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le 10 décembre 2001

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N° 3438

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 5 décembre 2001.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES (1) SUR LE PROJET DE LOI, ADOPTÉ PAR LE SÉNAT, autorisant l'approbation du protocole à l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie relatif à la coopération dans le domaine de l'exploration et de l'utilisation de l'espace à des fins pacifiques en date du 26 novembre 1996,

PAR M. RENÉ ANDRÉ,

Député

--

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Voir les numéros :

Sénat : 127, 283 et T.A. 113 (2000-2001)

Assemblée nationale : 3160

Traités et conventions

La Commission des affaires étrangères est composée de : M. François Loncle, président ; M. Gérard Charasse, M. Georges Hage, M. Jean-Bernard Raimond, vice-présidents ; M. Roland Blum, M. Pierre Brana, Mme Monique Collange, secrétaires ; Mme Michèle Alliot-Marie, Mme Nicole Ameline, M. René André, Mme Marie-Hélène Aubert, Mme Martine Aurillac, M. Édouard Balladur, M. Raymond Barre, M. Henri Bertholet, M. Jean-Louis Bianco, M. André Billardon, M. André Borel, M. Bernard Bosson, M. Philippe Briand, M. Bernard Brochand, M. Jean-Christophe Cambadélis, M. Hervé de Charette, M. Jean-Claude Decagny, M. Patrick Delnatte, M. Jean-Marie Demange, M. Xavier Deniau, M. Paul Dhaille, M. Jean-Paul Dupré, M. Charles Ehrmann, M. Jean-Michel Ferrand, M. Raymond Forni, M. Georges Frêche, M. Michel Fromet, M. Jean-Yves Gateaud, M. Jean Gaubert, M. Valéry Giscard d'Estaing, M. Jacques Godfrain, M. Pierre Goldberg, M. Michel Grégoire, M. François Guillaume, M. Jean-Jacques Guillet, M. Robert Hue, Mme Bernadette Isaac-Sibille, M. Didier Julia, M. Alain Juppé, M. Gilbert Le Bris, M. Jean-Claude Lefort, M. Guy Lengagne, M. François Léotard, M. Pierre Lequiller, M. Alain Le Vern, M. Bernard Madrelle, M. René Mangin, M. Jean-Paul Mariot, M. Gilbert Maurer, M. Jacques Myard, Mme Françoise de Panafieu, M. Étienne Pinte, M. Marc Reymann, M. François Rochebloine, M. Gilbert Roseau, Mme Yvette Roudy, M. René Rouquet, M. Georges Sarre, M. Henri Sicre, M. Dominique Strauss-Kahn, Mme Christiane Taubira-Delannon, M. Michel Terrot, Mme Odette Trupin, M. Joseph Tyrode, M. Michel Vauzelle.

SOMMAIRE

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INTRODUCTION 5

I - LE PROTOCOLE À L'ACCORD DE 1996 : UN SIMPLE TEXTE DE PRÉCISION 7

II - UN PROTOCOLE NÉCESSAIRE AFIN DE PERMETTRE LA POURSUITE D'UNE COOPÉRATION SPATIALE FRUCTUEUSE POUR LES DEUX PARTIES 9

A - UNE COOPÉRATION SPATIALE ANCIENNE 9

B - UNE COOPÉRATION QUI S'EST DÉVELOPPÉE DANS
LE CADRE DE L'ACCORD DE 1996
10

CONCLUSION 12

EXAMEN EN COMMISSION 13

Mesdames, Messieurs,

Le projet de loi que nous examinons aujourd'hui a pour objet d'autoriser l'approbation du protocole à l'accord franco-russe relatif à la coopération dans le domaine de l'exploration et de l'utilisation de l'espace à des fins pacifiques, signé le 26 novembre 1996 et ratifié par la France en 1998.

La mise en _uvre de cet accord avait été subordonnée à l'autorisation du législateur, conformément aux dispositions de l'article 53 de la Constitution, car son article 9 exemptait de droits et de taxes les marchandises importées de France « pour un lancement effectué dans l'espace extra-atmosphérique à partir de pas de tir utilisés par la Fédération de Russie » et réciproquement. Or, l'application de ces stipulations a fait l'objet de difficultés, notamment de la part des autorités douanières russes, rendant nécessaire la signature d'un protocole, le 12 janvier 1999, qui en précise la portée exacte.

Ainsi, si ce protocole a avant tout une portée technique, il importe d'en autoriser rapidement l'approbation afin de supprimer une entrave au développement de la coopération spatiale franco-russe.

I - LE PROTOCOLE À L'ACCORD DE 1996 :
UN SIMPLE TEXTE DE PRÉCISION

L'accord spatial franco-russe signé en 1996 avait pour but de développer la coopération dans le domaine industriel et commercial, alors que, jusque là, cette coopération était d'abord d'ordre scientifique.

En conséquence, l'accord comprenait de nombreuses stipulations visant à faciliter les échanges dans ce domaine entre la France et la Russie. Parmi celles-ci, les plus importantes étaient probablement celles relatives au régime douanier et fiscal.

Pour que la coopération spatiale soit stimulée dans ses aspects industriels et commerciaux, l'article 9-1 de l'accord prévoyait en effet une exonération douanière de tous droits et taxes sur les marchandises importées de France pour un lancement effectué à partir d'un pas de tir russe et réciproquement.

Cependant, les stipulations négociées en 1996 ne se sont pas avérées suffisamment précises pour permettre aux entreprises concernées de bénéficier aisément et rapidement des exemptions douanières et fiscales prévues. Ainsi, le Comité des douanes russes a interprété l'accord de 1996 de façon très restrictive, concernant notamment la nature des marchandises qu'il a accepté d'inclure dans le cadre de l'accord.

Le protocole signé en 1999 prévoit donc que :

- le principe de l'exonération des droits et taxes douanières est réaffirmé explicitement (article premier)

- la notion de « marchandises pour un lancement » est entendue de façon extensive : elle comprend tous les biens matériels ou immatériels nécessaires au lancement d'un satellite, depuis le lanceur jusqu'au logiciel utilisé pour cette opération (article 2)

- l'accord s'applique également aux marchandises venant de pays tiers (article 4)

Il faut préciser que les autorités russes ont commencé à mettre en _uvre de façon anticipée certaines stipulations du protocole, concernant l'exonération des marchandises importées par des sociétés françaises. Cependant, sa pleine mise en application exige une rapide approbation, préalable nécessaire aux quelques adaptations qu'il rendra nécessaire dans la législation russe.

II - UN PROTOCOLE NÉCESSAIRE AFIN DE PERMETTRE LA
POURSUITE D'UNE COOPÉRATION SPATIALE
FRUCTUEUSE POUR LES DEUX PARTIES

A - Une coopération spatiale ancienne

C'est la visite du général de Gaulle en URSS qui fut le point de départ de la coopération spatiale entre la France et l'Union soviétique. L'accord du 30 juin 1966, qui inaugure la coopération franco-soviétique dans le domaine spatial permit à la France d'être le premier partenaire occidental de l'Union soviétique dans le domaine spatial. Il s'agissait à l'époque d'une coopération à caractère uniquement scientifique.

La coopération franco-soviétique a ensuite acquis une certaine visibité avec le protocole additionnel à l'accord précité de 1966, signé lors de la visite en France de Mikhail Gorbatchev le 4 juillet 1989, qui offrait aux spationautes français la possibilité de participer régulièrement à des vols habités. Grâce à ce volet de la coopération spatiale franco-soviétique puis franco-russe, les laboratoires français ont capitalisé une compétence reconnue. Jean-Loup Chrétien fut ainsi le premier spationaute occidental à voler avec un équipage soviétique à bord de la station SALYOUT 7 en 1982. Depuis, les vols successifs de cosmonautes français (mission PVH, ARAGATS en 1988, ANTARES en 1992, ALTAIR en 1993, CASSIOPEE en 1996, PEGASE en février 1998, PERSEUS en février 1999) ont permis aux scientifiques français de progresser dans le domaine des neurosciences et de la physiologie cardio-vasculaire. Grâce à l'expérience accumulée lors des missions de vols habités réalisées avec les Russes, les compétences françaises sont maintenant utilisées par la NASA dans la réalisation de la station spatiale internationale.

Cependant, la disparition de l'Union soviétique n'a pas été sans conséquence sur le fonctionnement de la coopération spatiale entre les deux pays, celle-ci ayant profondément changé de nature. En effet, si les missions à caractère scientifique restent les plus médiatisées, telle la mission menée à bord de la station internationale ISS par Claudie Haigneré en octobre 2001, la coopération spatiale se développe dorénavant avant tout dans les domaines industriels et commerciaux.

En effet, la dimension financière devient alors prépondérante pour une industrie spatiale russe en quête perpétuelle d'argent. La coopération essentiellement scientifique, sans échange de fonds, pratiquée du temps de l'Union soviétique cède alors la place à une coopération où toutes les prestations sont désormais facturées, et bien davantage orientée en direction des applications industrielles et commerciales des activités spatiales.

Cette évolution a logiquement abouti au remplacement de l'accord de 1966 par un nouvel accord intergouvernemental franco-russe, signé en 1996. C'est dans le cadre de cet accord que la coopération entre les deux pays a pu se développer dans les domaines industriels et commerciaux.

B - Une coopération qui s'est développée dans le cadre de l'accord de 1996

La coopération industrielle et commerciale s'est avant tout développée dans le domaine des lanceurs. En effet, en 1996, parallèlement à la signature du nouvel accord franco-russe, était créée la société euro-russe STARSEM. Celle-ci est détenue à parité par des actionnaires russes et européens (35 % par EADS, 15 % par Arianespace), elle est chargée de la commercialisation et de l'exploitation des lanceurs Soyouz depuis le cosmodrome de Baikonour au Kazakhstan.

Spécialisés dans le lancement de satellites en orbite basse, ou pour des missions scientifiques de taille moyenne, ou pour des missions d'observation de la Terre, les lanceurs Soyouz exploités par STARSEM sont particulièrement complémentaires d'Ariane 5, qui occupe le créneau des satellites gestionnaires lourds de télécommunications.

Les débouchés sur lesquels STARSEM a ainsi d'ores et déjà commencé à se positionner sont particulièrement nombreux : on peut citer les constellations de satellites de téléphonie mobile, comme Globalstar, les missions scientifiques ou encore les satellites d'observation météorologique.

La coopération avec la Russie est donc particulièrement importante pour l'industrie aérospatiale européenne afin d'être présente sur tous les segments du marché, même s'il est vrai que les premières expériences de constellations de petits satellites de télécommunications (Iridium, Globalstar) se sont soldées par des échecs commerciaux. A l'inverse, l'industrie spatiale russe a besoin du partenariat européen pour rester compétitive. Par exemple, STARSEM développe actuellement une version évoluée du lanceur Soyouz pour optimiser ses capacités en termes de performances, de charge utile et de souplesse d'utilisation. Ce nouveau lanceur Soyouz ST devrait débuter son exploitation commerciale à la fin de 2002, il sera un exemple éclairant de l'utilité de la coopération spatiale entre entreprises russes et européennes. Or on sait le poids de la France dans ces dernières, qu'il s'agisse d'EADS ou d'Arianespace.

A l'inverse, des discussions sont actuellement en cours afin de permettre le lancement de lanceurs Soyouz depuis le site de Kourou en Guyane.

CONCLUSION

La fin de l'Union soviétique ne s'est donc heureusement pas traduite par une remise en cause de la très utile coopération spatiale entre la France et la Russie. Celle-ci a su s'adapter, en prenant davantage un aspect commercial, même si des programmes scientifiques continuent de se développer.

Mais le succès d'une coopération spatiale davantage orientée vers des applications industrielles et commerciales exige la mise en place d'un environnement économique et juridique stable. Or, en dépit des efforts menés ces dernières années, la Russie a encore des efforts à faire en ce domaine. Il est donc indispensable de s'assurer de la clarté des accords entre nos deux pays sur ces points. A cet égard, le protocole signé en 1999 permettra de clarifier la situation fiscale et douanière des entreprises françaises dans le respect de la philosophie de l'accord de 1996. Ainsi, votre Rapporteur vous recommande d'adopter le présent projet de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du mercredi 5 décembre 2001.

Après l'exposé du Rapporteur, M. Charles Ehrmann a demandé si des lancements de fusées Soyouz avaient déjà été effectués à partir de la base de Kourou.

Le Président François Loncle a précisé que cette partie de l'accord prévoyant le lancement de fusées russes depuis la base de Kourou était loin d'être finalisée.

M. Pierre Brana a souhaité savoir quel genre de difficultés, d'ordre commercial ou politique, faisaient obstacle à ces lancements.

M. René André a répondu que la volonté politique était tempérée par les réalités industrielles.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n° 3160).

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* *

La Commission vous demande donc d'adopter, dans les conditions prévues à l'article 128 du Règlement, le présent projet de loi.

NB : Le texte du protocole figure en annexe au projet de loi (n° 3160).

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