l'information préventive, le dispositif de prévention/protection repose sur deux bases d'importance très inégale actuellement :

    ù l'aménagement (occupation du sol, y compris la cartographie réglementaire, règle de construction, gestion du couvert boisé) ;

    ù la surveillance, permettant d'anticiper sur les départs de feux et de les maîtriser dès l'origine.

2.1. La cartographie

La planification de l'occupation du sol ne peut se faire comme pour d'autres aléas ; la croissance de la biomasse végétale, l'exploitation forestière, le parcours des incendies antérieurs peuvent considérablement modifier les caractéristiques de l'aléa d'une année sur l'autre.

Les PPR sont difficilement applicables aux forêts, une expérimentation a lieu dans les Alpes maritimes. Pour dire le risque, tracer un trait, définir les contraintes, cela va au-delà de ce que la connaissance des feux est perçu. D'après un avis autorisé, si ce PPR va au bout, il y aura contentieux.

Aussi des procédures spéciales ont-elles été mises en place : les plans de zones sensibles aux incendies de forêt (PZSIF) et les schémas départementaux d'aménagement des forêts contre l'incendie (SDAFI) sont établis après une procédure lourde et de fait encore peu utilisée.

Autre aspect, la forêt méditerranéenne n'est pas un espace naturel productif, mais un patrimoine, un paysage, un lieu d'habitat et de loisir, un cadre de vie.

La forêt méditerranéenne a une autre particularité, elle pousse seule, et elle est la seule forêt naturelle en France.

En Aquitaine, on a une organisation à partir d'une réglementation très contraignante : c'est une forêt productive, correspondant à la grande propriété.

La forêt méditerranéenne est très morcelée, il est parfois difficile de trouver certains propriétaires, 20 à 30 % de parcelles sont sans identification. Son revenu est très irrégulier, et une responsabilité sur le modèle aquitain est impossible.

En Languedoc Roussillon, avec l'abandon de la vigne, ce sont plus des broussailles que des arbres que l'on trouve dans l'Hérault et le Gard.

Par ailleurs, l'opinion publique considère comme une menace forte l'expansion de la forêt.

Les règles de construction en zone à risques ne sont pas normalisées et il n'y a d'ailleurs peu ou pas de contrôle a posteriori des prescriptions éventuelles des POS. Une « définition des normes de bon sens » à la diligence de la direction de la construction est nécessaire.

2.2. Le débroussaillement

Les travaux de débroussaillement et d'équipement des massifs disposent des bases légales nécessaires, encore conviendrait-il qu'elles soient respectées. Le maire a le pouvoir de l'imposer au départ, à défaut le Préfet. Mais les procédures pouvant aboutir sont extrêmement lourdes et trop longues, au minimum trois mois après le constat, c'est-à-dire au moment de la fin de la période critique des feux. Cela ne marche pas sauf dans les Alpes maritimes où le Préfet a fait preuve d'autorité.

L'Etat lui-même devrait procéder au dégagement le long des itinéraires routiers pour permettre les débroussaillements. Il faut y ajouter la création et l'entretien de chemins, de points d'eau et de postes de guet, d'aires hélicoptère pour la DFCI (Défense des forêts contre l'incendie).

En tout cas, le fonds de débroussaillement a été une fausse bonne idée qui a conduit à un échec monumental.

2.3. Les autres moyens

Enfin, la politique des coupures aménagées (agro-pastorale) donne lieu actuellement à un inventaire en vue d'une typologie des différentes méthodes possibles et de leurs résultats.

Maintenant que l'huile d'olive est devenue une production rentable, les régions méditerranéennes sont très désireuses de voir des plantations d'oliviers se développer, et ainsi réaliser une coupure en cas d'incendie.

La mise en _uvre des « grandes coupures » prévues par la loi de juillet 1992 est très lente. Il faut espérer que la prochaine loi sur la forêt qui doit être examinée fin 1999 en tiendra compte et sera plus directive.

L'ensemble des programmes d'intervention fait l'objet de plan intercommunaux de débroussaillement et d'aménagement forestier (PIDAF) -dont plus de 120 sont terminés pour 1,5 million d'hectares- et une soixantaine en cours. Les investigations pourraient porter sur :

    ù l'impact sur le niveau de risques et l'économie des grandes coupures ;

    ù la mise en _uvre d'un inventaire « prioritaire » à protéger (espaces urbanisés, naturels, paysagers) ;

    ù la cartographie des peuplements indiquant la biomasse combustible et l'intérêt patrimonial et paysager.

Les moyens de financement et de gestion sont assurés par l'Etat à hauteur de 325 millions de francs/an environ dont 200 MF/DERF et théoriquement 100 par le Conservatoire de la Forêt méditerranéenne, en contrepartie d'une contribution égale des régions et départements ; ces moyens sont coordonnés par la Délégation à la protection de la forêt méditerranéenne. Ils incluent le coût imputé à l'Etat de la main-d'_uvre en « régie » (forestiers, sapeurs pompiers, harkis, cf. infra).

2.4. Le Conservatoire de la Forêt méditerranéenne

Mais le Conservatoire de la Forêt méditerranéenne, qui avait lors de sa création en 1987 une dotation de l'Etat de 100 MF, n'a plus en 1998 que 62 MF.

Cela ne permet plus de mettre en _uvre les travaux et de maintenir le nombre de forestiers sapeurs ; il reste 200 harkis, dont l'âge est élevé et dont le rendement baisse. Le dispositif des forestiers-sapeurs qui devaient prendre le relais a été dénoncé en juin 96 : certains Conseils Généraux veulent être maître à bord puisqu'ils financent à 80 %, alors que l'Etat veut rester le seul maître.

3. LA PRÉVENTION

Si de nombreux feux sont d'origine humaine, la logique voudrait que l'on réduise cette présence au maximum. Cela passe par l'interdiction de l'occupation dans les sous-bois, notamment pour les caravanes, les cabanons, mais aussi par l'information de la population les jours de grand risque avec un bulletin météo du type météo marine -le pyromane n'a pas besoin de ce message, il connaît parfaitement les jours à risque- et l'interdiction de promenade en certaines périodes.

L'aménagement des zones sensibles est un facteur de prévention, et de nombreux partenaires y prennent part, des services ministériels au Conseil Général et au Conseil Régional, mais la mise à disposition de plus en plus tardive des crédits a finalement provoqué un décalage dans l'exécution des travaux d'environ un an.

3.1. La surveillance

La surveillance par patrouille, de forestiers, de forestier-sapeurs, de gardes, de sapeurs-pompiers font que moins de 1 % des départs de feux deviennent des grands feux. La surveillance par pompiers dans les Bouches du Rhône pour un jour normal mobilise 250 hommes, pour un jour de risque 1 000 hommes.

Il faut insister sur l'efficacité de ce quadrillage de terrain qui permet encore une fois d'anticiper en surveillants dissuadant, informant, intervenant à la fois pour les feux et la fréquentation du territoire. A ce sujet, il faut se féliciter de l'esprit citoyen de volontaires, répartis en « Comités Communaux Feux de Forêts ». Après une dizaine d'années de fonctionnement, les rapports avec les sapeurs pompiers se sont bien améliorés : de mal vécus à la concurrence, on est passé à l'insertion de bénévoles chez des professionnels, cela nécessitant une formation que le Centre de Valabre dispense. La formation est dispensée pour 6/7 personnes dans leur commune, pendant 3 week-ends.

3.2. Les Comités Communaux Feux de Forêts

Les CCFF sont bien perçus de l'ensemble des responsables que j'ai auditionnés, mais tous ont bien insisté sur le rôle de prévention qu'ils doivent mener et non de lutte contre le feu ; ils sont d'excellents interfaces avec les maires.

Les CCFF rassemblent environ 9 000 bénévoles en région Provence-Alpes-Côte d'Azur, dont 3 000 dans les Bouches-du-Rhône, 3 000 dans le Var, 1 500 dans les Alpes Maritimes et 1 500 dans le Vaucluse.

Dans les Bouches-du-Rhône, 89 communes se sont dotées de Comités. Comme pour tout bénévole, le temps disponible pour chacun d'entre eux est très variable ; aussi, il n'y a pas trop des 3 000 adhérents à l'association départementale pour mener une action efficace. Le budget départemental est inférieur à 100 000 F, provenant essentiellement des subventions du Conseil Général, des communes et de la vente de la Revue.

L'activité des CCFF est continue durant toute l'année, l'hiver est consacré au débroussaillage et à la formation, l'été -soit du 15 juin au 15 septembre- à la phase active de la prévention par des patrouilles, de la vigie, voire ce qui est parfois contesté des interventions sur feux naissants. Ils font avant tout de la logistique des pompiers, du guidage par leur très bonne connaissance des lieux.

Les patrouilles sont motorisées (apprentissage de la conduite des 4x4 en zone difficile), avec 600 litres d'eau en remorque. Ceci pose bien entendu le problème des critères d'attribution de ces véhicules, et d'une coordination entre collectivités.

Il reste un point épineux à régler, concernant les liaisons radio avec les pilotes de bombardiers d'eau, mais la normalisation des rapports avec les autres professionnels devrait bientôt le solutionner.

La journée d'un bénévole CCFF commence en général vers 13 h et va jusqu'à la tombée de la force du vent (sauf les jours de Mistral où elle est donc plus importante), et l'activité va de 2/3 jours à 60 jours par an.

3.3. L'Entente Interdépartementale

L'Entente Interdépartementale en vue de la Protection de la Forêt contre l'Incendie a été créée le 3 juillet 1963 par 7 départements fondateurs du sud-est, avec le soutien de l'Etat. Cet établissement public rassemble aujourd'hui 15 départements méditerranéens de la frontière italienne à la frontière espagnole, qui se sont unis pour protéger le patrimoine forestier.

Ses principales missions sont l'information, l'expérimentation et la formation. Pour ce faire, différentes structures ont été mises sur pied : l'Ecole de Valabre qui propose des stages spécifiques aux sapeurs-pompiers afin d'élargir leur formation, le Centre d'essais et de recherche de l'Entente (CEREN) qui contribue à l'amélioration de l'équipement des forces chargées de la lutte, et la Fondation pour la Protection de la Forêt Méditerranéenne contre l'Incendie dont la tâche est de sensibiliser le public en développant des actions originales.

Ainsi l'Ecomusée de la Forêt de Gardanne, ouvert depuis le 15 mars 1997, permet une excellente sensibilisation à la forêt et à la prévention pour les citoyens et les écoles de la Région.

Le CEREN est chargé de procéder à tous les essais nécessaires pour l'application des moyens de lutte contre les feux de forêt et ainsi, d'entrevoir l'efficience des produits et matériels par rapport à l'existant. Au cours de chaque saison de feux, le CEREN assure un contrôle-qualité des produits destinés à l'application aérienne.

3.4. Les espaces sensibles

Le feu de Septèmes les Vallons a créée un choc, ce qui fait que les problèmes posés par des centres de décharge ont été pris à bras le corps. Des pratiques ancestrales des agriculteurs sont aussi remises en cause, comme l'écobuage, mais l'environnement a changé.

Ce choc a d'ailleurs été ressenti au ministère de l'Aménagement du Territoire et de l'Environnement, puisque la ministre m'avait saisi, dans le cadre cette fois de la Présidence du Comité français de la DIPCN, du souhait de voir un groupe de travail se constituer sur les incendies de forêt en milieu périurbain.

D'autres grands feux de ce type ont lieu, en Australie (Nord de Sydney par deux fois ces dix dernières années, Melbourne et Adélaïde en février 1983), aux Etats-Unis en Californie (grand feu d'Oakland).

De très grands feux en zone moins peuplée ont lieu, tel celui du parc national de Yellowstone en 1988 (600 000 ha), ou encore en Chine, au Helongiang dans les monts du Grand Khin An en 1987 (870 000 ha) et au Québec. Ces feux n'ont été stoppés, le plus souvent, que par un élément naturel extérieur ou des travaux considérables. En Chine, l'arrêt au nord s'est produit sur les berges du fleuve Amour, au sud par la réalisation d'un gigantesque coupe-feu. 135 000 km de bandes de pare-feu, neuf aérodromes et 870 tours de guet sont depuis affectés à la protection des forêts.

En France, sur 4 millions d'hectares de végétation méditerranéenne, 50 % sont à risque important. Il faut des coupures stratégiques, éviter la fermeture des espaces, développer un certain pastoralisme, sélectionner des espèces, tels les oliviers ou d'autres essences. Le Pin d'Alep s'est adapté au feu, il y a une auto-sélection depuis 6 000 ans.

Une formation conjointe avec le ministère de l'Agriculture sur la prévention dans les espaces sensibles est entreprise et compte 12 000 journées stagiaires par an.

4. LA GESTION DE CRISE

Votre Rapporteur s'est rendu dans d'autres pays méditerranéens qui sont confrontés à des situations similaires.

Indépendamment du fait que dans la plupart des pays, prévention et gestion de crise ressortent du même organisme, ce qui revient à privilégier très souvent la partie secours, l'organisation politique et administrative de ces pays amènent quelques particularismes.

4.1. Les gestions étrangères

Ainsi, en Espagne, la loi du 21 janvier 1985 sur la Protection civile confie à l'Etat toutes les responsabilités pour les risques nucléaire, de guerre, ou d'intérêt national (décret 407/1992 du 24 avril 1992). Les autonomies ou les généralités ont la responsabilité de tous les autres, naturels ou technologiques : inondation, sismique, volcanique, transports de matières dangereuses. Si plusieurs autonomies sont touchées, cela devient du ressort de l'Etat, mais les interventions se font après demande du gouvernement de l'autonomie et du ministre de l'Intérieur.

Les plans de secours sont approuvés par la Commission après avis de trois organismes : Etat, Généralité, Commune. En cas de grande catastrophe naturelle en Catalogne, le commandement des secours resterait en Catalogne, avec des moyens mis à disposition par le reste du pays.

Le risque « feux de forêts » pour la Catalogne, qui doit gérer également les inondations, la neige, et les avalanches, est observé depuis un Centre de Commandement Avancé (CCA) dirigé par les sapeurs pompiers.

Les pompiers en Catalogne sont des agents de la Généralité, sauf à Barcelone où ils sont municipaux. Ils sont au nombre de 2 000 pompiers professionnels, 1 500 pompiers volontaires et 850 pompiers à Barcelone. Les volontaires formés chez les sapeurs pompiers peuvent servir directement sur les interventions, les autres volontaires sont cantonnés dans la logistique

Ils disposent pour les feux de forêts de 3 hélicoptères (1 500 l) appartenant à la Généralité, le reste étant loué.

Les pompiers de Catalogne sont en liaison avec Valabre, et ont un accord historique pour passer les frontières en cas de besoin ; toutefois, cette procédure est assez lourde, et la Protection civile de Catalogne souhaiterait un contact permanent avec l'Ariège et la Haute Garonne.

Les sapeurs pompiers ont la charge de la prévention, sauf pour la forêt qui est à charge du ministère de l'Agriculture, disposant d'un personnel de vigie.

En Italie, on compte près de 10 000 incendies par an. La prévention est du ressort du corps forestier de l'Etat depuis 1930. Deux fortes périodes d'incendie dominent : en été dans le sud, en hiver dans l'arc des Alpes.

Le phénomène est en régression, la surface ravagée a bien diminué puisque, l'an passé, il n'y a guère eu plus de 50 000 hectares détruits.

Les régions sont toujours assistées par les Corps d'Etat, les pompiers et des volontaires ; l'armée ou la protection civile peut être appelée en cas de sinistre important.

4.2. La gestion en France

En France, la crise importante est gérée par la Sécurité civile, qui a partagé le territoire en sept entités (voir carte).

Les feux de forêts du Sud-Est sont donc du ressort du CIRCOSC de VALABRE. Le Colonel NARDIN qui commande le dispositif définit ainsi la stratégie :

    ù une occupation massive du terrain dès qu'un risque est annoncé,

    ù un guet armé afin de détecter très précocement les départs de feux,

    ù avoir une hiérarchie de commandement.

La partie amont -prévention- est du ressort du ministère de l'Agriculture, pour l'entretien des pistes forestières, des massifs...

Comme on l'a déjà vu, le Conservatoire de la forêt méditerranéenne est né de la volonté politique en 1986. Doté au départ de 100 MF de la part de l'Etat et de 100 MF des collectivités, il connaît actuellement une baisse sensible, les crédits budgétaires étant réduits de 50 MF, ceux des collectivités également. Cette baisse compromet une stratégie de 10 ans qui mobilise 35 000 personnes.

Le dispositif opérationnel est en vigueur du 15 juillet au 10 septembre, mais peut faire l'objet d'aménagement si besoin est. Une réunion d'Etat-major a lieu tous les matins et soirs à Valabre, où Météo-France détache un ingénieur prévisionniste pendant toute la période estivale. Deux plans d'alerte, ALARME pour le jour et ALADIN pour la nuit, existent.

L'autorité responsable suivant l'importance du sinistre est le Préfet de zone de défense, ou le préfet par département, ou le maire.

Le dispositif de prévision surveillance et d'alerte terrestre et aérien coordonné par la Sécurité civile (CIRCOSC de VALABRE) comprend pour les 15 départements du Sud-Est, 27 000 sapeurs-pompiers volontaires et professionnels des départements, disposant de 3 500 véhicules, 1 800 hommes des unités de sécurité civile avec 1 000 sapeurs pompiers de renfort et 2 700 militaires mis à disposition en tant que de besoin par l'autorité militaire; une cinquantaine d'aéronefs spécialisés (Canadairs, trackers, hélicoptères...) est à disposition. La location des bombardiers d'eau C130 revient à 6 MF l'appareil par an.

La règle d'intervention est l'anticipation. Rappelons simplement que l'énergie dégagée par 1 ha de forêt est équivalent à celle de 4 centrales nucléaires par seconde.

Une prévision météorologique journalière donne le niveau du risque, sur 91 zones météo, en fonction duquel est mise en place le guet aérien armé et le déploiement des patrouilles pour intervenir dès l'éclosion des feux et assurer une présence dissuasive dans les secteurs sensibles ; on peut compter jusqu'à 600 patrouilles par jour. Il faut signaler que policiers, gendarmes, forestiers, sapeurs et harkis (1 000) et comités communaux feux de forêts participent à ces actions préventives.

Ce dispositif a fait la preuve de son efficacité, puisque la surface des feux à l'attaque et leur surface moyenne finale diminuent constamment et que la population joue un rôle très important dans l'alerte.

5. LA RECONSTRUCTION

Entre la reconstitution naturelle d'un massif et le reboisement avec certaines essences moins sensibles à l'incendie, les choix ne sont pas toujours très explicites.

Le mythe de la forêt qui ne brûle pas a vécu, hormis l'idée de replanter la zone incendiée par des arbres « métalliques ». Il existe des essences plus résistantes les unes que les autres à la combustion, qui ont des capacités à brûler et à recoloniser ou des capacités à résister au feu, mais le risque zéro n'existe pas en forêt.

Après un sinistre, il est toujours plus facile de faire passer quelques idées. Le mitage des habitations est un réel problème, peu d'autorités s'engageant dans des opérations spectaculaires de destruction. Aussi faut-il être particulièrement vigilant sur de nouvelles installations.

D'autres grands états ont connu des problèmes similaires et ont imposé des protections individuelles aux constructions en lisière de forêt, que ce soit en Californie ou en Nouvelle Galles du Sud. Les maisons doivent s'équiper de systèmes d'arrosage permettant un effet retardant sur l'incendie. De même, l'obligation d'avoir une piscine d'une certaine capacité -remplie- et une motopompe puissante est elle parfaitement acceptée.

Lorsque cela se produit en France, et bien qu'une piscine puisse permettre d'économiser de précieuses citernes et du temps, il n'est pas rare de tomber sur de sérieuses réticences de propriétaires, voire l'impossibilité de pomper sans le matériel des pompiers.

L'exemple de l'incendie d'Oakland, près de San Francisco, où une maison a flambé toutes les secondes pendant 3 heures, est à méditer. Sur une herbe sèche qui s'enflamme, les pompiers interviennent, éteignent le feu, montent une garde de nuit, mais au matin suivant avec un vent fort, c'est la reprise et la propagation. Dès un premier déblayage, et en moins d'une semaine, le sol a été fixé par un semis de gazon à pousse rapide effectué par hélicoptère. La reconstruction est intervenue très rapidement, grâce aux assurances qui ont permis en général de prévoir plus grand que précédemment à condition d'augmenter la prévention.

6. CONCLUSION

Selon Guy-Benoît de COIGNAC, Président de l'association pour la forêt méditerranéenne, il existe une grande frustration chez les forestiers : les pompiers disent être là pour protéger les vies et les biens avant la forêt.

Il est vrai qu'il existe des choix d'intervention :

    ù protection des biens ou protection des forêts, les biens peuvent être remplacés en quelques mois, ou quelques années, la forêt mettra des dizaines d'années à revenir ;

    ù problème de compétence entre les forestiers et les pompiers ;

    ù problème de responsabilité entre l'Etat et les collectivités locales, et la loi ne dit pas grand chose à ce sujet.

Par ailleurs, les remarquables efforts entrepris ces dix dernières années ont eu des résultats : surface brûlée moins importante, vies humaines mieux protégées, effort de citoyenneté des populations. Ces résultats n'existent que parce que des moyens substantiels ont été débloqués. Si les gros investissements en équipement peuvent être aujourd'hui considérés comme réalisés, il n'en demeure pas moins vrai que le fonctionnement ne peut être réduit davantage. Si le maillage de la surveillance est trop lâche, celle-ci deviendra très aléatoire et donc inefficace.

L'argent ne doit pas être là uniquement quand ça brûle, il est nécessaire pour la prévention.

La prévention passe aussi par une forêt contrôlée et entretenue, quitte à freiner son expansion naturelle. Il est nécessaire de prévoir des coupures pour le schéma de défense contre l'incendie et de maintenir un espace ouvert.