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le 13 octobre 1999

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N° 1832

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 6 octobre 1999.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES (1) SUR LE PROJET DE LOI, ADOPTÉ PAR LE SÉNAT, autorisant la ratification des amendements à la convention portant création de l'Organisation internationale de télécommunications maritimes par satellites (INMARSAT) relatifs à la création de l'Organisation internationale de télécommunications mobiles par satellites (ensemble une annexe),

PAR M. ROLAND BLUM,

Député

--

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Voir les numéros :

Sénat : 239, 323 et T.A. 140 (1998-1999)

Assemblée nationale : 1656

Traités et conventions

La Commission des Affaires étrangères est composée de : M. Jack Lang, président ; MM. Georges Hage, Jean-Bernard Raimond, Roger-Gérard Schwartzenberg, vice-présidents ; M. Roland Blum, Mme Monique Collange, François Loncle, secrétaires ; Mmes Michèle Alliot-Marie, Nicole Ameline, M. René André, Mmes Marie-Hélène Aubert, Martine Aurillac, MM. Edouard Balladur, Raymond Barre, Dominique Baudis, François Bayrou, Henri Bertholet, Jean-Louis Bianco, André Billardon, André Borel, Bernard Bosson, Pierre Brana, Jean-Christophe Cambadélis, Hervé de Charette, Yves Dauge, Patrick Delnatte, Jean-Marie Demange, Xavier Deniau, Paul Dhaille, Mme Laurence Dumont, MM. Jean-Paul Dupré, Charles Ehrmann, Laurent Fabius, Jean-Michel Ferrand, Georges Frêche, Jean-Yves Gateaud, Jean Gaubert, Valéry Giscard d'Estaing, Jacques Godfrain, Pierre Goldberg, François Guillaume, Jean-Jacques Guillet, Robert Hue, Mme Bernadette Isaac-Sibille, MM. Didier Julia, Alain Juppé, André Labarrère, Gilbert Le Bris, Jean-Claude Lefort, François Léotard, Pierre Lequiller, Bernard Madrelle, René Mangin, Jean-Paul Mariot, Gilbert Maurer, Charles Millon, Mme Louise Moreau, M. Jacques Myard, Mme Françoise de Panafieu, MM. Etienne Pinte, Marc Reymann, Mme Chantal Robin-Rodrigo, M. Gilbert Roseau, Mme Yvette Roudy, MM. René Rouquet, Georges Sarre, Henri Sicre, Mme Christiane Taubira-Delannon, M. Michel Terrot, Mme Odette Trupin, MM. Joseph Tyrode, Michel Vauzelle, Philippe de Villiers

Mesdames, Messieurs,

Le présent projet de loi vise à autoriser la ratification des amendements à la Convention portant création de l'Organisation internationale des télécommunications maritimes par satellites, INMARSAT. Le Sénat a adopté ce projet le 1er juin 1999.

INMARSAT a longtemps bénéficié d'une position de monopole sur le marché de la fourniture des communications universelles mobiles par satellite, tant pour des applications commerciales que pour des applications de détresse et de sécurité, sur terre, sur mer et dans les airs. Cette situation a pris fin avec le développement du marché de la téléphonie mobile par satellite : INMARSAT doit s'adapter pour évoluer au sein d'un environnement de plus en plus concurrentiel.

La vocation de service public d'INMARSAT ne saurait, cependant, être remise en cause par le développement de la concurrence. Cette organisation, par les prestations qu'elle fournit, assure en effet une véritable mission de service public : elle prend en charge les services de détresse et de sécurité maritime et contribue au désenclavement des zones peu couvertes par les réseaux traditionnels de téléphonie mobile - zones à faible densité de population ou en voie de développement.

C'est pour répondre à ce double défi - assurer la pérennité d'INMARSAT et de sa vocation de service public - que l'Assemblée des Etats parties à la Convention créant l'Organisation a adopté à Londres, le 24 avril 1998, des amendements à ce texte.

Avant de présenter ces amendements, conformes aux positions défendues par la France lors des négociations, votre Rapporteur présentera brièvement l'organisation et les activités d'INMARSAT.

*

* *

I - INMARSAT est une organisation originale et performante assurant des prestations dans le domaine de la communication mobile par satellite

INMARSAT a été créée en 1979 à la demande de l'Organisation Maritime Internationale pour prendre en charge les services de sécurité et de détresse en mer. Cette organisation a mis en place le secteur spatial nécessaire à l'amélioration des communications maritimes. Elle a ensuite élargi le champ de ses activités pour devenir le principal fournisseur de communications universelles mobiles par satellite, tant pour des applications commerciales que pour des applications de détresse et de sécurité.

A - L'organisation et le fonctionnement d'INMARSAT sont originaux

Conformément à sa constitution, INMARSAT est une coopérative de droit international, qui comprend actuellement 86 Etats membres. Son siège est à Londres.

L'Organisation Internationale des Télécommunications maritimes par satellite associe Etats et opérateurs privés.

Elle repose en effet sur deux instruments :

- la Convention, un traité international ratifié par chaque gouvernement qui devient alors Partie d'INMARSAT. Elle est entrée en vigueur le 16 juillet 1979.

- l'Accord d'exploitation, signé par chaque Signataire, habituellement un opérateur de télécommunications, désigné par chaque Partie.

Le financement de l'Organisation est assuré par les Signataires, chacun d'entre eux ayant une part d'investissement correspondant à l'utilisation qu'il fait du système INMARSAT. France Télécom est le Signataire pour la France.

Sur le plan de l'organisation interne, INMARSAT est constituée de trois organes principaux :

- l'Assemblée des Parties est composée des représentants de tous les pays membres, chacun d'entre eux disposant d'une voix. Elle se réunit tous les deux ans pour examiner les activités et les orientations de l'Organisation et présenter des recommandations au Conseil.

- le Conseil des Signataires fonctionne sur le mode d'un conseil d'administration d'une société. Il est composé des représentants des 18 Signataires disposant des parts d'investissement les plus élevées et de quatre autres représentants de Signataires élus par l'Assemblée, sur le principe d'une représentation géographique équitable et compte tenu des intérêts des pays en voie de développement. Le Conseil se réunit au moins quatre fois par an pour déterminer la politique de l'Organisation et prendre les décisions commerciales.

- l'Organe directeur est chargé des affaires courantes de l'Organisation. Il compte 500 personnes représentant plus de 50 nationalités différentes qui travaillent sous la direction du Directeur général, qui est actuellement M. Warren Grace, de nationalité australienne.

L'exploitation du Système INMARSAT repose sur un partenariat entre l'Organe directeur, les signataires qui gèrent l'Organisation et assurent la prestation des services dans leurs pays et les exploitants des stations terrestres qui établissent la liaison entre le secteur spatial d'INMARSAT et les réseaux de télécommunications publics commutés.

B - INMARSAT a acquis une position dominante sur le marché de la téléphonie mobile par satellites dont a bénéficié France Télécom

INMARSAT est devenu en vingt ans l'opérateur dominant de la téléphonie mobile par satellites.

Le réseau des 9 satellites d'INMARSAT offre divers systèmes de communication mobiles couvrant, dans 190 pays, une large gamme de services :

- pour le domaine maritime : le téléphone à numérotation directe, le télex, la télécopie, le courrier électronique et les transmissions de données ;

- pour le secteur aéronautique, des communications de téléphonie et de transmission des données ainsi que l'indication automatique de la position et des conditions de vol pour l'équipage et des téléphones à numérotation directe pour les passagers ;

- pour les transports terrestres, des communications de données dans les deux sens, l'indication de la position, le courrier électronique et la gestion du parc automobile.

L'Organisation met à la disposition de ses usagers plusieurs catégories de matériel (INMARSAT A, B, C, M et phone M), les plus récents étant généralement plus compacts et d'un coût d'utilisation et d'acquisition plus réduit.

INMARSAT étant en position de monopole jusqu'en 1998, ses activités ont connu une croissance constante depuis 1979, ce qui a permis de dégager des bénéfices élevés (soit 17 % en 1998/1997) pour les opérateurs de télécommunications désignés comme Signataires.

Le marché d'INMARSAT est ainsi passé de 50 000 terminaux mobiles au début des années 1990 à 143 000 en 1999, répartis de cette façon : 50 % en service terrestre, 48 % en service maritime et 2 % en services aéronautiques.

En tant que signataire désigné et partie à l'Accord d'exploitation, France Télécom a pleinement bénéficié de l'utilisation du système satellitaire proposé par INMARSAT.

France Télécom est, après la Comsat (Etats-Unis), British Telecom (Royaume-Uni), KDD (Japon) et Telemar (Norvège), le cinquième investisseur avec un investissement de 5,1 % en 1999. Avec environ 17 700 clients, soit 12 % du total d'INMARSAT, l'opérateur a mis en place 450 terminaux INMARSAT A, 400 terminaux INMARSAT B, 850 terminaux INMARSAT M et 2 250 terminaux INMARSAT C.

Cependant, la position privilégiée d'INMARSAT sur le marché de la téléphonie mobile par satellite est menacée. La concurrence dans ce secteur va en effet s'intensifier, en raison de l'entrée en force d'opérateurs venant des Etats-Unis.

II - Les amendements à la convention de 1976 permettront à INMARSAT d'évoluer dans un environnement plus concurrentiel tout en maintenant ses obligations de service public

A - INMARSAT doit relever le défi de la concurrence

La situation de monopole d'INMARSAT a pris fin avec le lancement, le 1er novembre 1998, du projet Iridium de la compagnie américaine Motorola. Ce système de téléphonie mobile par satellite veut capter la clientèle des hommes d'affaires pour les communications mobiles, terrestres, aéronautiques et maritimes, avec un objectif de 1,5 million d'abonnés en 2005. Cependant, il rencontre actuellement de sérieuses difficultés financières qui risquent de compromettre la poursuite du programme.

D'autres systèmes offrant des services de communications mobiles personnelles par satellite sont apparus depuis sur le marché. Il s'agit, principalement, de Globastar, de l'américain Coral, qui est associé à des entreprises européennes et notamment françaises, comme Alcatel et France Télécom, et de Ico, une filiale d'INMARSAT, financée par les principaux signataires et le constructeur américain Hughes.

Ces systèmes reposent sur des constellations de satellites. Ils permettront d'offrir des services de type téléphonie, fax et transmission de données bas débit, utilisant des terminaux portatifs de poche (de type GSM).

Il existe par ailleurs, des projets de téléphonie mobile par satellites régionaux en cours de développement, qui utilisent des satellites régionaux géostationnaires, tels que East, conçu par le groupe Matra pour la région Europe-Bassin méditerranéen-Afrique.

C'est donc un marché extrêmement concurrentiel qui se met en place. On remarquera que l'évolution du marché de la téléphonie mobile par satellite n'a pas été revue à la baisse, malgré le succès de la téléphonie mobile terrestre (près de 450 millions d'utilisateurs pour la fin de l'année 1999). Les services de téléphonie mobile par satellite et terrestre sont en effet complémentaires.

Aussi, les estimations du nombre d'abonnés à des systèmes par satellites pour les cinq prochaines années restent-elles considérables : elles varient entre 10 et 30 millions de personnes.

Ces différents systèmes devront adopter des stratégies agressives pour la commercialisation des terminaux (et donc agir sur les tarifs, les réseaux de distribution, le service après-vente, etc). Ils devront également fournir d'importants efforts d'investissements afin que leurs systèmes de téléphonie par satellite puissent intégrer des services de type multimédia (transmission de données, voix et images).

Il convient d'adapter l'organisation d'INMARSAT afin qu'elle puisse rechercher des alliances avec des partenaires et prendre des décisions rapides en matière d'investissement. La structure actuelle est trop lourde pour permettre à INMARSAT de répondre efficacement à tous les défis qui lui sont posés. Les amendements à la Convention, qui font l'objet du présent rapport, apportent une solution appropriée en imposant à INMARSAT une forme de semi-privatisation.

B - INMARSAT a été restructurée afin de relever le défi de la concurrence et de garantir la pérennité de ses obligations de service public

L'Assemblée des Parties qui s'est réunie à Londres au mois d'avril 1998 a adopté les principes de la restructuration d'INMARSAT qui se traduira par la création d'une société par actions à responsabilité limitée, INMARSAT plc, et le maintien de l'organisation intergouvernementale.

1) La création d'une société privée : INMARSAT plc

L'objet social de la nouvelle société recouvrira la fourniture des services du Système Mondial de Détresse et de Sécurité en Mer et la poursuite de la fourniture d'une capacité de secteur spatial, en maintenant les normes, services et systèmes de station terrienne de navire, notamment les services INMARSAT-A, INMARSAT-B, INMARSAT-C et INMARSAT-E.

Cette société à responsabilité limitée est une société de droit britannique localisée à Londres dont la structure comportera deux niveaux : holding et société d'exploitation.

Les activités opérationnelles et les actifs correspondant d'INMARSAT seront transférés à cette nouvelle société par la transformation des actuels signataires en actionnaires (avec possibilité d'échange de parts).

Dans les deux ans qui suivront la création de la société, ses actions seront cotées de façon officielle par le biais d'une offre publique initiale. La part maximale du capital autorisé pour un actionnaire est fixée à 15 %, à l'exception de Comsat (Etats-Unis) qui conservera ses droits au niveau qu'elle détient, c'est-à-dire 23 %.

Le Conseil d'administration de la société comprendra 15 membres élus par les actionnaires : 9 d'entre eux représenteront les plus gros investisseurs et 3 d'entre eux les autres investisseurs, avec une représentation équitable des pays en voie de développement.

2) Le maintien de l'Organisation internationale de télécommunications mobiles par satellites

Les amendements à la convention de 1976 définissent le statut de l'organisation intergouvernementale, devenue l'Organisation internationale de télécommunications mobiles par satellite.

Aux termes du nouvel article 3 de la Convention, l'Organisation devra veiller au respect, par la Société, de 5 principes de base :

- La société devra assurer la prestation continue des services mondiaux de communications par satellite de détresse et de sécurité en mer.

- INMARSAT plc devra fournir ses services sans aucune discrimination sur la base de la nationalité.

- INMARSAT plc devra, en outre, exercer ses activités à des fins exclusivement pacifiques.

- Cette société devra, par ailleurs, desservir toutes les zones dans lesquelles le besoin de communications mobiles se fait sentir, compte dûment tenu des régions rurales et isolées des pays en voie de développement.

- Enfin, elle devra fonctionner selon les principes de la concurrence loyale, tout en respectant les lois et réglementations applicables.

Ces principes de base conforteront la vocation de service public d'INMARSAT. Le nouvel article 4 prévoit, d'ailleurs, qu'un Accord de services publics, conclu entre l'Organisation et la Société, devra permettre à l'Organisation de s'assurer de la mise en _uvre de ces principes.

La structure de l'Organisation est remaniée : les nouveaux articles 8 et 9 détaillent ces modifications. Le Conseil et l'organe directeur sont supprimés. Un secrétariat, dirigé par un Directeur dont le mandat est de quatre ans, est créé. Chargé de déterminer les conditions de fonctionnement de l'Organisation et de la gestion de son personnel, il bénéficiera des privilèges et immunités traditionnels sur le territoire de toute partie contractante.

Les attributions et le mode de fonctionnement de l'Assemblée des Etats parties évoluent. Elle examine les buts et la politique générale de l'Organisation, notamment au regard des principes de base. Elle décide de toute question concernant les relations de l'Organisation avec les Etats. L'Assemblée décide également des amendements à la Convention. Enfin, elle nomme et peut congédier le Directeur.

Aux termes du nouvel article 10, les dépenses de l'Organisation sont prises en charge par la Société, selon des modalités convenues dans l'Accord de services publics, afin de couvrir les coûts relatifs à l'établissement et au fonctionnement du Secrétariat, à la tenue de l'Assemblée et à l'application des mesures prises par l'Organisation pour s'assurer du respect des principes de base qui s'imposent à la Société.

En cas de litige contre les Parties et l'Organisation, qui ne serait pas réglé dans un délai d'un an, une annexe à la Convention prévoit la soumission du différend à la Cour internationale de justice en cas de litige entre Parties et, dans les autres cas de différends, un recours à un tribunal arbitral.

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Les amendements à la Convention instituant l'Organisation internationale de télécommunications mobiles par satellite permettront à celle-ci de développer ses activités dans un environnement concurrentiel.

Au cours des négociations qui ont présidé à l'adoption de ces amendements, la France a défendu une position équilibrée, tendant à faire d'INMARSAT une structure commercialement viable et respectueuse de ses obligations de service public. Le texte qui est soumis à votre examen reflète ces préoccupations.

C'est pourquoi votre Rapporteur ne peut que conclure à l'adoption du présent projet de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du mercredi 6 octobre 1999.

Après l'exposé du Rapporteur, et suivant ses conclusions, la Commission a adopté le projet de loi (no 1656).

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La Commission vous demande donc d'adopter, dans les conditions prévues à l'article 128 du Règlement, le présent projet de loi.

NB : Le texte de la convention figure en annexe au projet de loi (n° 1656).

N°1832. - RAPPORT de M. Roland BLUM (au nom de la commission des affaires étrangères) sur le projet de loi, adopté par le Sénat (n° 1656), autorisant la ratification des amendements à la convention portant création de l'Organisation internationale de télécommunications maritimes par satellites (INMARSAT) relatifs à la création de l'Organisation internationale de télécommunications mobiles par satellites (ensemble une annexe)


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