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N° 997

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 18 juin 1998.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES (1) , SUR LE PROJET DE LOI (n° 587), portant règlement définitif du budget de 1996,

PAR M. François LAMY,

Député.

——

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Voir les numéros : 587, 934.

Lois de règlement.

La commission de la défense nationale et des forces armées est composée de :

M. Paul Quilès, président ; MM. Didier Boulaud, Arthur Paecht, Jean-Claude Sandrier, vice-présidents ; MM. Robert Gaïa, Pierre Lellouche, Mme Martine Lignières-Cassou, secrétaires ; MM. Jean-Marc Ayrault, Jacques Baumel, François Bayrou, Jean-Louis Bernard, André Berthol, Jean-Yves Besselat, Eric Besson, Bernard Birsinger, Jean-Marie Bockel, Loïc Bouvard, Jean-Pierre Braine, Philippe Briand, Jean Briane, Antoine Carré, Bernard Cazeneuve, Gérard Charasse, Hervé de Charette, Guy-Michel Chauveau, Alain Clary, Charles Cova, Michel Dasseux, Jean-Louis Debré, François Deluga, Claude Desbons, Jean-Pierre Dupont, François Fillon, Christian Franqueville, Roger Franzoni, Yann Galut, René Galy-Dejean, Roland Garrigues, Henri de Gastines, Bernard Grasset, François Hollande, François Huwart, Jean-Noël Kerdraon, François Lamy, Pierre-Claude Lanfranca, Jean-Yves Le Drian, Georges Lemoine, François Liberti, Jean-Pierre Marché, Franck Marlin, Jean Marsaudon, Christian Martin, Marius Masse, Gilbert Meyer, Michel Meylan, Jean Michel, Charles Miossec, Alain Moyne-Bressand, Jacques Peyrat, Robert Poujade, Gilles de Robien, Michel Sainte-Marie, Bernard Seux, Guy Teissier, André Vauchez, Jean-Claude Viollet, Michel Voisin, Pierre-André Wiltzer, Kofi Yamgnane.

S O M M A I R E

Pages

INTRODUCTION 5

I. —  L’EXÉCUTION DU BUDGET DE LA DÉFENSE EN 1996 : UN BUDGET

SOUS CONTRAINTE 7

A. —  LA CONTRAINTE DE TRÉSORERIE : LES EFFETS DE LA GESTION 19957

1. — Des reports de charges massifs 7

2. — Un phénomène préoccupant : la hausse continue des

intérêts moratoires 9

B. —  LES CONTRAINTES DE LA POLITIQUE BUDGÉTAIRE 12

1. — La régulation budgétaire 12

2. — La loi de programmation 1997-2002 16

II. —  LE FINANCEMENT DE LA DÉFENSE EN 1996 : UN BUDGET DE

TRANSITION 17

A. —  L’ÉVOLUTION SANS PERSPECTIVE DES DÉPENSES MILITAIRES 18

1. — L’augmentation des dépenses militaires 18

2. — Dépenses ordinaires et dépenses en capital : des logiques

d’évolution divergentes 19

a) Les dépenses du titre III : une augmentation régulière et prévisible 19

b) L’augmentation des dépenses en capital 22

B. —  LES MOUVEMENTS DE CRÉDITS 23

1. — Les modifications législatives 24

2. — Les modifications réglementaires 27

a) Les modifications du montant des crédits 27

b) Les modifications de la répartition des crédits 32

III. —  LES AJUSTEMENTS DE CRÉDITS PROPOSÉS PAR LE PROJET

DE LOI DE RÈGLEMENT 33

CONCLUSION 35

EXAMEN EN COMMISSION 37

Mesdames, Messieurs,

La loi de finances initiale pour 1996 prévoyait par rapport à celle de l’année précédente une baisse du budget de la Défense de 2,4 %, hors pensions, et plus particulièrement, une diminution des crédits d’équipement de 6,4 %. Le projet de loi de règlement pour 1996 fixe, quant à lui, un montant total des crédits militaires supérieur de 3 % à celui de l’exercice précédent, les dépenses d’équipement enregistrant une hausse de 4,4 %.

Ce constat témoigne à la fois d’un dérèglement de la prévision budgétaire et de l’extrême complexité des procédures de gestion des crédits d’équipement. Il traduit également les limites de l’annualité budgétaire quand sont en jeu des crédits portant sur des programmes de long terme.

*

L’exercice 1996 s’est trouvé pour une large part contraint par les conséquences de la gestion 1995, que d’aucuns considèrent comme catastrophique. Il a, en effet, au titre de l’exercice précédent, hérité de charges très importantes, qui se sont notamment traduites par le paiement d’intérêts moratoires à un niveau jusqu’alors inédit. Nul besoin, à cet égard, de souligner les effets désastreux de ce phénomène sur les petites et moyennes entreprises de l’armement et, conséquemment, sur l’emploi.

La contrainte exercée par l’héritage de l’exercice précédent a été d’autant plus lourde qu’elle a été amplifiée par la forte régulation budgétaire qu’a subie le budget de la Défense en 1996. Les annulations de crédits ont, notamment, suscité de nouveaux retards de paiement et, par un enchaînement devenu classique, l’alourdissement des intérêts moratoires.

S’est ajoutée enfin la nécessité de ne pas compromettre d’entrée de jeu la nouvelle loi de programmation 1997-2002 qui a contraint les gestionnaires publics à apurer autant que possible les effets des gestions précédentes.

*

Budget sous contrainte, le budget de la Défense pour 1996, qui n’entrait dans aucun cadre pluriannuel, n’a donc pu être qu’un budget de transition, sans perspective autre que la pression exercée par la nouvelle programmation.

I. —  L’EXÉCUTION DU BUDGET DE LA DÉFENSE EN 1996 : UN BUDGET SOUS CONTRAINTE

L’analyse de l’exécution du budget de la Défense en 1996 ne peut faire l’économie d’une réflexion plus large sur le contexte dans lequel elle s’est déroulée. Au-delà de la contrainte budgétaire qui s’est traduite par une politique extrêmement rigoureuse, pour tous les départements ministériels d’ailleurs, le ministère de la Défense a subi des contraintes tout à fait spécifiques, héritées des gestions précédentes pour certaines, issues des perspectives d’avenir pour d’autres.

A. —  LA CONTRAINTE DE TRÉSORERIE : LES EFFETS DE LA GESTION 1995

En 1996, le ministère de la Défense s’est trouvé confronté à de graves difficultés de trésorerie, héritées du caractère particulièrement chaotique de la gestion précédente. Si la forte régulation qu’il a subie simultanément participe également de ces difficultés financières, force est de reconnaître que les effets de la gestion 1995 ont pesé de tout leur poids dans l’exécution du budget de la Défense au cours de l’exercice 1996, comme en témoigne notamment le profil atypique de l’évolution des dépenses en capital au premier semestre.

L’augmentation des reports de charges et la croissance des intérêts moratoires, phénomènes qui entretiennent un lien étroit entre eux, constituent les symptômes de cette gestion financière en difficulté.

1. — Des reports de charges massifs

A la différence des reports de crédits, définis à l’article 17 de l’ordonnance organique du 2 janvier 1959, les reports de charges n’ont pas de fondement juridique : la notion elle-même de report de charges entre d’ailleurs en contradiction avec l’article 16 de cette ordonnance, dont le troisième alinéa dispose que “ les dépenses sont prises en compte au titre du budget de l’année au cours de laquelle les ordonnances ou mandats sont visés par les comptables assignataires ; elles doivent être payées sur les crédits de ladite année, quelle que soit la date de la créance ”. Comme l’indique la Cour des comptes en réponse à la Commission des Finances de l’Assemblée nationale1, la notion de reports de charges peut -doit, selon la direction du Budget- être récusée au regard des principes généraux de la comptabilité publique de l’État, qui est une comptabilité de décaissements et d’encaissements, et non de droits constatés. Cependant, la Cour des comptes relève que “ d’un point de vue économique et patrimonial, les reports de charges en fin de gestion constituent une donnée pertinente ”.

L’analyse des reports de charges, qui ont atteint en 1996 des niveaux jusqu’alors inédits, se révèle donc nécessaire, d’autant plus qu’ils se traduisent pour le ministère de la Défense et ses partenaires industriels par des conséquences pratiques tout à fait importantes.

La notion ne se laisse pas facilement appréhender. Elle pose un premier problème, d’ordre méthodologique, qui tient à sa définition. Les reports de charges peuvent être définis comme le montant des dettes impayées au 1er janvier 1996. En termes juridiques, ils correspondent à des mandatements qui auraient dû être imputés sur les crédits d’une gestion donnée et qui ne l’ont été que sur ceux de la gestion suivante. Il s’agit là d’une interversion d’exercice.

Équivalents à 12 milliards de francs de 1995 à 1996, ils sont à peu près du même montant que les reports de crédits, ce qui constitue apparemment un indicateur satisfaisant, les charges reportées étant égales aux crédits reportés.

Il convient cependant d’affiner l’analyse du montant des reports de paiement : sur ces 12 milliards de francs de charges reportées, il apparaîtrait que seulement 8 milliards correspondent en réalité à des retards de paiement effectifs. Les 4 milliards de francs restants correspondent à des factures en attente normale de paiement, l’administration disposant d’un délai légal pour acquitter ses dettes. Comme l’indique la Cour des Comptes dans sa réponse précitée, ces différents chiffres sont des estimations, ni la Cour ni la Direction des services financiers du ministère de la Défense n’étant en mesure de s’appuyer sur des données comptables adaptées.

Bien que ne faisant pas l’objet d’une évaluation comptable rigoureuse, les reports de charges n’en constituent pas moins une réalité pour les gestionnaires publics. Le profil atypique de l’évolution des dépenses en capital du ministère de la Défense au premier semestre 1996 en témoigne puisque, à la fin du mois de juin 1996, les dépenses militaires en capital étaient supérieures de 10 % par rapport à l’année précédente, à la même date.

Cette aggravation très sensible de la pratique des reports de charges tient aux conditions d’exécution de l’exercice 1995. La fin de cet exercice a été, pour les gestionnaires du ministère de la Défense, particulièrement difficile à maîtriser. Il faut en effet rapprocher les 8 milliards de francs de reports de paiement de 1995 à 1996 des quelque 11,9 milliards de francs de crédits annulés sur l’ensemble de l’année 1995 et des 6,9 milliards de francs de crédits gelés, officiellement et officieusement au cours du même exercice. Le lien entre les retards de paiement d’une part et les gels et annulations d’autre part apparaît alors clairement.

Il faut espérer que de tels dysfonctionnements ne se reproduiront pas. Tout d’abord, la masse des reports de paiement concourt à obscurcir l’évaluation des crédits dont le ministère de la Défense peut disposer pour mandater des dépenses correspondant à des engagements nouveaux. De plus, elle fausse les conditions d’exécution du budget de l’année suivante, comme l’illustre de façon quasi exemplaire la gestion 1996. En outre, en termes économiques, les reports de charges représentent autant de retards de paiement aux fournisseurs du ministère de la Défense. Or, des sommes, faibles au regard des masses financières en jeu, conditionnent souvent la capacité de survie des petites et moyennes entreprises qui, faute d’un volant de trésorerie suffisant, peuvent être contraintes au dépôt de bilan. Pour celles-ci en effet, le versement d’intérêts moratoires, qui représente, pour le ministère de la Défense, la conséquence financière des reports de charges, ne pallie pas l’absence de paiement à l’échéance ni les éventuelles baisses d’effectifs qu’auront pu entraîner les ajournements ou les annulations des commandes faites par le ministère de la Défense. Du côté du ministère de la Défense, le paiement d’importants intérêts moratoires grève d’autant un budget déjà éprouvé par une régulation massive.

2. — Un phénomène préoccupant : la hausse continue des intérêts moratoires

En 1996, le ministère de la Défense a payé 811,5 millions de francs au titre des intérêts moratoires, soit une hausse de 157,17 % par rapport à l’exercice 1995 qui avait vu le versement de 316 millions de francs au même titre.

INTÉRÊTS MORATOIRES PAYÉS

PAR LE MINISTÈRE DE LA DÉFENSE de 1992 À 1996

(en millions de francs)

 

1992

1993

1994

1995

1996

Total

201,7

410,3

358,7

316,0

811,6

Il faut noter cependant qu’ont pu exister à ce sujet des évaluations divergentes entre la Direction des services financiers (DSF) et l’Agence comptable des services industriels d’armement (ACSIA). La première indiquait en effet un chiffre de 410,9 millions de francs pour 1995, la seconde ayant arrêté le chiffre de 253 millions de francs. A la suite d’un examen approfondi des états de recensement de la DSF et par comparaison avec ceux fournis par l’ACSIA, le ministère de la Défense en a conclu qu’un double compte portant sur les intérêts moratoires payés par la Direction de la qualité (DQA) avait été fait et a établi, à la suite d’un redressement des chiffres, le montant total des intérêts moratoires de l’exercice 1995 à 316 millions de francs.

A ce propos, le ministère de la Défense souligne que cette correction a révélé les lacunes des modalités du recensement mis en place pour la première fois en 1995, ainsi qu’il avait été recommandé par la Commission de la Défense dans ses rapports antérieurs, ce recensement étant de nature extra-comptable et effectué auprès des seuls gouverneurs de crédits.

Le caractère incertain des réponses des gouverneurs a incité la DSF à compléter son dispositif de recensement par une demande adressée directement aux ordonnateurs. Cette approche plus complète conduit le ministère de la Défense à évaluer, pour 1996, le montant des intérêts moratoires à 811,6 millions de francs, soit 223,2 millions de francs payés au titre de la gestion 1995 et 588,4 millions de francs payés au titre de la gestion 1996.

Il apparaît nécessaire aux yeux de votre rapporteur d’assurer un meilleur suivi de l’évolution des intérêts moratoires, permettant d’éviter les divergences d’estimation entre les services du ministère et le comptable. Dès lors que la masse des intérêts versés atteint de tels niveaux, il est essentiel d’en avoir une vision juste. Le ministère de la Défense a engagé des réformes depuis 1997, afin de mieux cerner l’ampleur de ce phénomène. Dans cet objectif, a été créé, à titre expérimental pour la gestion 1997, en nomenclature d’exécution un paragraphe spécifiquement dédié à l’imputation des intérêts moratoires sur les principaux chapitres concernés (chapitres du titre V et chapitre 34-20 du titre III). De la sorte, le recensement des intérêts moratoires revêt, pour l’essentiel, une forme comptable. Il ne permet pas cependant de distinguer de façon tout à fait certaine les intérêts moratoires payés au titre de factures reçues l’année précédente de ceux payés au titre de l’année en cours, le système de l’exercice prenant seulement en compte la date de paiement effectif des dépenses. Il reste à systématiser cette procédure.

INTÉRÊTS MORATOIRES VERSÉS

PAR LE MINISTÈRE DE LA DÉFENSE EN 1996

(en milliers de francs)

 

Titre III

Titre V

Total

Armée de l’air

17 563

191 128

208 691

Armée de terre

2 759

308 286

311 045

Marine

1 058

62 270

63 328

Gendarmerie

900

6 784

7 684

Santé

78

169

247

Essences

150

200

350

EMA

0

18 554

18 554

DGA

2 682

120 103

122 785

DAG

3 973

1 129

5 102

DSF

26

141

167

DGSE

50

2 033

2 083

DPSD

0

31

31

DIRCEN

92

372

464

SIRPA

0

3

3

Comptes de commerce

   

71 038

Total

29 331

711 203

811 572

Source : recensement extra-comptable auprès des gouverneurs de crédits

Dans la note que consacre à ce sujet la Cour des comptes en réponse à la Commission des Finances2, deux types de causes sont avancées pour expliquer ce phénomène. La très forte augmentation du montant des intérêts moratoires payés par le ministère de la Défense en 1995 et en 1996 traduit tout d’abord les effets de la régulation pratiquée en 1995. “ Les annulations de crédits de paiement ont des effets pervers importants, tout en n’étant pas nécessairement efficaces pour diminuer la dépense réelle. Elles créent des reports de charges sur l’exercice ultérieur, source d’intérêts moratoires, tout en désorganisant les paiements chez les ordonnateurs. ” Combinée à des dotations trop étroites au regard des dépenses engagées antérieurement en vertu d’autorisations de programme, la régulation aggrave donc les risques de retards des paiements. La Cour souligne également la responsabilité propre du ministère de la Défense dans cette évolution, mettant plus particulièrement en avant les dysfonctionnements dans la prévision des paiements et le caractère complexe et mouvant de la réglementation relative aux délais de mandatement et au taux d’intérêt applicable.

B. —  LES CONTRAINTES DE LA POLITIQUE BUDGÉTAIRE

1. — La régulation budgétaire

Les modalités de la régulation budgétaire en 1996 sont sensiblement identiques à celles des années précédentes. Annoncée aux ministres le 26 février 1996, la régulation s’est traduite par un plafonnement des dépenses (hors rémunérations et charges sociales) à 50 % des dotations pour le premier semestre, au titre III et aux titres V et VI. A partir de juillet 1996, l’interdiction d’engagement de la moitié des crédits a été levée progressivement pour le titre III, tandis que, pour les titres V et VI, le déplafonnement s’effectua par tranche, mois par mois, selon un rythme extrêmement contraignant pour la dépense et sans que soient prises en compte les propositions d’échéancier avancées par le ministère de la Défense.

Comme en 1995, la régulation a conduit à une très large remise en cause des crédits votés en loi de finances initiale, notamment par le biais des annulations et des reports de crédits.

· Les annulations de crédits

8,507 milliards de francs d’autorisations de programme et autant de crédits de paiement ont été annulés en 1996. Là encore, la comparaison avec l’année 1995 se révèle tout à fait pertinente : seuls les crédits d’équipement ont été concernés par les annulations, venues en quelque sorte “ gager ” les ouvertures de crédits supplémentaires sur le titre III.

ANNULATIONS D’AUTORISATIONS DE PROGRAMME (AP) ET DE CRÉDITS DE PAIEMENT (CP) SUR LES TITRES V ET VI

DU BUDGET DE LA DÉFENSE EN 1996 AU TITRE DE LA PARTICIPATION À LA MAÎTRISE DU DÉFICIT BUDGÉTAIRE(1)

(en millions de francs)

 

Chapitres

Arrêté du

10 avril 1996

Arrêté du

26 septembre 1996

Arrêté du

13 novembre 1996

Total

en % des crédits votés

   

AP

CP

AP

CP

AP

CP

AP

CP

AP

CP

Titre V

Espace

51-60

204

382

140,29

140,29

4

293,02

348,29

815,32

- 9,01

- 19,96

Nucléaire

51-70

502

425

189,78

189,78

91

169

782,78

783,78

- 6,67

- 6,15

Autres études

51-80

146

777,8

492,37

492,37

611,02

436

1 249,39

1 706,17

- 8,92

- 12,80

Investissements techniques et industriels

52-70

70

80

61,54

61,54

131,54

141,54

- 8,65

- 9,68

Fabrications - Services communs, Gendarmerie

53-70

107,4

142,3

102,87

102,87

16,6

2,04

226,87

247,21

- 7,24

- 9,80

Fabrications - Air, Terre, Mer

53-80

2 586

1 694

1 373,48

1 373,48

946,94

734,94

4 906,42

3 802,62

- 10,55

- 8,14

Infrastructure

54-40

100,6

214,7

331,37

331,4

320,61

335

752,58

881,07

- 10,35

- 12,19

Sous-total Titre V

 

3 716

3 716

2 691,70

2 691,70

1 990,18

1 970

8 397,87

8 377,69

- 9,54

- 9,51

Titre VI

Participation à des travaux d’équipement civil et subvention d’équipement social intéressant la collectivité militaire

66-50

-

-

28,02

28,02

9,82

30

37,85

58,03

- 16,41

- 30,33

Subventions aux organismes sous tutelle

67-10

-

-

30,28

30,28

40

40

70,28

70,28

- 10,48

- 10,56

Sous-total titre VI

 

-

-

58,30

58,30

49,82

70

108,03

128,31

11,99

14,97

Total général

 

3 716

3 716

2 750

2 750

2 040

2 040

8 506

8 506

- 9,56

- 9,56

(1) 1,1 million de francs a été annulé par un arrêté en date du 1er octobre 1996 sur le chapitre 66-50 au titre de la participation du ministère de la Défense à une campagne de promotion du tourisme en Polynésie française. Un montant identique a été ouvert par ce même arrêté sur le budget du ministère des DOM-TOM.

Si les annulations ont réduit les marges de manoeuvre dans la gestion des autorisations de programme, elles n’ont cependant pas entraîné de conséquences dommageables à court et moyen terme, ayant été absorbées par un “ matelas ” de dotations.

Il en va tout autrement des annulations de crédits intervenues sur les crédits de paiement, qui ont contribué à une dégradation temporaire de la situation de trésorerie des titres V et VI. L’annulation de 2,04 milliards de francs intervenue à la fin du mois de novembre 1996, période extrêmement sensible pour la gestion de la trésorerie, a notamment entraîné un report de charges important de 5,8 milliards de francs sur 1997, c’est-à-dire une suspension temporaire des paiements jusqu’à l’ouverture des crédits en loi de finances initiale pour 1997.

Les annulations de crédits ont touché les armées de manière homogène. Il existe en effet deux méthodes de répartition des annulations entre les différents gouverneurs de crédits : elles conduisent à réduire de manière homothétique, soit les dotations allouées aux États-majors et à la DGA en loi de finances initiale, soit les sommes non encore dépensées par les gestionnaires de crédits, au prorata de ce qui leur reste à consommer d’ici la fin de l’exercice. Les annulations de crédits de l’exercice 1996 ressortissent de la première méthode, qui, sur le plan théorique, mérite d’être préférée à la seconde, pénalisante pour les gouverneurs de crédits gérant des programmes plus aléatoires, tels que les programmes en coopération (DGA, Armée de terre). En 1996, les annulations ont donc fait l’objet d’un calcul au prorata des ressources initiales, aboutissant ainsi à un résultat homogène.

ANNULATIONS DE CRÉDITS DE PAIEMENT OPÉRÉES SUR LE BUDGET DE LA DÉFENSE EN 1996

 

En millions de francs

En % des crédits votés

En % des dépenses nettes de l’exercice

Services communs

2 382,622

9,60

14,10

Air

2 028,422

9,62

10,36

Terre

1 865,904

9,53

9,24

Marine

2 026,563

9,52

10,48

Gendarmerie

203,589

9,37

10,27

Total

8 507,100

9,56

10,91

En pourcentage des dépenses nettes cependant, les services dont le taux de consommation des crédits est inférieur apparaissent mécaniquement plus touchés. C’est notamment le cas des services communs, et plus particulièrement de la DGA.

ÉVOLUTION DES TAUX DE CONSOMMATION DE CRÉDITS MILITAIRES PAR SERVICE (CRÉDITS DE PAIEMENT)

 

1993

1994

1995

1996

Titre V

       

I - Section commune

80,86 %

77,13 %

74,52 %

85,50 %

II - Air

97,71 %

94,67 %

94,94 %

96,60 %

III - Forces terrestres

87,11 %

91,81 %

86,48 %

97,39 %

IV - Marine

97,01 %

91,64 %

90,67 %

94,41 %

VI - Gendarmerie

84,85 %

89,08 %

93,64 %

98,37 %

Total

90,28 %

88,61 %

86,62 %

93,67 %

· Les reports de crédits

Le niveau des reports de crédits échappe largement au contrôle du ministère de la Défense puisque c’est le contrôleur financier, sur instruction du Ministre du Budget, qui en assure la modulation au regard des objectifs de déficit. Le montant des ordonnances visées par le contrôleur financier en fin de gestion constitue en effet l’une des principales variables d’ajustement des dépenses avant la clôture des opérations budgétaires. La nature des crédits d’équipement -reportables de droit- et leur importance au ministère de la Défense, expliquent l’attention dont ils font l’objet en fin d’exercice budgétaire.

C’est cette participation éminente des crédits militaires au réglage fin du déficit budgétaire qui explique également le caractère tardif des arrêtés de report qui permettent au ministère de la Défense de consommer les dotations reportées de l’année précédente. Ce dernier se trouve en quelque sorte pris dans un étau. D’une part, il est autorisé tardivement à consommer les reports de l’année précédente, ce qui, matériellement, est souvent impossible et contribue à dégrader le taux de consommation des crédits. D’autre part, des reports lui sont imposés à la fin de l’exercice budgétaire, notamment du fait du refus du contrôleur financier d’apposer son visa. L’exercice 1996 n’a pas échappé à ce schéma.

REPORTS DE CRÉDITS EN CAPITAL

DU BUDGET DE LA DÉFENSE PAR SERVICE

 

Reports de 1995 à 1996

Reports de 1996 à 1997

Évolution

 

En millions de francs

En % des crédits globaux

En millions de francs

En % des crédits globaux

En millions de francs

I - Services communs

5 397,935

25,48 %

2 865,493

14,50 %

- 2 532,442

(1)

II - Air

1 036,215

5,06 %

688,711

3,40 %

- 347,504

III - Forces terrestres

2 700,747

13,52 %

541,604

2,61 %

- 2 159,143

IV - Marine

2 046,461

9,33 %

1 144,735

5,59 %

- 901,726

V - Gendarmerie

158,354

6,38 %

32,950

1,63 %

- 125,404

Total des crédits militaires

11 339,712

11, 55 %

5 273,493

5,37 %

- 6 066,219

(1)

(1) Y compris les 250 millions de francs ouverts en gestion 1996 au ministère de l’Equipement (aviation civile)

2. — La loi de programmation 1997-2002

La loi de programmation militaire pour les années 1997-2002, votée en juillet 1996, a pesé de manière contraignante sur l’exécution du budget de 1996. Le ministère de la Défense s’est trouvé confronté à la triple nécessité d’apurer les effets de l’exercice 1995, de faire face aux modifications importantes imposées en cours d’année aux dotations initiales et de ne pas hypothéquer d’entrée de jeu la nouvelle loi de programmation militaire pour les années 1997-2002.

C’est dans cette perspective qu’il convient d’interpréter l’arbitrage favorable du Premier Ministre qui, à la fin du mois de novembre 1996, a donné au ministère de la Défense un droit à consommation supplémentaire des reports de la gestion 1995. Au total, ont été ainsi consommés 5,816 milliards de francs, soit davantage que les prévisions initiales de réduction de reports (5,2 milliards de francs). Il s’agit là d’un phénomène tout à fait exceptionnel, à la mesure de la pression exercée par la nouvelle programmation. Habituellement, en effet, non seulement les montants de réductions de reports autorisés ne sont pas atteints, mais, plus encore, la masse des crédits reportés stagne ou augmente.

ÉVOLUTION DES REPORTS DE CRÉDITS EN CAPITAL

DU BUDGET DE LA DÉFENSE (1)

(en millions de francs)

 

1992

1993

1994

1995

1996

1997

Reports de la gestion précédente

10 797,927

9 392,327

9 543,088

11 369,705

(2)

11 089,712

5 273,597

Reports à la gestion suivante

9 392,327

9 543,088

11 369,705

11 339,712

5 273,597

6 770,774

(3)

Évolution des reports par rapport à l’exercice précédent

- 1 405,600

150,761

1 826,617

- 29,993

- 5 816,115

1 497,177

(1) Hors comptes de commerce.

(2) Y compris les 250 millions de francs ouverts en gestion 1996 au ministère de l’Équipement (aviation civile).

(3) Prévisions de fin de gestion 1997.

Cette réduction des reports de crédits était devenue d’autant plus impérative qu’est intervenue, en même temps que l’autorisation de consommation supplémentaire des reports évoquée ci-dessus, au mois de novembre, une annulation de 2,04 milliards de francs de crédits de paiement. Les crédits reportés sur 1997 se sont ainsi élevés à 5,274 milliards de francs. Les reports de charges sur le titre V ont cependant atteint 5,7 milliards de francs, ce qui ne lève pas tous les doutes sur l’équilibre financier de la construction budgétaire sur laquelle ont été bâties les hypothèses de la programmation, sans compter que le titre III supporte également des reports de charges, à hauteur de 1,73 milliard de francs.

Il convient de noter, toutefois, que les conséquences des annulations sur le contenu physique des programmes d’armement ont été prises en compte dans l’élaboration de la loi de programmation.

II. —  LE FINANCEMENT DE LA DÉFENSE EN 1996 : UN BUDGET DE TRANSITION

Le budget de la Défense en 1996 est un budget paradoxal : contraint de ne pas hypothéquer les conditions d’entrée dans la nouvelle loi de programmation, sous peine de dévaloriser l’idée même de programmation déjà fortement ébranlée par l’échec de la programmation 1995-2000, il se déroule hors de tout cadre conceptuel et de toute référence opérationnelle. Il s’agit donc d’un exercice de transition, sans perspective aucune autre que celle, exclusivement négative, de ne pas invalider d’entrée la nouvelle loi de programmation militaire.

A. —  L’ÉVOLUTION SANS PERSPECTIVE DES DÉPENSES MILITAIRES

En 1996, le budget de la Défense évolue sans lisibilité. Alors qu’il affiche, en loi de finances initiale, une baisse par rapport à l’année précédente, l’exécution laisse apparaître une augmentation des dépenses militaires. Cette inversion reflète une gestion extrêmement perturbée des crédits de la Défense en 1995 et en 1996 et souligne la nécessité d’orienter l’évolution des budgets militaires par des lois de programmation réalistes.

1. — L’augmentation des dépenses militaires

L’exécution du budget militaire de 1996 conduit à une inversion de l’évolution observée en loi de finances initiale.

En loi de finances initiale, le budget de la Défense s’élevait en effet, y compris les pensions et la dotation affectée au fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels de l’État, à 241,442 milliards de francs, soit une diminution globale de 0,8 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1995. Plus encore, hors pensions, la baisse atteint 2,4 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1995, avec 189,592 milliards de francs ouverts en loi de finances initiale pour 1996

A l’issue de l’exécution du budget de 1996, la situation est totalement inverse : les dépenses militaires passent de 179,965 milliards de francs en 1995 à 185,453 milliards de francs en 1996, soit une progression de 3,04 %. Cette absence de lisibilité de l’évolution des dépenses militaires n’est pas propre au seul exercice 1996. Le tableau ci-après fait apparaître l’évolution quelque peu erratique des dépenses militaires effectives à partir de 1993, année à partir de laquelle baisses et hausses successives alternent sans qu’il soit possible d’y déceler une logique quelconque.

ÉVOLUTION DES DÉPENSES MILITAIRES EFFECTIVES

(au sens de la loi de règlement)

(en milliards de francs courants)

 

Dépenses ordinaires

Dépenses en capital

Total

 

Montant

Évolution

Montant

Évolution

Montant

Évolution

1991

95,490

+ 5,35 %

93,39

- 2,2 %

188,88

+ 1,5 %

1992

95,946

+ 0,48 %

93,885

+ 0,5 %

189,831

+ 0,5 %

1993

100,401

+ 4,6 %

88,666

- 5,6 %

189,067

- 0,4 %

1994

103,705

+ 3,29 %

88,476

- 0,2 %

192,181

+ 1,6 %

1995

105,236

+ 1,5 %

74,729

- 15,5 %

179,965

- 6,4 %

1996

107,455

+ 2,1 %

77,997

+ 4,4 %

185,452

+ 3,0 %

 Hors pensions

2. — Dépenses ordinaires et dépenses en capital : des logiques d’évolution divergentes

Si l’on détaille plus précisément l’origine de l’inversion en exécution de la tendance affichée en loi de finances initiale, il apparaît qu’elle est exclusivement due à l’évolution des dépenses en capital. En effet, les dépenses nettes du titre III s’établissent à 107,43 milliards de francs, en progression de 2,1 % par rapport à 1995, alors que les crédits du titre III en loi de finances initiale prévoyaient seulement une hausse de 1,3 %. Pour le titre III, la tendance est donc accentuée, mais non inversée.

Tout au contraire, alors que les crédits de paiement ouverts en loi de finances initiale pour les titres V et VI étaient en baisse de 6,3 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1995, les dépenses nettes des services militaires augmentent, en 1996, de 4,4 % par rapport à 1995.

Cette situation traduit nettement les problématiques d’évolution divergentes du titre III, d’une part, et des titres V et VI, d’autre part.

a) Les dépenses du titre III : une augmentation régulière et prévisible

Comme l’indique le tableau ci-dessus, la montée en charge des dépenses du titre III s’effectue progressivement et, depuis 1993, assez régulièrement. Il s’agit d’une évolution désormais irréversible qui, dans une certaine mesure et toutes proportions gardées, tend à rapprocher la structure budgétaire du ministère de la Défense de celle des autres ministères, où la part des dépenses de personnel et de fonctionnement prime sur celle des dépenses d’équipement. Amorcée, en exécution, dès 1990, cette tendance se confirme, en prévision, à partir de 1994.

PART RELATIVE DES DÉPENSES ORDINAIRES ET DES

DÉPENSES EN CAPITAL AU SEIN DU BUDGET DE LA DÉFENSE (1)

(1992-1996)

(en pourcentage)

 

Budget initial

Budget exécuté

 

Dépenses ordinaires

Dépenses en capital

Dépenses ordinaires

Dépenses en capital

1992

46,98

53,02

50,54

49,45

1993

47,99

52,01

53,10

46,90

1994

51,10

48,90

53,97

46,03

1995

51,13

48,87

58,48

41,52

1996

53,46

46,54

57,94

42,06

(1) (Hors pensions)

Ce constat incite à s’interroger sur la pertinence des prévisions budgétaires du titre III du budget de la Défense en loi de finances initiale. De manière récurrente, en effet, certains chapitres apparaissent sous-dotés, ce qui nécessite l’ouverture de crédits supplémentaires en cours d’exécution. Dans le même esprit, il peut être relevé, avec la Cour des comptes, que l’absence de mesures de régulation budgétaires sur le titre III militaire tend à prouver que les dépenses ordinaires du ministère de La Défense ne sont guère compressibles.

La croissance des dépenses du titre III en 1996 n’est pas principalement imputable aux dépenses de personnel. Celles-ci ont en effet connu en 1996 une augmentation modérée (+ 1,5 %), notamment au regard de l’évolution des dépenses civiles de personnel (+ 3,9 %). La modération de la croissance des rémunérations, alors que sont intervenues en 1996 de nombreuses mesures de revalorisation (application du protocole “ Durafour ”, création et mise en place de la nouvelle bonification indiciaire, modification du barème de calcul des primes de qualification, etc.), est due à la déflation des emplois budgétaires, relayée plus ou moins rapidement par celle des effectifs réels.

DÉPENSES NETTES DU TITRE III AU COURS DE L’EXERCICE 1996

(en millions de francs)

 

Partie 31 “ Personnel - Rémunérations d’activité ”

Partie 33 “ Charges sociales ”

Partie 34 “ Matériel et fonctionnement des services ”

Partie 36 “ Subventions de fonctionnement ”

Partie 37 “ Dépenses diverses ”

Total dépenses nettes 1996

Total dépenses nettes 1995

Évolution des dépenses nettes 1996/1995 (en %)

Services communs

13 627,499

1 575,088

5 788,712

985,251

1 910,230

23 886,780

23 668,838

0,92 %

Air

10 813,567

1 020,491

4 956,527

26,812

-

16 817,397

16 699,728

0,70 %

Forces terrestres

22 512,013

2 181,572

8 109,065

3,785

-

32 806,435

32 071,052

2,29 %

Marine

8 935,048

950,609

3 909,544

12,648

-

13 807,849

13 702,979

0,77 %

Gendarmerie

14 670,329

1 420,810

4 044,976

-

-

20 136,115

19 093,228

5,46 %

Total

70 558,456

7 148,570

26 808,824

1 028,496

1 910,230

107 454,576

105 235,825

2,11 %

Évolution 1996/1995

(en %)

0,59 %

2,76 %

5,84 %

9,02 %

2,47 %

     

En revanche, les autres dépenses du titre III enregistrent une augmentation conséquente de 5,7 % :

— après plusieurs années de baisse ou de stagnation (- 3,5 % en 1995, + 0,6 % en 1996), les dépenses de matériel et fonctionnement progressent de 5,8 %. Cette augmentation est liée à une hausse des crédits disponibles, notamment du fait de l’ouverture d’un crédit de 830 millions de francs au titre des opérations extérieures et des reports de fonds de concours qui concernent essentiellement le Service de santé des armées ;

— les subventions de fonctionnement progressent fortement (9 %), sans que cette augmentation ait un impact significatif sur la progression d’ensemble étant donné leur part mineure (1 %) dans le titre III.

Le profil de l’exécution du budget de la Défense en 1996 est atypique : depuis 1993, en effet, la progression des dépenses ordinaires des services militaires (+ 7 %) est essentiellement due à la croissance des rémunérations (+ 8,8 %), les dépenses de fonctionnement n’ayant augmenté que de 2,7 % sur cette période.

b) L’augmentation des dépenses en capital

L’évolution des dépenses en capital est, au contraire des dépenses ordinaires, difficilement prévisible et n’est, ex post, pas toujours lisible.

L’année 1996 marque une inflexion de l’évolution de ces dépenses puisqu’elles augmentent de 3,3 milliards de francs par rapport à 1995 pour s’établir à 78 milliards de francs. Il s’agit là d’une inversion notable, après plusieurs années de réductions successives qui conduisent, pour la période 1992-1995, à une baisse cumulée de 20,4 %. L’évolution favorable des dépenses d’équipement se traduit notamment par une amélioration du taux de consommation des crédits qui remonte, en 1996, à 93,7 %, contre 86,8 % en 1995, année exceptionnelle à cet égard, il est vrai.

L’ensemble des services et des armées a bénéficié de cette évolution favorable, comme l’indique le tableau ci-après.

ÉVOLUTION DES DÉPENSES MILITAIRES EN CAPITAL PAR SERVICE ET PAR TITRE

(en millions de francs)

 

Dépenses 1995

Taux d’utilisation 1995 en %

Dépenses 1996

Évolution 1996/1995 en %

Taux d’utilisation 1996 en %

Titre V

I - Section commune

II - Air

III - Forces terrestres

IV - Marine

V - Gendarmerie

15 056,955

19 435,596

17 242,912

19 876,527

2 295,151

74,48 %

94,94 %

86,47 %

90,67 %

94,16 %

16 166,401

19 582,561

20 198,609

19 326,362

1 939,417

1 109,446

146,965

2 955,697

- 550,165

- 355,667

85,73 %

96,65 %

97,42 %

94,42 %

98,41 %

Sous-total Titre V

73 907,141

86,96 %

77 213,417

3 306,276

93,83 %

Titre VI

822,504

76,04 %

784,450

- 38,054

80,22 %

Total

74 729,645

86,82 %

77 997,867

3 268,222

93,67 %

B. —  LES MOUVEMENTS DE CRÉDITS

Le budget de la Défense fait, de manière habituelle, l’objet d’importants mouvements de crédits qui en affectent le montant et la répartition.

Certains de ces mouvements sont récurrents d’année en année et relativement prévisibles. Ainsi en est-il du transfert au budget des charges communes des pensions qui représentent plus de 50 milliards de francs. Cette modification de la répartition des crédits ne pose pas de problème de principe.

Il en va différemment d’un autre mouvement de crédits, tout aussi prévisible, qui affecte le montant des dotations. Les ouvertures de crédits d’avance sur le titre III sont, en dépit de la majoration de crédits qu’elles apportent, critiquables dans leur principe car elles traduisent, pour une large part, la sous-dotation structurelle de certains chapitres du titre III et posent la question de la sincérité du budget voté.

Quant aux autres mouvements de crédits importants, ils relèvent de la régulation budgétaire et s’inscrivent de ce fait dans l’évolution générale de la politique budgétaire menée par le Gouvernement.

CRÉDITS VOTÉS, CRÉDITS OUVERTS ET DÉPENSES NETTES DE L’EXERCICE

(en millions de francs)

   

Dépenses ordinaires

 

Dépenses en capital

 

Total

Crédits votés en loi de finances initiale

 

152 500,8

 

88 947,6

 

241 449,4

Crédits ouverts ou annulés en cours d’exercice

           

- Ouverture de crédits

- Décret d’avance

- Annulations

 

+ 1 200

+ 2 750

-

 

-

-

- 8 507,1

 

+ 1 200

+ 2 750

- 8 507,1

Solde des mouvements

 

+ 3 950

 

- 8 507,1

 

- 4 557,1

Crédits votés

(après loi de finances rectificative)

 

156 450,8

 

80 440,5

 

236 491,3

Mouvements de crédits en cours d’exercice

           

- Reports de l’exercice précédent

- Fonds de concours

- Virements (solde)

- Transferts (solde)

- Répartitions (solde)

}

+ 1 528,6

+ 2 886,5

- 51 231,9

 

+ 11 089,7

+ 1 607,8

- 9 866,7

 

+ 12 618,3

+ 4 494,3

- 61 098,6

Solde des crédits ouverts

 

109 634,0

 

83 271,3

 

192 905,3

Reports à la gestion suivante

 

- 1 043,2

 

- 5 273,4

 

6 316,6

Situation avant loi de règlement

 

108 590,8

 

77 997,9

 

186 588,7

Ajustement du projet de loi de règlement

 

- 1 136,1

 

 

- 1 136,1

DÉPENSES NETTES

 

107 454,7

 

77 997,9

 

185 452,6

1. — Les modifications législatives

Une seule loi de finances rectificative est intervenue en 1996 (loi de finances rectificative du 30 décembre 1996). Elle a procédé aux ajustements suivants sur le budget de la Défense :

— ouverture, au titre des dépenses ordinaires du titre III, de 1,2 milliard de francs de crédits supplémentaires ;

— ratification du décret d’avance du 26 septembre 1996 qui a ouvert 2,75 milliards de francs pour les dépenses ordinaires du titre III ;

— reprise des trois arrêtés d’annulation des 10 avril, 26 septembre et 13 novembre 1996 annulant 8,5 milliards de francs d’autorisations de programme et de crédits de paiement.

Comme lors des précédents exercices et à l’image de la loi de finances rectificative de 1997, l’ouverture de crédits supplémentaires était justifiée par la nécessité de financer les dépenses de fonctionnement, non ou insuffisamment dotées en loi de finances initiale, induites notamment par les surcoûts liés aux opérations extérieures. Les conséquences budgétaires des opérations extérieures sont d’autant plus défavorables que les surcoûts sont difficiles à évaluer, et plus encore à maîtriser.

Pour 1996, les surcoûts résultant des opérations extérieures se sont élevés à 5,147 milliards de francs, dont 3,934 milliards de francs au titre III et 1,213 milliard de francs au titre V. L’augmentation constatée par rapport à 1995 (+ 968 millions de francs, dont 874 millions de francs pour le seul titre III) résulte essentiellement de la création de l’IFOR (Implementation Force) en Bosnie-Herzégovine, qui a entraîné une restructuration des forces présentes, et de la mise en place de la division multinationale sud-est à laquelle ont participé 8 921 militaires français. De plus, le ministère de la Défense a soutenu le financement de certains contingents étrangers (marocains, jordaniens, ukrainiens) et a apporté des contributions financières au titre de sa participation aux états-majors de l’OTAN. Les opérations nouvelles menées en République Centrafricaine (ALMANDIN) et au Yémen (CONDOR), ainsi que la perte d’un Mirage 2000 en Arabie Saoudite, au cours de l’opération Alysse, contribuent également à expliquer cette augmentation.

L’analyse par titre des surcoûts induits par les opérations extérieures indique qu’ils sont, à 75 %, imputés sur le titre III. La majeure partie de ces surcoûts est liée en effet à l’augmentation des rémunérations consécutive aux affectations hors métropole, aux suppléments de charges sociales qui en découlent et aux frais d’alimentation et de fonctionnement des troupes en campagne. Si l’on raisonne par armée, le tableau ci-après fait apparaître la part prépondérante de l’Armée de terre.

SURCOÛTS DES OPÉRATIONS EXTÉRIEURES EN 1996

(en millions de francs)

Théâtres

Services

Titre III

Titre V

Total

 

Air

273,20

81,76

354,96

 

Terre

1 942,17

481,41

2 423,58

“ Ex-Yougoslavie ”

Marine

70,15

49,61

119,75

 

Gendarmerie

49,18

0,20

49,38

 

Communes

204,70

127,86

332,56

 

Total

2 539,40

740,84

3 280,24

 

Air

289,53

47,77

337,30

 

Terre

555,11

55,78

610,89

Tchad et

Marine

1,45

0,00

1,45

Centrafrique

Gendarmerie

3,67

0,00

3,67

 

Communes

30,18

1,27

31,45

 

Total

879,93

104,83

984,75

 

Air

5,14

0,60

5,74

 

Terre

71,42

1,97

73,40

Liban

Marine

0,36

0,00

0,36

 

Gendarmerie

10,00

0,01

10,01

 

Communes

1,12

0,00

1,12

 

Total

88,05

2,57

90,62

 

Air

108,95

355,82

464,77

 

Terre

88,67

4,98

93,65

Autres

Marine

36,63

3,53

40,16

 

Gendarmerie

189,88

0,82

190,69

 

Communes

2,24

0,05

2,28

 

Total

426,37

365,19

791,55

 

Air

676,83

485,94

1 162,75

 

Terre

2 657,37

544,15

3 201,52

Total

Marine

108,58

53,14

161,72

 

Gendarmerie

252,73

1,02

253,75

 

Communes

238,23

129,18

367,41

 

Total

3 933,74

1 213,42

5 147,16

Enfin, en termes de théâtre d’opérations, l’ex-Yougoslavie demeure, comme les années précédentes, la première zone d’intervention des troupes françaises. Au total, sur la période allant de 1992 à 1996, les surcoûts imputables à la présence française sur ce territoire et dans l’Adriatique auront représenté plus de 12 milliards de francs, hors contributions obligatoires à l’ONU au titre des opérations de maintien de la paix. En prenant en compte les remboursements effectués sur cette période, le montant net de l’effort financier français peut être estimé à 7,5 milliards de francs environ. Cette analyse souligne la nécessité, déjà soulignée par votre rapporteur lors de l’examen de la loi de finances rectificative du 30 décembre 1997, de revoir les modalités de financement des opérations extérieures.

2. — Les modifications réglementaires

a) Les modifications du montant des crédits

Cinq types de mouvements d’origine réglementaire sont susceptibles d’affecter le montant des dotations votées :

— les reports de crédits ;

— les gels et annulations de crédits ;

— les décrets d’avance ;

— les rattachements de fonds de concours ;

— les rétablissements de crédits.

Les reports, gels et annulations ayant fait l’objet d’une analyse spécifique, l’analyse portera sur les trois derniers types de modifications.

· Le décret d’avance du 26 septembre 1996

Deux décrets d’avance sont intervenus en 1996. Le décret d’avance n° 96-318 du 10 avril 1996 n’a pas concerné les dotations militaires. En revanche, le décret d’avance n° 96-849 du 26 septembre 1996, ratifié par la loi de finances rectificative du 30 décembre 1996, a ouvert 2,75 milliards de francs de crédits au titre III afin de financer les surcoûts liés aux opérations extérieures à hauteur de 2,5 milliards de francs (dont 1,84 milliard de francs au titre des seules rémunérations des personnels en opérations). Il a également financé des dépenses pourtant prévisibles au moment de l’élaboration de la loi de finances initiale comme les indemnités journalières d’absence temporaire (IJAT) des gendarmes ou les loyers de Gendarmerie.

MODIFICATIONS APPORTÉES PAR VOIE RÉGLEMENTAIRE AU MONTANT ET À LA RÉPARTITION DES CRÉDITS EN 1996

A.- PAR TITRE

(en millions de francs)

 

Reports de 1995 à 1996

Reports de 1996 à 1997

Ouvertures

Arrêtés d’annulation

Fonds de concours rattachés

Rétablissements de crédits

Solde des modifications

Titre III

1 528,624

- 1 043,157

3 950

2 886,483

8 439,913

15 761,863

Titre V

10 830,554

- 5 080,061

- 8 377,693

1 607,863

1 729,149

709,812

Titre VI

259,158

- 193,432

- 129,407

- 63,681

Sous-total dépenses en capital

11 089,712

- 5 273,493

- 8 507,100

1 607,863

1 729,149

646,131

Total des crédits militaires

12 618,336

- 6 316,650

3 950

- 8 507,100

4 494,346

10 169,062

16 407,994

B.- PAR SERVICE

(en millions de francs)

 

Reports de 1995

Reports de 1996

Arrêtés d’annulation

Fonds de concours

Rétablis-sements

Répartition

Transferts

Virements

 

à 1996

à 1997

 

rattachés

de crédits

Ouverture

Annulation

Ouverture

Annulation

Ouverture

Annulation

I.-Services communs

6 104,962

- 3 596,268

- 2 382,622

3 248,792

 

44,193

- 150,077

22,280

- 60 901,947

II.- Air

1 117,138

- 736,817

- 2 028,422

210,350

 

46,420

317,950

37

- 37

III.- Terre

2 854,785

- 617,313

- 1 865,904

341,367

 

173,333

39,935

- 202,500

IV.- Marine

2 084,765

- 1 224,249

- 2 026,563

229,912

 

24,125

13,528

- 696,151

V.- Gendarmerie

456,686

- 142,003

- 203,589

463,925

 

170,265

Total des crédits militaires

12 618,336

- 6 316,650

- 8 507,100

4 494,346

10 169,062

458,336

- 150,077

393,693

- 61 800,598

37

- 37

·  Les rattachements de fonds de concours

La procédure de fonds de concours permet d’assouplir le principe de non-affectation des recettes posé par l’ordonnance organique, en autorisant des personnes morales ou physiques à concourir avec l’État à des dépenses d’intérêt public. Outre ces fonds de concours par nature, existent également des fonds de concours par assimilation, en pratique majoritaires, qui permettent d’assimiler à des fonds de concours certaines recettes à caractère non fiscal ou certains rétablissements de crédits.

En 1996, 4,5 milliards de francs ont été rattachés au budget du ministère de la Défense au titre de la procédure de fonds de concours, dont seuls 533 millions de francs correspondent à des fonds de concours par nature. Le budget de la Défense est ainsi le troisième poste budgétaire, après les charges communes et les services financiers, concerné par les rattachements de fonds de concours par assimilation.

FONDS DE CONCOURS RATTACHÉS

AU BUDGET DE LA DÉFENSE EN 1996

(en millions de francs)

 

Titre III

Titre V

Total

Services communs

2 311,744

937,048

3 248,792

Air

59,105

151,245

210,350

Terre

45,445

295,922

341,367

Mer

19,102

210,810

229,912

Gendarmerie

451,087

12,838

463,925

Total

2 886,483

1 607,863

4 494,346

En hausse de 5 % par rapport à l’année précédente, ces crédits ont été majoritairement (64,4 %) rattachés au titre III. L’origine des fonds rattachés à ce titre ne varie guère par rapport à l’année précédente, le remboursement des soins assurés par le Service de santé des armées constituant toujours la première source de rattachement.

ORIGINE DES FONDS DE CONCOURS RATTACHÉS AU TITRE III

 

En francs

En %

Produits provenant d’aliénations de biens meubles

55 378 899

1,92

Cessions directes de matériels à des tiers

15 110 530

0,52

Rémunérations de services divers

247 655 499

8,58

Prestations SHOM(1) et contributions autoroutières

450 395 362

15,60

Produits divers (taxes apprentissage, oeuvres sociales, legs)

8 367 340

0,29

Redevances de contrôle sur matériels d’exportation

51 817 916

1,80

Recettes provenant de soins dispensés par le Service de Santé

2 057 757 163

71,29

Total

2 886 482 709

100,00

(1) Services d’honneur et d’ordre assurés par les militaires de la Garde républicaine de Paris.

Il en va différemment des fonds rattachés au titre V qui voient la hiérarchie de leur origine modifiée. Si les participations étrangères aux frais d’études et de fabrication relatifs aux programmes en coopération restent toujours majoritaires, on observera en revanche la forte progression des produits provenant d’aliénations d’immeubles, qui reflète la politique de cession de son patrimoine immobilier par le ministère de la Défense.

ORIGINE DES FONDS DE CONCOURS RATTACHÉS AU TITRE V

 

En francs

En %

Produits provenant d’aliénations de biens meubles

71 339 243

4,44

Cessions directes de matériels à des tiers

132 239 913

8,22

Produits provenant d’aliénations d’immeubles

238 184 929

14,81

Recettes provenant d’essais dans les établissements Défense

14 402 048

0,90

Infrastructures, contrats d’achats de matériels

65 665 191

4,08

Coopération internationale

794 005 834

49,38

Redevances d’études et concessions de licences

138 016 399

8,58

Produits divers

154 009 494

9,58

Total

1 607 863 051

100,00

L’année 1996 a, une fois encore, été caractérisée par un rattachement tardif de ces crédits, notamment au titre V. Le ministère de la Défense n’est sans doute pas le seul concerné par ce phénomène ; il l’est, toutefois, dans une très forte proportion puisque plus de 80 % des rattachements de crédits au titre V interviennent aux troisième et quatrième trimestres, situation qui tend à se détériorer par rapport aux exercices précédents.

· Les rétablissements de crédits

Autre procédure d’affectation de recettes prévue par l’ordonnance organique de 1959, les rétablissements de crédits se sont élevés à 10,169 milliards de francs en 1996. La part principale de ces rétablissements de crédits est constituée par les remboursements des charges de personnel des arsenaux en provenance des comptes de commerce de la défense, considérés comme des remboursements de cession ayant donné lieu à paiement sur crédits budgétaires. Il faut rappeler en effet que l’ordonnance organique interdit l’imputation directe de la rémunération d’agents publics sur un compte spécial du Trésor.

Là encore, les effets de la régulation budgétaire sur le titre V se sont fait sentir, induisant notamment un ralentissement des virements de crédits de la zone budgétaire vers les comptes de commerce, les rémunérations et charges sociales des personnels employés par les comptes de commerce “ constructions navales de la marine militaire ” (DCN) et “ exploitations industrielles des ateliers aéronautiques de l’État ” (DCAé) étant remboursées au titre III du budget de la Défense par les comptes de commerce à partir des crédits virés du titre V.

RÉTABLISSEMENTS DE CRÉDITS DE LA GESTION 1996

(en millions de francs)

 

Gestion 1996

Recettes provenant de cessions :

— comptes de commerce de la DGA

— essences

— autres services

6 204,623

141,616

600,872

Sous-total cessions

6 947,111

Reversements de fonds

1 574,428

Changements d’imputation

1 647,522

Total

10 169,061

RÉTABLISSEMENTS DE CRÉDITS DE LA GESTION 1996 PAR TITRE

(en millions de francs)

 

Titre III

Titre V

Total

Règlement des cessions consenties

6 771,694

175,417

6 947,111

Reversements de fonds (trop perçus)

829,484

744,944

1 574,428

Changements d’imputation

838,734

808,788

1 647,522

Total atténuations de dépenses

8 439,912

1 729,149

10 169,061

b ) Les modifications de la répartition des crédits

Trois mouvements sont susceptibles de modifier la répartition des dotations :

— les transferts de crédits ;

— les virements de crédits ;

— les arrêtés de répartition de crédits globaux.

· Les transferts de crédits

L’article 14 de l’ordonnance organique vient assouplir la règle de la spécialité budgétaire en prévoyant que, dès lors que la dépense ne change pas de nature, le service responsable de son exécution peut être modifié sur simple arrêté du Ministre des Finances.

Comme chaque année, la quasi-totalité des transferts de crédits intéressant le ministère de la Défense concerne les pensions et s’effectue au profit du budget des charges communes. De manière tout aussi habituelle, le ministère de la Défense a bénéficié de transferts de crédits en provenance du budget du ministère de l’Intérieur pour l’acquisition et l’entretien des avions de la sécurité civile. La Cour des comptes souligne toutefois l’irrégularité d’une telle procédure, dans la mesure où elle se traduit par un transfert du titre VI au titre III.

Au total, le solde des transferts de crédits s’établit en 1996 à plus de 51 milliards de francs, répartitions comprises.

· Les virements de crédits

Contrairement aux transferts de crédits, les virements affectent la nature même de la dépense et font, de par l’exception importante au principe de spécialité des crédits qu’ils représentent, l’objet d’un décret.

Leur solde est nul pour le budget de la Défense en 1996, les ouvertures (37 millions de francs) ayant été égales aux annulations.

· Les arrêtés de répartition de crédits globaux

Aux termes de l’ordonnance organique, trois catégories de crédits sont susceptibles d’être réparties :

— les crédits “ ouverts pour des dépenses dont la répartition par chapitre ne peut être déterminée au moment où ils sont votés ” (article 7 de l’ordonnance organique du 2 janvier 1959) ;

— les crédits pour “ dépenses éventuelles ” (article 10) ;

— les crédits pour “ dépenses accidentelles ” (article 11).

Leur solde s’établit en 1996, pour le budget de la Défense, à 317 millions de francs.

III. —  LES AJUSTEMENTS DE CRÉDITS PROPOSÉS PAR LE PROJET DE LOI DE RÈGLEMENT

Les articles 5 et 6 du projet de loi de règlement arrêtent le montant définitif des dépenses militaires.

Deux types d’ajustement interviennent :

— les ouvertures de crédits complémentaires ;

— les annulations de crédits non consommés.

Ces deux mouvements modifient le montant des dotations ainsi qu’il est indiqué dans le tableau ci-après.

(en millions de francs)

 

Situation

avant la loi

Ajustements finaux

Dépenses

effectives

 

de règlement

Ouvertures

Annulations

en 1996

Titre III

108 590,8

113,045

1 249,157

107 454,756

Titre V

77 213,417

77 213,417

Titre VI

784,449

784,449

Sous-total Titres V et VI

77 997,867

77 997,867

Total

186 588,73525

113,045

1 249,157

185 452,625

Les ouvertures de crédits complémentaires s’élèvent à 113,045 millions de francs et viennent abonder le chapitre 33-90 “ cotisations sociales ” et, comme il est traditionnel, le chapitre 37-91 “ frais de contentieux - règlement des dommages et accidents du travail ”, chapitres dotés de crédits évaluatifs. Les dépassements de la dotation initiale constatés sont la conséquence :

— au chapitre 33-90, du report sur 1996 du règlement de cotisations sociales pour un montant de 90,37 millions de francs, dues au titre de 1995 ;

— au chapitre 37-91, du paiement, à la suite d’une décision de justice, d’intérêts moratoires à des techniciens d’étude et de fabrication.

Les annulations de crédits non consommés portent sur un montant de 1,249 milliard de francs.

CONCLUSION

L’exercice 1996 offre un profil tout à fait particulier, largement dû à l’absence de ce cadre de référence qu’est la loi de programmation. Budget sous contrainte, budget de transition, il a illustré, de manière éclatante, la nécessité, pour les gestionnaires publics, de trouver un point d’équilibre entre les objectifs annuels et le temps long des programmes d’armement, comme il a révélé un certain nombre de dysfonctionnements qu’illustrent l’existence de reports de charges massifs et la très forte croissance des intérêts moratoires.

Les symptômes connus, il convient de proposer des remèdes en proposant d’améliorer les méthodes de fonctionnement de l’administration et de clarifier les procédures budgétaires, condition nécessaire de l’efficacité du contrôle démocratique. L’examen parlementaire de la loi de règlement peut y contribuer.

*

La Commission de la Défense ne peut, en la matière, que renouveler sa proposition d’inscrire, en loi de finances initiale, des dotations qui reflètent davantage le montant des crédits effectivement mis à la disposition du ministère de la Défense. A cet égard, il est souhaitable de mettre fin à l’alourdissement des reports de charges, comme à la technique des reports de crédits imposés : ces pratiques obscurcissent considérablement le cadre budgétaire et, en conséquence, handicapent le contrôle parlementaire. Si elles cessaient, non seulement l’autorisation budgétaire s’en trouverait davantage respectée mais en outre, les gestionnaires du ministère de la Défense seraient à même de travailler dans une perspective de long terme et un contexte stabilisé, indispensables à la réussite des réformes actuellement mises en oeuvre.

Il serait également souhaitable d’encadrer la régulation budgétaire de principes qui permettraient d’atténuer les perturbations qui en résultent pour la gestion des crédits.

Il faut constater à ce propos que l’exécution du budget de la Défense pour 1997 paraît, jusqu’à présent, beaucoup plus satisfaisante, tant en ce qui concerne les reports de charges et les reports de crédits imposés que la régulation budgétaire.

*

La lourdeur des processus de gestion internes au ministère de la Défense amplifie les rigidités induites par la régulation budgétaire.

A cet égard, les réformes actuellement mises en oeuvre au ministère de la Défense, qui visent à doter celui-ci d’un contrôle de gestion moderne et efficace, devraient mettre fin à l’archaïsme de certaines procédures. Votre rapporteur se félicite en particulier de la mise en place en 1997 d’une comptabilité spéciale des investissements au sein de ce ministère, d’autant qu’elle existe depuis quinze ans dans les ministères civils. La clarification ainsi opérée dans la gestion des autorisations de programme traduit la modernisation du ministère de la Défense. Plus satisfaisante sur le plan juridique, elle permet, sur le plan comptable, de resserrer le lien entre autorisations de programme et crédits de paiement.

Reste cependant le problème de l’extrême globalité de certains chapitres du budget du ministère de la Défense, peu conforme au principe de spécialité posé par l’ordonnance organique du 2 janvier 1959. Il conviendrait donc de revoir la nomenclature budgétaire, en particulier le chapitre 53-80 qui, à lui seul, englobe 47 milliards de francs, soit la moitié des dépenses d’investissement de l’État. Il est à espérer que les projets du ministère de la Défense, qui visent à une présentation des crédits d’équipement détaillée par opérations budgétaires d’investissement, trouvent une concrétisation dès la loi de finances initiale pour 1999.

*

La régulation budgétaire particulièrement brutale en 1995 et en 1996 souligne la nécessité cruciale d’un meilleur dialogue entre les ministères du Budget et de la Défense pour la gestion des crédits militaires. Il paraît en particulier nécessaire à votre rapporteur d’abandonner définitivement la pratique du refus de visa du contrôleur financier en dehors de toute décision préalable de blocage des crédits.

Sur ce point, la signature le 24 avril 1997 d’une “ instruction interministérielle sur la gestion des crédits d’équipement du ministère de la Défense ” entre le Ministre du Budget, le Ministre de l’Économie et des Finances et le Ministre de la Défense, pourrait constituer le point de départ d’un rapprochement, souhaitable pour l’efficacité de la dépense, des méthodes, des instruments et des concepts mis en oeuvre par les administrations des Finances et de la Défense.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné, pour avis, sur le rapport de M. François Lamy, les projets de loi portant règlement définitif des budgets de 1995 (n° 33) et de 1996 (n° 587) le jeudi 18 juin 1998.

M. François Lamy, rapporteur pour avis, a tout d’abord regretté le caractère largement formel de la procédure d’examen des lois de règlement, faisant observer que celles-ci constituent, pour le budget de la Défense, la seule occasion de mener une analyse pertinente sur l’adéquation entre les crédits effectivement ouverts et les orientations fixées par la loi de programmation, eu égard à l’écart très important entre la loi de finances initiale et le budget exécuté. Il a indiqué que l’examen de la partie des lois de règlement relative aux crédits militaires permettait en outre de porter un regard sur les méthodes de gestion du ministère de la Défense, ce qui dépasse les simples enjeux de technique financière pour poser la question de l’effectivité du pouvoir de contrôle du Parlement sur un budget souvent peu transparent et permet de s’interroger sur le lien entre l’évolution des dotations et celle de leur contenu physique.

Il a ensuite présenté conjointement les deux avis sur les lois de règlement pour les budgets de 1995 et 1996, soulignant leur caractère indissociable tant dans leurs modalités que dans les enseignements qu’ils livrent. Il a souligné l’absence de correspondance stricte entre les crédits votés en début d’année et les dépenses nettes du ministère de la Défense en 1995 et 1996, dont l’évolution avait même été inverse de celle présentée en loi de finances initiale, et fait observer que ce décalage tenait exclusivement aux dépenses d’équipement. Il a rappelé qu’alors qu’en loi de finances initiale, le budget de la Défense pour 1996 affichait par rapport à 1995 une baisse de 2,4 % de son montant global et de 6,3 % pour les dépenses d’équipement, les dépenses nettes s’étaient révélées en exécution supérieures à celles de 1995 de 3 % pour l’ensemble des crédits militaires, et de 4,4% pour les dépenses d’équipement. Il a fait observer que la raison essentielle de cette déconnexion entre la loi de finances initiale et le budget exécuté tenait à la très forte régulation appliquée, à l’époque, au budget de la Défense, en conséquence d’une politique budgétaire et fiscale particulièrement rigoureuse. Il a relevé que cette régulation s’était traduite essentiellement par un niveau élevé d’annulations de crédits d’équipement (12 milliards de francs en 1995 et 8,5 milliards de francs en 1996) et par une masse très importante de reports de crédits qui avaient permis au budget de la Défense de jouer le rôle de variable d’ajustement du déficit de l’Etat.

Sans prétendre jeter l’anathème sur le principe même de la régulation budgétaire, M. François Lamy a toutefois déploré ses modalités, mentionnant notamment le caractère verbal des instructions reçues du ministère du Budget par le contrôleur financier sans que, par définition, les gestionnaires du ministère en soient informés. Il a estimé que cette procédure paraissait peu compatible avec les engagements du ministère de la Défense à l’égard de ses fournisseurs et, après avoir rappelé que le paiement de plus de 12 milliards de francs de charges avait été reporté en 1995 sur l’exercice 1996, il a précisé que sur ces 12 milliards de francs 8 milliards avaient entraîné le versement d’intérêts moratoires pour une somme de 812 millions de francs en 1996, soit une augmentation de 157 % par rapport à 1995.

Le rapporteur pour avis a en conséquence souligné que l’exercice 1995 apparaissait catastrophique puisqu’il s’était traduit par une baisse de 15,5 % des crédits d’équipement entre la loi de finances initiale et le budget exécuté, y compris toutefois les transferts vers le budget civil de la recherche. Il a ajouté que l’exercice 1996 s’était révélé tout aussi délicat en raison de trois contraintes : la contrainte financière héritée de l’exercice 1995, la contrainte budgétaire très forte de 1996 et la nécessité de ne pas hypothéquer d’entrée de jeu la loi de programmation 1997-2002.

M. François Lamy, soulignant la rupture introduite par la crise financière issue des exercices 1995 et 1996, a relevé que deux enseignements pouvaient en être tirés.

Il a insisté sur la nécessité de faire évoluer le budget de la Défense dans un cadre pluriannuel clair et réaliste, soulignant que l’exercice 1996 en avait été dépourvu, ce qui avait donné lieu à des errements chaotiques. Il a d’ailleurs fait observer que c’est précisément ce constat, nourri des enseignements tirés de l’échec de la loi de programmation 1995-2000, qui avait présidé à la revue de programmes permettant d’actualiser les données retenues par la loi de programmation militaire 1997-2002.

Il a souligné en outre que la lourdeur des processus de gestion internes au ministère de la Défense avait contribué à amplifier les effets de la régulation et les carences de la programmation, tout en indiquant que des améliorations étaient récemment intervenues sur ce point, notamment à la suite de la signature d’une instruction interministérielle commune aux ministères du Budget et de la Défense. Il a rappelé, à ce propos, que le ministère de la Défense avait, depuis le 1er janvier 1998, adopté la comptabilité spéciale des investissements, en vigueur dans les ministères civils depuis quinze ans déjà. Il a également indiqué qu’était actuellement envisagée une réforme de la nomenclature budgétaire susceptible de permettre un suivi plus fin de l’affectation des crédits d’équipement, et articulée autour de la notion d’“ opération budgétaire d’investissement ”, qui se situerait à un niveau intermédiaire entre l’extrême globalité de certains chapitres du titre V et les quelques 8 000 opérations budgétaires existant actuellement. Il a enfin souligné que les signes de dysfonctionnements les plus flagrants tels que les intérêts moratoires semblaient partiellement résorbés (environ 300 millions de francs en 1997), des mesures ayant par ailleurs été prises pour limiter leurs effets négatifs sur les petites et moyennes entreprises partenaires du ministère de la Défense.

M. François Lamy a estimé que s’il fallait se féliciter de cette évolution des pratiques gestionnaires et budgétaires, il restait néanmoins à espérer qu’elles se traduiraient rapidement dans la présentation des documents budgétaires, notamment à l’occasion de la loi de finances pour 1999.

Suivant les conclusions de son rapporteur pour avis, la Commission a donné un avis favorable à l’adoption des projets de loi portant règlement définitif des budgets de 1995 et de 1996.

______________

N° 997.– Avis de M. François Lamy (au nom de la commission de la défense), sur le projet de loi (n° 587), portant règlement définitif du budget de 1996.

1 Cité dans le rapport n° 933 sur le projet de loi portant règlement définitif du budget de 1995, p. 198.

2 Rapport n° 933 sur le projet de loi portant règlement définitif du budget de 1995,

pp. 215-218.