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le 10 décembre 2001

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N° 3436

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 5 décembre 2001.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES (1) SUR LE PROJET DE LOI (n° 3423), autorisant l'approbation de la décision du Conseil de l'Union européenne du 29 septembre 2000 relative au système des ressources propres des Communautés européennes,

PAR Mme MARIE-HÉLÈNE AUBERT,

Députée

--

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Traités et conventions

La Commission des affaires étrangères est composée de : M. François Loncle, président ; M. Gérard Charasse, M. Georges Hage, M. Jean-Bernard Raimond, vice-présidents ; M. Roland Blum, M. Pierre Brana, Mme Monique Collange, secrétaires ; Mme Michèle Alliot-Marie, Mme Nicole Ameline, M. René André, Mme Marie-Hélène Aubert, Mme Martine Aurillac, M. Édouard Balladur, M. Raymond Barre, M. Henri Bertholet, M. Jean-Louis Bianco, M. André Billardon, M. André Borel, M. Bernard Bosson, M. Philippe Briand, M. Bernard Brochand, M. Jean-Christophe Cambadélis, M. Hervé de Charette, M. Jean-Claude Decagny, M. Patrick Delnatte, M. Jean-Marie Demange, M. Xavier Deniau, M. Paul Dhaille, M. Jean-Paul Dupré, M. Charles Ehrmann, M. Jean-Michel Ferrand, M. Raymond Forni, M. Georges Frêche, M. Michel Fromet, M. Jean-Yves Gateaud, M. Jean Gaubert, M. Valéry Giscard d'Estaing, M. Jacques Godfrain, M. Pierre Goldberg, M. Michel Grégoire, M. François Guillaume, M. Jean-Jacques Guillet, M. Robert Hue, Mme Bernadette Isaac-Sibille, M. Didier Julia, M. Alain Juppé, M. Gilbert Le Bris, M. Jean-Claude Lefort, M. Guy Lengagne, M. François Léotard, M. Pierre Lequiller, M. Alain Le Vern, M. Bernard Madrelle, M. René Mangin, M. Jean-Paul Mariot, M. Gilbert Maurer, M. Jacques Myard, Mme Françoise de Panafieu, M. Étienne Pinte, M. Marc Reymann, M. François Rochebloine, M. Gilbert Roseau, Mme Yvette Roudy, M. René Rouquet, M. Georges Sarre, M. Henri Sicre, M. Dominique Strauss-Kahn, Mme Christiane Taubira-Delannon, M. Michel Terrot, Mme Odette Trupin, M. Joseph Tyrode, M. Michel Vauzelle.

SOMMAIRE

___

INTRODUCTION 5

I - LE FINANCEMENT DE L'UNION EUROPÉENNE :
UN ÉLÉMENT DU PROCESSUS D'INTÉGRATION
7

A - LE SYSTÈME DE RESSOURCES PROPRES ACTUELLEMENT EN VIGUEUR 7

B - LES DÉFAUTS DU MÉCANISME ACTUEL 9

1) L'analyse de la Commission européenne 9

2) Les inégalités de la contribution nette des Etats au budget communautaire 10

II - LA RECHERCHE D'UN FINANCEMENT PLUS ÉQUITABLE
DU BUDGET COMMUNAUTAIRE
12

A - LA PRISE EN COMPTE ACCRUE DE LA CAPACITÉ CONTRIBUTIVE
DES ETATS MEMBRES
12

1) La réduction du taux d'appel de la TVA de 1 à 0,50% 12

2) L'augmentation des frais de perception des ressources propres traditionnelles 13

3) Le poids prépondérant de la ressource assise sur le PNB 14

B - LA CORRECTION BRITANNIQUE : UNE DÉROGATION
QUI N'A PLUS LIEU D'ÊTRE
14

C - LES CONSÉQUENCES SUR LA CONTRIBUTION FRANÇAISE 15

CONCLUSION 18

EXAMEN EN COMMISSION 20

Mesdames, Messieurs,

Les Quinze, réunis en Conseil européen à Berlin les 24 et 25 mars 1999, ont conclu un accord global sur la révision des politiques communes et leur financement, après dix huit mois de négociations. On rappellera que cet accord global, appelé « Agenda 2000 », porte sur la réforme de la Politique agricole commune, sur les modalités de l'action structurelle pour la période 2000-2006, ainsi que sur le volet ressources des politiques communautaires.

La négociation de cet ensemble également appelé « paquet Santer » a été très difficile, car les clivages entre délégations étaient très profonds dans chacun de ces trois domaines. On se souvient de l'attachement de la France au financement communautaire de la PAC face à l'hypothèse du cofinancement défendue par un groupe de pays. On se souvient aussi de l'opposition des pays de la cohésion à la réforme fondamentale de la politique structurelle. Enfin, on se souvient de l'action vigoureuse entreprise par les pays à soldes nets importants (Allemagne, Pays-Bas, Autriche, Suède) pour un meilleur « partage du fardeau » avec les pays riches à solde net moins élevé, comme la France et l'Italie, notamment.

La difficulté de parvenir à un compromis était d'autant plus aiguë que, contrairement aux « paquets Delors I et II » caractérisés par une hausse substantielle des crédits communautaires, le « paquet Santer » impliquait, quant à lui, une maîtrise des dépenses, souhaitée par de nombreuses délégations.

Le Conseil européen de Berlin s'est prononcé en faveur de la révision de la décision du 31-10-1994 relative au système de ressources propres de l'Union. Le présent projet de loi portant approbation de la décision du Conseil du 29 septembre 2000 reprend les conclusions adoptées par le Conseil ; assez complexe, il porte la marque d'un compromis « à l'arraché », pour lequel il a fallu concéder à chaque Etat membre un bénéfice afin d'obtenir de lui certaines concessions. En effet, comme on le verra, certaines dispositions semblent avoir été « taillées sur mesure » au bénéfice d'un seul Etat.

La nouvelle décision ressources propres confirme les trois types de ressources propres en vigueur et ne crée pas de bouleversement par rapport au système en vigueur actuellement. Mais la part relative de chacune des ressources est modifiée, la ressource PNB devenant la principale recette du budget communautaire.

Cette ressource a été en effet considérée comme la plus représentative des capacités contributives des Etats membres.

La réforme des modalités de calcul des ressources propres induit, comme on le verra, des transferts de charge entre les Etats membres. Ces transferts tendent à relever le taux de contribution de la France au budget communautaire en raison d'un accroissement de sa participation au financement de la correction britannique et de l'augmentation de la part de la ressource PNB à laquelle elle contribue davantage.

Elle demande un effort financier à notre pays mais celui-ci a trouvé dans le paquet adopté à Berlin sa contrepartie politique, avec la confirmation d'acquis auxquels les autorités françaises ont toujours été attachées, comme par exemple la ligne directrice agricole.

La décision devait répondre à trois objectifs. Tout d'abord, assurer que l'Union dispose de ressources suffisantes pour financer ses politiques, tout en respectant une discipline financière stricte. Ensuite, améliorer la transparence et l'efficacité du système de financement de l'Union. Enfin, les Quinze ont souhaité un système fondé sur des critères prenant davantage en compte la capacité contributive de chaque Etat membre. Votre Rapporteure s'efforcera d'analyser dans quelle mesure la présente décision remplit ces objectifs.

I - LE FINANCEMENT DE L'UNION EUROPÉENNE :
UN ÉLÉMENT DU PROCESSUS D'INTÉGRATION

Le financement intégral du budget de la Communauté européenne par des ressources propres date de 1979, année pour laquelle les contributions financières des Etats membres ont été totalement supprimées. Le processus de remplacement des contributions nationales par des ressources propres avait été initié par la décision du Conseil du 21 avril 1970, qui a marqué un tournant dans l'histoire budgétaire de la Communauté européenne.

Ce nouveau régime de financement accordait une grande place à la ressource assise sur la TVA, obtenue par l'application d'un taux de 1% sur une assiette définie de manière uniforme par les Etats membres. Il n'a pas permis de résoudre la question du financement du budget communautaire, car les années 1984 à 1987 ont été qualifiées de « page noire des finances de l'Europe » ; les recettes ne pouvant couvrir les dépenses, des expédients devaient être trouvés chaque année ou presque, parmi lesquels le relèvement du taux d'appel de TVA à 1,4%.

A - Le système de ressources propres actuellement en vigueur

A partir de 1986, les mutations vécues par la Communauté avec le troisième élargissement et l'adoption de l'Acte unique européen ont permis de conduire une réforme en profondeur du système financier de la Communauté par deux dispositions fondamentales.

La décision du 24 juin 1988 créait une ressource supplémentaire assise sur le PNB des Etats membres dite « quatrième ressource » ou « ressource PNB ». En même temps était plafonnée l'assiette TVA prise en compte pour le calcul de la ressource TVA à 55% du PNB de chaque Etat membre. Ensuite, l'accord interinstitutionnel du 29 juin entre le Parlement européen, le Conseil et la Commission déterminait pour les cinq années suivantes un plafond de ressources, en pourcentage du PNB (évoluant de 1,15% en 1988 à 1,20% en 1992).

L'arrangement interinstitutionnel suivant, intervenant pour la période 1993-1999, a fixé de nouveaux plafonds de ressources qui suivent une progression allant de 1,20% à 1,27%. Surtout, la recherche d'un système plus équitable a conduit, dans la décision du 31 octobre 1994, à réduire quelque peu la place de la ressource TVA en ramenant son taux d'appel à 1% du PNB et le taux d'écrêtement de 55% à 50%. La place de la ressource PNB dans le financement en était donc renforcée.

Depuis la décision de 1994, qui constituait la quatrième décision relative aux ressources propres, le budget de l'Union est entièrement financé par les ressources propres suivantes :

- les droits perçus dans le cadre de la politique agricole commune et les droits de douane -dénommés « ressources propres traditionnelles ». Il s'agit de prélèvements agricoles, de cotisations sur le sucre et de droits de douane. Elles peuvent être considérées comme des ressources propres « par nature » dans la mesure où il s'agit de recettes perçues dans le cadre des politiques communautaires. Les montants recouvrés par les administrations nationales sont directement reversés au budget de la Communauté européenne, après un prélèvement de 10% correspondant aux frais de perception.

- un taux uniforme appliqué à l'assiette TVA. Le montant de la ressource TVA dû par chaque Etat membre est obtenu par l'application du taux1 fixé par la décision ressources propres à l'assiette de la TVA déterminée de manière uniforme pour tous les Etats membres. Cette assiette ne peut dépasser 50% du PNB de l'Etat membre. Cette recette était jusqu'à présent la principale et son taux d'appel comme son assiette ont subi de nombreuses corrections.

- un taux appliqué à la somme des Produits Nationaux Bruts (PNB) de tous les Etats membres. Ce taux est fixé au cours de la procédure budgétaire de manière à financer par cette ressource la différence entre les dépenses et le produit des autres ressources propres et recettes diverses. Cette quatrième ressource PNB est donc la ressource d'équilibre du budget. L'écart entre prévision et réalisation est d'ailleurs fréquent. Le financement de cette ressource est réparti entre les Etats membres au prorata de leur part dans le budget communautaire.

- les autres recettes : taxes payées par les fonctionnaires, amendes imposées aux entreprises, intérêts de retard, notamment.

Ce mécanisme comporte deux autres éléments essentiels.

Il s'agit, d'une part, du principe de maîtrise de la dépense publique traduit par le plafonnement du montant total des ressources appelées par la Communauté, fixé à 1,27% du PNB communautaire depuis le Conseil européen de Berlin et la décision ressources propres de 1994, précitée.

Il s'agit, d'autre part, de la dérogation consentie au Royaume-Uni selon laquelle les deux tiers du déséquilibre budgétaire constaté entre les versements de recettes effectués par ce pays et les dépenses de la Communauté sur le sol britannique sont pris en charge par les autres Etats membres au prorata de leur part dans le PNB communautaire, l'Allemagne bénéficiant d'une réduction d'un tiers de sa contribution à ce titre.

B - Les défauts du mécanisme actuel

1) L'analyse de la Commission européenne

En 1999, la Commission européenne a dressé un bilan du fonctionnement du système actuel de ressources propres.

Si la TVA était jusqu'en 1997 la principale ressource du budget de la Communauté, elle a ensuite diminué graduellement sous l'effet des différentes modifications apportées par les décisions successives. La Commission a également constaté la décrue des ressources propres traditionnelles, ainsi les droits de douane et les prélèvements agricoles, sous l'effet de la libéralisation des échanges. En conséquence, la part de la ressource PNB dans le budget a augmenté pour atteindre 43% dès 1998 et 47% en 2001.

L'analyse de la Commission a conclu à un fonctionnement satisfaisant au regard de l'adéquation des ressources aux besoins et de l'équité dans les contributions brutes. L'impératif d'adéquation était rempli par le relèvement progressif du plafond des ressources propres, avec néanmoins la restriction apportée dans les décisions relatives aux dépenses. Le système a même permis au Conseil de décider de creuser l'écart entre les perspectives financières et le plafond de ressources propres.

La Commission a de même estimé que le système évoluait vers plus d'équité, c'est à dire une bonne proportionnalité des contributions brutes par rapport à la richesse produite par les Etats membres. Le remplacement progressif de la ressource TVA par la ressource PNB contribue à cette évolution.

En effet, il n'y a pas de stricte proportionnalité entre le montant de la TVA acquittée par un Etat membre et sa richesse nationale. Ainsi, certains Etats paient au titre de la TVA une fraction supérieure à leur part dans le PNB communautaire total. Le clivage correspond partiellement au clivage pays pauvres/pays riches : les pays présentant des niveaux de consommation élevés et, corrélativement, des niveaux d'épargne peu élevés en proportion de leur PNB, ont des assiettes de TVA importantes.

L'assiette PNB, au contraire, garantit un prélèvement proportionnel à la richesse des Etats et se prête moins à la dissimulation liée au phénomène de l'économie souterraine.

Cependant, selon la Commission, le système présente des lacunes en termes de transparence et de simplicité, ainsi que d'autonomie financière.

2) Les inégalités de la contribution nette des Etats au budget communautaire

L'analyse de la répartition des dépenses opérationnelles de l'Union par Etat membre apporte aussi un éclairage à la question de l'équité du système de ressources. Le rapport annuel établi par la Commission sur ce thème présente les paiements effectivement réalisés en 2000 dans l'Union, à l'exclusion des dépenses administratives et des dépenses liées à la politique extérieure.

En 2000, les dépenses opérationnelles ont atteint un total de 73,1 milliards d'euros, soit 87,8 % des dépenses communautaires exécutées au cours de cet exercice. Ces dépenses portent sur trois grands secteurs : l'agriculture, les actions structurelles et les politiques internes.

Votre Rapporteure rappellera ici que la répartition des dépenses opérationnelles montre que la France a été le premier bénéficiaire de ces dépenses en 2000 avec 16,7% de celles-ci, passant devant l'Espagne (14,9%). Viennent ensuite l'Italie, l'Allemagne puis le Royaume-Uni. Notre pays a reçu des paiements effectifs de 12,18 milliards d'euros, dont plus de 9 milliards au titre de la seul PAC.

La Commission procède également à un calcul des soldes budgétaires. Il en ressort que le budget de l'Union génère d'importants transferts financiers nets en faveur des quatre pays bénéficiaires du Fonds de cohésion : la Grèce, le Portugal, l'Irlande et l'Espagne. En 2000, ces transferts ont représenté 3,61 % du PNB grec, 1,93% du PNB portugais, 1,83% du PNB irlandais et 0,86 % du PNB espagnol. Dans une moindre mesure, la Finlande, le Danemark et l'Italie ont aussi bénéficié de soldes positifs.

Mais surtout, cette analyse aboutit donc à une vision différente de l'apport des Etats au budget communautaire. Il apparaît, selon ce mode de calcul, que la Suède est le plus important contributeur net, consacrant 0,50 % de son PNB à la Communauté, suivie par l'Allemagne. La France ne contribue au budget de l'Union, comme la Belgique, que pour environ 0,10% de son PNB. Ces deux pays sont, parmi les Etats ayant une contribution nette positive, les plus faibles contributeurs, en pourcentage de leur richesse nationale.

Cette donnée justifiera, selon votre Rapporteure, que la révision ici examinée accroisse quelque peu la contribution française au budget de l'Union.

En fait, la modification du système actuel de ressources propres n'a pas suivi les "pistes de réflexion" ouvertes par la Commission européenne dans sa communication. Cette modification vise davantage à satisfaire la demande instante, exprimée par l'Allemagne, les Pays-Bas, la Suède et l'Autriche, d'un rééquilibrage de leurs contributions nettes au budget de l'Union, qu'ils jugent depuis plusieurs années excessives.

II - LA RECHERCHE D'UN FINANCEMENT PLUS
ÉQUITABLE DU BUDGET COMMUNAUTAIRE

La réforme s'est inscrite dans la continuité du système précédent et, surtout, des équilibres mis au point pour le "paquet Delors II". Aucune nouvelle ressource n'a été créée. La demande d'écrêtement généralisé des soldes nets a été repoussée et aucune dérogation n'a été prévue, sauf l'importante exemption de la compensation britannique qui a été maintenue. La nouvelle décision comporte quatre mesures principales :

- une réduction du taux de TVA maximal ;

-une augmentation du pourcentage des ressources propres « traditionnelles » retenu par les Etats membres pour couvrir les frais de perception ;

- un ajustement technique de la correction des déséquilibres budgétaires en faveur du Royaume-Uni ;

- un mode de financement de la correction britannique différencié selon les Etats.

A - La prise en compte accrue de la capacité contributive des Etats membres

La décision reprend pour l'essentiel les conclusions du Conseil européen de Berlin relatives à la modification de la décisions sur les ressources propres.

1) La réduction du taux d'appel de la TVA de 1 à 0,50%

Cette solution représente un compromis entre la position de la majorité des délégations, qui demandaient la substitution totale de cette ressource par la ressource PNB, et la Belgique et l'Italie qui s'opposaient à cette solution. Ce compromis s'inscrit dans la continuité, après la baisse de 1,4% à 1% du taux d'appel décidée pour le paquet Delors II. Le taux d'appel maximal est ramené à 0,75% en 2002 et 0,50% en 2004 pour l'ensemble des Etats membres.

Répartition des ressources propres par catégorie dans le projet de budget pour 2001 et 2002 (en millions d'euros)


Origine de la recette

Projet de
budget 2001


Part en %

Projet de budget 2002


Part en %

Prélèvements agricoles

1.062

1,2

841

0,9

Cotisations sucre isoglucose

905

1

578

0,6

Droits de douane

12.292

13,4

11.824

12,5

Ressource propre TVA

33.467

36,4

23.594

24,9

Ressource propre fondée sur le PNB

44.080

48

57.959

61,1

Total

91.807

100

97.797

100

Par ailleurs, la décision maintient l'écrêtement de l'assiette de la TVA à 50% du PNB des Etats membres.

La part de la ressource TVA, qui n'était plus que de 35% en 1999, ira donc encore en diminuant au profit de la ressource PNB, ce qui devrait renforcer, comme on l'a vu, l'équité du système, en raison des distorsions entraînées par la ressource TVA du fait de la part très variable de la consommation dans le PNB des Etats membres.

2) L'augmentation des frais de perception des ressources propres traditionnelles

Les Pays-Bas avaient demandé la suppression de ces ressources. Elles ont été maintenues mais le pourcentage restitué aux Etats membres au titre de leurs frais de perception passe de 10 à 25% à compter de l'exercice 2001.

Dans l'exposé des motifs de la proposition de décision, la Commission justifiait cette modification par l'augmentation des tâches dont doivent s'acquitter les administrations nationales à l'occasion de la perception des droits de douane et agricoles : contrôle des quotas et du respect de la législation communautaire en matière sanitaire, lutte contre la fraude, par exemple. En réalité, l'augmentation du pourcentage des ressources propres laissées aux Etats membres n'a d'autre justification que de donner satisfaction à certains pays contributeurs nets et, en particulier, les Pays-Bas qui, en raison de l'importance de leurs installations portuaires, perçoivent des droits de douane et agricoles supérieurs à ceux des autres Etats membres.

Comme l'observe Alain Barrau, Rapporteur d'information au nom de la Délégation pour l'Union européenne, dans son analyse de la décision alors au stade de la négociation, « il est cependant positif que les ressources propres traditionnelles aient été maintenues car elles correspondent à la mise en _uvre de politiques communes dont le bénéfice ne saurait échoir qu'au seul pays d'entrée des marchandises »2. Le système ne gagne toutefois pas en transparence.

3) Le poids prépondérant de la ressource assise sur le PNB

Conformément au v_u exprimé par le Conseil européen de Berlin, la part de la ressource PNB devient prépondérante dans le budget communautaire, ce qui traduit plus justement la capacité contributive de chaque Etat membre. Au plan communautaire, la part de la ressource PNB dans le financement de l'Union européenne passe de 48% à 62%.

La décision comporte un aménagement technique visant à tenir compte de l'application du nouveau système européen des comptes économiques intégrés (SEC 95). L'actualisation du plafond de ressources propres - maintenu à 1,27% du PNB - est effectuée avec ce nouveau système sans que le montant total des ressources attribué aux Communautés ne puisse dépasser un certain pourcentage du montant total des PNB des Quinze.

Coût par Etat membre de la nouvelle décision ressources propres

sur la base du projet de budget pour 2002

 

Ancienne DRP

Nouvelle DRP

Ecart sur les contributions nettes

Montant de la contribution

Contribution nette

en %

Nouvelle contribution

(*)

Contribution nette

en %

Belgique

Danemark

Allemagne

Grèce

Espagne

France

Irlande

Italie

Luxembourg

Pays-Bas

Portugal

Gde-Bretagne

Autriche

Finlande

Suède

3 862

1 952

23 413

1 591

7 494

16 160

1 281

12 555

231

6 399

1 415

13 810

2 341

1 401

2 647

3 719

1 916

23 028

1 567

7 386

15 978

1 258

12 384

228

6 194

1 394

13 437

2 310

1 387

2 601

4

2

24

2

8

17

1

13

0

7

2

14

2

2

3

4 038

2 097

23 404

1 654

7 793

16 877

1 330

13 498

241

6 257

1 472

14 157

2 278

1 498

2609

3 679

2 006

22 442

1 595

7 524

16 422

1 272

13 068

234

5 745

1 418

13 225

2 201

1 461

2 495

4

2

24

2

8

17

1

14

0

6

2

14

2

2

3

- 39,8

90,2

- 585,6

27,8

138,1

444,1

13,8

684,8

5,1

- 449,9

24

- 212,1

- 109,2

74,5

- 105,8

Total

96 553

94 787

100

99 201

94 787

100

0

(*) hors régularisation des frais de perception 2001

B - La correction britannique : une dérogation qui n'a plus lieu d'être

Comme l'a expressément prévu le Conseil européen de Berlin, la décision maintient la compensation budgétaire dont bénéficie le Royaume-Uni depuis 1984. La Commission européenne contestait la légitimité de la correction britannique et était plutôt favorable au « phasing out », c'est à dire à sa décrue sur plusieurs années jusqu'à sa suppression. On peut souligner que l'évolution positive de l'économie britannique au cours des dernières années rend encore moins compréhensible cette exemption ancienne3

Les modalités de calcul et de financement sont aménagées selon les principes définis par le Conseil de Berlin. Il s'agit d'abord de neutraliser les gains exceptionnels découlant de la modification du système, et éviter que les dépenses occasionnées par l'élargissement de l'Union ne soient incluses dans le calcul de la compensation.

Les dotations pour la pré-adhésion sont considérées comme des dépenses extérieures et sont donc exclues du calcul de la correction qui ne prend en compte que les dépenses réparties. Mais l'adhésion progressive des nouveaux Etats membres fera passer les crédits qui leur sont consacrés dans les dépenses internes ; ces crédits seraient alors pris en compte dans le calcul de la correction britannique, ce qui exonérerait le Royaume-Uni d'une part de cet effort financier. A chaque élargissement, il y aura donc un ajustement qui "sera effectué en réduisant le montant total des dépenses réparties d'un montant équivalent à celui de dépenses de pré-adhésion dans les pays candidats".

Si le calcul de la correction britannique est de plus en plus complexe, son financement ne le devient pas moins. Quatre Etats membres contributeurs nets - l'Allemagne, les Pays-Bas, la Suède et l'Autriche ont demandé que leur contribution à ce financement soit ramenée à 25% de leur part normale. L'Allemagne avait déjà obtenu, depuis 1984; une ristourne, et ne s'acquittait que des deux tiers de sa part.

La charge du financement de la correction britannique est diversement reportée sur les autres Etats membres. La France en devient premier contributeur à hauteur de 31,6 % et joue partiellement le rôle de variable d'ajustement de la correction. L'Espagne et, à un degré moindre, l'Italie, voient aussi leur contribution alourdie.

C - Les conséquences sur la contribution française

La réforme des modalités de calcul des ressources propres induit des transferts de charge entre les Etats membres. Ces transferts ont pour conséquence de relever le taux de contribution de la France au budget communautaire en raison d'un accroissement de sa participation au financement de la correction britannique et de la réduction de la part des ressources propres traditionnelles au profit de la ressource PNB à laquelle elle contribue davantage.

L'estimation de ces transferts de charge à moyen terme est difficile car elle dépend évidemment de plusieurs données : les assiettes TVA et PNB de chaque Etat, le niveau de la dépense communautaire déterminé chaque année dans le cadre de la procédure budgétaire et, enfin, le montant de la correction britannique.

Une simulation a été effectuée sur la base des données connues pour 2002. l'application de la décision s'est déjà traduite par une hausse du prélèvement sur recettes pour 2002, qui intervient de la façon suivante :

- le nouveau mode de calcul du financement de la correction britannique induit pour la France en 2002 un surcoût de l'ordre de 359 millions d'Euros (2,3 milliards de francs) ;

- l'augmentation des frais de perception et la première étape de réduction du taux maximal d'appel TVA induisent une forte progression de la ressource PNB (+ 2 226 millions d'Euros, + 14,6 millions de francs), supérieure à la réduction de la ressource TVA (- 1 868 millions d'euros, soit - 12,2 milliards de francs).

L'application rétroactive de la hausse des frais de perception sur les ressources propres traditionnelles à l'exercice 2001 se traduit en 2002 par un surcroît de ressource PNB (425 millions d'euros, soit 2,8 milliards de francs) que ne compense pas intégralement la restitution de 15% des RPT 2001 (288 millions d'euros, soit 1,8 milliard de francs). Le surcoût net ponctuel est donc de 137 millions d'euros (1 milliard de francs). Si du point de vue de l'Union européenne cette régularisation est neutre (substitution à due concurrence de la ressource PNB à des ressources propres traditionnelles), elle ne l'est pas pour la France dans la mesure où son taux de contribution à la ressource PNB (16,5%) est supérieur à son taux de contribution aux ressources propres traditionnelles (10,3%).

Au total, la contribution de la France, telle qu'elle est évaluée en loi de finances (prélèvement sur recettes), augmente de 1 142 millions d'euros soit 7,5 milliards de francs. Déduction faite du surcoût ponctuel lié à la régularisation des frais de perception 2001, le surcoût brut pérenne se limite à 717 millions d'euros (4,7 milliards de francs).

Pour 2002, en intégrant l'application rétroactive de la hausse des frais de perception, le surcoût net pour la France se limitera à 582 millions d'euros (3,8 milliards de francs). Mais l'impact de façon pérenne, déduction faite du surcoût ponctuel lié à la régularisation des frais de perception 2001, sera de 444 millions d'euros (2,9 milliards de francs).

La simulation effectuée par le Gouvernement sur la période des perspectives financières (2000/2006), en prenant comme hypothèse de dépense les budgets votés pour 2000 et 2001 et pour les années suivantes les plafonds des crédits de paiement arrêtés à Berlin pour l'Union européenne à 15, on observe que la contribution de la France (prélèvement sur recettes) devrait connaître une augmentation de 3 351 millions d'euros (22 milliards de francs), dont 625 millions d'euros (4 milliards de francs) imputables à la seule décision ressources propres. Cette simulation ne prend pas en compte les éventuels ajustements susceptibles d'intervenir (reports du solde de l'exercice précédent notamment) 4

En fait, la notion de ressources propres recoupe mal la réalité de la nature des recettes communautaires, car ces recettes ne sont pas homogènes. Les ressources dites traditionnelles reflètent un véritable transfert de souveraineté fiscale, dans la mesure où leur prélèvement établit un lien entre le contribuable - entreprise, producteur ou importateur- et la Communauté. Par contre, la nature réelle des ressources TVA et PNB est autre : il n'y a pas transfert de pouvoir vers la Communauté mais seulement affectation de recette, à charge pour l'autorité budgétaire nationale de les financer comme elle l'entend, par prélèvement sur les autres recettes fiscales, quelles qu'elles soient (pas nécessairement la TVA nationale). Il ne résulte donc pas de lien communautaire de cette affectation, pourtant appelée à prendre une part encore plus importante dans le nouveau système.

Si l'évolution du système de financement accroît son caractère équitable du fait de la progression de la ressource PNB, elle présente cependant le défaut de ne pas aller dans le sens d'une plus grande autonomie financière de l'Union (cet objectif était secondaire au Conseil européen de Berlin). On peut également lui reprocher de ne pas aller vers plus de transparence et de simplicité.

Et elle risque d'accentuer la tendance des Etats membres à faire la comptabilité de ce qu'ils versent et reçoivent de la Communauté.

CONCLUSION

Les dispositions relatives à l'entrée en vigueur de la décision sont juridiquement contradictoires. D'un côté, la décision doit entrer en vigueur après la ratification par tous les Parlements nationaux. D'un autre côté, son article 10 prévoit qu'elle prend effet au 1er janvier 2002. La Commission, suivie par le Conseil, a estimé que le projet de budget pour 2002 devait être établi sur la base de la décision, ce qui est en effet le cas.

On notera que la hausse des frais de perception s'appliquera quant à elle de manière rétroactive à l'année 2001 ; cela signifie qu'en 2002, la Commission restituera aux Etats membres 15% (soit 25% moins 10%) des ressources propres collectées en 2001.

La décision prévoit par ailleurs la révision générale du système de ressources propres, à l'initiative de la Commission, avant le 1er janvier 2006. Cette révision doit prendre en compte les conséquences de l'élargissement. La Commission devra présenter à ce moment un rapport sur le fonctionnement du système, et envisager "la possibilité de créer de nouvelles ressources propres autonomes". L'on n'accordera pas un poids particulier à cette disposition, toujours inscrite dans les textes de cette nature. Néanmoins, la recherche de modes de financements plus autonomes, d'une part, et créant un lien direct entre le citoyen européen et la Communauté.

Le renvoi à la fin de la période pluriannuelle retenue par le paquet Santer (2000-2006) a l'avantage de ne pas rouvrir le paquet ressources juste avant l'élargissement. Mais il a l'inconvénient très sérieux d'entériner la compensation britannique, y compris dans le contexte de l'élargissement. Or celle-ci doit être remise en cause dans ce nouveau contexte, dans lequel ces avantages anciens consentis au Royaume-Uni deviendront totalement incompréhensibles, surtout si l'on considère l'évolution économique positive du Royaume-Uni au cours des cinq dernières années.

Il est à craindre que les demandes de certains Etats membres - écrêtement des soldes nets, demande de rééquilibrage de la contribution allemande - ne resurgisse à l'occasion de cette révision.

La France risque alors d'être placée alors dans une situation délicate, car, il faut le rappeler, elle restera sur la période 2000-2006 en bonne place des bénéficiaires des crédits communautaires (elle se trouve en deuxième place en 1999) et ne devrait pas figurer parmi les pays fortement contributeurs nets. Sa position de premier bénéficiaire de la PAC et de versements encore importants des fonds structurels dans le cadre de la mise en _uvre de l'« Agenda 2000 » pourrait être remise en cause en 2006, alors que l'élargissement aura déjà été amorcé. Dès avant cette date, les inquiétudes que l'on peut concevoir quant au financement de l'élargissement peuvent susciter des remises en cause.

Notre pays devra donc entreprendre une réflexion sur le financement de la Communauté bien avant cette date, afin de pouvoir formuler des propositions « en amont » des discussions qui s'ouvriront.

Votre Rapporteure propose l'adoption du présent projet de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du mercredi 5 décembre 2001.

Après l'exposé de la Rapporteure, le Président François Loncle a estimé qu'en effet il y avait lieu d'entreprendre cette réflexion. Il est illusoire de penser réussir l'élargissement en se cantonnant sur un plafond de ressources propres maintenu à 1,27 % du PNB. Il va devenir impératif de reconsidérer cette position.

M. Pierre Brana a déclaré partager ce point de vue. Il a également regretté le maintien de la correction budgétaire en faveur du Royaume-Uni qui lui semble tout à fait anormale. Il faut espérer que cette correction n'aura plus lieu d'être lorsqu'interviendra la première vague de l'élargissement.

M. Paul Dhaille a souligné que le maintien du plafond de ressources propres à 1,27% du PNB relevait plutôt d'un choix politique. Son relèvement à 1,30%, par exemple, ne changera pas fondamentalement les choses. En l'absence d'avancées politiques majeures sur la nature et le rôle de l'Union, on ne verra pas d'avancée budgétaire. La position française consistant à vouloir une réforme fondamentale des institutions avant l'élargissement est pertinente à cet égard.

Conformément aux conclusions de la Rapporteure, la Commission a adopté le projet de loi (n° 3243).

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La Commission vous demande donc d'adopter, dans les conditions prévues à l'article 128 du Règlement, le présent projet de loi.

NB : Le texte de la décision figure en annexe au projet de loi (n° 3423).

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3436 - Rapport de Mme Marie-Hélène Aubert (affaires étrangères) sur le projet de loi (n° 3423) : approbation de la décision du Conseil de l'Union européenne du 29 septembre 2000 relative au système des ressources propres des Communautés européennes

1 Le taux uniforme est égal à l'écart entre le « taux d'appel maximal fixé à 1% et le taux gelé représentatif de la correction britannique. Le financement de la correction britannique est imputé par ce biais sur la ressource TVA.

2 Rapport d'information n° 1869 du 14 octobre 1999 de la Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, ???.

3 Le produit intérieur brut britannique s'est élevé à 891 milliards de livres en 1999. Le taux de croissance annuel moyen du PIB a été de 2,9% au cours des cinq dernières années. Sa progression est évaluée à 2,2% pour 2001 et 1,9% pour 2002. (données issues de « Britain 2001 », Office for national statistics.)

4 Simulation en francs courants, après actualisation des perspectives financières.


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