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le 5 juin 2000

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N° 2450

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 31 mai 2000.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES (1) SUR LE PROJET DE LOI, ADOPTÉ PAR LE SÉNAT, autorisant l'approbation de la convention du 15 juillet 1982 portant création de l'Organisation européenne de télécommunications par satellite (EUTELSAT) telle qu'elle résulte des amendements adoptés à Cardiff le 20 mai 1999,

PAR M. ROLAND BLUM,

Député

--

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Voir les numéros :

Sénat : 66, 122 et T.A. 83 (1999-2000)

Assemblée nationale : 2173

Traités et conventions

La Commission des Affaires étrangères est composée de : M. François Loncle., président ; MM. Gérard Charasse, Georges Hage, Jean-Bernard Raimond, vice-présidents ; MM. Roland Blum, Pierre Brana, Mme Monique Collange, , secrétaires ; Mmes Michèle Alliot-Marie, Nicole Ameline, M. René André, Mmes Marie-Hélène Aubert, Martine Aurillac, MM. Edouard Balladur, Raymond Barre, Dominique Baudis, Henri Bertholet, Jean-Louis Bianco, André Billardon, Maxime Bono, André Borel, Bernard Bosson, Pierre Brana, Jean-Christophe Cambadélis, Hervé de Charette, Yves Dauge,  Patrick Delnatte, Jean-Marie Demange, Xavier Deniau, Paul Dhaille, Mme Laurence Dumont, MM. Jean-Paul Dupré, Charles Ehrmann, Jean-Michel Ferrand, Raymond Forni, Georges Frêche, Jean-Yves Gateaud, Jean Gaubert, Valéry Giscard d'Estaing, Jacques Godfrain, Pierre Goldberg, François Guillaume, Robert Hue, Mme Bernadette Isaac-Sibille, MM. Didier Julia, Alain Juppé, André Labarrère, Jean-Claude Lefort, Guy Lengagne, François Léotard, Pierre Lequiller, Alain Le Vern, Bernard Madrelle, René Mangin, Jean-Paul Mariot, Gilbert Maurer, Jean-Claude Mignon, Charles Millon, Mme Louise Moreau, M. Jacques Myard, Mme Françoise de Panafieu, MM. Etienne Pinte, Marc Reymann, François Rochebloine, Gilbert Roseau, Mme Yvette Roudy, MM. René Rouquet, Georges Sarre, Henri Sicre, Mme Christiane Taubira-Delannon, MM. Michel Terrot, Mme Odette Trupin, MM. Joseph Tyrode, Michel Vauzelle, Philippe de Villiers.

Mesdames, Messieurs,

Le projet de loi qui nous est soumis vise à autoriser l'approbation d'amendements, adoptés le 20 mai 1999, à la convention portant création de l'Organisation européenne de télécommunications par satellite EUTELSAT.

Nous avons déjà eu à examiner, il y a quelques mois, des amendements apportés à la convention INMARSAT et le projet qui nous est soumis aujourd'hui s'inscrit dans la même logique.

Il s'agit en fait d'adapter la structure d'organisations créées, il y a vingt-cinq ans, dans un cadre de monopoles étatiques, au développement considérable de la concurrence qu'a connu depuis le secteur des télécommunications.

Malgré le cadre nécessairement limité de ce rapport, votre Rapporteur souhaite rappeler brièvement le bilan particulièrement positif d'Eutelsat, avant de vous présenter les modifications de structures que propose la convention qui nous est soumise.

I - LE BILAN POSITIF D'EUTELSAT

· Un bilan industriel satisfaisant

Eutelsat a été créé - à titre provisoire - en 1977 afin que se constitue un pôle européen de satellites de télécommunications permettant le développement d'une industrie européenne.

Une convention instituant l'organisation a ensuite été signée le 15 juillet 1982. C'est cette convention constitutive que les Européens ont souhaité modifier et dont les amendements sont soumis à notre approbation.

Eutelsat réunit 47 Etats européens : le principe, comme pour Inmarsat, est que chaque Etat est représenté au sein de l'organisation par un opérateur - il s'agissait bien entendu pour la France de la Direction générale des Télécommunications, devenue France Télécom - dont la part dans les charges d'investissements est proportionnelle à son utilisation effective des satellites.

En fait, les activités même d'Eutelsat ont évolué par rapport à ce qui avait été prévu par les créateurs de l'institution : ceux-ci avaient en vue une utilisation majoritairement tournée vers les télécommunications classiques ; or, celles-ci ne représentent que 10% du chiffre d'affaires d'Eutelsat - qui atteint 3 milliards de francs - l'essentiel de l'activité de l'organisation portant sur l'audiovisuel. Ceci est dû largement au fait que la téléphonie mobile par satellite n'a pas eu le développement espéré, les installations terrestres fixes s'étant révélées beaucoup moins coûteuses.

L'organisation dispose à cet effet de 15 satellites, dont les noms correspondent aux générations qui se sont succédé : deux Eutelsat 1 ; quatre Eutelsat 2 de deuxième génération ; et neuf satellites de conception plus récente, destinés à se substituer aux précédents ou à certaines applications militaires.

L'ensemble de ces satellites est de conception européenne, British Aerospace, Aérospatiale, Matra, notamment, en ayant construit, mais les lancements ont été réalisés par des lanceurs qui parfois n'étaient pas européens : ce fut souvent Ariane, mais on a eu recours aussi au lanceur américain Atlas ou russe Proton.

Au total, Eutelsat couvre toute l'Europe, mais aussi quelques pays méditerranéens ou du Moyen Orient.

· mais des adaptations nécessaires

Le système retenu à l'origine, sorte de coopérative d'utilisateurs, était assez bien adapté à la juxtaposition de monopoles que constituait l'environnement du secteur des télécommunications et de l'audiovisuel, il y a une vingtaine d'années. Comme chacun le sait, ce n'est plus du tout le cas : l'organisation doit revoir son mode de fonctionnement - mais aussi de financement - pour pouvoir s'adapter à la concurrence et être notamment en mesure de proposer des offres commerciales plus complexes, ne correspondant pas aux frontières étatiques.

Il va de soi que la part faite dans la structure à ceux que l'on appelle désormais les "opérateurs historiques", qui seuls sont les investisseurs, ne permet pas de mobiliser des financements provenant d'entreprises nouvelles souhaitant investir dans le satellite pour développer les capacités de leurs réseaux.

Dès lors ce type d'organisation publique internationale, si elle veut réussir dans le nouvel environnement, doit se transformer radicalement. Comme nous l'avions vu pour Inmarsat, c'est ce que proposent les amendements adoptés il y a un an à Cardiff.

II - LES MODIFICATIONS DE STRUCTURES
PROPOSÉES PAR LA CONVENTION

D'une manière générale, il s'agit de substituer à une organisation internationale classique deux structures séparées : Eutelsat d'une part, Eutelsat SA d'autre part.

Actuellement, comme il est de coutume dans les organisations internationales, l'organe suprême est l'Assemblée des parties qui réunit les 47 Etats et où chaque Etat partie dispose d'une voix, même si les décisions relèvent, le plus souvent, du consensus.

Comme dans Inmarsat, il existe un Conseil des Signataires qui regroupe en fait les opérateurs historiques ; dans ce conseil, les voix sont pondérées, aucun opérateur ne pouvant dépasser les 20% : France Télécom, en troisième position derrière British Telecom et Telecom Italia, dispose actuellement de 17,66% des voix.

Désormais, deux structures coexisteront : l'une, l'organisation internationale, n'aura plus qu'un rôle de surveillance afin de vérifier que les principes de base de l'institution sont bien respectés ; l'autre sera une société commerciale dont l'objet sera la fourniture de capacités satellitaires et de systèmes et services de communications par satellites.

La France ayant "bataillé ferme" pour obtenir l'installation du siège social en France, Eutelsat sera une société de droit français non cotée.

Le capital social sera réparti en fonction des parts d'investissement dont disposent les signataires actuellement : comme on l'a dit, France Télécom aura donc 17,66% du capital de la nouvelle société.

Une clause d'agrément et un droit de préemption sont conférés aux actionnaires actuels en cas d'augmentation de capital ou de projet de cession d'actions à des tiers.

La Société sera organisée autour d'un conseil de surveillance et d'un directoire.

Le conseil de surveillance comprendra 15 membres : d'une manière générale, la composition sera proportionnelle à la part de chacun dans le capital social ; toutefois, afin d'assurer une représentation aux petits opérateurs, les actionnaires sont divisés en trois groupes selon leur importance dans le capital social, chaque groupe ayant au moins un représentant au Conseil de surveillance. Au total, les actionnaires ayant moins de 1% du capital social auront donc, regroupés, au moins une voix au Conseil de surveillance.

Le Directoire de quatre membres, nommés pour quatre ans par le Conseil de surveillance, sera essentiellement collégial.

L'ensemble conduit donc à la création d'une société commerciale classique.

La Société se voit cependant soumise à des "contraintes de service public" qui justifient l'existence de l'organisation internationale chargée d'en vérifier l'application.

Sur le plan de la concurrence, on ne sera pas étonné d'apprendre que le Royaume-Uni et les pays nordiques étaient favorables à une approche libérale et que la France souhaitait que les missions de service public soient bien définies : le résultat, c'est l'article III, article de compromis s'il en est : d'une part il cite les deux expressions - service public et service universel - d'autre part il prévoit qu'Eutelsat doit respecter pour les services audiovisuels et futurs les réglementations nationales et le droit international, notamment la Convention européenne sur la télévision transfrontière.

Eutelsat doit en outre s'efforcer de couvrir toute l'Europe.

Enfin, la non-discrimination est un principe qui doit guider la Société : celle-ci doit traiter les utilisateurs "sur une base équitable" mais ceci "sous réserve de souplesse commerciale".

Dans l'ensemble, on a le sentiment que c'est une conception plus libérale qu'attachée au service public qui a prévalu.

Votre Rapporteur ne peut que s'en réjouir : non qu'il soit - comme certains voudraient le faire croire - un adepte du libéralisme à tout crin, mais plutôt parce que s'agissant du secteur des communications par satellite, la concurrence a bien montré son efficacité dès lors que les intérêts globaux de l'industrie européenne sont sauvegardés.

Or, la France a obtenu que dans les statuts de Eutelsat SA figure une clause prévoyant que "dans le respect du droit communautaire et des accords internationaux applicables, les offres de contrat de fourniture de biens et de prestations de services seront retenues en prenant en compte les intérêts de l'industrie européenne, en cas d'offres comparables".

CONCLUSION

En conclusion, votre Rapporteur estime que la nécessaire restructuration d'Eutelsat doit lui permettre de se développer dans le nouveau secteur concurrentiel et d'assurer ainsi un marché à l'industrie européenne, tout en fournissant une offre de service équitable à tous.

Au bénéfice de ces observations, il conclut à l'adoption du projet de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du mercredi 31 mai 2000.

Après l'exposé du Rapporteur, et suivant ses conclusions, la Commission a adopté le projet de loi (no 2173).

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La Commission vous demande donc d'adopter, dans les conditions prévues à l'article 128 du Règlement, le présent projet de loi.

NB : Le texte de la convention figure en annexe au projet de loi (n° 2173).


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