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- - Document mis en distribution le 14 mai 1998 ![]() N° 899 ______ ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 ONZIÈME LÉGISLATURE Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 13 mai 1998. RAPPORT FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES(1) SUR LA PROPOSITION DE LOI DE M. BERNARD PONS portant généralisation du chèquevacances et modifiant lordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 (n° 218), PAR M. Renaud Muselier, Député. (1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page. Tourisme et loisirs. La commission des affaires culturelles, familiales et sociales est composée de : M. Jean Le Garrec, président ; MM. René Couanau, Jean-Michel Dubernard, Jean-Paul Durieux, Maxime Gremetz, vice-présidents ; Mme Odette Grzegrzulka, MM. Denis Jacquat, Noël Mamère, Patrice Martin-Lalande, secrétaires ; MM. Yvon Abiven, Bernard Accoyer, Mme Sylvie Andrieux, MM. André Aschieri, Gautier Audinot, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, MM. Jean-Paul Bacquet, Jean-Pierre Baeumler, Pierre-Christophe Baguet, Jean Bardet, Jean-Claude Bateux, François Bayrou, Jean-Claude Beauchaud, Mmes Huguette Bello, Yvette Benayoun-Nakache, M. Patrick Bloche, Mme Marie-Thérèse Boisseau, MM. Jean-Claude Boulard, Bruno Bourg-Broc, Mme Christine Boutin, MM. Jean-Paul Bret, Victor Brial, Louis de Broissia, Alain Calmat, Pierre Carassus, Pierre Cardo, Roland Carraz, Mme Véronique Carrion-Bastok, MM. Laurent Cathala, Jean-Charles Cavaillé, Bernard Charles, Jean-Marc Chavanne, Jean-François Chossy, Mme Marie-Françoise Clergeau, MM. Georges Colombier, François Cornut-Gentille, Mme Martine David, MM. Bernard Davoine, Lucien Degauchy, Marcel Dehoux, Jean Delobel, Jean-Jacques Denis, Mme Monique Denise, M. Dominique Dord, Mme Brigitte Douay, MM. Guy Drut, Nicolas Dupont-Aignan, Yves Durand, René Dutin, Christian Estrosi, Claude Evin, Jean Falala, Jean-Pierre Foucher, Jean-Louis Fousseret, Michel Françaix, Mme Jacqueline Fraysse, M. Yves Fromion, Mmes Catherine Génisson, Dominique Gillot, MM. Jean-Pierre Giran, Michel Giraud, Jean Glavany, Gaëtan Gorce, François Goulard, Jean-Claude Guibal, Mme Paulette Guinchard-Kunstler, MM. Georges Hage, Francis Hammel, Mme Cécile Helle, MM. Pierre Hellier, Michel Herbillon, Guy Hermier, Mmes Anne-Marie Idrac, Françoise Imbert, Muguette Jacquaint, MM. Maurice Janetti, Serge Janquin, Armand Jung, Bertrand Kern, Christian Kert, Jacques Kossowski, Mme Conchita Lacuey, MM. Jacques Lafleur, Robert Lamy, Edouard Landrain, Pierre Lasbordes, Mme Jacqueline Lazard, MM. Maurice Leroy, Patrick Leroy, Maurice Ligot, Gérard Lindeperg, Patrick Malavieille, Alfred Marie-Jeanne, Mme Gilberte Marin-Moskovitz, MM. Didier Mathus, Jean-François Mattei, Mme Hélène Mignon, MM. Jean-Claude Mignon, Jean-Marie Morisset, Renaud Muselier, Philippe Nauche, Henri Nayrou, Alain Néri, Yves Nicolin, Bernard Outin, Michel Pajon, Michel Péricard, Mme Geneviève Perrin-Gaillard, MM. Bernard Perrut, Pierre Petit, Mme Catherine Picard, MM. Jean Pontier, Jean-Luc Préel, Alfred Recours, Gilles de Robien, François Rochebloine, Marcel Rogemont, Yves Rome, Jean Rouger, Rudy Salles, André Schneider, Patrick Sève, Michel Tamaya, Pascal Terrasse, Gérard Terrier, Mmes Marisol Touraine, Odette Trupin, MM. Anicet Turinay, Jean Ueberschlag, Jean Valleix, Emile Vernaudon, Philippe Vuilque, Jean-Jacques Weber, Mme Marie-Jo Zimmermann. SOMMAIRE Pages INTRODUCTION 5 I.- LES VACANCES, FACTEUR DINSERTION SOCIALE 7 II.- LE CHÈQUE-VACANCES, UNE RÉUSSITE INDÉNIABLE ... MAIS LIMITÉE 11 A. LE DISPOSITIF MIS EN PLACE EN 1982 11 1. Attribution des chèques-vacances 12 2. Financement des chèques-vacances 13 3. Utilisation des chèques-vacances 15 4. LAgence nationale pour les chèques-vacances 17 B. UN SUCCÈS INDÉNIABLE QUI COMPREND SES PROPRES LIMITES 17 1. Les autres modalités dacquisition des chèques-vacances 17 2. Succès et limites du dispositif actuel 18 III.- UNE PROPOSITION DE LOI POUR GÉNÉRALISER LE CHÈQUE-VACANCES 21 IV.- ANALYSE DES ARTICLES DE LA PROPOSITION DE LOI 23 Article premier (article 1er de lordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 portant création du chèque-vacances) : Champ dapplication du dispositif 23 Article 2 (article 2 de lordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 portant création du chèque-vacances) : Plafond de revenus 25 Article 3 (article 2 de lordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 portant création du chèque-vacances) : Exonérations sociales et fiscales 26 Article 4 (article 2 de lordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 portant création du chèque-vacances) : Exonération des taxes sur les salaires 29 Article 5 (article 3 de lordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 portant création du chèque-vacances) : Financement des chèques-vacances 30 Article 6 (article 4 de lordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 portant création du chèque-vacances) : Coordination 33 Article 7 (article 5 de lordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 portant création du chèque-vacances) : Agence nationale pour les chèques-vacances 33 Article 8 (article 5 de lordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 portant création du chèque-vacances) : Chèques-vacances distribués par les organismes à caractère social 35 Article 9 : Gage financier 36 TRAVAUX DE LA COMMISSION 39 Créé par lordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982, le système des chèques-vacances a pour objectif de mettre en place et de développer une aide à la personne pour permettre le départ en vacances des salariés les plus défavorisés et des personnes à leur charge, afin de réduire les inégalités devant le droit aux vacances pour tous. La constante progression du chiffre daffaires de lAgence nationale du chèque-vacances (établissement public industriel et commercial créé par lordonnance précitée pour émettre et gérer les chèques-vacances) atteste le succès de la formule ; cest ainsi quen 1996, la distribution de 2,4 milliards de francs de chèques à plus dun million de salariés a permis à quatre millions de personnes de bénéficier des avantages de ce système. De plus, le chèque-vacances a pleinement rempli sa mission dintégration sociale puisque 67 % des porteurs de chéquiers ont un revenu inférieur à 15 000 F. On estime dautre part que le tiers au moins de ses bénéficiaires ne prendrait pas de vacances sans ce système. Enfin, limpact économique du chèque-vacances est important puisquil représente de 13 à 35 % du budget-vacances de ses bénéficiaires et que les porteurs de chèques choisissent des sites et des formules daccueil agréés partout en France. On peut dire que le chèque-vacances induit une dépense trois fois supérieure au volume des chèques émis, estimée globalement en 1997 à près de 10 milliards de francs sur lensemble du territoire national. Toutefois, malgré cette réussite, il faut bien constater quaujourdhui encore près de 37 % des Français ne partent pas en vacances, dont une bonne moitié pour des raisons économiques. Or, le chèque-vacances voit en même temps sa généralisation freinée par différents obstacles juridiques. Sil rencontre en effet un vif succès dans les grandes entreprises dotées dun comité dentreprise, les 7,5 millions de salariés des petites et moyennes entreprises, ainsi que les artisans et les commerçants sont de fait exclus du bénéfice de cet instrument de promotion de vacances populaires. Pour remédier à cette situation, toutes les organisations syndicales et patronales, toutes les organisations du tourisme social ont réclamé, depuis longtemps, lexonération des charges sociales de la contribution de lemployeur au chèque-vacances, sur le modèle du titre-restaurant, et lélargissement de son champ dapplication. Aussi, lobjet de la proposition de loi présentée par M. Bernard Pons et les membres du groupe RPR est-il de répondre à cette forte attente sociale en reprenant un avant-projet de loi préparé par le ministère du tourisme en 1997, avant la dissolution, et dont les grandes lignes avaient été largement approuvées par tous les partenaires concernés. Elle modifie ainsi quelques points essentiels du régime juridique du chèque-vacances afin de créer les conditions de son développement le plus large et den faire le principal instrument daide aux vacances familiales et populaires. I.- LES VACANCES, FACTEUR DINSERTION SOCIALE En 1936, la création des congés payés, en consacrant un droit aux vacances pour tous , reconnaissait ce temps de détente et de ressourcement comme un élément normal du mode de vie des Français. Peu à peu, avec linstitutionnalisation des congés payés de trois semaines (en 1956), portés à quatre semaines après les accords Renault (1963), les structures daccueil relevant dun tourisme social corporatif, catégoriel ou associatif se sont développées. Ces installations étaient destinées à permettre au plus grand nombre de partir en vacances au meilleur prix. Parallèlement, les hôtels, les campings, les clubs de vacances, les gîtes ruraux se sont développés. Avec la croissance de loffre, la demande de loisirs et de vacances sest progressivement implantée dans les habitudes des Français, sans pour autant atteindre lobjectif souhaité des vacances pour tous , même si, pour la majorité dentre eux, loisirs et vacances sont des droits considérés comme acquis. En 1996, les analyses du ministère du tourisme montrent que 35 millions de Français sont partis en vacances, 62 % de la population ayant quitté pour quatre jours consécutifs au moins, toutes saisons confondues, leur domicile habituel pour une motivation de loisirs. Selon lINSEE, environ 40 % des Français ne partent pas en vacances et 17 % dentre eux y renoncent faute de moyens financiers suffisants. Il convient aussi de remarquer que 25 % de nos concitoyens ne sont jamais partis au cours des quatre dernières années et que 48 % font des sacrifices sur le budget vacances-loisirs. Alors que les loisirs et le temps de vacances sont théoriquement un droit pour tous, quils jouent un rôle important dans léquilibre psychologique de nos concitoyens et ont un impact favorable sur leur santé, depuis quelques années les taux de départ restent pratiquement stationnaires. Limpact de la crise économique semble ici indéniable. Toutes les études récentes tendent en effet à prouver que le choix de partir en vacances dépend essentiellement des revenus disponibles. Les catégories professionnelles les moins favorisées sacrifient leur budget vacances et loisirs et ceux qui peuvent encore partir réduisent les durées de séjours et retiennent les solutions les plus économiques. Comme le constatait une étude du CREDOC en novembre 1996, le développement de la pauvreté et de lexclusion conduit à ce quune bonne part de personnes concernées considèrent elles-mêmes les vacances comme un surplus, voire comme une récompense à laquelle ont droit exclusivement ceux qui travaillent et qui perçoivent un bon salaire. Les personnes concernées en concluent souvent que les vacances ne sont pas faites pour elles, mais pour des privilégiés... . Très rapidement, il est possible de définir deux grands groupes de personnes actuellement exclus du droit aux vacances et aux loisirs. Il sagit tout dabord des personnes à ressources modestes ou des personnes en situation demploi précaire, telles les personnes en contrat à durée déterminée, en contrat emploi solidarité, les retraités au minimum vieillesse, les familles nombreuses, etc... Lautre groupe est constitué des personnes marginalisées et les plus démunies comme les chômeurs de longue durée, les allocataires du revenu minimum dinsertion en isolement social, les familles monoparentales, les personnes sans domicile fixe, les jeunes exclus du système scolaire sans qualification. Dans leur esprit, comme dans celui de la majorité de nos concitoyens, lidée existe que seuls ceux qui travaillent ont droit aux vacances ou aux loisirs, récompense dune activité professionnelle rémunérée. Pourtant, comme le rappelle et le démontre un rapport publié en juin 1997 par M. Guy Matteudi, président-directeur général de lAgence nationale pour les chèques-vacances, les vacances peuvent être un facteur dinsertion sociale. Il est notamment souligné que : Les populations exclues ne relèvent pas dune catégorie unique, elles sont complexes et hétérogènes. Les intégrer nécessite, soit de leur permettre laccès à un travail, donc à un statut social et de percevoir une rémunération, soit de les aider par des actions relevant de la solidarité nationale et de la prévention (...). Lexpérience a montré que pour les personnes les plus démunies ou exclues, rompre loisiveté et la passivité en les encourageant à envisager un projet-vacances les aide à reconstituer un lien parfois familial et social (...). Ces populations extrêmement diverses ne peuvent envisager, ni pratiquement, ni psychiquement, des solutions à leurs problèmes ; elles sont enfermées dans la passivité, dans une sorte de retraite de survie et vivent la frustration. Pour elles, les loisirs et les vacances, occasions de détente et de divertissement, sont également des moments de socialisation, facteurs dautonomie et de développement de la personnalité. Elles peuvent occuper une place particulière dans un parcours dinsertion. Toutefois, cela implique une aide financière, une organisation du temps et un accompagnement. Partir en vacances, cest dabord être comme les autres , mais également accepter un certain nombre de ruptures qui peuvent avoir un effet positif sur la vie quotidienne des personnes en difficulté. Ainsi, la rupture géographique facilite la mobilité par rapport à la ségrégation et à lenfermement subis sur le lieu dhabitation. La rupture avec le quotidien permet de souvrir, de retrouver le contact aux autres et de faire, à nouveau, des projets. Enfin, partir ensemble permet souvent de renouer des liens familiaux distendus par les situations dexclusion. Les vacances des plus démunis au sein de structures de tourisme populaire permettent également de révéler des situations difficiles et cachées, telles que la malnutrition, la maladie, la violence ou lalcoolisme. Hors du contexte quotidien, les familles ou les enfants peuvent plus facilement se confier aux animateurs bénévoles et aux acteurs sociaux qui les entourent. Ceux-ci peuvent alors proposer une première réponse et surtout jouer un rôle dalerte et de relais avec les travailleurs sociaux du lieu dhabitation. Dans cet esprit dinsertion sociale, les vacances des personnes les plus défavorisées, quelles soient individuelles ou collectives, sont donc conçues par les associations caritatives (tous les ans, plusieurs milliers de familles à revenus modestes partent en vacances grâce à laide dorganismes comme ATD-Quart Monde, Solidarité laïque, le Secours catholique, la Fédération nationale des centres sociaux) et les organismes sociaux comme un projet que les familles doivent monter et réussir et non comme un produit de consommation prêt à lemploi . Les familles doivent dabord comprendre quelles ont droit aux vacances et surmonter leur peur de linconnu, puis élaborer leur projet en définissant la destination, le mode de transport et dhébergement avec laide dun conseiller social. Comme lexplique le rapport de lAgence nationale pour les chèques-vacances, il sagit de sortir de la logique dassistance pour entrer dans la logique du projet. Le bénéficiaire [des aides aux vacances] se positionne sur le moyen terme, sorganise et apprend à planifier. Cest déjà un premier pas vers lautonomie. Dun point de vue financier, tous les acteurs du secteur sont daccord pour dire quune participation, même minimale, des familles est souhaitable, même si ce nest quavec le soutien des différents structures et le complément financier des différentes aides que les départs sont possibles. Cest bien dans cette logique quen 1982, le ministère du temps libre a pris la décision de créer les chèques-vacances . II.- LE CHÈQUE-VACANCES, UNE RÉUSSITE INDÉNIABLE ... MAIS LIMITÉE Destinée à contribuer à une réduction des inégalités devant le droit aux vacances pour tous et à porter remède à une situation peu satisfaisante pour les salariés à revenu modeste, linstitution des chèques-vacances résulte de lordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982. Le préambule de lordonnance situe clairement linspiration du dispositif : Le droit aux vacances reconnu aux travailleurs en 1936 na pu sinscrire dans les faits que parce quétaient mis en place certains moyens permettant de lexercer. Ces mesures ont constitué une avance décisive dans la conquête du temps libre. Pourtant, cette croissance sociale marque aujourdhui le pas. Environ un sur deux de nos compatriotes part en vacances. Ce sont les plus défavorisés, ceux dont les conditions de travail et de vie quotidienne sont les plus difficiles, qui ne partent pas, partent peu et ont le moins la possibilité de choisir le lieu et les conditions de leurs vacances. Pour porter remède à cette situation, les syndicats et les organismes à caractère social ont, depuis longtemps déjà (...) développé des actions combinant linformation des usagers, laide directe aux personnes et la mise au point de formules économiques de vacances . Inspirée de la formule inventée par la Caisse suisse de voyage REKA dès 1939, linstitution en 1982 des chèques-vacances en France nest donc pas une totale nouveauté. Dès 1971, les principales organisations syndicales, les mouvements coopératifs et mutualistes et les associations de tourisme sétaient regroupés au sein de l Union coopérative de chèques-vacances et réclamaient une légalisation du système. A. LE DISPOSITIF MIS EN PLACE EN 1982 Linnovation essentielle de lordonnance du 26 mars 1982 réside dans la mise en place dun système de distribution de chèques-vacances par lentreprise, avec bonification par lemployeur. La technique du chèque-vacances est comparable dans son principe à celle du titre-restaurant ou du chèque-repas . Lemployeur acquiert auprès dun organisme, lAgence nationale pour les chèques-vacances, des titres nominatifs appelés chèques-vacances (article 1er de lordonnance), destinés à ceux de ses salariés qui en ont fait la demande et qui remplissent certaines conditions, et financés pour partie par lépargne de ces salariés, pour lautre par lemployeur lui-même. Ces chèques-vacances pourront par la suite être utilisés par ces salariés ou leurs ayants droit, pendant leurs vacances, pour acquitter certaines dépenses effectuées sur le territoire français auprès de prestataires de services agréés par lAgence nationale pour les chèques-vacances. 1. Attribution des chèques-vacances Seuls les salariés de certaines entreprises ou établissements peuvent, sous conditions de revenus, acquérir des chèques-vacances à condition, cependant, que leur employeur décide de lintroduction du système dans lentreprise ou létablissement. . Entreprises et établissements concernés Larticle 1er de lordonnance ouvre laccès au dispositif des chèques-vacances aux salariés des établissements industriels, commerciaux, artisanaux ou agricoles (même si ces établissements ont la forme dune coopérative), ainsi quaux salariés des professions libérales, des offices ministériels, des syndicats professionnels, des sociétés civiles, des associations et groupements de quelque nature que ce soit. Peuvent également en bénéficier les salariés des entreprises nationales à caractère industriel ou commercial, des sociétés déconomie mixte dont le capital est détenu à plus de 30 % par lEtat ou des entreprises nationales à caractère industriel ou commercial ou à plus de 50 % par des collectivités locales, ainsi que les salariés non statutaires des chambres de commerce et dindustrie et des chambres dagriculture. . Conditions dattribution au salarié A lorigine, selon larticle 2, alinéa premier de lordonnance, seuls les salariés dont limpôt sur le revenu ne dépassait pas un plafond de 1 000 francs, avant imputation de lavoir fiscal, du crédit dimpôts et des prélèvements et retenues non libératoires, étaient susceptibles de bénéficier du système. Cette somme plafond étant manifestement trop faible, un premier relèvement a été opéré par la loi de finances pour 1984 afin de porter le plafond à 5 000 F, celui-ci étant finalement porté à 9 000 F par la loi de finances pour 1988, cette somme étant réévaluée chaque année dans la même proportion que la première tranche du barème de limpôt sur le revenu. Ce plafond, pour 1998, est fixé à 11 350 F (impôt sur le revenu payé en 1997 sur les revenus 1996). . Décision de lemployeur dintroduire le système Il faut avant tout rappeler que le système des chèques-vacances nest en rien obligatoire pour un employeur. Par contre, si celui-ci décide de lintroduire dans son entreprise, il doit respecter certaines règles. En premier lieu, avant de déterminer les modalités dattribution des chèques-vacances, lemployeur doit procéder à la consultation du comité dentreprise ou, à défaut, des délégués du personnel ou de toute autre instance de concertation (article 3, alinéa premier, de lordonnance) sur le principe même de lintroduction du chèque-vacances puis, sur les grandes lignes du dispositif proposé (montant de la contribution de lemployeur, critère de modulation de cette contribution par catégorie de salariés et niveaux dimposition, modalités de versement de lépargne par les salariés, etc...). En second lieu, il doit conclure une convention avec lAgence nationale pour les chèques-vacances qui précise les conditions dacquisition et de distribution des chèques par lentreprise. Enfin, lemployeur doit conclure un contrat avec chaque salarié intéressé par le dispositif, qui peut notamment préciser le montant des chèques à acquérir, la durée de la période dépargne, les montants des contributions respectives de lemployeur et du salarié, les dates et mode de versement des participations. 2. Financement des chèques-vacances Le financement des chèques-vacances est assuré grâce à des versements obligatoires du salarié qui sest déclaré intéressé par le système et de son employeur. Ce financement peut être complété par une contribution du comité dentreprise. Lensemble de ces sommes sont immédiatement versées à lAgence nationale pour les chèques-vacances, qui les comptabilise. A la fin de la période dépargne, lAgence restitue les sommes collectées, diminuées dun prélèvement de 1 % pour frais de gestion, au bénéficiaire, sous forme de chéquiers. . Contribution du salarié A lorigine, selon lalinéa 2 de larticle 3 de lordonnance, les salariés ne pouvaient acquérir des titres-vacances que par des versements mensuels obligatoirement répartis sur au moins huit mois et compris entre 2 % et 10 % du salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) apprécié sur une base mensuelle . Tenant compte des résultats du système en 1983, le Gouvernement a inséré des dispositions dans la loi de finances pour 1984 diminuant la durée dépargne obligatoire de huit mois à quatre mois et augmentant corrélativement le montant des versements obligatoires des salariés qui doivent désormais être compris entre 4 % et 20 % du SMIC. . Contribution de lemployeur A chaque versement du salarié doit nécessairement correspondre un versement de lemployeur. La contribution de lemployeur à lacquisition par un salarié de chèques-vacances est fixé à 20 % au moins et 80 % au plus de leur valeur libératoire. Cette contribution annuelle globale ne peut être supérieure à la moitié du produit, évalué au 1er janvier de lannée en cours, du nombre total de ses salariés par le salaire minimum interprofessionnel de croissance apprécié sur une base mensuelle, charges sociales comprises. En pratique, il est souvent prévu que la contribution financière de lemployeur varie en fonction du montant de limposition du salarié. Ainsi, dans une entreprise de 4 500 salariés où 300 bénéficiaires ont été retenus, la contribution de lemployeur sera de 50 % de la valeur libératoire des chèques lorsque le montant de limposition sera inférieur à 6 000 francs et de 30 % pour un impôt compris entre 6 000 et 11 350 francs (exemple donné par lANCV). . Contribution facultative du comité dentreprise La contribution de lemployeur est obligatoire puisquelle est liée à chaque versement effectué par un salarié. En revanche, la contribution du comité dentreprise est purement facultative. Ce dernier est, par conséquent, seul habilité à en décider le principe et à en préciser les conditions de mise en uvre. Si le comité dentreprise a décidé dajouter sa propre contribution à celle du chef dentreprise, le montant de la contribution du comité dentreprise ne saurait ramener lépargne de chaque salarié à moins de 20 % du montant des chèques-vacances à acquérir. . Charges fiscales pour le salarié Lavantage en nature résultant de la contribution de lemployeur à lacquisition des chèques-vacances par le salarié est exonéré de limpôt sur le revenu dans la limite du SMIC mensuel1. Lexonération fiscale concerne non seulement la contribution proprement dite de lemployeur, mais également léventuelle participation financière du comité dentreprise. La limite dexonération sapplique par personne susceptible dacquérir des chèques-vacances : la circonstance que le conjoint et les enfants dun salarié puissent bénéficier, comme lintéressé lui-même, des chèques-vacances quil acquiert avec la participation de son employeur, nest pas de nature à augmenter la limite dexonération ; mais plusieurs membres du foyer fiscal peuvent bénéficier de cette exonération lorsquétant salariés, ils ont acquis personnellement et avec laide de leur propre employeur, un certain nombre de chèques-vacances. Par contre, lorsque le total formé par la contribution de lemployeur et la participation financière du comité dentreprise excède la limite dexonération, le surplus doit être soumis à limpôt sur le revenu, dans les conditions de droit commun. Enfin, les versements effectués par les salariés nouvrent droit à aucun avantage fiscal : les sommes correspondantes ne sauraient par conséquent venir en déduction du revenu imposable. . Charges fiscales pour lemployeur La contribution de lemployeur à lacquisition de chèques-vacances par ses salariés est exonérée, dans la même limite (cest à dire un SMIC mensuel) de lensemble des taxes et participations assises sur les salaires : taxe sur les salaires, taxe dapprentissage, participations à leffort de construction et à la formation continue (loi de finances pour 1989 article 231 k bis du Code général des impôts). . Charges sociales La contribution de lemployeur est soumises aux cotisations sociales recouvrées par lURSSAF et aux cotisations dassurance chômage. En revanche, elle est exonérée des cotisations de retraite complémentaire (AGIRC et ARRCP). La participation versée par le comité dentreprise aux chèques-vacances en complément de la contribution de lemployeur est incluse dans lassiette des cotisations de sécurité sociale (instruction ministérielle du 17 avril 1985). Lépargne du salarié est, par contre, logiquement exempte de cotisations sociales. 3. Utilisation des chèques-vacances . Conditions dutilisation Les chèques-vacances peuvent être utilisés par le salarié acquéreur, son conjoint et les personnes à leur charge en paiement des dépenses effectuées sur le territoire national aux collectivités publiques et aux prestataires de services agréés pour leurs vacances, pour les transports en commun, leur hébergement, leurs repas, leurs activités de loisirs (article 1er, alinéa 2 de lordonnance). Dun format analogue à celui des titres-restaurants, le chèque-vacances existe sous forme de coupures de 50 ou 100 francs (les chèques à valeur faciale de 10 francs ont été supprimés en 1988). Les titres-vacances ne peuvent être utilisés comme moyen de paiement que sur le territoire français et uniquement auprès des collectivités publiques et des prestataires de services qui ont fait lobjet dun agrément par lAgence nationale pour les chèques-vacances. De 5 000 fin 1983, ces points daccueil sont désormais 150 000, dont plus de 60 000 répertoriés dans lannuaire chèques-vacances publié chaque année. Il sagit, notamment, de toutes les associations de tourisme (comme les VVF ou lUCPA), des organismes de locations saisonnières (gîtes ruraux, Pierre et Vacances), des clubs de vacances (Club Méditerranée...), des campings-caravanings, des hôtels de une à trois étoiles, le plus souvent liés aux fédérations professionnelles nationales (Ibis, Novotel, Logis de France...), des restaurants, des transporteurs (SNCF, Air France, compagnies maritimes, péages dautoroutes...), des agences de voyage, des activités sportives, culturelles et artistique et des parcs de loisir. Par ailleurs, de nombreux prestataires offrent des avantages supplémentaires aux porteurs de chèques-vacances, comme cela est dailleurs prévu par le troisième alinéa de larticle 1er de lordonnance (réduction de tarifs SNCF ou sur Air France par exemple). . Durée dutilisation La date limite de validité des chèques-vacances est fixée au 31 décembre de la deuxième année civile suivant lannée démission. Ainsi les chèques-vacances émis en 1996 pourront être utilisés jusquau 31 décembre 1998. Dans les trois mois suivant le terme de la période dutilisation, les chèques-vacances non utilisés pourront être échangés contre des chèques-vacances dune même valeur (art. 4, al. 2 de lordonnance). A défaut, ils seront périmés, et leur contre-valeur sera affectée par lAgence nationale pour les chèques-vacances au bénéfice de catégories sociales défavorisées notamment sous la forme de bourses de vacances. Il est par ailleurs prévu que, sur demande motivée, le salarié titulaire de chèques-vacances puisse obtenir le remboursement immédiat de sa contribution à lachat de ces titres. 4. LAgence nationale pour les chèques-vacances LAgence nationale pour les chèques-vacances, créée par larticle 5 de lordonnance du 26 mars 1982, est un établissement public à caractère industriel et commercial doté de lautonomie financière. LAgence nationale pour les chèques-vacances est chargée de la gestion du système. Elle reçoit les versements correspondants aux contributions des salariés, des employeurs et des comités dentreprise, signe les conventions avec les employeurs et émet les chèques-vacances quelle doit ensuite rembourser aux prestataires de services agréés auxquels ils ont été remis en paiement. Par ailleurs, lAgence peut financer, avec ses excédents de gestion et les sommes correspondant aux chèques périmés, des opérations de nature à faciliter des activités de loisirs et de tourisme social. Cette mission a été confirmée et renforcée par le décret n° 92-1272 du 7 décembre 1992 qui précise que lAgence peut attribuer des aides en faveur des actions relatives aux équipements de tourisme et de loisir à vocation sociale ainsi quen faveur des actions contribuant à lapplication des politiques sociales du tourisme et des vacances . B. UN SUCCÈS INDÉNIABLE QUI COMPREND SES PROPRES LIMITES Linnovation essentielle de lordonnance du 26 mars 1982 réside dans la mise en place dun système de distribution de chèques-vacances par lentreprise, avec bonification par lemployeur. 1. Les autres modalités dacquisition des chèques-vacances A côté des chèques-vacances acquis par le canal des entreprises, il existe dautres circuits dacquisition qui, en volume financier, représentent la très large majorité des chèques distribués. Tout dabord, après différentes expérimentations, le bénéfice des chèques vacances a été étendu en 1987 à lensemble des fonctionnaires, agents de lEtat et salariés du secteur public. Gérée par la Fédération nationale des mutuelles de la fonction publique à qui lEtat a confié cette mission, la distribution des chèques-vacances aux fonctionnaires et aux agents de lEtat est soumise pour lessentiel aux conditions fixées par lordonnance du 26 mars 1982. Ensuite et surtout, larticle 6 de lordonnance prévoit que les aides aux vacances attribuées par les organismes à caractère social, notamment les caisses dallocations familiales, les caisses de mutualité sociale agricole, les bureaux daide sociale, les caisses de retraite, les comités dentreprise, les mutuelles ou les services sociaux de lEtat, des collectivités publiques ou de leurs établissements publics, peuvent être versées sous forme de chèques-vacances . Lorganisme social habilité à attribuer des aides aux vacances qui acquiert ainsi des chèques-vacances nest pas tenu de respecter les conditions dattribution fixées pour lacquisition des chèques-vacances par le canal de lentreprise. Leurs modalités de distribution sont donc beaucoup plus souples et un salarié ne pouvant prétendre à lattribution de chèques vacances acquis par son employeur parce que son impôt sur le revenu est supérieur au plafond de 11 350 francs pourra éventuellement y avoir droit par ce biais. Les modalités dacquisition des chèques-vacances auprès de lAgence nationale pour les chèques-vacances doivent cependant être définies par convention entre lAgence et lorganisme considéré. Enfin, si les aides aux vacances attribuées par les organismes sociaux sous forme de chèques-vacances ne bénéficient pas des exonérations fiscales prévues par lordonnance (instruction fiscale du 16 février 1984), par contre, la participation des comités dentreprises aux chèques-vacances est exonéré de toute charge sociale (lettre circulaire de lACOSS du 31 octobre 1984 et instruction ministérielle du 17 avril 1985). 2. Succès et limites du dispositif actuel · Ces deux autres circuits de distribution des chèques-vacances ont très largement contribué au succès de la formule. Alors quaprès deux ans dexistence, le bilan de linstitution des chèques-vacances pouvait être jugé catastrophique et que, dans les années 1986-1987, la privatisation de lAgence nationale pour les chèques-vacances, voire la suppression de la formule furent envisagées, le succès de linstitution est aujourdhui salué. Les chiffres et bilans présentés par lAgence nationale pour les chèques-vacances confirment cette opinion. En 1983, le montant des chèques-vacances émis atteignait difficilement 4,6 millions de francs. En 1997, 3 milliards de francs de chèques-vacances ont été distribués par un réseau de près de 10 000 organismes (employeurs, comités dentreprises, mutuelles et organismes paritaires) à un million dattributaires. Au total, quatre millions de personnes ont bénéficié de ces chèques et ont pu les utiliser dans 150 000 points daccueil agréés pour régler leurs dépenses de transports (23,8 % des utilisations), dhébergement (39,1 %), de restauration (15,6 %), de loisirs sportifs ou culturels (9,6 %) voire dagence de voyages (11,9 %). 44 % des chèques-vacances sont utilisés pendant les grandes vacances, 46 % sont répartis entre grandes vacances et courts séjours et 10 % sont consacrés aux weeks-ends et loisirs de proximité. Globalement, un tiers des porteurs utilise une partie de ses chèques pour des loisirs de proximité. LAgence nationale pour les chèques-vacances, longtemps déficitaire, est aujourdhui bénéficiaire, de sorte que ses missions ont été élargies afin, comme on la vu, de contribuer au développement du tourisme social et populaire. Dès 1982, lAgence nationale pour les chèques-vacances avait choisi de ne pas créer son propre réseau déquipements daccueil touristique mais de contribuer au financement de la rénovation du patrimoine existant. Depuis 1994, 57 millions de francs ont ainsi été consacrés à la rénovation déquipements touristiques à vocation sociale et à des actions de solidarité, dont 22,7 millions de francs en 1997. LAgence nationale pour les chèques-vacances a étendu son action à des publics particulièrement défavorisés grâce aux fonds correspondant à la contre-valeur des chèques-vacances périmés. Elle attribue désormais des bourses-vacances à de nombreux organismes caritatifs ou sociaux (Secours Catholique, Secours Populaire, ATD Quart-Monde, Solidarité Laïque, Association des paralysés de France,...). En 1996, 4,5 millions de francs ont ainsi été transformés en bourses-vacances ou utilisés à des fins daction sociale. Enfin, lAgence concourt efficacement à la promotion des professionnels du tourisme. Elle mène toute lannée des actions spéciales vers les prescripteurs de chèques-vacances pour proposer et mettre en valeur les produits touristiques avantageux ainsi que les services et activités de loisir de proximité recherchés par les porteurs de chèques-vacances. Une politique efficace de partenariat sest par ailleurs instaurée avec les professionnels du tourisme. · Il reste que le succès global et peu contestable aujourdhui de la formule ne doit pas dissimuler le relatif échec des chèques-vacances distribués aux salariés par le canal de lentreprise. En 1997, ceux-ci nont représenté que 4,7 % des chèques émis (contre 37,8 % par le canal des comités dentreprises et des organismes sociaux et près de 60 % par ladministration centrale et locale , La Poste et France Telecom), soit 140 millions de francs. Plusieurs raisons expliquent ce demi-échec. Dune part, le système mis en place en 1982 est purement facultatif et laissé à linitiative de lemployeur et à sa libre appréciation. Dautre part, la charge financière quimplique la contribution patronale au financement des chèques-vacances nest que très faiblement compensée par des incitations sociales ou fiscales. La contribution patronale est soumise aux cotisations sociales dans les conditions de droit commun (à lexception des cotisations pour les retraites complémentaires) et, en matière fiscale, simplement exonérée des taxes et participations sur les salaires, dans la limite du SMIC apprécié sur une base mensuelle. Cette absence davantages suffisants pour les employeurs a eu pour effet de les conduire, dans la très grande majorité des cas, à transférer aux comités dentreprise lessentiel du rôle de distributeur des chèques-vacances. De ce fait, les petites et moyennes entreprises, dépourvues de comités dentreprise, ont été, de facto, exclues de ce système daide. Ainsi, seules 23 % des entreprises clientes des chèques-vacances sont des entreprises de moins de cinquante salariés, alors que 41 % sont des entreprises de cent à cinq cents salariés. Le système des chèques-vacances est aujourdhui un système qui fonctionne bien, qui offre à la fois le choix et la diversité et peut concerner toutes les formes de tourisme. La conjoncture économique étant peu favorable à laccroissement des dépenses de loisir et de tourisme, ce dispositif est une solution sociale adaptée à une situation de crise. Les chèques-vacances sont donc un instrument privilégié de solvabilisation de la demande pour laccès de tous aux vacances, mais ils nécessitent aujourdhui des aménagements afin de pouvoir bénéficier à un plus grand nombre de personnes. III.- UNE PROPOSITION DE LOI POUR GÉNÉRALISER LE CHÈQUE-VACANCES · En proposant de lever les obstacles juridiques et financiers que rencontre actuellement la généralisation du chèque-vacances, la présente proposition de loi apporte une réponse attendue depuis longtemps par les organisations syndicales, patronale et de tourisme social et permet lextension du bénéfice du système aux salariés des petites et moyennes entreprise, soit un potentiel de 7 millions de clients supplémentaires. Deux dispositions essentielles peuvent être ici soulignées : lélargissement du champ dapplication du système aux professions non encore couvertes par le dispositif (article 1er de la proposition de loi) et lexonération de charges sociales pour la contribution de lemployeur au financement des chèques-vacances (articles 3 et 4 de la proposition de loi). Plus largement, le texte modifie plusieurs articles de lordonnance de 1982 afin de créer les conditions dun développement maximal et équilibré du système des chèques-vacances. Celui-ci se voit, de ce fait, consacré comme le principal instrument daide aux vacances populaires, le mécanisme de laide étant, dans cet esprit, encore plus axé vers les familles et les titulaires des revenus les plus faibles. Enfin, la proposition de loi précise et actualise les missions de lAgence nationale du chèque-vacances, en confirmant son monopole démission mais en lincitant à assurer une plus grande diffusion du titre en France et à létranger. · Lobjectif de cette proposition de loi est donc de participer à la réduction des fortes inégalités existant dans notre pays dans le domaine des loisirs tout en favorisant la promotion du tourisme populaire. La fonction sociale du chèque-vacances est confirmée grâce notamment à la limitation de son accès aux revenus les plus bas et son rôle renforcé dans la politique familiale. Par ailleurs, on peut attendre de ce dispositif rénové, un effet bénéfique sur la demande touristique nationale, et donc sur lactivité et lemploi dans ce secteur. En effet, dun point du vue macro-économique, la distribution du chèque-vacances sanalyse comme une incitation à constituer une épargne pour des vacances en France et à la dépenser sur le territoire national (le chèque-vacances ne peut être distribué que sur le territoire national et pour des services touristiques très peu importateurs). Quand un chef dentreprise décide de mettre en place le système, il incite, en fait, ses salariés à consommer, ceux-ci dépensant, en moyenne, trois fois la valeur des chèques-vacances quils ont pu acquérir. A lheure où la consommation stagne, une mobilisation du pouvoir dachat vers une consommation totalement nationale ne peut donc que profiter à notre économie. IV.- ANALYSE DES ARTICLES DE LA PROPOSITION DE LOI Article premier (article 1er de lordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 portant création du chèque-vacances) Champ dapplication du dispositif · A lheure actuelle, larticle premier de lordonnance limite le champ dapplication du système des chèques-vacances aux salariés des entreprises, sociétés et organismes visés par les articles L. 223-1 et L. 351-17 du code du travail . Cette dernière référence est aujourdhui obsolète, le contenu de larticle L. 351-17 correspondant désormais aux 3° et 4° de larticle L. 351-12. Comme cela a été exposé dans la présentation générale, le système des chèques-vacances est donc, en droit, accessible : - dune part aux salariés des établissements industriels, commerciaux, artisanaux et agricoles (même sils ont la forme de coopérative) ainsi quaux salariés des cabinets de professions libérales, des offices ministériels, des syndicats professionnels, des sociétés civiles, des associations et des groupements de quelque nature que ce soit (article L. 223-1 du code du travail), - et dautre part aux salariés des entreprises nationales à caractère industriel, commercial ou autres, aux salariés relevant soit des établissements publics à caractère industriel et commercial des collectivités territoriales, soit des sociétés déconomie mixte dans lesquelles ces collectivités ont une participation majoritaire, aux salariés non statutaires des chambres de métiers, des services à caractère industriel et commercial gérés par les chambres de commerce et dindustrie, des chambres dagriculture, ainsi quaux salariés des établissements et services dutilité agricole de ces chambres (3° et 4° de larticle L. 351-12 du code du travail). Dans la pratique cependant, laccès aux chèques-vacances est dores et déjà plus large puisquils sont distribués dans toute la fonction publique, nationale ou territoriale. · Le présent article permet dactualiser la rédaction de larticle premier de lordonnance (en corrigeant la référence obsolète à larticle L. 351-17 du code du travail), de la rapprocher de la réalité et délargir le champ des bénéficiaires potentiels à des professions non encore couvertes par le dispositif. En effet, en se référant désormais à lintégralité des personnes visées par larticle L. 351-12 du code du travail, larticle intègre dans le champ légal du dispositif des chèques-vacances les agents non fonctionnaires de lEtat et de ses établissements publics administratifs, ainsi que les agents non titulaires des collectivités territoriales et les agents non statutaires des établissements publics autres que ceux de lEtat. Toutes ces personnes bénéficiant dores et déjà des chèques-vacances, il sagit plus dune confirmation dune pratique que dune extension du champ du dispositif. Seuls les agents fonctionnaires de lEtat restent donc désormais hors de la définition légale du champ dapplication des chèques-vacances, alors quils peuvent en bénéficier depuis plus de dix ans. Le présent article élargit cependant le champ dapplication de lordonnance à des professions jusquici non couvertes. Dune part, la référence à larticle L. 351-13 du code du travail permettra tout dabord aux marins-pêcheurs, aux ouvriers dockers occasionnels et aux artistes non salariés de bénéficier des chèques-vacances. Dautre part, le bénéfice du dispositif est étendu aux personnes affiliées aux régimes dassurance-vieillesse des professions artisanales, industrielles et commerciales , cest-à-dire les commerçants et artisans. Selon le rapport sur les comptes de la sécurité sociale 1996, publié en septembre 1997, lorganisation autonome nationale de lindustrie et du commerce (ORGANIC) réunit plus de 600 000 cotisants et la Caisse autonome nationale de compensation de lassurance vieillesse artisanale (CANCAVA), 490 000. Ce sont donc plus dun million de personnes supplémentaires qui pourront désormais avoir accès au chèque-vacances, dès lors quelles entreront dans les conditions de revenu fixées à larticle 2. Le mécanisme de bonification par lemployeur prévu à larticle 3 de lordonnance ne pouvant bien évidemment pas sappliquer, un système dexonération fiscale et de charges sociales est prévu pour compenser le coût dacquisition des chèques-vacances (article 3 de la proposition de loi). Seuls resteront donc encore exclus du bénéfice du système des chèques-vacances les agriculteurs et les retraités. Article 2 (article 2 de lordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 portant création du chèque-vacances) Cet article substitue un critère de revenu au critère dimposition retenu par lordonnance de 1982 pour déterminer les personnes potentiellement bénéficiaires des chèques-vacances. Seuls pourront désormais avoir accès au dispositif : - les salariés dont les rémunérations brutes annuelles au sens de larticle 242-1 du code de la sécurité sociale 2 sont inférieures au plafond de la sécurité sociale, - les personnes affiliées aux régimes dassurance vieillesse des professions artisanales, commerciales et industrielles dont le revenu brut global retenu pour lassiette de limpôt sur le revenu nexcède pas le plafond de la sécurité sociale. Le plafond de revenu retenu est donc le même quel que soit le type de bénéficiaires. Au 1er janvier 1998, le plafond de la sécurité sociale est de 14 090 francs mensuels, soit 169 080 francs par an. Le nouveau plafond retenu par larticle cest-à-dire les rémunérations brutes annuelles ou le revenu brut global annuel du bénéficiaire est dune portée différente du critère dimposition actuellement applicable, puisque la cotisation due au titre de limpôt sur le revenu concerne, dune part, tous les revenus dun foyer fiscal (ce qui conduit à prendre en considération les ressources dun conjoint éventuel), et dautre part, tous les types de revenus, quelle que soit leur origine (travail ou capital). Dans le dispositif proposé, seule est prise en compte, pour le salarié, sa rémunération annuelle, sans tenir compte de ses revenus autres que salariaux et du revenu global de son foyer fiscal. Par contre, pour les commerçants et les artisans, le critère retenu étant le revenu annuel brut global servant de base au calcul de limpôt sur le revenu, lensemble des éléments évoqués ci-dessus sont pris en compte dans lévaluation du plafond. A lheure actuelle, même sil est difficile détablir des comparaisons en raison de la diversité des situations fiscales, le plafond dimposition applicable en 1998 pour laccès aux chèques-vacances (soit 11 350 francs) correspond, hors de toute réduction ou crédit dimpôt, à un revenu annuel brut global de 87 000 francs par an pour un célibataire, de 127 330 francs par an pour un couple sans enfant (deux parts) et de 167 000 francs par an pour une famille avec deux enfants (trois parts). En prévoyant de retenir un plafond de 169 080 francs de revenus annuels pour le seul bénéficiaire des chèques-vacances, larticle élargit donc le champ des bénéficiaires potentiels. En effet, ce revenu correspond à une cotisation dimpôt de 40 492 francs pour un célibataire, de 21 372 francs pour un couple (deux parts) et de 11 778 francs pour une famille avec deux enfants (trois parts), supérieure donc à limposition plafond actuellement prévue dans lordonnance. Article 3 (article 2 de lordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 portant création du chèque-vacances) Exonérations sociales et fiscales 1. Pour les salariés Cet article met en place une exonération plafonnée de charges sociales pour la contribution de lemployeur au financement des chèques-vacances. Cette exonération, réclamée de façon unanime par les partenaires sociaux au sein du conseil dadministration de lAgence nationale pour les chèques-vacances, devrait inciter les employeurs à accroître leur implication dans le financement des chèques, et donc contribuer à lélargissement effectif de laccès des salariés des petites et moyennes entreprises au dispositif. Faute de comités dentreprise susceptibles de prendre le relais des employeurs sur cette question, ce sont en effet sept millions de salariés qui ne peuvent en pratique accéder à un droit qui leur est pourtant ouvert par la loi. · Le système actuel est en effet, comme cela a été souligné plus haut, peu incitatif pour lentreprise. La contribution de lemployeur à lacquisition du chèque-vacances (qui sanalyse comme un avantage en nature accordé au salarié) est soumise aux cotisations recouvrées par lURSSAF (maladie, maternité, vieillesse, accidents du travail) et aux cotisations dassurance chômage. Elle est par contre exonérée des cotisations de retraite complémentaire. Une aide de 100 francs revient donc à environ 135 francs à lemployeur, tout en ne rapportant, in fine, que 80 francs environ au bénéficiaire. Par ailleurs, sur le plan fiscal, cette contribution est exonérée, dans la limite dun SMIC brut mensuel3, des taxes et participations assises sur les salaires (taxe sur les salaires4, taxe dapprentissage, participation au développement de la formation professionnelle continue et 1 % logement ). Quant au salarié, lavantage en nature dont il bénéficie est également soumis aux cotisations sociales évoquées précédemment, augmentées de la contribution sociale généralisée (CSG) et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS), mais fait lobjet dune exonération dimpôt sur le revenu dans la limite dun SMIC brut mensuel. · Larticle met en place un nouveau système qui, tout en assurant une exonération plafonnée de charges sociales pour la contribution de lemployeur, modifie le régime dexonération fiscale applicable au bénéficiaire. En ce qui concerne les cotisations sociales, lavantage en nature accordé au salarié na plus le caractère délément de salaire pour lapplication de la législation du travail et de la sécurité sociale. Cela signifie notamment quil nest pas soumis à cotisations sociales, à lexception cependant, pour le salarié, de la CSG et de la CRDS. Ainsi, une bonification qui coûtait environ 135 francs à lemployeur, lui reviendra désormais environ à 100 francs. De même, alors que le salarié ne touchait finalement que 80 francs, la quasi-totalité de la bonification devrait désormais pouvoir lui être versée, après prélèvement de la CSG et de la CRDS. Larticle introduit cependant une limite et une condition au bénéfice de cette exonération. Dun part, le montant de lexonération est limité, par salarié, à un plafond fixé à 50 % du SMIC brut mensuel (soit environ 3 332 francs), augmenté de 15 % du SMIC brut mensuel par enfant à charge (soit environ 1 000 francs.) Dautre part, lexonération de charges nest accordée que dans les cas où la contribution de lemployeur est accordée aux salariés en fonction de critères qui prennent en compte leurs revenus et leurs charges familiales . Cette dernière précision est destinée à renforcer le caractère social du chèque-vacances et à assurer sa contribution à la politique familiale ; elle renvoie aux nouvelles dispositions proposées à larticle 5 qui prévoient que la contribution de lemployeur peut être éventuellement modulée selon les catégories de salariés . Ce nest donc pas une obligation, mais le dispositif proposé est fortement incitatif. Pour le salarié, la contribution de lemployeur continuera dêtre exonérée dimpôt sur le revenu, mais le plafond applicable sera identique à celui retenu pour les cotisations sociales, cest-à-dire 50 % du SMIC brut mensuel (3 332 francs), augmenté de 15 % du SMIC brut mensuel par enfant à charge. Ce nouveau dispositif se traduit donc pour le salarié tout à la fois par un gain, grâce à lexonération de charges sociales (sur une bonification de 100 francs versée par lemployeur, 20 % étaient en effet jusqualors prélevés au titre des charges sociales) et par une perte en raison de la baisse du plafond applicable pour lexonération fiscale. Seuls les bénéficiaires ayant au moins quatre enfants à charge (50 % du SMIC mensuel brut + 4 x 15 % du SMIC mensuel brut = 110 %) continueront à bénéficier dune exonération comparable au dispositif actuel (soit 100 % du SMIC brut mensuel). 2. Pour les personnes affiliées au régime dassurance-vieillesse des professions artisanales, industrielles et commerciales Larticle met en place un dispositif dexonération dimpôt sur le revenu et de charges sociales qui rend laccès au bénéfice des chèques-vacances économiquement supportable pour les artisans et les commerçants, grâce à une sorte de bonification de leur montant par lEtat sous forme dune exonération dimpôt sur le revenu. En effet, la part de bénéfice consacré par ces personnes à lachat de chèques-vacances bénéficie dune exonération de limpôt sur le revenu et de charges sociales, à concurrence de la moitié de leur valeur faciale (part équivalente à la participation employeur qui, pour le salarié, est également exonérée dimpôt et de charges) et dans la limite du plafond précédemment décrit (50 % du SMIC mensuel brut augmenté de 15 % du SMIC mensuel brut par enfant à charge). Une famille dartisans ou de commerçants avec deux enfants bénéficiera donc pour lachat de 10 000 francs de chèques-vacances, dune exonération de 5 000 francs dimpôt sur le revenu (3 332 francs, plus 1 000 francs par enfant à charge) et dune exonération des charges sociales correspondant à ces 5 000 francs (soit 33,55 % pour des commerçants et 40,15 % pour des artisans). Par contre, en cohérence avec le dispositif applicable aux salariés, la part du bénéfice consacrée à lachat de chèques-vacances demeurera soumise à la CSG et à la CRDS. Au total, la déduction fiscale ainsi mise en place permettra une redistribution de pouvoir dachat utilisé, pour une grande part, sous forme de biens de consommation et générant dans le domaine de lindustrie touristique, des rentrées supplémentaires de TVA, dimpôts sur le revenu et dimpôts sur les sociétés. Article 4 (article 2 de lordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 portant création du chèque-vacances) Exonération des taxes sur les salaires Bien que cela ne figure pas dans le texte de lordonnance qui souffrait, sur ce point, dun manque dactualisation, la contribution de lemployeur au financement des chèques-vacances est, en vertu de larticle 205 de la loi n° 88-1149 du 23 décembre 1988 (loi de finances 1989), exonérée de lensemble des taxes et participations assises sur les salaires, dans la limite dun SMIC mensuel. Larticle introduit dans le texte de lordonnance ce principe dexonération, assurant ainsi la nécessaire actualisation de la loi. La bonification salariale est donc exonérée : - de la taxe sur les salaires (article 231 du code général des impôts ; cette taxe nest due que par les entreprises et organismes non assujettis à la TVA, cest-à-dire en pratique les associations et les établissements hospitaliers) ; - de la taxe dapprentissage (article 224 du code général des impôts) ; - de la participation due par les employeurs au développement de la formation professionnelle continue (article 235 ter C et suivants du code général des impôts) ; - de la participation due par les employeurs à leffort de construction (article 235 bis du code général des impôts, plus communément appelé 1 % logement ). Par contre, larticle ne reprend pas le principe de plafonnement de lexonération à hauteur dun SMIC mensuel (6663,67 francs au 1er janvier 1998) tel quil est prévu par larticle 231 bis K du code général des impôts. Le montant de lexonération nest donc pas limité. Article 5 (article 3 de lordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 portant création du chèque-vacances) Financement des chèques-vacances Larticle met en place de nouvelles modalités de financement des chèques-vacances, tant pour lemployeur que pour le salarié, afin de favoriser les revenus modestes et de privilégier leur accès au dispositif. · Décision dintroduction du dispositif dans lentreprise Le premier alinéa de larticle reprend et complète les dispositions de lordonnance en ce qui concerne la décision de lemployeur dintroduire dans son entreprise le système des chèques-vacances. Cette introduction demeure facultative et relève toujours du seul choix de lemployeur. Comme auparavant, celui-ci doit au préalable consulter le comité dentreprise ou, à défaut, les délégués du personnel ou toute autre instance de consultation (ce qui permet de couvrir tous les cas et toutes les tailles dentreprise). Par contre, larticle est plus précis quant au contenu des modalités dattribution des chèques-vacances définies par lemployeur car, au lieu de simplement rappeler le nécessaire respect des conditions daccès fixées par larticle 2 (plafond dimposition), la présente proposition de loi précise que lemployeur peut, à ce stade, définir le ou les montants maximum de sa contribution, éventuellement modulée selon les catégories de salariés et la durée de lépargne . Par catégories de salariés , il faut entendre niveau de rémunération mais aussi, vraisemblablement, en conséquence des dispositions de larticle 3, niveau de charges familiales. En effet, ce nest que si la contribution de lemployeur est modulée en fonction de critère qui prennent en compte leurs revenus et leurs charges familiales que celle-ci pourra bénéficier des exonérations de charges sociales autorisées par le texte. Sans être donc explicitement rappelée dans le présent article, la prise en compte de ces critères est donc indispensable (et pas seulement éventuelle) si lemployeur souhaite pleinement bénéficier du nouveau dispositif (dont tout lintérêt réside justement dans lexonération de charges). En pratique, certains de ces critères sont dores et déjà pris en compte a priori par lemployeur puisque le montant de la contribution et sa modulation par catégorie de salariés font le plus souvent lobjet dune discussion avec les représentants des salariés lors de la consultation préalable obligatoire. Comme le montrent les exemples de conventions donnés par lAgence nationale pour les chèques-vacances, la contribution financière de lemployeur varie très souvent en fonction du montant de limposition du salarié. La proposition de loi introduit cependant de nouveaux critères, comme la durée de lépargne et, indirectement, les charges de familles, sans que leur prise en compte soit totalement imposées par le texte. · Financement par le salarié Le deuxième alinéa de larticle met en place de nouvelles modalités de financement qui permettent une épargne plus étalée dans le temps et donc plus aisée à réaliser par les salariés aux revenus les plus modestes. La durée du plan-épargne, tout dabord, est modifiée dans le sens dune plus grande liberté puisque, à lancien dispositif qui prévoyait une épargne dau moins quatre mois , est substituée une durée de trois mois au moins de douze mois au plus . Lépargne devient donc ainsi plus facilement modulable en fonction de la capacité mensuelle de financement. Celle-ci est par ailleurs mieux prise en compte, puisque le montant dépargne minimum est abaissé à 2 % du SMIC mensuel (133 francs), contre 4 % auparavant. Par contre, larticle ne fixe plus de limites au montant des contributions mensuelles (auparavant plafonnées à 20 % du SMIC, soit 1333 francs) afin de laisser aux salariés la plus grande liberté possible dans lorganisation de son plan dépargne. · Financement par lemployeur Le troisième alinéa de larticle simplifie les règles encadrant la participation de lemployeur au financement des chèques-vacances, en réorientant ici aussi le dispositif en faveur des salariés les plus modestes. Dans le dispositif actuel, la contribution de lemployeur est fixée à 20 % au moins et 80 % au plus de la valeur libératoire dun chèque (soit pour un chèque de 100 francs, entre 20 et 80 francs). De plus, la contribution annuelle globale ne peut être supérieure à la moitié du produit du SMIC mensuel par le nombre de salariés (soit, pour une entreprise de cent salariés, environ 333 000 francs). La participation est donc, en moyenne, plafonnée à un demi SMIC par salarié. Le système proposé par la proposition de loi est à la fois plus simple et plus libéral. Il supprime tout plafond, tant pour la contribution par salarié que pour la contribution globale annuelle et ne conserve un plancher de contribution, fixé à 30 % des versements effectués par les salariés, que pour les salariés percevant une rémunération inférieure ou égale à 1,2 fois le SMIC mensuel, soit environ 8000 francs. Dans ces cas là, la participation de lemployeur ne pourra donc pas être inférieure à environ 23 % de la valeur libératoire du chèque. Ces nouvelles modalités de financement confèrent au total à lemployeur une plus grande liberté pour moduler son intervention en fonction de la situation de ses salariés, tout en privilégiant laccès des plus modestes au dispositif. Larticle précise également que la valeur du SMIC retenue est celle en vigueur au 1er janvier de lannée au cours de laquelle le plan dépargne est ouvert. · Larticle prévoit enfin, reprenant en cela le dispositif actuel, que les sommes versées par le bénéficiaire des chèques, par son employeur et par le comité dentreprise sont immédiatement versées à lAgence nationale des chèques-vacances, qui les comptabilise. Quelques ajouts ou modifications par rapport au texte de 1982 doivent cependant être soulignés. Lavant-dernier alinéa prévoit ainsi que lAgence nationale pour les chèques-vacances reçoit et comptabilise les différents financements sauf convention contraire entre lemployeur et cet établissement public . Cette disposition permet de laisser ouverte une possibilité, pour lAgence, de partiellement sous-traiter la commercialisation des chèques-vacances. Cette sous-traitance pourrait notamment concerner la distribution des titres aux petites et moyennes entreprises ainsi quaux artisans et commerçants, et passer, par exemple, par les organismes privés de gestion des titres-restaurant (tels la SODEXHO, le groupe ACCOR, ou les chèques-déjeuner ), particulièrement bien implantés dans ce secteur. Laccroissement du nombre de clients des chèques-vacances se ferait ainsi à moindre coût pour lAgence nationale. Par ailleurs, le dernier alinéa de larticle précise que les chèques-vacances sont délivrés par lAgence nationale pour les chèques-vacances à lissue des plans dépargne, mention qui ne figurait pas jusquici dans larticle. Le dispositif global de distribution des chèques-vacances sen trouve utilement clarifié. Par contre, la nouvelle rédaction de larticle ne signale pas explicitement le caractère obligatoire de la contribution de lemployeur et, a contrario, la nature facultative de la participation du comité dentreprise. Compte tenu du mécanisme de financement défini par larticle, lautomaticité de la participation de lemployeur ne fait cependant pas de doute. Article 6 (article 4 de lordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 portant création du chèque-vacances) En coordination avec larticle 2 qui ouvre le bénéfice des chèques-vacances aux artisans et commerçants, par définition non salariés, cet article effectue une modification rédactionnelle dans la dernière phrase de larticle 4 de lordonnance afin de remplacer les mots Le salarié-titulaire par les mots Le titulaire . Article 7 (article 5 de lordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 portant création du chèque-vacances) Agence nationale pour les chèques-vacances Cet article complète larticle 5 de lordonnance portant création de létablissement public industriel et commercial chargé de lémission et du remboursement des chèques-vacances, afin de préciser ses missions et de confirmer son monopole démission. · Les deux premiers alinéas de larticle précisent justement que lAgence nationale pour les chèques-vacances est le seul établissement public habilité à émettre des chèques-vacances et à les rembourser aux collectivités publiques et aux prestataires qui les ont acceptés en paiement. La confirmation du monopole de la gestion des chèques-vacances à lAgence nationale pour les chèques-vacances va dans le sens de la garantie du caractère social et non lucratif du dispositif et prend clairement position contre toute volonté de privatisation du système. LAgence nationale pour les chèques-vacances est aujourdhui excédentaire, ce qui suscite des nombreuses convoitises. Certaines propositions ont notamment été émises dans le sens dune levée du monopole démission et de la transformation du système en un mécanisme analogue à celui des chèques-restaurant. Une telle évolution pourrait rapidement conduire à une disparition de la vocation sociale du dispositif, ce à quoi la présente proposition de loi est fortement opposée. · Les trois alinéas suivants complètent les missions fixées par la loi à lAgence nationale pour les chèques-vacances afin de les adapter aux enjeux actuels du tourisme social. Il est tout dabord prévu que lAgence est chargée de promouvoir et diffuser le titre nominatif chèques-vacances en France et à létranger . Il ne sagit bien évidemment pas ici de revenir sur le principe, fixé par larticle 1er de lordonnance, de consommation des chèques uniquement sur le territoire national, mais bien dencourager lAgence à proposer les chèques à des organismes étrangers afin quils les utilisent ou les diffusent comme moyens de paiement pour des vacances passées en France. Un accord de ce type existe, à lheure actuelle, avec la caisse suisse de vacances REKA et une forte demande existe au Québec pour la création dun tel dispositif. Une telle pratique, permettrait, à terme, de faire des chèques-vacances un outil de fidélisation de la clientèle touristique étrangère, en donnant à la France un outil de commercialisation unique au monde pour un pays et aussi efficace que ceux de plus en plus utilisés par les entreprises touristiques, bancaires ou de transports aériens (carte Fréquence Plus dAir France ou points de la carte American Express). Cela reviendrait par ailleurs à faire financer la politique française de tourisme social par les consommateurs étrangers. Dautre part, en précisant que lAgence peut conclure des conventions de partenariat avec dautres entreprises ou organismes, français ou étrangers, susceptibles dassurer [aux chèques] la plus large diffusion , ce même alinéa prolonge les dispositions de larticle 5 qui prévoient que lAgence peut sous-traiter la diffusion des chèques à des organismes ou entreprise privées. Cette disposition contribuera à développer encore plus les entreprises françaises de titres-services, déjà les premières au monde grâce au titre restaurant et qui, de part cette extension de compétences, pourront gagner de nouveaux marchés dans un secteur économique prometteur. Larticle confirme également que lAgence nationale pour les chèques-vacances est chargée de mettre en place et de développer un réseau de prestataires et den réaliser la promotion . Bien que cela ne fasse pas partie des missions explicitement prévues par lordonnance en 1982, lAgence sest en effet attachée, depuis sa création, à devenir une véritable partenaire pour les professionnels du tourisme et des loisirs. Elle dispose ainsi aujourdhui dun réseau de 130 000 prestataires dont elle assure la promotion par un annuaire et un serveur Minitel qui jouent le rôle de centres dinformation et dorientation pour les porteurs de chèque-vacances dans la recherche et la préparation de leur séjour de vacances. Lagence garantit par ailleurs aux structures dhébergement ou de loisir en zone rurale et aux équipements (piscines, musées, camping) des communes une promotion identique à celle assurée pour le secteur privé. LAgence nationale pour les chèques-vacances participe donc, par son rôle promotionnel, au développement dune activité touristique plus diversifiée, plus équilibrée géographiquement, et mieux répartie dans le temps. · Le dernier alinéa de larticle dispose enfin que lAgence communiquera chaque année aux organisations syndicales représentatives au niveau national (cest à dire la CGT, la CFDT, FO, la CGC et la CFTC) un bilan économique et social de lutilisation des chèques-vacances. Linformation des partenaires sociaux sur lutilité et lefficacité du dispositif sera ainsi mieux assurée. Article 8 (article 5 de lordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 portant création du chèque-vacances) Chèques-vacances distribués par les organismes à caractère social Cet article harmonise le dispositif dexonération fiscale et sociale applicable en matière de chèques-vacances en prévoyant que leur attribution par les organismes à caractère social (et tout particulièrement les comités dentreprise) sera soumise aux conditions dexonération prévues à larticle 2. Comme cela a été dit dans la présentation générale (cf. II. B), les organismes à caractère social (comités dentreprise, caisses dallocation familiale, bureaux daide sociale, caisses de retraite, mutuelles, etc...) peuvent verser, sous forme de chèques-vacances, les aides aux vacances quils attribuent à leurs ressortissants. Chaque organisme habilité fixe ses propres critères et nest notamment pas soumis au respect du plafond dimposition retenu par lordonnance. De plus, à la différence des bonifications accordées par les employeurs, les aides aux vacances versées sous forme de chèques-vacances acquis par les comités dentreprise ne sont pas assujetties à cotisations sociales (instruction ministérielle du 17 avril 1985). A contrario, linstruction fiscale du 16 février 1984 estime que le fait que ces aides aux vacances puissent être versées sous forme de chèques-vacances ne suffit pas à les faire bénéficier des exonérations prévues par lordonnance, dès lors que ces exonérations sont réservées aux chèques-vacances acquis avec une contribution de lemployeur . Cet article revient donc sur ce traitement inégalitaire. Désormais, les aides aux vacances distribuées par les organismes sociaux sous forme de chèques-vacances ne seront exonérées de charges sociales que dans la limite de 50 % du SMIC mensuel (3332 francs), éventuellement augmenté de 15 % dun SMIC mensuel (soit 1000 francs) par enfant à la charge du bénéficiaire. Dans cette même logique, le bénéficiaire des aides se verra accorder lexonération dimpôt sur le revenu prévue par larticle 3 de la présente proposition de loi et soumise au même plafond. Les sommes excédant ce dernier seront donc soumises à cotisations sociales et à limpôt sur le revenu. Cette harmonisation des règles dexonération devrait conduire à un rééquilibrage des modes de distribution des chèques-vacances, lexonération totale instituée au profit des organismes sociaux ayant conduit les employeurs à leur transférer lessentiel du rôle de distributeur. Article 9 Le respect de larticle 40 de la Constitution (qui déclare irrecevable une proposition de loi dont ladoption aurait pour conséquence une diminution des ressources publiques (...) ) implique que la présente proposition de loi, qui instaure des exonérations de charges sociales et dimpôt sur le revenu (soit une diminution de certaines ressources publiques), propose, en contrepartie, une nouvelle recette publique permettant de compenser cette perte. Larticle propose donc dinstituer une taxe spécifique sur les produits agricoles et alimentaires importés des pays nappartenant pas à lUnion européenne afin de compenser, à due concurrence, les pertes de recettes pour lEtat et les organismes sociaux résultant de la proposition de loi. Lévaluation globale du coût du présent texte est délicate à effectuer, car linstauration dun certain nombre de nouvelles exonérations, plafonnées (charges sociales employeurs et bénéficiaires, impôt sur le revenu des artisans et commerçants et des bénéficiaires de chèques-vacances distribués par des organismes à caractère social), va de pair avec la modification des conditions dapplication des exonérations actuelles (baisse du plafond applicable à lexonération fiscale accordée aux salariés bénéficiaires et plafonnement de lexonération de charges sociales appliquées aux aides vacances des organismes à caractère social accordées sous forme de chèques vacances). Les quelques éléments suivants peuvent cependant donner une indication sur le coût possible du dispositif. En ce qui concerne linstauration dune exonération de charges sociales au profit du salarié et de lemployeur, il est difficile de faire une évaluation des pertes potentielles de recettes pour les organismes sociaux puisquà lheure actuelle, seul 4,7 % (140 millions de francs) des chèques distribués le sont par les entreprises. De plus, les 1,134 milliards de francs de chèques-vacances distribués actuellement par les comités dentreprises et les organismes sociaux sans paiement de cotisations sociales seront désormais imposés au-delà du plafond dexonération fixé par le texte. Il faut rappeler ici que lexonération de charges mise en place par le texte a avant tout pour objectif dencourager les chefs de petites et moyennes entreprises à proposer un dispositif de chèques-vacances à leurs salariés. Ceux-ci sont aujourdhui environ sept millions. Lors de la préparation du texte sous la précédente législature, les services du ministère chargé du tourisme ont évalué à 77 millions de francs le coût brut de cette exonération durant la première année pleine dapplication du dispositif, ce qui est relativement faible. En effet, lexonération ne porte que sur labondement patronal (qui nest souvent que de 20 % des sommes épargnées par le bénéficiaire), et opérera donc un effet de levier très important pour un coût sans commune mesure avec les sommes mobilisées pour la consommation intérieure. De plus, ce coût ne croîtra quen fonction du taux de pénétration du chèque-vacances dans les deux millions de petites et moyennes entreprises, qui sera nécessairement lent. Enfin, ce coût ne peut être que marginal puisquil ne sagit que dexonérer la partie des augmentations futures de la masse salariale (nécessairement limitées) que lemployeur choisira daccorder sous forme dabondement patronal au chèque-vacances. En ce qui concerne lextension du dispositif aux commerçants et artisans (soit environ un million de personnes), larticle 3 de la proposition de loi prévoit que 50 % des sommes qui seront consacrées par ces personnes à lacquisition de chèques-vacances seront exonérés de limpôt sur le revenu, dans la limite du plafond retenu par le texte, soit 3 332 francs plus 1 000 francs par enfant à charge. Environ 850 000 assurés se situent actuellement sous le plafond de revenu retenu par le texte (le revenu moyen est évalué à 120 000 francs par an). Si chacun deux consacre 9 000 francs par an à son budget vacances, financés au tiers (moyenne constatée par lAgence nationale pour le chèque vacances) par des chèques-vacances, ils pourront bénéficier dune exonération dimpôt de 1 500 francs, soit un coût fiscal de 1,275 milliards de francs. De plus, lexonération de charges sociales (soit 33,55 % pour les commerçants et 40,15 % pour les artisans) sur ces 1 500 francs devrait, dans lhypothèse dun exonération individuelle moyenne de 560 francs, générer une perte de recettes de près de 500 millions de francs pour la sécurité sociale. Il est cependant délicat deffectuer des prévisions quant à lévolution du taux de pénétration du chèque-vacances chez les commerçants et les artisans et donc dévaluer de façon satisfaisante le coût potentiel des dispositions proposées. Dautre part, tout raisonnement économique se doit de prendre en compte les retombées de telles dispositions sur léconomie nationale, les achats de chèques-vacances étant automatiquement générateurs dune consommation en moyenne trois fois plus importante dans le secteur du tourisme. La commission a examiné la présente proposition de loi au cours de sa séance du mercredi 13 mai 1998. En conclusion de son exposé, le rapporteur a considéré que la substitution du salaire au niveau dimposition comme critère douverture du droit aux chèques-vacances et le plafonnement de lexonération de charges sociales actuellement accordée aux comités dentreprises pour les aides aux vacances attribuées sous forme de chèques-vacances pourraient susciter des oppositions. Sur ces questions, le débat est ouvert et des amendements peuvent être proposés. Il a également rappelé que Mme Michelle Demessine, secrétaire dEtat au tourisme a indiqué quelle comptait défendre un projet de loi prévoyant daménager les conditions dattribution du chèque-vacances et quelle a estimé que le chèque-vacances encourageait les départs et quil constituait un coup de fouet économique . Le coût de la proposition de loi ne devrait pas dépasser 76 millions de francs. En revanche, elle devrait, selon les estimations dun observatoire indépendant, avoir des conséquences économiques très positives, puisquelle devrait entraîner une réduction du déficit public de lordre de 2,5 milliards de francs et la création de quarante mille à cinquante mille emplois dans le secteur du tourisme. Pour toutes ces raisons, ladoption de la présente proposition de loi apparaît particulièrement opportune. Après lexposé du rapporteur, M. Gérard Terrier a présenté, au nom des commissaires membres du groupe socialiste, une question préalable, en faisant valoir que la proposition de loi comportait, sous des dehors socialement attrayants, des aspects tout à fait contestables. En relevant le plafond dattribution des chèquesvacances à 14 000 francs de revenus par mois, elle contribue à détourner ce chèque de son objet social et à démanteler la dimension sociale du système mis en place en 1982. Par ailleurs, le fait de retenir le salaire et non plus le niveau dimposition, cest-à-dire la totalité du revenu imposable pour mettre en uvre cette condition de ressources est particulièrement critiquable et il nest donc pas étonnant que le rapporteur se soit déclaré prêt à revoir sa copie sur ce point. La généralisation dune exonération plafonnée des charges sociales pour les contributions des employeurs au financement des chèques-vacances comporte également des risques de détournement tandis que risquent dêtre mis en difficulté les comités dentreprise qui, jusquà présent, bénéficiaient de cet avantage sans être soumis à un plafond. Par ailleurs, lévaluation de 76 millions de francs du coût de la proposition de loi, outre quelle est délicate à réaliser puisquil sagit dun dispositif basé sur le volontariat, semble pour le moins optimiste, le chiffre avancé ne concernant que lexonération de charges sociales pour les employeurs et non pas les exonérations fiscales et uniquement la première année dapplication. En réalité, la perte de recettes pour lEtat et les organismes sociaux pourrait être beaucoup plus élevée alors que le gage prévu par la proposition de loi est sujet à caution. Compte tenu de ces approximations et de labandon au moins partiel de lobjectif social du chèque-vacances, la proposition de loi de M. Bernard Pons ne saurait être acceptée. Le rapporteur a souligné que les deux points de la proposition qui sont contestés à lappui de la question préalable, à savoir la remise en cause du rôle des comités dentreprise et la référence au salaire et non plus au niveau dimposition comme critère pour lattribution des chèquesvacances, sont, en fait, ouverts à la discussion. Dautre part, il faut contrebalancer les critiques sur le coût par la mesure de lefficacité du dispositif et de son impact qui sera, nécessairement, bénéfique. Le chèquevacances aura des effets positifs sur laménagement du territoire, sur léconomie française et sur les possibilités de départ en vacances des personnes qui nont quun faible revenu ou un faible niveau dimposition. La proposition na pas dautre but que délargir le champ des bénéficiaires du chèque-vacances et lon ne peut quêtre surpris de la procédure proposée par le groupe socialiste. Il est clair que celui-ci ne souhaite pas que le sujet soit discuté aujourdhui à partir dun texte du groupe RPR. M. Pierre Hellier jugeant le texte proposé correct et en tout cas amendable, a protesté contre le recours à la question préalable. Le président Jean Le Garrec a indiqué que la discussion de la question préalable devait permettre un large débat en commission sur lopportunité de la proposition de loi, ladoption éventuelle de la question préalable nayant dautre signification que le rejet de lensemble du texte avant lexamen de chacun de ses articles. M. Bernard Accoyer, après avoir jugé que la position du groupe socialiste était affligeante et quil était totalement excessif de parler dun démantèlement de notre système social et dun détournement du chèque-vacances, a estimé que lon assistait à une manoeuvre politique reposant sur des arguties. Il sagit, en fait, déviter que lordre du jour laissé à linitiative parlementaire fonctionne alors que cette initiative constitue un outil de modernisation des procédures parlementaires. La proposition de loi retient un mécanisme intéressant, nécessaire à la vie économique et le Parlement doit pouvoir faire sur ce texte un travail denrichissement. Ladoption de la question préalable serait donc particulièrement malvenue. M. Léonce Deprez, après sêtre déclaré très surpris de la procédure proposée, a observé que 37 % de nos concitoyens ne partent pas en vacances. Encourager le développement du chèque-vacances est donc tout à la fois une mesure sociale et un moyen dassurer le développement de léconomie touristique et de lemploi dans ce secteur. La proposition poursuit donc un objectif de politique sociale, de création demplois et de développement dactivités touristiques multisaisonnières. Le groupe UDF est donc favorable à son adoption. M. Georges Hage, après avoir évoqué léphémère existence du ministère du temps libre, a constaté que lon assistait à la résurgence dun projet de loi nayant pas trouvé sa place pendant la précédente législature et sest interrogé sur le vote qui aurait pu, à lépoque, être celui de lactuelle majorité. La présente proposition de loi relance le débat sur lopportunité sociale et lefficacité économique des chèques-vacances, mais les modalités retenues ne sont pas adéquates. Si tout le monde est daccord pour exploiter des gisements demplois, encore faut-il quil existe une demande solvable. Cette proposition de loi ne contient pas les dispositifs qui seraient nécessaires pour atteindre un tel objectif. Il est donc légitime de lui opposer la question préalable. M. Alfred Recours a indiqué que la proposition présentait un défaut majeur, en ce sens quelle ne sadresse pas vraiment aux personnes défavorisées qui ne peuvent pas partir en vacances. Lobjectif de lordonnance de 1982 concernait précisément ces personnes. Or, le texte naméliore pas ce dispositif, pas plus quil ne crée de possibilités nouvelles. Il ne sadresse donc pas aux plus défavorisés. Mme Jacqueline Fraysse, après avoir rappelé limportance de ce sujet, a souligné que si tant de personnes ne partaient pas en vacances, cétait principalement faute davoir un emploi ou des revenus suffisants. Il faut rappeler en outre que le groupe RPR sest prononcé contre la réduction du temps de travail qui permettrait aux salariés de bénéficier de plus de temps libre et que, lorsque des batailles sont menées pour lemploi et pour les loisirs, la droite ny adhère pas. Ce texte ne comporte pas de dispositions significatives pour avancer dans le domaine de lemploi ou du tourisme. La proposition de loi nest quune entreprise purement démagogique à laquelle il convient de sopposer. Mme Muguette Jacquaint a souligné que 40 % des familles ne pouvaient partir en vacances et étaient donc de ce fait exclues du bénéfice de ce droit fondamental. Tant sur le projet de loi relatif aux exclusions que sur les projets de réforme qui feront suite à la conférence de la famille du 12 juin prochain, le groupe communiste sera amené à formuler des propositions pour remédier aux lacunes existantes en matière de droit à la culture et de droit aux vacances. Plus fondamentalement, disposer de ressources suffisantes est la vraie condition de lexercice du droit aux vacances et cela renvoie donc à la question des minima sociaux, des prestations sociales et du niveau des salaires. M. Gérard Terrier a précisé que, dans son intervention précédente, il avait parlé du démantèlement de la dimension sociale du système mis en place par lordonnance du 26 mars 1982. Aujourdhui, peu de salariés peuvent effectivement bénéficier du dispositif de bonification des chèques-vacances par leur employeur. Le succès du système repose uniquement sur la distribution des chèques par les organismes à caractère social, notamment les caisses dallocations familiales et les comités dentreprise, qui bénéficient à ce titre dun mécanisme dexonération des charges sociales. Or, cette proposition de loi revient, en la plafonnant, sur le principe de cette exonération. Sil peut y avoir consensus sur la nécessité de remédier aux causes qui font obstacle aux départs en vacances, les nouvelles conditions dapplication des chèques-vacances qui sont proposées par les cinq premiers articles de cette proposition ne sont pas pour autant acceptables et justifient le rejet du texte. Dans la mesure où elle remet en cause le rôle des organismes sociaux et favorise la distribution de compléments de rémunération nayant pas le caractère dun salaire, elle ne peut que susciter une opposition de principe. Le rapporteur a tout dabord souligné que cette proposition de loi faisait suite à un projet qui navait pu être examiné en raison de la dissolution et ne pouvait donc être qualifiée dentreprise démagogique . Le succès indéniable des chèquesvacances justifie aujourdhui pleinement lélargissement du dispositif, sans autre considération. Par ailleurs, les articles incriminés de la proposition de loi se bornent à prévoir les éléments suivants : élargissement des bénéficiaires potentiels par larticle premier, attribution des chèquesvacances aux revenus les plus faibles par larticle 2 en fonction dun critère sur lequel il peut y avoir discussion exonération de charges sociales de la contribution de lemployeur afin de permettre laccès le plus large aux chèquesvacances par les articles 3 et 4 ; enfin, simplification des modalités dépargne et mise en place dune bonification plus favorable pour les salaires les plus bas par les articles 5 et 6. Rejeter cette proposition de loi aboutit donc à écarter délibérément de ce dispositif les huit millions de salariés qui travaillent dans les petites et moyennes entreprises, pour lesquels seule une exonération de charges sur la contribution de lemployeur permettra une distribution des chèques-vacances. Lélargissement des chèquesvacances est réclamé par tous les organismes intéressés et toutes les formations syndicales. Le vote de cette proposition de loi permettrait que les classes modestes en bénéficient dès cette année et pourrait déboucher sur la création de 50 000 emplois. En ce qui concerne la procédure, il faut rappeler que la loi constitutionnelle du 4 août 1995 a prévu quune séance par mois serait réservée à un ordre du jour fixé par lAssemblée nationale. Par le dépôt dune question préalable, la majorité met à mal lexercice par lopposition du droit dinitiative qui lui a été ouvert par cette réforme constitutionnelle et nie son droit à légiférer. Le président Jean Le Garrec a rappelé quen application de larticle 40 du Règlement de lAssemblée nationale, sous réserve des règles fixées par la Constitution et le Règlement, la commission était maîtresse de ses travaux. Le Règlement ninterdit en aucun cas le dépôt et lexamen en commission dune question préalable et il existe des précédents en ce sens. Il doit être cependant précisé que ladoption par la commission dune question préalable sur une proposition de loi vaut rejet du texte par celle-ci, mais ne fait aucunement obstacle à son examen en séance publique. M. René Couanau a protesté contre lusage dune telle procédure, inusitée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, et qui conduit à interdire tout débat de fond. La commission a adopté la question préalable. En conséquence, la proposition de loi a été rejetée. ___________ N° 899. Rapport de M. Renaud Muselier (au nom de la commission des affaires culturelles), sur la proposition de loi de M. Bernard Pons portant généralisation du chèquevacances et modifiant lordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 (n° 218). 1 Soit, pour 169 h par mois (39 heures par semaine), au 1er janvier 1998, 6 663,67 francs bruts. 2 Cest-à-dire toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à loccasion dun travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tout autre avantage en argent, les avantages en nature et les pourboires. 3 Soit 6 663,67 francs au 1er janvier 1998. 4 Il convient de rappeler que la taxe sur les salaires nest acquittée que par les entreprises et organismes qui ne sont pas soumis à la TVA, soit en pratique uniquement les associations et les établissements hospitaliers. 5 Cet article dispose dans son II que lexonération de taxe sur les salaires prévue par larticle 231 bis K du code général des impôts est accordée dans la limite du SMIC apprécié sur une base mensuelle et dans son III que Les rémunérations exonérées de la taxe sur les salaires en application des articles 231 bis K (et 231 bis L) du code général des impôts sont exonérées de la taxe dapprentissage et des participations des employeurs au développement de la formation professionnelle continue et à leffort de construction. |