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le 8 janvier 1999

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N° 1288

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 22 décembre 1998.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA PRODUCTION ET DES ÉCHANGES (1) SUR LE PROJET DE LOI (n° 1071), d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire et portant modification de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire,

PAR M. PHILIPPE DURON,

Député.

--

TOME I

Discussion générale

Examens des articles

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Aménagement du territoire.

La commission de la production et des échanges est composée de : M. André Lajoinie, président ; MM. Jean-Paul Charié, Jean-Pierre Defontaine, Pierre Ducout, Jean Proriol, vice-présidents ; MM. Léonce Deprez, Christian Jacob, Daniel Paul, Patrick Rimbert, secrétaires ; MM. Jean-Pierre Abelin, Jean-Claude Abrioux, Stéphane Alaize, Damien Alary, André Angot, François Asensi, Jean-Marie Aubron, Pierre Aubry, Jean Auclair, Jean-Pierre Balduyck, Jacques Bascou, Mme Sylvia Bassot, MM. Christian Bataille, Jean Besson, Gilbert Biessy, Claude Billard, Claude Birraux, Jean-Pierre Blazy, Serge Blisko, Jean-Claude Bois, Daniel Boisserie, Franck Borotra, Christian Bourquin, Mme Danièle Bousquet, MM. François Brottes, Marcel Cabiddu, Alain Cacheux, Dominique Caillaud, André Capet, Laurent Cathala, Jean-Paul Chanteguet, Jean Charroppin, Philippe Chaulet, Jean-Claude Chazal, Daniel Chevallier, Pierre Cohen, Alain Cousin, Yves Coussain, Jean-Michel Couve, Jean-Claude Daniel, Marc-Philippe Daubresse, Philippe Decaudin, Mme Monique Denise, MM. Eric Doligé, François Dosé, Jean-Pierre Dufau, Dominique Dupilet, Philippe Duron, Jean-Claude Etienne, Laurent Fabius, Alain Fabre-Pujol, Albert Facon, Alain Ferry, Jean-Jacques Filleul, Jacques Fleury, Nicolas Forissier, Roland Francisci, Claude Gaillard, Robert Galley, Claude Gatignol, André Godin, Alain Gouriou, Joël Goyheneix, Michel Grégoire, Gérard Grignon, Hubert Grimault, Lucien Guichon, Gérard Hamel, Patrick Herr, Claude Hoarau, Robert Honde, Claude Jacquot, Mme Janine Jambu, MM. Aimé Kergueris, Jean Launay, Thierry Lazaro, Patrick Lemasle, Jean-Claude Lemoine, Jacques Le Nay, Jean-Claude Lenoir, Arnaud Lepercq, René Leroux, Roger Lestas, Alain Le Vern, Félix Leyzour, Michel Liebgott, Lionnel Luca, Jean-Michel Marchand, Daniel Marcovitch, Alfred Marie-Jeanne, Alain Marleix, Daniel Marsin, Philippe Martin, Jacques Masdeu-Arus, Marius Masse, Roger Meï, Roland Metzinger, Pierre Micaux, Yvon Montané, Gabriel Montcharmont, Jean-Marie Morisset, Bernard Nayral, Jean-Marc Nudant, Jean-Paul Nunzi, Patrick Ollier, Joseph Parrenin, Paul Patriarche, François Patriat, Germinal Peiro, Jacques Pélissard, Mmes Marie-Françoise Pérol-Dumont, Annette Peulvast-Bergeal, MM. Serge Poignant, Bernard Pons, Jacques Rebillard, Jean-Luc Reitzer, Gérard Revol, Mme Marie-Line Reynaud, M. Jean Rigaud, Mme Michèle Rivasi, MM. Jean Roatta, André Santini, Joël Sarlot, Georges Sarre, Mme Odile Saugues, MM. François Sauvadet, Jean-Claude Thomas, Léon Vachet, Daniel Vachez, François Vannson, Michel Vaxès, Michel Vergnier, Gérard Voisin, Roland Vuillaume.

SOMMAIRE

INTRODUCTION 7

I - UN DEMI SIÈCLE D'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE  8

A.- " PARIS ET LE DÉSERT FRANÇAIS " : LE SOUCI DU RÉÉQUILIBRAGE. 8

B.- L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE À L'ÉPREUVE DE LA CRISE ET DU LIBÉRALISME 10

C.- RECONSTRUIRE UNE PLANIFICATION POUR LE SIÈCLE À VENIR 11

II.- PRINCIPALES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI D'ORIENTATION POUR L'AMÉNAGEMENT ET LE DÉVELOPPEMENT DURABLE DU TERRITOIRE 12

A.- RAPPEL DU RÔLE DE L'ETAT ET RECHERCHE D'UN NOUVEL ÉQUILIBRE ENTRE LES DIFFÉRENTS ACTEURS DE L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE 13

1. L'Etat demeure un acteur majeur de l'aménagement du territoire 13

2. La recherche d'un nouvel équilibre entre les différents acteurs de l'aménagement du territoire 13

B.- LES PRINCIPALES IDÉES NOUVELLES DU PROJET DE LOI D'ORIENTATION POUR L'AMÉNAGEMENT ET LE DÉVELOPPEMENT DURABLE DU TERRITOIRE 14

1. La prise en compte de la dimension européenne 14

2. La substitution d'une approche fondée sur les besoins des populations aux politiques de l'offre mises en _uvre jusqu'à présent 15

3. Le renforcement de la démocratie participative 16

4. L'introduction de la notion de développement durable 16

C.- LES OUTILS 17

1. Les schémas de services collectifs 17

2. Les autres outils 18

D.- LA RECOMPOSITION TERRITORIALE - LA RECHERCHE DE TERRITOIRES PERTINENTS 19

1. Les pôles de taille européenne 19

2. Les pays 20

3. Les agglomérations 21

4. Le soutien aux espaces en difficulté 23

TRAVAUX DE LA COMMISSION 25

I.- AUDITION DE MME DOMINIQUE VOYNET, MINISTRE
DE L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET DE
L'ENVIRONNEMENT
25

II.- DISCUSSION GÉNÉRALE 46

III.- EXAMEN DES ARTICLES 60

Article 1er (article 1er de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Principes de la politique d'aménagement et de développement durable du territoire 60

Article 2 (article 2 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Choix stratégiques de la politique d'aménagement et de développement durable du territoire 67

Après l'article 2 81

Article 3 : Coordination 82

Article 4 (article 3 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Conseil national d'aménagement et de développement du territoire 83

Après l'article 4 88

Article 5 (article 34 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983) : Schéma régional d'aménagement et de développement du territoire 88

Après l'article 5 94

Article 6 (article 34 ter de la loi du 7 janvier 1983) : Conférence régionale de l'aménagement et du développement du territoire 94

Article 7 (article L. 425-1 du code général des collectivités territoriales) : Plan de la région 98

Article 8 (article 9 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Suppression du groupement d'intérêt public d'observation et d'évaluation de l'aménagement du territoire 99

Article 9 (article 10 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Schémas de services collectifs 100

Article additionnel après l'article 9 : Création d'une délégation parlementaire à l'aménagement et au développement durable du territoire 106

Article 10 (article 11 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Schéma de services collectifs de l'enseignement supérieur et de la recherche 107

Article 11 (article 12 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) Articulation de la carte des formations supérieures et de la recherche et du schéma de services collectifs de l'enseignement supérieur et de la recherche 116

Article 12 (article 16 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Schéma de services collectifs culturels 117

Article 13 (article 16-1 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Modalités de mise en _uvre du schéma de services collectifs culturels 124

Article 14 (article 17 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Schéma de services collectifs sanitaires 125

Article 15 (article 18 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Schéma de services collectifs de l'information et de la communication 130

Article 16 (article 19 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) :  Schémas de services collectifs de transport de personnes et de marchandises 137

Article 17 (article 20 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Schéma de services collectifs de l'énergie 145

Article 18 (article 21 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Schéma de services collectifs des espaces naturels et ruraux 150

Article 19 (article 22 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Reconnaissance des pays et chartes de pays 159

Article 20 (article 23 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Agglomérations 180

Après l'article 20 185

Article 21 (article 24 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Parcs naturels régionaux 187

Après l'article 21 188

Article additionnel avant l'article 22 (article 28 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Création de commissions départementales de présence postale 188

Article 22 (articles 29 et 29-1 [nouveau] de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Maintien des services publics sur le territoire 194

Article additionnel après l'article 22 (article 7 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne) : Information du comité de massif sur l'attribution de certains crédits du fonds national d'aménagement et de développement du territoire 199

Article additionnel après l'article 22 (article 33 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Information du conseil national de l'aménagement et du développement du territoire sur l'attribution des crédits du fonds national d'aménagement et de développement du territoire 199

Article additionnel après l'article 22 (article 33 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Information des élus concernés sur l'attribution des crédits inscrits à la section locale du fonds national d'aménagement et de développement du territoire 200

Après l'article 22 201

Article 23 (article 38-1 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Fonds de gestion des milieux naturels 201

Après l'article 23 204

Article 24 (article 39 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Objectifs du schéma directeur de la région Ile-de-France 205

Article 25 (article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Zones prioritaires ultra-périphériques 206

Après l'article 25 208

Article 26 (article 61 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) : Zones de revitalisation rurale 209

Après l'article 26 211

Article 27 : Suppression de l'obligation de déclaration de location
de résidences de tourisme 212

Après l'article 27 212

Article 28 (article 1er de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982) : Objectifs du système de transports intérieurs 213

Article 29 (article 3 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982) : Politique globale des transports 214

Article 30 (article 4 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982) : Intégration des politiques locales de transport 218

Article 31 (article 14 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982) : Coordination 222

Article 32 (articles 14-1 et 14-2 [nouveaux] de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982) : Conditions d'établissement des schémas de transport 222

Article 14-1 [nouveau] de la loi de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982: Schémas
de transport
222

Article 14-2 [nouveau] de la loi de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982: Objectifs des
schémas de services de transport
226

Après l'article 32 229

Article 33 : Coordination 229

Article 34 (article L. 111-1-1 du code de l'urbanisme) : Directives territoriales d'aménagement 229

Article 35 (article L. 141-1 du code de l'urbanisme) : Schéma directeur de la région Ile-de-France 232

Article 36 : Compagnie nationale du Rhône 235

Après l'article 36 235

MESDAMES, MESSIEURS,

Le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire, présenté par Mme Dominique Voynet au nom du gouvernement répond à la volonté exprimée par le Premier Ministre lors de sa déclaration de politique générale le 19 juin 1997. Lionel Jospin annonçait alors la révision de la loi du 4 février 1995 afin que "toutes les dimensions - écologiques, culturelles et économiques - du développement soient prises en compte dans les régions ". Le Comité Interministériel d'Aménagement et de développement du territoire (CIADT) du 15 décembre 1997 réorientait les priorités de la politique d'aménagement et de développement du territoire en ce sens.

Ce projet de loi vise à fournir un cadre pour l'élaboration de la nouvelle génération des contrats de plan Etat-régions ainsi qu'une doctrine pour conduire de manière cohérente la renégociation de la politique européenne des fonds structurels.

Il s'intègre dans un dispositif plus large qui vise aussi à simplifier l'organisation des territoires : le projet de loi relatif à l'organisation urbaine et à la simplification de la coopération intercommunale qui sera présenté par M. Jean-Pierre Chevènement en février, et le projet de loi sur les interventions économiques des collectivités territoriales de M. Emile Zuccarelli, que l'on annonce pour 1999.

Ce projet de loi modifie la loi du 4 février 1995, dont les difficultés d'application ont montré les limites et s'inscrit dans une évolution des politiques d'aménagement du territoire amorcée depuis le début de la décennie. Projet de loi d'orientation, il n'a pas vocation à décrire la totalité des actions d'aménagement du territoire, mais d'en préciser le cadre, les intentions et les modalités.

I.- UN DEMI SIÈCLE D'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE 

La politique d'aménagement du territoire aura bientôt cinquante ans. Volontariste et centralisée, elle a constitué pendant les " Trente Glorieuses " un outil pour orienter et accompagner les mutations structurelles que vivait alors notre pays. La crise économique qui s'est développée après le choc pétrolier de 1973 et la remise en cause des politiques interventionnistes de l'Etat, ont vidé de son sens et privé d'efficacité cette politique de structuration et d'aménagement de l'espace. Un regain d'intérêt pour la notion d'aménagement du territoire s'est manifesté au cours des années quatre-vingt-dix. La réflexion universitaire, l'attente des acteurs de terrain, ont incité le Politique à réviser les concepts de l'aménagement du territoire, à s'interroger sur la structuration de l'espace national, à identifier les acteurs qui, autour de l'Etat, doivent se mobiliser et agir pour répondre aux attentes des territoires et de leurs habitants.

Pour bien comprendre les problématiques d'aujourd'hui, il est cependant nécessaire de revenir sur les concepts et les pratiques qui ont, jusqu'ici, caractérisé les politiques d'aménagement du territoire.

A.- " PARIS ET LE DÉSERT FRANÇAIS " : LE SOUCI DU RÉÉQUILIBRAGE.

Des années cinquante au milieu des années soixante-dix, la croissance favorise la transition d'une France rurale à une France urbaine. Encore fortement agricole avant la seconde guerre mondiale, notre pays modernise et développe son outil industriel. L'Etat qui joue un rôle moteur dans cette mutation s'appuie sur les deux outils que sont une planification étatique et centralisée et l'aménagement du territoire. En 1950, M. Claudius-Petit, alors ministre de la Construction et de l'Urbanisme, crée, au sein de son département ministériel, une direction de l'aménagement du territoire. Il faudra attendre 1963 et la création de la DATAR. par M. Olivier Guichard pour lui voir reconnus une autonomie et un caractère interministériel.

Ce premier âge de l'aménagement du territoire est marqué au sceau du rééquilibrage ; il s'agit de corriger les inégalités spatiales entre Paris et la province, entre la France de l'Est plus industrialisée et la France de l'Ouest encore largement agricole.

D'abord préoccupé par l'hypertrophie de la région parisienne, l'Etat s'efforce de maîtriser la croissance désordonnée de l'agglomération capitale. Celle-ci sera contenue dans des limites acceptables. La politique des villes nouvelles prévue par le schéma d'aménagement de la région parisienne a ainsi permis d'accueillir la moitié de la progression démographique de la région parisienne. Celle des métropoles d'équilibre a favorisé le développement des huit agglomérations urbaines les plus peuplées ; elle leur a apporté un niveau de service et leur a permis de limiter leur dépendance par rapport à la région parisienne.

Fondée sur une politique de l'offre, cette politique a connu d'indéniables succès. Les schémas directeurs pour les principaux moyens de communication, schémas des grandes liaisons routières, des voies navigables, des télécommunications, des liaisons aériennes..., ont apporté une cohérence nécessaire à ces infrastructures structurantes et en ont souvent accéléré la mise en _uvre. Il en va de même de la réalisation de la politique des grands aménagements touristiques. Ainsi l'aménagement du littoral Languedoc-Roussillon s'est déroulé autour d'une mission interministérielle, créée en 1963. Présidée par M. Pierre Racine, elle entreprit l'assainissement d'un secteur réputé insalubre et l'aménagement de cinq stations balnéaires aujourd'hui réputées : la Grande Motte, Cap d'Agde, Gruissan, Leucate et Saint Cyprien.

Une autre approche de l'aménagement du territoire fut la redistribution. Dans le contexte de croissance et de modernisation qui caractérise cette première période, le rééquilibrage passe aussi par une politique de déconcentration industrielle menée aux dépens de la région parisienne ; la DATAR a favorisé, par les primes d'aménagement du territoire, par des procédures d'agrément, l'installation d'unités de production dans les villes de province. L'industrie automobile a bien illustré la réussite de cette politique qui permettait aux industriels de trouver sur les bassins d'emploi des conditions d'embauche avantageuses.

C'est à un rythme soutenu que cette politique a été conduite de manière volontariste et centralisée. La croissance urbaine forte a généré un urbanisme et une architecture dont on mesure aujourd'hui les effets néfastes ; le " zoning " excessif a provoqué la ségrégation de l'habitat et l'appauvrissement des pratiques sociales. Construits vite, pour résorber la crise du logement née de la reprise démographique de l'après-guerre et d'un exode rural continu qu'a aggravé l'afflux subit et massif des rapatriés d'Algérie, les grands ensembles ont permis, dans un premier temps, d'élever très significativement les standards de confort dans notre pays. Mais la qualité insuffisante du bâti, la rotation trop rapide des résidents dans ces quartiers, l'affectation de ceux-ci aux plus fragiles de nos concitoyens, la concentration de populations immigrées souvent étrangères au mode de vie urbain marquent les limites de cette politique et expliquent les maux dont souffrent ces quartiers aujourd'hui.

B.- L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE À L'ÉPREUVE DE LA CRISE ET DU LIBÉRALISME

La crise qui a suivi le choc pétrolier, l'entrée dans un contexte de stagnation, voire, certaines années, de récession économique rendent plus délicates les politiques d'aménagement du territoire ; de surcroît, le contexte politique libéral qui émerge au milieu des années soixante-dix détourne les responsables des politiques d'aménagement du territoire et de planification. A une politique d'Etat visant à une redistribution des activités et donc des richesses, on préfère le respect des règles du marché et la recherche de la compétitivité. Le 25 novembre 1975, lors d'une réunion du conseil central de planification placé sous la présidence du Président de la République, il fut affirmé, qu'en période de crise, l'aménagement du territoire devait être " une politique économique de développement global du territoire " Il perdait ainsi son originalité et renonçait à tout choix stratégique.

Durant les années quatre-vingt, la décentralisation et le transfert des compétences de l'Etat vers les collectivités territoriales confèrent à celles-ci des compétences en matière d'aménagement du territoire. L'article 59 de la loi du 2 mars 1982 donne ainsi à la région la compétence de "promouvoir " l'aménagement de son territoire et la loi du 29 juillet 1982 lui permet de participer à la négociation et à la conclusion du contrat de plan. L'Etat se dote donc de partenaires, mais il lui manque encore une culture de partenariat.

La DATAR voit ses crédits se réduire ; elle tend à servir de " Canadair à des incendies sociaux dûs à des situations économiques que la puissance publique n'avait ni prévues, ni aménagées et qu'elle n'a pas pu redresser " comme le notait M. Olivier Guichard dans son rapport " Propositions pour l'aménagement du Territoire ". Les outils de l'aménagement du territoire serviront à la reconversion des régions frappées par la crise que connaissent les secteurs industriels hérités de la première révolution industrielle, qu'il s'agisse des activités minières sur les bassins charbonniers du Nord-Pas-de-Calais, du bassin de la Loire, du bassin ferrifère de Lorraine ou qu'il s'agisse des industries lainières et cotonnières. Avec la mondialisation de l'économie, un relâchement de l'effort de rééquilibrage entre l'aire urbaine parisienne et le reste du territoire a été constaté. Il peut s'expliquer par le souci de lutter contre le chômage, mais aussi par celui de conforter le rôle international de Paris dans une économie qui se globalise et dans un monde qui s'internationalise. La multiplication des bureaux, les grands travaux, l'installation d'Eurodisney sont autant de signes du renouveau et du renforcement de la région urbaine parisienne.

C.- RECONSTRUIRE UNE PLANIFICATION POUR LE SIÈCLE À VENIR

Avec la dernière décennie du siècle, l'aménagement du territoire connaît un regain d'intérêt, dans notre pays comme au plan européen. Il ne s'agit plus aujourd'hui de revenir à la grande période des années cinquante et soixante. Le contexte a changé ; l'Etat n'est plus le seul acteur de l'aménagement du territoire : les lois de décentralisation ont fait émerger des partenaires nouveaux, porteurs de priorités, de projets, de politiques, qu'il faut confronter, et coordonner avec les politiques nationales. Les contrats de plan Etat-Région, imaginés par M. Jacques Chérèque et mis en place par le gouvernement de M. Michel Rocard en 1990, répondent à cette nouvelle problématique. Au terme de la seconde génération de ces contrats, on mesure leur intérêt et leur impact.

Le territoire français doit aujourd'hui se penser dans une perspective plus large ; la construction de l'Union Européenne, l'ouverture des frontières, l'adoption d'une monnaie unique nous amènent à repenser notre rapport à l'espace et au territoire. Le découpage du territoire adopté par l'Assemblée Nationale Constituante à la fin du XVIIIe siècle est-il encore pertinent ? Ce qui était adapté à une société agraire et au monde plein de la fin de l'époque moderne a cessé de l'être deux siècles plus tard dans une société urbaine profondément changée par la révolution des communications matérielles et immatérielles.

Aujourd'hui, un remodelage du territoire s'impose ; il doit prendre en compte deux impératifs, l'un national, l'autre européen ; le premier amène à définir des espaces de projet dont la dimension correspond au vécu professionnel et social de nos concitoyens ; les bassins d'emploi et les bassins de vie identifiés par l'INSEE constituent une préfiguration vraisemblable de ces nouveaux territoires ; le second doit faciliter l'insertion de notre pays, dans un espace plus large, l'Europe, dont le centre de gravité tend à glisser vers l'Est au rythme des élargissements attendus. C'est dans cet espace ouvert que s'organisent les flux majeurs de l'économie ; ils conditionnent les localisations des activités et des hommes.

Aujourd'hui, l'espace ne se pense plus seulement de manière statique, mais aussi de façon dynamique ; les rapports qu'établissent entre eux les réseaux qu'ils élaborent concourent à l'évolution, à l'enrichissement des territoires. La loi d'orientation, d'aménagement et de développement du territoire du 4 février 1995 a engagé une réflexion sur la pertinence des territoires. A l'évidence la réponse est insuffisante. Elle n'a qu'incomplètement répondu à ses objectifs En effet, les lois d'application, les décrets et les circulaires nécessaires à sa mise en _uvre sont loin d'avoir été tous élaborés et publiés. Ainsi, le schéma national d'aménagement et de développement du territoire, a connu des vicissitudes d'élaboration avant que le gouvernement ne renonce à le valider. Certes, les pays ont bénéficié d'un accueil positif, et un nombre non négligeable d'entre eux a pu être "constaté", tandis que d'autres bénéficient aujourd'hui d'une aide à l'expérimentation de la part de la DATAR. Préoccupés par ce qu'ils considèrent comme une désertification du territoire, les auteurs de la loi de 1995 lui ont donné une coloration fortement " ruraliste ". Le pays fait l'objet de tous les soins au détriment de la ville qui concentre pourtant les deux tiers de la population.

C'est dans ce contexte de re-fondation des politiques d'aménagement du territoire, que s'inscrit le projet de loi du gouvernement présenté par Madame Dominique Voynet. Il était en effet urgent de compléter le dispositif législatif afin de reprendre les articles de la loi du 4 février 1995 qui n'avaient pu connaître un début d'application. Il fallait ensuite s'ouvrir aux problématiques de notre temps insuffisamment prises en compte par le texte précédent. Penser la recomposition du territoire dans une perspective européenne, redéfinir le rôle de l'Etat au centre d'un partenariat élargi et clairement identifié. Favoriser le développement et l'équilibrer à l'aune de la justice sociale et de la préservation de l'environnement. Développer une culture de projet qui associe les acteurs économiques et sociaux ainsi que les citoyens qui doivent se reconnaître dans les nouveaux territoires et les politiques qui y seront associées. Ce sont là les enjeux pour le siècle à venir et les défis que relève ce projet de loi.

II.- PRINCIPALES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI D'ORIENTATION POUR L'AMÉNAGEMENT ET LE DÉVELOPPEMENT DURABLE DU TERRITOIRE

Les trente six articles de ce projet de loi modifient la loi du 4 février 1995 qui en comptait quatre-vingt huit. C'est dire qu'il ne s'agit pas de faire table rase de ce texte important et du travail parlementaire qui l'avait accompagné. Les modifications proposées par le texte du gouvernement et par les nombreux amendements adoptés par la commission de la production et des échanges ont pour objet de donner à la politique d'aménagement et de développement durable du territoire un socle législatif efficace. C'est pourquoi la LOADDT se présente comme une loi de méthode. Après avoir rappelé les valeurs qui fondent la politique d'aménagement du territoire, le projet de loi précise les rôles respectifs de l'Etat et de ses partenaires institutionnels, énonce les objectifs stratégiques arrêtés par le gouvernement et définit les outils réglementaires et financiers ; enfin, il présente le cadre de la recomposition territoriale de la France.

A.- RAPPEL DU RÔLE DE L'ETAT ET RECHERCHE D'UN NOUVEL ÉQUILIBRE ENTRE LES DIFFÉRENTS ACTEURS DE L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

1. L'Etat demeure un acteur majeur de l'aménagement du territoire

Il est important de rappeler que le projet de loi qui nous est soumis conserve à l'Etat son rôle majeur dans la politique d'aménagement du territoire. C'est à lui que revient de déterminer cette politique à l'échelon national, après avoir consulté l'ensemble des partenaires intéressés et associé les citoyens à son élaboration et à sa mise en _uvre. L'Etat est ainsi le garant des choix stratégiques en matière d'aménagement du territoire et des objectifs des schémas de services collectifs aussi bien dans la mise en _uvre de toutes ses politiques publiques que dans l'allocation des ressources budgétaires et dans le contenu des contrats de plan (article 2).

Le rapporteur a tenu à souligner que l'Etat a aussi pour tâche d'assurer un égal accès de chaque citoyen aux services publics sur l'ensemble du territoire (nouvelle rédaction de l'article 1er). La question de l'accès aux services publics fait, de manière plus approfondie, l'objet du projet de loi présenté par M. Emile Zuccarelli relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations. La nécessité d'une politique coordonnée des services publics assurant un service moderne et solidaire a par ailleurs été clairement réaffirmée par le Premier Ministre lors du Comité Interministériel d'Aménagement et de Développement du Territoire (CIADT), réuni le 15 décembre 1998.

Enfin, le rapporteur a jugé important de réaffirmer que l'Etat doit s'appliquer à réduire les écarts de richesses entre les collectivités territoriales par une péréquation de leurs ressources en fonction de leurs charges et par une modulation des aides publiques (nouvelle rédaction de l'article 1er).

2. La recherche d'un nouvel équilibre entre les différents acteurs de l'aménagement du territoire

Avec la décentralisation, introduite par les lois de 1982, l'Etat, tout en conservant son rôle majeur, n'est plus le seul décideur en matière d'aménagement du territoire. Ainsi, l'article 59 de la loi n°82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions reconnaît aux régions un rôle essentiel en matière de planification, de promotion du développement économique et social et de l'aménagement de leur territoire. L'article 1er de la loi n°83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat affirme également que les communes, les départements et les régions concourent avec l'Etat à l'aménagement du territoire, au développement économique ainsi qu'à la protection de l'environnement.

Le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire vise ainsi à créer un nouvel équilibre entre l'action de l'Etat qui reste le garant de l'équité territoriale et le respect de la décentralisation et celle des autres acteurs de l'aménagement du territoire. Le rôle des régions, à l'interface entre un processus ascendant émanant des mobilisations locales et un processus descendant qui équilibre et intègre au nom de l'intérêt national, est renforcé. La région est reconnue comme l'échelon pertinent pour l'aménagement du territoire, sans que les compétences de chacune des collectivités territoriales soient pour autant modifiées.

Plusieurs actions sont proposées en vue d'aboutir à ce nouvel équilibre :

- le remplacement du schéma national d'aménagement du territoire par huit schémas de services collectifs élaborés dans une perspective de 20 ans, en harmonie avec les schémas régionaux. Ces schémas de services collectifs définissent des choix stratégiques qui constituent les nouvelles priorités nationales de la politique d'aménagement et de développement durable du territoire ;

- les schémas régionaux d'aménagement du territoire (SRADT) acquièrent un rôle plus important. Ils contribuent à renforcer le rôle de la région dans le domaine de l'aménagement du territoire ;

- le rôle du Conseil national d'aménagement et de développement (CNADT) du territoire est consacré. Celui-ci se voit doté d'une commission permanente chargée d'une mission d'évaluation des politiques d'aménagement du territoire et se substitue au groupement d'intérêt public qui n'avait pas vu le jour.

B.- LES PRINCIPALES IDÉES NOUVELLES DU PROJET DE LOI D'ORIENTATION POUR L'AMÉNAGEMENT ET LE DÉVELOP-PEMENT DURABLE DU TERRITOIRE

1. La prise en compte de la dimension européenne

La chute du mur de Berlin, la mondialisation de l'économie, la construction européenne marquent la seconde moitié du vingtième siècle. Les frontières entre les Etats se sont effacées ; les marchandises, les capitaux, les informations et les hommes circulent librement dans un espace européen qui se dilate. La mégalopole concentre, de Londres à Milan, les hommes, les activités, les capitaux, les flux ; elle induit un dualisme centre/périphéries, plus fort que celui qui oppose Paris à la province. Le glissement vers l'Est du centre de gravité de l'Europe pourrait accentuer la marginalisation de l'Ouest du continent. Si l'on souhaite encore se référer aux objectifs premiers de toute politique d'aménagement du territoire, le rééquilibrage et l'équité entre les territoires, il importe d'inscrire notre réflexion dans une perspective plus large. L'aménagement du territoire change d'échelle, l'aménageur doit changer de point de vue et lever le regard vers des horizons plus lointains.

C'est ce qui faisait défaut à la loi du 4 février 1995. Le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire souligne pour la première fois la nécessité d'élaborer la politique d'aménagement du territoire à l'échelle de l'Europe, et non plus seulement dans le cadre hexagonal, afin d'en faire un instrument de la capacité de notre pays à affirmer sa place dans l'économie européenne et mondiale. En effet, on a constaté que les grands décideurs et investisseurs du secteur industriel ou tertiaire choisissent de plus en plus de fixer les sièges de leurs installations sans souci des limites nationales.

La volonté de mise en cohérence avec l'Europe se retrouve également à l'article 25, avec l'introduction du concept européen de zonage prioritaire ultra-périphérique, qui recouvre les départements d'outre-mer. Ceux-ci ont vocation, compte-tenu de leur structure géographique, économique, sociale et environnementale particulière, à bénéficier tout particulièrement de la solidarité européenne et nationale.

2. La substitution d'une approche fondée sur les besoins des populations aux politiques de l'offre mises en _uvre jusqu'à présent

Dans le domaine de l'aménagement du territoire, la loi a, par le passé, souvent imposé des outils dont la mise en application sur le terrain ne répondait pas aux attentes. L'Etat n'a pas toujours été à l'écoute des projets et des véritables besoins des populations.

La logique de l'offre a atteint ses limites avec l'impossible mise en _uvre du schéma national prévu par la loi du 4 février 1995. Soucieux de répondre à l'ensemble des sollicitations, il ne fixait pas de choix stratégiques clairs. Il est remplacé par huit schémas de services collectifs, qui partent des besoins de services et d'équipements, et non de l'offre ou de la seule demande exprimée.

3. Le renforcement de la démocratie participative

Les Français ont le souhait d'être davantage associés aux décisions qui les concernent. Ils veulent participer plus concrètement à la construction de leur cadre de vie et de travail. La politique d'aménagement du territoire doit donc concourir à mieux associer les Français aux choix de la puissance publique, grâce à des procédures de délibération leur permettant d'exprimer leurs idées.

Le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire entend encourager le dialogue et la participation des citoyens, en renforçant la participation démocratique dans les instances de l'aménagement du territoire (Conseil national d'aménagement et de développement du territoire, conférences régionales d'aménagement et de développement du territoire, conseils de développement), qui associeront, aux différents niveaux, élus, représentants de l'Etat, des administrations et des services publics, représentants des partenaires sociaux et des acteurs culturels ou environnementaux.

4. L'introduction de la notion de développement durable

Issu du constat des risques qu'un développement peu soucieux du devenir de nos enfants fait courir à la planète et à chacun de ses habitants, le développement durable est une stratégie de développement qui cherche à neutraliser ces risques et à optimiser les ressources sur le long terme, en combinant préservation de l'environnement, efficacité économique et équité sociale. Le développement durable révèle les interdépendances des nations face aux enjeux planétaires de l'environnement. Il introduit l'inscription de ces enjeux à l'intérieur des critères du développement économique et social. Ce qui est vrai à l'échelle mondiale l'est aux échelles européenne et régionale. C'est pourquoi il existe une forte convergence entre les principes défendus par le projet de loi qui nous est soumis et ceux de l'Union européenne, notamment depuis le Traité de Maastricht. Ces principes guideront ainsi la politique du gouvernement à travers la négociation des prochains contrats de plan Etat-régions, tout comme celle de l'Union européenne au niveau de la répartition des prochains fonds structurels.

Cette stratégie de développement engendre une mutation de la gestion traditionnelle de l'environnement : il ne s'agit plus seulement de protéger les ressources naturelles et de lutter contre les pollutions et les nuisances, mais, par une approche dynamique, de prévenir ces dommages dès l'amont et de chercher à internaliser les coûts de lutte contre les pollutions et les nuisances, afin d'orienter les choix des acteurs vers les programmes les moins onéreux pour la collectivité.

Appliqué à la politique traditionnelle d'aménagement du territoire, le développement durable introduit trois exigences nouvelles : l'application de ces principes au sein de l'ensemble des politiques territoriales ; leur déclinaison sur des espaces pertinents, combinant enjeux environnementaux et facteurs économiques et sociaux ; la mobilisation de l'ensemble des acteurs, par la voie de la concertation et de la coopération.

C.- LES OUTILS

1. Les schémas de services collectifs

Le projet de loi substitue au schéma national et aux schémas sectoriels de la loi du 4 février 1995 huit schémas de services collectifs : schéma de l'enseignement supérieur et de la recherche, schéma des services culturels, schéma des services sanitaires, schéma de l'information et de la communication, schéma multimodal de transport de marchandises et schéma multimodal de transport de voyageurs (ces deux schémas remplaçant les cinq schémas sectoriels relatifs aux modes et infrastructures de transport prévus par la loi du 4 février 1995), schéma de l'énergie, schéma des espaces naturels et ruraux, ces deux derniers schémas étant des créations nouvelles par rapport à la loi du 4 février 1995.

Documents de planification à vingt ans, les schémas de services collectifs ont vocation à fixer les orientations stratégiques de l'Etat et ses priorités d'actions dans les huit domaines clés. Ils constituent le cadre unique de planification de la politique nationale d'aménagement et de développement du territoire. Par voie de conséquence, ils s'imposent à l'ensemble des autres documents de planification. Ainsi, les contrats de plan, tout comme les schémas régionaux d'aménagement et de développement du territoire (SRADT) devront tenir compte des orientations qui auront été définies dans le cadre de ces huit schémas de services collectifs.

Le projet de loi qui nous est proposé introduit donc un changement de démarche par rapport à la loi du 4 février 1995 : à la logique apparemment rationnelle de construction successive d'un schéma national, puis du schéma régional et du contrat, il substitue une approche plus intégrée et interactive, avec une première phase de définition des cadres, orientations ou stratégies - schémas de services, schémas régionaux, stratégies des contrats -, puis une deuxième phase consacrée aux documents eux-mêmes, prenant en compte les contributions concertées de la première phase, les schémas régionaux devant être compatibles avec les schémas de services.

Ces huit schémas nécessitent une approche interrégionale et une mise en perspective à l'échelle européenne. En outre, ils participent à la déclinaison territoriale des principes du développement durable. En effet, en ce qui concerne les deux schémas de transports, les transports collectifs interurbains et urbains et le fret ferroviaire seront privilégiés, ce qui contribuera, conformément aux engagements internationaux de la France, à lutter contre l'effet de serre et à préserver la qualité de l'air et des espaces naturels et ruraux. Avec le schéma de l'énergie, priorité est donnée à une meilleure adéquation offre-demande d'énergie, à travers une programmation énergétique régionale et à la valorisation énergétique des ressources locales. Avec le schéma des espaces naturels et ruraux, l'objectif est de mettre en réseau ces espaces grâce à une gestion patrimoniale et contractuelle. Ce schéma est un vecteur majeur de liaison entre les contrats territoriaux d'exploitation et les pays, entre la politique agricole et la politique environnementale. Il participe à la reconstruction d'une politique moderne de développement rural.

Le projet de loi prévoit la validation des schémas de services collectifs par décrets. En effet, les contraintes du calendrier, ainsi que la méthode d'élaboration concertée des schémas de services collectifs rendent difficile leur adoption par la loi. Toutefois, il a paru nécessaire aux membres de la commission de la production et des échanges d'indiquer au Gouvernement que le Parlement ne pouvait se dessaisir de toute compétence en matière d'aménagement du territoire. C'est le sens des amendements adoptés par la commission de la production et des échanges qui prévoient, d'une part, la validation des schémas de services collectifs par la loi et qui proposent, d'autre part, la création d'une délégation parlementaire à l'aménagement et au développement durable du territoire ayant pour objet de permettre un suivi de cette politique par le Parlement.

2. Les autres outils

- La création d'un fonds de gestion des milieux naturels permet d'affecter des ressources à la protection et à la gestion du patrimoine naturel. Il a entre autres pour vocation d'accompagner à l'aide de moyens identifiés et pérennes la mise en _uvre du schéma des espaces naturels et ruraux. Il vient compléter le fonds de gestion des espaces ruraux.

- Le fonds national de développement économique, concernant les petites entreprises et intéressant particulièrement le milieu rural, a été doté budgétairement, pour la première fois en 1998.

- Les objectifs du Schéma Directeur Régional d'Ile-de-France (SDRIF) sont redéfinis par le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire dans un sens de maîtrise de la croissance démographique et de meilleure prise en compte du développement durable (maîtrise de l'étalement urbain, des déséquilibres internes, limitations des nécessités de déplacement). S'il n'y a pas de nécessité formelle de réviser l'actuel SDRIF, approuvé en avril 1994, après promulgation de la nouvelle loi, cette nécessité devra toutefois être appréciée en fonction de la compatibilité du SDRIF avec les orientations définies par l'article 35 de la nouvelle loi.

D.- LA RECOMPOSITION TERRITORIALE - LA RECHERCHE DE TERRITOIRES PERTINENTS

Le maillage de nos territoires, hérité de la Révolution française, où la volonté de rationalisation de l'espace national l'avait emporté, avec un découpage commune - canton - département, a aujourd'hui beaucoup perdu de sa pertinence économique et sociale. Il était adapté à une société encore fortement rurale, faiblement urbanisée. Les critères de différenciation entre urbains et ruraux se sont considérablement estompés avec l'uniformisation des modes de consommation, des formes d'acculturation. La mobilité a modifié la perception de notre rapport à l'espace ; les distances se mesurent aujourd'hui en espaces-temps. L'accès à un réseau de communication ou à un système d'information moderne importe plus que l'éloignement du chef-lieu de canton. Notre perception de l'espace a changé ; elle tend à minimiser la continuité territoriale. Une restructuration de notre espace national s'impose donc, centrée sur la recherche de territoires pertinents, c'est à dire des espaces qui structurent la vie et qui sont perçus comme tels. La définition et la structuration de ces territoires constituent les préalables à l'aménagement et au développement durable du territoire

Le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire prend donc en compte deux dimensions nouvelles : l'une européenne, donc macro-géographique, l'autre infrarégionale, avec les pays et les agglomérations.

1. Les pôles de taille européenne

La métropolisation caractérise cette fin de siècle. Les métropoles constituent les lieux privilégiés de l'innovation ; créatrices des nouvelles activités et des nouveaux emplois, elles attirent diplômés et chercheurs. Paris au même titre que Londres domine le réseau des villes européennes. Depuis le début des années quatre-vingt, la région parisienne et l'Ile de France ont capté l'essentiel de la croissance urbaine (respectivement 27 et 36 %). Cette hypertrophie de la capitale n'est pas compensée par l'existence d'un réseau de métropoles susceptible de structurer le maillage urbain français. Lyon, deuxième agglomération française, arrive très loin après Paris dans la hiérarchie des villes européennes. Le projet de loi replace l'espace français dans sa dimension européenne, en renforçant les pôles de développement à vocation européenne, alternatives à la région parisienne, capables de rivaliser avec les autres métropoles européennes, en offrant un niveau élevé de services. Ces pôles pourront aussi animer des réseaux de villes capables de structurer des espaces ayant une pertinence européenne, à l'exemple du réseau de villes Rhône-Alpes, qui envisage d'élargir demain ses partenariats avec d'autres métropoles du grand sud-est européen.

Ces pôles représentent des points forts pour une structuration de l'Ouest européen, au moment où le centre de gravité de l'Union Européenne se déplace vers l'Est.

2. Les pays

La notion de pays a été créée par la loi du 4 février 1995. Elle avait rencontré l'intérêt des élus. Au 15 décembre 1998, 71 pays ont été constatés par les commissions départementales et 22 reconnus par la DATAR.

Territoire de projet, le pays s'organise sur une aire géographique assez vaste pour mobiliser des moyens humains et financiers significatifs au service d'une stratégie territoriale élaborée dans un esprit de concertation et de partenariat. Cadre d'impulsion, d'animation et de coordination, le pays n'existe que par les énergies et les organismes ou institutions, publics et privés, qu'il fédère autour d'un projet territorial commun. Le pays n'est donc pas un nouvel échelon administratif.

Le pays doit être caractérisé par une cohésion géographique, culturelle, économique ou sociale. Il n'est aucunement tributaire du découpage administratif ou politique du territoire, et peut le cas échéant, s'en affranchir pour recouvrir des solidarités héritées de l'histoire et mal prises en compte par ce dernier.

Selon les cas, les pays pourront être ruraux, mixtes urbains et ruraux, ou seulement urbains. Les pays mixtes auront à concilier leurs composantes rurales et urbaines. Un certain nombre de villes pourront devenir le noyau dur de pays (Quimper par exemple). Ainsi, ces derniers contribueront à dépasser le clivage entre l'urbain et le rural.

Dans un souci de cohérence, la délimitation finale des pays devra être le résultat d'une phase préalable de concertation locale associant les communes et leurs groupements, les conseils généraux et régionaux, le conseil économique et social régional, les parlementaires élus dans les circonscriptions concernées, le préfet de région et les services déconcentrés de l'Etat, les responsables des parcs naturels régionaux susceptibles d'être concernés, et enfin les principaux acteurs socioprofessionnels et associatifs concourant activement au développement du territoire. Par l'intermédiaire des conseils généraux, les départements seront ainsi associés à cette phase de concertation. Après avis conforme de la conférence régionale d'aménagement et de développement du territoire, le préfet de région arrête le périmètre définitif du pays.

Dès lors qu'il se sera doté d'un projet commun de développement durable, traduit dans une charte de pays, le pays pourra contractualiser avec l'Etat et la région dans le cadre des contrats de plan Etat-régions. La charte sera portée à la connaissance des habitants et consultable par toute personne intéressée.

Lors de la phase de préfiguration et de réflexion préparatoire, le pays pourra demeurer sous simple forme associative. Le projet de loi prévoit qu'à l'exception des cas où l'ensemble de son territoire sera réuni en un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, le pays devra se constituer en syndicat mixte pour pouvoir contractualiser avec l'Etat. Sur proposition du rapporteur, la commission de la production et des échanges a également décidé de donner aux pays la possibilité de créer un groupement d'intérêt public pour la durée de son contrat avec l'Etat et la région. En outre, la commission a souhaité accorder la possibilité de contractualiser avec l'Etat ou la région aux groupements constituant le pays, qu'il s'agisse de groupements de communes à fiscalité propre ou de syndicats intercommunaux à vocation multiple qui s'engagent à adopter une fiscalité propre avant la fin de la contractualisation.

3. Les agglomérations

Le passage à une société urbaine est une mutation majeure de la France contemporaine. Il s'agit non seulement d'une transformation complète des modes de vie, mais aussi d'une modification fondamentale de l'organisation du territoire. L'extension des banlieues et des zones périurbaines restera le phénomène marquant du dernier quart de siècle. Une nouvelle donnée statistique, l'aire urbaine, rend compte de cette nouvelle réalité : elle associe à l'agglomération les communes rurales dont au moins 40 % des actifs occupent un emploi en ville.

Les villes, qui rassemblent 80% de la population française actuelle, jouent un rôle déterminant pour l'économie nationale. Elles sont le lieu où se crée l'essentiel de la richesse et de l'emploi, mais elles concentrent également l'essentiel des phénomènes de pauvreté et d'exclusion. Les villes constituent donc le lieu du défi social. Elles sont devenues un véritable enjeu de gouvernement. Les instructions du Premier Ministre concernant la préparation des prochains contrats de plan Etat-régions, transmises par le biais de la circulaire du 31 juillet 1998, témoignent de cette préoccupation. L'agglomération est identifiée comme l'un des objets prioritaires de l'action publique.

Avec l'affirmation du rôle des agglomérations, le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire entend, sans pour autant affaiblir les dispositions relatives au milieu rural, remédier au déficit de la loi du 4 février 1995, qui prenait insuffisamment en compte les aires urbaines.

Ainsi, le texte qui nous est soumis reconnaît aux agglomérations constituées ou qui s'engagent à se constituer en établissements publics de coopération intercommunale à taxe professionnelle unique la possibilité de conclure des contrats dans le cadre des contrats de plan Etat-régions.

Dans l'optique de ces futurs contrats d'agglomération, l'Etat poursuit quatre objectifs principaux : le partage des ressources fiscales liées aux activités économiques et une meilleure répartition des charges de centralité ; la maîtrise de l'étalement urbain et la réduction des différentes formes de spécialisation fonctionnelle au sein du territoire de l'agglomération ; l'organisation de la mixité sociale et urbaine ; la rationalisation de son intervention dans le secteur urbain et la recherche d'une plus grande cohérence de ses politiques.

Le contrat d'agglomération, précédé par l'élaboration d'un projet d'agglomération, doit être appréhendé comme un instrument de négociation entre l'Etat et les collectivités locales concernées pour traiter dans un même cadre l'ensemble des domaines qui concourent à l'aménagement et au développement des agglomérations dans une optique durable et solidaire, conformément aux orientations nationales. Les thèmes et les enjeux sur lesquels il faudra faire converger l'action des acteurs concernent le développement économique et la cohésion sociale ; l'aménagement et l'urbanisme ; le transport et le logement ; la politique de la ville ; la politique de l'environnement et la gestion des ressources naturelles.

Afin d'ancrer la démarche contractuelle dans la réalité du fonctionnement territorial urbain, l'agglomération en tant qu'échelle pertinente de l'action publique est définie en tenant compte des espaces péri-urbains. C'est en direction des principaux ensembles territoriaux urbains formés des villes et de leur sphère d'influence que l'Etat se tourne. Un contrat d'agglomération pourra ainsi être conclu entre l'Etat, la ou les région(s), le ou les établissement(s) public(s) et les communes qui appartiennent à une même aire urbaine d'au moins 50 000 habitants et dont une commune-centre en compte plus de 15 000. L'agglomération visée par le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire anticipe et prépare l'organisation intercommunale du projet de loi relatif à l'organisation urbaine et à la simplification de la coopération intercommunale, qui sera prochainement présenté par le ministre de l'intérieur.

La possibilité de contractualiser donnée aux pays et aux agglomérations, l'invitation faite aux départements de s'associer à la contractualisation, l'affirmation du rôle de la région dans la contractualisation renforce la décentralisation.

La recomposition des territoires avec le maillage des agglomérations et des pays inclut en outre la dimension de développement durable. En effet, dans les agglomérations et les pays, les chartes pour l'environnement sont appelées à constituer le volet environnemental des projets d'agglomération et des chartes de territoires des pays, au même titre que les contrats de ville en constituent le volet de cohésion sociale.

4. Le soutien aux espaces en difficulté 

Le projet de loi qui nous est soumis définit comme étant l'un des choix stratégiques de la politique d'aménagement et de développement durable du territoire le soutien aux territoires en difficulté. Sur proposition du rapporteur, la commission de la production et des échanges a décidé de préciser qu'outre les territoires ruraux en déclin, les zones en reconversion, les régions insulaires et les départements d'outre-mer, ce soutien s'adressait également à certains territoires de montagne, aux territoires urbains déstructurés ou très dégradés cumulant des handicaps économiques et sociaux.

Lors de l'examen du projet de loi par la commission de la production et des échanges, il n'a pas été possible de retenir la plupart des amendements proposés par nos collègues des départements d'outre-mer car il était difficile d'en mesurer l'impact. Les problèmes posés n'en sont pas moins réels et méritent notre attention pour permettre à ce projet de loi de trouver son application sur l'ensemble du territoire de la République.

Aménager le territoire c'est vouloir  " modifier l'ordre des choses ", agir sur la structuration même d'un territoire, sur ses caractéristiques. Une telle ambition ne peut s'inscrire que dans la durée et doit mobiliser des moyens et des hommes pour être menée à bien. Le projet de loi qui est mis en discussion ouvre de nouvelles perspectives que nous nous sommes efforcés de mettre en évidence. L'Europe, la prise en compte de l'environnement ne constituent pas les moindres de ces innovations. Mais les clés de la réussite reposent sur la qualité des projets et sur la mobilisation des acteurs.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.- AUDITION DE MME DOMINIQUE VOYNET,
MINISTRE DE L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE
ET DE L'ENVIRONNEMENT

La commission a entendu Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, au cours de sa réunion du 18 novembre 1998.

Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, a rappelé que le Gouvernement débattait depuis plusieurs mois des nouvelles modalités de la politique d'aménagement du territoire et fait valoir que le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire permettait de recadrer cette politique en fonction des évolutions constatées :

- la mondialisation de l'économie et des échanges qui a changé l'échelle à laquelle doit se penser la politique d'aménagement du territoire ;

- la nécessité de construire cette politique à l'échelle de l'Europe et non plus seulement dans le cadre hexagonal ; en effet, dans une économie ouverte, elle est devenue un instrument de la capacité de notre pays à affirmer sa place originale dans l'économie mondiale ;

- la décentralisation qui fait que l'Etat n'est plus le seul acteur de l'aménagement du territoire ; l'action publique doit aujourd'hui être négociée entre divers partenaires disposant de ressources variées et d'une légitimité ;

- enfin, le souhait des Français d'être davantage associés aux décisions qui les concernent et de participer plus concrètement à la construction de leur cadre de vie et de travail ; la politique d'aménagement du territoire doit donc concourir à restaurer le rôle du citoyen dans la cité.

La ministre a ensuite expliqué que la politique d'aménagement du territoire devait évoluer en s'appuyant sur quatre priorités :

- un développement tenant compte du fait urbain, et résolument ouvert sur l'international, construit à partir des fonctions de l'intelligence, grâce à la généralisation et l'élévation du niveau des équipements et des services. Ceux-ci constituent aujourd'hui les facteurs primordiaux de la modernisation de la société, notamment en matière d'éducation, de culture et de santé ;

- une organisation solidaire des territoires construite sur des logiques de partenariats économique et institutionnel ayant la double préoccupation de créer des espaces pertinents au regard des réalités du développement économique et de la vie collective, d'une part, et d'accroître l'initiative des citoyens et leur participation à la décision publique, d'autre part ;

- la préservation du cadre de vie dans la diversité des territoires, c'est-à-dire la sauvegarde du modèle de ville européenne auquel les Français sont fortement attachés, la qualité des campagnes et la richesse des espaces naturels ;

- l'association des Français aux buts poursuivis par la puissance publique, comme à ses choix, grâce à des procédures de délibération leur permettant d'exprimer leurs idées et de confronter leurs intentions. La ministre a fait observer, comme un président de région le lui avait confié le matin même, que ce n'est pas tant la qualité des projets qui compte que la façon dont ils sont portés par la population.

La ministre a jugé que la mise en oeuvre de ces orientations nécessitait la révision de la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire du 4 février 1995, née d'un triple constat :

- l'épuisement d'une politique nationale d'aménagement du territoire qui peinait à inspirer et imprimer les changements structurels qui relevaient de sa responsabilité ;

- la multiplication, du fait de la décentralisation et de la construction européenne, des lieux de conception et de mise en oeuvre des politiques à finalité spatiale, sans que ces nouveaux échelons d'administration soient en mesure d'agir à partir de la société et non plus en son nom ;

- l'absence de règles constitutives définissant de manière stable les objectifs et les moyens d'action de l'aménagement du territoire et garantissant des règles du jeu et des principes harmonisant les coopérations entre les acteurs de l'aménagement.

La loi du 4 février 1995 avait vocation à redonner à la politique d'aménagement du territoire des principes fondamentaux clairs et susceptibles de lui assurer légitimité et continuité, et à permettre la mise au point des outils et des règles organisant un système d'actions collectives fondé sur la coopération entre les différentes catégories d'acteurs publics et privés.

Son bilan en 1997 fait apparaître une application très partielle. Plus de deux ans après le vote de la loi, de nombreux textes d'application n'avaient pas été publiés. Des dispositions étaient restées sans effet faute de cohérence et de continuité dans l'action publique.

Mme Dominique Voynet a considéré que les mesures de discrimination présentées comme une " grande victoire " n'apportaient pas les solutions attendues pour le développement des territoires les plus fragiles. L'impasse sur la question urbaine réduit les chances d'accrochage des territoires aux grands mouvements économiques, sociaux, culturels et leur capacité à générer une géographie solidaire avec les territoires qui les entourent. Cette loi traduit une approche plus préoccupée de redistribution que de création de richesses et une conception insuffisamment attentive aux rôles des initiatives locales porteuses de développement économique, de création d'emplois, de cohésion sociale et de responsabilité vis-à-vis de l'environnement.

Elle a fait valoir que trois principes présidaient à la révision de la loi du 4 février 1995 proposée au travers du projet de loi :

- la recherche d'un nouvel " équilibre " entre l'Etat et les autres acteurs de l'aménagement du territoire. Au schéma unitaire dans lequel les autorités centrales assuraient la direction des politiques territoriales, se substitue un jeu pluraliste qui rend nécessaire la mise au point de modes de coordination des initiatives publiques et privées ;

- le souci de " ménager " le territoire, le milieu devant être considéré comme une ressource à part entière, source de service et nécessaire à la pérennité du développement. L'Etat doit retrouver sa capacité à soustraire les politiques publiques à l'hégémonie du court terme ;

- la nécessité d'une organisation des territoires, préoccupée d'efficacité économique et d'efficacité démocratique et décidée à s'appuyer sur la constitution de ces territoires pertinents au regard des réalités de la vie collective.

La ministre a estimé qu'il s'agissait de passer à un développement construit, endogène où, face aux nouvelles règles de la performance économique, de la justice sociale et d'une qualité de vie et d'environnement plus partagée, la construction de compétences spécifiques, les capacités d'organisation et de coopération, la solidarité des cadres collectifs d'action notamment, prennent le pas sur les infrastructures et les équipements, ce qui ne signifie pas pour autant que l'on ne bâtira plus d'infrastructures ou d'équipements.

Quatre modifications sont proposées en application du premier principe énoncé, le nouvel équilibre entre l'Etat, les collectivités et les acteurs divers :

- le schéma national d'aménagement du territoire est remplacé par huit schémas de services collectifs élaborés, dans une perspective à 20 ans, en harmonie avec les schémas régionaux ;

- les schémas régionaux d'aménagement du territoire acquièrent un rôle plus important, renforçant les compétences de la région dans le domaine de l'aménagement du territoire ;

- les schémas de services collectifs introduisent des modifications dans les processus d'élaboration, l'évaluation financière, économique, sociale et environnementale et le recours à la concertation. Ils définissent des choix stratégiques qui constituent les nouvelles priorités nationales de la politique d'aménagement et de développement durable du territoire ;

- le conseil national d'aménagement du territoire évolue vers une indépendance apte à éclairer les choix publics en matière d'aménagement du territoire. Il se voit doter d'une commission permanente chargée d'une mission d'évaluation des politiques d'aménagement du territoire et se substitue au groupement d'intérêt public prévu initialement et qui n'a pas été créé.

La ministre a ensuite expliqué que le second principe qui énonce le caractère durable de l'aménagement et du développement en conformité avec des engagements internationaux de la France conduisait à proposer sept modifications qui concernent tout d'abord la politique des transports.

Les cinq schémas sectoriels relatifs aux modes et infrastructures de transport sont regroupés en deux schémas de services intermodaux de transport des personnes et des marchandises. Ces schémas visent à réorienter la politique des transports afin que la réalisation des infrastructures et l'organisation des services de transport soient dorénavant conçues à partir du niveau de besoin à satisfaire plutôt qu'en fonction des caractéristiques des modes de transport à offrir.

La construction du canal Rhin-Rhône est abandonnée.

Concernant la gestion de l'espace et la valorisation des ressources, la ministre a indiqué que deux schémas supplémentaires étaient introduits dans la loi : un schéma de l'énergie et un schéma des espaces naturels et ruraux. Le premier vise à satisfaire les besoins en épargnant les ressources rares, en réduisant les risques, en limitant les pollutions et en favorisant les ressources énergétiques locales. Le second vise à assurer le devenir et la valorisation des ressources naturelles et rurales.

Les autres schémas sectoriels sont transformés en schémas de services collectifs construits, à 20 ans, sur une perspective de réponse aux besoins, articulant équipements et services rendus. Ils portent sur l'enseignement supérieur et la recherche, la culture, la santé ainsi que sur les services de l'information et de la communication. Ces huit schémas sont ceux qui nécessitent une approche interrégionale et une mise en perspective à l'échelle européenne.

La ministre a indiqué que des ressources financières étaient affectées à la protection et à la gestion du patrimoine naturel, dans le cadre du fonds de gestion des milieux naturels.

La ville durable, enfin, doit être définie afin de lutter contre l'étalement urbain et s'inspirer du modèle européen de la ville compacte qu'il faut mettre en valeur.

La ministre a également indiqué que les contrats d'agglomération comprendraient l'engagement des collectivités signataires à se constituer en établissements publics de coopération intercommunale à taxe professionnelle unique, dotés de compétences élargies (développement économique, aménagement de l'espace et transports permettant de mener une politique de cohésion sociale et de développement durable à l'échelle de l'agglomération). Des établissements publics fonciers pourront être créés dans les contrats d'agglomération.

Mme Dominique Voynet a expliqué que le troisième principe conduisait à proposer deux modifications concernant l'organisation des territoires.

Elle a fait observer que le pays était conforté en tant que territoire de projet et échelle de référence des services publics à travers la mise en place d'une politique contractuelle appuyée sur des chartes de territoires, expression d'un projet commun de développement et des orientations stratégiques de son organisation spatiale.

Elle a indiqué que l'organisation des agglomérations était encouragée. L'agglomération visée par le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire, qui s'attache au projet d'agglomération et vise la contractualisation, anticipe et prépare l'organisation intercommunale du projet de loi relatif à l'organisation urbaine et à la simplification de la coopération intercommunale.

La ministre a ensuite fait observer que trois sujets n'étaient pas traités dans le cadre actuel du projet de loi portant révision de la loi du 4 février 1995 :

- la question des zonages, dont chacun s'accorde à souhaiter la simplification mais qui ne pouvait être traitée qu'une fois connues les dispositions arrêtées par l'Union européenne en matière de zonage des aides à finalité régionale, d'une part, et la nouvelle politique de fonds structurels, d'autre part ;

- la question de la péréquation financière, question de solidarité de proximité et des transferts entre l'Etat et les collectivités sous la forme de dotations ou de subventions ;

- la question des services publics, enfin, qui fait l'objet d'un autre projet de loi qui traite des droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration. Son contenu et ses principes en termes de services publics dépendent des schémas de services collectifs et de l'organisation du territoire en cours d'élaboration.

La ministre a conclu que le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire modifiait l'orientation générale de la loi du 4 février 1995 dans le sens d'un développement durable conciliant performance économique, justice sociale et qualité de l'environnement, et d'un renforcement de la participation au travers :

- des schémas de services collectifs centrés sur les besoins de service, et non sur l'offre ou la demande exprimée ;

- du passage à une logique de projets pour les territoires (régions, agglomérations, pays) ;

- du nouvel outil financier consacré aux milieux naturels (Fonds de gestion des milieux naturels) ;

- des structures participatives aux échelons nationaux (CNADT), régionaux (CRADT) et locaux (conseils de développement).

Il nourrit également le contenu de la décentralisation et anticipe, par le projet et le contrat, le renforcement de l'action des collectivités territoriales par trois moyens :

- l'affirmation du rôle des régions dans la planification ;

- la possibilité de contractualiser donnée aux agglomérations engagées dans une démarche de constitution de communauté urbaine ou d'agglomération, aux pays et aux parcs naturels régionaux, les structures intercommunales que sont les communautés urbaines, communautés d'agglomération et communautés de communes étant maîtresses d'ouvrage et responsables des actions ;

- l'invitation faite aux départements de s'associer à la contractualisation sans pour autant constituer, sauf exception, l'échelon élémentaire d'élaboration et de mise en oeuvre du projet.

Elle a, à ce sujet, précisé que la constatation des pays requérait l'avis conforme des conférences régionales d'aménagement du territoire, présidées conjointement par le préfet de région et le président du conseil régional et associant de manière explicite les conseils généraux. Contrairement à la loi du 4 février 1995, les pays qui sont des territoires de projet, n'ont pas vocation par eux-mêmes à devenir un niveau d'intercommunalité ou un arrondissement, et sont, à ce titre, moins déstabilisateurs pour les départements que le dispositif de l'article 24 de la loi du 4 février 1995. Par ailleurs, ces pays, qui peuvent être, selon les régions, ruraux, mixtes urbain et rural ou seulement urbains, auront à identifier, reconnaître et assurer la participation des composantes rurales de leur territoire afin d'assurer la contribution de ces dernières au projet et d'éviter une domination du rural par l'urbain.

La ministre a fait valoir que le projet de loi rééquilibrait la loi du 4 février 1995 au profit des aires urbaines, insuffisamment prises en compte à l'origine par l'affirmation de l'agglomération dans un cadre intégré en matière de compétences ou de solidarité fiscale, sans pour autant affaiblir les dispositions relatives au milieu rural.

Il prend en compte la dimension européenne, principalement dans les huit schémas de services collectifs qui appellent nécessairement cette cohérence et des approches interrégionales. Il maintient, par définition, toutes les dispositions non abrogées et non modifiées, notamment celles relatives aux coopérations interrégionales ou transfrontalières, aux politiques de la montagne et du littoral, aux zonages et aux instruments financiers. Le fonds d'investissements des transports terrestres et des voies navigables (FITTVN) est largement doté et le fonds national pour le développement des entreprises (FNDE) a été doté pour la première fois en 1998, à hauteur de 200 millions de francs.

La ministre a estimé que le projet de loi introduisait, dans sa conception et dans la réalité, un changement de démarche renforçant la décentralisation. A la logique apparemment rationnelle de construction successive et déductive d'un schéma national, du schéma régional et du contrat - qui dans la réalité, introduit des écarts et de réelles contradictions entre le premier et le dernier -, il substitue une approche plus intégrée et plus interactive qui engage une première phase de définition des cadres, orientations ou stratégies - schémas de services, schémas régionaux, stratégies des contrats -, puis une deuxième phase consacrée aux documents eux-mêmes qui prennent en compte les contributions concertées de la première phase, les schémas régionaux devant être compatibles avec les schémas de service.

Le projet veut poser le fondement et le cadre nécessaires à la contractualisation entre l'Etat et les régions et à la programmation européenne qui doivent être définies pour le 31 décembre 1999. Le Gouvernement a décidé, à cet égard, de proposer aux régions, aux départements, aux groupements de communes et aux différents partenaires, une stratégie unique pour ces deux exercices, portant sur une même période de 2000 à 2006 d'une durée de 7 années, et comportant une mise à jour simultanée en 2003.

Le projet modifie donc, sans la bouleverser totalement, la loi du 4 février 1995.

M. Philippe Duron, rapporteur, a estimé que le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire était un texte très attendu qui traduisait une nouvelle ambition et une démarche novatrice.

Il a indiqué que ce texte, bien que présenté comme un projet de modification de la loi Pasqua, avait en fait un aspect très novateur. Il vise en effet à mettre en cohérence les politiques d'aménagement du territoire nationale et européenne, il introduit la notion nouvelle de développement durable, et il rompt avec la théorie de l'offre d'équipements qui a présidé aux textes précédents relatifs à l'aménagement du territoire.

A terme, l'aspect le plus intéressant du projet lui semble être la restructuration des territoires qu'il propose, centrée sur la recherche de nouvelles dynamiques liées à la manière dont est vécu l'espace : les pays, déjà existants, et les agglomérations, insuffisamment prises en compte précédemment.

Le renforcement des pôles de développement à vocation européenne replace l'espace français dans sa dimension européenne. Quant au rééquilibrage entre le rural et l'urbain, il ne doit pas aboutir à leur opposition, un certain nombre de villes pouvant devenir le noyau dur de pays (Quimper par exemple).

Le texte du projet de loi a pour effet de modifier les moyens d'action de la politique d'aménagement du territoire. Il supprime ainsi le schéma national d'aménagement du territoire afin d'assurer un meilleur dialogue entre les régions et l'Etat. Il permet également une démocratisation de la vie locale en assurant la participation des acteurs locaux (économiques, sociaux, culturels) au Conseil national de l'aménagement et du développement du territoire, aux conférences régionales d'aménagement et de développement du territoire et aux conseils de développement des pays.

Au delà de ces aspects nouveaux et positifs, il a cependant tenu à faire quatre observations.

Le calendrier contraignant imposé par la nécessité d'adopter au 1er janvier 2000 les prochains contrats de plan Etat-régions et les documents uniques de programmation va probablement imposer une accélération de la procédure législative. Il a ainsi estimé cohérent, comme M. Jean-Pierre Balligand, que le Gouvernement demande l'urgence sur ce texte.

L'adoption et la révision des schémas de services collectifs par décret semblent rendues nécessaires par ce calendrier contraignant, mais cela aboutirait à priver le Parlement pendant vingt ans de son droit à se prononcer sur la politique d'aménagement du territoire. Il conviendra donc de modifier le texte pour permettre d'assurer l'information et un réel pouvoir d'appréciation du Parlement.

La notion de territoire pertinent est un concept fondamental de l'aménagement du territoire. S'agissant des agglomérations, le texte fait référence au projet de loi relatif à l'organisation urbaine et à la simplification de la coopération intercommunale qui fixe le seuil de celles-ci à 50 000 habitants pour les aires urbaines comportant une commune centre de plus de 15 000 habitants. Il s'est interrogé sur la pertinence de ces seuils, craignant que les petites villes ne soient incitées à se constituer en agglomérations alors qu'elles pourraient être l'élément moteur de pays.

Enfin, il a estimé que la structuration et l'animation du territoire passait par la présence de l'Etat et de ses services publics sur l'ensemble du territoire national. Reconnaissant que celle-ci doit évoluer pour tenir compte des mutations intervenues, il a estimé toutefois nécessaire de garantir une présence adaptée de l'Etat.

M. Christian Bataille a indiqué qu'il importait, dans un contexte de construction européenne, de réaffirmer le rôle régulateur de l'Etat. En matière d'aménagement du territoire, c'est l'Etat et lui seul qui peut prendre en compte l'intérêt national et réduire les inégalités entre régions. Selon lui, l'intérêt national ne saurait être compris comme une addition d'intérêts régionaux car une telle conception ne pourrait aboutir qu'à l'aggravation des déséquilibres territoriaux ; l'Etat doit donc assurer la cohérence des politiques publiques. La solidarité n'a de sens que lorsqu'elle s'exerce au niveau de la nation.

Il a ensuite rappelé que les lois de décentralisation de 1982 avaient accru le rôle des régions et que depuis cette date ces collectivités territoriales n'avaient cessé de voir leur influence s'étendre. Il ne faudrait pas pour autant que les autres collectivités soient négligées, le département devant également jouer un rôle important et complémentaire de celui des régions dans notre politique d'aménagement du territoire.

Puis il a estimé que l'émergence de pays et d'agglomérations correspondait à une approche pertinente des géographes mais que ces concepts devaient faire l'objet d'une définition juridique précise. Il a enfin craint que la montée en puissance de ce type d'entités ne s'accompagne d'un déficit démocratique puisque le mode de désignation de leurs dirigeants n'est pas le suffrage universel direct.

M. Félix Leyzour a en préambule replacé ce texte dans une actualité marquée par plusieurs projets de loi concernant les collectivités territoriales et par la prochaine réforme des fonds structurels européens. Après avoir souligné que la " loi Pasqua " avait été très partiellement appliquée, il a rappelé son attachement à une politique d'aménagement du territoire équilibrée tenant compte de la dimension sociale du problème.

Il a ensuite exprimé ses craintes sur les défauts de cohérence pouvant survenir entre le contenu des schémas de services collectifs et les options de la politique nationale. Il a par ailleurs déploré le rôle secondaire laissé au Parlement dans l'élaboration des schémas de services collectifs puisque le contenu de ceux-ci sera défini par décret. Il a ensuite demandé quelle péréquation était envisagée pour corriger les inégalités entre régions et quelle serait la place des services publics dans la politique d'aménagement du territoire, ceux-ci ayant un rôle structurant essentiel à jouer dans ce domaine. Il a enfin indiqué que les pays allaient probablement recouvrir des réalités diverses et qu'il convenait en conséquence d'aborder cette question avec pragmatisme, le pays ne devant pas devenir une institution vouée à éclipser à terme une collectivité territoriale telle que le département.

Pour M. Jean-Claude Lenoir, le rééquilibrage territorial doit bénéficier prioritairement aux zones rurales qui n'ont pas accès à certains équipements et services publics et non aux agglomérations urbaines. Il s'est également inquiété de l'articulation de ce texte avec d'autres projets de loi en préparation et a craint que, faute de coordination nationale, ne se pose le problème de la cohérence de nos politiques sectorielles et régionales.

Il a ensuite demandé, s'appuyant sur l'exemple de l'Orne, département déjà quadrillé par différents pays créés par arrêté préfectoral, quel serait l'avenir des pays déjà existants. Il a également voulu savoir si le terme d'agglomération avait la même acception dans ce texte et celui présenté par le ministère de l'intérieur et s'il était possible que des projets de pays soient éligibles à l'aide des fonds structurels européens.

M. Patrick Ollier s'est montré surpris par la démarche consistant à réformer une loi n'ayant reçu qu'un début d'application. Pour lui, l'Etat doit être l'élément coordinateur de la politique d'aménagement du territoire ; or en supprimant le schéma national d'aménagement du territoire, on élimine l'élément garantissant la cohérence de l'action publique dans ce domaine. Les huit schémas sectoriels ne remplaceront pas l'élément structurant que constitue le schéma national. Il a par ailleurs regretté que le projet de loi ne fixe pas d'objectifs clairs d'aménagement du territoire et s'est montré gêné par le choix fait en faveur d'un rééquilibrage vers la ville de notre politique d'aménagement du territoire. Selon lui, il faut donner à toutes les parties du territoire, quelles soient rurales ou urbaines, la même chance.

Il a ensuite rappelé que la " loi Pasqua " n'avait pas apporté de solution au problème posé par la clarification des compétences des acteurs de l'aménagement du territoire. Il a déploré de ne pas trouver plus de réponses à cette question dans le présent texte pas plus qu'à celle de la péréquation.

Quant aux instruments servant la politique d'aménagement du territoire, ils doivent pouvoir recourir aux " discriminations positives ". En effet, pour M. Patrick Ollier, l'égalité des chances passe par l'inégalité des traitements. Il s'est ainsi montré choqué par l'attitude du secrétariat d'Etat au budget consistant à promouvoir des normes fiscales uniformes ne tenant pas compte des disparités géographiques et économiques.

Rappelant que dans l'esprit de la " loi Pasqua " le pays " se constate ", il a estimé que la création administrative autoritaire de pays par les préfets de région allait poser des problèmes. Il en est de même pour l'obligation faite aux pays de se constituer en syndicats mixtes. Il a indiqué que cette obligation risquait d'être interprétée comme un pas en avant vers la création d'une nouvelle collectivité territoriale. Il a donc appelé à une plus grande prudence en ce qui concerne les pays, tout en soulignant son approbation de leur non remise en cause.

Il a pour conclure insisté sur le rôle de l'Etat et la nécessité d'un " fil conducteur national " et exprimé la crainte que le manque de cohérence entre les schémas ne conduise à une augmentation des disparités entre régions.

M. Jean-Michel Marchand a indiqué que le projet de loi avait pour objet de modifier la loi du 4 février 1995 qui avait un caractère ruraliste trop marqué.

Le projet de loi a un objectif de développement durable, il affirme le rôle majeur de la région et il s'inscrit dans une dimension européenne.

Il a souligné le rôle de la conférence régionale d'aménagement et de développement du territoire composée de représentants des collectivités territoriales, des pays, des parcs naturels régionaux et des activités économiques, sociales, culturelles et environnementales.

Il s'est demandé quelles seront l'articulation et la place respective des parcs naturels régionaux, des pays et des agglomérations dans le cas où il y aurait superposition des zonages.

Il a souhaité en outre avoir des précisions sur le cahier des charges qui présideront à la mise en place des schémas de services collectifs.

Enfin, il s'est interrogé sur le rôle du Parlement en matière d'évaluation des politiques d'aménagement du territoire face aux nécessaires réorientations imposées par une prospective à vingt ans.

M. Yves Coussain a observé que le projet de loi était un projet de rupture par rapport à la loi du 4 février 1995.

Il a regretté que le principe de complémentarité entre ville et campagne soit abandonné au profit d'une opposition plus marquée entre ces deux territoires, l'un étant considéré comme étant créateur de richesse et l'autre comme zone de loisirs.

Il s'est demandé quelle réponse apporter au problème de l'appauvrissement des services publics dans les zones rurales.

En matière d'équipement, il a indiqué que le texte rompait avec le principe de la loi du 4 février 1995 selon lequel il ne devait pas y avoir de bassin de vie à plus de 45 minutes d'une route à quatre voies.

S'agissant des pays, il a regretté les complications apportées par le texte. L'obligation de constituer un syndicat mixte ou un établissement public de coopération intercommunale pour permettre aux pays de contractualiser lui semble susceptible de décourager les initiatives. Certaines communes ou communautés de communes ont déjà abandonné l'idée de se constituer en pays car elles ne souhaitent pas voir apparaître une structure nouvelle ayant vocation à percevoir l'impôt.

Il s'est enfin interrogé sur la cohésion entre schémas de services collectifs et schémas régionaux d'aménagement du territoire.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont s'est réjouie de la nouvelle approche du projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire notamment du rééquilibrage proposé entre le monde rural et urbain.

Elle a relevé le fait qu'avec les schémas de services collectifs l'Etat se livre pour la première fois à une réflexion stratégique prospective à vingt ans. Elle a toutefois estimé nécessaire de prévoir des conditions d'ajustement des orientations afin de ne pas introduire de rigidités dans la mobilisation des concours de l'Etat sur des projets structurants ou des mesures nouvelles.

Elle a souligné l'importance de l'intégration des services publics au sein des schémas, en milieu rural mais aussi en zone urbaine fragile.

Elle s'est ensuite inquiétée de la place faite aux régions. Rappelant que les conseils généraux sont des collectivités de plein exercice élues au suffrage universel direct qui prélèvent l'impôt et participent fortement à l'aménagement du territoire, il lui a semblé important de préciser et affirmer leur rôle.

Elle s'est demandée si la réforme de la taxe professionnelle, aussi positive soit-elle, ne masquait pas la nécessité de réaffirmer le principe de péréquation entre les collectivités.

Elle a conclu en soulignant l'importance de l'aménagement du territoire pour une recomposition de notre pays et la lutte contre les inégalités. Elle a insisté sur la nécessité de préciser de façon explicite les engagements de l'Etat.

M. Alain Cacheux a félicité la ministre du rééquilibrage proposé entre ville et campagne, soutenant l'émergence des agglomérations et de pôles de développement forts. Il a également approuvé le renforcement du rôle des régions.

Il a cependant émis des réserves sur l'insuffisante prise en compte des services publics et s'est interrogé sur la cohérence du projet de loi par rapport aux autres textes sur la coopération intercommunale et sur les interventions économiques des collectivités territoriales.

Enfin, il a constaté une imprécision dans la définition des concepts nouveaux introduits par le texte, par exemple les schémas de services collectifs, et leur valeur juridique. Il a observé que la philosophie d'équipement et d'infrastructures fait place à une philosophie de services, mais il a souligné leur interférence mutuelle. En outre, il reste des besoins en matière d'infrastructures de transport afin de désenclaver un certain nombre de territoires.

Pour conclure, il a précisé que le contenu de certains schémas lui semblait vague et que certains aspects plus précis pouvaient être discutés.

Mme Sylvia Bassot s'est interrogée sur le devenir des pays qui ont déjà été constatés par arrêté préfectoral.

Elle s'est inquiétée du problème de superposition des territoires notamment celle d'une partie de pays et d'un parc naturel régional ainsi que de l'intégration des pays dans les futurs contrats de plan Etat-régions alors que peu d'entre eux seront effectivement créés au 1er janvier 2000.

Elle a souhaité plus de souplesse dans l'organisation juridique des pays se demandant s'il serait possible de les constituer par association d'EPCI ou par association loi de 1901.

Après avoir mis l'accent sur la nécessité de donner un caractère plus lisible et plus volontariste aux objectifs de la politique d'aménagement du territoire, M. Léonce Deprez a demandé à la ministre si elle pouvait partager la " logique d'une chronologie " consistant d'abord à connaître les orientations européennes dans le cadre de la réforme des fonds structurels, puis à adopter successivement les schémas de services collectifs qui remplacent le schéma national d'aménagement du territoire, les schémas régionaux qui doivent structurer la région pour les vingt prochaines années et enfin les contrats de plan Etat-régions (2000-2006) qui seront la première phase d'application des schémas de service et des schémas régionaux.

Abordant ensuite la question de la pertinence des territoires, il a souligné que la loi du 4 février 1995 avait constitué un grand progrès que le projet de loi confirme en considérant que la politique d'aménagement du territoire ne devait pas s'élaborer à partir des communes, ni des départements mais se placer à l'échelon régional et reconnaître le rôle des pays et des agglomérations dans le développement de projets.

Evoquant le double volet, régional et territorial, que comporteront les prochains contrats de plan Etat-régions, il s'est demandé si les contrats de pays et d'agglomération pourraient être insérés dans ces futurs contrats ou s'ils seraient conclus postérieurement à l'adoption de ceux-ci.

M. Michel Vaxès, marquant son accord avec les observations déjà émises en ce qui concerne la cohérence et l'articulation des différents schémas, s'est demandé si la " logique de chronologie " mentionnée par M. Léonce Deprez ne relevait pas plutôt d'une " logique de hiérarchie ".

Puis, il a demandé des précisions sur l'articulation entre les schémas multimodaux de services collectifs de transport et les schémas régionaux de transport ainsi que sur la valeur juridique de ces documents. Il s'est également interrogé sur la possibilité de privilégier une politique de services collectifs de transport sans que soient simultanément affirmés des objectifs en matière d'infrastructures, soulignant que l'optimisation des équipements existants ne saurait suffire à répondre aux besoins.

M. Eric Doligé a fait part des contradictions qu'il a relevées dans le projet de loi et a posé à la ministre les questions suivantes :

- s'agit-il d'une loi d'orientation ou d'une loi d'organisation territoriale ayant des effets institutionnels ?

- l'objectif est-il de créer une intercommunalité de territoires, s'appuyant sur les agglomérations et les pays, ou une intercommunalité de projets par les schémas de services collectifs ?

- les pays et les agglomérations ne préfigurent-ils pas un échelon supplémentaire de décision ?

- quelle sera l'articulation entre les pays et les parcs naturels régionaux ?

M. Jean-Paul Nunzi a demandé des précisions sur les choix stratégiques de la politique d'aménagement et de développement durable du territoire prévus à l'article 2 du projet de loi et souligné que le nombre d'habitants ne lui paraissait pas le critère pertinent pour définir ni les bassins de vie ou d'emploi, ni les agglomérations.

M. Serge Poignant a estimé que les pays devaient être des structures souples pouvant comprendre des parcs naturels régionaux, des " petites " agglomérations ou des parties de " grandes " agglomérations. Il a estimé que l'affirmation de l'article 19 du projet selon lequel les pays doivent respecter le périmètre des établissements publics de coopération intercommunale allait à l'encontre de la souplesse qu'il fallait rechercher.

M. Jacques Rebillard a souhaité savoir si la volonté de mettre en place une fiscalité plus écologique trouvait une traduction en termes d'utilisation des espaces et de développement territorial.

M. Jean Proriol a considéré que si l'article 20 du projet de loi relatif aux agglomérations procédait à une clarification, tel n'était pas le cas de l'article 19 concernant les pays. S'interrogeant sur la logique du dispositif proposé et sur le sort réservé aux pays existants, il a fait part des réactions de méfiance suscitées par cet article alors que les nouvelles structures de coopération intercommunale n'avaient pas encore atteint le stade de la maturité. Il a également soulevé le problème des parcs naturels régionaux dont le périmètre est interdépartemental.

M. André Lajoinie, président, a souhaité formuler quelques observations reflétant la manière dont la commission percevait le projet de loi.

Il a tout d'abord souligné la nécessité d'une cohérence nationale de la politique d'aménagement du territoire. Après avoir relevé que la politique européenne d'aménagement du territoire était encore balbutiante et que ses moyens tendaient plutôt à diminuer pour des motifs budgétaires mais aussi en raison de l'élargissement futur de l'Union européenne, il a souligné avec force que les mécanismes de péréquation et le maintien des services publics étaient indispensables pour éviter l'aggravation des inégalités et assurer le rééquilibrage entre les régions.

Puis il a indiqué que les problèmes de calendrier - l'ensemble des schémas devant être prêts avant le 31 décembre 1999 - ne pouvait justifier que le Parlement soit exclu du processus de décision sur des schémas prospectifs élaborés dans une perspective à vingt ans.

Il a enfin mis l'accent sur la nécessité d'une organisation territoriale caractérisée par la souplesse, tenant compte de la montée en puissance de l'intercommunalité, du rôle des départements ou encore de la coopération entre les agglomérations et les zones rurales.

En réponse aux intervenants, la ministre a apporté les précisions suivantes :

- la procédure d'examen du projet de loi par le Parlement ne fait que débuter. Elle devrait permettre d'en améliorer et d'en clarifier les dispositions. Lors de l'élaboration du projet de loi d'orientation, il ne s'agissait pas de créer à partir du néant, mais de conserver les mécanismes fonctionnant bien, d'améliorer les imperfections et d'oser changer ce qui devait l'être. Le projet de loi résulte d'une démarche fondée sur un projet fonctionnel, qui rompt avec un discours déconnecté de la réalité. Il doit réaffirmer le rôle de l'Etat, clarifier les missions des collectivités territoriales et définir les synergies entre les structures ;

- la position de défense de la ruralité est " datée ". Elle ne tient notamment pas compte des évolutions, favorisées par les mécanismes européens, en faveur de la pluriactivité et du tourisme ;

- il convient d'adopter une démarche pragmatique et modeste. L'action publique en faveur de l'aménagement du territoire est dérisoire, par rapport aux moyens d'investissement mis en oeuvre par les grands groupes privés ;

- l'état balbutiant de l'aménagement du territoire au niveau européen ne permet pas de décliner les projets nationaux à partir des orientations communautaires ;

- la disparition du schéma national ne correspond pas à une réduction du rôle de l'Etat, garant de l'équité et de la cohérence des choix. Il aurait été possible d'une manière cynique, d'appeler schéma national la somme des huit schémas de services collectifs ; cela n'aurait pas modifié le fond des choses ;

- les schémas régionaux doivent être cohérents avec les schémas de service collectifs ;

- la priorité affirmée en faveur d'une meilleure utilisation des infrastructures existantes ne signifie pas qu'il n'y aura plus d'équipements nouveaux réalisés. Il s'agit de chercher à répondre aux besoins des populations en tenant compte de l'impact des choix sur les finances publiques, et non plus de partir des demandes des entreprises de travaux publics ;

- l'objectif affiché par l'article 17 de la loi du 4 février 1995 qui prévoyait une desserte équilibrée du territoire par des infrastructures de transport terrestre, constituait surtout l'affichage d'une volonté. Personne ne croyait possible sa réalisation en raison d'un manque de moyens financiers ;

- le projet de loi ne vise pas à bouleverser la répartition des compétences entre les collectivités territoriales, mais à préciser laquelle assure la coordination et l'animation de chaque projet. Si le département remplit cette mission dans le domaine de l'action sociale, ce rôle revient à la région pour l'aménagement du territoire. Mais il ne s'agit pas pour cette collectivité de décider en lieu et place des autres. Rien de ce qui relève des compétences du département ne lui est retiré. Il doit également être consulté sur le schéma régional d'aménagement du territoire et sur les projets de création de pays ;

- certaines dispositions de la loi du 4 février 1995 étaient inapplicables ou sont devenues caduques. Au contraire le projet de loi a cherché à proposer des mesures immédiatement applicables ;

- les dispositions de la loi relative à la montagne, n'étant pas modifiées, sont toujours en vigueur. Dans ce domaine comme dans d'autres, tels les efforts consentis en faveur des zones rurales, les moyens financiers consacrés à la politique de revitalisation de ces espaces fragiles ont été accrus depuis le changement de majorité parlementaire ;

- les craintes d'un dessaisissement pour vingt ans des compétences du Parlement, en matière d'aménagement du territoire, ne sont pas fondées. Si la perspective dans laquelle seront élaborés les schémas de services collectifs s'inscrit dans cette durée, ils devraient cependant être révisés un an avant le renouvellement des contrats de plan Etat-régions, avec la même vision à long terme ;

- les dispositifs actuels, permettant une péréquation des aides en fonction du niveau du développement des régions, sont particulièrement indigents, puisque le fonds existant est seulement doté de quelque 500 millions de francs par an. Un moyen d'améliorer la différenciation des interventions pourrait être trouvé dans une modulation des enveloppes versées dans le cadre des contrats de plan Etat-régions. Une telle approche doit faire encore l'objet de discussions entre les ministères concernés ;

- la logique d'entreprise de certains services publics ne permet pas de prendre correctement en compte les besoins de leur diffusion sur le territoire, du point de vue des populations. L'idée d'un observatoire des services publics a été acceptée par le Premier ministre. Des propositions sur ce point pourraient être examinées lors du prochain conseil interministériel d'aménagement et de développement du territoire ; il serait ensuite possible de traduire certaines des décisions du CIADT dans le texte du projet de loi ;

- le concept d'agglomération retenu par le projet de loi est identique à celui du projet de loi que soutiendra le ministre de l'intérieur ;

- il n'est pas exact de considérer les agglomérations comme une structure pour les zones riches, les pays correspondant aux zones pauvres. L'importance de projets d'agglomération, qui porteront sur des montants de plusieurs milliards de francs consacrés à la réhabilitation urbaine, le démontre. En outre, la mise en place des outils financiers correspond à une unification fiscale forte, par le biais de la taxe professionnelle unique ;

- les pays sont tout d'abord des espaces de projet ; ils n'ont pas une simple cohérence géographique ou culturelle ; ils sont porteurs de projets d'économie et de développement. Le pays existe plus par sa charte de développement que par son périmètre. Il ne doit pas être créé pour favoriser une personnalité locale ou s'opposer à d'autres initiatives d'organisation ;

- les pays qui ont été créés et mis en place sur la base des dispositions de la loi du 4 février 1995 seront reconnus par les conférences régionales après la promulgation de la nouvelle loi d'orientation. Il en ira de même pour les autres espaces de projets créés à l'initiative des élus locaux ;

- la forme d'organisation des pays retenue par le projet de loi est le syndicat mixte, car cette structure est suffisamment souple pour associer d'autres partenaires que les collectivités territoriales, en même temps qu'elle offre plus de garanties que la forme associative, tant du point de vue du contrôle démocratique que du respect des règles des finances publiques. Ce minimum de formalisme s'impose car les pays seront appelés à contracter avec l'Etat. En revanche, si la structure syndicale paraît s'imposer, le recours systématique au syndicat mixte peut être l'objet d'un débat, car la participation des tiers au pays n'est pas toujours requise ;

- la majorité des cahiers des charges des schémas de services collectifs ont été d'ores et déjà élaborés et transmis, pour la plupart, aux préfets pour organiser localement les débats. D'ici la fin du mois de novembre, seuls resteront à définir le cahier des charges des services collectifs sanitaires et celui relatif aux services de l'information et de la communication ;

- le projet de loi ne considère pas que les villes sont les seuls lieux de création de richesses. Mais, à l'inverse de la loi du 4 février 1995 qui ne traitait pas des espaces urbanisés, où habitent aujourd'hui plus de 80 % de la population, le projet de loi croit à une synergie possible entre les villes et les zones rurales. D'ailleurs, sauf rares exceptions, celles-ci ont besoin des villes pour favoriser leur développement. Les pays ne sont donc pas réservés aux espaces ruraux et les agglomérations aux espaces urbains. La logique du pays est celle d'une ville moyenne et de sa périphérie ; elle peut également être un outil strictement urbain ;

- le ministère n'a pas connaissance à ce jour de cas où les élus souhaitent renoncer à la constitution d'un pays, au motif que le dispositif prévu dans le projet de loi transformerait cet instrument en nouvel échelon administratif doté de compétences en matière fiscale. Il est d'ailleurs clair que rien, dans le projet de loi, ne permet d'alimenter une telle inquiétude ;

- même si la culture personnelle du ministre l'incite à souhaiter une diminution du rôle du département, le projet de loi ne comporte aucun élément de la sorte, car une telle position ne dispose pas d'un soutien assez ample pour être proposée ;

- le niveau auquel l'Etat envisage de contracter avec les structures décentralisées sera de nature à rassurer sur la capacité à poursuivre des actions d'investissement en faveur d'infrastructures nouvelles et de grands équipements. En revanche, le ministère chargé de l'aménagement du territoire s'opposera aux projets fondés sur des formules creuses, se contentant par exemple d'affirmer l'impact de l'infrastructure sur l'emploi ou le désenclavement. En effet, l'infrastructure n'est qu'un élément du développement. A un certain niveau, il est plus efficace d'optimiser les infrastructures existantes, de renforcer leur entretien, d'améliorer les formations, plutôt que d'engager des travaux de constructions nouvelles ;

- les contrats de plan Etat-régions comporteront un volet territorial et un volet régional. Les contrats avec les pays et les agglomérations s'inséreront dans ces contrats de plan. Il a été décidé que le volet territorial pourrait être utilisé jusqu'en 2003, soit jusqu'à la révision à mi-parcours de ces contrats de plan ;

- le recours à la procédure d'urgence pour l'examen du projet de loi par le Parlement est souhaitable, mais il ne s'agit nullement de priver la représentation nationale d'un débat sur l'aménagement du territoire ;

- la logique chronologique dans l'élaboration des schémas de services collectifs, partant de l'échelon européen, avant d'aborder les phases nationale, puis régionales, pour séduisante qu'elle paraisse, n'est pas praticable, compte tenu de la modestie de l'intervention communautaire dans l'aménagement du territoire. C'est pourquoi l'élaboration pertinente des schémas doit s'organiser autour d'une démarche simultanée, aux différents niveaux ;

- s'agissant de la pertinence du territoire, la qualité des critiques de ceux qui s'opposent aux pays ne doit pas duper quant à leurs motivations réelles. Les pays ne sont pas un outil de déstabilisation des autres structures. L'Etat ne devra pas ménager son soutien aux projets de pays pertinents et en continuité territoriale ; à l'inverse il ne devra pas valider les initiatives qui en usurperaient l'appellation ;

- c'est parce que le Gouvernement n'entend pas fragiliser l'intercommunalité qu'il ne s'agit pas de permettre qu'un pays ne respecte pas le périmètre d'un EPCI. De même ne sera pas admise, sauf exceptions, la pluralité d'affiliations ;

- l'application d'une fiscalité écologique différenciée suivant les parties du territoire ne trouve pas sa place dans ce projet, même si l'idée est intéressante ;

- la demande d'un renforcement du rôle du Parlement dans l'élaboration de la politique d'aménagement du territoire, ainsi que celle d'un accroissement du rôle des services publics dans cet aménagement ont été entendues.

II.- DISCUSSION GÉNÉRALE

La commission a examiné, sur le rapport de M. Philippe Duron, le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire et portant modification de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire (n° 1071) au cours de ses réunions des 15, 16 et 22 décembre 1998.

M. Philippe Duron, rapporteur, a indiqué que le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire répondait à la volonté exprimée par le Premier ministre le 19 juin 1997 de réviser la loi du 4 février 1995 afin que " toutes les dimensions -écologiques, culturelles et économiques- du développement soient prises en compte dans les régions ".

Ce texte vise à fournir un cadre pour l'élaboration de la nouvelle génération des contrats de plan Etat-régions et s'inscrit dans un dispositif plus large, qui vise à simplifier l'organisation des territoires (projet de loi relatif à l'organisation urbaine et à la simplification de la coopération intercommunale (n° 1155), dit " projet de loi Chevènement ") et à codifier les interventions économiques des collectivités territoriales (projet de loi préparé par M. Emile Zuccarelli). Il s'inscrit dans une évolution des politiques d'aménagement du territoire amorcée depuis le début de la décennie.

Au cours des " Trente Glorieuses " la France a en effet connu des mutations profondes et elle a mené une politique volontariste ambitieuse fondée sur des efforts d'équipements structurants. A partir de la seconde moitié des années 1970, le choc pétrolier et la crise économique qui s'en est suivie ont conduit l'État à concentrer ses efforts sur la reconversion des régions industrielles. L'aménagement du territoire est alors devenu plus défensif.

Au cours de cette décennie, l'État a du réviser ses concepts en matière d'aménagement du territoire en raison d'une croissance incertaine, d'une tertiarisation prononcée de l'économie, de la décentralisation et de l'ouverture progressive à l'Europe.

Malgré certaines avancées incontestables, comme la création des pays, la loi du 4 février 1995 présente de fortes lacunes :

- une insuffisante prise en compte de la vie urbaine,

- une vision trop pessimiste de la réalité des territoires,

- une conception trop centralisatrice de l'aménagement du territoire.

Le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire est fondé sur une approche plus réaliste et pragmatique. Trois idées nouvelles sous-tendent le texte :

- la recherche de territoires pertinents,

- le passage d'une logique de l'offre à une logique de besoins,

- la volonté de s'inscrire dans une perspective de développement durable.

La définition de nouveaux territoires pertinents doit prendre en compte deux dimensions nouvelles, l'une macro géographique et l'autre infra régionale.

Le projet de loi vise à constituer des pôles urbains, alternatives à la région parisienne, capables de rivaliser avec d'autres métropoles européennes. Il prend en compte le fait urbain qui caractérise la seconde moitié du XXè siècle et fait de l'agglomération un objectif prioritaire de l'action publique en lui permettant de contractualiser avec l'État au sein des contrats de plan État-régions. Il essaie de clarifier la notion de pays, territoires de projets, qui s'organisent à l'échelle du bassin d'emploi pour mobiliser des moyens humains et financiers significatifs.

Cette recherche de territoires pertinents va de pair avec l'ambition gouvernementale de poursuivre la décentralisation et de trouver un nouvel équilibre entre l'action de l'État qui reste le garant de l'équité territoriale et le respect de la décentralisation.

Le projet de loi substitue une approche fondée sur la demande aux politiques de l'offre mises en _uvre jusqu'à présent ce qui permettra de mieux identifier les besoins des territoires et de leur population. Il remplace par huit schémas de services collectifs, qui fixent au plan national les objectifs de l'État, le schéma national d'aménagement du territoire (SNADT) qui avait été impossible à mettre en _uvre.

Il vise à renforcer la participation démocratique en intégrant les acteurs économiques et sociaux et les associations dans les différentes instances de l'aménagement du territoire.

Afin de mieux ménager le territoire, il introduit le concept de développement durable fondé sur une croissance qui économise les ressources, qui privilégie une stratégie de long terme, et qui considère le territoire non comme un simple support d'activités économiques mais comme un outil de développement en soi.

Modeste dans sa forme, ce projet de loi a cependant des ambitions nouvelles et s'inscrit dans une démarche de renouvellement de l'aménagement du territoire.

Après l'exposé du rapporteur, la commission a rejeté l'exception d'irrecevabilité et la question préalable.

Intervenant dans la discussion générale, M. Jean-Michel Marchand a indiqué que le projet de loi soumis au vote du Parlement vient compléter la loi du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat et la loi du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire. Il s'inscrit dans le cadre d'une réflexion d'ensemble sur l'aménagement du territoire à laquelle participent également le projet de loi d'orientation agricole, le projet de loi sur l'intercommunalité et le projet de loi sur les interventions économiques des collectivités locales.

Son originalité repose sur une conception transversale de l'aménagement du territoire, c'est-à-dire sur une volonté de s'appuyer sur les élus locaux, les acteurs économiques et associatifs afin de mettre en place une politique de projet fondée sur une véritable participation des citoyens. Ce texte renforce également la décentralisation en reconnaissant le rôle de la région comme échelon pertinent de cet aménagement. L'Etat conserve son rôle éminent de garant de la sécurité juridique et de détermination des objectifs et orientations de la politique d'aménagement nationale du territoire. Il conviendra cependant de trouver une formule permettant l'association des parlementaires à l'élaboration des schémas de services collectifs. Enfin, ce texte prend en compte le souci de ménager le territoire.

M. Patrick Ollier a regretté qu'un nouveau texte vienne en discussion devant le Parlement sans qu'une mise en oeuvre des dispositions de la loi du 4 février 1995 ait véritablement été tentée.

Le projet de loi démantèle sans précaution la logique du texte de 1995 et ses éléments fondamentaux comme le schéma national d'aménagement du territoire et ne présente aucun moyen nouveau et convaincant pour lutter de manière efficace contre les déséquilibres territoriaux. Le rôle de l'Etat se trouve remis en cause dans ses responsabilités de lutte contre les inégalités géographiques et de garantie d'égal accès au service public. Quant au projet de loi de finances pour 1999, il réduit le rôle d'instruments financiers importants comme le fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables et le fonds de péréquation des transports aériens.

La question de la péréquation financière entre les collectivités territoriales et de la clarification de leurs compétences reste entière. Le passage d'une notion d'un pays " constaté " à la notion d'un pays " délimité " par le préfet de région et constitué en syndicat mixte ou structure intercommunale apparaît inquiétant aux élus locaux.

Alors que la loi du 4 février 1995 demandait naturellement à être prolongée et éventuellement renforcée, le texte du projet de loi s'inscrit dans une volonté de rupture qui paraît à tous égards regrettable.

M. Félix Leyzour a souligné que l'inapplication de la loi du 4 février 1995 appelait nécessairement une révision des instruments juridiques de la politique d'aménagement du territoire. Le Comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire (CIADT) du 15 décembre 1997 a défini les éléments principaux d'une politique durable et soucieuse du renforcement de la cohésion sociale et de la protection de l'environnement. Le projet de loi se donne pour mission de répondre à ces objectifs mais devra probablement être complété sur certains points : l'association du Parlement à l'élaboration des schémas de services collectifs, la garantie de cohérence entre les orientations nationales et les politiques régionales d'aménagement du territoire, l'introduction d'une péréquation corrigeant les inégalités de moyens entre régions et enfin la place des services publics car leur rôle structurant sur le territoire doit être réaffirmé.

M. Patrick Rimbert a observé que la loi de 1995, qui avait pour objet de permettre aux territoires ruraux de rejoindre le niveau de développement des villes, se trouve en attente d'application. Il convient aujourd'hui de mettre en place une véritable politique de lutte contre les inégalités intra-régionales, s'appuyant sur des communautés de communes et des agglomérations organisées capables de développer des projets.

L'actuel projet de loi prend en compte la dimension européenne de l'aménagement du territoire et la nécessité de renforcer les structures urbaines à vocation européenne.

Il se veut également un projet d'équilibre et non d'opposition entre les territoires urbains et les territoires ruraux.

Alors que la loi du 4 février 1995 était inspirée par une vision statique qui se bornait à décliner au plan local un schéma pensé à l'échelon national, ce projet tente au contraire de confronter les besoins dans une démarche dynamique et de mettre en place une réponse cohérente à travers les schémas de services collectifs.

Le pays, notion fondamentale, se voit précisé. Mais, a souligné M. Patrick Rimbert, celui-ci doit être compris comme une structure de projet assise sur un territoire et non comme une nouvelle institution qui viendrait s'ajouter à des échelons déjà nombreux.

S'agissant enfin du respect de l'environnement, ce projet de loi doit permettre, eu égard aux responsabilités des générations actuelles vis-à-vis des générations futures, d'assurer un développement économique durable, c'est-à-dire respectueux du milieu naturel dans lequel il s'insère.

M. Jean-Claude Daniel a jugé cette loi à la fois utile et nécessaire.

Elle marque d'abord une nouvelle étape dans une politique de décentralisation que la loi de 1995 avait échoué à moderniser. Elle se situe au confluent d'une logique de projet entre des hommes et des territoires, entre le développement économique et social et le respect dû à la préservation de l'environnement, d'une part, et d'une logique d'équité garantissant aux citoyens l'effectivité du pacte républicain à tout endroit du territoire, d'autre part.

Aux éléments qui structurent ce système -les communes, les établissements publics de coopération intercommunale et les agglomérations- viennent s'ajouter les dispositifs souples et adaptables que sont les pays et les parcs naturels régionaux.

Le renforcement de la contractualisation doit être salué, car il constitue l'élément nécessaire d'une politique d'aménagement du territoire dont l'échelon régional est le pivot. Il restera naturellement à préciser le rôle des départements qui sont un élément indispensable de la conception et du financement de cette politique.

Il convient de réaffirmer le rôle de l'Etat et ses missions de service public, dont les règles générales seront fixées dans le cadre des schémas de services collectifs.

Il faut enfin, pour éviter une réédition de l'échec de la loi de 1995, que l'articulation des différentes structures - schémas de services collectifs, schémas régionaux d'aménagement du territoire, contrats de plan Etat-régions, zonages européens - soit nettement précisée et qu'un calendrier ordonné d'application du texte soit rapidement présenté.

M. Jean Proriol a fait remarquer que la gestation du projet de loi sur l'aménagement et le développement durable du territoire avait été particulièrement délicate. Notant que certaines dispositions de ce projet de loi étaient inscrites aussi dans d'autres textes et notamment dans le projet de loi relatif à l'organisation urbaine et à la simplification de la coopération intercommunale, il s'est demandé si l'intégration de ces dispositions dans un seul texte n'aurait pas été préférable. Il a observé ensuite que le présent projet de loi ne modifie certes que partiellement le dispositif de la loi du 4 février 1995, une vingtaine d'articles seulement de ce dernier texte étant concernée, mais la désarticule. Il a tenu à rendre hommage aux qualités de M. Patrick Ollier, qui fut le rapporteur de ce projet de loi.

Il a regretté que le Gouvernement ait renoncé au schéma national d'aménagement du territoire, qui constituait un indispensable instrument de cohérence de la politique d'aménagement du territoire, puis il a souligné le recul dans le mouvement de décentralisation que représentaient les nouveaux pouvoirs reconnus aux préfets, notamment en matière de reconnaissance des pays. Le problème de la superposition des périmètres des parcs naturels régionaux et des pays est une question importante qui mérite d'être débattue.

S'agissant du financement des mécanismes mis en place par le projet de loi, il est essentiel de noter que, dans le projet de loi de finances pour 1999, les crédits consacrés à l'aménagement du territoire sont en recul par rapport à ceux de l'année précédente. Par ailleurs, la logique de péréquation financière, au c_ur de la politique d'aménagement du territoire, semble oubliée. Le projet de loi affiche ainsi peut être des ambitions, mais il n'a pas les moyens de les satisfaire.

Divers organismes qui se sont exprimés sur le texte ont fait d'ailleurs part de leurs perplexités, sinon de leurs inquiétudes, qu'il s'agisse du Conseil économique et social, des groupements écologistes, des chambres d'agriculture, des départements ou encore des parcs naturels.

M. Jean Proriol a jugé positif le contenu de l'article du projet de loi qui traite de l'agglomération et observé, s'agissant des pays, que leur capacité à contractualiser suppose qu'ils se soient constitués soit en syndicat mixte, soit en établissement public de coopération intercommunale. En toute hypothèse, il a estimé nécessaire que le pays ne devienne pas un échelon administratif supplémentaire.

Il a observé que la mise en _uvre du projet de loi risquait d'être aussi difficile que celle de la loi du 4 février 1995. On ne peut que regretter que le calendrier de la discussion ait été précipité, que le mouvement de décentralisation paraisse aujourd'hui s'essouffler, alors qu'il serait nécessaire d'aller plus loin. Il faut tout au contraire conduire une politique volontariste d'aménagement du territoire, prendre aussi mieux en compte les spécificités des zones rurales, notamment des territoires de montagne et donner un caractère plus démocratique à notre organisation territoriale ainsi qu'à la procédure d'élaboration des schémas de services collectifs.

M. Yves Coussain a regretté que le projet de loi semble marquer une véritable rupture avec la loi du 4 février 1995. Celle-ci était ambitieuse, fixant à la fois des règles et des objectifs précis, en sorte, qu'en deux années, des évolutions positives ont pu être observées, qu'il s'agisse de la mise en place de fonds de péréquation ou de certains zonages. A l'inverse, le présent projet de loi ne contient pas d'objectifs clairs, ne donne pas de véritable contenu aux schémas de services collectifs et oublie la dimension nationale.

Il est ainsi indispensable que le projet de loi soit sérieusement amendé dans le but de permettre que des chances égales pour l'accès aux services collectifs soient reconnues à tous, qu'une véritable péréquation financière soit mise en _uvre et que soient évitées les complications dans la définition de la notion de pays.

M. Claude Hoarau s'est demandé de quel territoire traitait le projet de loi. Si l'on a à l'esprit le territoire " national ", il faut alors envisager aussi l'aménagement territorial des départements d'outre-mer. L'article 2 du projet de loi indique certes que ceux-ci doivent bénéficier d'un soutien, mais il est indispensable d'aller au-delà et d'intégrer les départements d'outre-mer dans leur environnement et dans l'ensemble national. Un projet de loi devrait être prochainement présenté qui comportera des dispositions spécifiques, éventuellement dérogatoires, de nature à favoriser le développement de nos départements d'outre-mer.

M. Claude Hoarau a fait part de son intention de présenter des amendements car les mesures proposées par le projet de loi actuellement en cours d'examen ne sont pas toutes adaptées aux départements d'outre-mer. A cet égard, il a rappelé la spécificité du schéma d'aménagement des régions d'outre-mer, document prescriptif, déjà mis en application à la Réunion, par rapport au schéma régional d'aménagement du territoire.

M. Serge Poignant a remarqué que le rôle de l'État, tel qu'il était prévu dans le projet de loi, méritait discussion. Il a rappelé que la loi du 4 février 1995 prévoyait la mise en place d'un schéma national d'aménagement du territoire et le renforcement de la décentralisation, alors que le texte proposé fait exactement l'inverse. En outre, celui-ci n'organise pas d'efforts de péréquation financière entre les régions.

Ainsi, a-t-il a observé, des responsabilités nouvelles sont confiées aux préfets de région dans le cadre d'un mouvement de simple déconcentration.

Il a estimé que les départements devaient avoir toute leur place et qu'il fallait éviter un " empilement " des structures. Il a enfin souligné qu'il importait de faire évoluer le texte dans le sens d'une plus grande souplesse et d'un renforcement de la démocratie.

M. Léonce Déprez a estimé que le projet de loi présentait de multiples faiblesses qu'il fallait corriger. Il a fait remarquer que la suppression du schéma national d'aménagement du territoire prévu dans la loi du 4 février 1995 n'était pas comprise localement et que le remplacement de ce schéma unique par des schémas de services collectifs ne paraissait pas satisfaisant. Il a regretté qu'il n'y ait pas de schéma de services collectifs spécifique à la justice alors qu'il s'agit d'un secteur dont le développement est essentiel. Il a estimé ensuite que le souci de prise en considération des pays pouvait être sans effet si les agglomérations reconnues peuvent se substituer aux pays, dès lors que l'on abaisse le seuil démographique nécessaire à leur constitution.

Il a jugé que les conférences régionales de l'aménagement et du développement du territoire ne seraient pas nécessairement plus en mesure de reconnaître les " pays " que les commissions départementales de coopération intercommunales qui ont, quant à elles, apporté la preuve de leur capacité à juger de la pertinence des territoires.

Il a souligné le risque, pour les parcs naturels régionaux, de voir certaines de leurs compétences reprises par les structures de coopération intercommunale couvrant les pays, ce qui entraînerait certains conflits de pouvoir. Il a relevé que la politique d'aménagement du territoire ne peut être l'addition de huit schémas régionaux d'aménagement du territoire. Il a critiqué la multiplication des fonds déjà prévue dans la loi du 4 février 1995 mais accentuée dans le projet de loi et souhaité que soit mis en place un fonds unique comportant plusieurs sections. Enfin il a estimé que l'articulation entre les mesures de la loi du 4 février 1995 qui sont maintenues et les mesures nouvelles proposées n'était pas suffisamment expliquée dans l'exposé des motifs.

M. Eric Doligé a tout d'abord estimé que le projet de loi devrait clarifier le rôle des collectivités territoriales. Il a considéré que la mise en place hâtive de procédures favorisant l'intercommunalité risquait d'aboutir à priver les communes, parfois contre leur gré, de certaines de leurs compétences. Cette orientation peut conduire à amplifier la lassitude actuellement constatée chez nombre d'élus locaux, qui déclarent ne pas souhaiter briguer un nouveau mandat lors des prochaines élections municipales.

Il a également souhaité que le Parlement et les acteurs locaux de l'aménagement du territoire soient associés à l'élaboration des schémas de services collectifs. Il a souligné la nécessité d'une cohérence entre le présent projet de loi et celui relatif à l'organisation urbaine et à la simplification de la coopération intercommunale.

Il a enfin regretté le manque de clarification dans la répartition des compétences entre le ministère chargé de l'équipement et celui de l'aménagement du territoire.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont a relevé que le projet de loi ne constituait pas une remise en cause a priori des dispositions de la loi du 4 février 1995. Ainsi, une vingtaine d'articles seulement du projet modifie les dispositions de la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, qui en comporte quatre-vingt huit. Elle a cependant considéré que ce projet appréhendait de manière plus globale que la loi du 4 février 1995 la notion d'aménagement du territoire, corrigeant la vision trop rurale du texte précédent et s'attachant au problème des agglomérations et des zones urbaines sensibles.

Elle a fustigé les précédentes interventions, prenant prétexte de la faiblesse des crédits de l'aménagement du territoire dans le projet de loi de finances pour 1999 pour mettre en cause la volonté de la majorité dans ce domaine. Elle a rappelé à ce sujet, d'une part, que les crédits pour l'année en cours n'avaient pas été totalement utilisés, d'autre part, que les efforts consentis par l'Etat en faveur de l'aménagement du territoire n'étaient pas inscrits dans leur totalité au sein des seules dotations du ministère en charge de cette responsabilité.

Evoquant sa participation, en sa qualité d'élue locale, à des réunions de concertation lors de l'élaboration de la loi du 4 février 1995, elle a formé le voeu que les députés travaillent en commun à améliorer cet important projet de loi.

M. Jean-Claude Lenoir a rappelé que la ministre en charge de l'aménagement du territoire avait tenu, lors d'une récente séance de questions au Gouvernement à l'Assemblée nationale, des propos inquiétants à l'égard de l'avenir des zones rurales. Il a quant à lui porté un jugement qu'il a qualifié de sévère sur le contenu d'un projet de loi, qu'il estime tout à la fois déséquilibré et confus.

Ce projet de loi, a-t-il ajouté, intervient de manière intempestive dans un domaine où les textes ont besoin de temps pour entrer pleinement en application. Observant que la loi d'orientation du 6 février 1992 relative à l'administration territoriale de la République n'avait vraiment entraîné la création de structures intercommunales à fiscalité propre qu'à partir de 1994-1995, il a rappelé que les gouvernements qui se sont succédé à compter de 1993 avaient fait preuve d'une grande prudence dans ce domaine, en refusant de remettre en cause un dispositif à peine établi.

Il a considéré qu'il aurait dû en être de même dans le cas de la loi du 4 février 1995. Celle-ci n'est d'ailleurs pas restée lettre morte, puisque de nombreux pays ont été mis en place, mais d'autres projets sont gelés du fait de l'incertitude qui résulte du dépôt de l'actuel projet de loi. Il a souhaité sur ce point obtenir des précisions quant aux possibilités de restructuration territoriale des pays déjà créés.

Il a en outre estimé qu'il aurait été peut être plus cohérent d'inscrire à l'ordre du jour de la séance publique le projet de loi relatif à l'organisation urbaine et à la simplification de la coopération intercommunale avant le présent projet.

Il a considéré que ce projet créait un déséquilibre entre les villes et les zones rurales, les agglomérations étant dotées de moyens et d'outils tandis que les pays étaient réduits à n'être qu'une structure de réflexion.

Il s'est inquiété des risques d'attraction que pourraient exercer les agglomérations vis-à-vis de leur périphérie rurale, ce qui conduirait à affaiblir les autres zones rurales. Il s'est insurgé contre l'idée selon laquelle les activités devaient se concentrer dans les zones urbaines, les zones rurales étant réduites à se cantonner dans un rôle de territoires de loisir ; les créations d'emploi sont au contraire particulièrement dynamiques à la campagne.

Relevant des avancées intéressantes dans l'évolution des compétences des parcs naturels régionaux, il a estimé que ceux-ci ne devaient pas néanmoins être un frein à la création de pays et qu'il faudrait amender le texte du projet en conséquence.

Il a enfin estimé que la réussite d'une politique d'aménagement du territoire impliquait la pleine association des régions et des départements. Il a regretté que, dans le projet de loi, le rôle des premières ne soient pas suffisamment défini, tandis que les seconds en sont absents.

M. François Dosé a souhaité que le projet de loi conduise à réussir l'aménagement du territoire, en renforçant l'efficacité de ses dispositifs et en assurant une véritable solidarité territoriale. Il a souhaité que le texte soit amélioré sur plusieurs points. Il conviendrait notamment de renforcer les instruments tendant à réduire la fracture territoriale et d'améliorer la démocratie territoriale.

M. Anicet Turinay a regretté que les éléments contenus dans le projet de loi soient insuffisants pour fonder juridiquement des mesures spécifiques répondant aux exigences de développement des départements d'outre-mer. En effet, ce projet mentionne les DOM comme zones prioritaires ultrapériphériques (ZPU), sans pour autant fournir le contenu de cette reconnaissance. C'est pourquoi le projet constitue un recul important pour l'outre-mer, par rapport au cadre existant, même s'il est vrai que les dispositions pertinentes de la loi du 4 février 1995 n'ont jamais été mises en application.

Il a évoqué deux approches possibles pour améliorer le texte sur ce point. La première consisterait à y introduire à l'article 25 une référence qui renvoie à une loi spécifique à l'outre-mer le contenu détaillé de mesures concernant les ZPU. La seconde conduirait à introduire directement dans ce projet des mesures en faveur des DOM, telles que l'adaptation de la prime d'aménagement du territoire, l'extension du bénéfice des zones de revitalisation rurale (ZRR) ou des mesures en faveur du désenclavement. Compte tenu des difficultés que risque de rencontrer une telle approche, il s'est prononcé en faveur de la première option.

M. Paul Patriarche a rappelé qu'en France continentale 20 % de la population se concentraient sur 80 % du territoire, et qu'en Corse 6 % d'habitants occupaient 90 % de l'espace. Il a estimé que l'on ne pouvait pas dès lors traiter de la même façon les zones défavorisées et les autres, si l'on voulait aboutir à une égalité des chances en matière d'aménagement du territoire.

L'idée d'un accès aux services publics, dans les zones peu peuplées, par le moyen des nouvelles technologies de télécommunication lui paraît inadaptée à des territoires habités par une population âgée.

Il a considéré que, s'agissant de la Poste en zone rurale, l'Etat envisageait de se décharger de ses obligations sur les petites communes, qui devraient financer les équipements et supporter une partie des coûts d'exploitation. Evoquant la désertification des campagnes, souvent liée aux fermetures d'écoles, il a estimé que les mesures dites de " reconquête écologique " étaient parfaitement inadaptées à l'objectif de maintien des populations.

En conclusion, M. Paul Patriarche a déploré la suppression du schéma national d'aménagement et de développement du territoire qui aura pour conséquence un manque de cohérence de l'action publique et a vivement souhaité un effort supplémentaire en faveur du monde rural.

M. François Brottes s'est réjoui du caractère ouvert du projet de loi. Celui-ci constitue une bonne base de travail et respecte le Parlement et ses capacités d'initiative. Il tisse une trame comportant quatre aspects principaux : une dimension verticale, avec les schémas de services collectifs, une vision horizontale avec les parcs naturels, les pays et les agglomérations, un volet européen marqué, et enfin un contenu humain, avec la définition de territoires de projets.

Il a considéré que le travail parlementaire devrait permettre d'étoffer ce projet de loi. Il devrait également garantir que l'aménagement du territoire sera mené sur l'ensemble de celui-ci.

M. Pierre Ducout, tout en admettant que l'application des lois, telles que les lois du 6 février 1992 ou du 4 février 1995, demandait du temps, a estimé que ce projet arrivait à un moment propice. Il est en effet indéniable que la loi du 4 février 1995 a une tonalité trop rurale.

Il a relevé que le projet de loi instituait plusieurs niveaux de développement de la politique d'aménagement du territoire : celui des métropoles de dimension européenne, qui permettrait de rétablir un certain fédéralisme qui avait existé autrefois dans notre Etat, et qui existe actuellement en Allemagne ou au Royaume-Uni, celui des agglomérations et celui des pays en veillant à éviter la dissolution de ceux-ci dans les agglomérations.

Il a estimé qu'il conviendra d'apporter un soutien spécifique aux territoires en grande difficulté, tels que certains quartiers des villes, ou les zones isolées de montagne.

Il a considéré qu'en coordination avec le projet de loi relatif à l'organisation urbaine et à la simplification de la coopération intercommunale, qui renforcera la décentralisation, il convient d'agir en faveur d'un développement équilibré du territoire. Dans ce cadre, l'Etat devra apporter des moyens compensant la réduction prévisible des contributions européennes.

M. Philippe Duron, rapporteur, a indiqué, en réponse aux intervenants, qu'à son avis le projet de loi ne constituait pas une rupture avec la loi du 4 février 1995 car une évolution de la politique d'aménagement du territoire était déjà perceptible dès les années 1990 : avec la mise en place des contrats de plan Etat-régions, l'Etat n'était plus le seul acteur de cette politique et avec la loi du 4 février 1995 a été recherchée la définition de nouveaux territoires pertinents, même si celle-ci s'est un peu trop axée sur les territoires ruraux. Il a rappelé que le gouvernement d'Alain Juppé n'avait pas mis en _uvre ce texte, que le gouvernement de M. Lionel Jospin avait indiqué dès le 19 juin 1997 sa volonté de réouvrir le dossier, et que le projet de loi actuel s'inscrivait dans la continuité de cette évolution.

Il a indiqué que le schéma national d'aménagement et de développement du territoire s'étant révélé impossible à construire et que les données économiques ayant changé, son remplacement par huit schémas de services collectifs s'inscrivait dans une autre logique. Il a reconnu cependant qu'il conviendrait de mieux la préciser. Il a ajouté que la politique volontariste d'aménagement du territoire n'avait pas empêché le dépeuplement de certains territoires et estimé que le texte actuel inspiré par une logique de projets s'appuyant sur les besoins des populations serait mieux à même de répondre à leurs problèmes.

Il a observé qu'il avait déposé plusieurs amendements visant à réintroduire l'idée d'égalité des chances et d'égal accès aux services publics ainsi que de la nécessité d'une péréquation. Il a indiqué qu'il avait également procédé à la réécriture de l'article 2 qui semblait induire une hiérarchisation des différents territoires, de manière à mieux prendre en compte le devenir des zones rurales.

S'agissant des pays, il a souligné que, désormais, si la délimitation de leur périmètre appartient aux préfets de régions, c'est parce que la région est la maille territoriale adaptée à une politique d'aménagement du territoire mais il a relevé que la décision du préfet n'intervenait qu'après avis conforme des conférences régionales d'aménagement du territoire où siègent des élus régionaux et départementaux. Il a insisté sur la nécessité de réaffirmer la prééminence des élus dans la constatation des pays.

Il a rappelé que le pays subissait deux types de critiques, celle de risquer de devenir une strate administrative ou politique supplémentaire, et en sens inverse celle de ne pas être assez structuré pour bénéficier de dotations intéressantes comme les agglomérations. Il a insisté sur le fait que le pays ne doit se structurer que dans l'optique d'une contractualisation et que sa constitution en syndicat mixte ou EPCI ne vise qu'à assurer une transparence financière qui est de nature à protéger les élus. Il s'est inquiété du problème posé par la fixation d'un seuil pour les agglomérations, estimant que celui-ci devrait être assez élevé pour éviter le risque d'une dévitalisation des pays entourant l'agglomération. Il a souligné l'importance d'une cohérence entre le texte sur l'aménagement du territoire et celui sur l'intercommunalité.

Il a souligné la nécessité d'une clarification du problème de la superposition des périmètres entre parcs naturels régionaux et pays dans le souci de concilier à la fois la pérennité de ces parcs et les intérêts des collectivités situées à leur frange.

Il a estimé qu'il faudrait également s'attaquer au problème de la démocratie locale qui ne s'exerce parfois qu'au deuxième ou troisième degré mais il a considéré qu'il serait préférable de traiter de cette matière lors de l'examen du projet de loi sur l'intercommunalité.

III.- EXAMEN DES ARTICLES

Article premier

(article 1er de la loi n° 95-115 du 4 février 1995)

Principes de la politique d'aménagement
et de développement durable du territoire

Cet article remplace l'article premier de la loi du 4 février 1995. Il définit de manière très générale les principes fondamentaux de la politique d'aménagement et de développement durable du territoire et précise la valeur juridique des schémas de services collectifs.

1. La nouvelle définition de la politique d'aménagement du territoire

L'article premier introduit plusieurs changements majeurs par rapport à la définition de la politique d'aménagement et de développement du territoire retenue à l'article premier de la loi du 4 février 1995 :

- En premier lieu, la politique d'aménagement et de développement du territoire est consacrée comme une politique d'aménagement et de développement durable.

L'idée de développement durable qui est inhérente à l'ensemble du projet de loi est ainsi affirmée dès l'article premier comme l'élément nouveau et moteur de la politique d'aménagement du territoire et ses trois dimensions économique, mais aussi sociale et environnementale sont soulignées.

- Le projet de loi inscrit la politique d'aménagement et de développement durable du territoire dans une dimension européenne, en précisant qu'elle participe à la construction européenne et que l'Etat favorise la prise en compte des choix stratégiques de cette politique dans la politique européenne de cohésion économique et sociale.

- Il réaffirme les priorités de la politique gouvernementale que sont la création d'emplois, l'accroissement de la justice sociale, la réduction des inégalités territoriales, et la préservation des ressources et des milieux.

- Il annonce les choix stratégiques de la politique nationale d'aménagement et de développement durable du territoire qui sont définis à l'article 2.

- Il introduit la notion de schémas de services collectifs dont les objectifs sont la traduction des choix stratégiques de la politique d'aménagement du territoire.

- Il mentionne le rôle majeur de l'Etat dans la politique d'aménagement et de développement durable du territoire puisque c'est à l'Etat qu'il appartient de déterminer cette politique à l'échelon national, après avoir consulté l'ensemble des partenaires intéressés et associé les citoyens à son élaboration et à sa mise en _uvre.

- Il réaffirme clairement la nécessité de respecter les principes de la décentralisation.

- Il fait de l'Etat le garant du respect des choix stratégiques et des objectifs des schémas de services collectifs aussi bien dans la mise en _uvre de toutes ses politiques publiques que dans l'allocation des ressources budgétaires et dans le contenu des contrats de plan.

Le rapporteur se félicite de la reconnaissance de ces différents principes mais a proposé que trois notions supplémentaires soient prises en compte par les objectifs d'une politique d'aménagement et de développement durable du territoire :

- l'égal accès de chaque citoyen aux services publics sur l'ensemble du territoire ;

- la réduction des écarts de ressources entre collectivités territoriales au moyen d'une péréquation de leurs ressources en fonction de leurs charges et d'une modulation des aides publiques ;

- l'affirmation de la nécessité d'une mise en cohérence de cette politique avec la politique d'aménagement de l'espace communautaire.

Lors de l'examen de cet article par la commission, un amendement de suppression de cet article, présenté par M. Patrick Ollier, a tout d'abord été examiné. L'auteur de l'amendement a indiqué que le texte du projet de loi reflétait une vision restrictive de la politique d'aménagement du territoire et a mis l'accent sur l'absence d'éléments aussi essentiels que l'égalité des chances, la réduction des écarts de ressources entre les collectivités territoriales, la compensation des handicaps géographiques ou l'égal accès au service public sur le territoire. Il a également souligné qu'une phase de concertation préalable d'un an environ avait précédé l'élaboration du projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire (LOADT) afin de répondre aux aspirations des Français, ce qui n'était pas le cas pour le projet de loi soumis à l'examen de la commission. Après que le président André Lajoinie eut rappelé que la commission et le rapporteur avaient procédé à de nombreuses auditions, le rapporteur a souligné que la rédaction de l'article pouvait être améliorée pour réparer certains oublis ou corriger certaines maladresses. Il s'est prononcé contre l'amendement de suppression en indiquant qu'il proposait à la commission d'adopter plusieurs amendements répondant au souci exprimé par M. Patrick Ollier. Après l'intervention de M. Jean-Michel Marchand, la commission a rejeté l'amendement de suppression de l'article premier ainsi qu'un amendement de M. Patrick Ollier ayant pour objet de maintenir la définition de la politique d'aménagement et de développement du territoire de l'article premier de la loi du 4 février 1995.

Puis, elle a examiné deux amendements soumis à discussion commune, le premier présenté par le rapporteur, le second par M. Jean-Michel Marchand, visant à insérer au début de l'article premier les objectifs inscrits au troisième alinéa et à préciser la stratégie de développement durable. Après les interventions du rapporteur, de M. Jean-Jacques Filleul et de M. Jean-Michel Marchand, la commission a adopté l'amendement du rapporteur, sous-amendé par M. Félix Leyzour pour préciser que la politique de l'aménagement du territoire s'inscrivait dans un cadre national (amendement n° 237), celui de M. Jean-Michel Marchand devenant sans objet.

La commission a ensuite examiné les amendements identiques n° 24 de M. Michel Bouvard et n° 32 de M. Patrick Ollier et un amendement de M. Jean Proriol visant à préciser que l'objectif fondamental de la politique d'aménagement du territoire était la réduction des inégalités territoriales, trois amendements de M. Pierre Micaux visant à donner la priorité au développement économique et à préciser que la politique d'aménagement concerne le territoire national, un amendement de M. Jean-Michel Marchand et un amendement du rapporteur ayant pour objet de réécrire le premier alinéa de l'article en vue d'y intégrer notamment l'égal accès des citoyens au service public, la réduction des écarts de richesses entre les collectivités territoriales et la réduction des inégalités territoriales. Après les interventions de M. Patrick Ollier, du rapporteur, de M. Christian Jacob et de M. Félix Leyzour, la commission a adopté l'amendement du rapporteur (amendement n° 238), et rejeté en conséquence les amendements n° 24 de M. Michel Bouvard et n° 32 de M. Patrick Ollier ainsi que les amendements présentés par MM. Pierre Micaux, Jean Proriol et Jean-Michel Marchand.

Un amendement de M. Yves Coussain ayant le même objet que le sous-amendement de M. Félix Leyzour a été retiré de même qu'un amendement de M. Félix Leyzour tendant à préciser que le développement du territoire devait être équilibré.

La commission a également rejeté, comme devenus sans objet :

- l'amendement n° 61 de M. Léonce Deprez tendant à substituer la notion de valorisation à celle de protection de l'environnement, après les interventions du rapporteur, de MM. Christian Jacob, Patrick Ollier, Jean-Michel Marchand et Patrick Rimbert ;

- un amendement de M. Patrick Ollier visant à préciser dans le premier alinéa de l'article que la politique d'aménagement du territoire devait créer des conditions favorables à la création de richesses et donc de l'emploi ;

- un amendement de M. Félix Leyzour visant à préciser l'objectif de réduction des inégalités entre les territoires et les disparités financières entre les collectivités territoriales ;

- l'amendement rédactionnel n° 62 de M. Léonce Deprez ;

- un amendement de M. Pierre Micaux visant à supprimer la référence à la coopération entre l'Etat, les collectivités territoriales, les organismes publics et les acteurs économiques et sociaux ;

- un amendement de M. Jean Proriol tendant à mentionner les chambres consulaires dans ce dispositif.

Puis, la commission a examiné un amendement de M. Félix Leyzour tendant à insérer, après le premier alinéa de l'article un nouvel alinéa prévoyant que, dans un délai d'un an à compter de la publication de la loi, le gouvernement proposera les modalités de mise en place de fonds régionaux pour l'emploi et le développement.

M. Félix Leyzour ayant indiqué qu'il souhaitait que l'on puisse ainsi étudier la mise en place de fonds destinés au développement économique dans les régions, le rapporteur a déclaré partager cette idée tout en émettant des réserves sur l'insertion de cet amendement dans l'article premier du projet de loi. M. Patrick Ollier a indiqué qu'un tel dispositif avait été proposé lors de l'examen du projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire (LOADT) et souhaité savoir si les fonds régionaux mobiliseraient des capitaux privés aux côtés de financements publics. Après les interventions de M. Patrick Rimbert, de M. Patrick Ollier, de M. Félix Leyzour et du rapporteur, la commission a décidé de réserver l'examen de cet amendement.

Elle a ensuite rejeté un amendement de M. Pierre Micaux visant à mentionner le caractère national de la politique d'aménagement du territoire et un amendement de M. Patrick Ollier y intégrant la préservation de l'intérêt général.

Puis, elle a examiné un amendement du rapporteur visant à préciser au troisième alinéa de l'article premier que la politique d'aménagement du territoire est menée en cohérence avec la politique d'aménagement de l'espace communautaire. M. Philippe Duron, rapporteur, a indiqué que l'amendement avait pour objet de prendre en compte les effets des politiques européennes, notamment celle des fonds structurels. M. Christian Jacob a jugé cette précision inopportune, soulignant que les règlements et directives s'appliqueraient et qu'il lui semblait inutile de rappeler systématiquement que les politiques nationales devaient s'inscrire dans le cadre européen. M. Patrick Ollier s'est également montré réservé sur cet amendement en soulignant qu'il n'existait pas de politique européenne de l'aménagement du territoire, les fonds structurels n'étant que des instruments financiers. M. Jean-Jacques Filleul a fait observer que la rédaction proposée par le rapporteur ne devait pas obérer la capacité de définir une politique nationale d'aménagement du territoire. Le président André Lajoinie a souligné que le terme de cohérence lui semblait à la fois fort et ambigu. Souhaitant que l'on puisse trouver la même cohérence entre les régions et l'Etat qu'entre l'Etat et l'Union européenne, M. Jean-Michel Marchand s'est déclaré favorable à l'amendement. M. Félix Leyzour a suggéré que l'amendement prévoie une liaison entre politique nationale et communautaire, sans aller jusqu'à la mise en cohérence proposée par le rapporteur, M. Patrick Rimbert que l'on y substitue l'expression d'un souci de cohérence et M. Jacques Pélissard que l'amendement soit inséré au début du quatrième alinéa de l'article premier. Après les interventions de MM. François Brottes, Christian Jacob, Serge Poignant et Félix Leyzour, l'amendement a été retiré.

La commission a ensuite adopté un amendement du rapporteur visant à supprimer la deuxième phrase du troisième alinéa de l'article premier et examiné un amendement du même auteur proposant une nouvelle rédaction du quatrième alinéa. Après les interventions du rapporteur et de M. Claude Hoarau, le rapporteur a rectifié son amendement en vue d'y intégrer la première phrase du troisième alinéa de l'article et d'améliorer la rédaction du dispositif. La commission a alors adopté ces amendements ainsi rectifiés (amendements nos 240 et 239). En conséquence, elle a considéré comme étant devenus sans objet :

- un amendement de M. Jean Proriol visant à garantir que la politique déterminée par l'Etat n'entrave pas les compétences des collectivités territoriales ;

- un amendement de M. Jean-Michel Marchand visant à introduire le principe de subsidiarité, cet amendement ayant été retiré par son auteur après les interventions du rapporteur, de M. Patrick Ollier et de M. Gabriel Montcharmont ;

- un amendement de M. Jean-Michel Marchand tendant à remplacer la consultation par la concertation des partenaires intéressés, après les interventions du rapporteur, de M. Félix Leyzour, de M. Patrick Ollier et de M. Joseph Parrenin ;

- l'amendement n° 119 de Mme Sylvia Bassot et un amendement identique de M. Eric Doligé précisant que l'Etat et les collectivités territoriales exercent en ce domaine une mission partagée ;

- un amendement de M. Jean-Michel Marchand visant à réinsérer le principe de la libre administration des collectivités territoriales ;

- un amendement de M. Eric Doligé visant à préciser les transferts de compétences issues des lois de décentralisation ;

- un amendement de M. Jean Proriol tendant à insérer dans la première phrase du quatrième alinéa le principe de péréquation.

Elle a également rejeté un amendement de M. Jean Proriol visant à prévoir la consultation des citoyens sur l'élaboration, la mise en oeuvre et l'évaluation des projets d'aménagement du territoire ainsi que l'amendement n° 120 de Mme Sylvia Bassot visant à prendre en compte les transferts de compétences issus des lois de décentralisation.

2. La valeur juridique des schémas de services collectifs

Les derniers alinéas de cet article ont pour objet de préciser la valeur juridique des schémas de services collectifs.

Ce ne sont pas des schémas, du type schémas directeurs, en ce sens qu'ils ne sont pas contraignants. Elaborés dans une perspective de vingt ans, ils énoncent un ensemble de principes directeurs, d'objectifs et de procédures déclinables à court, moyen et long termes. Ils comprennent également les actions à engager à court terme, les projets à réserver à moyen terme et les enjeux restant à examiner. Ils analysent les différentes modalités possibles d'intervention publique en identifiant les zones de carence.

De façon générale, ils définissent plus une obligation de résultat que de moyens.

L'avant dernier alinéa de cet article précise donc que les politiques publiques nationales, et l'allocation des ressources budgétaires s'inspirent, dans leur déclinaison territoriale, des schémas de services collectifs.

De même, les contrats conclus par l'Etat avec des collectivités territoriales et leurs groupements ainsi qu'avec des personnes morales de droit public ou privé (établissements et organismes publics, entreprises nationales...) doivent tenir compte des schémas de services collectifs.

Enfin, l'Etat doit favoriser leur prise en compte dans la politique européenne de cohésion économique et sociale.

Ces schémas de services collectifs orientent donc les politiques contractuelles ainsi que les politiques publiques. Ces dernières sont cependant suffisamment diverses pour que ces schémas revêtent des caractéristiques différentes et une portée normative variable.

Enfin, au niveau territorial français, les schémas de services collectifs :

- servent de cadre de référence à l'action des collectivités territoriales et de leurs groupements, des agglomérations, des pays et des parcs naturels régionaux ;

- s'imposent aux schémas régionaux d'aménagement et de développement du territoire puisque ces derniers doivent être compatibles avec eux.

Lors de l'examen de ces derniers alinéas, la commission a rejeté :

- un amendement de M. Jean Proriol visant à réduire de vingt à sept années la perspective des choix stratégiques définis par les schémas de services collectifs prévus à l'article 2 du projet de loi ;

- l'amendement n° 63 de M. Léonce Deprez visant à préciser que les schémas de services collectifs constituaient le schéma national d'aménagement et de développement du territoire ;

- un amendement de M. Pierre Micaux précisant que les crédits budgétaires devaient être déconcentrés ;

- un amendement de M. Pierre Micaux visant à réaffirmer le principe de la décentralisation ;

- un amendement de M. Jean Proriol tendant à préciser que les choix stratégiques de l'Etat sont un cadre de référence indicatif pour l'action des collectivités territoriales ;

- un amendement de M. Jean Proriol supprimant la dernière phrase du dernier alinéa de l'article premier qui prévoit la compatibilité entre les schémas régionaux d'aménagement et de développement du territoire et les schémas de services collectifs ;

- l'amendement n° 64 de M. Léonce Deprez tendant à considérer les schémas de services collectifs comme schéma national d'aménagement et de développement durable du territoire.

La commission a ensuite adopté l'article premier ainsi modifié.

Article 2

(article 2 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995)

Choix stratégiques de la politique d'aménagement et de développement durable du territoire

Cet article définit les objectifs et les moyens de la politique d'aménagement et de développement durable du territoire et remplace l'article 2 de la loi du 4 février 1995 qui définissait le schéma national d'aménagement et de développement du territoire (SNADT).

1. Abandon du schéma national d'aménagement du territoire

Le schéma national d'aménagement du territoire devait fixer les orientations fondamentales en matière d'aménagement du territoire, d'environnement et de développement durable, établir les principes régissant la localisation des grandes infrastructures de transport, des grands équipements, et des services collectifs d'intérêt national et déterminer la manière dont les différentes politiques de l'Etat concourent à la réalisation de ces orientations et à la mise en _uvre de ces principes.

Le projet de SNADT devait être, avant son adoption par le Parlement, soumis pour avis aux régions, aux départements ainsi qu'aux principales organisations représentatives des communes urbaines et rurales et des groupements de communes.

Le SNADT a été préparé dans les conditions fixées par des circulaires du 25 août 1995. La synthèse des travaux menés dans les régions et dans les ministères ainsi qu'au sein de groupes transversaux nationaux, animés par le commissariat général du plan, a contribué à nourrir les réflexions de cinq commissions thématiques nationales. Ces commissions thématiques présidées par des parlementaires membres du SNADT et regroupant des élus nationaux et locaux, des partenaires économiques et sociaux, des personnes qualifiées et des représentants des administrations centrales et territoriales ont formulé des propositions qui ont conduit à l'élaboration d'un avant-projet approuvé par le précédent gouvernement au CIADT d'Auch, le 10 avril 1997.

L'actuel gouvernement a remis en cause cet avant-projet, estimant qu'il ne pouvait constituer l'ébauche d'un schéma national.

Cette remise en cause manifeste le souci de s'éloigner d'une vision technocratique de la planification, c'est-à-dire un système descendant " du haut vers le bas ", peu en phase avec les modes de régulation de la société d'aujourd'hui.

Le projet de loi vise à redonner à la politique d'aménagement du territoire des principes fondamentaux clairs et cohérents susceptibles de lui assurer légitimité et continuité, et à permettre la mise au point des outils et des règles organisant un système d'actions collectives fondé sur la coopération entre les différentes catégories d'acteurs publics ou privés qui agissent dans le champ de l'aménagement du territoire.

La commission a d'abord examiné trois amendements de suppression de cet article présentés respectivement par MM. Yves Coussain, Patrick Ollier et Jean Proriol. Ils ont donné lieu à une longue discussion sur les mérites comparés du schéma national d'aménagement du territoire et des schémas de services collectifs.

M. Patrick Ollier a souligné en préambule la différence d'approche entre ce texte et la loi du 4 février 1995. En effet, ce dernier texte recherchait la cohésion nationale de notre politique d'aménagement du territoire. A cette fin, celle-ci était définie par l'Etat puis déclinée par les collectivités territoriales dans leur cadre géographique propre. La loi de 1995 prévoyait certes des schémas sectoriels mais n'omettait pas de mettre en place un fil conducteur national. Or, cette référence est indispensable car plus un Etat décentralise plus le besoin de cohérence nationale est grand. Comment, par exemple, limiter les inégalités entre régions et définir dans ce but des principes de péréquation si les documents de référence en matière d'aménagement du territoire sont sectoriels ?

Les principaux opposants à la mise en oeuvre de la loi du 4 février 1995 étaient les grands responsables des services de l'Etat qui ne pouvaient pas admettre que les élus de la nation décident, dans le cadre d'un schéma national, des grandes orientations qu'eux seuls s'estimaient à même de déterminer. Dans ce débat, M. Charles Pasqua avait donné raison aux élus contre l'administration.

Aujourd'hui, on use du prétexte de l'échec du schéma national pour le supprimer. Cela signifie que le politique n'est pas capable de définir lui-même une politique d'aménagement du territoire. On cède ainsi aux exigences de la technocratie. Mais pour M. Patrick Ollier l'administration ne doit pas avoir raison contre le pouvoir politique. Telle est, selon lui, l'histoire de l'abandon du schéma national qui marque ainsi une grande victoire de la technocratie.

Où et comment seront désormais établies la cohésion de notre politique d'aménagement du territoire et la répartition des richesses et des moyens permettant de réduire la fracture territoriale ? Les schémas sectoriels sont comme des voies de chemin de fer parallèles qui privées de références réciproques ne connaissent pas d'aiguillage.

Reconnaissant l'opposition entre la logique des deux textes, M. Philippe Duron, rapporteur, s'est interrogé sur le point de savoir si l'élaboration d'un schéma national dans une France fortement décentralisée n'était pas un exercice trop difficile.

M. Yves Coussain a estimé que le schéma national était un incontournable instrument de cohérence politique permettant d'établir un lien entre les huit schémas de services collectifs.

M. Eric Doligé a indiqué qu'il existait dans les départements divers plans sectoriels et s'est demandé comment s'établirait la politique départementale en matière de voirie et de transport si celle-ci était laissée à la seule appréciation des communes. A l'échelle du pays, le problème est le même et l'absence d'un schéma national serait préjudiciable pour notre économie. M. Philippe Duron, rapporteur, a fait valoir que la cohérence des schémas collectifs était garantie par le fait qu'ils étaient soumis à la double signature des ministres intéressés et du ministre chargé de l'aménagement du territoire.

Pour M. Joseph Parrenin, la définition de l'aménagement du territoire contenue dans le projet de loi est plus précise que celle inscrite dans la loi du 4 février 1995.

M. Serge Poignant a estimé pour sa part qu'un schéma national permettrait de mieux prendre en compte au niveau européen les exigences de la France en matière d'aménagement du territoire communautaire.

M. Patrick Rimbert s'est déclaré d'accord avec M. Patrick Ollier sur le fait que la politique d'aménagement du territoire doit être déterminée par les élus mais selon lui, leur pouvoir de décision sera plus grand dans le cadre de schémas régionaux. Il ne faut pas placer le débat sur un plan formel -schéma national ou schémas régionaux- mais l'inscrire dans une démarche plus réaliste fondée sur l'accès aux services publics.

Or, le vecteur de la cohérence de notre politique d'aménagement du territoire réside dans l'égalité d'accès aux services publics. Par ailleurs, la prise en compte des objectifs sectoriels sera mieux assurée s'ils font l'objet de schémas spécifiques et ne constituent pas de simples paragraphes du schéma national.

Pour M. Félix Leyzour, il est incontestable qu'il faut une cohérence entre la politique nationale et les schémas régionaux. Le maintien du schéma national proposé par M. Patrick Ollier est une idée certes séduisante, mais qui est desservie par le fait qu'il a été impossible de mettre en place un tel schéma. Il a estimé qu'on ne pouvait pas faire abstraction du contexte préélectoral qui a entouré l'élaboration de la loi du 4 février 1995, celle-ci devant servir de rampe de lancement à la candidature à l'élection présidentielle du Premier ministre de l'époque.

M. Christian Jacob a mis en exergue ce qui apparaissait à ses yeux comme la différence fondamentale entre la loi du 4 février 1995 et le projet de loi présenté devant la commission. Le texte de 1995 établissait un véritable cadre à notre politique d'aménagement du territoire en faisant des choix importants notamment en matière d'implantation des administrations ou de localisation des investissements publics. En revanche, l'actuel projet de loi en reste au stade des pétitions de principe.

Cette opinion n'a pas été partagée par M. Pierre Ducout qui a au contraire estimé que le texte du Gouvernement mettait en oeuvre les schémas dans un cadre clairement défini.

M. Jean-Michel Marchand a déploré les implications centralisatrices sous-tendues par le schéma national, l'actuel projet de loi marquant au contraire une volonté de faire vivre la décentralisation. Par ailleurs, la définition à l'article premier des objectifs et des orientations de notre politique d'aménagement du territoire permet d'écarter le risque d'incohérence entre les schémas.

S'inspirant de la métaphore ferroviaire utilisée par M. Patrick Ollier, M. Jean-Michel Marchand a estimé que les schémas de services collectifs partaient de la même gare et passaient tous par la station des schémas régionaux.

Revenant sur les travaux préparatoires au schéma national, M. Patrick Ollier a rappelé que ceux-ci avaient donné lieu à des débats ouverts, sincères et instructifs et que seul le changement de majorité de 1997 avait empêché de finaliser le projet de schéma national. Aujourd'hui, l'administration a repris le dessus et le texte présenté par le Gouvernement met en place un système laissant les mains libres à la technocratie pour définir une politique nationale d'aménagement du territoire. La loi du 4 février 1995 prévoyait un schéma national voté par le Parlement ; l'actuel projet de loi se borne à mettre en place des schémas de services collectifs conçus par l'administration puis pris par décrets sans aucune validation politique. Il conviendrait au minimum que ces schémas de services collectifs soient présentés au Parlement.

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont a estimé que l'addition des schémas de services collectifs constituait en fait un schéma national mais qu'ils auront l'avantage de permettre de faire un choix plus proche des préoccupations des citoyens. Elle s'est également félicitée que M. Christian Jacob se soit fait le chantre des délocalisations administratives décidées en 1992.

Revenant sur ce point, M. Christian Jacob a indiqué que pour lui l'essentiel était que les délocalisations de ce type soient décidées par le Parlement ainsi que le prévoit la loi du 4 février 1995.

M. Gabriel Moncharmont a fait observer que si les schémas de services collectifs répondent aux prescriptions des alinéas 2 à 9 de l'article 2, il y aura forcément cohérence. Il s'est par ailleurs dit séduit par la proposition consistant à soumettre les schémas de services collectifs au vote du Parlement.

M. Jean-Claude Lenoir a déclaré partager l'analyse de M. Patrick Ollier selon laquelle l'Etat doit être le garant des équilibres territoriaux et de la solidarité nationale. Selon lui, l'intervention du Parlement sur l'élaboration d'un schéma national doit être affirmée dès le premier paragraphe de cet article. Il s'est montré surpris par le tour pris par les débats, estimant que si les noms des participants étaient blanchis sur le procès-verbal, un étudiant aurait quelques difficultés à déterminer les intervenants de la majorité mais pourrait constater la permanence des opinions défendues par l'opposition.

M. Joseph Parrenin a estimé curieux que l'on puisse simultanément défendre le schéma national et les droits du Parlement car le schéma national est largement le produit du pouvoir exécutif. Selon lui, les élus auront plus de prise sur les schémas régionaux. Il a également regretté la façon autoritaire dont la DATAR avait délimité les périmètres des pays dans le cadre de l'application de la loi du 4 février 1995.

M. Eric Doligé a rappelé qu'un responsable avait affirmé devant des députés qu'il ne souhaitait pas que les schémas de services collectifs soient présentés devant le Parlement car une telle procédure constituerait un échec pour la politique d'aménagement du territoire.

A l'issue de ce débat, la commission a rejeté les trois amendements de suppression de cet article.

2. Les choix stratégiques

Quatre choix stratégiques sont définis par cet article. Ils tendent à mettre en place un maillage du territoire prenant en compte des échelles différentes, pôles européens, agglomérations, pays et à maintenir la cohésion des territoires et de leurs populations en mettant en _uvre certaines politiques spécifiques pour les territoires en voie de relégation.

Lors de l'examen en commission, M. Patrick Ollier a présenté l'amendement n° 23 de M. Michel Bouvard et son propre amendement proposant tous deux une nouvelle rédaction de l'article 2 afin :

- d'introduire comme nouvel objectif stratégique la structuration des territoires ruraux par le développement de la coopération intercommunale à fiscalité propre, pour éviter que le renforcement des pôles de développement urbains ne relance la concentration des populations ;

- de renforcer la cohésion des territoires destinés à constituer des pays en les faisant reposer sur de fortes solidarités intercommunales et socio-professionnelles ;

- d'introduire, dans la même logique, la notion de " politiques structurelles de soutien " aux territoires en difficulté, en harmonisation avec les politiques communautaires qui se dessinent dans la réforme des fonds structurels, et en précisant la définition des territoires en difficulté ;

- de réintroduire comme instrument privilégié de réalisation des choix stratégiques la péréquation des ressources entre collectivités territoriales.

M. Philippe Duron, rapporteur, a estimé que l'orientation proposée par M. Patrick Ollier était intéressante mais que l'amendement que lui-même proposait aux quatrième et cinquième alinéas du deuxième paragraphe de cet article prenait en compte ces observations. Il a, en outre, fait valoir qu'il ne fallait pas alourdir le début du texte de cet article par des considérations qui ne sont pas liées à l'organisation de l'espace. La commission a alors rejeté ces deux amendements.

La commission a ensuite rejeté deux amendements de rédaction globale de M. François Sauvadet et de M. Patrick Ollier faisant référence à un schéma national.

Elle a également rejeté un amendement de M. Eric Doligé proposant d'imposer un nouveau choix stratégique, celui de renforcer la complémentarité des différentes politiques publiques locales.

Le premier choix stratégique vise à renforcer les pôles de développement à vocation européenne et internationale, susceptibles d'offrir des alternatives à la région parisienne. Il s'agit de faire exister à côté de la région parisienne quelques pôles, à l'évidence peu nombreux (moins nombreux que les métropoles d'équilibre), qui puissent se hisser à un rang international et surtout européen. L'ouverture à l'Europe de notre territoire devient en effet une donnée fondamentale de l'aménagement du territoire et il convient de le structurer dans cette optique.

La commission a d'abord rejeté un amendement de M. Jean Proriol proposant de renforcer les pôles régionaux et interrégionaux de développement, après que le rapporteur eut fait valoir que cette dernière proposition était contraire à l'esprit du projet de loi qui visait à permettre aux métropoles françaises de concurrencer les autres métropoles européennes.

M. Christian Jacob a attiré l'attention de la commission sur la référence à la région parisienne figurant à cet alinéa. Il a jugé que cette notion ne permettait pas de prendre en compte les spécificités des cantons ruraux de l'Ile-de-France, qui se trouvaient ainsi pénalisés dans le projet de loi. Il a donc proposé de substituer à la notion de région parisienne une référence à l'agglomération parisienne.

M. Gabriel Montcharmont a fait observer que cet alinéa était la traduction d'un constat fait par tout le monde depuis la parution en 1947 de l'ouvrage " Paris et le désert français ". M. Philippe Duron, rapporteur, a indiqué que le projet de loi visait à prendre en compte par ces termes la très grande région parisienne. Paris est en effet la seule ville française de taille mondiale ; il ne faut pas réduire son importance mais donner la capacité aux autres villes françaises de devenir des pôles européens en attirant les sièges sociaux des entreprises, les personnels qualifiés, les chercheurs, etc. Alors que la politique des métropoles d'équilibre qui a tenté de réduire le déséquilibre entre Paris et les villes de province n'a eu que des résultats incomplets, le projet de loi vise non pas à pénaliser Paris mais à donner aux métropoles régionales la capacité de devenir des métropoles européennes. Une référence à l'agglomération parisienne ne correspond donc pas au niveau pertinent d'aménagement du territoire voulu par le Gouvernement.

M. Jean-Michel Marchand a craint que l'expression d'agglomération parisienne ne conduise à un renforcement des pôles urbains autour de Paris tandis que M. Félix Leyzour a considéré que le troisième alinéa du deuxième paragraphe ne conduisait pas, contrairement à l'interprétation de M. Christian Jacob, à pénaliser le cantons ruraux de l'Ile-de-France ; le rééquilibrage qui est, en effet, visé est un rééquilibrage entre pôles urbains.

La commission a alors rejeté l'amendement de M. Patrick Ollier proposant la suppression de l'alinéa sur les pôles de développement à vocation européenne.

La commission a ensuite rejeté l'amendement n° 118 de Mme Sylvia Bassot et l'amendement de M. Patrick Ollier, proposant la mise en cohérence des politiques d'aménagement du territoire et celle de l'aménagement du territoire européen.

Les deuxième et troisième choix stratégiques doivent s'analyser de concert. Il s'agit d'organiser les agglomérations de telle sorte qu'elles participent au développement des bassins de vie et d'emploi qui les entourent et qu'elles soient fondées sur un certain nombre d'objectifs :

- intégration des populations ;

- solidarité dans la répartition des activités, des services et de la fiscalité locale ;

- gestion économe de l'espace.

Il s'agit également d'aider au développement local, en aidant en particulier à la mise en valeur des potentialités des territoires ruraux grâce à la formation de pays, entités présentant une cohésion géographique culturelle économique ou sociale.

Lors de l'examen en commission, le rapporteur a proposé une nouvelle rédaction de ces deux alinéas car il s'agit, d'une part, d'éviter que ces choix stratégiques, n'établissent une hiérarchisation entre les territoires et, d'autre part, de mettre en valeur le fait que le pays ne constitue pas seulement un territoire rural, mais qu'il doit être aussi un territoire assurant la solidarité du rural et de l'urbain, de petites agglomérations ayant donc vocation à constituer un pays avec l'espace rural qui les entoure.

M. Jean-Claude Lenoir a fait valoir les différences existant entre les notions de bassins d'emploi et de pays visées dans l'amendement du rapporteur et a proposé de supprimer la référence aux bassins d'emploi. Le rapporteur a objecté qu'il fallait éviter de constituer des pays de taille trop réduite et leur donner un poids suffisant en matière d'aménagement du territoire.

La commission a adopté un sous-amendement rédactionnel de M. Gabriel Montcharmont puis l'amendement du rapporteur ainsi modifié (amendement n° 241). Les amendements de M. Pierre Micaux (relatif à la mise en valeur des potentialités des territoires ruraux), de M. Gérard Voisin proposant de supprimer la référence aux territoires ruraux et de M. Patrick Ollier proposant de compléter le cinquième alinéa sont devenus sans objet.

Le quatrième choix stratégique est celui du soutien à apporter aux territoires en difficulté qui sont notamment les territoires ruraux en déclin, les zones en reconversion industrielle, les régions insulaires et les départements d'outre-mer.

Lors de l'examen en commission, M. Jean Proriol a proposé une nouvelle rédaction de cet alinéa afin de préciser la politique de soutien aux territoires en difficulté. Il s'est étonné que l'amendement du rapporteur venant d'être adopté aux précédents alinéas ne prenne pas en compte ces territoires. Le rapporteur a objecté que son amendement portant sur cet alinéa visait à les prendre en compte. La commission a donc rejeté l'amendement de M. Jean Proriol.

M. Jean Proriol a ensuite défendu un amendement proposant de viser précisément les zones de revitalisation rurale. Le rapporteur a estimé que les territoires ruraux en difficulté incluaient ces zones. L'amendement a donc été rejeté.

Puis M. Philippe Duron, rapporteur, a proposé de compléter la liste des territoires en difficulté en incluant " certains territoires de montagne, les territoires urbains déstructurés ou très dégradés cumulant des handicaps économiques et sociaux ". M. Christian Jacob a proposé de substituer à la notion de territoires de montagne celle de territoires à handicap géographique afin d'englober les hauts piémonts. Le rapporteur a fait observer que cette notion était contingente et variable selon les époques ; la moyenne montagne était au siècle dernier une zone du territoire prospère et très recherchée et la haute montagne était délaissée ; aujourd'hui la haute montagne présente des atouts économiques qu'a perdus la moyenne montagne. C'est pourquoi, il a proposé de viser " certains territoires de montagne ". M. Patrick Ollier a craint que cette expression n'ait qu'un caractère faiblement normatif. La commission a ensuite adopté l'amendement du rapporteur (amendement n° 242).

M. Patrick Ollier a ensuite proposé d'inclure dans les territoires en difficulté toutes les zones en reconversion et non pas les seules zones en reconversion industrielle. M. Philippe Duron, rapporteur, a exprimé son accord avec l'objectif poursuivi par M. Patrick Ollier. M. Gabriel Montcharmont a estimé que les zones en reconversion étaient largement visées par l'amendement du rapporteur précédemment adopté. M. Pierre Ducout a fait observer que le projet de loi ne citait les zones en reconversion industrielle qu'à titre d'exemple de territoires en difficulté mais que tous ces territoires étaient en fait concernés. M. Patrick Rimbert a suggéré de viser les territoires en reconversion économique, mais le rapporteur s'est interrogé sur la définition légale et réglementaire de cette notion. M. Jean-Michel Marchand a soutenu l'amendement de M. Patrick Ollier car le projet de loi ne vise pas spécifiquement les zones de reconversion industrielle. A l'issue de ce débat, la commission a adopté l'amendement de M. Patrick Ollier (amendement n° 243).

Puis, M. Claude Hoarau a présenté un amendement tendant à viser parmi les territoires en difficulté les " départements d'outre-mer - régions ultrapériphériques françaises ". Il s'est cependant interrogé sur le fait que le projet de loi cite les départements d'outre-mer au titre des territoires en difficulté et a observé qu'ils ne le sont pas par principe car ce sont des entités distinctes qui ont leur identité propre. Il a indiqué que les DOM sont visés dans le projet de loi seulement aux articles 2 et 25, ce qui n'est pas satisfaisant. Bien que le Gouvernement ait annoncé le dépôt à l'automne 1999 d'un projet de loi d'orientation sur l'outre-mer, M. Claude Hoarau a estimé indispensable de permettre aux DOM de s'adosser aux dispositions du projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire.

Il a ensuite fait valoir que l'intégration des DOM dans la Communauté européenne nécessitait une démarche volontariste. L'amendement proposé s'appuie sur le nouvel article 299-2 du Traité d'Amsterdam qui définit le processus d'intégration des régions dites ultrapériphériques.

Après ces explications, la commission a adopté l'amendement de M. Claude Hoarau (amendement n° 244).

3. Les moyens d'action de l'Etat

Pour assurer la réalisation de ces choix stratégiques et la cohésion de ces différents territoires, l'Etat dispose de trois moyens d'action. Le premier passe par la mobilisation des services publics, ceux-ci devant assurer un égal accès aux savoirs, à la santé, à la culture, à l'information, aux transports et à un environnement de qualité.

Le second permet un soutien aux initiatives économiques qui peut être différent suivant l'emplacement de ces activités sur le territoire. Il fait référence à tous les moyens (fiscaux, sociaux et autres) dont dispose l'Etat pour aider les entreprises dans les diverses zones aidées actuelles. Il n'est pas envisagé à ce stade de réformer les zonages car le gouvernement est en attente des décisions européennes sur les zonages, mais certains d'entre eux devront être révisés avant le 31 décembre 1999 sous peine d'être caducs.

Le troisième moyen d'action concerne la gestion à long terme des ressources naturelles et des équipements. Il s'inscrit dans la perspective du développement durable de notre territoire.

Lors de l'examen en commission, M. Félix Leyzour a présenté un amendement visant à ce que l'Etat assure la correction des inégalités spatiales et la solidarité envers les populations en intervenant de façon différenciée. Le rapporteur a fait remarquer que la proposition de M. Félix Leyzour serait en partie reprise dans les dispositions du projet de loi relatives aux interventions économiques des collectivités locales mais qu'il n'avait pas d'objection de fond à l'adoption de l'amendement. La commission a donc adopté l'amendement (amendement n° 245).

M. Félix Leyzour a ensuite présenté un amendement tendant à ce que l'Etat assure la mobilisation et le développement des services publics dans le respect de l'égal accès de tous les citoyens, en vue de favoriser, par la péréquation tarifaire, l'emploi, l'activité économique et la solidarité et de répondre à l'évolution des besoins des usagers. Il a défendu la nécessité de réaffirmer la place et le rôle des services publics dès l'article 2 du projet de loi.

M. Christian Jacob s'est interrogé sur la référence à la péréquation tarifaire et son éventuelle application en matière de protection sociale. M. Félix Leyzour lui a répondu en citant l'exemple de la protection sociale des personnes démunies variant selon les départements et selon les ressources de ces derniers. M. Jean-Claude Lenoir a néanmoins fait remarquer que l'amendement ne reliait pas l'exigence de péréquation tarifaire au domaine de la protection sociale et aux autres domaines cités et a invité M. Félix Leyzour à rédiger différemment son amendement pour atteindre le but qu'il poursuit.

M. François Brottes a estimé que la rédaction retenue pouvait desservir l'objectif poursuivi dans la mesure où un égal accès peut être un accès à un coût élevé, donc inabordable. Il conviendrait donc de se référer au caractère abordable de l'accès aux services publics. En outre, la péréquation tarifaire est une condition insuffisante ; il est nécessaire aujourd'hui, avec les mesures d'ouverture à la concurrence décidées par la Communauté européenne de mettre en place des compensations financières. Le rapporteur a en conséquence invité M. Félix Leyzour à retirer son amendement pour le corriger et le redéposer ultérieurement. M. Félix Leyzour a alors retiré son amendement.

M. Jean Proriol a présenté un amendement afin que l'Etat assure non seulement la mobilisation des services publics, mais également celle des entreprises publiques.

M. Patrick Ollier a défendu cette proposition qui permet d'affirmer la volonté du Parlement d'empêcher la fermeture abusive des établissements des entreprises publiques. M. Jean-Claude Lenoir a proposé de viser non pas les entreprises publiques mais les entreprises poursuivant une mission de service public, car des entreprises privées exercent de telles missions. M. Gabriel Montcharmont a fait valoir que désormais ces entreprises étaient en situation de concurrence et qu'il était difficile d'exiger d'elles à la fois de présenter des comptes équilibrés et de contribuer à l'aménagement du territoire, sans prévoir un dédommagement financier pour le coût que représente l'accomplissement de cette mission. M. François Brottes a estimé que le service public n'avait pas d'existence en tant qu'entité et que seules des entreprises ou des personnes accomplissaient des missions de service public. En outre, il est indispensable d'inclure les entreprises privées accomplissant des missions de service public.

M. Jean Proriol a, en conséquence, rectifié son amendement afin de viser les entreprises qui accomplissent des missions de service public.

M. Patrick Rimbert s'est inquiété des conséquences de cet amendement et a jugé préférable de garder la rédaction du projet de loi. Il est indispensable de distinguer la collectivité publique qui définit les missions de service public et les entreprises qui sont, tels des maîtres-d'oeuvres, chargées de les exécuter. M. Jean Proriol a fait valoir qu'il était indispensable d'impliquer davantage les entreprises, comme EDF ou France Télécom dans des missions d'aménagement du territoire. Il a cité l'exemple de la desserte des populations habitant dans des zones très reculées. M. Jean-Claude Lenoir s'est déclaré favorable à la nouvelle rédaction proposée par M. Jean Proriol qui vise à la fois les services publics et les entreprises. M. François Brottes a exprimé son accord pour ne plus viser les entreprises publiques mais a suggéré de viser les organismes qui accomplissent des missions de service public afin d'englober les acteurs qui n'ont pas le statut d'entreprise. M. Joseph Parrenin a suggéré de préciser que ces organismes peuvent être publics ou privés.

En conclusion, M. André Lajoinie, président, a proposé que la commission s'en tienne au texte initial du Gouvernement du fait que les députés n'arrivent pas à se mettre d'accord sur une rédaction commune. M. Philippe Duron, rapporteur, a invité les députés à soumettre à la commission, d'ici le passage en séance publique, une meilleure rédaction de la disposition. A l'issue de ce débat, la commission a rejeté l'amendement.

Puis, elle a adopté un amendement de M. Patrick Rimbert prévoyant que l'Etat doit assurer non pas la " mobilisation des services publics " mais " leur présence et leur organisation appropriée ", de manière à répondre aux exigences de l'aménagement du territoire (amendement n° 246). La commission a ensuite rejeté un amendement de M. Pierre Micaux supprimant la référence aux ressources offertes par les technologies de l'information et de la communication pour l'égal accès aux savoirs. Elle a également rejeté un amendement de M. Jean Proriol visant à introduire la notion d' " infrastructures " estimée par son auteur inhérente à l'aménagement du territoire et un amendement de M. Pierre Micaux tendant à prévoir des modalités de soutien aux initiatives économiques différenciées selon l'intérêt des projets. La commission a, en revanche, adopté un amendement de M. Félix Leyzour prévoyant que le soutien aux initiatives économiques apporté par l'Etat peut être différencié sur la base de critères d'emploi et de développement d'activité (amendement n° 247). Elle a rejeté un amendement de M. Jean Proriol tendant à prévoir que la différenciation des soutiens se fait en fonction des zonages en vigueur, le rapporteur ayant indiqué que ceux-ci devraient être revus prochainement.

La commission a ensuite adopté un amendement de M. Joseph Parrenin présenté par M. Patrick Rimbert faisant d'une juste péréquation des ressources publiques un instrument privilégié de réalisation des choix stratégiques, le rapporteur ayant suggéré l'adoption d'un sous-amendement indiquant que l'objectif de cette péréquation était de réduire les inégalités entre " les territoires " et non entre " les collectivités territoriales ", comme le prévoyait le libellé de l'amendement. Après les interventions de M. Jean-Claude Daniel et de Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, la commission a adopté le sous-amendement puis l'amendement ainsi modifié (amendement n° 248). Deux amendements, le premier de M. Patrick Ollier, le second de M. Jean Proriol, ayant un objet similaire, ont été rejetés.

La commission a ensuite rejeté un amendement de M. Patrick Ollier tendant à prévoir un rééquilibrage financier des ressources entre collectivités territoriales afin de rétablir une égalité des chances pour celles comportant des zones en difficulté.

Elle a ensuite adopté un amendement du même auteur, après avis favorable du rapporteur, introduisant une référence à l'article L. 110 du code de l'urbanisme qui définit les principes d'une gestion à long terme des ressources naturelles et des équipements (amendement n° 249).

La commission a rejeté un amendement de M. Serge Poignant tendant à prévoir que les choix stratégiques sont définis dans un schéma national d'aménagement du territoire regroupant les schémas de services collectifs ainsi qu'un amendement de M. Pierre Micaux prévoyant que les choix stratégiques sont mis en _uvre dans les schémas de services collectifs après avis des instances décentralisées professionnelles et sociales concernées.

4. Les différents schémas de services collectifs

Les derniers alinéas de cet article énumèrent les huit schémas de services collectifs qui mettent en _uvre les quatre choix stratégiques précédemment étudiés. Ils portent sur l'enseignement supérieur et la recherche, les services culturels, les services sanitaires, l'information et la communication, le transport de voyageurs et le transport de marchandises, l'énergie, les espaces naturel et ruraux.

Chacun de ces schémas de services collectifs sera étudié ultérieurement. Il convient simplement de remarquer ici que, par rapport aux schémas sectoriels de la loi du 4 février 1995, quelques nouveaux secteurs bénéficient d'un schéma : l'énergie et les espaces naturels et ruraux, et que les schémas sectoriels de transport sont remplacés par deux schémas, l'un pour les voyageurs, l'autre pour les marchandises.

Les schémas de services collectifs ont été définis à partir de trois critères :

- une dimension structurante pour les territoires ;

- une nécessaire hiérarchisation territoriale des interventions publiques ;

- une cohérence avec les thèmes développés dans le schéma de l'espace communautaire (SDEC).

D'après les notes de cadrage déjà élaborées, ils apparaissent très divers tant au regard de la nature de leurs objectifs (depuis des objectifs quantifiables et prescriptibles jusqu'à des objectifs plutôt fédérateurs et tendanciels) que des moyens à mettre en _uvre (depuis des moyens d'intervention coercitifs jusqu'à des modalités contractuelles et incitatives).

Cette diversité est logiquement induite par celle des acteurs sollicités (Etat, collectivités territoriales et opérateurs), par l'environnement législatif et réglementaire qui les entourent et par les espaces territoriaux dans lesquels ils s'inscrivent.

En tout état de cause, le Gouvernement a souhaité introduire la notion nouvelle de services collectifs, d'une part pour manifester qu'il entend privilégier l'objectif d'un service rendu aux usagers, d'autre part pour concrétiser l'ambition de projet collectif que sous-tend la notion de service public à la française.

Lors de l'examen des derniers alinéas relatifs aux schémas de services collectifs, la commission a rejeté un amendement de M. Yves Coussain prévoyant que le schéma de l'information et de la communication ne vise que le développement des technologies correspondantes, ainsi que l'amendement n° 66 cor. de M. Léonce Deprez visant à prévoir un schéma des services de justice. La commission a ensuite rejeté un amendement de M. Patrick Ollier visant à réintroduire dans les schémas des services collectifs le schéma directeur national routier et autoroutier, un amendement de M. Marc-Philippe Daubresse visant à articuler les deux schémas de services collectifs de transport sur l'intermodalité, un amendement de M. Patrick Ollier supprimant le schéma des espaces naturels et ruraux, ainsi qu'un amendement de M. François Sauvadet visant à remplacer celui-ci par un " schéma de protection des espaces naturels ". La commission a également rejeté trois amendements identiques de MM. Eric Doligé, Jean Proriol et M. Yves Nicolin (n° 117) instaurant un schéma des services publics locaux. Elle a également rejeté un amendement de M. Jean Proriol prévoyant un schéma du développement économique.

La commission a ensuite rejeté l'amendement n° 65 cor. de M. Léonce Deprez prévoyant que l'ensemble des schémas des services collectifs constitue le schéma national d'aménagement et de développement durable du territoire.

Puis elle a rejeté deux amendements identiques de M. Eric Doligé et n° 116 de M. Yves Nicolin ayant pour objet de soumettre les schémas de services collectifs à l'avis du Parlement, le rapporteur ayant émis un avis défavorable.

La commission a ensuite adopté un amendement de M. Claude Hoarau prévoyant que les schémas de services collectifs comportent un volet particulier prenant en compte la dimension ultra-marine représentée par les départements d'outre-mer, le rapporteur ayant estimé que cet amendement précisait utilement la notion de région ultra-périphérique française (amendement n° 250).

Elle a rejeté un amendement de M. Patrick Ollier prévoyant que les choix stratégiques arrêtés dans les schémas de services collectifs feront l'objet, tous les cinq ans, d'un rapport d'objectifs et d'une réévaluation.

La commission a ensuite adopté l'article 2 ainsi modifié.

Après l'article 2

La commission a rejeté un amendement de M. Jean-Michel Marchand visant à donner une nouvelle définition du principe de précaution dans le cadre de l'article L. 200-1 du code rural, son auteur ayant précisé qu'il devait être sursis aux actions susceptibles de créer des dommages graves pour l'environnement ou ayant un coût économique inacceptable ; après une intervention du président André Lajoinie, le rapporteur a estimé qu'il n'était pas souhaitable de modifier une disposition du code rural dans le cadre de ce projet de loi.

La commission a également rejeté un amendement de M. Jean-Michel Marchand visant à redéfinir le principe de participation auquel fait référence l'article L. 200-1 du code rural.

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Jean-Michel Marchand prévoyant que chaque citoyen doit avoir accès aux services publics qui lui sont nécessaires et qu'à cet effet sont créées des maisons de service public. Cet amendement a été retiré par son auteur, après les observations de M. Patrick Rimbert qui a insisté sur la nécessité pour le Gouvernement de faire des propositions en ce sens et celles du rapporteur qui a indiqué que cette question serait abordée ultérieurement lors de la discussion d'un autre projet de loi.

Article 3

Coordination

Cet article précise que l'expression " schémas de services collectifs " remplace désormais celle de " schéma national d'aménagement du territoire " dans toutes les dispositions législatives où apparaissait cette référence.

Celle-ci étant de nature récente, puisque le schéma national d'aménagement du territoire est une création de la loi n° 95-115 du 4 février 1995, il est probable que ce terme ne figure pas dans de nombreuses lois postérieures.

Cette mesure générale de coordination évite cependant une énumération des textes concernés.

Lors de l'examen de cet article, la commission a rejeté trois amendements, n° 68 de M. Léonce Deprez, de M. Jean Proriol et de M. Patrick Ollier de suppression de l'article leurs auteurs souhaitant conserver les références au schéma national d'aménagement et de développement du territoire. Elle a également rejeté un amendement de M. Robert Honde prévoyant que les schémas de services collectifs n'ont qu'un caractère de complément par rapport au schéma national.

La commission a ensuite rejeté, conformément à l'avis du rapporteur, un amendement de M. Patrick Ollier défendu par M. Serge Poignant, prévoyant que dans un souci de cohérence les schémas de services collectifs font l'objet d'un document unique de synthèse, lequel est évalué tous les cinq ans. La commission a également rejeté un amendement de M. Patrick Ollier prévoyant que le document unique de synthèse est établi en tenant compte des plans pluriannuels de modernisation des administrations.

La commission a ensuite adopté l'article 3 sans modification.

Article 4

(article 3 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995)

Conseil national d'aménagement et de développement du territoire

Cet article est relatif au Conseil national d'aménagement et de développement du territoire institué par l'article 3 de la loi du 4 février 1995 et dont la composition et les principales règles de fonctionnement ont été précisées par les décrets du 29 septembre 1995 et du 17 janvier 1996.

1. La composition du CNADT

Présidé par le Premier ministre, le CNADT comprend cinquante-deux membres :

- quatre députés et quatre sénateurs ;

- six présidents de conseil régional ;

- six présidents de conseil général ;

- six maires ;

- quatre représentants des conseils économiques et sociaux régionaux ;

- trois représentants des chambres consulaires ;

- douze représentants syndicaux ;

- un représentant des associations familiales ;

- un représentant des associations culturelles ;

- un représentant du mouvement sportif ;

- un représentant des associations agréées de protection de l'environnement ;

- un représentant des activités touristiques ;

- une personnalité choisie en raison de sa compétence en matière d'aménagement du territoire.

S'agissant de la composition du CNADT, le paragraphe I de cet article modifie le texte actuel de manière à permettre que le CNADT puisse être présidé, en l'absence du Premier ministre, par le ministre chargé de l'aménagement du territoire.

Cette disposition est motivée par la constatation que le Premier ministre n'a pas toujours la possibilité de présider cet organisme, et qu'il faut éviter que ses délibérations ne soient soumises à l'insécurité juridique.

Lors de l'examen de ce paragraphe, la commission a rejeté un amendement de M. Pierre Micaux prévoyant que le ministre de l'économie et des finances peut également présider le Conseil national d'aménagement et de développement du territoire.

Elle a ensuite examiné un amendement de M. Jean-Michel Marchand tendant à prévoir la participation de parlementaires européens au Conseil national. M. Jean-Michel Marchand a retiré son amendement, après que le rapporteur eut exprimé ses réserves sur ses modalités d'application.

2. Les compétences du CNADT

S'agissant des compétences du CNADT, l'objet du paragraphe II de cet article est de les élargir : le CNADT continuera comme par le passé à être consulté sur les orientations de la politique d'aménagement du territoire mais une mission nouvelle sera confiée à sa commission permanente, celle de l'évaluation des politiques d'aménagement et de développement durable du territoire. Les missions d'évaluation que la loi du 4 février 1995 avait confiées au Groupement d'intérêt public d'observation et d'évaluation de l'aménagement du territoire seront donc désormais dévolues au CNADT.

A l'heure actuelle, le CNADT formule des avis et des suggestions sur la mise en oeuvre de la politique d'aménagement et de développement du territoire par l'État, les collectivités territoriales et l'Union européenne.

Il pourra désormais formuler ces avis et suggestions non seulement sur la mise en oeuvre mais également sur les orientations de la politique d'aménagement et de développement durable du territoire. Il aura donc un rôle de proposition en matière d'aménagement du territoire et il pourra ainsi formuler avis et suggestions aussi bien sur les projets de loi relatifs à l'aménagement du territoire que sur les propositions de directives ou les projets de règlement de l'Union européenne, par exemple ceux sur les zonages.

Lors de l'examen de ce paragraphe, la commission a rejeté un amendement de M. Patrick Ollier visant à conserver tel qu'il est défini dans la loi du 4 février 1995 le rôle du Conseil national d'aménagement et de développement du territoire.

Le CNADT est actuellement également associé à l'élaboration du projet de schéma national d'aménagement du territoire (SNADT) et des projets de schémas sectoriels et donne des avis sur ces projets. La suppression du SNADT et son remplacement par les schémas de services collectifs a pour conséquence logique la modification du deuxième alinéa du paragraphe II et l'association du CNADT à l'élaboration des projets de schémas de services collectifs sur lesquels il donnera un avis.

Le CNADT a commencé à travailler en ce domaine puisqu'il a mis en place en juin 1998 trois commissions thématiques sur les projets de schémas de services collectifs ; elles ont vocation à l'aider à émettre un avis sur ceux-ci.

En revanche, la disposition selon laquelle le CNADT est périodiquement consulté sur la mise en oeuvre du SNADT et est associé à son évaluation lors de son réexamen tous les cinq ans disparaît dans la nouvelle rédaction du texte.

Bien que cette suppression soit justifiée par sa trop grande rigidité et son inefficacité réelle puisque la consultation prévue ne se traduit pas par un avis conforme, le rapporteur a cependant estimé nécessaire une association du CNADT à la révision des schémas de services collectifs (prévue tous les sept ans, aux termes de l'article 9 du projet). Il a donc proposé un amendement en ce sens au deuxième alinéa du paragraphe II que la commission a adopté (amendement n° 251).

La compétence d'avis du CNADT sur les projets de directives territoriales d'aménagement et sur les projets de loi de programmation prévus à l'article 32 du projet demeure inchangée. En revanche, le texte ne mentionne plus sa consultation (facultative) sur les schémas de réorganisation des services de l'État prévue à l'article 25 de la loi du 4 février 1995.

Enfin, comme précédemment, le CNADT pourra se saisir de toute question relative à l'aménagement et au développement durable du territoire.

Lors de l'examen de cet article, la commission a rejeté les amendements identiques de M. Yves Nicolin (n° 113) et de M. Eric Doligé prévoyant une consultation du Conseil national sur la définition des procédures contractuelles entre l'Etat, les collectivités territoriales, organismes et entreprises signataires, y compris celles relatives à la mise en _uvre des fonds européens. Elle a également rejeté un amendement de M. Pierre Micaux prévoyant que le Conseil peut se saisir de toute question relative à l'aménagement du territoire après consultation des parties concernées, le rapporteur ayant estimé cette précision inutile, puis elle a adopté, conformément à l'avis du rapporteur, un amendement de M. Jean-Michel Marchand prévoyant que le Conseil transmet chaque année au Parlement un rapport sur la mise en _uvre de la politique d'aménagement et de développement durable du territoire (amendement n° 252).

3. La commission permanente du CNADT

Le paragraphe III de cet article prévoit la création, au sein du CNADT, d'une commission permanente comprenant des représentants de toutes ses composantes.

La création d'une telle commission permanente devra avoir pour effet un meilleur suivi de la politique d'aménagement du territoire par le CNADT. Elle devrait permettre au Conseil national de travailler dans une configuration plus opérationnelle et avec une périodicité plus grande. En effet, le CNADT ne s'est pas beaucoup réuni jusqu'à présent : quatre fois depuis son installation officielle le 5 février 1996. Le 5 décembre 1996, il a examiné les projets de décrets sur les zones urbaines sensibles (ZUS), les zones de redynamisation urbaine (ZRU) et les zones franches urbaines (ZFU), ainsi que le projet de décret relatif au schéma régional d'aménagement du territoire (SRADT) ; le 26 septembre 1997, il a été informé et a discuté de la révision de la LOADT et de l'élaboration du SNADT, il a examiné deux décrets portant sur les ZFU et a été informé du schéma de développement de l'espace communautaire et des propositions de réforme des fonds structurels ; la séance du 17 février 1998 a été consacrée à la présentation des mesures décidées lors du CIADT du 15 décembre 1997 ; la séance du 11 juin 1998 a été consacrée à la présentation par MM. Jean Auroux, Jacques Chérèque, Yves Morvan et Pierre Trousset du contenu des missions qui leur ont été confiées ; par ailleurs les membres du CNADT ont été invités à émettre leur avis et formuler des suggestions sur le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire.

Lors de l'examen de cet article, la commission a rejeté deux amendements identiques, l'un de M. Pierre Micaux, l'autre de M. Yves Coussain tendant à supprimer la référence à la création d'une commission permanente au sein du Conseil national d'aménagement et de développement du territoire.

La commission permanente se voit confier un rôle de pilotage de l'évaluation des politiques d'aménagement et de développement durable du territoire, à partir des orientations fixées par le Conseil. Il est prévu également qu'elle puisse, par délégation du Conseil, donner un avis sur les affaires soumises à son examen.

Le rôle donné à la commission permanente pour l'évaluation des politiques d'aménagement et de développement durable du territoire est essentiel car la fonction d'évaluation est devenue particulièrement importante avec le développement de la contractualisation.

L'évaluation est actuellement confiée au Commissariat général du plan pour ce qui concerne l'évaluation des politiques publiques ainsi que pour les programmes ou les actions des contrats de plan Etat-régions. Mais la procédure est lourde et peu employée pour les politiques publiques. S'agissant des contrats de plan Etat-régions, la procédure repose sur les propositions d'évaluation faites par des comités régionaux, puis sur les avis de l'Instance nationale d'évaluation, ce qui ne permet pas d'apprécier dans son ensemble cette politique.

La procédure d'évaluation est également menée à l'échelon de certains ministères qui sont dotés des structures adaptées. Le ministère de l'aménagement du territoire n'a pas les moyens de mener à bien une telle procédure.

Le choix du CNADT, organisme rassemblant élus et socio-professionnels, pour mener à bien cette mission paraît intéressant.

La commission a adopté deux amendements du rapporteur, l'un tendant à préciser que la commission permanente n'est pas la seule instance à procéder à une évaluation de la politique d'aménagement du territoire, l'autre prévoyant, que la commission permanente rend compte de sa politique d'évaluation devant le Conseil national (amendement nos253 et 254).

Elle a ensuite rejeté l'amendement n° 115 de M. Jean Proriol prévoyant que les politiques d'aménagement du territoire font l'objet d'un réexamen tous les cinq ans, le rapporteur ayant fait remarquer que ce délai était inadapté car aussi bien pour les contrats de plan Etat-régions, que pour les fonds structurels, les délais prévus portent sur trois ans et six ans.

Pour permettre à la commission permanente de mieux remplir ses missions, le rapporteur a souhaité qu'elle puisse se faire assister par les services de l'État pour les études nécessaires à l'exercice de sa mission. Cette disposition qui figurait dans la loi du 4 février 1995 mais qui concernait le CNADT devrait être reprise pour la commission permanente de manière à lui permettre de bénéficier d'une aide appréciable pour la conduite de ses travaux. La commission a adopté cet amendement (amendement n° 255). Un amendement similaire de M. Patrick Ollier a en conséquence été rejeté.

La commission permanente s'est réunie le 8 septembre et a procédé à l'élection de son président, M. Robert Savy, président du conseil régional du Limousin.

Des moyens budgétaires seront dégagés sur les crédits du Fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT). Il est prévu pour 1999 une enveloppe de 200 000 francs au titre du fonctionnement et une enveloppe de 800 000 francs pour le développement des études.

La commission a rejeté deux amendements identiques, le n° 114 de M. Yves Nicolin et un amendement de M. Eric Doligé défendu par M. Serge Poignant prévoyant que la commission permanente est assistée par un comité de suivi composé de représentants des principaux financeurs.

La commission a adopté l'article 4 ainsi modifié.

Après l'article 4

M. Jean-Michel Marchand a présenté un amendement visant à instituer un office parlementaire d'évaluation de la politique d'aménagement et de développement durable du territoire. Le rapporteur s'est déclaré en plein accord avec le renforcement du rôle du Parlement, mais il a souhaité que cette question soit examinée après l'article 9. L'amendement a donc été réservé.

Article 5

(article 34 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983)

Schéma régional d'aménagement et de développement du territoire

Cet article, qui concerne le schéma régional d'aménagement et de développement du territoire, modifie l'article 34 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat.

Document nouveau crée par la loi du 4 février 1995, il permettait de confirmer la compétence de la collectivité régionale dans le domaine de l'aménagement du territoire. Ce schéma régional devait prendre en compte le schéma national de l'aménagement du territoire (SNADT) et les schémas sectoriels qui n'ont pas vu le jour. C'est peut-être l'une des explications du fait, qu'à l'heure actuelle, aucune des réflexions menées par les régions pour l'élaboration de ces schémas n'a encore abouti. Les régions les plus avancées sont l'Auvergne, la Basse Normandie, le Languedoc Roussillon et la région Midi-Pyrénées.

Cet article maintient le schéma régional d'aménagement et de développement du territoire, mais il en modifie le contenu.

Le SRADT comprendra désormais trois documents spécifiques :

- un document d'analyse prospective ;

- une charte d'aménagement et de développement durable du  territoire régional ;

- des documents cartographiques.

Les trois documents spécifiques prévus pour le SRADT sont inspirés des trois documents proposés par le rapport de M. Yves Morvan sur les SRADT : le document prospectif, la charte de développement et le schéma. Le document d'analyse prospective devrait donc être élaboré avec une vision interrégionale (ou transfrontalière, le cas échéant), la charte serait l'outil d'action et de programmation stratégique, et les documents cartographiques seraient la traduction spatiale des orientations et des options retenues.

Le SRADT actuel devait exprimer les orientations de la région dans les secteurs suivants (limitativement énumérés) :

- environnement,

- développement durable,

- grandes infrastructures de transport,

- grands équipements,

- services d'intérêt général.

Le nouveau SRADT définira les principaux objectifs à moyen terme de la région dans les domaines suivants :

- localisation des grands équipements et des services d'intérêt  régional,

- développement harmonieux des agglomérations,

- protection et mise en valeur de l'environnement, des sites et des  paysages naturels et urbains,

- réhabilitation des territoires dégradés.

La liste ainsi définie n'est pas limitative et la région se voit donc accorder une très grande latitude pour l'élaboration de son schéma.

S'agissant de la valeur juridique du SRADT il est prévu que les schémas doivent être compatibles avec les schémas de services collectifs, mais qu'ils n'ont aucun caractère prescriptif par rapport aux différents documents d'urbanisme, schémas directeurs et plans d'occupation des sols.

Le caractère prescriptif de ces schémas était plus affirmé dans le rapport précité d'Yves Morvan qui proposait un renforcement du caractère normatif des SRADT, à travers la mobilisation d'instruments juridiques appropriés et une élaboration du document par la région en association avec l'Etat.

Le Gouvernement n'a pas repris ces deux dispositions qui auraient pu bouleverser l'équilibre de la décentralisation.

Les SRADT resteront donc des documents indicatifs tirant leur force de la qualité de la concertation dont ils sont issus. Les documents cartographiques pourront cependant recommander la mise en place d'instruments d'aménagement, d'urbanisme ou de protection de l'environnement. Parmi les instruments cités figurent :

- un schéma directeur

- un parc naturel régional

- une directive territoriale d'aménagement

- un schéma de mise en valeur de la mer.

La procédure d'élaboration du SRADT n'est pas modifiée : élaboration et approbation par le conseil régional après avis des conseils généraux des départements concernés et du conseil économique et social régional (CESR). En revanche, la consultation est considérablement élargie. Alors qu'étaient associés à l'élaboration du schéma les départements, les communes chefs-lieux de département ou d'arrondissement, les communes de plus de 20 000 habitants et les groupements de communes compétents en matière d'aménagement ou d'urbanisme, désormais s'y ajoutent les agglomérations, les pays, les parcs naturels régionaux, les représentants des activités économiques et sociales et des associations.

Le projet de schéma est ensuite adopté et assorti des avis des conseils généraux des départements et de celui du CESR ainsi que des observations de toutes les personnes qui ont été associées à son élaboration. Il est ensuite mis en consultation, à la disposition du public pendant deux mois.

L'évaluation et la révision du SRADT sont prévues par la loi du 4 février 1995 tous les cinq ans. Cet article apporte la précision selon laquelle le SRADT sera révisé suivant la même procédure que celle fixée pour son élaboration.

Cet article prévoit également la suppression du plan régional qui fixait les priorités à mettre en _uvre pour la réalisation du schéma régional pour une durée de cinq ans. Cet alinéa doit se lire en liaison avec l'article 7 du projet de loi, selon lequel le plan de la région est constitué par le schéma régional d'aménagement et de développement du territoire.

Il convient de noter que le schéma régional est établi à moyen terme, comme le schéma de services collectifs, c'est-à-dire environ pour vingt ans, alors que le plan de la région était un outil de programmation établi sur cinq ans.

Le dernier paragraphe de cet article concerne les contrats de plan Etat-régions.

Il n'est pas besoin de souligner l'importance et l'intérêt de ces contrats. Les trois générations de contrats témoignent de l'augmentation des crédits qui leur sont consacrés (actuellement 77,3 milliards de francs pour l'Etat et 71,1 milliards de francs pour les régions), de l'extension du champ de la contractualisation et de la part de plus en plus importante prise par les régions.

Selon la législation en vigueur, le contrat de plan Etat-région tient compte des orientations retenues par le schéma régional et, le cas échéant, par le schéma interrégional du littoral et le schéma interrégional de massif.

Lors de l'examen de cet article, la commission a rejeté un amendement de M. Patrick Ollier, visant à maintenir le texte actuel de la loi " Pasqua " définissant l'objet du schéma régional d'aménagement et de développement du territoire.

Elle a ensuite adopté un amendement du rapporteur à portée rédactionnelle sur la charte régionale (amendement n° 256), ainsi qu'un amendement du même auteur faisant référence à la notion de localisation d'infrastructures dans les objectifs définis par le schéma régional (amendement n° 258) ; la commission a par ailleurs adopté un amendement de M. Patrick Ollier retenant le développement des projets économiques porteurs d'investissements et d'emplois parmi les objectifs définis par le schéma régional (amendement n° 259).

La commission a également adopté un amendement du rapporteur, ayant pour objet d'indiquer que le développement harmonieux poursuivi par les schémas régionaux ne concerne pas les seules agglomérations mais aussi les territoires urbains, périurbains et ruraux (amendement n° 260). Deux amendements de M. Patrick Ollier, ainsi que le n° 34 du même auteur, les amendements de MM. Eric Doligé, Jean Proriol, Félix Leyzour, Pierre Micaux et Yves Coussain, le n° 19 de M. Michel Bouvard et le n° 69 de M. Léonce Deprez, ayant un objet identique, sont donc devenus sans objet.

La commission a ensuite adopté un amendement de M. Patrick Ollier prévoyant que le schéma régional a pour objet la mise en valeur et la protection, non seulement des sites et des paysages, mais aussi du patrimoine (amendement n° 261).

La commission a adopté un amendement du rapporteur indiquant que le schéma régional veille à la cohérence des projets d'équipement avec les politiques de l'Etat et des différentes collectivités territoriales dès lors que ces politiques ont une incidence sur l'aménagement et la cohésion du territoire régional (amendement n° 257). Elle a rejeté un amendement de M. Jean-Michel Marchand prévoyant, dans un souci de cohérence, que les dispositions du schéma régional sont opposables aux documents d'urbanisme. La commission a ensuite rejeté un amendement de M. Claude Hoarau prévoyant que, dans les départements d'outre-mer, le schéma d'aménagement régional joue le rôle de schéma régional d'aménagement et de développement du territoire. Le rapporteur a fait part de son accord sur le fond, mais il a suggéré que cet amendement soit reformulé.

La commission a ensuite rejeté un amendement de M. Jean Proriol précisant que le schéma régional est dénué de caractère prescriptif et n'a qu'une portée prospective. Puis elle a examiné un amendement de M. Patrick Ollier prévoyant que les schémas régionaux font l'objet tous les cinq ans d'une évaluation et d'un réexamen. Après une intervention de M. Serge Poignant, et celle du rapporteur précisant que cette disposition de la loi du 4 février 1995 n'était pas modifiée, l'amendement a été retiré. Elle a ensuite rejeté un amendement de M. Jean Proriol supprimant l'obligation faite aux schémas régionaux en cours d'élaboration d'être compatibles avec les schémas de services collectifs, son auteur ayant précisé que la région Auvergne devait adopter la semaine prochaine son schéma. La commission a également rejeté un amendement du même auteur restreignant cette disposition aux schémas déjà élaborés.

La commission a adopté un amendement de M. Jean-Jacques Filleul précisant que les schémas régionaux intègrent les schémas régionaux de transport (amendement n° 262). La commission a ensuite adopté un amendement de M. Patrick Ollier faisant référence à la mise en place d'instruments de planification (amendement n° 263). Elle a examiné un amendement de M. Patrick Rimbert prévoyant que les schémas régionaux peuvent recommander la mise en place d'une charte portuaire. Le rapporteur ayant indiqué que les chartes portuaires étaient de simples projets de développement et qu'elles étaient donc dénuées de valeur juridique, la commission a rejeté cet amendement. Elle a examiné ensuite deux amendements, le premier de M. Jean Proriol et le second de M. Jean-Michel Marchand, visant à définir les acteurs associés à l'élaboration des schémas régionaux. M. Jean Proriol a ainsi suggéré de faire figurer les conseils régionaux ainsi que les chambres consulaires parmi ces acteurs et de supprimer la possibilité pour les représentants des associations d'être associés à l'élaboration des schémas régionaux. Le rapporteur a fait remarquer que les chambres consulaires étaient déjà représentées au Conseil national. M. Jean Proriol a indiqué que la référence aux associations résultant du projet de loi était trop vague et que se poserait le problème de leur choix. M. François Brottes a estimé la distinction entre acteurs économiques et sociaux et associations discutable. Après les interventions de MM. Jean-Michel Marchand, Léonce Deprez et Jean-Claude Lenoir, la commission a rejeté l'amendement de M. Jean Proriol. Elle a également rejeté l'amendement de M. Jean-Michel Marchand précisant que les associations habilitées à élaborer les schémas régionaux étaient les associations agréées de protection de l'environnement, le rapporteur ainsi que M. Jean-Jacques Filleul ayant estimé qu'il avait un caractère trop restrictif.

La commission a ensuite adopté un amendement du rapporteur prévoyant que le schéma régional d'aménagement et de développement du territoire fait l'objet d'une évaluation et d'une révision, selon le même rythme que celui des schémas de services collectifs (amendement n° 264). La commission a rejeté un amendement de M. Patrick Ollier prévoyant que le plan régional arrête les priorités à mettre en _uvre pour la réalisation du schéma régional pour une durée de cinq ans.

La commission a rejeté un amendement de M. Patrick Ollier supprimant le paragraphe VIII relatif à la coordination avec la politique de l'Union européenne ; elle a également rejeté un amendement du même auteur faisant référence au schéma national d'aménagement du territoire.

La commission a ensuite rejeté un amendement de M. Pierre Micaux prévoyant que la mise en _uvre des schémas régionaux est coordonnée avec la mise en _uvre de la politique de l'Union européenne et un amendement de M. François Sauvadet faisant référence à la mise en place d'un schéma de développement de l'espace européen.

La commission a examiné un amendement de M. Patrick Rimbert indiquant que, dans le cadre de la préparation des contrats de plan Etat-régions, lorsque d'autres collectivités territoriales sont appelées à cofinancer les programmes prévus dans ces contrats, ces dernières sont associées à l'ensemble de la procédure de négociation, de programmation et de suivi des contrats. Le rapporteur a estimé qu'il n'était pas souhaitable que cette association porte sur l'ensemble de la procédure. Après un débat auquel ont pris part MM. Jean Proriol, Serge Poignant, Félix Leyzour, Patrick Rimbert, Léonce Deprez et Pierre Ducout, la commission a adopté l'amendement présenté par M. Patrick Rimbert modifié par un sous-amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 265). L'amendement n° 110 de M. Yves Nicolin ainsi que deux amendements de M. Eric Doligé ayant un objet similaire ont, en conséquence, été rejetés.

La commission a ensuite adopté l'article 5 ainsi modifié.

Après l'article 5

La commission, après l'intervention de M. Serge Poignant, a rejeté, conformément à l'avis du rapporteur, deux amendements identiques de MM. Patrick Ollier et Jean Proriol relatifs à la mise en _uvre de schémas interrégionaux.

Elle a également rejeté, conformément à l'avis du rapporteur, un amendement de M. Jean-Michel Marchand permettant de reconnaître à un schéma régional la qualité de directive territoriale d'aménagement.

Article 6

(article 34 ter de la loi du 7 janvier 1983)

Conférence régionale de l'aménagement
et du développement du territoire

Cet article modifie la composition et les pouvoirs de la Conférence régionale de l'aménagement et du développement du territoire (CRADT) instituée par l'article 6 de la loi du 4 février 1995.

La composition de cette instance collégiale a été précisée par le décret du 2 novembre 1995. Elle comprend dans chaque région, à l'exception de la collectivité territoriale de Corse :

- des représentants de l'Etat : le préfet de région, les préfets de département, le (ou les) recteur (s), le trésorier payeur général de la région ;

- des représentants de la région : le président du conseil régional et trois membres (ou plus, selon le nombre de départements dans la région) de la commission permanente du conseil régional ; le président du conseil économique et social régional ;

- des représentants des départements appartenant à la région : le président du conseil général de chacun de ces départements ;

- des représentants des communes et groupements de communes : deux représentants désignés par l'association des maires de chacun des départements composant la région.

Elle comprend donc de 15 à 53 membres au plus suivant le nombre de départements composant la région.

NOMBRE DE DÉPARTEMENTS

2

3

4

5

6

7

8

Etat

4

5

6

7

8 ou 9

(*)

9

10, 11 ou 12

(*)

Région

4

6

8

10

12

14

16

Département

2

3

4

5

6

7

8

Communes + groupements

4

6

8

10

12

14

16

CESR

1

1

1

1

1

1

1

Total

15

21

27

33

39 ou 40
(*)

45

51, 52 ou 53 (*)

(*) Selon le nombre de recteurs.

Cet article prévoit, en premier lieu, d'élargir leur composition aux acteurs économiques et sociaux.

La CRADT ne comprendra plus seulement le président du conseil économique et social régional, mais plusieurs représentants de ces organismes.

Elle comprendra également, en son sein, des représentants des activités économiques et sociales et des associations, ce qui traduit la volonté d'accorder une plus grande place à la société civile dans la conception de la politique d'aménagement et de développement durable du territoire.

Sa composition sera également élargie à des représentants des agglomérations, des pays et des parcs naturels régionaux, ce qui paraît cohérent avec la possibilité qui leur est offerte par le projet de loi de contracter dans le cadre des contrats de plan Etat-régions.

La CRADT sera ainsi un lien de concertation et de partenariat entre tous les acteurs de l'aménagement et du développement durable du territoire.

Pour la collectivité territoriale de Corse, la CRADT comprend 9 membres :

- le préfet de Corse,

- le président du conseil exécutif,

- les présidents des conseils généraux des deux départements en  Corse,

- deux représentants des communes (dont un président de groupement de communes compétent en matière d'aménagement du territoire) pour chaque département,

- le président du conseil économique, social et culturel de Corse.

Par parallélisme avec la composition de la CRADT des autres régions, il est prévu d'élargir sa composition à des représentants du conseil économique, social et culturel de Corse, des activités économiques et sociales et des associations, ainsi qu'à des représentants des agglomérations, des pays et des parcs naturels régionaux.

Présidée par le préfet de région et par le président du conseil régional (ou du conseil exécutif pour la Corse), cette CRADT se réunit au moins une fois par an pour examiner les conditions de mise en _uvre du schéma régional d'aménagement et de développement du territoire.

La CRADT de la région Aquitaine et de la région PACA ne se sont encore jamais réunies. Quelques CRADT ne se sont jamais réunies après leur réunion constitutive : Alsace, Centre, Franche-Comté, Limousin, Nord-Pas-de-Calais, Basse-Normandie.

La plupart des autres CRADT ont tenu une réunion. Seules celles de Bourgogne, de Picardie, et de Poitou-Charentes ont tenu deux réunions.

Il convient donc de tenter de redynamiser ces CRADT qui peuvent assurer une meilleure concertation entre élus et socioprofessionnels.

Cet article prévoit donc, comme ce sera le cas pour le Conseil national d'aménagement du territoire, de lui permettre de créer en son sein des formations spécialisées qui se réuniront au moins une fois par an sur un ordre du jour déterminé par le préfet de région et le président du conseil régional.

Il prévoit également d'élargir ses missions. Jusqu'à présent, la CRADT n'était consultée que sur les schémas régionaux ou interdépartementaux concernant la région, sur les services publics et les services privés participant à l'exercice d'une mission de service public.

Elle sera désormais consultée également sur le schéma régional d'aménagement et de développement du territoire, sur les schémas de service collectif et sur les directives territoriales d'aménagement.

Elle sera donc, au niveau régional, le seul organisme permettant une discussion approfondie entre élus et socio-professionnels sur l'aménagement du territoire. Elle sera donc un instrument important pour la mise en cohérence du schéma régional d'aménagement du territoire et des schémas de services collectifs.

Il est donc fondamental de lui donner les moyens d'exercer un tel rôle.

La commission a examiné un amendement de M. Jean-Michel Marchand précisant que le préfet de région et le président de région sont membres de droit de la conférence régionale de l'aménagement et du développement du territoire (CRADT). A la suite de l'intervention du rapporteur qui a indiqué qu'ils étaient co-présidents de cet organisme, cet amendement a été retiré par son auteur. La commission a ensuite rejeté, conformément à l'avis du rapporteur, un amendement de M. Jean-Michel Marchand renforçant la place des associations au sein de la conférence régionale.

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Félix Leyzour visant à préciser les conditions de représentativité des organisations professionnelles et associatives contribuant à l'élaboration du schéma régional. Après l'intervention du rapporteur, qui a indiqué qu'un tel amendement risquait de compliquer la désignation de ces différents groupements, celui-ci a été retiré par son auteur.

La commission a rejeté, conformément à l'avis du rapporteur, un amendement de M. Jean-Michel Marchand conditionnant la représentation des associations de protection de l'environnement au sein de la conférence régionale à leur préalable agrément.

Elle a ensuite rejeté successivement, conformément à l'avis du rapporteur :

- un amendement de M. Félix Leyzour relatif à la représentativité des organisations professionnelles et associatives membres de la CRADT ;

- un amendement de M. Jean Proriol supprimant la représentation des associations au sein de la conférence régionale ;

- un amendement de M. Patrick Ollier supprimant la création de formations spécialisées au sein de la CRADT ;

- un amendement de M. Jean Proriol rappelant la mission purement consultative de la CRADT, le rapporteur ayant précisé que cet organisme rendait des avis conformes lors de la création des pays.

Elle a ensuite adopté l'article 6 sans modification.

Article 7

(article L. 425-1 du code général des collectivités territoriales)

Plan de la région

Cet article a pour objet de substituer au plan de la région le schéma national d'aménagement du territoire, tel que modifié à l'article 5 du projet. En conséquence, il abroge les dispositions relatives au plan de la région contenues dans le code général des collectivités territoriales.

Institué par la loi n° 82-653 du 29 juillet 1982, le plan de la région détermine les objectifs à moyen terme du développement économique, social et culturel de la région pour une période de 5 ans et prévoit les programmes d'exécution mis en _uvre par la région (article L. 4251-1). Les articles L. 4251-2 à L. 4251-4 du code général des collectivités territoriales précisent les modalités de l'élaboration du plan de la région, ainsi que les modalités des contrats de plan souscrits par la région avec l'Etat.

Ces dispositions législatives ont été appliquées de façon inégale par les différentes régions, moins de la moitié des régions disposant aujourd'hui d'un tel document.

Lors de l'examen de cet article, la commission a tout d'abord, conformément à l'avis du rapporteur, rejeté deux amendements de suppression de cet article, l'un de M. Jean Proriol, l'autre de M. Patrick Ollier, ainsi qu'un amendement de M. Yves Coussain supprimant l'alinéa de cet article qui prévoit que le plan de la région est constitué par le schéma régional d'aménagement et de développement du territoire.

Elle a ensuite examiné un amendement de M. Claude Hoarau précisant que, dans les départements d'Outre-mer, le plan de la région est constitué par le schéma d'aménagement régional. Après que le rapporteur eut déclaré qu'il partageait les objectifs de cet amendement mais qu'il fallait en revoir la formulation, cet amendement a été retiré par son auteur.

La commission a alors adopté l'article 7 sans modification.

Article 8

(article 9 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995)

Suppression du groupement d'intérêt public d'observation et d'évaluation de l'aménagement du territoire

Cet article supprime le groupement d'intérêt public d'observation et d'évaluation de l'aménagement du territoire institué par l'article 9 de la loi du 4 février 1995. Cet organisme avait pour mission de recueillir des informations et des données nationales et internationales sur l'aménagement et le développement du territoire ainsi que sur les expériences de développement local. Il devait les diffuser aux utilisateurs publics et privés. Il était également chargé de procéder à l'évaluation des politiques d'aménagement et de développement du territoire.

Cet organisme était composé de parlementaires, de représentants des collectivités territoriales et des groupements de communes, ainsi que de représentants des administrations de l'Etat, des associations nationales compétentes, du comité des finances locales et des personnalités qualifiées.

L'association de personnes morales et de personnes physiques a soulevé des difficultés de nature juridique qui n'ont pas permis la création de cette instance.

Cet article a donc pour objet de supprimer ce groupement d'intérêt public et de transférer sa mission d'évaluation au Conseil national de l'aménagement et du développement du territoire (CNADT), qui associe élus nationaux, élus locaux et socioprofessionnels.

Lors de l'examen de cet article, la commission a, après l'intervention de M. Jean-Claude Lemoine qui a souligné l'utilité du groupement d'intérêt public d'observation et d'évaluation de l'aménagement du territoire et conformément à l'avis du rapporteur, rejeté un amendement de M. Patrick Ollier de suppression de l'article. Elle a ensuite dans les mêmes conditions rejeté un amendement du même auteur proposant de créer une commission spéciale du conseil national d'aménagement et de développement du territoire pour recueillir des informations et des données nationales et européennes sur l'aménagement et le développement du territoire.

Elle a ensuite adopté l'article 8 sans modification.

Article 9

(article 10 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995)

Schémas de services collectifs

Cet article remplace l'article 10 de la loi du 4 février 1995 relatif aux schémas sectoriels.

Il précise les modalités d'élaboration et d'adoption des schémas de services collectifs. Ces schémas de services collectifs sont élaborés par l'Etat dans une perspective de vingt ans. Cet horizon de 2020 a une portée symbolique, celle du long terme, mais il faut bien être conscient que si cette échelle temporelle est bien adaptée au temps long des infrastructures de transport, elle est moins significative pour le schéma des nouvelles technologies de l'information et de la communication au regard des vraisemblables ruptures technologiques qui interviendront à plus court terme.

Ces schémas devront prendre en compte les projets d'aménagement de l'espace communautaire européen. Cette formulation vise le schéma de développement de l'espace communautaire (SDEC) auquel il n'est pas possible de se réferer puisqu'il n'existe encore qu'à l'état d'esquisse (adoptée le 9 juin 1997 à Noordwijk par les ministres en charge de la politique régionale) et qu'il ne repose que sur une coopération intergouvernementale (la politique d'aménagement du territoire n'étant pas une compétence communautaire).

L'élaboration des schémas de services collectifs devra donner lieu à une concertation associant les collectivités territoriales, les organismes socio-professionnels, les associations et les autres organismes qui concourent à l'aménagement régional.

L'engagement du processus d'élaboration des schémas de service collectifs ayant été acté au CIADT du 15 décembre 1997, deux circulaires des 1er et 17 juillet 1998 sont venues préciser les conditions d'élaboration de ces documents :

- la première étape est conduite au sein de l'administration centrale ; pour chaque schéma, un document de cadrage est élaboré par un comité stratégique ad hoc. Spécifique à chaque schéma, ce document doit néanmoins comprendre quatre types d'informations :

·  des éléments de scénario d'évolution de la demande ;

·  des éléments de contraintes budgétaires, réglementaires ou autres ;

·  les objectifs de l'Etat, formulés sous forme d'orientations et d'enjeux assez globaux, d'une part, et aussi des priorités en nombre limité, d'autre part ;

·  la méthode à suivre au plan local pour l'élaboration de ces schémas.

Cette étape est déjà terminée pour six schémas sur huit.

- la deuxième étape doit être déconcentrée au niveau régional et aura trois objectifs :

- permettre un meilleur ancrage territorial des propositions ;

- favoriser à travers le pilotage unique du préfet (et conjointement du recteur pour le schéma de services collectifs de l'enseignement supérieur et de la recherche) la transversalité et le décloisonnement de l'exercice et donc une meilleure articulation entre les différents thèmes ;

- permettre une large association des partenaires territoriaux aux propositions et aux choix qui seront faits.

Cette concertation pourrait se dérouler jusqu'en juin 1999 et être organisée au sein des commissions thématiques adressés à la CRADT, conférence co-présidée par le préfet de région et le président du conseil régional. Cette phase de concertation aurait un double objectif, celui d'expliciter au niveau régional les priorités des différents schémas et d'en définir les objectifs, et celui de sélectionner et de hiérarchiser les projets et autres modalités d'intervention sous forme d'une stratégie d'ensemble.

- la troisième étape serait celle de l'établissement des schémas de services collectifs au niveau national. Il se ferait sur la base de ces propositions, par les comités stratégiques, après synthèse et arbitrage des propositions des préfets. Après consultation du CNADT, des régions et des CRADT, ces schémas seraient ensuite adoptés par décret avant le 31 décembre 1999. Ils seraient ensuite révisés dans les mêmes formes au plus tard un an avant l'échéance des contrats de plan Etat-régions. Ceux-ci ayant désormais une durée de sept ans, cette révision interviendra en 2006, puis tous les sept ans.

Lors de l'examen de cet article, la commission a tout d'abord rejeté, conformément à l'avis du rapporteur et après les interventions de MM. Jean-Claude Lemoine et Léonce Deprez, un amendement de M. Patrick Ollier supprimant cet article. Elle a également rejeté, sur proposition du rapporteur, deux amendements du même auteur précisant les schémas sectoriels et les insérant dans le schéma national d'aménagement et de développement du territoire.

Elle a ensuite successivement rejeté, conformément à l'avis du rapporteur :

- un amendement de M. François Sauvadet faisant référence au schéma de développement de l'espace européen, après que le rapporteur eut indiqué que ce document n'existait pas encore formellement ;

- un amendement de M. Pierre Micaux et deux amendements identiques de M. Eric Doligé et n° 107 de M. Yves Nicolin, précisant quelles collectivités territoriales participent à l'élaboration des schémas de services collectifs ;

- un amendement de M. Jean Proriol associant les chambres consulaires à l'élaboration des schémas de services collectifs ;

- un amendement de M. Jean-Michel Marchand réservant aux seules associations agréées de protection de l'environnement la possibilité de participer à la concertation préalable à l'adoption des schémas.

La commission a ensuite examiné en discussion commune 9 amendements relatifs à la procédure d'adoption et de révision des schémas de services collectifs :

- un amendement de M. Jean Proriol, un amendement de M. Eric Doligé et l'amendement n° 108 de M. Yves Nicolin, soumettant les schémas de services collectifs pour avis au Parlement, préalablement à leur adoption par décret ;

- un amendement de M. Jean-Michel Marchand et un amendement de M. Félix Leyzour indiquant que les schémas sont soumis à l'approbation du Parlement ;

- un amendement de M. Félix Leyzour prévoyant que ces schémas doivent être présentés au Parlement et faire l'objet d'un débat préalablement à leur adoption ;

- deux amendements de M. Jean Proriol et un amendement de M. Patrick Ollier assouplissant le délai d'adoption des schémas.

Un débat s'est engagé sur ces amendements.

M. Jean-Michel Marchand a souhaité que le Parlement soit associé à l'adoption des schémas de services collectifs. Il a à cet égard estimé nécessaire la création d'une structure spécifique, telle qu'un office ou une délégation parlementaire.

M. Félix Leyzour a estimé qu'il convenait de garantir la cohérence des différents schémas par leur présentation au Parlement au sein d'un projet de loi unique. Il a par ailleurs considéré que le Parlement était le cadre adapté pour décider des grandes orientations de la politique d'aménagement du territoire.

M. Léonce Deprez s'est étonné que le projet de loi ne permette pas l'expression du Parlement sur un aspect essentiel de la politique d'aménagement du territoire.

M. Claude Hoarau a estimé que les schémas de services collectifs devaient faire l'objet d'une procédure d'approbation par le Parlement. Il a considéré que c'était le seul moyen pour éviter que le cadre de l'aménagement du territoire pour les deux prochaines décennies soit défini par les administrations. Il s'est également prononcé pour une révision des schémas selon la même procédure législative.

M. Jean Proriol a fait valoir que le Gouvernement et la majorité semblaient redouter un débat national sur les schémas d'aménagement du territoire.

Le rapporteur a indiqué que l'adoption des schémas de services collectifs par la loi lui paraissait être la procédure la plus pertinente mais qu'elle n'était pas sans défauts. Il a en effet relevé que, jusqu'à aujourd'hui, en dépit de l'adoption de la loi du 4 février 1995, le Parlement n'avait jamais été appelé à adopter les divers schémas d'aménagement du territoire. Il a observé en outre, que le débat parlementaire pouvait conduire à la juxtaposition dans les schémas de la somme des revendications locales. A l'inverse, la création d'un office ou d'une délégation parlementaire, telle que la suggèrent certains, permettrait d'associer le Parlement de manière continue à l'élaboration et au suivi de la politique d'aménagement du territoire. Le Parlement deviendrait ainsi un lieu de débat permanent sur la politique d'aménagement du territoire. Il s'est donc déclaré favorable à la création d'un organisme parlementaire qui permettrait de mieux associer le Parlement et donc d'alerter en temps utile le Gouvernement sur certains problèmes d'aménagement du territoire.

Il s'est en outre opposé aux amendements proposant de soumettre les schémas à l'avis du Parlement préalablement à leur adoption par décret, d'une part, en vertu du principe de séparation des pouvoirs, d'autre part, parce que le Parlement n'est pas un organe consultatif.

M. Léonce Deprez s'est élevé contre l'opinion du rapporteur selon laquelle les représentants de la Nation seraient incapables de se placer au-dessus des contingences locales. S'agissant de la création d'un office ou d'une délégation parlementaire, il a observé que la commission de la production et des échanges était déjà chargée au sein de l'Assemblée nationale du suivi de la politique de l'aménagement du territoire. Estimant qu'un tel organisme ne pourrait qu'avoir un rôle mineur, il s'est prononcé en faveur de l'adoption des schémas par la loi.

A l'issue d'une suspension de séance demandée par M. Patrick Rimbert, ce dernier a proposé, au nom des commissaires socialistes, de se rallier pour l'essentiel à l'amendement de M. Jean-Michel Marchand et à celui de M. Félix Leyzour, soumettant l'adoption des schémas à la loi.

MM. Patrick Ollier et Léonce Deprez se sont déclarés favorables à ce nouvel amendement, le premier estimant toutefois qu'il convenait de prévoir un délai limite pour le dépôt par le Gouvernement du projet de loi portant adoption des schémas.

M. Jean-Jacques Filleul ne s'est pas déclaré favorable à la fixation d'un délai rigide.

M. Patrick Rimbert a relevé l'importance du dépôt d'un projet de loi unique, rassemblant l'ensemble des projets de schémas. Il s'est en même temps déclaré partisan de la création d'une délégation parlementaire permettant d'assurer un suivi de la politique d'aménagement du territoire.

M. Jean-Michel Marchand a considéré que ce nouvel amendement, s'il était adopté, permettrait au Parlement de jouer pleinement son rôle dans la politique d'aménagement du territoire. Il aurait en outre l'avantage de rassembler tous les schémas au sein d'une loi unique. Ne souhaitant pas enfermer le Gouvernement dans des délais stricts pour présenter un tel projet de loi, il a considéré que le Parlement devrait être également associé à l'évolution des schémas.

En réponse aux intervenants, le rapporteur a apporté les précisions suivantes :

- son intervention précédente ne mettait aucunement en cause la capacité du Parlement à légiférer dans le domaine de l'aménagement du territoire, mais visait à trouver un compromis entre la nécessaire légitimation des schémas et la recherche de leur efficacité ;

- la mention, dans l'amendement, de la consultation des régions, préalablement à l'examen du projet de loi par le Parlement, est inutile car déjà prévue par ailleurs ;

- la révision des schémas selon la même procédure, un an avant l'échéance des contrats de plan Etat-régions, est maintenue ;

- il convient de laisser au Gouvernement le soin d'apprécier le temps dont il a besoin pour déposer ce projet de loi et il serait prématuré de fixer dès aujourd'hui une date limite ;

- la création d'un office ou d'une délégation parlementaire serait un complément utile, permettant de garantir le contrôle parlementaire dans la durée.

La commission a alors adopté à l'unanimité un amendement prévoyant que les schémas de services collectifs sont soumis au Parlement dans un projet de loi (amendement n° 266).

En conséquence, les autres amendements sont devenus sans objet.

La commission a ensuite examiné un amendement du rapporteur prévoyant la consultation de la commission supérieure du service public des postes et télécommunications avant l'adoption du schéma de services collectifs de l'information et de la communication. M. Patrick Ollier a relevé qu'il serait cohérent, dès lors que cet amendement serait adopté, de prendre une disposition identique pour chacun des schémas. Après l'intervention du rapporteur, qui a précisé qu'il convenait plutôt de réserver ce dispositif à certains des schémas, la commission a adopté cet amendement (amendement n° 267). Elle a ensuite adopté un amendement similaire du même auteur prévoyant la consultation du Comité national de l'organisation sanitaire et sociale avant l'adoption du schéma de services collectifs sanitaires (amendement n° 268).

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Jean-Michel Marchand prévoyant que certains documents d'urbanisme, notamment les schémas de secteurs et les plans d'occupation des sols devaient être compatibles avec les schémas de services collectifs. Après que le rapporteur eut fait observer qu'il n'était pas pertinent de descendre à ce niveau de prescription et qu'en outre l'adoption d'une telle disposition risquait d'entraîner une multiplication des contentieux, l'amendement a été retiré par son auteur.

La commission a par ailleurs rejeté un amendement de M. Yves Coussain précisant que les contrats de plan Etat-régions tiennent compte des orientations des schémas de services collectifs, le rapporteur ayant fait observer que cette disposition allait de soi.

Après que M. Patrick Rimbert eut retiré un amendement devenu sans objet, la commission a adopté l'article 9 ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 9

Création d'une délégation parlementaire à l'aménagement et au développement durable du territoire

La commission a examiné en discussion commune trois amendements, deux portant création d'un office parlementaire d'évaluation de la politique d'aménagement du territoire, présentés par M. Félix Leyzour et M. Jean-Michel Marchand et le troisième du rapporteur tendant à mettre en place une délégation parlementaire.

M. Patrick Rimbert s'est déclaré favorable à cette dernière proposition.

M. Jean Proriol a, quant à lui, craint que la création d'une nouvelle structure, à l'instar de la délégation pour l'Union européenne, ne dépossède la commission de la production et des échanges d'une partie de ses compétences. M. Léonce Deprez a déclaré partager ce point de vue. Par ailleurs, il a rappelé que la commission venait d'adopter un amendement prévoyant l'adoption des schémas de services collectifs par le Parlement. M. André Lajoinie, président, a rappelé que l'aménagement du territoire relevait expressément des compétences de la commission en vertu du règlement de l'Assemblée. Dès lors, tout projet ou proposition de loi relevant de ce secteur lui resterait obligatoirement soumis.

M. Félix Leyzour a déclaré se rallier à l'amendement du rapporteur et a donc retiré son amendement. Il a estimé que la création d'une délégation, commune au Sénat et à l'Assemblée nationale, ne pouvait pas entraîner de conflits de compétences avec les commissions de chaque assemblée parlementaire, le périmètre des structures étant différent.

M. Patrick Ollier a considéré que le débat sur la création d'une délégation à l'aménagement du territoire n'avait plus lieu d'être, dès lors qu'un amendement de la commission prévoyait désormais l'adoption des schémas de services collectifs par la loi. Il a relevé à ce propos que, dans l'exposé des motifs de l'amendement du rapporteur, la création d'une telle délégation constituait une réponse à l'adoption des schémas de services collectifs par décret. En revanche, le travail d'expertise et de suivi de la politique d'aménagement du territoire relevait, non des missions du Parlement, mais plutôt d'un comité d'experts, tel que celui prévu par la loi du 4 février 1995 sous la forme d'un groupement d'intérêt public.

M. Jean-Michel Marchand s'est au contraire déclaré favorable à l'amendement du rapporteur et a en conséquence retiré le sien.

M. Patrick Rimbert a considéré que la création de la délégation proposée renforcerait le rôle du Parlement dans le domaine de l'aménagement et du développement du territoire. Il a proposé une modification de l'amendement pour tenir compte de l'amendement préalablement adopté par la commission prévoyant de soumettre les schémas à l'approbation du Parlement. La commission a alors adopté l'amendement proposé par le rapporteur ainsi modifié portant article additionnel après l'article 9 (amendement n° 269).

Article 10

(article 11 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995)

Schéma de services collectifs de l'enseignement supérieur
et de la recherche

Cet article vise à créer, conformément à l'article 9 du projet de loi, un schéma de services collectifs dans le domaine de l'enseignement supérieur et de la recherche. Pour cela, il propose une nouvelle rédaction de l'article 11 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire qui se substitue aux contenus des actuels articles 11 et 12.

Le schéma de services collectifs de l'enseignement supérieur et de la recherche établit un cadre général en matière de programmation de l'enseignement supérieur et de la recherche. Il sert de support à la mise en oeuvre du plan Université du troisième millénaire (U3M) qui prend la suite du programme Université 2000 (U 2000).

U 2000 avait pour objectif de pallier, par un effort important de constructions universitaires, le déficit de locaux des établissements d'enseignement supérieur, dans un contexte de croissance forte des effectifs étudiants. Ce programme aura mobilisé 40 milliards de francs sur 9 ans, partagés entre les collectivités territoriales, l'Etat et, dans une moindre mesure, les fonds structurels européens. Il aura permis de construire 3 500 000 m² de locaux neufs et notamment (estimation à fin 1999) : 8 universités nouvelles, dont 4 en Ile-de-France, 196 départements d'instituts universitaires de technologie (IUT) et 24 IUT de plein exercice, ainsi que 7 pôles européens.

Le programme U 2000 comporte malheureusement de nombreuses insuffisances. Il n'inclut la recherche que marginalement et, surtout, il privilégie les nouvelles réalisations au détriment des réhabilitations, restructurations ou mises en sécurité des locaux anciens. Les grandes écoles n'étaient pas concernées et ont développé elles-mêmes des implantations souvent sans lien avec la programmation U 2000. De même, tous les besoins n'ont pu être satisfaits, tout particulièrement dans les établissements parisiens.

Le plan Université du troisième millénaire (U3M) s'inscrit dans un contexte démographique différent de décroissance du nombre d'étudiants, certes modulé selon les régions et les disciplines.

U3M demeure un programme de collaboration entre l'Etat et les collectivités territoriales, dans le cadre d'une politique contractuelle discutée au niveau régional et arbitrée au niveau national, mais ses modalités, ses buts et sa philosophie mêmes sont différents d'U 2000. Le contenu du plan U3M a vocation à être intégré dans les prochains contrats de plan Etat-régions (XIIème Plan), qui couvriront les années 2000 à 2006.

U3M a pour ambition d'améliorer la qualité des locaux existants, de faciliter les conditions de travail et de vie des étudiants, en particulier dans le cadre du plan social étudiant, de favoriser l'intégration de l'université dans la ville, d'inciter à la construction de véritables réseaux universitaires grâce à l'utilisation des nouvelles technologies de l'information et de la communication, et d'assurer enfin le renouvellement d'équipements obsolètes.

Le déploiement des activités d'enseignement et de recherche en réseaux doit favoriser le rayonnement national et international des métropoles universitaires et permettre à chaque région ou interrégion de proposer une offre complète de formation. Le maillage du territoire par les départements d'instituts universitaires de technologie implantés dans des bassins d'emplois devrait favoriser par ailleurs la synergie université-entreprise et, par conséquent, l'innovation.

Lors de l'examen de cet article, la commission a tout d'abord rejeté un amendement de M. Patrick Ollier proposant une nouvelle rédaction de l'article 10, ayant pour objet de maintenir le texte de la loi " Pasqua ".

Le premier alinéa du paragraphe I intègre dans l'intitulé de la section 1 du chapitre V du titre Ier de la loi du 4 février 1995 précitée la notion de schéma de services collectifs.

Le premier alinéa du paragraphe II propose une nouvelle rédaction de l'article 11 de la loi du 4 février 1995 et, par là même, une fusion du contenu de ses articles 11 et 12.

Le premier alinéa du I du nouvel article 11 de la loi de 1995 reprend l'objectif de répartition équilibrée des établissements d'enseignement supérieur sur le territoire national institué par l'article 12 de la même loi. Il intègre la recherche dans le schéma, ce qui constitue un élément important car le développement des universités nouvelles avait souffert de cette lacune. La commission a adopté un amendement de M. Félix Leyzour intégrant dans les objectifs du schéma, non seulement la répartition équilibrée, mais aussi le développement des services d'enseignement supérieur et de recherche sur le territoire national afin d'inscrire le schéma dans un processus plus dynamique (amendement n°270). Puis, un amendement de M. Pierre Micaux, incluant aussi bien la recherche publique que privée dans le schéma été rejeté par la commission.

Le deuxième alinéa du I du nouvel article 11 fixe les orientations visant à développer les pôles à vocation internationale. La notion de pôle se définit par une concentration de sites ou un ensemble de sites constituant un réseau.

Cet alinéa prend en compte la dimension internationale de ces pôles. En effet, qu'on le souhaite ou non, une compétition des formations supérieures va s'instaurer en Europe. La question est de savoir si des pôles européens sauront attirer les élites du monde au regard des technopôles prestigieuses américaines. La route 128 ou la Silicon Valley résultent par exemple d'initiatives convergentes autour de centres d'excellence. Faire émerger en France des lieux de ce type demandera un effort d'objectivité dans l'évaluation et de courage dans les décisions.

Sur ce point, la commission a examiné un amendement de M. Félix Leyzour intégrant, outre leur rayonnement, la possibilité d'émergence de pôles à vocation internationale. Le rapporteur s'est montré défavorable à cet amendement en expliquant que la France possédait déjà 12 pôles à vocation européenne et que l'heure n'était donc plus à l'émergence de nouveaux pôles mais plutôt à leur concentration afin de leur donner un certain niveau d'excellence. M. Pierre Cohen a soutenu le rapporteur en ajoutant que la multiplication des pôles à vocation internationale tendait surtout à réduire leur compétitivité. M. Félix Leyzour a retiré son amendement.

Puis, la commission a adopté un amendement du rapporteur précisant que le schéma favorise le rayonnement de pôles d'enseignement supérieur et de recherche à vocation internationale, et non des pôles, ouvrant ainsi une possibilité d'émergence de nouveaux pôles d'enseignement supérieur et de recherche (amendement n°271).

M. Claude Hoarau a déclaré souhaiter que le texte soit amendé afin d'inclure les départements d'outre-mer dans le schéma. Ceux-ci se révèlent en effet de plus en plus dynamiques et spécialisés en matière d'enseignement et de recherche.

La commission a ensuite rejeté un amendement de M. Jean Proriol, donnant au schéma l'objectif de définir une stratégie d'ensemble pour le secteur de la recherche.

Le troisième alinéa du I du nouvel article 11 vise à concevoir l'offre de formation au niveau " interrégional " car la région peut parfois être une entité insuffisante pour programmer le développement des établissements d'enseignement supérieur et de recherche. Il s'agit de regrouper des régions géographiques quand cela est nécessaire autour de plusieurs grandes villes. En effet, toutes les formations ne peuvent être développées sur tous les sites et il n'est pas possible de développer des laboratoires de recherche d'excellence dans tous les domaines et sur toutes les implantations.

La commission a adopté, conformément à l'avis du rapporteur, un amendement de M. Félix Leyzour sous-amendé par M. Pierre Cohen, visant à assurer une offre de formation à un niveau soit interrégional soit régional (amendement n°272).

Le quatrième alinéa du I du nouvel article 11 précise la méthode retenue pour assurer cette coopération interrégionale. Il tend à organiser la répartition des activités de l'enseignement supérieur et de la recherche, ainsi que la coopération entre les sites universitaires, en particulier avec ceux situés dans les villes moyennes, en tenant compte de l'organisation des villes et des établissements en réseaux.

La loi du 4 février 1995 proposait dans son article 12, la création d'universités thématiques dotées de contrats de recherche correspondant à leur spécialisation. Une seule université a été créée sur ce modèle à Agen. La philosophie du présent projet de loi est différente : elle préconise un regroupement et une rationalisation par une fédération des sites existants. Les sites dans les villes moyennes seraient ainsi maintenus mais il ne s'agit plus de création de sites nouveaux. Compte tenu des évolutions démographiques, les moyens existants sont suffisants.

La notion de réseau s'inspire des " services communs universitaires " cités dans la loi n° 84-52 du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur. Elle implique une mutualisation des ressources comme la création d'un réseau technique à travers la mise en place des technologies de l'information et de la communication.

La commission a adopté un amendement de M. Félix Leyzour intégrant le développement des services d'enseignement supérieur et de la recherche sur le territoire national dans les objectifs du schéma (amendement n°273). Elle a ensuite adopté un amendement de précision de M. Jean Proriol, comprenant les sites de recherche et non seulement de l'enseignement supérieur dans la coopération entre sites (amendement n°274).

Le cinquième alinéa du I du nouvel article 11 favorise les liaisons entre les formations technologiques et professionnelles et le monde économique. Il prévoit en outre la valorisation de la recherche technologique.

Les formations technologiques comprennent les universités, les lycées à travers les sections de techniciens supérieurs (STS) et les instituts universitaires de technologie (IUT). Les brevets de techniciens supérieurs (BTS) bénéficient des possibilités de partenariat avec les entreprises. Cet alinéa vise essentiellement les objectifs du projet de loi sur l'innovation qui doit être déposé au début de l'année 1999. Compte tenu des informations communiquées à votre rapporteur, l'avant-projet de ce texte prévoit la possibilité pour les universités de créer des services d'activités commerciales, avec des règles de gestion plus souples, afin d'assurer des prestations de service et d'exploiter des brevets. Les lycées technologiques et professionnels pourront fournir des prestations de service aux entreprises dans des conditions juridiques claires.

Les liaisons entre formations et monde économique incluent notamment les conventions de formation par la recherche des techniciens supérieurs. Ces conventions de formation, créées en 1989, associent un technicien supérieur (DUT ou BTS), une PME-PMI et un centre de compétences (lycée, IUT) qui assure le suivi scientifique.

La commission a rejeté un amendement de M. Jean Proriol tendant à favoriser les échanges de connaissances entre recherche publique et privée. Concernant la valorisation de la recherche technologique, la commission a adopté un amendement du rapporteur intégrant également la recherche appliquée (amendement n°275).

Le sixième alinéa du I du nouvel article 11 a pour objectif de coordonner le schéma de services collectifs de l'enseignement supérieur et de la recherche avec la loi n° 82-610 du 15 juillet 1982 d'orientation et de programmation pour la recherche et le développement technologique de la France.

Le septième alinéa du I du nouvel article 11 organise dans les régions, sur des thèmes évalués internationalement, l'association des différentes composantes de la recherche. Il encourage des processus d'essaimage à partir des centres de recherche. La prise en compte des régions est conforme aux objectifs de la loi n° 82-610 du 15 juillet 1982 précitée qui instaure des comités consultatifs régionaux. La commission a adopté un amendement du rapporteur sous-amendé par M. Pierre Cohen impliquant outre les régions, tous les niveaux pertinents, qu'ils soient locaux, régionaux ou interrégionaux dans l'association des différentes composantes de la recherche (amendement n°276).

Les thèmes seraient évalués internationalement par des experts nationaux et des experts étrangers. Cette procédure d'évaluation s'inspire de méthodes anglo-saxonnes qui préconisent la prise en compte du nombre de brevets, de conventions, de publications pour évaluer les choix scientifiques et technologiques. Le Conseil national de la science, qui aura la charge de conseiller le Gouvernement sur les orientations de la politique de recherche et de technologie, est composé d'une vingtaine de personnalités du monde scientifique et de représentants du monde économique, et inclut des directeurs de recherche étrangers.

L'association des différentes composantes de la recherche se conçoit dans le sens d'une concertation mais peut aussi donner lieu à un contrat d'association.

La commission a rejeté un amendement de M. Félix Leyzour ouvrant la possibilité de choisir les thèmes de recherche, non seulement au niveau international, mais aussi national après que le rapporteur eut précisé que le niveau international incluait forcément l'association des chercheurs nationaux. MM. Pierre Cohen et Eric Doligé ont regretté que le lieu choisi pour l'évaluation internationale ne soit pas précisé dans le texte. Enfin ils ont fait remarquer que l'évaluation des thèmes était une mission bien précise et ont proposé un amendement visant à se référer à des thèmes, non pas évalués mais reconnus internationalement. Le rapporteur ayant donné un avis favorable à cet amendement, la commission l'a adopté (amendement n°277).

L'essaimage concerne les étudiants et les chercheurs et vise à associer le monde économique dans la perspective du futur projet de loi sur l'innovation. Il vise également un transfert entre sites et établissements universitaires par un transfert d'une partie d'une équipe de recherche dans un nouveau site sous le contrôle du laboratoire ou de l'université-mère. Ce type d'essaimage donnant lieu à terme, si l'université ou le laboratoire le juge nécessaire, à une autonomie de l'équipe transférée.

La commission a adopté un amendement du rapporteur précisant dans cet alinéa qu'il s'agit d'un double processus d'essaimage, l'un de type fonctionnel ayant pour but de générer des activités économiques, l'autre de type géographique qui s'opère entre sites ou entre établissements supérieurs (amendement n°278).

Le huitième alinéa du I du nouvel article 11 de la loi de 1995 définit les objectifs de répartition géographique des emplois de chercheurs et d'enseignants chercheurs. L'article 13 de la loi du 4 février 1995 prévoit déjà des objectifs de répartition géographique des emplois de chercheurs. Il énonce un objectif précis afin qu'en 2005 soient installés, en dehors de la région Ile-de-France, 65 % de l'ensemble des chercheurs, enseignants-chercheurs et ingénieurs participant à la recherche publique et 65 % des personnes qui, dans ces catégories de personnels, ont le grade de directeurs de recherche ou un grade équivalent.

L'objectif proposé par le présent projet de loi semble plus large car il ne s'applique pas à la seule région Ile-de-France. Le taux de 65 % n'étant pas encore atteint à ce jour, cet objectif quantitatif reste valable. En revanche, le texte n'inclut pas les ingénieurs parmi les catégories concernées et ne précise pas que l'objectif concerne les seuls chercheurs publics. La commission a rejeté un amendement de M. Félix Leyzour, supprimant la disposition relative à la définition des objectifs de répartition géographique des emplois de chercheurs et d'enseignants-chercheurs. Puis elle a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur, ainsi qu'un autre amendement du même auteur étendant l'objectif de répartition géographique aux ingénieurs participant à la recherche publique (amendements nos 279 et 280).

Le neuvième alinéa du I du nouvel article 11 intègre le développement des technologies de l'information et de la communication dans le domaine de l'enseignement supérieur et de la recherche.

L'accès des étudiants aux outils informatiques se généralise dans les établissements supérieurs. Cela se traduit dans les faits par une politique progressive d'attribution d'adresses électroniques aux étudiants, par la multiplication de centres de ressources multimédias en libre accès et par la mise à disposition de formation en ligne ou télédiffusées. Tous les établissements d'enseignement supérieur sont désormais connectés au Réseau national des télécommunications pour la technologie, l'enseignement et la recherche (RENATER), qui a été mis en place dès 1993. En 1998, l'effort a plus particulièrement porté sur le raccordement des sites distants et des instituts isolés. Ce schéma de services collectifs de l'enseignement supérieur et de la recherche permettra une meilleure programmation de ces technologies nouvelles.

Le dernier alinéa du I du nouvel article 11 définit les moyens à mettre en oeuvre pour favoriser l'insertion professionnelle des étudiants.

L'insertion professionnelle des étudiants s'inscrit dans le cadre des mesures d'encouragement des processus d'essaimage vers le monde économique. Il s'agit aussi de tenter de savoir, par le biais d'un observatoire par exemple, où s'opère l'insertion territoriale des étudiants. Mais la préoccupation de fournir un accueil adapté aux besoins des étudiants doit constituer aussi une priorité. Après avoir adopté un amendement rédactionnel du rapporteur, la commission a adopté un amendement de celui-ci intégrant l'accueil des étudiants dans l'objectif du schéma (amendements nos 281 et 282).

L'accueil global des étudiants, à savoir le logement, les bibliothèques, les salles de travail mais aussi l'information et l'orientation, et l'urbanisme des campus, reste en effet insuffisant. La situation sur le territoire est très inégale. Dans les villes moyennes et les universités nouvelles, elle est bien meilleure que dans les grandes métropoles. Il a été annoncé lors du Plan social étudiant qu'un quart des crédits d'U3M devrait être consacré à ces aspects de la vie étudiante.

Par ailleurs, il est important de veiller à ce qu'un certain nombre de logements soient réservés aux étudiants étrangers. Il semblerait important d'envisager systématiquement l'implantation d'une maison des entreprises au sein des sites universitaires pour faciliter l'insertion professionnelle et la recherche d'emplois des étudiants.

Le paragraphe II de cet article définit les objectifs et le rôle de la conférence régionale de l'aménagement et du développement du territoire en matière d'enseignement supérieur et de recherche.

L'article 34 ter de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat crée une conférence régionale de l'aménagement et du développement du territoire dans chaque région et dans la collectivité territoriale de Corse. Cette conférence examine les conditions de mise en oeuvre du schéma régional d'aménagement et de développement du territoire. Elle est consultée sur les schémas qui concernent les services publics et les services privés participant à l'exercice d'une mission de service public.

Ce paragraphe tend à favoriser une concertation sur l'enseignement supérieur et la recherche. L'objectif est de créer un équilibre dans la répartition géographique des activités d'enseignement supérieur et de recherche, mais aussi de favoriser l'essaimage des pôles universitaires et de recherche vers le monde économique, au moyen notamment du développement des formations en alternance ou des formations continues.

Il propose également de soutenir les projets porteurs de développement économique, ce qui s'inscrit dans les objectifs et les moyens proposés dans l'avant-projet de loi sur l'innovation.

Ces conférences régionales seront consultées avant l'adoption du schéma de services collectifs de l'enseignement supérieur et de la recherche par décret avant le 31 décembre 1999, conformément à l'article 9 du présent projet de loi.

La commission a adopté un amendement du rapporteur proposant une nouvelle rédaction du paragraphe II (amendement n°283). L'amendement n°106 cor. de M. Jean Proriol et un autre amendement du même auteur ainsi qu'un amendement de M. Félix Leyzour sont devenus sans objet.

La commission a ensuite rejeté un amendement de M. Patrick Ollier, relatif à la répartition des chercheurs entre l'Ile-de-France et le reste du territoire, partiellement satisafait.

La commission a adopté l'article 10 ainsi modifié.

Article 11

(article 12 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) 

Articulation de la carte des formations supérieures et de la recherche et du schéma de services collectifs de l'enseignement supérieur
et de la recherche

Cet article a pour objectif de coordonner les dispositions existantes de la loi n° 84-52 du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur et celles de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire avec l'article 10 du présent projet de loi. Il a notamment pour but d'établir une cohérence entre la carte des formations supérieures et de la recherche avec le schéma de services collectifs de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Le paragraphe I de cet article supprime les subdivisions de la section 1 du chapitre V du titre Ier de la loi du 4 février 1995 précitée. Il n'y a en effet plus lieu de prévoir une sous-section pour l'enseignement supérieur et une sous-section pour la recherche compte tenu de l'intégration de la recherche dans le schéma de services collectifs de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Les articles 13 à 15 de la loi du 4 février 1995, relatifs au développement de la politique de recherche, sont conservés dans le but de concourir à la réalisation des objectifs définis par le nouveau schéma en ce qui concerne la recherche.

Le paragraphe II de cet article propose une nouvelle rédaction de l'article 12 de la loi du 4 février 1995, afin de rendre la carte des formations de l'enseignement supérieur et de la recherche compatible avec le schéma de services collectifs de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Selon l'article 19 de la loi n° 84-52 du 26 janvier 1984 précitée, la carte des formations supérieures et de la recherche, qui est liée aux établissements d'enseignement supérieur, est arrêtée et révisée par le ministre chargé de l'éducation, compte tenu des orientations du plan et après consultation des établissements, des conseils régionaux, du Conseil supérieur de la recherche et de la technologie et du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche. Cette carte constitue le cadre des décisions relatives à la localisation géographique des établissements, à l'implantation des formations supérieures et des activités de recherche et de documentation, aux habilitations à délivrer des diplômes nationaux et à la répartition des moyens.

Il est en effet important de coordonner les différents exercices de planification afin que les décisions prises soient cohérentes. Le schéma des services collectifs doit fixer des objectifs sur vingt ans, alors que la participation à laquelle se réfère la carte est limitée à une durée de cinq ans. Il faut souligner qu'une carte des formations supérieures a été élaborée dans le cadre du plan Université 2000, sans qu'elle ait pour autant été arrêtée conformément aux dispositions de la loi n°84-52 du 26 janvier 1984 précitée.

La commission a rejeté deux amendements de M. Patrick Ollier, l'un visant à supprimer l'article 11 (n°157), et l'autre proposant une nouvelle rédaction de l'article prévoyant des incitations en faveur des laboratoires privés choisissant une localisation conforme au schéma national d'aménagement et de développement du territoire.

La commission a adopté l'article 11 sans modification.

Article 12

(article 16 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995)

Schéma de services collectifs culturels

Cet article substitue au schéma des équipements culturels, prévu par l'article 16 de la loi du 4 février 1995, un nouveau schéma de services collectifs qui, comme les sept autres schémas sectoriels du projet de loi, servira de cadre de référence à l'action de l'Etat dans une perspective à long terme.

Cette évolution est justifiée par deux séries de motifs : d'une part, le schéma des équipements culturels n'a pas été élaboré ; d'autre part, son objet était limité à la promotion des équipements s'inscrivant dans une stratégie de rééquilibrage de l'offre culturelle entre la région d'Ile-de-France et les autres régions.

Si l'objectif de rééquilibrage de l'intervention de l'Etat est maintenu, l'article 12 du projet de loi propose d'inverser la logique de l'offre ou de la demande exprimée qui a prévalu jusqu'à présent en partant des besoins de services et d'équipements culturels. A cet effet, il propose de modifier l'article 16 de la loi du 4 février 1995.

Le schéma de services collectifs reflète en ce domaine deux grandes priorités complémentaires : la " démocratisation de la culture " et l'intégration de cet élément dans les politiques de développement des territoires.

Après avoir rejeté un amendement de suppression de cet article présenté par M. Patrick Ollier, la commission a examiné un amendement du même auteur visant à maintenir en vigueur l'article 16 de la loi du 4 février 1995. M. Patrick Ollier a souligné la nécessité de réaffirmer l'objectif de rééquilibrage des équipements culturels entre la région d'Ile-de-France et les autres régions. Le rapporteur a déclaré partager ce point de vue et fait observer que le projet de loi ne modifiait pas l'article 16 de la loi du 4 février 1995 sur ce point, maintenant ainsi l'objectif de rééquilibrage fixé en 1995. Il a également indiqué que le schéma de services collectifs culturels serait, tout comme les autres schémas, pris en compte dans les contrats de plan Etat-régions, la principale modification proposée étant d'étendre la portée du schéma prévu par la loi du 4 février 1995 limité aux seuls équipements culturels. M. Patrick Ollier a alors retiré son amendement.

Le premier alinéa du texte proposé pour l'article 16 de la loi du 4 février 1995 (troisième alinéa du II de l'article 12 du projet de loi) assigne à l'Etat un double rôle : favoriser l'accès de tous aux biens et services culturels et développer les pratiques artistiques et culturelles sur l'ensemble du territoire.

On peut considérer cet objectif comme une application du principe inscrit dans le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 selon lequel " la Nation garantit l'égal accès de l'enfant et de l'adulte à l'instruction, la formation professionnelle et la culture ". S'il ne constitue donc pas une novation, il correspond à de réels besoins. En effet, en dépit des actions menées tant par l'Etat et les collectivités territoriales que par les institutions et associations culturelles, l'égalité d'accès est loin d'être effective. A titre d'exemple, selon l'enquête menée par le ministère de la culture et de la communication sur les pratiques culturelles des Français en 1997, un quart des personnes interrogées déclarent aujourd'hui encore ne pas avoir lu un seul livre au cours des douze derniers mois, c'est-à-dire autant qu'en 1989 et à peine moins qu'en 1973 ; 34 % en ont lu de 1 à 9 en un an. S'agissant de la fréquentation des équipements culturels, les résultats de l'enquête sont encore plus éloquents : elle est nulle pour 24 % des Français et exceptionnelle pour 27 % d'entre eux ; les taux de fréquentation habituelle et régulière ne s'établissent respectivement qu'à 10 % et 12 %, bien que la majorité des personnes interrogées (61 %) considèrent que ces équipements sont plutôt bien situés par rapport à leur domicile. Si les Français paraissent, dans l'ensemble, satisfaits de l'offre culturelle, les inégalités d'usage restent criantes. Le constat est clair : " Les disparités entre catégories de population demeurent... conformes à ce qu'elles étaient dans les enquêtes précédentes : dans la plupart des cas, les taux de fréquentation des diplômés de l'enseignement supérieur, des Parisiens, des cadres et professions intellectuelles supérieures et, dans une moindre mesure, des professions intermédiaires restent nettement plus élevés que ceux des autres catégories de population... Les disparités géographiques se sont, en revanche, légèrement réduites, du fait de l'augmentation des taux de fréquentation des habitants des communes rurales et, dans certains cas - celui des musées par exemple -, des habitants des grandes villes de province. "

Pour autant, de nombreuses inégalités géographiques subsistent, entre les villes et le milieu rural, entre les centres et les périphéries des agglomérations et entre certaines régions, comme l'atteste l'atlas des activités culturelles paru en mai 1998. Ce document réalisé par le ministère de la culture et de la communication confirme la nature essentiellement urbaine des activités culturelles et la part primordiale de Paris en matière d'offre culturelle. Parallèlement, l'atlas met en lumière des inégalités territoriales ne relevant pas du rapport entre Paris et la province ; il constate ainsi le rôle prépondérant de deux autres régions ayant une forte densité de population, les régions Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte d'Azur, révélateur de déséquilibres interrégionaux. Il met aussi l'accent, à l'intérieur des zones les moins dotées, sur la " persistance de déséquilibres intrarégionaux marqués par l'attraction dominante des métropoles régionales au détriment de leurs périphéries ou des villes environnantes moins importantes ". Il constate cependant que " l'aménagement culturel du territoire est caractérisé dans le même temps par une offre culturelle abondante et, dans de nombreux cas, relativement bien répartie sur l'ensemble du territoire ", notamment grâce à l'intervention de l'Etat et des collectivités territoriales.

La commission a adopté, au premier alinéa du futur article 16 de la loi du 4 février 1995, un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 284), ainsi qu'un amendement de M. Félix Leyzour visant à inclure le développement de la création parmi les objectifs de l'Etat dans le domaine culturel, après que le rapporteur eut proposé un sous-amendement rédactionnel (amendement n° 285) . Elle a ensuite examiné un amendement du rapporteur visant à clarifier la rédaction de l'objectif d'accès aux biens, services et pratiques culturels, son auteur faisant observer qu'il convenait de lever l'ambiguïté liée à l'utilisation de l'adjectif " artistiques ", applicable aux pratiques mais inadaptée pour les biens et services. M. Philippe Duron, rapporteur, a estimé que la suppression de cette référence n'était pas gênante dans la mesure où l'on peut considérer que les pratiques culturelles incluent les pratiques artistiques, ainsi que l'attestent plusieurs publications récentes du ministère compétent, comme l'atlas des activités culturelles et l'enquête sur les pratiques culturelles des Français. M. François Brottes a souligné que cette suppression était d'autant plus justifiée que la commission venait d'adopter l'amendement de M. Félix Leyzour introduisant le développement de la création dans le même alinéa de l'article. La commission a alors adopté l'amendement du rapporteur (amendement n° 286).

Elle a ensuite examiné un amendement de M. Jean Proriol visant à mentionner les établissements scolaires comme vecteur d'un accès plus démocratique aux oeuvres et pratiques culturelles. Le rapporteur a indiqué que cette insertion pouvait être interprétée comme étant restrictive, d'autres établissements contribuant tout autant à la réalisation de cet objectif, par exemple les conservatoires municipaux pour l'accès aux pratiques musicales. M. Félix Leyzour a déclaré partager l'avis du rapporteur, tout en soulignant que le rôle de l'école était essentiel et qu'il fallait intervenir sur les programmes d'enseignement. Après que M. Jean Proriol eut précisé que son amendement ne visait pas les programmes mais les activités artistiques ou culturelles proposées en milieu scolaire, la commission a rejeté cet amendement. M. Jean Proriol a retiré un amendement relatif au développement de la production culturelle, partiellement satisfait par l'amendement de M. Félix Leyzour précédemment adopté.

Le schéma de services collectifs décline les objectifs de l'intervention publique destinés à conforter l'aménagement culturel du territoire.

Il prévoit tout d'abord que soient identifiées des zones d'intervention prioritaire pour améliorer le maillage du territoire. Cette opération devrait être réalisée au plan national, à partir de l'atlas des activités culturelles précité, puis dans le cadre des schémas régionaux d'aménagement et de développement du territoire. Une fois identifiées, ces zones devraient bénéficier de moyens financiers accrus, mobilisés tant par l'Etat que par les régions, les départements et les communes. La commission a adopté un amendement du rapporteur visant à supprimer une redondance entre les efforts et les moyens publics au quatrième alinéa du paragraphe II de cet article (amendement n° 287).

Il convient de rappeler, à cet égard, que la dépense publique se répartit de façon à peu près équilibrée entre l'Etat (36,4 milliards de francs), le ministère de la culture n'en représentant que 19,8 %, et les collectivités territoriales (36,9 milliards de francs). Si l'on peut regretter que l'ensemble des données chiffrées remontent à 1993, il est intéressant de relever que ce sont les communes qui occupent la place essentielle : elles consacrent, en effet, 30 milliards de francs aux dépenses culturelles (40,9 %) quand les départements y consacrent 5,4 milliards de francs (7,4 %) et les régions 1,5 milliard de francs (2 %). C'est dire l'importance que revêt en ce domaine le partenariat entre l'Etat et les collectivités territoriales et l'importance de la coordination des politiques que mènent les divers intervenants.

La politique d'incitation et d'accompagnement de l'action des collectivités locales menée par l'Etat devrait désormais s'orienter davantage vers un rôle de correction des inégalités territoriales. Selon les informations communiquées au rapporteur, cette réorientation devrait se traduire par l'implantation d'équipements dans certaines zones périphériques, notamment grâce à la dynamique d'agglomération ou de pays. Elle passe également par une meilleure diffusion des activités des organismes culturels dans les zones rurales et périurbaines, grâce aux chartes d'objectifs prévues au sixième alinéa du paragraphe II du présent article. Il s'agit donc de mobiliser les institutions existantes pour élargir l'accès aux pratiques culturelles. Tel est l'objet de la " charte des missions de service public pour le spectacle " proposée par le ministère de la culture et de la communication en octobre 1998 et qui devrait être étendue à d'autres secteurs d'activité. Dans la même logique, plutôt que de développer systématiquement l'offre d'équipements, il apparaît plus opportun d'encourager la constitution de réseaux entre les institutions culturelles et les collectivités territoriales.

Le schéma des services collectifs prévoit, par ailleurs, de développer dans chaque région, au moins un pôle artistique ou culturel de rayonnement national ou international. Reprenant pour la culture, l'un des choix stratégiques de la politique d'aménagement du territoire inscrits à l'article 2 du projet de loi, cet objectif pourrait se traduire par des regroupements d'activités autour d'une spécificité " locale " ou d'une vocation à conforter, par exemple, la francophonie à La Rochelle, la photographie à Châlons-sur-Saône ou encore la bande dessinée à Angoulême. Pour faciliter l'émergence ou le développement de ces pôles, le projet de loi rappelle la possibilité de transférer des fonds patrimoniaux ; on pense naturellement aux transferts de collections mal ou pas exploitées par un musée national vers d'autres établissements, par exemple des musées municipaux de province, transferts qui se distinguent d'une simple mise à disposition et ne se pratiquent guère aujourd'hui. Bien entendu, ces transferts devront s'effectuer sans aliénation des biens et être entourés de garanties quant à leur conservation et leur mise en valeur. Afin d'encourager ces opérations, la commission a adopté, au cinquième alinéa du paragraphe II de cet article, un amendement du rapporteur précisant que les transferts de fonds patrimoniaux se réaliseront sans aliénation des collections d'origine (amendement n° 288).

Pour favoriser l'accès aux oeuvres et pratiques culturelles, le schéma prévoit également :

- la conclusion de conventions entre l'Etat et les organismes culturels subventionnés afin de déterminer des objectifs en matière de création, de diffusion et de formation, dans le sixième alinéa du paragraphe II de l'article 12 ; la commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur à cet alinéa (amendement n° 289) ;

- la reconnaissance de toutes les formes d'expression et de pratiques artistiques dans le but de renforcer la politique d'intégration ; la rédaction proposée à cet égard dans le septième alinéa du paragraphe II de l'article 12 apparaît à la fois maladroite et restrictive : d'une part, elle distingue à tort les formes d'expression et la création artistiques, d'autre part, elle se limite aux pratiques artistiques. C'est pourquoi, la commission a adopté un amendement du rapporteur élargissant le champ de la politique d'intégration aux pratiques culturelles (amendement n° 290) ;

- l'utilisation des nouvelles technologies de l'information et de la communication.

Enfin, le schéma des services collectifs mentionne expressément, dans le huitième alinéa du paragraphe II de cet article, la valorisation des cultures et langues régionales comme objectif de l'action de l'Etat dans le domaine culturel. Celle-ci pourrait notamment prendre la forme d'aides à la création, à la traduction de certaines oeuvres et à la diffusion d'émissions audiovisuelles.

La commission a examiné un amendement présenté par le rapporteur proposant une nouvelle rédaction de cet alinéa en vue d'élargir sa portée. Le rapporteur a souligné qu'il lui paraissait opportun de prendre en compte non seulement les langues régionales mais aussi, s'agissant des objectifs stratégiques de l'Etat, la promotion de la langue française et l'apprentissage des langues parlées par les populations vivant sur le territoire national, qu'elles soient françaises ou d'origine étrangère, l'approche multiculturelle des langues constituant elle aussi un facteur d'intégration. M. Jean-Claude Lenoir, appréciant cette initiative, a suggéré d'inclure dans le dispositif la diffusion de la langue française. M. Pierre Ducout a fait observer que la rédaction proposée ne mentionnait plus les cultures régionales car elle était axée sur les langues. M. Eric Doligé, tout en approuvant l'initiative du rapporteur, a émis des réserves sur la mention de l'apprentissage des langues parlées par les Français d'origine étrangère en mettant l'accent sur les difficultés de mise en oeuvre d'un dispositif aussi général dont les conséquences pour les " petites " communes seraient très lourdes. M. Patrick Ollier, après avoir jugé que la nouvelle rédaction proposée par le rapporteur améliorait sensiblement le texte du projet de loi, a cependant estimé que l'intégration passait avant tout par l'apprentissage de la langue du pays d'accueil, ce qui n'empêchait nullement de préserver les cultures des Français d'origine étrangère. Le rapporteur a rappelé qu'il s'agissait de définir les objectifs à long terme du schéma de services collectifs qui n'a pas pour fonction de prévoir de mesures d'application concrète, compte tenu de sa valeur indicative. Il a souligné que la politique d'intégration passait à la fois par l'acceptation de la culture du pays d'accueil et par la préservation de l'identité culturelle du pays d'origine. Il a précisé que son amendement visait en particulier les enfants de la deuxième ou troisième génération, qui bien souvent n'ont pas les moyens d'apprendre la langue maternelle ou paternelle.

Soulignant l'intérêt de l'amendement du rapporteur pour renforcer la politique d'intégration, M. Félix Leyzour a fait observer qu'un débat important avait lieu actuellement sur la signature par la France de la charte européenne des langues régionales et minoritaires qui pourrait poser un problème de constitutionnalité, le français étant la langue officielle de l'Hexagone. M. Paul Patriarche a indiqué que cette charte pourrait poser problème car certains de ses articles confèrent un caractère obligatoire à l'utilisation des langues régionales, par exemple dans l'enseignement scolaire, et s'est prononcé contre une telle contrainte. M. Félix Leyzour a souligné à son tour qu'il était opposé à ce que la charte rende l'enseignement des langues régionales obligatoire tout en mettant l'accent sur la nécessité de les valoriser. Prenant l'exemple de la musique celtique, il a fait observer que son développement reposait sur la sauvegarde du breton. M. Patrick Ollier, rappelant que la transmission des langues s'effectuait surtout dans le cadre familial, s'est interrogé sur le rôle de l'Etat en ce domaine. Il s'est déclaré favorable à la valorisation des cultures régionales ainsi qu'à la préservation de l'identité culturelle des Français d'origine étrangère, tout en considérant que celle-ci ne relevait pas de la politique d'intégration. Le président André Lajoinie a fait observer que l'amendement du rapporteur faisait la synthèse entre les différents intervenants et souligné qu'il s'agissait d'objectifs à long terme, comme il est d'usage dans une loi d'orientation. Après que le rapporteur eut proposé de rectifier son amendement pour tenir compte des observations des commissaires, la commission a adopté l'amendement ainsi rectifié (amendement n° 291).

Puis, elle a examiné un amendement de M. Patrick Ollier tendant à insérer dans l'article 12 un nouvel alinéa afin de mettre l'accent sur le développement des pratiques culturelles des jeunes. Le rapporteur ayant fait observer que les jeunes étaient à l'évidence concernés par l'accès de tous aux pratiques et services culturels, dont ils sont souvent les principaux usagers, et que l'amendement posait des problèmes rédactionnels, M. Patrick Ollier l'a retiré. Un amendement du même auteur tendant à insérer dans le texte le développement des productions culturelles a été rejeté au motif qu'il était partiellement satisfait par les décisions précédentes de la commission.

Par ailleurs, l'article 12 du projet de loi abroge, dans son dernier alinéa, la disposition de la loi du 4 février 1995 qui prévoyait l'articulation entre le schéma des équipements culturels et les contrats de plan Etat-régions. Cette précision perd en effet son utilité, puisque désormais les documents contractuels devront tenir compte de tous les schémas de services collectifs, sans qu'il soit nécessaire de le mentionner pour chacun d'entre eux.

La commission a successivement rejeté un amendement de M. Yves Coussain supprimant le dernier alinéa de l'article 12 et un amendement de M. Patrick Ollier ayant pour objet de maintenir la référence expresse aux contrats de plan Etat-régions dans cet article.

Puis, elle a adopté un amendement du rapporteur visant, dans un souci de lisibilité, à replacer dans l'article 12 les modalités de mise en oeuvre du schéma de services collectifs culturels inscrites à l'article 13 du projet de loi, sous réserve de deux modifications rédactionnelles. Il semble, en effet, préférable que le même article de la loi du 4 février 1995, en l'occurence l'article 16, comprenne toutes les dispositions relatives au même schéma, d'autant plus que les modalités prévues à l'article 13 ne concernent que l'organisation de la concertation dans le domaine culturel et les contrats passés entre l'Etat et les organismes culturels qu'il subventionne avec les collectivités territoriales. C'est, au demeurant, la solution qui a été retenue pour les autres schémas de services collectifs institués par le projet de loi (amendement n° 292).

Puis, la commission a adopté l'article 12 ainsi modifié.

Article 13

(article 16-1 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995)

Modalités de mise en _uvre du schéma
de services collectifs culturels

Cet article s'inscrit dans le prolongement de l'article 12 relatif au schéma de services collectifs culturels. Il comprend deux types de dispositions de nature différente.

·  Le premier alinéa confie à la conférence régionale d'aménagement et de développement du territoire (CRADT) le soin d'organiser la concertation en vue de mieux coordonner les politiques culturelles menées par l'Etat et les collectivités territoriales dans chaque région. La culture est, en effet, un domaine où le partenariat et la politique contractuelle sont les principaux vecteurs de l'action publique. En outre, ce secteur d'intervention n'a pas fait l'objet d'une répartition claire des compétences entre les différents niveaux de décision dans le cadre des lois de décentralisation. Seuls les départements se sont vus transférer la responsabilité des bibliothèques centrales de prêt et des archives départementales. Dès lors que les collectivités territoriales ont une compétence générale dans le domaine culturel, chacune à son échelle d'intervention, l'action est fortement dépendante de la capacité et de la volonté politique des élus. Il en résulte un grand dynamisme mais aussi des risques de doublons, des déséquilibres et des carences persistantes pour certains territoires ruraux et périurbains.

Prévoir un lieu de concertation paraît donc justifié, tout comme le choix de la CRADT comme instance compétente, compte tenu de sa composition et de la création de " formations spécialisées " se réunissant " au moins une fois par an ", aux termes de l'article 6 du présent projet de loi. Quant à l'objet de la concertation, il devrait permettre de renforcer la coordination des actions et des soutiens financiers mis en _uvre par les différents intervenants sur l'espace régional.

·  Le deuxième alinéa de l'article 13 se borne à indiquer que les contrats passés entre l'Etat, les collectivités territoriales et les organismes culturels, tiennent compte des objectifs assignés à ces derniers par le schéma de services collectifs. Il s'agit, rappelons-le, des objectifs de soutien à la création et de diffusion de leurs activités. Cette disposition paraît d'une faible portée ; en effet, il est difficile d'imaginer que l'Etat ou les collectivités territoriales puissent, dans une convention conclue avec un organisme qu'ils subventionnent, s'abstraire d'un schéma qui sert précisément de cadre de référence pour l'action culturelle à long terme.

Suivant la proposition du rapporteur, la commission a adopté un amendement de suppression de cet article afin que l'ensemble des dispositions du projet de loi relatives au schéma de services collectifs culturels figure dans le même article de la loi du 4 février 1995 (amendement n° 293). Elle a par conséquent adopté l'amendement n° 105 de M. Yves Nicolin et l'amendement n° 164 de M. Patrick Ollier ayant le même objet mais fondés sur des motifs différents. Deux amendements, l'un de M. Jean Proriol rappelant le respect du principe de la libre administration des collectivités territoriales, l'autre de M. Eric Doligé faisant référence aux schémas départementaux culturels, ont donc été considérés comme sans objet.

Article 14

(article 17 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995) 

Schéma de services collectifs sanitaires

Cet article a pour objet la mise en place d'un schéma de services collectifs dans le secteur de la santé.

Les données sanitaires influent de fait très fortement sur l'aménagement du territoire. Il est clair ainsi que la qualité de l'offre de soins est un facteur important du choix d'un lieu de résidence ou d'une implantation économique et qu'elle participe directement à la qualité de vie des populations. Il est clair aussi qu'existent des liens étroits entre le domaine sanitaire et l'emploi local.

Le secteur de la santé lui-même nécessite, par ailleurs, un effort de planification à long terme, du fait du coût global et de la durée de vie des équipements concernés, comme de l'incidence importante que peuvent avoir les facteurs démographiques.

Cet article prévoit donc la mise en place dans le domaine sanitaire de la formule du schéma de services collectifs, ce qui doit permettre là aussi une planification s'appuyant d'abord sur l'analyse des besoins existants et y répondant en termes de services rendus, ainsi qu'une meilleure association des partenaires locaux à l'élaboration des propositions.

L'exercice est pour ce secteur particulièrement malaisé, car il importe de faire face à deux grands défis nouveaux qui jouent partiellement en sens contraire : la nécessaire maîtrise des dépenses de santé et l'affirmation de nouveaux besoins par les usagers (développement de la médecine scolaire et de prévention, accueil du quatrième âge, conditions de vie des adultes handicapés, maladies invalidantes, hygiène et cadre de vie).

Cet article a pour objet de remplacer les dispositions de l'article 17 de la loi du 4 février 1995, étant observé que cette dernière prévoyait des dispositions en matière sanitaire dans son article 21.

Le dispositif de l'article 21 de la loi du 4 février 1995 reposait sur un schéma national d'organisation sanitaire, qui n'a en réalité pas été élaboré. L'article 21 assignait à ce schéma national plusieurs rôles essentiels :

- assurer une répartition équilibrée de l'offre sanitaire ;

- donner la priorité à la sécurité des soins ;

- veiller à l'égalité des conditions d'accès à ceux-ci sur l'ensemble du territoire et au maintien des établissements de proximité.

·   L'alinéa premier du nouvel article 17, tel qu'il est prévu par le projet de loi traite lui aussi de l'égal accès aux soins en tout point du territoire, mais y voit " un but " du schéma de services collectifs sanitaires, alors que le schéma national d'organisation sanitaire de la loi du 4 février 1995 devait simplement y " veiller ". Il retient également la préoccupation de sécurité des soins, mais y ajoute celle de leur efficience.

Il est indiqué surtout que le schéma " vise à promouvoir la continuité et la qualité des prises en charge ". L'accent mis sur la qualité des prestations fait passer ainsi d'un système où la proximité des établissements est jugée primordiale, à une vision s'appuyant sur des notions plus larges, celles d'accessibilité et de mise en réseau. La référence faite, par ailleurs, aux " prises en charge " témoigne d'un souci de prise en compte globale, médicale, mais aussi sociale des personnes. L'objectif poursuivi est clairement de mettre en place des réseaux à caractère sanitaire, mais aussi social et médico-social représentant un dispositif gradué et coordonné de professionnels présents sur une même zone sanitaire et y exerçant des missions complémentaires et non plus concurrentes.

Les objectifs assignés au schéma de services collectifs pour le secteur de la santé par l'alinéa premier, on le voit, sont ambitieux et en phase avec les nouveaux grands axes de la politique sanitaire.

Sur le premier alinéa de cet article, la commission a examiné en discussion commune un amendement de M. Patrick Rimbert prévoyant que dans le cadre du schéma de services collectifs sanitaires, ayant pour but d'assurer un égal accès en tout point du territoire à des soins de qualité il faudra " veiller notamment au maintien des établissements de proximité " et un amendement de M. Patrick Ollier mentionnant " le maintien des établissements de proximité dans les régions confrontées à des problèmes d'accès difficile ".

Le rapporteur a fait valoir que le maintien des établissements de proximité, qui était mentionné dans la loi du 4 février 1995, correspond effectivement à un souhait fort de la société et estimé que la rédaction de l'amendement de M. Patrick Rimbert, plus large, était préférable. M. Patrick Ollier a estimé que ce problème se posait fréquemment dans les zones de montagne et souligné la souplesse de la solution qu'il préconisait. La commission a ensuite adopté l'amendement de M. Patrick Rimbert (amendement n° 294), celui de M. Patrick Ollier devenant en conséquence sans objet.

La commission a ensuite adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 295).

·   Le deuxième alinéa de l'article prévoit que le schéma de services collectifs sanitaires " est établi dans le respect du principe d'équilibre financier de la sécurité sociale ". La contrainte ainsi prévue, quoique compréhensible, est particulièrement lourde. L'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui intervient chaque année, ne donne-t-il pas notamment l'occasion de remises en cause du contenu du schéma sanitaire ?

Sur ce point, la commission a examiné trois amendements identiques de MM. Yves Coussain, Félix Leyzour et Patrick Ollier, visant à supprimer le deuxième alinéa de cet article qui prévoit que le schéma de services collectifs sanitaires " est établi dans le respect du principe d'équilibre financier de la sécurité sociale ". MM. Patrick Ollier, Félix Leyzour et Léonce Deprez ont fait valoir que cette disposition ne devait pas figurer logiquement dans un projet de loi consacré à l'aménagement du territoire.

Le rapporteur a exprimé sa compréhension à l'égard des arguments développés puis souligné que, conscient de la nécessité de maîtriser l'évolution des dépenses de santé, il avait présenté un amendement prévoyant que le schéma de services collectifs sanitaires " vise au respect du principe d'équilibre financier de la sécurité sociale ". Après de nouvelles interventions de MM. Patrick Ollier et Léonce Deprez, le rapporteur s'est rallié aux amendements de suppression et a retiré son amendement. Les amendements de MM. Yves Coussain, Félix Leyzour et Patrick Ollier ont été adoptés (amendement n° 296).

·   Le troisième alinéa de l'article dispose que le schéma de services collectifs sanitaires est construit sur la base des schémas régionaux d'organisation sanitaire et des schémas nationaux et interrégionaux prévus aux articles L. 712-1 à L. 712-5 du code de la santé publique.

Il vise ainsi à intégrer le schéma sanitaire dans les mécanismes de planification existants. Rappelons que les schémas régionaux d'organisation sanitaire, prévus à l'article L. 712-3 du code de la santé publique sont établis pour chaque région sanitaire pour tout ou partie des installations ou activités. Les schémas régionaux, qui ont pour objet la recherche d'une satisfaction optimale des besoins de la population, sont élaborés pour cinq ans. Arrêtés par le préfet de région après avis des préfets de départements, ils constituent pour les établissements de santé publics et privés, la référence pour délivrer les autorisations, approuver les projets d'établissement, conduire le processus de contractualisation de ressources et orienter l'allocation.

Les premiers schémas régionaux ont été publiés en 1994 et leur révision a été entamée en mars 1998. Ceux dits de " deuxième génération " devraient poursuivre trois objectifs :

- améliorer la prise en compte par le système de santé et, en son sein, par l'offre hospitalière, des besoins de santé ;

- promouvoir la coordination des soins en développant la complémentarité entre les différents segments de l'offre : médecine hospitalière, médecine de ville, prise en charge médico-sociale ;

- accélérer la recomposition du tissu hospitalier.

Il apparaît ainsi, qu'en prévoyant que le schéma de services collectifs sanitaires " est construit sur la base des schémas régionaux d'organisation sanitaire ", lesquels ont un champ plus restreint, une période d'application plus courte et des procédures d'élaboration de nature différente, cet article du projet de loi réduit quelque peu les ambitions affichées au départ.

Il faut remarquer, qu'aux côtés des schémas régionaux, il existe également des schémas nationaux d'organisation sanitaire sur plusieurs activités de soins hautement spécialisés (notamment transplantations d'organes, greffes de moelle osseuse ou chirurgie cardiaque). Ces schémas nationaux prévus par l'article L. 712-5 du code de la santé publique sont fixés par arrêté ministériel. Du fait du caractère très spécialisé des activités en cause, l'approche nationale apparaît effectivement indispensable pour permettre une répartition géographique adaptée.

Il faut mentionner enfin la carte sanitaire prévue à l'article L. 712-2 du code de la santé publique qui traduit le niveau souhaitable de la quantité de l'offre exprimée le plus souvent en lits ou places (alors que les schémas régionaux d'organisation sanitaire sont chargés de fixer la répartition géographique de l'offre au regard de priorités).

Arrêtée par le préfet de région, la carte sanitaire conjugue un découpage géographique par zones sanitaires et des indices de besoins exprimés en lits ou places, en nombre d'appareils ou d'unités par habitant selon la discipline, l'équipement matériel lourd ou l'activité de soins concernée.

C'est donc dans le cadre complexe de ces différents outils de planification de l'offre, que le schéma de services collectifs sanitaires doit inscrire son action.

Sur les dispositions du troisième alinéa, le rapporteur a présenté un amendement prévoyant que le schéma de services collectifs sanitaires " prend en compte " les dispositions des schémas régionaux d'organisation sanitaire (SROS), alors que le projet de loi dispose qu'il " est construit sur la base " de ces SROS. Le rapporteur a indiqué, en effet, que le schéma de services collectifs sanitaires ne doit pas s'inscrire dans un cadre fermé ni constituer une simple addition des SROS.

M. Jean-Claude Lenoir a estimé qu'une planification de l'offre sanitaire ne peut ignorer le contenu des schémas régionaux, cependant que MM. Jean-Claude Daniel et Félix Leyzour ont jugé que l'Etat doit pouvoir prévoir et programmer les réponses aux besoins existants sans être excessivement lié par ces schémas. M. Patrick Ollier a rappelé que la " loi Pasqua " avait prévu la mise en place d'un schéma national d'organisation sanitaire, pour tenir compte en particulier de certains établissements non traités par la loi hospitalière, notamment les établissements climatiques. Il a fait remarquer également que le schéma national ne devait pas s'analyser comme une simple addition des schémas régionaux d'organisation sanitaire. MM. François Dosé et Jean Proriol ont insisté sur le fait que l'effort de planification sanitaire ne doit pas être enfermé dans le carcan des schémas régionaux d'organisation sanitaire et de l'action des agences régionales de l'hospitalisation.

La commission a ensuite adopté l'amendement du rapporteur (amendement n° 297), puis l'article 14 ainsi modifié.

Article 15

(article 18 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995)

Schéma de services collectifs de l'information et de la communication

L'article 15 du projet de loi substitue au schéma des télécom-munications prévu par l'article 20 de la loi du 4 février 1995 précitée un schéma de services collectifs de l'information et de la communication dont le dispositif constituera l'article 18 de la loi du 4 février 1995 (cet article traitait du schéma directeur routier national, réformé par l'article 32 du projet de loi).

Le schéma des télécommunications prévu par la loi du 4 février 1995 n'a jamais vu le jour. Aucun projet ou avant-projet n'a pu être communiqué à la commission de la production et des échanges. Il est devenu aujourd'hui obsolète en raison de la loi n° 96-659 du 26 juillet 1996 de réglementation des télécommunications. Celle-ci a en effet libéralisé l'offre de services de télécommunications : il ne paraît donc plus désormais possible de fixer par une décision de l'Etat (même indicative comme c'est le cas des schémas de développement) les axes de développement tant technique que physique des réseaux de télécommunications couvrant le territoire national comme le disposait l'article 20 de la loi du 4 février 1995. Les politiques industrielles en matière de télécommunications, de développement des réseaux, d'offre de services, d'orientation tarifaire, etc. ne relèvent plus de l'Etat mais des opérateurs, même si celui-ci exerce un contrôle sur le secteur pour faire prévaloir l'intérêt général notamment au moyen de l'attribution de licences.

En revanche, la politique de recherche en matière de télécommunications, dont le cadre devait être fixé par ce schéma comme le prévoyait le troisième alinéa de l'article 20 de la loi du 4 février 1995, relève toujours aujourd'hui en grande partie de l'Etat au travers de la recherche publique. La recherche en télécommunications est en effet dominée par l'activité du centre national de recherche en télécommunications (CNET), qui est une direction de France Télécom, et le Gouvernement a décidé de la fédérer au travers du réseau national de recherche en télécommunications (RNRT) mis en place en décembre 1997. Le budget du RNRT, qui réunit les laboratoires de recherche des opérateurs et des industriels et les établissements de recherche publique et d'enseignement supérieur, s'élève à 260 millions de francs pour sa première année d'activité ; il est utilisé pour soutenir des projets de recherche labellisés et fédératifs (210 millions de francs) ou des projets compétitifs portés par une PME (50 millions, après instruction de l'ANVAR).

Pour ces motifs tenant à l'ouverture à la concurrence du secteur des télécommunications, le nouveau schéma prévu par le projet de loi porte sur les seuls services collectifs de l'information et de la communication. Il ne concerne en fait que la sphère publique : sont visés le fonctionnement des administrations, l'accès des usagers à certains services publics et les établissements d'enseignement scolaire et supérieur. Dès lors, du strict point de vue du droit, une loi n'est pas nécessaire pour donner une base légale à ce schéma dont la philosophie relève de la bonne organisation des services publics, qui ressortit de la compétence du Gouvernement. L'enjeu politique de ces services est cependant déterminant et mérite l'intervention du législateur.

Que sont les services collectifs de l'information et de la communication ?

Aucun texte légal ou réglementaire ne définit les services de l'information et de la communication. Ce concept recouvre les services offerts au moyen des nouvelles technologies de l'information et de la communication qui permettent de passer par une même communication téléphonique de la voix, du son, des données informatiques et de l'image fixe ou animée. La fourniture de ces services est rendue possible par la numérisation du contenu des informations et leur traitement informatique pour leur transport et leur communication. Désormais les centraux téléphoniques numériques sont de véritables ordinateurs et de jour en jour la frontière entre les télécommunications, l'informatique, l'électronique, la radiodiffusion, la télédiffusion et la communication d'une manière générale s'estompe. C'est à ce processus et ce traitement numérique des informations que se réfère le concept de nouvelles technologies de l'information et de la communication.

Au regard du code des postes et télécommunications, l'offre de ces services impose l'utilisation ou la fourniture du service téléphonique ouvert au public entre points d'abonnement qui est un élément du service universel et éventuellement l'utilisation ou la fourniture d'un service obligatoire (accès au réseau numérique à intégration de services). La réalisation du schéma nécessite donc l'intervention d'opérateurs de télécommunications, mais une licence n'est pas nécessaire dans tous les cas, notamment pour la simple fourniture d'accès à Internet qui ne constitue pas un service téléphonique mais un service de télécommunications libre.

Au regard de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication (article 2), un site Internet est un service de communication audiovisuelle (" mise à disposition du public par un procédé de télécommunication, de signes, de signaux, d'écrits, d'images, de sons ou de messages de toute nature qui n'ont pas le caractère d'une correspondance privée "). Dès lors qu'un service Internet utilise le réseau téléphonique, aucune autorisation du Conseil supérieur de l'audiovisuel n'est nécessaire ; elle n'est requise qu'en cas de diffusion hertzienne des services fournis par le site ou d'utilisation d'un réseau câblé de télévision. En principe, seule une déclaration préalable (auprès du procureur de la République) est nécessaire pour ouvrir un site Internet.

En lui-même, l'accès aux services de l'information et de la communication ne constitue pas une mission de service public puisqu'il ne s'agit pas d'un service téléphonique ni d'un service obligatoire de télécommunications. Il n'est donc pas régi par le principe de l'égalité d'accès des usagers. Le projet de loi indique cependant que le schéma " fixe les conditions dans lesquelles est assurée l'égalité d'accès à ces services " car il s'agit de l'accès au fonctionnement des services publics que le schéma vise.

La commission a rejeté deux amendements de M. Patrick Ollier proposant, l'un, de supprimer l'article, l'autre de le réécrire afin de maintenir le schéma des télécommunications prévu par la loi du 4 février 1995. Elle a également rejeté l'amendement de M. Yves Coussain intitulant le schéma " schéma de développement des technologies de l'information et de la communication ".

Le projet de loi assigne à ce schéma trois objets :

- fixer des objectifs de développement de l'accès à distance (2e alinéa de l'article 18 de la loi du 4 février 1995) ;

- définir les objectifs de numérisation et de diffusion des données publiques (2e alinéa de l'article 18) ;

- déterminer les moyens nécessaires pour promouvoir l'usage des technologies de l'information et de la communication au sein des établissements d'enseignement scolaire et supérieur (dernier alinéa de l'article 18).

En revanche, il ne définit aucun objectif. Ceux-ci seront fixés par le décret en Conseil d'Etat qui arrêtera le schéma. Comme on le verra, des objectifs précis ont cependant déjà été présentés par M. Lionel Jospin et plusieurs ministres sur ce sujet.

M. Félix Leyzour a retiré son amendement prévoyant que le schéma fixe des objectifs de développement des services, le deuxième alinéa de l'article 18 se référant déjà à des objectifs. Il a également retiré son amendement demandant l'égalité d'accès de tous les citoyens à ces services, cette expression étant trop restrictive par rapport à la notion traditionnelle d'usagers. M. Jean Proriol a retiré son amendement ayant le même objet.

Après que M. Jean-Claude Lenoir eut fait valoir que l'objectif du schéma devrait être une couverture de 100 % du territoire par les services de radiocommunication, la commission a rejeté un amendement de M. Yves Coussain proposant que 85 % du territoire national soit desservi par des grands opérateurs de radiocommunications. Elle a également rejeté, au bénéfice des dispositions proposées par M. François Brottes, un amendement de M. Yves Coussain disposant que le schéma définit les conditions de promotion, par l'État, de services utilisant des réseaux interactifs.

Tel qu'il est formulé dans le projet de loi, le premier objet du schéma n'a guère de sens car le développement, en général, de l'accès à distance (sans préciser à quels services) relève de l'offre de services commerciaux, donc du marché. Un schéma est vain s'il n'existe pas de demandes. En revanche, on peut comprendre l'utilité d'un tel schéma pour l'accès à distance aux services publics. Le terme " notamment " cerne donc mal le premier objet du schéma.

Sous cette considération, il faut encore toutefois s'interroger sur l'offre d'" un accès à distance à certains services publics ". Cette formulation restrictive est contraire à l'unité du service public défendue par les groupes de la majorité, notamment lors de la discussion du projet de loi de réglementation des télécommunications. Si l'on comprend que l'accès à distance de certains services publics soit irréalisable ou incompatible avec le fonctionnement du service, nul n'est tenu à l'impossible et en tous les cas, le schéma pourra sélectionner les services concernés ; mais la loi doit fixer un principe général applicable à tous les services publics.

M. François Brottes a présenté un amendement visant à ce que le schéma garantisse notamment :

- une distribution quotidienne, au moins six jours sur sept, du courrier de moins de 350 grammes dans des conditions tarifaires abordables et identiques sur l'ensemble du territoire ;

- une capacité à émettre ou à percevoir des mandats postaux, sans avoir à effectuer un déplacement de plus d'une heure, par le moyen de transport le plus accessible ;

- un accès de proximité aux cabines téléphoniques en fonction de critères d'implantation portant sur la densité de population et la notion de voisinage par rapport à toute zone habitée ;

- une couverture optimale du territoire pour l'utilisation du téléphone mobile cellulaire ;

- une réception correcte des chaînes de radio et de télévision publiques en tout point habité du territoire ;

- des possibilités de connexion à un réseau de télécommunications interactif à haut débit accessibles aux lieux de formation et d'éducation, aux entreprises, aux établissements publics et aux collectivités locales.

Il a fait valoir que les dispositions concernant le service postal et le service des mandats postaux avaient un caractère normatif car il convenait, d'une part, que la loi soit adaptée pour éviter un vide juridique né de l'absence de transposition de la directive européenne du 15 décembre 1997 dans la mesure où celle-ci est en retrait par rapport au contenu du service postal français puisqu'elle prévoit une distribution minimale seulement cinq jours sur sept et, d'autre part, d'affirmer l'importance sociale du service des mandats postaux. Par ailleurs, il a fait observer que le cahier des charges de France Télécom n'était pas suffisamment précis ou contraignant en matière de cabines publiques et de téléphonie mobile.

Le rapporteur a exprimé son accord avec l'amendement sous réserve de l'adoption de deux sous-amendements. Il a cependant fait observer que dès à présent les mandats postaux pouvaient être perçus en tout point du territoire grâce aux facteurs qui peuvent les délivrer et ils peuvent être émis de la même manière en confiant la somme d'argent au facteur qui, le lendemain, vient faire signer le mandat à la personne qui en a demandé l'émission.

La commission a adopté le premier sous-amendement du rapporteur qui prévoit que le schéma définisse les conditions pour assurer les services décrits et non les garantisse.

Le rapporteur a proposé un second sous-amendement visant à supprimer l'objectif de réception correcte des chaînes de radio et de télévision. Il a fait valoir qu'il était matériellement impossible de définir les conditions d'une réception correcte rapide de ces chaînes en raison de la multitude des zones d'ombre existant sur le territoire français, y compris dans les zones habitées. De ce fait, le seul moyen de parvenir à une réception correcte rapide est d'inviter les Français mal desservis à s'équiper en paraboles pour recevoir les émissions satellitaires. En outre, la disposition établit une discrimination entre les chaînes publiques et les chaînes privées, ce qui apparaît peu conforme aux principes constitutionnels et rend la tâche de Télédiffusion de France impossible.

M. François Brottes a estimé que sa proposition n'était pas discriminatoire car il est justifié de garantir une réception correcte des chaînes accomplissant une mission de service public.

M. Eric Doligé a attiré l'attention sur la lourdeur des engagements représentés par cette disposition. Notamment, il s'est demandé si en cas de grève, la proposition de M. François Brottes n'impliquait pas la mise en place d'un service minimum. M. Patrick Ollier a proposé que la loi prévoit simplement la réception des chaînes sans exiger un caractère correct qu'il est difficile d'apprécier. En outre, il a fait observer que lorsqu'on le veut, TDF et les pouvoirs publics dégagent les moyens pour installer des émetteurs. M. Léonce Deprez s'est inquiété de la confusion faite entre ce qui doit relever de la loi et ce qu'il convient de laisser à la charge du Gouvernement. L'amendement de M. François Brottes permettrait d'intenter des recours des usagers contre toute mauvaise réception, ce qui conduira à des contentieux inextricables. M. Christian Estrosi, usant de la faculté offerte par le premier alinéa de l'article 38 du Règlement, a invité les commissaires à rejeter le sous-amendement afin que le Parlement fasse progresser la politique d'aménagement du territoire dans la mesure où les gouvernements n'assument pas leurs responsabilités. Il convient d'avoir les mêmes conditions de confort et de sécurité dans les zones d'habitation reculées que dans les villes. M. Patrick Rimbert s'est déclaré favorable à l'adoption du sous-amendement. M. Jean Proriol s'y est, en revanche, opposé. M. Paul Patriarche a attiré l'attention sur l'importance sociale de la télévision et du nombre de personnes qui vivent sans recevoir de manière correcte certaines chaînes de télévision. M. Patrick Ollier a fait observer que l'accès le plus important aux services publics était, pour de nombreuses personnes, l'accès à la télévision.

Après avoir fait remarquer que son amendement ne limitait en rien le droit de grève, M. François Brottes a accepté la suppression de la disposition dans l'attente d'une nouvelle proposition de sa part. Puis, la commission a adopté le sous-amendement du rapporteur et l'amendement de M. François Brottes ainsi modifié (amendement n° 301).

La commission a ensuite adopté deux amendements de M. François Brottes tendant à englober le secteur postal dans le troisième alinéa du paragraphe II de l'article, dans la mesure où La Poste participe à l'offre de base en matière d'information et de communication (amendements nos 298 et 299). Puis, elle a adopté un amendement de conséquence de M. François Brottes supprimant le quatrième alinéa du paragraphe II, c'est-à-dire le premier objectif proposé par le Gouvernement, rendant ainsi sans objet un amendement rédactionnel du rapporteur (amendements n° 300).

Enfin, la commission a rejeté un amendement de M. Patrick Ollier relatif à la couverture du territoire par des réseaux interactifs à haut débit.

Le deuxième objet du schéma prévu par le projet de loi est fondamental car sans numérisation des éléments d'information détenus par les services publics, les nouvelles technologies de l'information et de la communication ne peuvent se développer.

Le schéma précisera également les objectifs de diffusion des données publiques. D'ores et déjà, le Gouvernement a mis en place un plan d'action en ce sens, qui a été présenté le 16 janvier 1998 par M. Lionel Jospin. Avant la fin de l'année 1999, l'ensemble des services des ministères accessibles par minitel devront être disponibles sur Internet. Tous les ministères devront avoir élaboré en 1998 un plan de mise en ligne sur Internet de leurs données publiques. Dès à présent, les grands textes de droit sont disponibles gratuitement, avec une sélection de jurisprudence, sur le site Legifrance. Selon l'expression du Premier ministre, " l'Internet doit devenir la norme pour l'administration ".

Si on peut être optimiste sur la diffusion des données publiques, il faut s'interroger sur les capacités de consultation dont disposent les usagers. Une politique de développement de sites d'accès publics serait en ce sens utile.

Le troisième objet du schéma correspond là encore à un plan gouvernemental. Le 24 août 1998, M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, a réaffirmé, dans la lignée du plan d'action annoncé par M. Lionel Jospin, qu'en l'an 2000 tous les établissements scolaires français seraient connectés à Internet.

A la rentrée scolaire de 1998, 82 % des lycées et 60 % des collèges étaient reliés à Internet. Pour soutenir l'équipement des écoles en matériels multimédia, le ministère de l'éducation nationale a débloqué 500 millions de francs destinés aux collectivités territoriales exerçant la tutelle sur les établissements. En matière tarifaire, après la suspension, le 19 mai 1998, par le Conseil de la concurrence, de la première offre tarifaire d'accès des établissements d'enseignement à Internet présentée par France Télécom, le second " forfait scolaire Internet " a été homologué en juillet 1998 après avis favorable de l'Autorité de régulation des télécommunications (forfait (1) annuel de 4 890 F pour 380 heures de connexion à Internet destinés à un parc de 15 micro-ordinateurs maximum). Plus de 500 écoles ont déjà souscrit au forfait de France Télécom. En outre, France Télécom propose un forfait annuel d'abonnement de 850 F (" Wanadoo à l'Ecole ") pour une connexion illimitée quel que soit le nombre de micro-ordinateurs.

La commission a adopté l'article 15 ainsi modifié.

Article 16

(article 19 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995)

Schémas de services collectifs de transport de personnes et
de marchandises

La loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aména-gement et le développement du territoire définit, dans sa rédaction actuelle, une politique de transports fondée sur l'offre d'infrastructures par réseaux, ceux-ci devant être coordonnés au sein d'une approche intermodale.

Ainsi, l'article 17 de la loi d'orientation fixe un objectif à terme de vingt ans, selon lequel chaque partie du territoire métropolitain continental devra être distante au maximum de cinquante kilomètres ou trois quarts d'heure de voiture, soit d'une autoroute ou d'une route express à deux fois deux voies en continuité avec le réseau national, soit d'une gare desservie par le réseau ferroviaire à grande vitesse.

Afin d'atteindre ce but, le schéma directeur routier national et le schéma directeur des voies navigables devaient être révisés dans un délai de dix-huit mois et prolongés jusqu'en 2015. Dans le même délai, trois autres schémas, relatifs au réseau ferroviaire, aux ports maritimes et aux infrastructures aéroportuaires, devaient être également établis.

L'article 17 dispose en outre que les cinq schémas précités doivent prendre en compte les orientations des schémas européens d'infrastructures, ainsi que l'objectif d'établissement de liaisons européennes à travers le territoire français.

Il précise également que les schémas doivent veiller à améliorer l'accès à tout le territoire, notamment dans les zones d'accès difficile, et prévoir des modes de transport adaptés pour le trafic des marchandises dans les zones à environnement fragile.

Enfin, les schémas doivent être définis, pour chaque mode, en prenant en compte, au sein de la chaîne de transport, les capacités retenues pour les autres modes.

Ces schémas, comme les autres schémas inscrits dans la loi d'orientation, n'ont pas été établis. Dès lors, en l'état actuel, les schémas préexistants subsistent, portant sur les voies navigables (défini en 1985), les infrastructures routières nationales (1992) et les lignes ferroviaires à grande vitesse (1992).

A la différence de la logique d'offre d'infrastructures qui caractérise les schémas prévus en 1995, le projet de loi s'attache à définir des services de transport tels qu'ils résultent des besoins effectifs.

Par rapport aux dispositions existantes, le projet de loi privilégie également une approche dite multimodale dans la chaîne de transport, même si cette notion n'était pas absente de la loi du 4 février 1995.

Il apparaît en effet plus conforme à l'intérêt général de considérer les modes de transport comme complémentaires et de raisonner en termes d'offre globale de transport.

Trop souvent jusqu'ici en effet, malgré les orientations fixées en 1982 par la LOTI et en 1995 par la LOADT, les habitudes et les structures ont abouti à privilégier une approche technicienne fondée sur un raisonnement en termes d'infrastructures, au sein d'un même mode de transport. Il s'en est suivi un déséquilibre dans l'offre d'infrastructures, un manque certain de prise en compte des besoins d'interconnexion, ce qui a contribué à la poursuite d'une politique peu économe des ressources n'ayant pas empêché pour autant une certaine inefficacité.

Le présent article crée tout d'abord au sein du chapitre V relatif aux schémas sectoriels du titre Ier de la loi du 4 février 1995, une section 5 portant sur les schémas multimodaux de services comportant un seul article, l'article 19.

La loi du 5 février 1995 prévoyait cinq schémas directeurs dans le domaine des transports :

- le schéma directeur routier national,

- le schéma directeur des voies navigables,

- le schéma du réseau ferroviaire,

- le schéma des ports maritimes,

- le schéma des infrastructures aéroportuaires.

L'article 16 du projet les remplace par deux schémas de transport, l'un de voyageurs, l'autre de marchandises.

Votre rapporteur souhaite apporter ici une précision de vocabulaire. En effet, selon le glossaire des statistiques de transport commun à la conférence européenne des ministres des transports (CEMT), à la commission économique des Nations Unies pour l'Europe (CEE-ONU) et à l'Union européenne Eurostat (deuxième édition, 1997), le concept du transport multimodal a été défini par la CEMT comme le " transport de marchandises par au moins deux modes de transport différents ".

Cette notion doit donc être distinguée de celle de transport intermodal, définie dans le même ouvrage de référence comme un mouvement de marchandises (sur une même unité de charge ou sur un même véhicule) par différents modes de transport successifs, sans qu'il y ait manutention des marchandises elles-mêmes lors du changement de mode. La CEE-ONU utilise ce dernier terme dans un sens identique à celui de " transport combiné ", tandis que la CEMT considère celui-ci comme désignant plus spécifiquement un transport intermodal dont les parcours européens s'effectuent principalement par rail, voie navigable ou mer, et les parcours initiaux et terminaux, les plus courts possibles, par route.

Le concept de " multimodalité " est donc ici utilisé par convenance, signifiant qu'il est nécessaire de fonder la politique des transports sur une approche globale qui intègre de manière cohérente les différents modes. Il convient toutefois de souligner que cette acception tend à s'étendre à ce sens, englobant transports de personnes et transports de marchandises.

Trois éléments caractérisent, selon les informations qui ont été communiquées à votre rapporteur, la démarche d'établissement de ces schémas :

- avant d'étudier les moyens de leur mise en _uvre, les schémas sont élaborés tout d'abord à partir d'une interrogation sur les objectifs de services à l'usager, qui doivent être satisfaits. Ainsi, l'infrastructure nouvelle ne sera plus considérée nécessairement comme le meilleur moyen pour améliorer un service de transport ;

- une fois les objectifs de services définis, il sera procédé à une évaluation des avantages et inconvénients des différentes actions envisageables ;

- ces deux premières étapes ayant été conduites, les différents moyens d'améliorer un service de transport seront comparés, l'action la moins coûteuse pour la collectivité publique étant privilégiée : une infrastructure nouvelle ne sera proposée qu'après l'examen de toutes les solutions à moindre coût, telles qu'une meilleure adaptation des infrastructures existantes, l'usage de modes de transport alternatifs, la réforme de la réglementation de la circulation ou la modulation des tarifications pour favoriser un étalement des trafics.

On pourrait s'interroger sur l'existence de deux schémas, l'un pour les voyageurs, l'autre pour les marchandises.

Le recours à deux schémas aurait été, dans une logique d'offre de transport, d'application difficile. En revanche, en raisonnant à partir des besoins, il est utile de distinguer les transports de voyageurs des transports de marchandises, afin d'étudier de la manière la plus pertinente les besoins spécifiques de chacun de ces types de transport.

En revanche, il est évident que l'élaboration des deux schémas devra être conduite de manière simultanée, nombre de déplacements assurant le transport à la fois des passagers et du fret. C'est la raison pour laquelle les deux schémas relèvent conjointement du même cahier des charges, qui définit les principes qu'ils devront retenir. Ce cahier des charges a été publié en annexe de la circulaire du 17 juillet 1998 relative à la préparation des prochains contrats de plan Etat-régions (stratégie de l'Etat dans la région), au Journal officiel du 13 septembre dernier.

Le cahier des charges précise notamment que les schémas de transport devront s'appuyer sur les principes suivants :

- satisfaire la demande de mobilité dans des conditions économiques, sociales et environnementales propres à contribuer au développement durable du territoire ;

- rechercher un développement harmonieux et complémentaire des divers modes, notamment en matière de services à l'usager et aux entreprises, de développement régional, d'aménagement urbain, de protection de l'environnement et d'utilisation rationnelle de l'énergie, avec un souci d'efficacité de la dépense publique ;

- optimiser l'utilisation des réseaux et équipements existants, par des aménagements, des mesures d'exploitation et des tarifications appropriées ;

- favoriser la complémentarité et la coopération entre modes, tant au niveau de la coordination et de l'exploitation des réseaux que de leur extension, notamment par l'aménagement des lieux d'échanges et d'interconnexion ;

- mettre en place des chaînes de transport supplémentaires lorsque celles existantes sont insuffisantes et concevoir les chaînes de transports dans un ensemble intégré au niveau tant des grandes régions géographiques françaises qu'à l'échelon européen ;

- accorder une priorité à l'amélioration des liaisons directes des régions françaises avec les grands pôles de développement internationaux.

Le cahier des charges commun aux deux schémas de transport précise que, dans le cadre de ces principes, les priorités stratégiques doivent être les suivantes :

- assurer la fluidité de l'axe nord-sud Paris-Lyon-Méditerranée et ses antennes vers les vallées de la Moselle et du Rhin, en aménageant des axes alternatifs ;

- contribuer à structurer l'" arc latin " reliant le nord-est de l'Espagne aux régions italiennes du Piémont et de Lombardie ;

- aménager des axes est-ouest reliant rapidement la façade Manche-Atlantique aux grands pôles européens ;

- renforcer la compétitivité des ports français, notamment la Basse-Seine (Le Havre, Rouen) et Fos-Marseille, dans les échanges internationaux, améliorer leur desserte terrestre, privilégier leur complémentarité et développer le cabotage, notamment intraeuropéen, au niveau des ports secondaires (développement de la pratique du " feeding ") ;

- favoriser le développement des liaisons aériennes, notamment internationales, à partir de quelques plates-formes aéroportuaires dites " interrégionales ", c'est-à-dire rayonnant sur une zone de chalandise couvrant une grande région géographique du territoire (grand Sud-Ouest par exemple, autour de l'axe Bordeaux-Toulouse) ;

- donner priorité au mode ferroviaire pour le transit international franchissant les Alpes et les Pyrénées.

Enfin, le cahier des charges des schémas de services de transport prévoit qu'à l'échelle des grandes agglomérations urbaines, et particulièrement de l'Ile-de-France, où se concentrent les principaux besoins d'amélioration des services, les schémas de services collectifs favoriseront d'abord les modes de transports alternatifs à la route, l'interconnexion des réseaux et, au besoin, les infrastructures de contournement qui assurent la continuité du transit et atténuent les nuisances urbaines.

Si on ne peut que partager le souci que l'accent soit mis sur le concept de politique globale de transports, afin de corriger la tendance à une approche trop sectorielle qui subsiste dans la réalité malgré une orientation déjà forte des textes en faveur de la coopération et de la complémentarité entre modes, il faudrait toutefois que le projet de loi ne favorise pas une vision figée des besoins et des infrastructures.

Même si l'objectif chiffré, défini dans le texte actuel de la loi d'orientation du 4 février 1995 d'un maillage du territoire paraît relever trop largement de la déclaration d'intention, il ne faut pas pour autant perdre de vue l'objectif de désenclavement des zones isolées, facteur évidemment primordial d'une desserte équilibrée du territoire et nécessaire pour freiner l'hypertrophie des grands pôles urbains. Il ne faut pas en outre se masquer le fait qu'une offre de services de transport, même privilégiant le transport collectif, notamment dans les zones périurbaines, passe encore par des infrastructures supplémentaires et un effort de la collectivité nationale en faveur des territoires mal desservis.

De plus, la réorientation nécessaire de la politique de transports en faveur de services plus respectueux des besoins des usagers et des entreprises, comme des impératifs de lutte contre les émissions de polluants, ne peut faire l'économie d'une action sur le marché. Dans ce sens, il aurait été utile que la question fondamentale de l'harmonisation sociale, technique et fiscale soit posée comme élément indispensable d'alternative au tout routier. Il est néanmoins évident que la réponse à ce problème ne peut être fournie par la voie d'amendements parlementaires, notamment parce que toute proposition dans ce domaine doit faire l'objet d'une large concertation avec les partenaires sociaux.

En outre, la seule prise en compte des besoins actuels paraît être parfois contradictoire avec la volonté d'aménagement à long terme et une vision dynamique de l'aménagement du territoire. Il conviendra donc, dans la préparation des schémas, de tenir compte des besoins actuels mais aussi des nouvelles demandes générées par une offre supplémentaire d'infrastructures. En un mot il faut avoir une vision prospective de la politique des transports.

L'optimisation de l'utilisation des infrastructures ne saurait concerner les seuls équipements existants : celle-ci vaut pour l'existant comme pour le futur. C'est pourquoi les perspectives de développement des infrastructures doivent être définies à l'intérieur des schémas de services, étant entendu que, conformément à la LOTI, les développements des équipements doivent être maîtrisés de manière cohérente et coordonnée, en favorisant les interconnexions entre modes.

Il s'agit d'aboutir à des schémas de services de transports qui permettent de réorienter efficacement une politique des transports qui a démontré qu'elle avait atteint ses limites : part trop importante du transport routier individuel, des voyageurs comme des marchandises, qui suscite encombrements, pollution et insatisfactions nombreuses, pour les particuliers comme pour les entreprises ; dettes abyssales nées d'infrastructures lancées sans financements adéquats ; retards dans l'interconnexion des réseaux et des modes, particulièrement visibles au regard de ce qui existe dans des pays voisins.

En même temps, si une politique en faveur des modes alternatifs à la route peut aboutir à des succès sensibles, comme le démontre la croissance actuelle de la part du ferroviaire dans le transport de fret ou des passagers sur les lignes régionales, force est de constater qu'il s'agit plus d'un infléchissement que d'un bouleversement. Dans le domaine des transports, les pratiques tant individuelles que collectives, sont la résultante des avancées comme des lourdeurs de la société. Dès lors, une action des pouvoirs publics sur ce seul secteur n'a d'effets souvent qu'à la marge. Par exemple, selon les informations communiquées à votre rapporteur, des études conduites à la demande du ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement démontrent que, même si une politique volontariste de rééquilibrage des parts modales conduisait par hypothèse à fixer, en 2020, les prix toutes taxes du super et du gazole à plus de 13 francs le litre (valeur 1996) et à baisser à l'inverse de 10 % les prix ferroviaires voyageurs, la part du transport routier ne diminuerait pas de façon sensible.

La commission a tout d'abord rejeté un amendement de M. Patrick Ollier de suppression de cet article. Elle a également rejeté, sur proposition du rapporteur, un amendement de M. Jean Proriol tendant à renvoyer à l'ensemble de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs les modalités d'établissement des schémas de transport.

Elle a ensuite examiné deux amendements identiques, l'un de M. Yves Coussain, l'autre de M. Jean Proriol tendant au maintien du premier alinéa de l'article 17 de la loi du 4 février 1995. Un débat s'est engagé sur ces amendements. M. Jean Proriol a considéré qu'il était indispensable de fixer de façon précise les perspectives à long terme d'une desserte équilibrée et équitable du territoire, faute de quoi le schéma resterait trop flou. M. Patrick Ollier a déclaré qu'il fallait conserver des objectifs ambitieux en matière de désenclavement du territoire, notamment des zones de montagne.

M. Christian Estrosi a mis en parallèle le renoncement à l'objectif fixé par la LOADT d'existence de liaisons de transport rapides accessibles de toutes les parties du territoire avec les annulations par le Gouvernement de plusieurs importants projets d'infrastructures, telle la construction du canal Rhin-Rhône, de l'autoroute A51 ou de nouvelles liaisons transalpines.

M. Eric Doligé a relevé qu'il était contradictoire d'accepter de préciser les objectifs des schémas de services collectifs dans certains cas et de les refuser dans d'autres. Il s'est prononcé en faveur d'une politique plus ambitieuse pour la France. Le rapporteur a indiqué en réponse qu'il était évidemment impossible de réaliser en vingt ans, échéance des schémas, l'ensemble des infrastructures qui seraient nécessaires pour remplir les conditions définies par la LOADT en matière de transports rapides.

M. Jean-Jacques Filleul a soutenu la position du rapporteur. Il a estimé qu'une référence aux objectifs de désenclavement trouverait plus sa place à l'article 32 du projet de loi.

M. Félix Leyzour a rappelé qu'en matière de transport le projet de loi tendait à développer l'intermodalité et à rééquilibrer les parts respectives du ferroviaire et de la route. Il a par ailleurs indiqué qu'il restait beaucoup à faire dans ce domaine, ce qui nécessitait à la fois d'optimiser le réseau existant et de prévoir des infrastructures nouvelles.

M. Patrick Rimbert a contesté le sérieux du discours de l'opposition, qui veut à la fois remplir des objectifs de construction d'infrastructures de transport particulièrement difficiles à réaliser en seulement vingt ans, et revendique une utilisation des fruits de la croissance pour réduire le désendettement de l'Etat. Il a rappelé à ce propos que le niveau actuel de l'encours de la dette, tant de Réseau ferré de France que des sociétés concessionnaires d'autoroutes, s'établissait à environ 200 milliards de francs.

M. Jean-Michel Marchand a fait observer que des évolutions étaient intervenues dans la définition des priorités d'aménagement. Toutefois, la construction d'infrastructures nouvelles n'est pas exclue. En outre le projet de loi devrait permettre aux acteurs locaux de mieux contribuer au développement des politiques de transport.

En réponse aux intervenants, le rapporteur a indiqué que l'originalité de ce projet de loi était de prendre en compte la dimension durable du développement, ce qui expliquait la remise en cause de certains projets. Il a par ailleurs fait observer que la notion, contenue dans les amendements, d'un temps de trajet en voiture n'était guère précise et ne tenait pas compte des conditions de circulation. De même, depuis plusieurs années, la tendance est à préférer le développement des trains pendulaires à la construction de lignes nouvelles à grande vitesse, autrement plus coûteuses. Il convient donc de trouver un équilibre entre le développement des infrastructures et les capacités financières et budgétaires de la collectivité. La commission a ensuite rejeté ces deux amendements.

Puis la commission a rejeté, suivant l'avis du rapporteur :

- un amendement de M. Patrick Ollier réintroduisant un schéma des ports maritimes ;

- un amendement de M. Yves Coussain prévoyant à l'horizon 2015 l'obligation d'une desserte de proximité de toutes les aires urbaines par une grande liaison d'aménagement du territoire ;

- trois amendements de M. Patrick Ollier, réintroduisant, le premier, un schéma du réseau ferroviaire, le deuxième, un schéma directeur des voies navigables, et le troisième un schéma directeur routier national ;

- un amendement de M. Claude Hoarau visant à atteindre un même niveau de dotation, par habitant, du fonds d'investissement routier et de transport, en métropole et dans les départements d'outre-mer, le rapporteur ayant fait observer que cet amendement posait des problèmes de recevabilité financière.

La commission a ensuite adopté l'article 16 sans modification.

Article 17

(article 20 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995)

Schéma de services collectifs de l'énergie

Le schéma de services collectifs de l'énergie, institué par cet article, doit prendre la place occupée par le schéma des télécommunications à l'article 20 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 précitée.

Ce schéma doit jouer un triple rôle :

- évaluer l'évolution des besoins et des ressources en énergie des régions ainsi que leurs gisements d'économies d'énergie ;

- déterminer les actions publiques pouvant être menées afin de maîtriser la consommation d'énergie et d'optimiser l'exploitation des ressources locales ;

- présenter les perspectives d'évolution des réseaux de transport et des installations de stockage.

Par ailleurs, le présent article confie à la conférence régionale d'aménagement et de développement du territoire le soin d'organiser la concertation censée coordonner les " politiques énergétiques menées sur le territoire régional ".

La commission a d'abord rejeté un amendement de suppression de l'article 17 présenté par M. Patrick Ollier.

La rédaction de cet article au style peu normatif voire imprécis, pose le problème de l'articulation de l'action des régions avec notre politique nationale de l'énergie et laisse pendante la question de la portée juridique du schéma des services collectifs de l'énergie.

Sur le premier point, il convient de rappeler que l'énergie fait l'objet en France d'une politique nationale. Le présent texte ne le nie d'ailleurs pas puisqu'il précise que le contenu du schéma s'inscrit dans ce cadre. Mais le projet de loi manie également plusieurs notions nouvelles dont la compatibilité avec le concept même de politique nationale est loin d'être évidente. Ainsi l'expression " programmation énergétique territoriale " dont on cerne mal la portée et le périmètre ; que penser par ailleurs du pluriel des " politiques énergétiques " mentionnées au dernier alinéa ? Il est vrai que quelques essais d'" appropriation régionale " de la politique de l'énergie ont été tentées - telle la tentative de programme faite par la région Bretagne en 1997 - mais leur principal effet a surtout consisté à porter à la connaissance de l'Etat les préoccupations locales - souvent légitimes - en matière d'énergie.

Il existe en France une tradition du contrôle du secteur de l'énergie par l'Etat. Celui-ci n'a jamais voulu laisser aux mains d'intérêts privés, un secteur vital pour notre économie et notre indépendance nationale.

La mise en place d'un marché européen intégré de l'énergie pourtant encouragé par les tenants d'un libéralisme de stricte obédience n'a pas remis en cause ce principe. Les Etats membres qui le désirent, demeurent maîtres de leur politique de l'énergie et peuvent à ce titre, mettre en oeuvre une planification à long terme de leurs investissements (cf. article 3 de la directive 96/92/CE du 19 décembre 1996 concernant des règles communes pour le marché de l'électricité). Cette reconnaissance européenne n'a pas été des plus facile à obtenir et a même constitué un des points d'achoppement de la négociation communautaire.

Il importe donc de réaffirmer plus nettement dans cet article l'unicité de notre politique énergétique, celle-ci ne pouvant être la résultante d'une quelconque addition ou superposition de choix régionaux.

C'est pour tenir compte de cette exigence que la commission a adopté deux amendements du rapporteur, le premier supprimant la référence à la programmation énergétique régionale (amendement n° 306) et le second sous-amendé afin de prendre en compte la notion d'" utilisation rationnelle de l'énergie " supprimant au dernier alinéa de cet article la mention de politiques énergétiques jugeant ce pluriel douteux (amendement n° 309).

C'est le même esprit qui animait un amendement présenté par M. Félix Leyzour précisant que les objectifs d'exploitation des ressources locales concourent à l'indépendance énergétique nationale, à la sécurité d'approvisionnement et à la lutte contre l'effet de serre. Celui-ci a donné lieu à un long débat intégrant dans une discussion commune deux amendements respectivement présentés par M. Patrick Ollier et le rapporteur.

Lors de ce débat, le rapporteur a dans un premier temps fait remarquer que sa rédaction était plus globale et se rapprochait plus de la définition de la politique énergétique donnée à l'article premier du projet de loi relatif à la modernisation et au développement du secteur public de l'électricité. MM. Jean-Claude Daniel et Jean-Michel Marchand ont indiqué que l'effet de serre n'était pas le seul risque environnemental lié à l'énergie et qu'en conséquence la rédaction proposée par le rapporteur leur paraissait meilleure. MM. Christian Bataille, Patrick Ollier et Léonce Deprez sont intervenus pour marquer leur accord avec l'amendement proposé par M. Félix Leyzour, M. Patrick Ollier retirant en conséquence un amendement voisin qu'il avait déposé. Le rapporteur ayant décidé à son tour de retirer son amendement, la commission a adopté l'amendement de M. Félix Leyzour (amendement n° 303).

Au-delà de ce problème de fond, l'attribution aux régions de ce que l'on pourrait considérer comme un " commencement " de prérogatives en matière d'énergie soulève d'autres questions.

On peut d'abord s'interroger sur le point de savoir si les collectivités territoriales désirent réellement disposer de pouvoirs propres dans le domaine de l'énergie (ce que le projet de loi ne leur accorde pas de manière explicite mais qui pourrait découler d'expressions telles que " les conditions dans lesquelles (...) les collectivités territoriales pourront favoriser des actions de maîtrise de l'énergie, etc... ou " les politiques énergétiques menées sur le territoire régional ") ; en effet, rappelons que, dans un passé récent, les régions et les départements s'étaient vu offrir un véritable levier fiscal leur permettant à une échelle certes modeste, d'agir sur le secteur de l'énergie (il s'agissait de la simple faculté que leur offrait en 1996 le projet de loi sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie, d'exonérer de la taxe sur les cartes grises et de la vignette, les véhicules roulant au GNV, au GPL ou à l'électricité). Or, les collectivités territoriales ont marqué une telle opposition à cette disposition ne présentant aucun caractère contraignant, que le Parlement renonça à inscrire ces facultés d'exonération dans la loi.

Par ailleurs, s'agissant des énergies de réseaux, la pertinence de l'échelon régional est extrêmement douteuse. En matière d'électricité, le dispatching, pierre angulaire de l'organisation de notre parc de production, est d'abord national puis supra-régional.

Dans le domaine du gaz, le stockage est organisé nationalement, les sites de stockage de GDF n'étant pas dédiés aux aires géographiques avoisinantes, la desserte relève de schémas départementaux et la construction d'infrastructures de transport dépend souvent, en raison du développement du transit gazier à l'intérieur de l'Union européenne, d'accords de fournitures entre pays producteurs et consommateurs nécessitant une autorisation administrative permettant à un gazoduc de traverser notre pays (l'Espagne et l'Italie sont ainsi alimentées en gaz norvégien).

Enfin, la politique d'économies d'énergie se traduit quasi-exclusivement par la définition de normes techniques déterminées soit au niveau européen, soit au niveau national.

Quant à la portée juridique du schéma de services collectifs de l'énergie, il semble acquis que celle-ci sera des plus limitée, ce document servant principalement à informer l'Etat de la position et des souhaits des régions en matière de politique d'énergie. Le projet de loi sur la modernisation et le développement du service public de l'électricité ne mentionne dans aucun article l'existence du schéma de services collectifs de l'énergie. Ainsi la programmation pluriannuelle des investissements de production d'électricité, pierre angulaire de notre politique de l'électricité dans un marché ouvert à la concurrence devrait s'élaborer suivant une procédure ne prenant pas en compte le contenu des schémas. On peut penser que plusieurs autres documents - schémas départementaux de desserte du gaz, contrat d'objectifs de GDF, contrat d'entreprise d'EDF - " s'appuient " également sur ce schéma. De même, on peut imaginer que les travaux des comités régionaux de concertation, compétents pour les tracés des lignes à haute et très haute tensions prendront en compte le contenu du schéma.

De surcroît, les dispositions du schéma portant sur les produits pétroliers ne pourront, en raison de la privatisation de ce secteur de l'économie, que relever du simple voeu. Ce point mérite d'être souligné car la fermeture à grande échelle des stations-service situées dans les zones rurales constitue un des facteurs les plus préoccupants de " désaménagement " du territoire dans le domaine de l'énergie.

Pour ces multiples raisons, le schéma de services collectifs de l'énergie ne peut être qu'indicatif, ce qui ne rend pas pour autant vain l'exercice consistant à l'élaborer. En effet, les régions sont certainement les entités les plus indiquées pour déterminer et promouvoir les sources locales d'énergie renouvelable. En effet ce type d'énergie étant principalement utilisable sur des niches de marché (c'est-à-dire pour des périmètres de desserte limités), seule une autorité locale est susceptible d'identifier avec précision les ressources et les besoins. Dans cet esprit le rapporteur a présenté un amendement précisant que sont visées à l'article 17, les sources locales d'énergie renouvelables et d'utilisation rationnelle de l'énergie. Cet amendement a été adopté par la commission (amendement n° 304).

Puis, après avoir rejeté un amendement de M. Jean Proriol, la commission a adopté un amendement du rapporteur indiquant les conditions dans lesquelles l'Etat et les collectivités territoriales peuvent mener des actions de maîtrise de l'énergie (amendement n° 307).

La commission a également adopté un amendement corrigeant une erreur matérielle du texte (amendement n° 302) et deux amendements indiquant que le stockage visé à cet article concerne le gaz naturel, ce qui implique que les stockages de déchets radioactifs et les stockages de pétrole, ces derniers étant partiellement soumis à des règles spécifiques en raison de leur caractère stratégique, sont exclus du champ d'application du schéma (amendements nos 305 et 308).

Abordant la question de la conférence régionale d'aménagement et de développement du territoire, la commission a rejeté un amendement de M. Patrick Ollier et deux amendements de M. Jean Proriol apportant des précisions jugées non nécessaires sur ses conditions de fonctionnement, M. Félix Leyzour ayant pour sa part retiré un amendement.

La commission a ensuite adopté l'article 17 ainsi modifié.

Article 18

(article 21 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995)

Schéma de services collectifs des espaces naturels et ruraux

La stratégie de développement durable qui sous-tend l'ensemble du projet de loi trouve une application particulière dans cet article qui consacre les espaces naturels comme enjeu de l'aménagement du territoire.

La création d'un schéma de services collectifs des espaces naturels et ruraux conduit, en effet, à considérer ces territoires comme une ressource à part entière qu'il convient de mettre en valeur en conciliant son utilisation économique et sa préservation à long terme au bénéfice de tous. Elle traduit la volonté de privilégier une gestion patrimoniale de l'ensemble des espaces non bâtis plutôt que d'assurer la protection de zones naturelles isolées et gérées sans lien avec les espaces ruraux et urbains qui les entourent.

Les espaces naturels doivent, en effet, être pris en considération de façon globale en termes d'utilité économique, de protection des milieux naturels et de fonction sociale. Ils représentent près de 92 % du territoire national dont 56,2 % sont consacrés à la production agricole, 27,8 % sont réservés à l'exploitation forestière et 7,9 % sont sans usage ou réservés pour la protection d'un milieu naturel, selon le rapport sur l'état de l'environnement réalisé par l'Institut français de l'environnement (IFEN) dans son édition pour 1999.

A partir de ces données générales, on peut distinguer trois grands modes dominants d'utilisation des espaces naturels, sous la réserve que le même espace peut faire l'objet de plusieurs usages simultanés :

- les utilisations productives par l'agriculture, la sylviculture, la pisciculture, qui représentent la fonction la plus importante en termes d'occupation du territoire ;

- les usages sociaux, grâce aux terrains affectés à l'habitation, aux équipements, aux fonctions de loisirs et de sport, à la protection du milieu naturel, aux espaces verts, que l'on peut considérer comme des espaces producteurs de services ;

- les espaces sans usage économique ou social, comme les friches par exemple.

Outre leur importance quantitative, ces espaces se caractérisent par leur richesse et leur diversité. La valeur de ce patrimoine doit aussi être appréciée au regard de son évolution. L'utilisation des sols n'est pas figée. Les espaces naturels et ruraux diminuent à un rythme continu, de l'ordre de 40 000 hectares par an ; l'urbanisation et les infrastructures consomment peu à peu des terres agricoles et des espaces forestiers, notamment dans les zones périurbaines, entraînant une " artificialisation " des sols irréversible. A l'inverse, les surfaces forestières s'accroissent régulièrement, de l'ordre de 30 000 hectares par an. Les espaces naturels sont, en outre, soumis à de fortes pressions dues à l'impact des activités humaines : agriculture intensive, émissions de substances polluantes par les véhicules et les industries, sur-fréquentation touristique...

Partant des services que ces espaces rendent à la collectivité en termes de développement économique local, de qualité de la vie et de réponse à une demande sociale d'environnement de plus en plus forte, cet article propose de mieux tirer parti de cette richesse.

La commission a examiné un amendement de suppression de cet article présenté par M. Patrick Ollier. Soulignant que cette fois il ne proposait pas de retour à la loi " Pasqua ", M. Patrick Ollier s'est interrogé sur la pertinence d'un schéma de services collectifs des espaces naturels et ruraux qui, contrairement aux transports ou à la santé, ne rendent pas, en tant que tels, de services au public. Le rapporteur a estimé au contraire que ces espaces, par leurs fonctions économique, environnementale et sociale, rendaient de multiples services à la collectivité en tant que support foncier des activités agricoles, comme espaces de loisirs et de tourisme, en termes de préservation des ressources ou encore comme facteur de prévention des risques naturels. Insistant sur la nécessité de préserver les espaces naturels afin de les soustraire à un urbanisme sauvage, notamment dans les zones littorales, M. Félix Leyzour a souligné l'intérêt des conventions conclues entre les collectivités locales et les propriétaires privés afin d'ouvrir ces espaces au public. M. Jean-Michel Marchand a mis l'accent sur l'utilité sociale de ces espaces pour les habitants des zones urbaines. M. Patrick Ollier a indiqué qu'il souhaitait la préservation et la mise en valeur des espaces naturels, qu'il était même favorable à la création d'un réseau national des espaces protégés, mais contestait leur caractère de " services collectifs ". Après les interventions de MM. Pierre Ducout et Jean-Claude Daniel relevant l'importance des services rendus sur les territoires naturels et ruraux, la commission a rejeté l'amendement de suppression. Elle a également rejeté l'amendement n° 25 de M. Michel Bouvard, un amendement de M. François Sauvadet et un amendement de M. Jean Proriol ayant pour objet de restreindre le schéma aux seuls espaces naturels protégés.

Le premier paragraphe de l'article 18 procède à l'intégration formelle du nouveau schéma de services collectifs dans la loi du 4 février 1995. Cependant, la création de trois autres documents relatifs à l'information et à la communication (article 15), aux schémas multimodaux de transports (article 16) et à l'énergie (article 17) a été mal prise en compte dans la recomposition du texte. En conséquence, la commission a adopté un amendement du rapporteur rectifiant cette erreur matérielle (amendement n° 310).

Le second paragraphe propose une nouvelle rédaction de l'article 21 de la loi du 4 février 1995 jusqu'alors consacré au schéma national d'organisation sanitaire. Il pose le principe de l'élaboration du schéma des services collectifs en indiquant que ce document fixe les orientations fondamentales de la " valorisation économique, environnementale et sociale " des espaces naturels et ruraux. Il met ainsi en lumière la multifonctionnalité de ces territoires, à l'instar du projet de loi d'orientation agricole adopté par l'Assemblée nationale le 13 octobre dernier.

Le schéma recouvre, en effet, deux objectifs stratégiques de l'Etat : faire reconnaître la multifonctionnalité de ces espaces et privilégier une approche globale du territoire.

·  Le premier objectif est inscrit dans le premier et le troisième alinéas du nouvel article 21 de la loi du 4 février 1995 (deuxième et quatrième alinéas du paragraphe II de l'article 18 du projet de loi). L'application du concept de développement durable suppose la combinaison des facteurs économiques et sociaux avec les enjeux environnementaux.

La commission a adopté un amendement du rapporteur en vue de préciser dès le début du nouvel article 21 de la loi du 4 février 1995 les principes de multifonctionnalité des espaces naturels et ruraux et de mise en valeur durable de ces espaces qui ne sont mentionnés qu'au quatrième alinéa du paragraphe II de l'article (amendement n° 311). En conséquence, elle a rejeté un amendement de M. Pierre Micaux relatif à la concertation avec les instances élues locales. Puis, elle a adopté un amendement du rapporteur insérant également dans cet alinéa le principe d'une gestion équilibrée de ces espaces et assurant l'articulation entre le schéma de services collectifs et les contrats territoriaux d'exploitation prévus par la loi d'orientation agricole (amendement n° 312).

Le schéma ayant pour finalité de répondre à la demande sociale de qualité de la vie et de mettre en valeur le patrimoine naturel décrira les mesures destinées à :

- améliorer la qualité de l'environnement et des paysages ; cet objectif ambitieux vise probablement la mise en oeuvre d'actions préventives en vue de protéger les espaces les plus remarquables et d'actions correctives de réhabilitation, notamment sur le littoral et dans les zones périurbaines ;

- préserver les ressources naturelles, en particulier celles qui ne sont pas renouvelables. Les espaces naturels jouent, en effet, un rôle fondamental aussi bien pour la qualité des sols et, par conséquent, des eaux que pour le maintien des quantités d'eau disponibles ou encore la prévention des risques d'inondation. Il s'agira par exemple d'améliorer le système de gestion intégrée de l'eau ; à cet égard, la généralisation des périmètres de protection de captage pour l'eau potable ou la mise en oeuvre de pratiques agricoles adaptées (mise aux normes des bâtiments d'élevage, diminution de l'utilisation des engrais et des produits phytosanitaires...) sont des vecteurs essentiels ;

- maintenir et développer la diversité biologique. Cette action suppose l'identification de priorités thématiques et territoriales pour le moyen et le long termes et la mise en place d'un programme pour assurer la sauvegarde du patrimoine. Le schéma des services collectifs des espaces naturels et ruraux intégrera donc la mise en oeuvre de la directive 92/43/CEE du 21 mai 1992 relative à la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages, dite directive " habitats ". Rappelons que le coeur du dispositif est la création d'ici 2004 du réseau Natura 2000, c'est-à-dire d'un réseau de protection des habitats naturels menacés de disparition ou vulnérables ou encore caractéristiques de l'une des six régions bio-géographiques de l'Union européenne. Celui-ci doit contribuer à la réalisation des objectifs de la convention mondiale sur la préservation de la diversité biologique, adoptée au " Sommet de la Terre " de Rio de Janeiro en juin 1992 et ratifiée par la France.

D'ici 2004, les Etats membres devront désigner les sites retenus comme " zone spéciale de conservation " ; le réseau Natura 2000 inclura aussi les " zones de protection spéciale " issues de la mise en oeuvre de la directive n° 79/409/CEE du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages, dite directive " oiseaux ". La première étape de la procédure, c'est-à-dire la réalisation de l'inventaire des sites susceptibles de participer au réseau, est achevée : 1 316 sites couvrant une superficie d'environ 7 millions d'hectares, soit 13 % du territoire national, ont été identifiés. Compte tenu de la diversité des milieux concernés (espaces agricoles et forestiers, zones humides...), les zones d'intérêt écologique majeur ne peuvent être préservées et entretenues que si des mesures de gestion sont clairement définies par la voie contractuelle avec l'ensemble des acteurs concernés. Des documents d'objectifs seront établis précisant, pour chaque site, les orientations de gestion, les moyens financiers d'accompagnement ainsi que les modalités de mise en oeuvre des mesures de conservation ;

- assurer une meilleure prévention de certains risques naturels, comme les crues, mouvements de terrain, incendies de forêt et avalanches ; la réalisation de bassins de retenues, la création de champs d'expansion des crues et l'entretien des cours d'eau concourent par exemple à la prévention des inondations ; de même, le reboisement et le maintien d'une activité agricole intégrée au site permettent de limiter l'érosion des sols en cas de fortes précipitations ou les risques d'incendie de forêt dans les zones méditerranéennes. Cependant, quelle que soit la contribution des espaces naturels et ruraux à la prévention des risques, celle-ci ne peut être qu'une réponse partielle. L'identification des zones à risque, la mise en oeuvre de plans de prévention sont indispensables, tout comme la maîtrise de l'urbanisation dans les zones vulnérables ;

- contribuer à la prévention des changements climatiques. Les espaces naturels, plus particulièrement les espaces forestiers, jouent un rôle important dans la lutte contre l'effet de serre, en stockant le carbone tant dans les sols que dans les végétaux, même si d'autres moyens doivent être mobilisés, au premier chef la réduction des émissions provenant du transport automobile et routier. Du reste, le plan national de lutte contre l'effet de serre prévoit le développement des surfaces boisées de 30 000 hectares par an jusqu'en 2005.

La commission a examiné plusieurs amendements portant sur la deuxième phrase du premier alinéa du nouvel article 21 de la loi du 4 février 1995 (deuxième alinéa du II de l'article 18) qui décrit les mesures que l'on vient d'examiner.

Elle a tout d'abord rejeté un amendement de M. Patrick Ollier visant à mentionner la mise en valeur des ressources naturelles au même titre que leur préservation, au motif qu'il était partiellement satisfait par les amendements précédemment adoptés. Elle a ensuite adopté un amendement supprimant la mention de la prévention de certains risques naturels, après que le rapporteur eut expliqué qu'il proposait une rédaction plus complète sur la mise en oeuvre de cette politique et souhaitait, en outre, l'étendre à l'ensemble des risques naturels (amendement n° 313). En conséquence, les amendements de M. Patrick Ollier et de M. Félix Leyzour procédant à la même extension sont devenus sans objet. La commission a alors adopté l'amendement du rapporteur visant à préciser que le schéma de services collectifs détermine les conditions de mise en oeuvre des actions de prévention des risques naturels afin d'assurer leur application homogène et adaptée sur l'ensemble du territoire national (amendement n° 314). MM. Jean-Claude Daniel et Eric Doligé s'étant interrogés sur la contribution des espaces naturels à la prévention des changements climatiques, le rapporteur a indiqué que le texte visait notamment la politique de boisement mise en oeuvre dans le cadre du plan national de lutte contre l'effet de serre.

·  Le second objectif stratégique de l'Etat, exprimé par le schéma des services collectifs des espaces naturels et ruraux, est de privilégier une approche globale du territoire.

Cet objectif est inscrit au deuxième alinéa du nouvel article 21 de la loi du 4 février 1995 (troisième alinéa du paragraphe II de l'article 18). Le schéma devra tout d'abord identifier les territoires " selon les fonctions auxquelles ils devraient être principalement affectés ". Devraient ainsi être pris en compte leur usage traditionnel et leur intérêt en tant qu'élément du patrimoine naturel, de sorte que l'on puisse définir les mesures de protection et de gestion correspondantes.

Le schéma devra également identifier les " réseaux écologiques " qu'il convient d'organiser. Il s'agit d'assurer la continuité entre les espaces protégés et les zones environnantes, en cohérence avec les autres schémas de services collectifs, en particulier les schémas multimodaux de transport. Cette nouvelle approche s'inspire du " réseau écologique national " mis en place aux Pays-Bas, en raison des contraintes pesant sur l'espace du fait d'une forte densité de population, des risques majeurs d'inondations et de l'impact des activités agricoles. Ce réseau, qui couvre 20 % du territoire néerlandais, est intégré au schéma structurel de l'espace rural ; il est constitué d'un " noyau dur " d'espaces protégés, de zones de reconquête et de zones de liaison avec les espaces environnants.

Il est ainsi envisagé de " ménager des corridors écologiques " entre les milieux de grand intérêt afin de constituer une " trame verte " reliant les différents territoires : rivières, zones humides, zones littorales, pelouses sèches, landes, massifs forestiers, etc...

Il ne paraît pas inutile de rappeler, à cet égard, les divers modes de protection existants. Outre les zones délimitées par les documents d'urbanisme (zones ND des POS), l'on peut distinguer trois types d'instruments :

- la protection réglementaire concerne principalement les sites classés, les 141 réserves naturelles (443 795 hectares), principalement dans les zones de montagne, les zones humides et les zones côtières ; les 7 parcs nationaux (Vanoise, Port-Cros, Pyrénées occidentales, Cévennes, Ecrins, Mercantour, Guadeloupe) dont les zones centrales couvrent 369 349 hectares et les zones périphériques 921 088 hectares, les forêts de protection, les réserves biologiques et les périmètres de captage des eaux. Il existe donc une palette d'outils diversifiés, mais les surfaces concernées restent isolées et modestes ;

- la protection par la maîtrise foncière est mise en oeuvre essentiellement par le Conservatoire du littoral et des rivages lacustres sur les terrains qu'il a acquis (53 000 hectares), les espaces naturels sensibles définis par les départements, les conservatoires régionaux d'espaces naturels et les conservatoires botaniques ;

- la protection conventionnelle est mise en oeuvre par les 36 parcs naturels régionaux dont la superficie couvre près de 10 % du territoire national.

Il convient également de mentionner les espaces protégés en vertu de directives européennes ou de conventions internationales. Pour les premières, il s'agit des 100 zones de protection spéciale de la directive " oiseaux " (700 000 hectares) et des futures zones spéciales de conservation de la directive " habitats " en vue de constituer le réseau Natura 2000 ; s'agissant des secondes, on peut citer la convention de Ramsar de 1971 concernant les zones humides, la convention de Berne de 1979 relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel en Europe ainsi que la convention de Barcelone de 1982 prévoyant la création d'aires protégées en Méditerranée.

Le schéma de services collectifs n'est pas prescriptif. Sa mise en oeuvre n'aura donc pas d'effet sur les instruments existants ; elle sera cependant l'occasion de mieux articuler les dispositifs de protection et surtout de les mettre en perspective avec les outils de planification et les mesures de gestion des territoires auxquels ils s'appliquent, qu'il s'agisse des directives territoriales d'aménagement ou des schémas d'aménagement et de gestion des eaux par exemple.

La commission a examiné un amendement de M. Patrick Rimbert visant à supprimer dans le troisième alinéa du paragraphe II de l'article 18 l'identification des territoires selon les fonctions auxquelles ils devraient être principalement affectés. M. Patrick Rimbert a indiqué que la rédaction du projet de loi risquait de figer la situation et d'empêcher toute évolution future des territoires. Le rapporteur a mis l'accent sur l'utilité d'une typologie, partant de l'existant et intégrant la multifonctionnalité des espaces naturels et ruraux. Il a proposé de modifier la rédaction en faisant référence à la vocation principale des territoires. M. Patrick Ollier a estimé que la rédaction suggérée par le rapporteur serait en tout cas préférable à celle du projet de loi qui tend à figer l'usage des territoires pour vingt ans et reflète une volonté sous-jacente de zonage. M. Jean-Claude Daniel a jugé plus opportun de se référer à la destination principale des territoires. Après les interventions de MM. François Brottes, Serge Poignant, Félix Leyzour, Léonce Deprez, Patrick Ollier et celle du rapporteur se ralliant à la position exprimée par M. Patrick Rimbert, la commission a adopté cet amendement (amendement n° 315).

Puis, elle a examiné un amendement visant à substituer à l'identification des territoires selon les degrés de protection qu'ils requièrent une identification reposant sur les mesures de gestion, le rapporteur précisant qu'il fallait concilier les activités humaines et la protection de l'environnement. M. Jean-Michel Marchand a estimé préférable de mentionner à la fois les deux éléments, certains espaces naturels devant bénéficier de dispositifs de protection contraignants. Le rapporteur a indiqué que son amendement ne l'excluait aucunement, tout espace bénéficiant de mesures de protection faisant simultanément l'objet d'une gestion. Après l'intervention de M. Félix Leyzour approuvant la position du rapporteur, la commission a adopté l'amendement (amendement n° 316).

Elle a ensuite adopté l'amendement n° 70 cor. de M. Léonce Deprez et un amendement identique du rapporteur supprimant le quatrième alinéa du II de l'article 18, dont les dispositions ont été replacées en début d'article (amendement n° 317), M. Léonce Deprez ayant indiqué que les principes définis à cet alinéa devaient plutôt relever du schéma régional d'aménagement et de développement du territoire. En conséquence, la commission a considéré comme sans objet un amendement de M. Patrick Ollier visant à mentionner dans cet alinéa le développement des territoires.

Aux termes du cinquième alinéa du paragraphe II de l'article 18, le schéma devra définir également les territoires dégradés qui nécessitent une reconquête. Il serait utile que cet inventaire s'accompagne d'un programme pluriannuel de réhabilitation, à l'instar des " opérations grands sites " déjà réalisées, par exemple dans les gorges de l'Ardèche ou à la Pointe du Raz, ou en cours, comme le rétablissement du caractère maritime de la baie du Mont-Saint-Michel. Les actions de réhabilitation pourront concerner non seulement des espaces naturels au sens strict mais aussi des zones périurbaines, pour traiter le problème des entrées de villes notamment.

La commission a rejeté l'amendement n° 71 cor. de M. Léonce Deprez visant à supprimer cet alinéa, son auteur soulignant que les opérations de reconquête des territoires dégradés devaient relever des schémas régionaux d'aménagement et de développement du territoire. Après les explications du rapporteur, indiquant que le schéma de services collectifs devait en fixer les objectifs à long terme et que ces opérations pourront bénéficier d'un financement de l'Etat, M. Léonce Deprez a indiqué qu'il allait retirer cet amendement. Après l'intervention de M. Patrick Ollier proposant un sous-amendement rédactionnel, la commission a adopté un amendement du rapporteur afin de rendre plus dynamiques les orientations du schéma en précisant qu'il ne suffit pas d'identifier les territoires les plus dégradés mais qu'il fallait aussi définir des actions en vue de leur reconquête, à l'instar du rétablissement du caractère maritime de la baie du Mont-Saint-Michel ou de la reconquête écologique de l'étang de Berre (amendement n° 318). Elle a en conséquence rejeté un amendement de M. Jean Proriol tendant à substituer le terme de restauration à celui de reconquête.

L'avant-dernier alinéa du paragraphe II de l'article 18 prévoit la mise en place d'outils pertinents pour évaluer le devenir des territoires : les indicateurs de développement durable. Il s'agit de croiser les données économiques, sociales et environnementales afin de tenir compte de leur interdépendance pour une " croissance soutenable " à long terme. En effet, ni les indicateurs économiques, ni les indicateurs de l'environnement ne permettent d'appréhender de façon suffisamment globale l'impact des activités humaines sur les espaces naturels et d'infléchir en conséquence les politiques publiques. L'IFEN a été chargé d'élaborer des indicateurs de développement durable pour la France. Votre rapporteur regrette de ne pouvoir présenter un exemple concret, illustrant l'intérêt de cette démarche. Selon les informations qui lui ont été fournies, les indicateurs " classiques " mesurant l'évolution des espaces naturels (prélèvement et consommation d'eau, qualité de l'eau, érosion et qualité des sols, artificialisation et mitage...) devraient être associés à des indicateurs sociaux, tels que " l'inégalité d'accès à ces espaces, la perte de patrimoine naturel, le stress, l'éducation à l'environnement... " et des indicateurs économiques, tels que le nombre d'emplois, les revenus liés à l'utilisation de ces espaces, la valorisation énergétique...

Après avoir rejeté l'amendement n° 72 cor. de M. Léonce Deprez tendant à supprimer cet alinéa, la commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 319).

Puis, elle a examiné un amendement de M. Serge Poignant précisant que le schéma de services collectifs devait être élaboré en concertation avec tous les acteurs locaux des territoires concernés. M. Serge Poignant a souligné la nécessité d'une large concertation sur ce schéma dont la mise en place du réseau Natura 2000 sera une composante essentielle. M. Jean-Claude Daniel a déclaré comprendre l'argumentation de M. Serge Poignant mais jugé que cet amendement n'avait pas sa place dans l'article définissant les objectifs stratégiques de l'Etat à long terme. Le rapporteur a indiqué que les procédures de concertation liées à la mise en place du réseau Natura 2000 restaient valables et rappelé la création de comités départementaux de suivi en vue d'associer l'ensemble des partenaires intéressés à l'élaboration des documents d'objectifs, puis à la définition de mesures de gestion, assorties d'éventuelles compensations financières. La commission a rejeté l'amendement de M. Serge Poignant.

Le dernier alinéa de l'article 18 se borne à préciser qu'un rapport sur l'état du patrimoine naturel ainsi que ses perspectives de conservation et de valorisation est annexé au schéma de services collectifs. Ce rapport sera élaboré principalement à partir de l'inventaire des zones naturelles d'intérêt écologique, floristique et faunistique (ZNIEFF) réalisé sous l'égide du Muséum national d'histoire naturelle depuis 1982, des fichiers des zones de protection spéciale réalisés en application de la directive " oiseaux " de 1979 ainsi que, le cas échéant, des inventaires départementaux du patrimoine naturel institués par l'article 30 de la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement. Il convient de noter que ce rapport devrait être révisé tous les six ans, en même temps que le schéma de services collectifs auquel il est annexé, en application de l'article 9 du projet de loi qui soumet l'ensemble des schémas à révision un an avant l'échéance des contrats de plan Etat-régions.

Après avoir rejeté l'amendement n° 73 cor. de M. Léonce Deprez visant à supprimer cet alinéa, puis adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 320), la commission a examiné un amendement de M. Patrick Ollier visant à préciser que l'évaluation des perspectives de conservation et de mise en valeur du patrimoine naturel devait s'accompagner d'une évaluation de leur coût et de leurs effets économiques. Le rapporteur ayant émis des réserves sur la possibilité d'évaluer les effets économiques à long terme et souligné qu'il fallait aussi intégrer les avantages induits des mesures de gestion, M. Patrick Ollier a retiré son amendement.

Puis, la commission a adopté l'article 18 ainsi modifié.

Article 19

(article 22 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995)

Reconnaissance des pays et chartes de pays

Cet article modifie l'article 22 de la loi du 4 février 1995 relatif à la reconnaissance des pays ; son champ d'application est plus large puisqu'il inclut en outre les modalités d'élaboration des chartes de pays par les communes et leurs groupements et les conditions posées à son adoption pour celles-ci.

1. Le texte du projet de loi

S'agissant de la reconnaissance des pays, l'article 22 de la loi du 4 février 1995 a fait de la cohésion géographique, culturelle, économique ou sociale, la détermination du critère de pays. Le pays n'est donc pas une circonscription administrative supplémentaire ou une collectivité territoriale de plus. Le pays se constate parce qu'il est une entité géographique fondée sur une réalité spatiale et une réalité humaine. Tout en renouant, dans de nombreux cas avec des solidarités inscrites dans l'histoire ou la géographie, le pays correspond à l'aire d'attraction d'une (ou plusieurs) ville(s) moyenne(s) ou petite(s), voire, le cas échéant, d'une agglomération significative. Il est un cadre de solidarité réciproque entre pôles urbains et espaces ruraux.

C'est la commission départementale de coopération intercommunale (CDCI) qui opère la constatation du pays.

Au 15 décembre 1998, 71 pays ont été constatés par les commissions départementales de coopération intercommunale compétentes. A ce chiffre doivent être ajoutés 22 des pays reconnus par la DATAR mais n'ayant pas fait l'objet d'une constatation par la CDCI ; il s'agit de pays ayant participé à l'opération dite de " préfiguration " par la DATAR (opération lancée sur 42 " pays-tests ").

Au total, on estime que 160 pays sont en cours d'organisation au niveau national.

Cet article consolide la politique de pays mise en oeuvre par la loi du 4 février 1995 en ouvrant la possibilité aux pays de s'inscrire dans les contrats de plan Etat-régions.

Dans l'optique du projet de loi, le pays constitue en effet une des mailles importantes du territoire régional, caractérisée par l'existence de fortes interdépendances entre les diverses composantes rurales et urbaines qui le constituent et une communauté manifeste d'intérêts entre ses divers agents économiques et sociaux.

Cadre d'impulsion, d'animation et de coordination, il doit aider à démultiplier les capacités d'agir des communes et de leurs groupements en leur offrant un cadre de coordination de leurs initiatives.

Le premier alinéa de cet article transfère du niveau départemental vers le niveau régional la procédure de reconnaissance administrative des pays.

La demande de reconnaissance du pays devra émaner des communes ou de leurs groupements désirant former un pays.

L'avis conforme de la Conférence régionale d'aménagement du territoire (CRADT), au sein de laquelle toutes les collectivités sont représentées, sera nécessaire. Celle-ci comprend, comme nous l'avons vu précédemment, des représentants de l'État, des représentants des exécutifs de la région, des départements, des communes et de leurs groupements, ainsi que des représentants du CESR, des pays, des agglomérations, des parcs naturels régionaux, des activités économiques et sociales et des associations.

La reconnaissance de pays et leur délimitation seront donc effectuées à l'échelon régional, ce qui permettra à certains pays de s'affranchir des frontières départementales et régionales.

Deux conditions territoriales seront, en outre, imposées aux pays pour être reconnus :

- le respect du périmètre des établissements publics de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre que sont les districts, les communautés urbaines, les communautés de communes, les syndicats d'agglomération nouvelle et les communautés de villes ;

- l'accord de l'organisme de gestion du Parc naturel régional (PNR) si le territoire du pays recouvre une partie du périmètre du PNR.

La décision d'arrêter le périmètre du pays sera ensuite prise par le ou les préfets de région, après l'avis du ou des préfets de départements compétents.

Une fois que le périmètre du pays aura été arrêté, les communes et leurs groupements ayant des compétences en matière d'aménagement et de développement économique pourront élaborer une charte de pays en association avec le ou les départements intéressés (deuxième alinéa). A ce stade, les communes et leurs groupements n'ont aucun besoin de se constituer en une structure particulière. La forme associative peut être adaptée à cette phase de la procédure. La charte qu'elles élaboreront exprimera le projet commun de développement durable du territoire concerné et comprendra des orientations pour son organisation spatiale et des mesures de mise en oeuvre.

La charte sera ensuite adoptée par l'ensemble des communes et des groupements. Elle visera à renforcer les solidarités réciproques entre la ville et l'espace rural. Dans l'esprit du texte, le pays ne doit, en effet, absolument pas être assimilé à une zone exclusivement rurale, il doit plutôt être un territoire organisé autour d'un ou plusieurs pôles urbains qui ont vocation à animer l'espace rural qui les entoure.

La charte formalisera en un document, ratifié par les acteurs impliqués dans le projet, les orientations et les principes fondamentaux d'aménagement et de développement du territoire. Elle sera le fruit d'une démarche volontaire et collective et devra recevoir l'agrément des collectivités constitutives du pays.

Le troisième alinéa de cet article prévoit l'institution d'un conseil de développement, organisme composé de représentants des milieux économiques, sociaux, culturels et associatifs et librement organisé à l'échelon local. Il sera le lieu d'animation du projet et de mobilisation de ses différents partenaires. Il pourra également être consulté sur toute question relative à l'aménagement et au développement du pays.

Au quatrième alinéa de cet article, sont prévues les conditions de la contractualisation des communes et groupements appartenant au pays.

Avant la conclusion d'un contrat, ceux-ci peuvent demeurer sous simple forme associative. Mais dès lors qu'ils veulent conclure un contrat particulier avec l'Etat et la ou les régions en application du ou des contrats de plan, ils doivent se constituer en un syndicat mixte ou en un établissement public de coopération intercommunale.

Le syndicat mixte peut prendre plusieurs formes :

- le syndicat mixte fermé (article L. 5711-1 du code général des collectivités territoriales) qui peut associer communes, syndicats de communes et districts ; le projet de loi sur la simplification de la coopération intercommunale prévoit également d'y intégrer les communautés de communes ;

- le syndicat mixte ouvert composé des différents échelons de collectivités territoriales (communes, groupements, départements, régions) ;

- le syndicat mixte ouvert élargi qui, outre ces différents échelons de collectivité territoriale comprend d'autres établissements publics tels que chambres consulaires, universités, ONF,...

Les syndicats mixtes fermés sont institués à partir d'une initiative unanime ou majoritaire de chaque assemblée, selon les règles des syndicats de communes traditionnels tandis que les syndicats mixtes ouverts le sont sur la base de l'unanimité des organes délibérants des personnes morales intéressées. La définition de l'objet du syndicat mixte peut inclure des compétences transférées sur un contenu opérationnel précis.

Enfin, dans le domaine fiscal, le syndicat mixte ouvert élargi, à la différence des deux autres, ne peut pas bénéficier de la dotation globale de fonctionnement, du fonds de compensation de la TVA, de l'exonération de l'impôt sur les sociétés et de l'exonération de la taxe sur les salaires.

Adoptée par la majorité des parcs naturels régionaux, la formule du syndicat mixte apparaît souple et peu contraignante. Elle ne peut pas être considérée comme un nouvel échelon de collectivité territoriale en gestation.

En revanche, la seconde formule retenue par cet article comme condition de conclusion d'un contrat, celle de l'EPCI amène certains à se demander s'il n'y a pas là une trop grande exigence qui risque de conduire vers une structuration non souhaitable du pays.

Le Gouvernement estime que cette formule sera limitée aux pays dont l'ensemble du territoire est déjà réuni en un EPCI à fiscalité propre et recommande plutôt la formule du syndicat mixte ouvert.

Les contrats conclus par le pays avec l'Etat et la région s'inséreront dans le volet territorial des contrats de plan Etat-régions.

Pour donner le temps aux pays non encore constitués d'élaborer de tels contrats, le Gouvernement a décidé de leur laisser la possibilité de les conclure jusqu'en 2003, date de la révision à mi-parcours des contrats de plan Etat-régions.

Il convient de noter enfin que l'alinéa de la loi du 4 février 1995 précisant qu'il est tenu compte de l'organisation des pays pour l'organisation des services de l'Etat et la délimitation des arrondissements est supprimé. C'est un nouveau signal de la volonté du Gouvernement de ne pas s'orienter sur la voie d'un redécoupage du département sur la base des pays, et de ne pas faire des pays une nouvelle structure territoriale.

2. Le débat général en commission

Lors de l'examen de cet article par la commission, un débat général s'est tout d'abord engagé à l'occasion de l'examen de deux amendements de suppression de cet article de MM. Patrick Ollier et Yves Coussain.

M. Patrick Ollier a déploré que le projet de loi abandonne une notion fondamentale, celle de constatation du pays, notion pourtant synonyme de liberté pour les communes participant au pays et d'engagement volontaire de celles-ci. Il s'est élevé contre la disparition de cette notion qui fondait les articles sur les pays de la loi du 4 février 1995 et qui avait pour effet de ne donner au préfet que le seul pouvoir de publier la liste des communes faisant partie du pays. Il a regretté que, désormais, l'administration, en la personne du préfet de région, soit appelée à délimiter le périmètre pertinent du pays. Il a souhaité qu'une rédaction plus souple et consensuelle de cet article puisse être trouvée en ce qui concerne la reconnaissance des pays.

M. Philippe Duron, rapporteur, a fait valoir que cet article était un des articles essentiels du projet de loi puisque ce sont les pays et les agglomérations qui vont structurer notre territoire. Il a indiqué qu'il ne s'agissait pas de revenir sur la notion de pays dont la création a été définie par la loi du 4 février 1995, mais qu'il s'agit de tirer les leçons de l'expérience fournie par la constatation de 81 pays ainsi que par l'" opération de préfiguration " instituée par la DATAR sur 41 pays-tests.

Reconnaissant que certaines craintes ne sont pas totalement infondées, il a observé qu'il proposerait un amendement visant à garantir la liberté des élus tout en évitant la constitution, regrettable, de pays de circonstance. Il a précisé que la liberté du préfet de région pour déterminer le périmètre du pays n'était pas totale puisqu'il devait s'entourer de l'avis de la conférence régionale de l'aménagement et du développement du territoire, qui comprend des représentants de toutes les collectivités territoriales, mais il a souhaité qu'une consultation de la commission interdépartementale de la coopération intercommunale soit également instituée.

Il a estimé opportun que le périmètre du pays ainsi délimité par le préfet de région ne soit pas définitif car celui-ci ne doit pas être conçu a priori mais il doit être la conséquence de la volonté des acteurs exprimée dans une charte approuvée par l'ensemble des conseils municipaux. Il a relevé qu'une fois la charte adoptée, le périmètre d'étude préalablement constitué pouvait alors être validé en périmètre définitif. Il a souligné que les deux étapes de cette procédure permettraient de mettre en valeur l'importance de la notion de projet qui doit être à la base de la constitution du pays.

Évoquant le problème de la superposition des territoires, parcs naturels et pays, pays et agglomérations, il a observé qu'une grande souplesse pouvait être admise à condition qu'elle se fasse dans le respect de certaines structures et il a évoqué la possibilité de conventionnement entre ces différents territoires.

M. Léonce Deprez a relevé que la notion de pays était une notion fondamentale de la loi du 4 février 1995 comme du projet de loi actuel mais qu'il convenait d'aller encore plus loin car le pays constitue vraiment la structure d'avenir de l'aménagement du territoire. Il a observé qu'il fallait approfondir les notions de projet de territoire et de maîtres d'ouvrage responsable du projet.

M. Serge Poignant a pris acte des observations du rapporteur et a déclaré en partager les objectifs.

M. Félix Leyzour a considéré que les pays allaient jouer un rôle important dans l'aménagement du territoire car ce sont des territoires pertinents mais qu'il ne fallait pas surestimer leur rôle. Évoquant son appartenance à un pays interdépartemental, il a souligné la réalité que constitue les pays mais aussi la manière fort nuancée dont ils sont vécus suivant leur implantation géographique sur le territoire. Faisant remarquer qu'ils pouvaient correspondre soit à des bassins de vie, soit à des bassins d'emploi et qu'ils étaient donc une réalité aux contours imprécis mais qui avait l'avantage de mettre en relation les acteurs d'un territoire, il a souhaité que l'on fasse preuve de pragmatisme pour l'élaboration du projet et de la charte et il a craint que l'obligation de constituer un syndicat mixte pour pouvoir contractualiser avec l'État et la région ne soit une source de conflit avec les collectivités appartenant à des groupements et avec les départements.

M. Patrick Ollier a observé que ce serait une erreur de s'enfermer dans un texte trop rigoureux et précis et il a trouvé intéressante l'idée d'une consultation de la commission interdépartementale de la coopération intercommunale car cet organisme est plus proche de la réalité de terrain que la conférence régionale de l'aménagement et du développement du territoire. Il a souhaité que le préfet de région n'ait pas le pouvoir d'arrêter, donc de décider la délimitation du périmètre, mais qu'il ait seulement pour fonction de publier la liste des communes membres du pays, comme c'est le cas à l'heure actuelle.

Il a estimé intéressante l'idée selon laquelle l'élaboration de la charte ne serait pas liée à la délimitation définitive du périmètre et il a souhaité que soit bien précisé le fait que le pays ne constitue en aucun cas une nouvelle structure territoriale. Il a approuvé l'idée d'obliger à la constitution d'un syndicat mixte pour permettre la contractualisation mais il a évoqué les craintes de ceux qui estiment que c'est donner trop de pouvoirs à une nouvelle structure.

M. Jean-Michel Marchand a considéré que la notion de pays constituait la pierre angulaire du projet et qu'il s'agissait d'un territoire en évolution.

Il a souligné la responsabilité qui sera celle des acteurs de terrain puisque le préfet de région n'en détermine le périmètre qu'après avis conforme de la conférence régionale de l'aménagement et du développement du territoire.

Il a estimé intéressante l'idée selon laquelle le périmètre ne serait pas définitif avant l'élaboration d'un véritable projet de pays. Il a indiqué qu'il y aurait un équilibrage à trouver pour déterminer la place de l'agglomération au sein des pays et qu'il faudrait réfléchir aux structures nécessaires à la contractualisation.

Il a estimé indispensable qu'il n'y ait pas de " trous blancs ", c'est à dire de territoires n'appartenant ni à un pays, ni à une agglomération, et il a évoqué, à cet égard, la nécessité pour l'autorité administrative de veiller à ce problème par une concertation accrue. Il a conclu sur la nécessité d'une certaine souplesse.

M. Léonce Deprez a insisté sur le fait qu'il fallait s'appuyer sur les groupements intercommunaux à vocation multiple déjà existants tels que les communautés de communes, les SIVOM ou les districts et qu'il fallait donc en faire les maîtres d'ouvrage des projets de développement du pays. Citant l'exemple de la région Nord Pas-de-Calais et de ses groupements intercommunaux il a fait valoir que le pays ne devrait pas constituer une nouvelle structure mais qu'il devait fédérer l'ensemble des groupements intercommunaux qui décident de s'associer pour former un pays. Il a observé que le périmètre du pays devait donc relever d'un choix de ces structures intercommunales, que celles-ci devaient être les maîtres d'ouvrage des projets sauf si elles n'en ont pas la capacité, auquel cas elles pourraient passer entre elles des conventions.

M. Pierre Cohen a relevé qu'il était important de bien spécifier que le pays n'était pas une structure supplémentaire mais qu'il fallait prendre garde à ne pas remettre en cause la dynamique d'intercommunalité lancée à partir de 1992.

Il a considéré que le pays devait être une association de structures intercommunales dans le cadre d'un projet de développement mais ne devrait être en aucun cas le refuge de communes qui s'associent pour éviter l'intercommunalité. Il a estimé qu'il serait souhaitable de savoir quelle serait la position adoptée à l'article 20 relatif aux agglomérations avant de se prononcer sur cet article. Il a observé qu'à son avis le territoire devait être structuré en pays et en aires urbaines organisées, mais qu'il ne devrait y avoir ni vide entre ces structures, ni superposition de celles-ci.

M. Serge Poignant a observé qu'il ne fallait pas confondre intercommunalité et pays, car il existe encore des communes qui ne sont pas des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI).

Il a souligné qu'il fallait prendre en compte la diversité de notre territoire national et qu'il fallait avoir une attitude souple si l'on voulait couvrir l'ensemble du territoire par des pays, et donc qu'il ne fallait pas que le pays soit une fédération d'EPCI.

M. Joseph Parrenin a exprimé son accord avec ce dernier point de vue et il a estimé qu'il fallait trouver pour le pays un cadre applicable à l'ensemble de la France. Citant l'exemple des SIVOM, il a noté cependant qu'en l'absence de fiscalité propre, les projets intercommunaux ne peuvent se mettre en place. Il a souhaité que le texte soit élaboré dans un esprit de souplesse.

M. Félix Leyzour a rappelé les propos de Mme Dominique Voynet, ministre de l'environnement et de l'aménagement du territoire, selon lesquels le pays ne deviendrait pas un maître d'ouvrage et il a considéré que si un accord se réalisait sur ce point, il serait possible de trouver une solution au problème posé.

M. Jean-Claude Daniel a souligné que les craintes exprimées sont légitimes mais qu'elles ne sauraient éviter les dangers. Il a souhaité que l'on réfléchisse à l'organisation du territoire à partir des données existantes, l'Etat, les régions, les départements, les communes et les diverses structures intercommunales auxquelles le projet de loi de M. Jean-Pierre Chevènement doit ajouter les communautés d'agglomérations. Il a observé qu'à partir de ces données, il s'agissait de mettre en place des structures de projet. Il a donc considéré que si le territoire local comportait plusieurs EPCI, il ne fallait pas constituer un EPCI d'EPCI, mais faire un seul EPCI ou à défaut constituer une structure très souple basée sur une charte ou éventuellement sur une structure un peu plus structurée comme un syndicat mixte, si les acteurs du pays en décidaient ainsi. Prenant l'exemple du pays de Quimper qui comprend un territoire rural et une grosse agglomération, il a estimé que celle-ci devait pouvoir contractualiser au titre de l'agglomération mais que le pays de Quimper pouvait également être une réalité au sein d'une organisation plus souple.

M. Philippe Duron, rapporteur, a identifié quatre thèmes nouveaux et importants concernant les pays : celui de leur périmètre, celui de la superposition de plusieurs structures, celui de leur gestion et celui de la contractualisation.

S'agissant du périmètre des pays, il a observé qu'il était nécessaire de faire une synthèse de deux éléments, d'une part, la nécessité d'organiser le territoire à partir de la région, ce qui conduit à privilégier l'avis de la conférence régionale de l'aménagement et du développement du territoire (CRADT), car elle peut avoir une vision d'ensemble du territoire, et la nécessité d'une vision plus proche du terrain, ce qui le conduit à proposer la consultation de la commission départementale de la coopération intercommunale (CDCI), car elle peut disposer de meilleurs éléments d'appréciation.

Il a considéré qu'il fallait lier les deux éléments que sont la distance et la proximité pour avoir une vue d'ensemble pertinente pour la création d'un pays. Citant l'exemple du pays d'Auge qui s'est constitué à l'intérieur de frontières départementales alors qu'il aurait dû naturellement les transgresser, il a estimé que la CRADT constituait l'échelon pertinent d'appréciation pour la création de pays.

Il a donc souhaité que la décision du préfet de région soit prise après avis conforme de la CRADT et avis simple de la CDCI. Il a observé que cette décision des préfets de délimiter le périmètre ne faisait pas d'eux les décideurs, que cette décision revenait aux communes et aux groupements de communes mais que l'intervention des préfets avait pour objet de s'assurer que la décision prise était raisonnable et cohérente et éventuellement d'ouvrir une discussion pour parvenir à une meilleure solution.

S'agissant du problème de la superposition des périmètres, qui est assurément le plus difficile, il a observé qu'il ne fallait pas démembrer les parcs naturels régionaux (PNR) mais qu'en même temps, il y avait une aspiration légitime des PNR à être associés à un projet de pays. Il a estimé qu'il serait bon de procéder par voie de convention, de manière à ne pas remettre en cause les PNR qui fonctionnent, pour certains, depuis plus de trente ans, et qu'une modification éventuelle de périmètre ne devait intervenir qu'au moment de la renégociation de la charte (c'est-à-dire tous les dix ans).

En ce qui concerne la superposition des pays et des agglomérations, il s'est déclaré en faveur de celle-ci car il existe autour des agglomérations des territoires dont la vocation est incertaine. Il s'est donc montré partisan d'ouvrir à ceux-ci la possibilité d'une contractualisation avec l'agglomération sur certains sujets bien identifiés (transports en commun, assainissement, ordures ménagères...).

S'agissant de la gestion du pays, il a fait part de son souci d'éviter la création d'une strate territoriale supplémentaire et souligné la nécessité de garder une certaine souplesse au système. Il a relevé que la structure de syndicat mixte fermé n'était pas pertinente car elle induisait un transfert de compétences et il a considéré que la formule du syndicat mixte ouvert était intéressante, car elle est très souple, tout en préservant la sécurité de l'Etat et des élus dans la contractualisation, à la différence de la simple association. Il s'est déclaré ouvert également à la possibilité d'une constitution d'un groupement d'intérêt public (GIP).

Il a observé que dans les pays qui sont entièrement couverts par des EPCI à fiscalité propre, il ne devrait pas y avoir de problème, chacun d'entre eux pouvant être cosignataire du contrat, mais que dans les territoires où coexiste encore un grand nombre de communes, la solution du syndicat mixte ouvert paraît pertinente, car il faut que les élus puissent se retrouver dans une structure qui leur soit propre et pas seulement au sein du conseil de développement qui sera créé.

A l'issue de ce débat, la commission a rejeté les deux amendements de suppression de l'article de MM. Patrick Ollier et Yves Coussain.

3. L'examen des dispositions de l'article par la commission

a) La reconnaissance des pays et la délimitation de leurs périmètres

La commission a d'abord rejeté, conformément à l'avis du rapporteur :

- un amendement de M. François Sauvadet, défendu par M. Léonce Deprez visant à supprimer l'avis conforme de la conférence régionale de l'aménagement et du développement du territoire (CRADT) lors de la constitution de pays ;

- les amendements n° 26 de M. Michel Bouvard et n° 40 de M. Patrick Ollier tendant à préciser que le pays doit se constituer à l'initiative de communes dont le territoire représente au moins la moitié du périmètre envisagé pour le pays ;

- deux amendements de MM. Eric Doligé et Yves Nicolin (n° 95) visant à soumettre la création d'un pays à l'avis du département ;

- un amendement de M. Yves Coussain tendant à préciser que le pays doit se constituer à l'initiative d'au moins la moitié des communes, représentant au moins la moitié de la population.

La commission a ensuite examiné l'amendement n° 75 cor. de M. Léonce Deprez, visant à faire des groupements de communes à vocation multiple les seuls initiateurs de la constitution d'un pays.

M. Léonce Deprez a observé qu'il fallait imposer que la constitution de pays se fasse à l'initiative de ces groupements car il faut inciter à un effort de coopération intercommunale.

M. Félix Leyzour a considéré qu'il fallait une plus grande souplesse et voir les choses à plus long terme ; il a fait remarquer à cet égard que certains pays qui n'avaient pas d'EPCI lors de leur constitution en ont créé un par la suite.

MM. Jean-Jacques Filleul et Serge Poignant se sont déclarés en faveur d'une certaine souplesse tandis que M. Jean-Claude Lenoir a soutenu l'amendement de M. Léonce Deprez et souhaité que le pays soit constitué d'une fédération de communautés de communes.

M. Philippe Duron, rapporteur, a salué la démarche vertueuse et incitative à l'intercommunalité qui sous-tend cet amendement mais a estimé qu'il fallait tenir compte des réalités et ne pas imposer d'exigences trop élevées pour la constitution de pays.

A l'issue de ce débat, la commission a rejeté cet amendement.

Après avoir rejeté l'amendement n° 74 cor. de M. Léonce Deprez visant à supprimer l'avis conforme de la conférence régionale de l'aménagement et du développement du territoire (CRADT) et à lui substituer l'avis simple de la commission départementale de coopération intercommunale (CDCI), la commission a examiné un amendement du rapporteur et un amendement de M. Patrick Rimbert visant à demander l'avis simple de la CDCI et l'avis conforme de la CRADT.

Le rapporteur a rappelé qu'il convenait de trouver un équilibre entre la vision distanciée de la CRADT et la vision de proximité de la CDCI.

M. Patrick Ollier a observé que le texte privilégiait une vision globale alors qu'il serait souhaitable que la constatation du pays se fasse in situ.

M. Léonce Deprez a considéré qu'il s'agissait là d'une position en retrait par rapport à la dynamique qui s'était mise en marche jusqu'à présent autour du préfet et de la CDCI.

M. Jean-Michel Marchand a estimé que le pays était un territoire de projet qui se constituait autour des élus et des acteurs locaux, qu'il était favorable à l'avis conforme de la CRADT, mais qu'il ne souhaitait pas que soit imposé l'avis de la CDCI.

Le rapporteur a fait observer que sa position était intermédiaire, que les pays n'avaient pas vocation à couvrir la totalité du territoire national dans un bref délai, que la situation de la région Nord-Pas-de-Calais était spécifique, qu'il y avait d'autres dispositifs incitatifs au regroupements de communes que l'intercommunalité et que la contractualisation pourrait en être un.

Il a souhaité l'intervention de la CRADT car le niveau régional permet d'éviter le réflexe départementaliste dans la création de pays et une harmonisation de la politique des pays entre plusieurs départements.

Après que M. Félix Leyzour eut approuvé la rédaction de l'amendement du rapporteur et que M. Patrick Ollier eut observé qu'il constituait un progrès par rapport au texte du projet, l'amendement du rapporteur, approuvé par M. Patrick Rimbert qui a retiré le sien, a été adopté (amendement n° 321).

La commission a ensuite rejeté un amendement de M. Jean Proriol, l'amendement n° 36 de M. Patrick Ollier et l'amendement n° 30 de M. Michel Bouvard, satisfaits par l'adoption de l'amendement précédent et deux amendements identiques de M. Yves Nicolin (n° 96) et de M. Eric Doligé, devenus sans objet.

La commission a ensuite adopté, conformément à l'avis du rapporteur, les amendements identiques n° 27 de M. Michel Bouvard et n° 38 de M. Patrick Ollier tendant à préciser que les avis demandés pour la constitution de pays étaient réputés favorables s'ils n'avaient pas été formulés dans un délai de trois mois après l'initiative communale.

Elle a rejeté un amendement de M. Gérard Voisin tendant à préciser les objectifs du pays.

Elle a ensuite rejeté un amendement de M. François Sauvadet visant à empêcher les parcs naturels régionaux de bénéficier d'un droit de veto sur la constitution de pays ainsi qu'un amendement de M. Robert Honde visant à ne subordonner la constitution de pays qu'à l'avis simple des organismes gestionnaires de parcs naturels régionaux et non à leur accord.

La commission a ensuite examiné en discussion commune trois amendements, le premier du rapporteur, le deuxième de M. Patrick Rimbert et le troisième de M. Jean-Paul Chanteguet relatifs aux parcs naturels régionaux (PNR).

M. Jean-Paul Chanteguet a rappelé l'antériorité de l'expérience des PNR qui remonte à 30 ans et observé que la formule du PNR sert de fondement à la notion de pays. Il a relevé cependant que ces deux entités ayant les mêmes projets et les mêmes missions, la création de pays risque de créer des difficultés aux PNR et notamment de créer un risque d'explosion du PNR s'il y a superposition totale d'un pays et d'un PNR, les risques étant plus limités mais à examiner sérieusement en cas de superposition partielle. Il a souhaité autoriser de façon tout à fait dérogatoire ou exceptionnelle la superposition du périmètre d'un pays et celle d'un PNR.

M. Jean-Claude Lenoir a observé que ce problème de superposition était très délicat dans la mesure où il est difficile de modifier le périmètre d'un parc pendant dix ans. Il a souhaité que le territoire du PNR soit élargi à la dimension du pays.

M. Patrick Ollier a indiqué que cet amendement conduisait à aborder le débat de la dimension qui devrait être celle du pays et il a souhaité que le pays ait le périmètre le plus large possible pour que puissent émerger de véritables projets. Il a considéré que le PNR concourt à la création du pays mais qu'il a une autorité, des pouvoirs, une structure, généralement celle du syndicat mixte, à la différence du pays. Il a donc souhaité que l'on n'identifie pas les PNR aux pays. Il s'est déclaré favorable à l'amendement du rapporteur, de même que M. Félix Leyzour.

M. Philippe Duron, rapporteur, a indiqué que juridiquement le parc vaut pays et qu'il peut donc contractualiser. Il a donc fait observer qu'en cas de coïncidence de périmètres, il n'était pas nécessaire de créer un pays et qu'il suffisait d'accroître la vocation du parc. Par contre, en cas de superposition de périmètres, et si les vocations du parc et du pays voisin ne sont pas identiques, il ne faut pas remettre en cause le périmètre du parc mais laisser une commune située à la périphérie du PNR exercer sa vocation avec le pays voisin. Il a rappelé que le pays était un territoire de projet et que c'était, au moment du renouvellement de la charte du PNR qu'une solution de redéfinition des périmètres serait éventuellement trouvée.

M. Patrick Ollier a observé qu'il fallait éviter les conflits de compétences mais que le pays en tant que tel, à la différence du parc n'avait pas de compétences propres.

M. Jean-Paul Chanteguet a évoqué le problème du pays inclus dans un parc naturel régional.

M. Jean-Claude Daniel a observé qu'il fallait tenir compte de l'existant, que les PNR avaient des missions, qu'ils avaient deux modes d'organisation possibles, mais qu'ils étaient surtout structurés en syndicats mixtes. Il a évoqué quatre cas de figure possibles. Dans le cas où un pays aurait le même périmètre qu'un parc, il a considéré qu'il faudrait élargir les missions du parc. Dans le cas où un pays recouvrirait le périmètre d'un parc sans qu'il y ait superposition exacte, il a estimé qu'il faudrait autoriser cette superposition en rendant les missions du pays et du parc cohérentes sur les parties de territoire qui leur seront communes. Il a ensuite évoqué le problème d'un parc entièrement englobé dans un pays et le cas inverse d'un petit pays englobé dans un très grand parc. Les présidents des PNR redoutant l'éclatement de leur structure dans la première et dans la troisième hypothèse, il a souhaité que dans la première hypothèse on s'en tienne au parc. En ce qui concerne la troisième hypothèse, il a considéré qu'il y avait là un problème à trancher.

M. Stéphane Alaize a souhaité insister sur le fait que le parc a des missions moins larges que celles d'un pays et que si l'on donne la priorité au parc sur le pays, les missions qui seront les siennes seront moins nombreuses.

M. François Brottes s'est déclaré en accord avec les positions de M. Jean-Claude Daniel et a proposé qu'une partie du territoire du parc puisse recouvrir une partie du territoire du pays.

M. Léonce Deprez a observé qu'il était rare que les parcs soient plus vastes que les pays, et qu'en tout état de cause l'existence de parcs ne devait pas empêcher la création de pays.

M. Jean-Claude Lenoir a estimé que la seule réponse à l'hypothèse d'un parc dont le périmètre recouvre celui de plusieurs pays est celle de la convention.

A l'issue de ce débat, et après que le rapporteur eut fait observer que les litiges les plus difficiles pourraient se résoudre au moment de la renégociation de la charte du parc, la commission a adopté l'amendement du rapporteur rectifié par son auteur selon lequel : " Si le territoire du pays recouvre une partie de l'espace d'un parc naturel régional et si le territoire d'un parc naturel régional recouvre une partie du territoire d'un pays et qu'il ne peut être procédé à l'harmonisation de périmètres, la reconnaissance du pays est subordonnée à la définition préalable, par convention passée entre les parties concernées, des missions respectives confiées aux organismes de gestion du parc naturel régional et du pays sur les parties communes.  La charte du pays et les actions qui en procèdent doivent être, sur les parties communes, compatibles avec les orientations de protection, de mise en valeur et de développement définies par la charte du parc naturel régional en application de l'article L. 244-1 du code rural." (amendement n° 322).

En conséquence, les amendements de MM. Patrick Rimbert et Jean-Paul Chanteguet ont été retirés et les amendements suivants sont devenus sans objet : amendement n° 29 de M. Michel Bouvard, amendement n° 37 de M. Patrick Ollier, amendements de MM. François Sauvadet, Joseph Parrenin, Jean Proriol et Gérard Voisin.

La commission a ensuite rejeté les amendements n° 28 de M. Michel Bouvard et n° 39 de M. Patrick Ollier visant à faire constater, avant la décision de constatation du pays, que les avis de la CRADT et de la CDCI étaient favorables.

Elle a également rejeté un amendement de M. Robert Honde visant à imposer l'avis des conseils généraux et régionaux concernés.

Elle a adopté un amendement du rapporteur introduisant la notion de périmètre d'étude du pays (amendement n° 323).

Un débat s'est engagé sur un amendement de M. Serge Poignant tendant à supprimer l'obligation pour les pays de respecter les périmètres des EPCI à fiscalité propre.

M. Serge Poignant a indiqué qu'il s'agissait du cas de communes périurbaines qui devraient pouvoir à la fois faire partie d'une agglomération et d'un pays. Il a évoqué le cas d'une commune de l'agglomération nantaise qui depuis vingt ans fait partie du pays du vignoble nantais et assuré que le système fonctionne bien et qu'il importe de ne pas l'en empêcher.

M. Joseph Parrenin a estimé qu'il fallait régler ce problème au niveau d'une convention entre la commune et le pays pour ce qui concerne son projet viticole.

M. Philippe Duron, rapporteur, a observé qu'en cas de superposition d'un pays et d'une agglomération le problème n'est pas aussi simple à traiter que dans celui de la superposition du parc et du pays.

M. Patrick Ollier a fait remarquer que Mme Dominique Voynet, ministre de l'environnement et de l'aménagement du territoire, avait affirmé que les pays existants ne seraient pas remis en cause.

MM. Jean-Claude Daniel et Pierre Cohen ont estimé qu'il ne fallait pas permettre que le périmètre d'un pays puisse couper un EPCI.

MM. Joseph Parrenin et Jean-Michel Marchand se sont prononcés en faveur de plus de souplesse.

A l'issue de ce débat, la commission a adopté à l'unanimité un amendement du rapporteur, rectifié par celui-ci, selon lequel : " Les pays constatés à la date de la publication de la présente loi ne sont pas modifiés. Une commune membre d'un pays constaté et d'un EPCI, peut concilier cette double appartenance si les missions qu'elle partage dans le pays ne recoupent pas les compétences de l'EPCI auquel elle appartient. Les modalités de cette double appartenance sont précisées par une convention entre la commune, le pays et l'EPCI. " (amendement n° 324).

En conséquence, l'amendement de M. Serge Poignant a été retiré.

La commission a ensuite rejeté un amendement de M. Patrick Ollier visant à demander la consultation de la CDCI, avant que le préfet ne publie la liste et le périmètre du pays. Les cinq amendements de M. Patrick Ollier visant à prévoir en outre la consultation du conseil général ont été retirés.

La commission a ensuite rejeté l'amendement n° 101 de M. Jean Proriol tendant à prévoir l'accord du conseil régional pour la délimitation du périmètre du pays ainsi que l'amendement n° 102 du même auteur prévoyant la consultation du conseil régional.

La commission a rejeté un amendement de M. Gérard Voisin sur les délais que devront respecter les préfets de départements saisis pour avis, ainsi qu'un amendement du même auteur relatif aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI).

Un amendement de M. Serge Poignant relatif au problème de la délimitation des pays a été retiré et un amendement ayant un objet similaire de M. François Sauvadet rejeté.

b) La charte de pays

La commission a rejeté deux amendements identiques, l'amendement n° 13 cor. de M. Michel Bouvard et l'amendement n° 41 de M. Patrick Ollier, visant à permettre que l'élaboration de la charte de pays soit initiée sans que la procédure d'arrêté de périmètre soit nécessairement parvenue à son terme. Un amendement de M. Jean Proriol sur le même sujet a été retiré par son auteur.

La commission a rejeté un amendement de M. François Sauvadet supprimant l'obligation pour les groupements d'avoir des compétences en matière d'aménagement et de développement économique pour être associés à l'élaboration des chartes et l'amendement n° 77 cor. de M. Léonce Deprez visant à n'associer que les groupements à vocation multiple ayant des compétences en matière d'aménagement et de développement économique à l'élaboration des chartes de pays, excluant de ce fait les communes

La commission a ensuite adopté un amendement du rapporteur relatif au périmètre d'étude du pays, en cohérence avec l'amendement adopté précédemment sur le même sujet (amendement n° 325).

Elle a adopté deux amendements identiques de MM. Joseph Parrenin et Jean Proriol visant à bien préciser que le périmètre d'un pays doit pouvoir être compris sur le territoire de plus d'une région (amendement n° 326). Elle a en conséquence rejeté les amendements n° 12 cor. de M. Michel Bouvard et n° 42 de M. Patrick Ollier parce que satisfaits.

Elle a ensuite rejeté un amendement de M. Patrick Rimbert visant à associer les parcs naturels régionaux à l'élaboration de la charte de pays, l'amendement n° 76 cor. de M. Léonce Deprez visant à supprimer l'association des départements et des régions à cette élaboration, ainsi qu'un amendement de M. François Sauvadet supprimant des objectifs du projet commun de développement du pays, les orientations fondamentales de son organisation spatiale.

Elle a rejeté l'amendement n° 11 cor. de M. Michel Bouvard et l'amendement n° 43 de M. Patrick Ollier ayant pour objet de supprimer des objectifs de la charte le renforcement des solidarités entre la ville et l'espace rural. Un amendement de M. Joseph Parrenin visant les villes et les espaces ruraux a été retiré ainsi qu'un amendement de M. Patrick Rimbert sur la relation à établir entre un projet d'agglomération et la charte de pays.

La commission a rejeté l'amendement n° 78 cor. de M. Léonce Deprez donnant aux seuls groupements de communes à vocation multiple le pouvoir d'adopter la charte de pays. Elle a également rejeté deux amendements identiques, l'un de M. Eric Doligé, l'autre de M. Yves Nicolin (n° 97), visant à faire adopter la charte de pays par les régions et les départements concernés, le rapporteur ayant considéré que cette disposition allait à l'encontre du principe de libre administration des communes.

La commission a ensuite adopté à l'unanimité un amendement du rapporteur, modifié par un sous-amendement de M. Jean-Claude Lenoir, visant à permettre aux communes ou à leurs groupements, situés dans le périmètre d'étude d'un pays, qui auront engagé une démarche de projet commun de développement durable du territoire, de bénéficier d'une prise en charge par l'Etat d'une partie de leurs frais liés aux études et à l'ingénierie du projet (amendement n° 327).

c) Le conseil de développement du pays

Un amendement de M. François Sauvadet supprimant le conseil de développement du pays ainsi qu'un amendement du même auteur visant à rendre facultative la création de ce conseil ont été rejetés.

Un débat s'est alors engagé sur un amendement de M. Patrick Rimbert visant à moins formaliser ce conseil de développement.

MM. Patrick Ollier et Jean-Claude Lenoir ont souscrit à cette observation.

Le rapporteur et M. Jean-Jacques Filleul ont souhaité que soient maintenues les dispositions actuelles du texte relatives à la constitution du conseil de développement. M. Patrick Rimbert a alors retiré son amendement ; celui-ci repris par M. Jean-Claude Lenoir, a été rejeté.

Un amendement de M. Félix Leyzour visant à préciser que les représentants des milieux économiques du conseil de développement sont constitués par les organisations représentatives de ces milieux a été retiré, tandis qu'un amendement de M. Patrick Ollier visant à supprimer les dispositions relatives à la composition de ce conseil a été rejeté par la commission.

L'amendement n° 79 cor. de M. Léonce Deprez visant à réserver aux seules structures de coopération intercommunale à vocation multiple la constitution de syndicats mixtes ou d'EPCI a également été rejeté.

La commission a rejeté un amendement de M. Serge Poignant visant à faire participer les parlementaires ou les conseillers généraux dont la circonscription électorale ou le canton fait partie du périmètre du pays aux instances du conseil de développement, le rapporteur ayant précisé qu'ils avaient la possibilité d'en faire partie et qu'il ne convenait pas de formaliser la composition de ce conseil.

La commission a adopté après une intervention de M. Jean Proriol un amendement de M. Gérard Voisin visant à préciser que le conseil de développement est informé au moins une fois par an de l'avancement des actions engagées par les maîtres d'ouvrage pour la mise en _uvre du développement du pays et qu'il peut être associé à l'évaluation de la portée de ces actions (amendement n° 328).

La commission a adopté un amendement du rapporteur visant à prévoir les conditions de l'adoption définitive du périmètre du pays, en cohérence avec un amendement précédemment adopté (amendement n° 329).

d) Le contrat de pays

La commission a rejeté un amendement de M. Pierre Micaux visant à réserver aux seuls syndicats mixtes ouverts et aux EPCI la possibilité de contractualiser avec l'Etat et la région. Elle a également rejeté trois amendements de MM. Eric Doligé, Jean Proriol et Patrick Ollier rendant facultative la constitution de syndicats mixtes ou d'EPCI à cet effet.

Un débat s'est engagé sur les amendements de M. Félix Leyzour et de M. François Sauvadet n'imposant aucune forme juridique au pays pour la contractualisation.

M. Jean-Claude Lenoir s'est étonné que la constitution d'un syndicat mixte soit autant redoutée. Il a précisé que, pour contractualiser, il fallait un lien plus fort entre les communes que le lien associatif car il fallait s'entourer d'un minimum de garanties. Il a évoqué le problème qui se posera lors des élections municipales de 2001 si un pays se trouve en difficulté de fonctionnement ainsi que le problème de la gestion des fonds européens LEADER qui portent sur des sommes importantes.

M. Patrick Ollier a souhaité qu'une liberté de choix soit laissée au pays en ce qui concerne sa structure, estimant que certaines communes pouvaient contractualiser elles-mêmes et que le syndicat mixte n'était qu'un choix alternatif.

M. François Brottes a rejoint l'analyse de M. Patrick Ollier, estimant qu'il fallait de la souplesse au système pour éviter le découragement des acteurs locaux avant la procédure de contractualisation.

M. Jean-Claude Daniel a fait observer que ce n'est pas la structure du pays qui permet la contractualisation et que si l'on retient un mécanisme souple rien n'empêcherait les communes ou les groupements de communes de passer des conventions.

M. Jean-Claude Lenoir a évoqué le problème des charges communes que doit supporter la structure du pays et a souligné la nécessité de garantir la pérennité de celle-ci.

M. Philippe Duron, rapporteur, a estimé que les acteurs du pays pouvaient s'en tenir à la structure associative jusqu'à la phase de contractualisation, mais qu'alors il était nécessaire d'assurer une sécurité des actes juridiques passés. Il a évoqué les trois solutions possibles : une voie volontariste et ambitieuse, probablement plus réaliste sur le long terme dont M. Jean-Claude Lenoir est le chef de file, une voie plus libérale et plus souple qui est celle de M. Jean-Claude Daniel et une voie intermédiaire qu'il a proposée dans un amendement, qui permettrait aux groupements de communes de pouvoir contractualiser avec l'Etat et la région.

M. Léonce Deprez ayant fait observer qu'il ne fallait pas exclure les SIVOM de la contractualisation, le rapporteur a modifié en conséquence son amendement. Pour inciter à la coopération intercommunale, le rapporteur a apporté une modification supplémentaire, inspirée de l'article 20 du projet de loi, aux termes de laquelle la possibilité de contractualisation serait ouverte aux groupements de communes à fiscalité propre ainsi qu'aux SIVOM qui s'engagent à adopter une fiscalité propre avant la fin de la contractualisation.

M. Félix Leyzour a fait observer que la contractualisation avec l'Etat et la région devait concerner un projet cohérent sur un espace pertinent et que l'Etat et la région ne seraient peut-être pas intéressés par une contractualisation avec un si grand nombre de collectivités territoriales.

A l'issue d'une discussion au cours de laquelle sont encore intervenus MM. François Brottes, Jean-Claude Daniel, Patrick Ollier, Jean-Claude Lenoir, Léonce Deprez et Jean-Jacques Filleul, la commission a adopté l'amendement du rapporteur ainsi rédigé : " En vue de conclure avec l'Etat et la ou les régions un contrat particulier en application du ou des contrats de plan Etat-régions, les communes et les groupements de communes qui constituent le pays devront, pour assurer l'exécution et le suivi du contrat, soit créer un groupement d'intérêt public pour la durée de celui-ci, soit se constituer en syndicat mixte. En outre, les groupements qui constituent le pays, qu'il s'agisse de groupements de communes à fiscalité propre ou de syndicats intercommunaux à vocation multiple qui s'engagent à adopter une fiscalité propre avant la fin de la contractualisation, peuvent contractualiser avec l'Etat ou la région. " (amendement n° 330).

En conséquence sont devenus sans objet : les amendements de MM. Félix Leyzour et François Sauvadet, un amendement de M. Patrick Ollier énumérant les structures aptes à contractualiser avec l'Etat et la région, un amendement de M. Pierre Cohen visant à réserver aux communes et à leurs groupements la constitution d'un syndicat mixte ou d'un EPCI, les amendements n° 10 cor. de M. Michel Bouvard, et un amendement de M. Jean Proriol relatifs aux syndicats mixtes, deux amendements de M. Gérard Voisin relatifs aux possibilités de contractualisation avec la personne morale qui représente le pays et l'amendement n° 80 cor. de M. Léonce Deprez assouplissant les conditions de la contractualisation et la rendant possible pour les simples associations.

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Patrick Rimbert visant à permettre, notamment en Ile-de-France le classement de certaines zones agricoles ou forestières constituées en pays pour se préserver de la pression de l'urbanisation.

M. Patrick Rimbert a fait valoir qu'il s'agissait de mettre en place une des propositions du rapport de M. Larcher sur le périurbain. Bien que partageant la préoccupation exprimée par cet amendement, le rapporteur a estimé qu'il convenait d'approfondir la réflexion sur cet amendement qui a en conséquence été retiré.

Un amendement de M. Patrick Rimbert visant à assurer une coordination entre les contrats de pays et les contrats d'agglomération a également été retiré.

La commission a ensuite rejeté :

- un amendement de M. Serge Poignant visant à interdire aux pays de s'organiser à travers une structure qui voudrait tirer ses ressources financières d'une fiscalité propre ;

- un amendement de M. Pierre Micaux visant à préciser que les pays ne pouvaient pas être un nouvel échelon administratif local ;

- deux amendements identiques, l'un de M. Eric Doligé, l'autre de M. Yves Nicolin (n° 98), visant à mentionner que l'Etat coordonne son action au niveau départemental et régional ;

- un amendement de M. Pierre Micaux permettant la conclusion de conventions et d'accords entre une ville ou une agglomération urbaine et l'organisme de gestion du pays.

La commission a ensuite adopté l'article 19 ainsi modifié.

Article 20

(article 23 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995)

Agglomérations

Cet article définit les conditions de l'élaboration du projet d'agglomération et les modalités de sa concrétisation en contrat particulier du contrat de plan Etat-région.

1. La définition de l'agglomération

Cet article est à étudier en parallèle avec celui sur les pays car de la définition du seuil à partir duquel pourra se créer une agglomération dépendra la capacité ou non d'un pays à constituer un ensemble viable mêlant harmonieusement les territoires ruraux et urbains. Le seuil de création de l'agglomération proposé par cet article est celui d'une " aire urbaine comptant au moins 50 000 habitants et dont une commune-centre compte plus de 15 000 habitants ".

L'aire urbaine est constituée par un ensemble de communes d'un seul tenant et sans enclave constitué par un pôle urbain et par des communes rurales ou unités urbaines dont au moins 40 % de la population résidente ayant un emploi travaille dans le pôle ou dans les communes attirées par celui-ci. La nomenclature INSEE des aires urbaines fait apparaître 361 agglomérations de ce type.

Si l'on s'en tient au seuil proposé par le texte, il y aurait 141 agglomérations comportant une commune-centre de 15 000 habitants dans une aire urbaine de 50 000 habitants.

Différentes hypothèses de relèvement du seuil ont été étudiées. Seraient ainsi concernées par cet article :

- 100 agglomérations si l'on retient le seuil d'aire urbaine d'au moins 80 000 habitants ayant une commune-centre d'au moins 15 000 habitants ;

- 95 agglomérations si l'on retient le seuil d'aire urbaine d'au moins 80 000 habitants ayant une commune-centre d'au moins 30 000 habitants ;

- 74 agglomérations si l'on retient le seuil d'aire urbaine d'au moins 100 000 habitants ayant une commune-centre d'au moins 15 000 habitants ;

- 70 agglomérations si l'on retient le seuil d'aire urbaine d'au moins 100 000 habitants ayant une commune-centre d'au moins 30 000 habitants.

Le relèvement du seuil concernant la commune-centre de 15 à 30 000 habitants a donc peu d'effet sur le nombre d'agglomérations susceptibles d'être concernées par les futures communautés d'agglomé-rations (5 de moins pour les agglomérations de plus de 80 000 habitants, 4 de moins pour les agglomérations de plus de 100 000 habitants.

En revanche, un seuil de 30 000 habitants pour la commune-centre réduirait au sein des grandes métropoles (Lyon, Marseille, Lille, ...) la possibilité de créer une agglomération dans l'agglomération à partir d'une commune qui ne soit pas la ville-centre.

Lors de l'examen de cet article, la commission a rejeté trois amendements de suppression de cet article présentés respectivement par MM. Yves Nicolin (n° 94), François Sauvadet et Gérard Voisin. Elle a également rejeté deux amendements identiques de M. Gérard Voisin et de M. Eric Doligé tendant à remplacer le mot " aire urbaine " par le mot " agglomération ".

Elle a ensuite examiné quatre amendements soumis à discussion commune relatifs aux seuils retenus pour les aires urbaines, ceux de MM. Gérard Voisin et Eric Doligé proposant de supprimer toute référence au seuil et deux amendements de M. Patrick Rimbert proposant le premier d'élever le seuil de l'aire urbaine de 50 000 à 70 000 habitants et le second d'élever le seuil de la commune-centre de 15 000 à 30 000 habitants.

M. Philippe Duron, rapporteur, a précisé que les seuils fixés dans le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire étaient identiques à ceux fixés pour les communautés d'agglomérations dans le projet de loi relatif à l'organisation urbaine et à la simplification de la coopération intercommunale. Il a considéré qu'il n'était pas possible de s'engager à la légère dans un débat sur les seuils et qu'il convenait au préalable de faire procéder à une étude d'impact des modifications de seuil éventuelles.

M. François Brottes a convenu également que ce problème devrait être réglé lors de la discussion du projet de loi sur l'intercommunalité.

M. Jean Proriol a estimé qu'il ne fallait pas laisser le seuil en l'état car il comportait un risque d'élimination des petites agglomérations.

M. Léonce Deprez a estimé qu'il serait dangereux de ne pas fixer de seuil dans le texte du projet.

M. Claude Hoarau a soulevé le problème posé aux DOM par la définition des agglomérations proposée par le texte. Il a souhaité un alinéa spécifique prenant en compte la situation particulière des départements d'outre-mer.

M. Jean-Jacques Filleul a estimé que le seuil retenu n'était pas pertinent et il a considéré qu'il devrait être possible d'accorder une dotation globale de fonctionnement (DGF) aux pays si le seuil des agglomérations était relevé.

M. Jean-Michel Marchand a considéré qu'il valait mieux garder le seuil proposé même s'il était insatisfaisant car le supprimer reviendrait à l'appliquer à l'ensemble des aires urbaines, ce qui serait donc équivalent à un abaissement considérable du seuil.

M. Patrick Rimbert a alors retiré ses deux amendements estimant effectivement préférable de laisser le texte dans sa forme actuelle.

M. Félix Leyzour s'est interrogé sur les conséquences pour le projet de loi sur l'aménagement du territoire d'une décision de changement de seuils dans le projet de loi sur l'intercommunalité.

M. Philippe Duron, rapporteur, a estimé qu'il n'était pas illégitime de vouloir définir les seuils dans un projet de loi relatif à l'aménagement du territoire, mais il a observé qu'il fallait définir les conséquences précises des modifications éventuelles du seuil. Il a donc indiqué que le maintien du seuil dans le texte actuel n'avait pas pour signification qu'un accord avait été réalisé autour du seuil proposé. Il a souhaité un rapprochement ultérieur des points de vue lorsque les conséquences des modifications de seuils seraient plus claires.

En conséquence, à l'issue de ce débat, la commission a rejeté les amendements de MM. Gérard Voisin et Eric Doligé.

2. Le projet d'agglomération

Le ou les établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière d'aménagement et de développement économique ainsi que les communes de l'agglomération qui n'en sont pas membres pourront élaborer un projet d'agglomération qui devra porter sur les problèmes spécifiques de l'agglomération :

- orientations en matière de développement économique et de cohésion sociale, de transport et de logement, de politique de la ville, de politique de l'environnement et de gestion des ressources naturelles ;

- mesures permettant de mettre en _uvre ces orientations.

Lors de l'examen de cet article, la commission a rejeté trois amendements de MM. Eric Doligé, Gérard Voisin et Yves Nicolin (n° 88) visant à rendre facultative l'élaboration d'une charte de développement et deux amendements identiques de MM. Yves Nicolin (n° 89) et Eric Doligé tendant à associer les départements et les régions à l'élaboration de la charte de développement.

Elle a adopté un amendement du rapporteur tendant à créer, à l'instar de ce qui existe pour les pays, un conseil de développement composé de représentants des milieux économiques, sociaux, culturels et associatifs (amendement n° 331). En conséquence, un amendement similaire de M. Félix Leyzour a été retiré et deux amendements identiques de MM. Michel Bouvard (n° 9) et Patrick Ollier (n° 44) ont été rejetés comme devenus sans objet.

3. Le contrat d'agglomération

Une fois le projet d'agglomération défini, les établissements publics et les communes concernées par le projet pourront conclure avec l'Etat un contrat particulier dans le cadre de la conclusion du contrat de plan Etat-régions.

Il est spécifié que ce contrat comprendra un volet foncier et éventuellement les conditions de création d'un établissement public foncier. Le problème foncier est en effet un enjeu capital pour les agglomérations, et il serait souhaitable d'inciter celles-ci à s'en préoccuper.

Lors de l'examen de cet article, la commission a rejeté deux amendements identiques de MM. Gérard Voisin et Eric Doligé relatifs aux contrats passés entre une agglomération et l'Etat ou les régions. Elle a également rejeté deux amendements identiques de M. Yves Nicolin (n° 91) et Eric Doligé visant à imposer la consultation des conseils généraux lors de la préparation du contrat.

La commission a adopté un amendement du rapporteur précisant que lorsqu'un pays comprend une agglomération éligible à un contrat particulier, le contrat d'agglomération constitue le volet spécifiquement urbain de la charte du pays et prend en compte les orientations de celle-ci (amendement n° 332). En conséquence, deux amendements de M. Patrick Rimbert visant à rendre cohérentes les orientations des projets d'agglomérations et celles des pays ont été retirés.

La commission a ensuite rejeté deux amendements de MM. Eric Doligé et Gérard Voisin visant à supprimer les conditions posées à la contractualisation avec l'Etat et la région.

4. Le regroupement des établissements publics intéressés au sein d'un établissement public de coopération intercommunale à taxe professionnelle unique

Le contrat particulier conclu par l'agglomération devra préciser, pour pouvoir être renouvelé, que les établissements publics intéressés s'engagent à se regrouper avant l'échéance du contrat en établissement public de coopération intercommunale à taxe professionnelle unique d'au moins 50 000 habitants et comprenant une commune-centre de plus de 15 000 habitants. C'est ce nouvel EPCI qui sera seul habilité à engager l'agglomération lors du renouvellement du contrat. Cette disposition, qui vise à encourager l'intercommunalité à fiscalité propre, est à lire en parallèle avec le projet de loi relatif à l'organisation urbaine et à la simplification de la coopération intercommunale qui prévoit que les communautés urbaines et les " communautés d'agglomération " qu'il envisage de créer, seront soumises à titre obligatoire au régime de la taxe professionnelle unique d'agglomération.

Lors de l'examen de cet article, la commission a rejeté :

- un amendement de M. Gérard Voisin visant à laisser aux collectivités et établissements publics la faculté de mettre en place une taxe professionnelle unique ;

- un amendement de M. Félix Leyzour substituant à l'obligation faite aux communes et aux établissements publics qui souhaitent contracter d'instaurer une taxe professionnelle unique un principe de coopération pour l'harmonisation des niveaux de taxe professionnelle, le rapporteur ayant indiqué que cet amendement trouverait sa place lors de la discussion du projet de loi sur l'intercommunalité ;

- deux amendements de MM. Eric Doligé et Yves Nicolin (n° 93) prévoyant que les conditions de la consultation des conseils généraux seraient déterminées par décret en Conseil d'Etat.

M. Jean-Michel Marchand a retiré un amendement visant à faire élire au suffrage universel direct les assemblées des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre.

La commission a adopté l'article 20 ainsi modifié.

Après l'article 20 

M. Claude Hoarau a présenté un amendement visant à prendre en compte la spécificité des départements d'outre-mer où les moyennes et grandes communes sont constituées d'agglomérations alors qu'en France métropolitaine, ce sont les agglomérations qui sont constituées de communes. Il a évoqué le cas de la Réunion qui comprend 27 communes pour 700 000 habitants et qui n'aurait qu'une seule agglomération concernée par le seuil retenu par le projet de loi. Il a souhaité que soit précisé si le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire concernait ou non les départements d'outre-mer. En cas de réponse positive, il a souhaité que des articles spécifiques soient consacrés aux départements d'outre-mer.

M. Joseph Parrenin a estimé que cet amendement qui fait état de la particularité des départements d'outre-mer devrait être discuté dans le cadre du projet de loi sur l'intercommunalité.

M. François Brottes a évoqué les situations identiques qui pouvaient se présenter en métropole et il a souhaité que le débat soit reporté dans le cadre de la discussion du projet de loi sur l'intercommunalité.

M. Félix Leyzour a estimé qu'il serait bon de débattre de cette question même si une réponse définitive ne pouvait lui être donnée que dans le projet de loi sur l'intercommunalité.

M. Jean-Claude Daniel a évoqué le problème posé en matière de dotation globale de fonctionnement lorsqu'une seule commune est à elle seule une agglomération. Il s'est demandé si elle avait le statut de commune ou d'agglomération.

M. Philippe Duron, rapporteur, a estimé que cette question était fort complexe et qu'il conviendrait de demander une expertise approfondie au Gouvernement.

A l'issue de ce débat, cet amendement a été rejeté.

La commission a également rejeté un amendement de M. Patrick Ollier relatif aux projets locaux de développement présentés par des communes ou des groupements de communes.

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Félix Leyzour visant à reconnaître et à affirmer le rôle des départements en matière d'aménagement du territoire au travers de leur politique sociale, de transport et de leurs prérogatives en matière d'enseignement. Cet amendement a pour objet de permettre aux départements qui ont adopté un projet de développement de conclure avec l'Etat et la région des contrats particuliers. M. Félix Leyzour a souligné que le département ne pouvait pas rester en dehors des contrats de plan Etat-régions.

M. Léonce Deprez s'est prononcé contre cet amendement estimant qu'il ne fallait pas donner aux départements une compétence en matière d'aménagement du territoire.

M. Félix Leyzour a fait observer que c'est bien la région qui a un rôle pivot en matière d'aménagement du territoire, mais que le département a un rôle à jouer en cette matière. Il ne s'agit pas de lui donner de nouvelles responsabilités mais de bien situer sa place en tenant compte des réalités.

M. Alain Cacheux a estimé que cet amendement présentait le département comme un concurrent de la région alors que ces deux collectivités sont complémentaires et s'est donc prononcé contre cet amendement.

MM. Jean-Michel Marchand, Joseph Parrenin et le rapporteur ont exprimé leur désaccord avec cet amendement.

En conséquence la commission a rejeté cet amendement.

Article 21

(article 24 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995)

Parcs naturels régionaux

Cet article a pour objet d'assurer aux parcs naturels régionaux (PNR) les mêmes prérogatives et possibilités que celles ouvertes pour les pays et les agglomérations dans le cadre du volet territorial des futurs contrats de plan Etat-régions. Ce parallélisme est destiné à préserver le rôle actif qu'exercent les parcs naturels régionaux en matière d'aménagement et de développement durable.

Constitués à l'initiative des régions, les parcs naturels régionaux sont au nombre de 36 actuellement et couvrent près de 10 % du territoire national. Ils regroupent plus de 3 000 communes, intéressent 21 régions et 60 départements, et comptent une population de 2 728 000 habitants. Territoires à l'équilibre fragile, au patrimoine naturel et culturel riche et menacé, ils font l'objet d'un projet de développement fondé sur la préservation mais aussi sur la valorisation de leur patrimoine. Une charte élaborée pour 10 ans et approuvée par l'Etat est porteuse du projet de territoire.

Cet article a pour objet, une fois que la charte du PNR est approuvée par l'Etat, de permettre à l'organisme de gestion du parc de conclure, avec l'Etat et la ou les régions, un contrat particulier, en application du contrat de plan Etat-régions.

Les parcs naturels régionaux, comme les pays ou les agglomérations, seront donc des partenaires à part entière de l'Etat et des collectivités régionales dans le cadre du volet territorial des contrats de plan Etat-régions.

Lors de l'examen de cet article, la commission a rejeté un amendement de M. Serge Poignant tendant à tenir compte des pays pour l'organisation des services publics en milieu rural. Après que M. Patrick Rimbert eut retiré un amendement précisant les modalités de superposition du pays et du parc naturel régional (PNR), la commission a, conformément à l'avis du rapporteur, rejeté deux amendements identiques, l'un de M. Michel Bouvard (n° 7), l'autre de M. Patrick Ollier (n° 46), supprimant le dernier alinéa de cet article.

Elle a ensuite adopté l'article 21 sans modification.

Après l'article 21

La commission a examiné un amendement de Mme Sylvia Bassot (n° 85) visant à préciser la répartition des compétences entre les pays et les PNR. Après l'intervention de M. Jean Proriol en faveur de cet amendement, le rapporteur a fait observer que cette question avait été réglée précédemment par l'adoption d'un de ses amendements. L'amendement a été en conséquence rejeté.

Article additionnel avant l'article 22

(article 28 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995)

Création de commissions départementales de présence postale

La commission a examiné un amendement de M. François Brottes visant à inscrire dans la loi certaines dispositions contenues dans le contrat d'objectifs et de progrès portant contrat de plan entre l'Etat et la Poste pour 1998-2001, signé le 25 juin 1998.

Le chapitre 4 du contrat d'objectifs et de progrès définit la participation des points de contact postal à l'aménagement du territoire. Il est centré sur le développement du partenariat et la mise en place d'une concertation avec les élus locaux lorsque La Poste envisage de fermer un point de contact.

EXTRAIT DU CONTRAT D'OBJECTIFS ET DE PROGRÈS PORTANT CONTRAT DE PLAN ENTRE L'ÉTAT ET LA POSTE POUR 1998-2001,
SIGNÉ LE 25 JUIN 1998

4- LE RÉSEAU DES POINTS DE CONTACT ET LA PARTICIPATION À  L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

La Poste, présente sur l'ensemble du territoire national, doit adapter son réseau de points de contact aux besoins des populations, en tenant compte notamment des évolutions démographiques, sociales et économiques et des projets d'aménagement envisagés, et en recherchant l'équilibre financier de ses activités. Ces évolutions requièrent en particulier une adaptation du réseau postal aux caractéristiques des zones urbaines sensibles et des zones rurales.

Dans ce cadre, La Poste détermine les moyens les mieux adaptés pour assurer un service de qualité dont le niveau est mesurable, adapte en permanence son réseau aux besoins du public en fonction de critères appropriés aux zones rurales, aux zones urbaines et aux différentes zones sensibles, et en optimise l'utilisation.

Pour atteindre ces objectifs, la concertation locale et la recherche de partenariats constituent pour La Poste des instruments privilégiés.

Enfin, La Poste est attentive, dans la conduite et la mise en _uvre de ses projets nationaux, à l'effet que ceux-ci peuvent avoir sur l'équilibre du territoire.

4-1 Développer les partenariats

La Poste optimise ses implantations en fondant les évolutions nécessaires de son réseau de points de contact sur la recherche de partenariats équilibrés, notamment dans un cadre intercommunal, avec les collectivités territoriales qui le souhaitent et avec les autres services publics.

Les partenariats peuvent revêtir différentes formes : maisons des services publics, points publics, agences postales, accords avec d'autres acteurs publics ou privés. Ils donnent lieu à la signature de conventions qui définissent les engagements des parties. L'Etat prendra les dispositions permettant, si nécessaire, de préciser le cadre juridique de ces partenariats.

4-2 Une concertation rénovée et renforcée

La concertation avec l'ensemble des partenaires concernés sera renforcée afin de préciser les besoins exprimés localement et de dégager des solutions assurant un service de qualité dans des conditions économiques améliorées. A cet effet, La Poste instaure, y compris au plan national, une concertation avec les représentants des collectivités territoriales, afin de déterminer les conditions d'évolution de son réseau de points de contact.

Au plan régional, La Poste apporte sa contribution aux réflexions et aux travaux relatifs à l'aménagement du territoire et à la présence des services publics. Dans ce cadre, elle présente chaque année le bilan de son action au niveau régional et ses projets dans ce domaine. Ces derniers, lorsqu'ils concourent à l'aménagement du territoire, pourront être pris en compte dans les discussions relatives à l'élaboration des futurs contrats de plan Etat-régions.

Afin de permettre l'évolution du réseau des points de contact dans des conditions respectant l'autonomie de décision et de gestion de La Poste et sa responsabilité à l'égard des choix de présence postale mais également les préoccupations d'aménagement du territoire, une clarification des rôles et des responsabilités des différents partenaires doit être engagée.

Pour mettre en _uvre des principes clairs de responsabilité, il est proposé aux collectivités territoriales de constituer dans chaque département une commission réunissant, sous la présidence d'un membre du conseil général, des représentants des élus départementaux et régionaux, d'un représentant des maires du département et des représentants de La Poste. Le préfet désignerait un observateur pour assister aux travaux de cette commission afin d'assurer la cohérence avec ceux de la commission départementale d'organisation et de modernisation des services publics.

La composition de la commission pourrait être élargie, si nécessaire et à leur demande, aux entités autres que les collectivités territoriales et La Poste éventuellement intéressées par un partenariat actif ou le cofinancement de nouvelles formes de service de proximité telles que les maisons de service public.

La commission serait tenue informée des projets d'évolution du réseau des points de contact visant à établir une meilleure répartition sur le territoire tout en permettant à La Poste de rechercher l'équilibre financier de ses activités. Dans ce cadre, La Poste s'engagerait, sauf accord de l'élu local concerné ou de la commission, à ne fermer aucun point de contact dans les six mois suivant l'annonce de son projet.

En outre, la commission statuerait dans un délai de six mois à compter de sa saisine, sur les opérations particulières de restructuration du réseau des points de contact qui n'auraient pu donner lieu à un accord des collectivités locales directement intéressées. Elle procéderait préalablement à l'audition des élus locaux directement concernés. Afin de respecter l'autonomie de gestion de La Poste et sa responsabilité à l'égard des choix de présence postale, la commission ne pourrait demander le maintien d'une implantation inadaptée que dans la mesure où les partenaires associés à cette demande auraient arrêté avec La Poste les dispositions permettant d'en assurer l'équilibre financier pour l'exploitant public.

Enfin, la commission départementale pourrait également jouer un rôle actif d'incitation à la modernisation du réseau en donnant un avis sur les projets d'intérêts locaux, notamment de regroupements de services publics incluant La Poste. Ces projets pourraient, dès lors, bénéficier de soutiens à l'investissement associant des financements locaux, des financements de La Poste et de l'Etat, dans le cadre de sa politique d'aménagement du territoire.

4-3 Assurer le suivi des actions engagées

La mise en _uvre des dispositions du présent article fait l'objet d'un suivi par la commission supérieure du service public des postes et télécommunications.

Cette commission proposera le cadre et les modalités de fonctionnement des commissions départementales mentionnées au 4-2 ci-dessus. Elle proposera également, le cas échéant, les aménagements nécessaires de la composition des instances locales de concertation.

La Poste rend compte, chaque année, au ministre chargé des postes et télécommunications, des résultats de cette concertation, dans le cadre du bilan d'exécution du contrat d'objectifs et de progrès.

En raison de sa participation à l'aménagement du territoire, La Poste bénéficie de l'abattement fiscal prévu à l'article 21 de la loi du 2 juillet 1990.

Au terme du contrat, l'Etat et La Poste procéderont à une évaluation du surcoût éventuel de la présence postale induit par la participation de l'exploitant à l'aménagement du territoire.

Le présent contrat d'objectifs et de progrès tient lieu de contrat de service public.

Dans l'intérêt de la qualité du service postal il est indispensable de permettre à La Poste d'adapter son réseau de points de contact en fonction des besoins des populations et des territoires. Ce n'est pas rendre service à la population que de figer le réseau postal à l'état dans lequel il se trouvait en 1993. En revanche il est impérieux de mettre fin à des pratiques consistant à informer les élus locaux de la fermeture d'un point de contact et éventuellement d'engager une discussion alors que la décision est prise, les instructions adressées et la réorganisation du service finalisée.

Au 31 décembre 1997, La Poste possédait 17 011 points de contact sur le territoire français (DOM compris). Sur les quinze dernières années, on constate que ce nombre est stable. Il dissimule cependant des situations et des évolutions contrastées :

- le nombre de bureaux de poste (recettes de plein exercice et recettes rurales) et de guichets indépendants diminue continûment depuis une dizaine d'années, cette diminution étant compensée par une augmentation des agences postales et correspondants postaux (2). L'accroissement de cette dernière catégorie a largement été entraînée, d'une part, par le moratoire des services publics intervenu en mai 1993, qui a contraint La Poste à ne fermer aucun bureau ou agence en milieu rural (dans les communes de moins de 2 000 habitants) et à n'opérer aucune réduction d'effectif dans les bureaux ayant moins de 4 emplois affectés au guichet-développement (les fermetures de bureaux envisagées se sont donc traduites par des transformations en agence) et, d'autre part, par la création de points de contact dans des zones urbaines en difficulté ou en développement rapide ;

- cependant, sur le très long terme, le nombre de bureaux de poste a étonnamment peu évolué : en 1914 (hors Alsace-Moselle) on en dénombrait 12 881 ; ils sont aujourd'hui 12 099. Si de très nombreux bureaux de poste ont été transférés dans les villes avec les migrations de ce siècle, il n'en demeure pas moins que l'administration postale n'a pas totalement traduit par des suppressions de bureaux l'ampleur des mouvements de concentration urbaine.

ÉVOLUTION DU RÉSEAU POSTAL

 

fin 1983

fin 1986

fin 1990

fin 1993

fin 1994

fin 1995

fin 1996

fin 1997

Bureaux de poste

12 796

12 843

12 752

12 357

12 222

12 118

12 029

12 029

Agences postales et assimilées (1)

3 310

3 264

3 130

3 092

3 068

3 038

3 073

3 025 (3)

Guichets délocalisés (2)

1 105

1 080

1 085

1 428

1 629

1 767

1 928

1 893

TOTAL

17 211

17 187

16 967

16 877

16 919

16 973

17 030

17 018

(1) Établissements rattachés à un bureau de poste et tenus par des personnes extérieures à La Poste mais sous contrat avec elle.

(2) Guichets dits annexes, indépendants physiquement mais rattachés à un bureau de poste (pas de chef d'établissement, ni de comptabilité propre).

(3) Nombre d'agences postales hors agences militaires.

Source : La Poste

- le réseau postal conserve un caractère fortement rural comme le souligne le tableau ci-dessous. On peut relever, en outre, que sur les 73 000 tournées quotidiennes de facteurs, 16 800 sont effectuées dans ces communes rurales (et 38 150 dans les communes de moins de 10 000 habitants) :

(chiffres fin 1996)

COMMUNES

Nombre de communes

Nombre d'habitants

Nombre de points

de contacts (part dans le total)

de moins de 500 habitants

21 577

4 737 000

3 370 (19,8 %)

de 500 à 2000 habitants

10 601

10 117 000

7 156 (42,0 %)

Total

32 178

14 854 000

10 526 (1) (61,8 %)

(1) Au 1er avril 1998, le nombre de points de contact n'était plus que de 10 333, dont 2 364 agences postales.

M. François Brottes a proposé de donner un statut législatif aux commissions départementales de présence postale.

Une circulaire, non publiée, adressée aux préfets, a été établie par le secrétaire d'Etat à l'industrie le 3 septembre 1998 pour déterminer les conditions de mise en place de ces commissions. Elle a prévu qu'elles seront composées de 11 membres : 3 représentants des communes, dont les noms sont proposés par l'association des maires, permettant la représentation des communes de moins de 2000 habitants, celles de plus de 2000 habitants et des groupements de communes ; 2 représentants du conseil régional ; 3 représentants de La Poste ; 1 représentant du préfet. Chaque commission élit son président en son sein. Le représentant du préfet a notamment pour rôle d'assurer la cohérence des travaux de la commission avec ceux de la commission départementale d'organisation et de modernisation des services publics et de veiller à l'information régulière de celle-ci.

Aux termes de cette circulaire, la commission " sera tenue informée suffisamment longtemps à l'avance, des projets d'évolution du réseau des points de contact susceptibles d'en modifier significativement la répartition ou les modalités de présence. En l'absence de consensus dans le cadre de la concertation locale sur un projet d'ouverture ou de fermeture d'un point de contact, la CDPPT sera saisie.

" Dans ce cadre, La Poste s'est engagée, sauf accord des élus locaux concernés ou de la commission, à ne fermer aucun point de contact dans les six mois suivant l'annonce de son projet. La commission disposera donc d'un délai de six mois pour émettre toute proposition de nature à assurer le meilleur équilibre entre les besoins exprimés, le niveau de qualité et de coût attendu du service public, les préoccupations d'aménagement local exprimées par les représentants des collectivités territoriales. ".

Le dispositif proposé par M. François Brottes étend donc les dispositions prévues par le ministre chargé des postes sur quatre points :

- alors que la circulaire indique que La Poste ne doit fermer aucun point de contact pendant le délai de six mois, l'amendement impose à La Poste de ne pas modifier le service rendu à la population concernée ;

- alors que la circulaire prévoit que ce délai de six mois court à compter de l'annonce du projet d'évolution du réseau des points de contact par La Poste, l'amendement fait courir ce délai à compter de la saisine de la commission départementale ;

- l'amendement prévoit que le délai de six mois est mis à profit pour trouver la meilleure solution du maintien ou de l'évolution des prestations de La Poste sur la commune concernée, ce qui constitue un objectif plus large que celui définit par la circulaire ;

- les possibilités de financements publics ne sont pas mentionnées par la circulaire.

Un débat s'est engagé sur cet amendement. M. François Brottes a précisé que l'adoption du dispositif qu'il préconisait aboutirait à créer un lieu de concertation entre les communes, l'Etat et la Poste, susceptible de contribuer au maintien de cet important service public sur l'ensemble du territoire. Le rapporteur a proposé de sous-amender cet amendement afin de le mettre en conformité, en ce qui concerne la composition de la commission départementale, avec une circulaire du 3 septembre 1998 du ministre chargé des postes qui l'a fixée. En conséquence, et conformément à l'avis du rapporteur, la commission a adopté ce sous-amendement puis l'amendement ainsi modifié portant article additionnel avant l'article 22 (amendement n° 333).

Article 22

(articles 29 et 29-1 [nouveau] de la loi n° 95-115 du 4 février 1995)

Maintien des services publics sur le territoire

L'article 22 du projet de loi propose deux modifications de la loi du 4 février 1995 :

- la suppression de la définition par décret des modalités d'application de l'article 29 ;

- l'introduction d'un article additionnel 29-1 relatif aux agences postales.

1. La suppression du décret d'application de l'article 29

Les articles 28 et 29 de la loi du 4 février 1995 essaient de répondre au problème difficile du maintien des services publics sur l'ensemble du territoire.

En vertu du principe d'égal accès des citoyens au service public, le gouvernement a institué le 10 mai 1993 un moratoire suspendant la fermeture ou la réduction des services publics en milieu rural. Ce moratoire a été prolongé et demeure applicable. Il concerne toutes les communes dont la population agglomérée ne dépasse pas 2 000 habitants et vise " tous les services publics de proximité de l'État ", comme par exemple l'éducation nationale, et " les entreprises publiques placées sous la tutelle de l'État et chargées d'une mission de service public de proximité ", comme La Poste, EDF ou France Telecom.

Il suspend " la fermeture ou la réduction des services publics ainsi que la réorganisation aboutissant à une diminution significative du service rendu ". En revanche, les réorganisations internes qui n'ont pas d'effet sur les services ou les bureaux directement en contact avec le public ou sur les prestations rendues aux usagers n'entrent pas dans le champ du moratoire.

Toutefois, sous peine d'entraîner des blocages préjudiciables à la qualité du service rendu aux usagers, un tel moratoire ne saurait être immuable et la loi du 4 février 1995 a tenté de répondre à cette préoccupation :

- par son article 28 sur les commissions départementales d'organisation et de modernisation des services publics qui sont des organes consultatifs formulant des propositions d'amélioration des services publics et un avis sur les schémas départementaux d'organisation et d'amélioration des services publics ;

- par son article 29 consacré aux modalités de la prise en compte des objectifs d'aménagement du territoire et de services rendus aux usagers par les établissements et organismes publics ainsi que les entreprises nationales placées sous la tutelle de l'État et chargées d'un service public.

L'article 29 précise que les objectifs établis par l'État sont fixés dans les contrats de plan de ces établissements ou dans les contrats de service public conclus à cet effet. Il est également indiqué que l'État compense à ces établissements, organismes et entreprises publiques les charges qui en résultent. Par ailleurs, lorsqu'une décision de réorganisation ou de suppression d'un service aux usagers est néanmoins prise par ces établissements, en contradiction avec les objectifs des contrats de plan ou de service public, elle doit être précédée d'une étude d'impact, qui en apprécie les conséquences. Les collectivités territoriales concernées sont consultées sur son élaboration. La commission départementale d'organisation et de modernisation des services publics est également consultée.

A l'issue de la procédure, en cas de désaccord du préfet, le ministère de tutelle de l'établissement concerné peut statuer par une décision qui s'impose à cet établissement.

Le dernier alinéa de l'article 29 prévoyait qu'un décret en Conseil d'État définirait les modalités d'application de cet article, notamment :

- les règles permettant d'assurer l'équilibre entre les obligations des établissements, organismes et entreprises et la compensation par l'État des charges qui en résultent ;

- les critères spécifiques que doit respecter la décision du représentant de l'État dans le département ou du ministre de tutelle lorsque le projet de suppression concerne une zone prioritaire de développement du territoire.

Ce décret n'a jamais pu voir le jour bien que plusieurs versions aient été soumises au Conseil d'État. On se trouve en effet placé devant une difficulté certaine. La loi du 4 février 1995 en visant les établissements et organismes publics placés sous la tutelle de l'Etat et chargés d'un service public ne pensait concerner que six établissements : La Poste - GDF - France Telecom - SNCF - Banque de France. Mais, tel qu'il est rédigé l'article peut viser environ 400 établissements de cette sorte comme les haras nationaux et les chambres de commerce et d'industrie.

Un décret d'application édictant des règles générales pour l'ensemble de ces établissements n'ayant pu être rédigé, le Gouvernement propose dans le paragraphe I la suppression du dernier alinéa de cet article.

Cette suppression n'empêchera pas la signature par l'État de contrats avec la SNCF, la Banque de France et France Telecom, comme cela a été déjà fait pour EDF et GDF (contrats de service public de mai 1997 intégrés aux contrats de plan) et pour La Poste (contrat d'objectif et de progrès signé le 25 juin 1998).

Lors de l'examen de cet article, la commission a tout d'abord, conformément à l'avis du rapporteur, rejeté l'amendement n° 84 de M. Jean Proriol et un amendement de M. Patrick Ollier, tendant tous deux à supprimer cet article. Elle a ensuite, conformément à l'avis du rapporteur, rejeté un amendement de M. Patrick Ollier proposant une nouvelle rédaction de cet article visant à maintenir la rédaction actuelle de la loi du 4 février 1995. Elle a également rejeté un amendement de M. Yves Coussain supprimant le paragraphe I de cet article.

La commission a ensuite adopté, conformément à l'avis du rapporteur, trois amendements de M. François Brottes au paragraphe I de cet article modifiant l'article 29 de la loi du 4 février 1995, ayant pour objet de tenir compte du fait que désormais certaines entreprises dont l'Etat est actionnaire majoritaire assument des missions de service public et que le financement des compensations de charges résultant des services publics ne doit pas être assumé seulement par l'Etat (amendements nos 334, 335 et 336).

2. La création d'un article 29-1 relatif aux agences postales

La présence postale et la qualité du service postal sont des éléments structurant le territoire français.

En ce qui concerne la présence de La Poste sur le territoire, le contrat d'objectifs et de progrès, portant contrat de plan entre l'Etat et La Poste pour 1998-2001, signé le 25 juin 1998, a implicitement mis fin au moratoire institué le 10 mai 1993. Ce contrat de plan définit en effet une procédure visant à soumettre à une concertation large et préalable toute réorganisation du réseau des points de contact de La Poste, qui a été examiné à l'article additionnel avant l'article 22.

La portée de l'article 29-1 (nouveau) ne peut être appréciée qu'en prenant en compte les dispositions relatives aux maisons des services publics contenues dans le projet de loi (n° 900) relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, présenté par M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation (articles 24, 25 et 26). Ce projet de loi donne un statut législatif aux espaces réunissant des services publics relevant de l'Etat ou de ses établissements publics, des collectivités territoriales ou de leurs établissements publics, des organismes de sécurité sociale ou d'autres organismes chargés d'une mission de service public. Ces maisons des services publics visent à " faciliter les démarches des usagers et (à) améliorer la présence des services publics sur le territoire ". Elles doivent abriter au moins une personne morale de droit public et sont créées par une convention entre les personnes morales qu'elles regroupent, approuvée par le préfet du département.

Les maisons des services publics fonctionnent avec le concours d'agents mis à disposition par les personnes morales qui y participent et d'agents détachés auprès d'un groupement d'intérêt public constitué à cet effet. Cependant, si le projet de loi n° 900 précité organise la procédure contractuelle de création de ces maisons et définit leurs fonctions, il ne traite pas du statut des personnels des maisons, hormis pour le responsable de chacune d'elle qui doit être désigné parmi les agents soumis au statut général des fonctionnaires.

Le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire permet aux communes et groupements de communes de mettre à disposition des agences postales des locaux et des personnels.

La mise à disposition de locaux est réalisée depuis plus d'un siècle, à des loyers souvent dérisoires en comparaison des prix du marché.

La mise à disposition de fonctionnaires territoriaux est permise par les articles 61 et 62 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale. L'article 61 organise la mise à disposition dans une administration territoriale (collectivité territoriale ou établissement public local) ; l'article 62 permet la mise à disposition auprès des organismes d'intérêt général. La Poste, que la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications qualifie d'exploitant public, bénéficie donc des dispositions de l'article 62.

Le décret n° 85-1081 du 8 octobre 1985 relatif au régime de la mise à disposition des fonctionnaires territoriaux a limité à trois ans la durée de la mise à disposition, tout en permettant son renouvellement par période n'excédant pas trois années. La mise à disposition est prononcée par arrêté du maire (pour les communes) et donne lieu à la passation d'une convention avec l'organisme d'accueil, qui est annexée à l'arrêté. Cet arrêté de mise à disposition est publié et transmis au préfet.

Le projet de loi prévoit que les fonctionnaires territoriaux mis à la disposition de La Poste seront employés uniquement pour le fonctionnement du service postal. Le service postal est défini par le titre Ier du code des postes et télécommunications. Il comprend la collecte, le tri, le transport et la distribution du courrier et des colis. Le service des mandats relève, en revanche, des services financiers puisqu'il est réglementé par le livre III du code des P&T.

Le dispositif posera des difficultés délicates d'application sur le terrain car au sein d'une agence postale, comme dans tout point de contact postal, les tâches d'accomplissement du service postal et celles relevant des services financiers ne sont aucunement séparées. Il appartiendra aux conventions de mise à disposition de régler ce problème.

Lors de l'examen de cet article, la commission a, conformément à l'avis du rapporteur, adopté un amendement de M. Joseph Parrenin étendant le dispositif de mise à disposition prévu à l'article 29-1 (nouveau) à tous les services publics de l'Etat (amendement n° 337). Un amendement de M. Pierre Micaux intégrant les parcs naturels régionaux et les pays dans le dispositif tendant à favoriser le maintien du fonctionnement du service postal en milieu rural est devenu sans objet.

Ce nouveau dispositif permet d'utiliser des locaux et des agents municipaux pour le fonctionnement des services publics. Comme la mise à disposition est conclue avec une administration, établissement ou entreprise d'Etat, il s'agit implicitement d'un service public dont la gestion relève de l'Etat. La nouvelle rédaction laisse subsister le problème du partage des activités de La Poste entre celles relevant du service public (courrier, mandats) et celles relevant des services financiers.

La commission a adopté l'article 22 ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 22

(article 7 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et
à la protection de la montagne)

Information du comité de massif sur l'attribution de certains crédits du fonds national d'aménagement et de développement du territoire

L'article 7 de la loi relative au développement et à la protection de la montagne prévoit la création d'un comité de massif qui définit les objectifs et précise les actions qu'il juge souhaitables pour le développement, l'aménagement et la protection des massifs de montagne.

Il est consulté sur les priorités d'interventions, les conditions générales d'attribution des aides accordées aux massifs par le FNADT, ainsi que sur leur programmation annuelle.

Lors de l'examen en commission, deux amendements identiques, l'un de M. Joseph Parrenin, l'autre de M. Patrick Ollier (n° 59), portant article additionnel après l'article 22 ont été présentés. Ils visent à actualiser la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne, pour tenir compte du regroupement du fonds interministériel de développement et d'aménagement rural ainsi que du fonds d'intervention pour l'autodéveloppement en montagne, au sein du fonds national d'aménagement et de développement du territoire. Ces amendements substituent à l'obligation de consultation du comité de massif devenue sans objet une obligation d'information.

La commission a adopté ces amendements, conformément à l'avis du rapporteur (amendements n° 338 et n° 59 de M. Patrick Ollier).

Un amendement similaire de M. Jean Proriol est en conséquence devenu sans objet.

Article additionnel après l'article 22

(article 33 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995)

Information du conseil national de l'aménagement et du développement du territoire sur l'attribution des crédits du fonds national d'aménagement et de développement du territoire

Créé par l'article 33 de la loi du 4 février 1995, le fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT) regroupe " les crédits consacrés à l'aménagement du territoire, à la restructuration des zones minières, à la délocalisation des entreprises, à l'aide aux initiatives locales pour l'emploi, au développement de la montagne et à l'aménagement rural ".

Les crédits de ce fonds sont répartis entre une section générale et une section locale à gestion déconcentrée au niveau régional.

Lors de l'examen en commission, quatre amendements identiques, de MM. Michel Bouvard (n° 4), Patrick Ollier (n° 58), Joseph Parrenin et Jean Proriol, créant un article additionnel après l'article 22 ont été présentés. Ils prévoient explicitement l'information du conseil national de l'aménagement et du développement du territoire sur les décisions d'attribution des crédits du fonds national d'aménagement et de développement du territoire. La commission a adopté ces amendements, conformément à l'avis du rapporteur (amendements no339, n° 4 de M. Michel Bouvard et n° 58 de M. Patrick Ollier).

Article additionnel après l'article 22

(article 33 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995)

Information des élus concernés sur l'attribution des crédits inscrits à la section locale du fonds national d'aménagement et de développement du territoire

La commission a adopté, contre l'avis du rapporteur qui a considéré que cette précision relevait du domaine réglementaire, quatre amendements identiques portant article additionnel après l'article 22, de MM. Michel Bouvard (n° 6), Patrick Ollier (n° 56), Joseph Parrenin et Jean Proriol, indiquant que les décisions d'attribution des crédits inscrits à la section locale du FNADT sont communiquées par le préfet de région aux présidents des conseils régionaux et généraux intéressés et que le trésorier payeur général de région adresse chaque année au président du conseil régional un rapport sur les conditions d'exécution de ces décisions (amendement n° 340, n° 6 de M. Michel Bouvard et n° 56 de M. Patrick Ollier).

Après l'article 22 

La commission a ensuite rejeté, conformément à l'avis du rapporteur, un amendement de M. Patrick Ollier donnant un caractère prioritaire aux zones de revitalisation rurale pour l'attribution des subventions du FNADT, ainsi qu'un amendement de M. Jean Proriol ayant le même objet.

Article 23

(article 38-1 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995)

Fonds de gestion des milieux naturels

L'objet de cet article est d'inscrire dans la loi sur l'aménagement et le développement du territoire le fonds de gestion des milieux naturels (FGMN) créé dans le projet de loi de finances pour 1999 pour assurer le financement de la politique de préservation de certains espaces naturels et de la diversité biologique. Ainsi, le fonds sera doté dès le 1er janvier 1999 avant même son institution formelle.

A la différence d'autres fonds, comme le Fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables (FITTVN), il ne s'agit pas d'un compte d'affectation spéciale. Les crédits proposés pour 1999 sont inscrits sur six lignes budgétaires du fascicule " environnement " et seront donc gérés comme les autres dotations du ministère.

La globalisation dans ce nouveau fonds de crédits jusque là distincts doit permettre de renforcer la cohérence des actions menées sur la base d'une gestion contractuelle. En sont donc exclues certaines interventions, soit parce qu'elles concernent des établissements publics de l'Etat, soit parce que les mesures de protection mises en _uvre relèvent de son pouvoir de réglementation et ne sont, de ce fait, pas contractualisées. Il s'agit, d'une part, des parcs nationaux et du Conservatoire du littoral et, d'autre part, des réserves naturelles et sites classés.

Les crédits du fonds de gestion des milieux naturels pour 1999 s'élèvent à 164 millions de francs, dont 90 millions de francs de mesures nouvelles. Le tableau ci-dessous en indique la répartition par type d'action.

RÉPARTITION DES CRÉDITS DU FGMN EN 1999

(en millions de francs)

ACTIONS

Dépenses ordinaires

Dépenses en capital

Total
(DO+CP)

%
du total

   

CP

AP

   

Parcs naturels régionaux

34,8

7,6

15,2

42,4

25,9

Capacité d'expertise

10

     

11,1

   

}5,2

}10,5

}18,2

 

Gestion contractuelle de l'espace

3

       

Programme d'actions sur la biodiversité

20,8

5,3

10,5

26,1

15,9

Conservatoires botaniques nationaux

3,2

   

3,2

1,9

Natura 2000

55,3

13,3

29,8

68,6

41,9

Autres actions communautaires

 

5,5

13,6

5,5

3,3

TOTAUX

127,1

36,9

79,6

164

100

A la lecture de ces éléments chiffrés, il apparaît clairement que la principale destination du fonds est la conservation de la diversité biologique. Outre les programmes d'actions spécifiques concernant les espèces animales sauvages, notamment le retour du loup dans les Alpes françaises et la population d'ours dans les Pyrénées, la mise en place du réseau Natura 2000 qui vise, on l'a vu à l'article 18, à préserver les habitats des espèces de faune et de flore sauvages, bénéficie de la plus forte dotation, soit près de 42 % de l'ensemble des crédits. Les parcs naturels régionaux, quant à eux, bénéficient de plus du quart des crédits avec une enveloppe de 42,4 millions de francs.

Le fonds sera géré par le ministère de l'environnement, les crédits étant déconcentrés auprès des directions régionales de l'environnement (DIREN). Les critères d'attribution des crédits ne paraissent pas encore clairement déterminés.

Si l'insertion formelle du fonds de gestion dans un article de la loi du 4 février 1995 n'est pas critiquable, il apparaît que la rédaction proposée pour le premier alinéa de cet article n'est plus vraiment d'actualité. En effet, le fonds étant d'origine budgétaire, son utilisation pourra démarrer dès la publication de la loi de finances pour 1999, sans qu'il soit besoin d'attendre celle de la présente loi.

Quant aux objectifs du fonds, ils sont définis de manière très large au deuxième alinéa du nouvel article 38-1 qui mentionne tout projet d'intérêt collectif contribuant, soit à la protection, soit à la réhabilitation, soit à la gestion des milieux naturels, c'est-à-dire des espaces et des espèces, ainsi que des " habitats naturels ". Ces termes renvoient expressément à la directive n°92/43/CEE du 21 mai 1992 concernant la conservation des " habitats naturels " ainsi que de la faune et de la flore sauvages, texte fondateur du réseau Natura 2000.

Les actions seront menées au niveau local, privilégiant une politique de proximité, en vue de favoriser le maintien ou le développement d'activités compatibles avec le respect des équilibres naturels. Il ne s'agit pas, en effet, de " sanctuariser " de nombreux territoires mais de rechercher les moyens de mieux concilier environnement et développement.

Le fonds devrait ainsi être l'instrument financier d'accompagnement de la création du réseau Natura 2000. Dans un premier temps, les crédits serviront à financer l'élaboration de documents d'objectifs, sortes de plans de gestion ; après l'élaboration de cahiers des charges, les sites concernés feront l'objet de contrats avec les propriétaires des terrains. Les propriétaires ou exploitants qui ont en charge l'entretien et la gestion des sites officiellement retenus pourront alors bénéficier d'une rémunération appropriée aux prestations et aux services qu'ils rendent à la collectivité, soit au titre des sujétions occasionnées, soit pour la réalisation d'investissements concourant à la réhabilitation des milieux naturels particulièrement menacés. De ce point de vue, le choix d'une définition large des objectifs du fonds a le mérite de permettre une application souple et évolutive.

La rédaction du dernier alinéa de l'article appelle, en revanche, quelques réserves. Celui-ci crée un lien entre le fonds et le schéma de services collectifs des espaces naturels et ruraux. Cette précision ne paraît pas très utile dans la mesure où il s'agit, d'un côté, de crédits du budget général, de l'autre, d'objectifs déterminés également par l'Etat. En outre, le fonds de gestion des milieux naturels n'a aucune autonomie, il lui est donc impossible de " prendre en compte " quelqu'objectif que ce soit.

M. Léonce Deprez a estimé que la multiplication des fonds constituait une dérive et souligné que le fonds national d'aménagement et de développement du territoire devrait regrouper l'ensemble des moyens de l'Etat en ce domaine. Le rapporteur ayant indiqué que le projet de loi de finances pour 1999 prévoyait de doter le fonds de gestion des milieux naturels de 164 millions de francs de crédits en provenance du ministère de l'environnement qui viendront ainsi en complément de ceux consacrés à l'aménagement du territoire, la commission a rejeté l'amendement n° 81 de M. Léonce Deprez visant à supprimer cet article.

Elle a ensuite adopté un amendement du rapporteur proposant une nouvelle rédaction globale de l'article 38-1 de la loi du 4 février 1995 en vue de supprimer le premier alinéa, devenu obsolète du fait de la dotation du fonds à partir du 1er janvier 1999 et de rectifier la rédaction du troisième alinéa (amendement n° 341). En conséquence, elle a considéré comme sans objet :

- un amendement de M. Jean Proriol visant à modifier la dénomination du fonds en y adjoignant le qualificatif de ruraux ;

- un amendement de M. Patrick Ollier tendant à étendre l'utilisation du fonds aux projets concourant à l'entretien ou à la réhabilitation des territoires ruraux dont les maîtres d'_uvre ne sont pas éligibles aux contrats territoriaux d'exploitation ;

- un amendement de M. Jean Proriol ayant un objet similaire ;

- un amendement de conséquence d'un amendement précédemment rejeté à l'article 18 présenté par M. François Sauvadet pour limiter le schéma de services collectifs aux espaces naturels.

Après l'article 23

La commission a examiné un amendement de M. Claude Hoarau prévoyant l'institution dans chaque département d'outre-mer (DOM) d'un fonds régional d'aménagement et d'organisation des services collectifs. Le rapporteur a estimé que, compte tenu des spécificités des départements d'outre-mer, il serait préférable d'inclure ce type de dispositions dans la loi d'orientation sur l'outre-mer en préparation. Rappelant que la loi sur l'aménagement du territoire était inapplicable aux DOM qui bénéficient, en outre, de règles particulières en matière de transports et de logement par exemple, M. Claude Hoarau a souligné qu'à son avis la seule solution serait de prévoir une loi spécifique relative à l'aménagement et au développement de ces départements. Il a indiqué qu'il déposerait un amendement en ce sens avant l'examen du projet de loi en séance et qu'il comprendrait que, dans ces conditions, la commission n'adopte pas les amendements spécifiques aux DOM qu'il a déposés à l'article 25 et après l'article 25. Le président André Lajoinie a indiqué que la commission examinerait l'amendement en application de l'article 88 du Règlement. Le rapporteur s'est montré favorable à cette solution en rappelant que, dans le rapport qui lui avait été confié, M. Jean Auroux souhaitait des propositions d'adaptation spécifiques à chaque département d'outre-mer. La commission a alors rejeté l'amendement de M. Claude Hoarau.

Elle a également rejeté un amendement de M. Jean-Pierre Defontaine tendant à créer une fondation destinée à contribuer à la préservation et au développement des services publics locaux en milieu rural.

Article 24

(article 39 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995)

Objectifs du schéma directeur de la région Ile-de-France

Cet article abroge l'article 39 de la loi du 4 février 1995 selon lequel le schéma national d'aménagement du territoire (SNADT) et le schéma directeur de la région Ile-de-France (SDRIF) précisent les moyens à mettre en _uvre pour réaliser trois objectifs :

- renforcer la position de Paris comme métropole européenne ;

- conforter le rayonnement international de la région d'Ile-de-France ;

- assurer son développement qualitatif tout en maintenant sa croissance quantitative.

La loi du 4 février 1995 comporte deux articles relatifs au SDRIF, les articles 39 et 40, l'article 40 étant une modification de l'article L. 141-1 du code de l'urbanisme.

Pour permettre une meilleure lisibilité des textes, le projet de loi regroupe toutes les dispositions relatives au SDRIF dans l'article L. 141-1 du code de l'urbanisme.

C'est la raison pour laquelle il abroge l'article 39 de la loi du 4 février 1995 et en intègre les dispositions (modifiées) dans l'article 35 du projet de loi modifiant l'article L.141-1 du code de l'urbanisme.

L'examen des dispositions ainsi modifiées prendra donc place à l'article 35.

Lors de l'examen en commission, après les interventions du rapporteur, du président André Lajoinie, de M. Patrick Rimbert et de M. Christian Jacob, la commission a rejeté un amendement de M. Patrick Ollier visant à maintenir en vigueur l'article 39 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995.

Elle a adopté l'article 24 sans modification.

Article 25

(article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995)

Zones prioritaires ultra-périphériques

Cet article modifie l'article 42 de la loi du 4 février 1995 relatif aux zones prioritaires d'aménagement du territoire.

Dans ces zones qui se caractérisent par des handicaps géographiques, économiques ou sociaux, sont mises en oeuvre des politiques renforcées et différenciées de développement.

Actuellement ces zones comprennent :

- les zones d'aménagement du territoire, c'est-à-dire les zones éligibles à la Prime d'aménagement du territoire (PAT) ;

- les territoires ruraux de développement prioritaire (TRDP) ; ce sont des zones rurales à faible développement économique ; les zones les moins peuplées et les plus touchées par le déclin démographique et économique parmi ces TRDP sont les zones de revitalisation rurale (ZRR) ;

- les zones urbaines sensibles (ZUS) caractérisées par la présence de grands ensembles ou de quartiers d'habitat dégradé et par un déséquilibre accentué entre l'habitat et l'emploi ; elles comprennent les zones de redynamisation urbaine (ZRU) qui sont les quartiers de ZUS confrontés à des difficultés particulières et les zones franches urbaines (ZFU) qui sont créées dans les quartiers particulièrement défavorisés de ces zones.

Ce dispositif de discrimination positive institué par la loi du 4 février 1995 est difficilement applicable aux départements d'outre mer. Ces derniers n'ont pas accès à la prime d'aménagement du territoire ; les critères de délimitation des ZRR (régions peu peuplées touchées par le déclin démographique) reflètent mal la réalité des DOM et ont exclu ces départements de ce zonage (à l'exception du canton de Saint Philippe à La Réunion) ; seuls leur sont bien appliqués les zonages urbains puisqu'il y a 34 zones urbaines sensibles dans les DOM (sur les 750 ZUS) et 6 zones franches urbaines (contre 38 en métropole).

Cet article prévoit donc d'ajouter une quatrième zone prioritaire : les zones prioritaires ultra-périphériques dont il est précisé qu'elles recouvrent les départements d'outre-mer.

La notion de zones ultra-périphériques est définie au niveau communautaire : elle concerne les DOM, les Açores et Madère et les îles Canaries, c'est-à-dire des régions subissant " un retard structurel important aggravé par plusieurs phénomènes (grand éloignement, insularité, faible superficie, relief et climat difficiles, dépendance économique vis-à-vis de quelques produits dont la constance et le cumul portent lourdement préjudice à leur développement économique et social) ". Il est donc possible d'adopter des mesures spécifiques en leur faveur, dans la mesure et aussi longtemps qu'il existe un besoin objectif de prendre de telles mesures en vue d'un développement économique et social de ces régions.

L'intérêt de ces zones est principalement de déroger aux plafonds d'aide communément fixés. Cette notion s'applique dans certains dispositifs communautaires : par exemple les programmes POSEIDOM et le programme d'intérêt communautaire REGIS.

Cet article a donc pour objet de mieux prendre en compte la spécificité des DOM et de permettre le développement de l'intégration économique et sociale de ces départements. Il permet de mettre en cohérence l'ensemble des mesures fiscales d'ores et déjà existantes. Enfin, il assure l'intégration des DOM dans le nouvel objectif 1.

Il n'implique pas la création de mesures nouvelles mais la mise en cohérence des mesures déjà existantes. Cette absence de mesures nouvelles s'explique par le fait que la situation des DOM a été considérée comme trop spécifique pour être traitée dans une loi relative à l'aménagement du territoire. En effet, si l'on se réfère aux propositions du rapport de M. Jean Auroux sur les zonages, chaque DOM devrait bénéficier, dans le cadre des zones ultra-périphériques, de mesures différentes adaptées aux spécificités de chaque département, ce qui relève d'un dispositif législatif particulier pour l'Outre-mer qui sera déposé ultérieurement.

La commission a examiné deux amendements soumis à discussion commune, le premier de M. Patrick Ollier tendant à préciser que les départements d'outre-mer sont considérés comme des zones ultra-prioritaires, le second de M. Claude Hoarau les qualifiant de zones prioritaires ultra-périphériques et leur accordant de plein droit le bénéfice des dispositions applicables aux zones d'aménagement du territoire.

Après que le rapporteur eut indiqué que l'objet de l'article 25 était d'introduire dans la loi la notion de zones ultra-périphériques afin d'anticiper la réforme des fonds structurels européens, donc d'assurer que les DOM bénéficieront de l'objectif 1 de ces fonds, et que M. Claude Hoarau eut souligné que la qualification de zones ultra-prioritaires reflétait une autre volonté, la commission a rejeté ces deux amendements.

Puis, elle a examiné un amendement de M. Patrick Ollier visant à préciser que des dispositions spécifiques seront mises en _uvre en faveur des zones ultra-périphériques d'ici la fin de l'année 1999. Le rapporteur a indiqué que cet amendement semblait prématuré, la réforme des fonds structurels européens ne devant entrer en vigueur qu'en l'an 2000. M. Christian Jacob a fait observer que cette réforme pourrait être décidée avant la fin de l'année 1999 et M. Serge Poignant qu'elle pourrait intervenir au cours du premier semestre de l'année prochaine. Après que le rapporteur eut souligné que cette échéance était prise en compte par la reconnaissance des DOM comme zones ultra-périphériques, la commission a rejeté l'amendement.

Elle a, en revanche, adopté un amendement de M. Félix Leyzour prévoyant le dépôt au Parlement d'un rapport d'évaluation des politiques mises en _uvre dans les zones caractérisées par des handicaps géographiques, économiques ou sociaux tous les trois ans, M. Félix Leyzour ayant souligné l'intérêt d'un suivi régulier de ces actions (amendement n° 342).

Puis, la commission a adopté l'article 25 ainsi modifié.

Après l'article 25

La commission a tout d'abord rejeté un amendement de M. Jean-Michel Marchand visant à permettre à des entreprises ayant leur siège dans une zone prioritaire et prenant en charge une activité d'intérêt général de bénéficier d'aides des collectivités publiques, à l'instar des contrats territoriaux d'exploitation prévus par le projet de loi d'orientation agricole.

Elle a ensuite rejeté trois amendements de M. Claude Hoarau :

- le premier visant à préciser que les zones des départements d'outre-mer classés en territoires ruraux de développement prioritaire bénéficient des dispositions applicables aux zones de revitalisation rurale ;

- le deuxième tendant à créer dans ces départements des entreprises franches bénéficiant de l'exonération de la taxe professionnelle et des cotisations d'assurances sociales, sous réserve de remplir certaines conditions ;

- le troisième permettant aux DOM de mettre en place au bénéfice des entreprises des primes régionales d'équipement.

Article 26

(article 61 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995)

Zones de revitalisation rurale

Créées par les articles 42 et 52 de la loi du 4 février 1995, les zones de revitalisation rurale correspondent aux zones les moins peuplées et les plus touchées par le déclin démographique et économique des Territoires ruraux de développement prioritaire (TRDP). Elles concernent 40 % du territoire et 4,5 millions d'habitants.

Elles comprennent :

- les communes appartenant aux TRDP situées soit dans les arrondissements dont la densité démographique est inférieure ou égale à 33 habitants/km2, soit dans les cantons dont la densité démographique est inférieure ou égale à 31 habitants/km2 dès lors que ces arrondissements ou cantons satisfont également à l'un des critères suivants :

·  déclin de la population totale,

·  déclin de la population active,

·  taux de la population active agricole supérieur au double de la moyenne nationale.

- les communes situées dans les cantons dont la densité démographique est inférieure ou égale à 5 habitants/ km2.

Ces critères conduisent à une définition stricte, quasi-mécanique des zones éligibles. Les entreprises créatrices d'emploi dans ces zones bénéficient de divers avantages, notamment fiscaux.

Les mesures propres aux ZRR ayant été jugées insuffisantes par les parlementaires, l'article 61 de la loi du 4 février 1995 prévoyait qu'une loi ultérieure, à adopter au plus tard en août 1996, viendrait compléter ces dispositions. Dans cette perspective, le gouvernement d'Alain Juppé a entamé la préparation d'un plan pour l'avenir du monde rural. Mais celui-ci n'a jamais abouti et ne comprenait, d'ailleurs, que très peu de mesures législatives, toutes les mesures fiscales de discrimination positive figurant déjà dans la loi du 4 février 1995.

Considérant que de nouvelles mesures législatives spécifiques ne sont pas pertinentes au regard d'une logique intégrée de projet, cet article abroge donc l'article 61 de la loi du 4 février 1995. Il le remplace par un article qui précise spécifiquement que ces zones doivent être prises en compte par les schémas de services collectifs et par les schémas régionaux d'aménagement du territoire et qu'elles sont un territoire de référence pour l'organisation des services publics.

Enfin, l'article prévoit que ces zones pourront bénéficier des politiques contractuelles prévues dans le cadre des pays. L'État doit mettre en place les moyens nécessaires à cet effet.

Après avoir rejeté un amendement de M. Patrick Ollier visant à faire prendre en compte l'existence des zones de revitalisation rurale (ZRR) par le schéma national d'aménagement et de développement du territoire, la commission a rejeté deux amendements identiques de M. Patrick Ollier et de M. Jean Proriol tendant à préciser que les communes situées en zones de revitalisation rurale peuvent bénéficier d'interventions financières du FNADT pour s'engager dans des conventions de services publics.

Puis, elle a examiné trois amendements identiques prévoyant la création au sein du FNADT d'une section spéciale ayant pour objet d'apporter aux pays compris dans les zones de revitalisation rurale les moyens de fonctionnement nécessaires à l'élaboration de leur charte, déposés respectivement par MM. Joseph Parrenin, Patrick Ollier et Jean Proriol.

Le rapporteur a estimé que ces amendements étaient satisfaits par un amendement adopté à l'article 19 relatif à l'aide à l'ingénierie de projets dans les pays. M. Christian Jacob ayant souligné qu'il s'agissait ici de moyens de fonctionnement, le rapporteur a indiqué que le CIADT réuni le 15 décembre dernier avait décidé d'augmenter la part locale du FNADT à cette fin. M. Daniel Chevallier a insisté sur le manque de moyens humains, donc de moyens financiers, pour élaborer les chartes dans les pays compris dans les zones de revitalisation rurale. Après les interventions de M. Joseph Parrenin et du rapporteur, la commission a rejeté ces trois amendements. Elle a également rejeté un amendement de M. Yves Coussain tendant à préciser que les zones de revitalisation rurale comprennent les départements dont la densité démographique est inférieure à trente habitants au kilomètre carré, le rapporteur ayant indiqué que cette disposition serait à examiner avec la réforme prochaine des zonages.

La commission a adopté l'article 26 sans modification.

Après l'article 26

Après les interventions du rapporteur, de M. Serge Poignant et de M. Joseph Parrenin, la commission a successivement rejeté :

- deux amendements identiques de M. Jean Proriol et de M. Patrick Ollier incitant l'Etat à réviser les modalités de la prime d'aménagement du territoire pour assurer une bonne efficacité des crédits dans les zones de revitalisation rurale  ;

- un amendement de M. Patrick Ollier proposant une exonération temporaire d'impôt sur les bénéfices pour les créations d'entreprises dans les zones de revitalisation rurale ;

- deux amendements identiques de M. Jean Proriol et de M. Patrick Ollier étendant à toutes les communes situées dans ces zones la suppression des droits de mutation pour l'acquisition de fonds de commerce ;

- un amendement de M. Patrick Ollier prévoyant une exonération temporaire de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les immeubles situés dans les zones de revitalisation rurale ;

- deux amendements identiques de M. Jean Proriol et de M. Patrick Ollier tendant à généraliser dans les zones de revitalisation rurale l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les logements acquis par les organismes d'HLM en vue de leur location ainsi que pour ceux faisant l'objet d'un bail à réhabilitation ;

- un amendement de M. Jean Proriol visant à maintenir la réduction pour embauche et investissement au titre de la taxe professionnelle pour les établissements situés en zones de revitalisation rurale ;

- deux amendements identiques de M. Jean Proriol et de M. Patrick Ollier visant à rééquilibrer le dispositif d'allégement de charges sociales applicable dans les zones franches urbaines et les zones de revitalisation rurale en allongeant pour ces dernières la durée d'application du dispositif de trois ans.

Article 27

Suppression de l'obligation de déclaration de location
de résidences de tourisme

L'article 27 du projet de loi abroge l'article 86 de la loi du 4 février 1995, qui oblige les propriétaires qui veulent louer à des fins touristiques à des personnes non domiciliées dans la commune tout ou partie de leur résidence principale ou secondaire à en faire la déclaration à la mairie du lieu d'implantation de cette résidence.

Ce même article 86 a prévu l'intervention d'un décret afin de définir les modalités d'application de cette disposition.

Le décret en question n'a jamais été pris, ce qui a interdit la mise en oeuvre de l'obligation prévue, dont l'intérêt n'apparaît de surcroît pas évident.

Le projet de loi dans son article 27 suggère donc la suppression de ce dispositif.

La commission a adopté cet article sans modification.

Après l'article 27

Après que le rapporteur eut signalé que la commission avait déjà adopté une disposition ayant le même objet, la commission a rejeté l'amendement n° 3 de M. Michel Bouvard actualisant l'article 7 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne pour tenir compte du regroupement de deux fonds au sein du FNADT.

Article 28

(article 1er de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982)

Objectifs du système de transports intérieurs

Cet article est le premier d'une série de six tendant à adapter la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs (LOTI) aux objectifs d'aménagement et de développement durable du territoire dans le domaine des transports.

Le présent article modifie, de manière assez peu significative, le contenu de l'article 1er de la LOTI, qui n'a lui-même pas un caractère normatif. Dans sa rédaction actuelle le premier alinéa de cet article de la LOTI déclare notamment que le système de transports intérieurs doit satisfaire les besoins des usagers dans les conditions les plus avantageuses pour la collectivité ; celui-ci concourt aux objectifs d'unité nationale, de défense du pays, de développement économique et d'aménagement équilibré du territoire ainsi qu'à l'expansion des échanges internationaux.

Le second alinéa de l'article 1er de la LOTI précise en outre que les besoins de transport sont satisfaits par la mise en oeuvre des dispositions rendant effectifs le droit de l'usager à se déplacer et la liberté d'en choisir les moyens.

Le paragraphe I de cet article du projet ajoute un volet environnemental au contenu économique et social du premier alinéa de l'article 1er de la LOTI, tandis que le paragraphe II complète le second alinéa de cet article en précisant que la satisfaction des besoins de transport doit s'opérer dans le respect des objectifs de limitation ou de réduction des risques, nuisances, émissions de polluants et de gaz à effet de serre.

Compte tenu de la part devenue prépondérante de l'énergie d'origine nucléaire dans la production d'électricité en France, il est vrai que la part des transports routiers dans les émissions de polluants et de gaz à effet de serre s'est mécaniquement accrue au cours des quinze dernières années. Rappelons à ce sujet que les engagements souscrits par notre pays à Kyoto, l'an dernier, dans le domaine de la réduction des émissions polluantes sont remplis grâce, précisément, à l'importance du parc de nos centrales nucléaires. Il convient dès lors de renforcer nos efforts en portant ceux-ci désormais en priorité sur les pollutions liées aux transports routiers, c'est-à-dire en privilégiant les modes de déplacements utilisant des véhicules peu ou non polluants (véhicules électriques, au GPL ou au GNV...).

En outre, selon les informations communiquées au rapporteur, le simple remplacement du parc actuel de bus de la RATP, issu pour l'essentiel d'une conception datant des années 1970, par des matériels roulants utilisant le gazole dans les normes courantes actuelles, diviserait par sept les émissions de polluants des transports publics parisiens de surface.

Force est de constater cependant que, s'agissant du transport routier, notamment de marchandises, les technologies existantes ne permettent pas de remplacer efficacement les moteurs diesel par des véhicules puissants utilisant des carburants ou des énergies alternatifs. Toutefois, les progrès liés aux techniques de raffinage du gazole (abaissement de la teneur en soufre par exemple) et à la réduction de la consommation par l'emploi de l'injection directe ont des effets importants dans le domaine de la réduction des effluents. De plus, le développement des filtres à particule et de la catalysation des gaz, a permis de produire des nouveaux moteurs diesel particulièrement peu polluants (le gazole n'émettant en outre aucun gaz à effet de serre).

Conformément à l'avis du rapporteur, la commission a rejeté un amendement de suppression de cet article de M. Patrick Ollier.

Elle a ensuite examiné un amendement de M. Jean-Jacques Filleul, visant à mieux insérer le système de transport intérieur au sein de l'objectif d'aménagement de l'espace communautaire européen. Après que le rapporteur eut exposé que cet amendement trouverait mieux sa place à l'article 32, où il proposerait lui-même une rédaction plus précise sur ce point, la commission a rejeté cet amendement.

Elle a ensuite adopté l'article 28 sans modification.

Article 29

(article 3 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982)

Politique globale des transports

Cet article modifie sur deux points le contenu de l'article 3 de la LOTI, qui précise notamment que la politique globale des transports de personnes et de marchandises assure le développement harmonieux et complémentaire des divers modes de transports individuels et collectifs. Le texte actuel de la LOTI indique également que la politique globale des transports établit les bases d'une concurrence loyale entre les modes de transport et entre les entreprises, favorise leur complémentarité et leur coopération, notamment dans les choix d'infrastructures et par le développement rationnel des transports combinés.

La commission a tout d'abord, conformément à l'avis du rapporteur, rejeté un amendement de M. Patrick Ollier supprimant cet article.

Elle a ensuite rejeté un amendement de M. Jean-Michel Marchand renforçant l'objectif de complémentarité des différents modes de transport, au sein de cet article de la LOTI, après que le rapporteur se fut prononcé contre son adoption au motif qu'il ne convenait pas d'imposer une filière unique aux utilisateurs les privant de la possibilité d'emprunter les transports de leur choix.

Le paragraphe I de cet article vise à ajouter, comme à l'article précédent, un volet environnemental aux éléments de coûts économiques et sociaux dont doit tenir compte la politique globale de transports.

La commission a adopté, conformément à l'avis du rapporteur, un amendement de M. Félix Leyzour créant un paragraphe I bis nouveau, visant à harmoniser les conditions de travail des salariés des différents modes de transport (amendement n° 343).

Le paragraphe II de l'article est important, puisqu'il inscrit dans la LOTI la démarche nouvelle retenue pour définir les priorités dans l'offre de services de transport. Inversant l'ordre dans lequel doit se conduire l'analyse des moyens de satisfaire les besoins de transports, le projet de loi privilégie, pour assurer la complémentarité et la coopération des modes de transport, l'optimisation de l'existant, insistant sur la coordination de l'exploitation des réseaux d'infrastructures, la coopération entre les opérateurs, l'aménagement des interconnexions, et reléguant la réflexion sur le choix des infrastructures au dernier point du déroulement de la démarche.

Ainsi que l'a précédemment indiqué le rapporteur, s'il ne s'agit nullement de créer des infrastructures nouvelles pour satisfaire les carnets de commande des entreprises de travaux publics, il convient d'analyser les besoins de transport et organiser de façon cohérente et efficace leur satisfaction. Une telle action doit être conduite en recherchant une optimisation des structures disponibles mais aussi en prenant en compte les prévisions d'évolution et de croissance de la demande. Une vision figée des besoins de transport conduirait inévitablement l'Etat à manquer à ses obligations à long terme à l'égard de la collectivité publique et à pénaliser la croissance et l'emploi.

La commission a rejeté, suivant la proposition du rapporteur et après l'intervention de M. Léonce Deprez, un amendement de M. Marc-Philippe Daubresse incitant à accélérer le développement des réseaux d'infrastructures, dans le souci de favoriser la croissance du transport intermodal de marchandises et de voyageurs.

Elle a également rejeté, conformément à l'avis du rapporteur, un amendement de M. Jean-Michel Marchand au paragraphe II du présent article renforçant l'obligation de complémentarité entre modes de transports ainsi qu'un amendement rédactionnel de M. Jean-Jacques Filleul. Puis, elle a adopté, après l'intervention de M. André Lajoinie, président, un amendement du rapporteur et de M. Jean-Michel Marchand tendant, dans le cadre de la conduite de la politique globale des transports, à ne pas négliger les besoins en infrastructures nouvelles (amendement n° 344).

Elle a ensuite adopté, sur l'avis favorable du rapporteur, un amendement de M. Jean-Jacques Filleul (amendement n° 345) favorisant l'utilisation par les passagers de modes de transport combiné, grâce à une tarification adaptée et une meilleure information des usagers.

Le paragraphe II de cet article complète en outre l'article 3 de la LOTI par deux alinéas nouveaux. Le premier précise que l'optimisation des réseaux et équipements existants est réalisée par des mesures d'exploitation et des tarifications appropriées. S'agissant de ce dernier point, le rapporteur souscrit à cet objectif, qui peut être envisagé comme un moyen de répartir le trafic sur des plages horaires plus larges, susceptible d'assurer une meilleure fluidité. Cependant, force est de constater que, si cette politique tarifaire est efficace pour les transports collectifs (tarifs bleus et blancs de la SNCF et des compagnies aériennes sur les vols intérieurs), tarifs promotionnels de basse et moyenne saisons sur les vols internationaux, qui favorisent de meilleurs coefficients de remplissage, les expériences conduites sur les autoroutes A 1, A 10 et A 11 par la SANEF et la COFIROUTE, de modulation des péages selon les heures, n'ont pas été concluantes, car elles généraient une baisse de recettes des sociétés concessionnaires. Elles provoquaient en outre le développement de pratiques dangereuses pour la sécurité routière, certains automobilistes se garant sur l'autoroute aux abords des barrières de péage pour attendre les heures creuses.

Si de nouvelles expérimentations de modulations de péages autoroutiers devaient être pratiquées, il faudrait veiller à respecter en outre un équilibre entre la recherche légitime d'une meilleure fluidité du trafic et le droit de tous les automobilistes, notamment les plus modestes, qui sont en majorité, à utiliser le réseau autoroutier dans des conditions budgétaires supportables. Il ne s'agit pas seulement d'une mesure de justice sociale, mais aussi d'un moyen de prévention efficace des accidents de la route. L'autoroute est trois à quatre fois plus sûre que la route traditionnelle ; il serait dès lors impensable qu'une tarification par trop discriminatoire lors des périodes de pointe de trafic renvoie les automobilistes issus des couches populaires vers le réseau présentant le plus de risques.

La commission a examiné un amendement de M. Félix Leyzour à cet alinéa, équilibrant, au sein de l'objectif d'optimisation des réseaux, les places respectives relevant, d'une part, de l'entretien et de la réalisation d'infrastructures nouvelles et, d'autre part, de la mise en _uvre de mesures de gestion et de tarifications appropriées. Le rapporteur a émis un avis favorable à l'adoption de cet amendement sous réserve de l'adoption d'un sous-amendement de coordination qu'il a proposé.

M. Serge Poignant s'est déclaré en faveur de l'amendement, considérant qu'il convenait de dépasser la seule optimisation des infrastructures existantes et d'envisager la construction d'équipements supplémentaires intégrant les progrès technologiques les plus récents.

M. Félix Leyzour a précisé que l'objectif de son amendement visait à reconnaître qu'il était nécessaire de poursuivre la construction de nouvelles infrastructures de transport. Il s'est ensuite prononcé en faveur de l'adoption du sous-amendement du rapporteur.

En réponse aux intervenants, le rapporteur a indiqué qu'optimiser l'utilisation des réseaux et équipements existants signifiait aussi veiller à leur modernisation technique ou à l'élargissement de leur gabarit.

La commission a alors adopté le sous-amendement du rapporteur, puis l'amendement ainsi modifié (amendement n° 346). Elle a en conséquence rejeté un amendement de M. Patrick Ollier, devenu sans objet.

Le deuxième alinéa introduit à l'article 3 de la LOTI, indique que la politique globale des transports facilite la desserte des territoires de faible densité démographique, à partir des grands réseaux de transport. La commission a adopté un amendement du rapporteur (amendement n° 347) précisant que cette desserte constituait pour la collectivité nationale une obligation sur la totalité du parcours, le terme retenu par le texte du projet de loi pouvant prêter à confusion sur ce point.

Elle a ensuite adopté l'article 29 ainsi modifié.

Article 30

(article 4 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982)

Intégration des politiques locales de transport

Le présent article modifie l'article 4 de la LOTI. Toutefois, comme pour nombre des articles de ce projet de loi, la technique retenue pour la rédaction aboutit à intégrer ici également certains éléments de l'article 14 de la LOTI, dont le contenu est simultanément transformé.

La commission a tout d'abord rejeté, suivant l'avis du rapporteur, un amendement de M. Jean-Michel Marchand confiant aux régions un rôle de coordination des politiques de transport des collectivités territoriales.

Le paragraphe I effectue une modification de coordination, tirant à la fin du premier alinéa de l'article 4 de la LOTI, les conséquences de l'abandon des schémas de développement de transport et de la mise en place de schémas de services collectifs. Puis, il introduit un nouvel élément dont l'origine est contenue dans la rédaction actuelle du troisième alinéa de l'article 14 de la LOTI en le modifiant sensiblement.

L'article de la LOTI dispose que des schémas directeurs d'infrastructures sont établis respectivement par l'Etat, en concertation avec les régions, et par les collectivités territoriales et leurs groupements, pour assurer la cohérence à long terme des réseaux définis pour les différents modes de transport et pour fixer les priorités en matière de modernisation, d'adaptation et d'extension des réseaux. Ces schémas directeurs d'infrastructures sont élaborés dans le cadre des orientations nationales et locales de la planification et de l'aménagement.

Reprenant ici la logique d'une réflexion fondée sur les besoins plutôt que sur les infrastructures, la nouvelle rédaction, intégrée dans l'article 4 de la LOTI, précise que les autorités compétentes pour l'organisation des transports et la gestion des infrastructures coordonnent leurs actions à partir d'une analyse globale des déplacements, notamment dans les aires urbaines, et harmonisent leur politique au niveau régional.

Cette rédaction appelle plusieurs commentaires. S'agissant du dernier élément, elle confie à la région un nouveau rôle en matière de coordination des politiques des transports de voyageurs relatives aux déplacements internes à son territoire. Cette concertation ne pourra à l'évidence jouer réellement que sur une base volontaire entre les autorités organisatrices de transports, du fait de l'absence en droit de tutelle entre les différents échelons de collectivités territoriales. Sous cette réserve, cette proposition paraît pertinente mais pourrait toutefois poser des problèmes lorsque les besoins de transport concernent un bassin de vie ou d'emploi situé à la lisière de plusieurs régions, comme c'est par exemple le cas autour d'Alençon. Il faut donc conserver une grande souplesse dans la définition du cadre d'exercice de l'harmonisation des politiques de transport, là où, à titre exceptionnel, le périmètre de la région n'est pas pertinent.

Outre la coordination des structures, le paragraphe I de cet article prévoit que l'harmonisation des actions des différentes autorités organisatrices de transport s'effectuera à partir d'une analyse globale des déplacements. Dans les aires urbaines, où l'interconnexion des différents modes de transport revêt une importance croissante, cette démarche est particulièrement utile. Elle devrait notamment avoir pour intérêt de renforcer les efforts déjà engagés en faveur d'une desserte du périurbain, les retards pris dans ce domaine démontrant que notre pays n'avait pas encore pleinement pris conscience de l'importance, depuis vingt ans, des transferts de population vers la périphérie des grandes villes.

Rappelons que la loi n° 96-1236 du 30 décembre 1996 sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie avait déjà rendu obligatoire l'élaboration par les autorités organisatrices d'un plan de déplacements urbains (PDU) dans les périmètres de transport urbain (PTU) inclus dans les agglomérations de plus de 100 000 habitants. La loi sur l'air avait repris dans ce domaine les dispositions de l'article 28 de la LOTI qui visait à une utilisation plus rationnelle de la voiture. Elle a prolongé cette orientation en fixant clairement aux PDU l'objectif de diminution du trafic automobile.

Ainsi, outil de planification et de coordination, le PDU vise désormais à réduire la place et l'usage de la voiture dans l'espace au profit des transports publics, de la marche à pied et de la bicyclette, pour une mobilité plus favorable à l'environnement et au cadre de vie. Le PDU doit en outre rendre plus cohérent l'ensemble du système de déplacements, de circulation et de transport des personnes et des marchandises et maîtriser l'interaction entre les transports et l'urbanisme.

Une telle démarche dépasse bien entendu le cadre du périmètre de transports urbains pour s'étendre à la notion d'agglomération, de bassin de vie, intéressant toutes les communes de ce territoire, dans la mesure où elle influence durablement l'aménagement, la circulation et les déplacements.

Les orientations définies au paragraphe I de cet article, visant à harmoniser les politiques entre les autorités organisatrices de transport urbain et les gestionnaires d'infrastructures, devraient permettre de mieux coordonner les objectifs entre les différents plans de déplacements urbains au plan régional et de renforcer au plan local les interconnexions entre modes de transport.

Cette coordination favorisera également la mise en place d'offres intégrées de transport, permettant d'utiliser un même titre de voyage pour un déplacement de bout en bout (service de train régional et utilisation des réseaux de transport urbain des agglomérations de départ et d'arrivée, par exemple).

La commission a examiné un amendement de M. Jean-Jacques Filleul tendant à mieux articuler les dispositions du projet de loi avec celles de la LOTI. Le rapporteur, après avoir déclaré partager l'idée de l'auteur de l'amendement, a estimé préférable qu'une rédaction plus précise soit ultérieurement proposée. M. Jean-Jacques Filleul a alors retiré son amendement.

Après l'intervention de M. Serge Poignant, la commission a rejeté un amendement de M. Patrick Ollier précisant la hiérarchie entre les orientations nationales et locales d'aménagement, le rapporteur ayant estimé inutile cette mention, déjà contenue dans le projet de loi.

Elle a adopté, conformément à l'avis du rapporteur, un amendement de M. Jean-Jacques Filleul (amendement n° 348) précisant l'aspect prospectif de l'analyse des besoins de déplacement. M. Jean-Michel Marchand a alors retiré un amendement similaire, devenu sans objet.

Puis, la commission a examiné un amendement de M. Patrick Rimbert tendant à viser en ce qui concerne l'organisation des transports non seulement les zones urbaines mais aussi les zones rurales.

M. Eric Doligé s'est déclaré en faveur de cet amendement. Citant l'exemple de l'agglomération orléanaise, il a indiqué que les projets d'extension des transports collectifs vers les zones périurbaines traversaient des zones rurales. Dès lors, on ne peut opposer villes et campagnes en matière d'aménagement des transports.

M. Jean-Claude Daniel a confirmé que les périmètres de transport urbain incluaient parfois des zones rurales, situées entre plusieurs zones urbaines.

M. Pierre Ducout a considéré qu'il s'agissait alors dans ce type de cas, d'une seule zone urbaine.

En réponse aux intervenants, le rapporteur a proposé de simplifier et de clarifier la rédaction de cet amendement.

Préciser que la coordination des actions des autorités organisatrices de transport devait s'effectuer tant dans les zones urbaines que dans les zones rurales conduit logiquement à les mettre au même plan et aboutit à alourdir le texte inutilement. Le rapporteur a donc proposé de supprimer la référence aux zones urbaines. Après que M. Patrick Rimbert se fut associé à cette nouvelle rédaction proposée par le rapporteur, la commission a adopté ce nouvel amendement (amendement n° 349).

Le paragraphe II de cet article ajoute, au sein du deuxième alinéa de l'article 4 de la LOTI, une définition des priorités de développement en matière de transport de marchandises. Rappelons que le texte existant se limite à traiter du caractère prioritaire du développement de l'usage des transports collectifs de personnes.

Le projet de loi indique ici par défaut, dans l'énumération des modes de transport de marchandises, qu'il convient d'encourager tous les modes de transport alternatifs à la route c'est-à-dire le transport fluvial, le ferroviaire et le cabotage maritime, notamment au moyen du transport combiné, ce que le rapporteur soutient pleinement.

La commission a examiné un amendement de M. Jean-Jacques Filleul intégrant l'intégralité du transport maritime et non seulement le cabotage dans les modes de transport dont il convenait de développer l'utilisation. Le rapporteur a fait observer que, si cet objectif rencontrait son assentiment, il devait toutefois s'exprimer contre cet amendement, car l'article 30 du projet de loi s'insérait dans la LOTI, qui ne régit que les transports intérieurs. Ainsi, si le cabotage maritime relève de cette catégorie, en revanche les transports maritimes, au sens général, sont régis pour l'essentiel par le code de la marine marchande.

Après que M. Félix Leyzour eut déclaré partager le point de vue du rapporteur, M. Jean-Jacques Filleul a retiré son amendement.

La commission a ensuite rejeté, conformément à l'avis du rapporteur, un amendement de M. Marc-Philippe Daubresse étendant le rôle du fonds d'intervention des transports terrestres et des voies navigables.

Puis la commission a adopté l'article 30 ainsi modifié.

Article 31

(article 14 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982)

Coordination

Cet article, tirant les conséquences de l'abandon des schémas directeurs d'infrastructures au profit des schémas de services collectifs de transport de personnes et de marchandises, supprime la définition de ces schémas directeurs, de leur mode d'élaboration et de leurs objectifs, au sein de l'article 14 de la LOTI.

La commission a rejeté, après l'intervention de M. Serge Poignant, et conformément à l'avis du rapporteur, un amendement de M. Patrick Ollier supprimant cet article.

Elle a également rejeté dans les mêmes conditions un amendement de M. Jean-Michel Marchand précisant les éléments pris en compte lors de l'évaluation des coûts des grands projets d'infrastructures, définie au deuxième alinéa de l'article 14 de la LOTI. Un autre amendement de M. Jean-Michel Marchand prévoyant que les grands projets d'infrastructures de transport étaient adoptés par le Parlement, a été retiré.

La commission a ensuite adopté l'article 31 sans modification.

Article 32

(articles 14-1 et 14-2 [nouveaux] de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982)

Conditions d'établissement des schémas de transport

Cet article insère deux articles additionnels, après l'article 14, au sein du chapitre III du titre premier de la LOTI. Rappelons que ce chapitre porte sur les infrastructures, équipements, matériels et technologies.

Article 14-1 [nouveau] de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982

Schémas de transport

Le projet de nouvel article 14-1 de la LOTI définit les modalités d'élaboration des schémas de services de transport, les autorités qui les établissent, les objectifs et le contenu de ces documents. Il subordonne également les dispositions de la LOTI relatives aux schémas de transport aux choix stratégiques de la loi du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire et aux procédures fixées par cette dernière pour l'établissement des schémas. Ces deux obligations, qui relèvent respectivement des articles 2 et 10 de la LOADT, sont elles-mêmes restructurées par les articles 2 et 9 du présent projet de loi.

Ce nouvel article 14-1 de la LOTI se subdivise en trois paragraphes. Le paragraphe I définit les conditions d'élaboration par l'Etat des schémas de services de transport. Le paragraphe II vise le même objet, s'agissant des schémas des régions. Le paragraphe III enfin détermine les objectifs de l'ensemble de ces schémas.

Le paragraphe I précise que l'Etat élabore de manière conjointe les deux schémas de services de transport, définis à l'article 16 du projet de loi. Ces schémas, bien entendu, doivent s'insérer dans la logique des choix stratégiques de la politique d'aménagement et de développement durable du territoire. Comme les autres schémas de services collectifs, ils seront élaborés dans une perspective à vingt ans et adoptés dans les conditions prévues à l'article 9. Cette insertion des conditions d'élaboration des schémas de transport dans la LOTI permet d'articuler ce texte avec celui de la loi du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire.

Comme il avait été indiqué précédemment, l'Etat, à partir de l'analyse des besoins de transport, établira deux schémas de services, l'un pour les transports de personnes, l'autre pour les marchandises. L'approche globale de la politique des transports doit favoriser une démarche privilégiant l'interconnexion des différents modes dans les deux cas, ainsi que la recherche de solutions renforçant la part des transports respectueux du cadre de vie, au détriment du " tout routier ".

La commission a rejeté, conformément à l'avis du rapporteur, après l'intervention de M. Léonce Deprez, un amendement rédactionnel de M. Marc-Philippe Daubresse.

Ce paragraphe indique en outre, à son dernier alinéa, que tout grand projet d'infrastructures devra être compatible avec ces schémas nationaux. Cette disposition devrait permettre ainsi de donner un caractère prescriptif aux schémas.

La commission a adopté, conformément à l'avis du rapporteur, et après l'intervention de M. Christian Jacob, un amendement de précision de M. Patrick Ollier sur ce point (amendement n° 350).

Le paragraphe II du nouvel article 14-1 de la LOTI donne compétence à la région pour élaborer un schéma régional de transport. Le succès rencontré par l'expérimentation dans six régions pilotes du transfert à ce niveau de collectivité des compétences en matière d'organisation de transport ferroviaire en matière de croissance du trafic et de reconquête de parts de marchés par rapport à l'automobile, montre qu'il s'agit là d'un niveau pertinent de décision pour le transport d'intérêt local de voyageurs.

Bien entendu, ce schéma régional devra être compatible avec les schémas de services collectifs élaborés par l'Etat, ce qui signifie une primauté de ceux-ci sur celui-là. En outre, les régions, qui ne bénéficient pas de transferts de compétences dans le projet de loi, devront respecter les prérogatives des départements, des communes et de leurs groupements, responsables notamment des routes autres que nationales, des transports scolaires et des réseaux de transport public au sein des périmètres de transport urbain. Il n'en demeure pas moins que cette responsabilité de la région facilitera une approche globale des déplacements, notamment au sein des aires urbaines et entre agglomérations d'une même région, à l'intérieur de laquelle l'interconnexion des différents modes de transport revêt une importance croissante.

En revanche, le niveau régional n'est pas adapté pour assurer une cohérence des transports entre régions limitrophes, transports nationaux et internationaux de voyageurs et, a fortiori, de marchandises. L'existence d'un seul schéma régional de transport, à la différence de ce que le projet de loi prévoit pour l'Etat, qui élaborera un schéma pour les transports de personnes et un autre pour les transports de marchandises, conforte cette analyse.

Le schéma régional de transport constituera le volet transport du schéma régional d'aménagement et de développement du territoire prévu à l'article 34 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat. Ainsi, comme le prévoit l'article 5 du projet de loi qui modifie l'article 34 de la loi du 7 janvier 1983, sont consultés lors de son élaboration les départements, les principales communes et les groupements de communes compétents en matière d'aménagement, les agglomérations, les pays, les parcs naturels régionaux, ainsi que les représentants des activités économiques et sociales et des associations.

La commission a rejeté, conformément à l'avis du rapporteur, un amendement de M. Patrick Ollier supprimant le paragraphe II de cet article, ainsi qu'un amendement du même auteur rappelant à ce paragraphe la primauté des orientations de la politique nationale de transport sur les choix des régions, le rapporteur ayant fait observer, comme précédemment, que cette notion n'était pas absente du projet de loi.

M. Jean-Michel Marchand a alors retiré un amendement obligeant les plans de déplacements urbains et les plans départementaux de transport routier non urbain de personnes à se conformer au schéma régional des transports, le rapporteur ayant rappelé qu'il ne convenait pas de subordonner une collectivité territoriale à une autre.

Le paragraphe III rappelle que les schémas doivent se conformer aux objectifs généraux de la politique globale des transports, tels qu'ils sont déjà définis au sein de l'article 3 de la LOTI, que le projet de loi actualise à son article 29.

Il s'agit notamment de donner la priorité à la meilleure utilisation des réseaux et équipements existants et de favoriser la complémentarité entre les modes de transport, de procéder à une élaboration de schémas de services collectifs qui partent de l'analyse des besoins de transport, afin d'y répondre dans des conditions économiques, sociales et environnementales propres à contribuer au développement durable du territoire et à la lutte contre l'effet de serre.

Sans qu'il paraisse nécessaire de supprimer ce paragraphe, il convient néanmoins de noter son caractère redondant avec le contenu de la nouvelle rédaction de l'article 3 de la LOTI.

La commission a ensuite adopté un amendement de coordination du rapporteur, proposant une nouvelle rédaction du premier alinéa du paragraphe III de cet article (amendement n° 351).

Trois amendements, le premier de M. Félix Leyzour, le deuxième de M. Patrick Ollier et le dernier de M. Marc-Philippe Daubresse, sont alors devenus sans objet.

La commission a ensuite rejeté, conformément à l'avis du rapporteur, un amendement rédactionnel de M. Marc-Philippe Daubresse. Elle a en revanche adopté, suivant l'avis du rapporteur, un amendement de M. Jean-Jacques Filleul favorisant la cohérence à l'intérieur de chaque réseau de transport (amendement n° 352).

Elle a rejeté, sur proposition du rapporteur, et après l'intervention de M. Christian Jacob, un amendement de M. Patrick Ollier simplifiant la référence aux objectifs environnementaux en matière de politique de transport, ainsi qu'un amendement du même auteur, déjà satisfait par l'amendement du rapporteur, proposant une nouvelle rédaction du premier alinéa du paragraphe III de cet article.

La commission a adopté un amendement du rapporteur précisant au sein de la LOTI l'objectif de l'intégration des réseaux français de transport dans les schémas européens, M. Jean-Jacques Filleul s'étant préalablement prononcé en faveur de cette rédaction (amendement n° 353). Un amendement de M. Jean Proriol est alors devenu sans objet.

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Félix Leyzour indiquant que les schémas de services collectifs de transport privilégient les possibilités offertes par les transports maritimes.

M. Félix Leyzour a fait observer que cet objectif permettrait notamment, en renforçant l'activité maritime sur la façade atlantique, de contrebalancer efficacement la tendance au déplacement des axes de transport vers le centre de l'Europe.

M. Jean-Jacques Filleul a souligné l'importance du développement du mode maritime pour l'avenir du transport.

Après l'intervention de M. Pierre Ducout, le rapporteur s'est déclaré favorable à l'objectif poursuivi par l'amendement, souhaitant toutefois que sa rédaction soit précisée.

M. Jean-Claude Daniel ayant proposé un sous-amendement de clarification, la commission a adopté ce sous-amendement, ainsi que l'amendement ainsi modifié (amendement n° 354).

Article 14-2 [nouveau] de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982

Objectifs des schémas de services de transport

Le nouvel article 14-2 de la LOTI définit, dans son premier alinéa, les objectifs des schémas de services de transport élaborés par l'Etat dans les domaines des transports internationaux maritimes et aériens. S'agissant du transport maritime et selon les informations qui ont été communiquées à votre rapporteur, le premier alinéa de ce nouvel article qui prévoit de favoriser le renforcement de la compétitivité des ports d'importance internationale, marque une orientation en faveur d'une concentration du trafic maritime sur les principaux ports d'importance internationale, qui résultera, d'une part, du développement du drainage du fret (feeding) vers les plus grandes places portuaires, notamment par une croissance du cabotage et, d'autre part, de la spécialisation des ports de moindre importance.

Abordant le transport aérien international, l'article prévoit de favoriser le développement des liaisons aériennes à partir des aéroports d'importance interrégionale. Il s'agirait, selon les mêmes informations, de viser à une limitation des mouvements sur les plates-formes d'Ile-de-France à la seule desserte de la zone de chalandise de cette région. En revanche, il conviendrait de favoriser le développement des vols internationaux sur un grand aéroport pour chaque grande subdivision du territoire (Sud-Ouest, Sud-Est...). Pour séduisante qu'elle soit, cette idée dont l'aboutissement favoriserait une répartition plus équilibrée des trafics, paraît largement irréaliste, car elle se heurte aux réalités économiques, sans que soient prévus les moyens d'exercer une influence pouvant les contrebalancer. La stratégie à long terme de plates-formes de correspondance (hubs) des grandes compagnies aériennes mondiales conduit tout au contraire à une limitation des points de desserte des grands vols internationaux, les aéroports de moindre importance servant au rabattement et à la redistribution des passagers et du fret. Les crédits que peut consacrer l'Etat au financement de lignes aériennes intérieures d'aménagement du territoire sont limités. Les besoins de financement requis pour garantir la rentabilité de lignes internationales au départ des grandes villes de province seraient sans commune mesure avec le niveau des ressources publiques disponibles. Cependant, toute mesure pouvant modérer cette tendance à la concentration des trafics sur Roissy et Orly, serait la bienvenue.

La commission a rejeté, après l'intervention de M. André Lajoinie, président, un amendement de M. Jean-Michel Marchand excluant la construction de nouveaux aéroports en Ile-de-France et dans les départements limitrophes, conformément à l'avis du rapporteur qui a souligné le caractère local de cette proposition.

Le deuxième alinéa de l'article 14-2 précise les orientations des schémas de services collectifs de transport élaborés par l'Etat en matière de desserte du territoire. Le développement d'axes reliant les grandes aires urbaines entre elles et aux grands pôles européens vise notamment à développer des liaisons entre grandes agglomérations de province qui contournent la région d'Ile-de-France et Paris, qui subissent un engorgement de trafic dû pour une part importante à un transit dont la capitale ne tire aucun avantage.

S'agissant des zones d'accès difficile, le projet se limite à proposer de contribuer à leur désenclavement par une augmentation de la qualité des services de transport qui relient ces zones aux grandes villes et aux réseaux rapides. La commission a considéré que le respect du principe d'égalité de traitement des citoyens, quel que soit leur lieu de résidence ou d'activité, exigeait un effort plus soutenu de la collectivité publique que cette simple " augmentation de qualité des services ", aux contours particulièrement vagues. C'est pourquoi elle a adopté un amendement du rapporteur fixant un objectif d'égalité d'accès des usagers aux infrastructures de transport rapide et visant à poursuivre l'action de désenclavement des territoires (amendement n° 355).

Le troisième alinéa indique que l'effort doit être porté, dans les grandes aires urbaines, en faveur des modes de transport alternatifs à l'automobile. Il conviendrait que, dans le contenu des schémas, ce principe ne se traduise pas par des obstacles à l'automobile, mais de manière positive par une offre de services collectifs sûrs, attractifs, confortables, rapides et accessibles à tous, grâce notamment à des tarifs adaptés. Il s'agirait en quelque sorte d'un droit à une égalité d'accès, en tout point de l'agglomération, aux services de transport collectifs.

La commission a adopté, conformément à l'avis du rapporteur et après l'intervention de M. Léonce Deprez, un amendement de M. Marc-Philippe Daubresse favorisant l'extension des plates-formes d'échanges intermodales dans les grandes zones urbaines (amendement n° 356).

Le dernier alinéa de cet article indique que les schémas nationaux pourront instaurer des restrictions ou des interdictions d'accès dans les zones à environnement fragile. Rappelons que l'article 17 de la LOADT disposait déjà que les schémas pouvaient prévoir des modes de transport adaptés pour le trafic des marchandises dans les zones à l'environnement fragile. Selon les informations communiquées à votre rapporteur, l'interdiction de circulation ne viserait que la reprise de dispositions existantes, en matière d'accès à certaines réserves naturelles. Les restrictions porteraient quant à elles notamment sur la limitation de la circulation de certains véhicules, principalement les poids lourds, dans des zones de montagne où les émissions de polluants risquent de stagner et de porter gravement atteinte à la qualité de l'air. Il ne faudrait pas cependant que, pour des raisons environnementales, des mesures disproportionnées conduisent à un enclavement de fait de certaines zones, qui ne représentent pas un marché susceptible de permettre d'envisager sérieusement leur desserte par des transports collectifs alternatifs à la route, notamment pour les marchandises. En d'autres termes, il ne faut pas opposer aménagement et développement durable et équilibré du territoire, et défense de l'environnement. La commission a rejeté, après l'intervention de M. Christian Jacob et conformément à l'avis du rapporteur, un amendement de M. Patrick Ollier tendant à assouplir les dispositions particulières limitant la circulation dans les zones à environnement fragile.

Enfin, ce dernier alinéa donne la priorité au transport ferroviaire dans le développement du transit international franchissant les Alpes et les Pyrénées, disposition de bon sens qui, pour les transports de marchandises de masse, favoriserait une fluidité du trafic routier sur des axes particulièrement saturés.

La commission a adopté l'article 32 ainsi modifié.

Après l'article 32

Conformément à l'avis du rapporteur, la commission a rejeté deux amendements de M. Jean-Michel Marchand créant chacun un article additionnel renforçant, au sein de la LOTI, les compétences de la région en matière de définition des politiques de transport.

Article 33

Coordination

Conformément à l'avis de la section permanente du Conseil national des transports du 15 juillet dernier, concernant l'articulation du projet de loi d'orientation avec la LOTI, le présent article supprime à l'article 39 de la LOTI la référence au schéma directeur des voies navigables, désormais remplacé par les schémas de services collectifs des transports.

Après avoir rejeté, conformément à l'avis du rapporteur, un amendement rédactionnel de M. Marc-Philippe Daubresse, la commission a adopté cet article sans modification.

Article 34

(article L. 111-1-1 du code de l'urbanisme)

Directives territoriales d'aménagement

Cet article modifie l'article L. 111-1-1 du code de l'urbanisme pour sa partie relative aux directives territoriales d'aménagement (DTA).

L'article L. 111-1-1 du code de l'urbanisme a été modifié par l'article 4 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 qui a créé les directives territoriales d'aménagement. Elles se situent à la charnière de l'aménagement du territoire et de l'aménagement urbain.

La loi leur assigne trois objectifs spécifiques :

- " fixer, sur certaines parties du territoire, les orientations fondamentales de l'État en matière d'aménagement et d'équilibre entre les perspectives de développement, de protection et de mise en valeur des territoires " ;

- fixer " les principaux objectifs de l'État en matière de localisation des grandes infrastructures de transport et des grands équipements, ainsi qu'en matière de préservation des espaces naturels, des sites et des paysages " ;

- préciser éventuellement, " pour les territoires concernés, les modalités d'application des lois d'aménagement et d'urbanisme adaptées aux particularités géographiques locales ".

Elles sont élaborées sous la responsabilité de l'État et à son initiative, suivant une procédure déconcentrée qui associe les collectivités territoriales concernées.

Cette procédure est longue et complexe et comporte deux phases :

- une phase d'études préalables s'appuyant sur les services déconcentrés de l'État qui vise à préciser les enjeux d'aménagement et de développement spécifiques du territoire, à dégager les orientations et les objectifs sur lesquels l'État devra se prononcer, ainsi qu'à statuer sur l'opportunité et le périmètre pertinent de la DTA.

A l'issue de cette phase, un comité interministériel se prononce sur la poursuite de la démarche et arrête le contenu du mandat permettant d'engager la seconde phase, celle de l'élaboration de la DTA.

- une phase d'élaboration qui prévoit une procédure d'association officielle des collectivités locales concernées et qui doit aboutir au projet de DTA.

Le projet de DTA est transmis après avis favorable de ces mêmes collectivités, au Conseil d'Etat et approuvé par décret.

Les travaux préparatoires à l'élaboration des DTA ont été lancés sur cinq territoires départementaux : l'aire métropolitaine marseillaise, les Alpes maritimes, l'estuaire de la Seine, l'estuaire de la Loire et les Alpes du Nord. Un site expérimental supplémentaire, celui de l'aire urbaine de Lyon a été ensuite rajouté à cette liste.

Les DTA les plus avancées sont celles des Alpes Maritimes et de l'aire métropolitaine marseillaise. La première phase d'élaboration est en effet achevée, les préfets ayant, en novembre 1997 pour les Alpes Maritimes et en juin 1998 pour l'aire métropolitaine marseillaise, reçu mandat pour engager la phase d'élaboration associée.

Les études préalables de la DTA Estuaire de la Loire sont achevées et le mandat d'élaboration devrait être envoyé prochainement au préfet.

Les études préalables des DTA Estuaire de la Seine et Alpes du Nord devraient s'achever à la fin de l'année 1998, et celle de l'aire urbaine de Lyon en avril 1999.

Deux dispositions relatives au DTA sont modifiées par cet article du projet.

La première modification donne aux régions la possibilité de demander l'élaboration d'une DTA, initiative qui était jusqu'alors réservée à l'État. Il s'agit là d'une modification intéressante mais limitée à la seule demande d'élaboration, toute la procédure restant de la responsabilité de l'État.

La deuxième modification proposée permet, dans un souci de plus grande transparence, la mise à disposition du public pendant deux mois des avis émis par les Conseils régionaux et les conseils généraux. Il s'agit là d'une information portée à la connaissance du public mais non pas d'un processus formalisé d'enquête publique.

Lors de l'examen de cet article, la commission a d'abord adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 357).

Puis elle a examiné cinq amendements de M. Jean-Michel Marchand soumis à discussion commune, le premier visant à donner au schéma régional d'aménagement et de développement du territoire (SRADT) la possibilité d'être reconnu en qualité de directive territoriale d'aménagement (DTA), le second visant à soumettre à enquête publique les projets de directives territoriales d'aménagement, le troisième visant à rendre les SRADT compatibles avec les DTA, le quatrième visant à préciser que les schémas directeurs et les schémas de secteurs doivent être compatibles avec le SRADT, le cinquième visant à préciser qu'en l'absence de schéma directeur et de schéma de secteur, les plans d'occupation des sols et les documents d'urbanisme doivent être compatibles avec le SRADT, et en son absence, avec les DTA.

M. Jean-Michel Marchand a indiqué que tous ses amendements s'inspiraient d'une philosophie commune de hiérarchie des normes en matière d'urbanisme qui vise à donner une valeur prescriptive au SRADT. Rappelant que telle n'était pas la philosophie du projet de loi, le rapporteur a proposé le rejet de ces amendements. Un débat s'est néanmoins engagé sur l'amendement relatif à la compatibilité des schémas directeurs et des schémas d'urbanisme avec le SRADT, le rapporteur estimant qu'il pourrait s'y rallier s'il était sous-amendé pour préciser que cette compatibilité ne doit intervenir qu'au moment de la révision de ces schémas. Il a évoqué à cet égard le problème posé par le schéma directeur de la région Ile-de-France ou par les schémas d'aménagements régionaux des DOM qui ont un caractère prescriptif. M. Jean-Michel Marchand a indiqué qu'il était favorable à ce sous-amendement parce qu'il donnait un délai d'une durée limitée pour cette mise en conformité. Après les observations de MM. Félix Leyzour, Léonce Deprez, Jean-Jacques Filleul et du rapporteur, la commission a décidé de rejeter les cinq amendements.

La commission a ensuite adopté l'article 34 ainsi modifié.

Article 35

(article L. 141-1 du code de l'urbanisme)

Schéma directeur de la région Ile-de-France

Cet article modifie l'article 40 de la loi du 4 février 1995 relatif au schéma directeur de la région Ile-de-France codifié à l'article L. 141-1 du code de l'urbanisme.

Il introduit les dispositions rendues nécessaires par la suppression du schéma national d'aménagement et de développement du territoire (SNADT) et surtout il regroupe toutes les dispositions relatives au SDRIF en intégrant en les modifiant les dispositions de l'article 39 de la loi du 4 février 1995 relatives aux objectifs de ce schéma.

Pour parvenir à une meilleure définition de ces objectifs, il convient de rappeler certaines particularités du SDRIF.

Compte tenu de sa place particulière dans la collectivité nationale et de ses problèmes spécifiques, la région Ile-de-France dispose d'un schéma directeur particulier commun à l'ensemble de la région qui vaut schéma régional de l'aménagement et du développement du territoire et qui est assorti de certaines spécificités.

A la différence des autres SRADT, ce schéma directeur est élaboré par la région en association avec l'Etat. L'initiative de son élaboration appartient soit à la région, soit à l'Etat. Pour l'élaboration du schéma, le conseil régional recueille les propositions des conseils généraux des départements intéressés, du conseil économique et social régional et des chambres consulaires. Le projet leur est ensuite soumis pour avis. Il est alors mis à la disposition du public pendant deux mois, puis adopté par décret en Conseil d'Etat.

Ce schéma doit respecter les règles générales d'aménagement et d'urbanisme à caractère obligatoire, les servitudes d'utilité publique et les dispositions nécessaires à la mise en _uvre de projets d'intérêt général relevant de l'Etat et d'opérations d'intérêt national. Il devra prendre également en compte les orientations des schémas de services collectifs.

Le SDRIF est le seul schéma régional (avec celui de Corse et ceux des DOM) à être de nature prescriptive puisqu'il est spécifié qu'il a les mêmes effets que les directives territoriales d'aménagement, tout en devant être compatible avec elles.

Le schéma directeur en vigueur aujourd'hui a été approuvé par décret le 26 avril 1994, c'est-à-dire avant la modification introduite par la loi du 4 février 1995. La révision de l'ancien schéma directeur d'aménagement et d'urbanisme de l'Ile-de-France (S.D.A.U.R.I.F.) de 1976 a donc été décidée par le Conseil des ministres en 1989, puis formellement décidée par arrêté du préfet de région le 19 juillet 1990. Un avant-projet a été publié en octobre 1991 puis le conseil régional, les conseils généraux et les organismes socio-professionnels ont été consultés. Achevé en octobre 1992, l'avant-projet a été soumis au conseil régional et aux conseils généraux qui ont manifesté leur désaccord. Remanié, il a été ensuite approuvé par décret le 26 avril 1994.

Le schéma de la région Ile-de-France devra être révisé et élaboré selon la nouvelle procédure, décentralisée mais garantissant un certain contrôle de l'Etat, qui a été instituée par la loi du 4 février 1995. Dans cette perspective, la définition de nouveaux objectifs du SDRIF par cet article prend toute son importance. Il n'est cependa nt pas précisé dans quels délais devra se faire cette révision.

Les objectifs de l'ancien SDRIF étaient au nombre de trois :

- renforcer la position de Paris comme métropole européenne,

- conforter le rayonnement international de la région Ile-de-France,

- assurer son développement qualitatif tout en maîtrisant sa croissance quantitative.

Cet article reprend l'idée de maîtrise démographique de la région et celle de son rayonnement international.

Il remplace la notion de développement qualitatif par celle d'une maîtrise de l'utilisation de l'espace. Il prévoit enfin que le SDRIF définit les moyens à mettre en _uvre pour assurer les conditions d'un développement durable de la région :

- corriger les déséquilibres internes de la région,

- limiter les nécessités de déplacements,

- préserver les zones rurales et naturelles.

L'objet du nouvel alinéa de cet article est de hiérarchiser les priorités qui doivent être celles du SDRIF pour assurer le rayonnement international de la région.

Le problème de la croissance démographique de la région n'est plus aussi important quantitativement qu'il a pu l'être, mais il a changé de nature.

On assiste en effet à une stabilisation globale de sa population et parallèlement à l'émergence de nouveaux problèmes liés à l'attirance que représente la région pour les jeunes et les cadres, et a contrario au refoulement des personnes âgées et des exclus.

La correction des déséquilibres internes de la région doit passer par une plus grande solidarité entre les collectivités de la région. Elle doit s'attaquer à la solution du problème de la présence de zones de très grandes pauvreté parmi les zones les plus riches et au problème le plus fondamental de la région parisienne, celui du logement social.

Le SDRIF doit également s'attacher à favoriser une meilleure organisation de l'espace qui permette de limiter les déplacements dans la région et en maintenir les zones rurales et naturelles.

Lors de l'examen de cet article, la commission a d'abord rejeté un amendement de suppression de M. Patrick Ollier.

Elle a ensuite examiné un amendement de M. Patrick Rimbert proposant une nouvelle rédaction du deuxième alinéa de cet article visant à introduire la notion de maîtrise de la croissance urbaine et celle de coordination de l'offre de déplacement. Le rapporteur a indiqué qu'il était favorable à cet amendement. M. Christian Jacob a fait valoir que l'approche générale proposée par le texte de cet amendement n'était pas applicable à l'ensemble des zones de la région parisienne qui comprend un certain nombre de zones rurales. Le rapporteur a fait observer que l'idée de maîtrise de la croissance urbaine n'était pas synonyme d'arrêt de cette croissance. Il a indiqué qu'il s'agissait seulement d'éviter une reprise forte de la croissance de la région parisienne, comme ce fut le cas dans les années 1980. M. Pierre Ducout a évoqué l'idée d'une maîtrise " relative " de cette croissance urbaine. A la suite de ces observations, la commission a adopté cet amendement (amendement n° 358).

La commission a ensuite adopté l'article 35 ainsi modifié.

Article 36

Compagnie nationale du Rhône

Cet article abroge les articles 1er, 2 et 4 de la loi n° 80-3 du 4 janvier 1980 relative à la Compagnie nationale du Rhône (CNR).

L'article 1er donnait à la CNR la mission de construire un canal à grand gabarit de la Saône au Rhin et d'exploiter et d'entretenir l'ensemble de la liaison fluviale du Rhône au Rhin. L'article 2 prévoyait le financement nécessaire aux travaux de construction. L'article 4 était relatif aux emprunts contractés à cet effet.

La suppression de ces articles est cohérente avec la décision gouvernementale de juin 1997 d'abandonner le projet de construction du canal Rhin-Rhône.

La commission a adopté l'article 36 sans modification.

Après l'article 36

La commission a examiné deux amendements identiques, le n° 20 de M. Michel Bouvard et un amendement de M. Patrick Ollier, visant à permettre aux collectivités territoriales de moins de 10 000 habitants et aux unités de gestion des établissements publics de l'Etat d'adhérer à des groupements d'employeurs lorsqu'elles sont directement concernées par leur objet. Le rapporteur a indiqué que cet amendement était intéressant mais qu'il relevait plutôt du projet de loi sur les interventions économiques des collectivités locales. En conséquence, la commission a rejeté ces deux amendements.

La commission a rejeté, conformément à l'avis du rapporteur, un amendement de M. Jean-Michel Marchand relatif à la commission nationale du débat public visant à permettre d'ouvrir la présidence de la commission particulière qui organise ce débat public à d'autres personnalités que les membres de la commission nationale.

La commission a examiné un amendement de M. Jean-Michel Marchand relatif aux chemins ruraux. Il a indiqué que ces chemins, qui sont de plus en plus affectés à l'usage de la promenade et de la randonnée, font souvent l'objet d'aliénations au profit des propriétaires riverains et que l'amendement visait à poser de nouvelles garanties préalablement à leur aliénation, ainsi qu'à permettre aux associations de protection de l'environnement d'entretenir à leurs frais ces chemins.

Le rapporteur ayant estimé intéressant cet amendement, mais ayant souhaité son réexamen ultérieur, M. Jean-Michel Marchand a retiré son amendement.

La commission a rejeté un amendement de M. Jean Proriol, introduisant les statuts du groupement local de coopération transfontalière dans le code général des collectivités territoriales, le rapporteur ayant indiqué que cet amendement trouverait sa place dans le projet de loi sur les interventions économiques des collectivités locales.

La commission a examiné un amendement de M. Félix Leyzour, précédemment réservé, visant à demander au Gouvernement de proposer, dans le délai d'un an à compter de la promulgation de la présente loi, les modalités de mise en place de fonds régionaux pour l'emploi et le développement. Après que le rapporteur eut indiqué que l'amendement était imprécis notamment sur les modalités de financement de ces fonds, M. Félix Leyzour a retiré son amendement.

La commission a ensuite adopté l'ensemble du projet de loi (n° 1071) ainsi modifié.

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En conséquence, la commission de la production et des échanges vous demande d'adopter le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire et portant modification de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire (n° 1071), modifié par les amendements figurant au tableau comparatif présenté au tome II du présent rapport.

N°1288. - RAPPORT de M. Philippe DURON (au nom de la commission de la production) sur le projet de loi (n° 1071), d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire et portant modification de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire (Tome I)

1 ) Ce forfait couvre le raccordement au réseau téléphonique, l'abonnement et le coût des communications vers le fournisseur d'accès Internet que l'établissement scolaire choisit librement.

2 ) Petits établissements gérés contractuellement par des particuliers ou des municipalités.


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