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Document E2861
(Mise à jour : 12 décembre 2009)


Lignes directrices intégrées pour la croissance et l'emploi (2005-2008) - Communication du président, en accord avec le vice-président Verheugen et les commissaires Almunia et Spidla comprenant une recommandation de la Commission relative aux grandes orientations des politiques économiques des Etats membres et de la Communauté (en application de l'article 99 du traité CE) et une proposition de décision du Conseil relative aux lignes directrices pour les politiques de l'emploi des Etats membres (en application de l'article 128 du traité CE).


E2861 déposé le 22 avril 2005 distribué le 3 mai 2005 (12ème législature)
   (Référence communautaire : COM(2005) 0141 final du 12 avril 2005, transmis au Conseil de l'Union européenne le 12 avril 2005)

M. Daniel Garrigue, rapporteur, a présenté à la Délégation le 11 mai 2005 le document élaboré par la Commission dans le prolongement direct des conclusions du Conseil européen des 22 et 23 mars derniers : les " lignes directrices intégrées " qui, théoriquement, devraient regrouper les anciennes " grandes orientations des politiques économiques " (GOPE) et les anciennes " lignes directrices pour l'emploi " (LDE). L'une des ambitions de ce Conseil européen du mois de mars, dans le cadre de la relance de la stratégie de Lisbonne, a été de donner à ces instruments une portée plus grande que par le passé.

Mais le document présenté par la Commission se limite à un simple replâtrage. Il n'y a de lignes directrices " intégrées " que dans son titre. La procédure d'examen reste partagée puisque le Conseil " Compétitivité " a examiné les orientations de politique micro-économique le 10 mai, le Conseil " Emploi, politique sociale, consommation " va examiner le volet relatif à l'emploi les 2 et 3 juin prochains, et le Conseil " Ecofin " adoptera formellement les GOPE au mois de juillet. C'est le Conseil européen des 16 et 17 juin qui devrait donner un caractère intégré à l'ensemble ainsi élaboré.

C'est sur le fondement de ces lignes directrices intégrées que devront ensuite être préparés les " programmes nationaux de réformes " pour la période 2005-2008, qui permettront aux Etats de mieux s'approprier les objectifs de la stratégie de Lisbonne. M. Daniel Garrigue a souligné l'intérêt de ces programmes, qu'il a qualifiés d'outils d'interface entre ces objectifs et les politiques nationales. La Commission a demandé aux Etats de présenter leurs programmes nationaux de réformes d'ici le 15 octobre 2005, alors que le Conseil européen des 22 et 23 mars avait prévu leur présentation dans le courant de l'automne. Cette date du 15 octobre n'est pas nécessairement un inconvénient pour la France puisqu'elle permettrait d'assurer une meilleure coordination entre le programme national de réformes et le prochain projet de loi de finances.

La mise en œuvre de chaque programme national de réformes fera l'objet d'un rapport qui fusionnera plusieurs rapports jusqu'alors trop peu connus.

En parallèle, la Commission définira un programme d'action communautaire pour 2005-2008. Elle va d'autre part présenter dans les prochaines semaines une communication relative à la méthode d'élaboration des programmes nationaux.

La présente communication sur les lignes directrices intégrées opère une mise en perspective intéressante dans la mesure où elle comporte des analyses lucides qui ne sont pas nécessairement formulées au plan national, notamment sur les effets du vieillissement de la population européenne et son impact sur le taux d'activité, ou sur l'insuffisance de la création d'emplois dans l'Union européenne.

Les objectifs chiffrés qui avaient été fixés à Lisbonne sont rappelés : le but était d'atteindre en moyenne un taux d'emploi total de 70 %, un taux d'emploi des femmes de 60 % et un taux d'emploi des travailleurs âgés de 55 à 64 ans de 50 %. Le taux d'emploi total actuel dans l'Union européenne n'est encore que de 62,9 %, soit sept points de moins qu'aux Etats-Unis.

Les analyses de la Commission font également état du manque de flexibilité du marché du travail, des insuffisances en matière de recherche-développement et de pénétration des Technologies de l'information et de la communication (TIC), et de l'impact des nouveaux pays émergents en termes de concurrence et d'évolution du cours des matières premières et énergétiques.

La plupart des lignes directrices proposées s'inscrivent dans le droit fil des conclusions du Conseil européen, qu'il s'agisse de l'ouverture et de la compétitivité des marchés, du respect des impératifs budgétaires, de l'amélioration des infrastructures européennes ou du thème de la création d'un espace attrayant pour les entreprises et l'investissement. En ce qui concerne la zone euro, la Commission soulève une question sur laquelle il serait utile de se pencher, celle de la représentation extérieure de la zone euro. S'agissant de l'amélioration du marché intérieur, sont évoqués le problème de son approfondissement, notamment dans le domaine des services, et le taux insuffisant de transposition des directives concernant le marché intérieur, ce qui intéresse la France.

Le thème de la recherche-développement est bien développé au sein des lignes directrices, et permet d'évoquer le septième programme-cadre qui est en cours d'élaboration.

Enfin, les lignes directrices pour l'emploi reprennent des thèmes particulièrement intéressants par rapport aux débats actuels en France, comme celui de la flexibilité, et celui de l'activité tout au long du cycle de vie qui mériterait cependant d'être plus développé.

Au-delà de ces éléments positifs, le document de la Commission présente néanmoins, sur le fond, certaines faiblesses.

En premier lieu, il n'y a pas de véritable intégration entre les GOPE et les LDE, ce qui n'est pas conforme aux conclusions du dernier Conseil européen de printemps et n'est pas non plus sans incidence sur les objectifs poursuivis. Ainsi le texte proposé affirme-t-il moins nettement que ne l'a fait le Conseil européen, que la croissance et l'emploi doivent bien être au service de la cohésion sociale.

En deuxième lieu, deux éléments posent problème. D'une part, la ligne directrice n° 21 relative à l'évolution des salaires et des autres coûts du travail, évoque l'hypothèse d'un cadre pour les mécanismes de négociation salariale. En France, cette question est de la compétence des partenaires sociaux. D'autre part, la notion de services économiques d'intérêt général (SIEG) apparaît en retrait par rapport aux GOPE de la période antérieure, dans lesquelles c'est la notion de " services d'intérêt général " qui était évoquée. La communication présente les SIEG comme un " sous-produit " de l'amélioration du marché des industries de réseau, ce qui n'est pas totalement conforme aux conceptions précédemment retenues.

S'agissant en troisième lieu de la gouvernance économique, notion à laquelle il faut préférer celle de Gouvernement économique de l'Union européenne, le flou actuel doit laisser place à plus de force, de cohérence et de volontarisme politique.

En quatrième lieu, si les différents thèmes relatifs à la recherche-développement sont bien développés, celui de la base industrielle de l'Europe n'est pas suffisamment appuyé. Le document de la Commission doit également être complété par la mention d'une politique européenne de l'énergie et des matières premières. L'ensemble des grands acteurs économiques, les Etats-Unis, la Chine, le Japon, ont chacun une stratégie dans ce domaine.

Enfin, le rôle du Parlement vis-à-vis de ce document communautaire, qui définit les orientations européennes en matière de croissance et d'emploi, ainsi que des suites qui lui sont données, doit être réaffirmé et renforcé. Les assemblées parlementaires doivent consacrer d'autant plus de temps à l'examen de ces objectifs que la perspective de l'élaboration des futurs Programmes nationaux de réforme est dès à présent très proche.

La proposition de résolution qu'il est ainsi proposé à la Délégation d'adopter vise notamment à ce que les commissions concernées s'en saisissent.

M. Bernard Deflesselles a indiqué soutenir la proposition de résolution. On constate en effet une certaine dichotomie entre ce que dit le Conseil et les propositions de la Commission.

A l'issue de ce débat et après que le rapporteur y eut apporté quelques aménagements, la Délégation a adopté , au cours de sa réunion du 11 mai 2005, la proposition de résolution ainsi modifiée :

" L'Assemblée nationale,

- Vu l'article 88-4 de la Constitution,

- Vu la communication du président de la Commission, en accord avec le vice-président Verheugen et les commissaires Almunia et Spidla, comprenant une recommandation de la Commission relative aux grandes orientations des politiques économiques (GOPE) des Etats membres et de la Communauté (en application de l'article 99 du traité CE) et une proposition de décision du Conseil relative aux lignes directrices pour les politiques de l'emploi (LDE) des Etats membres (en application de l'article 128 du traité CE), (COM (2005) 141 final / E 2861),

Considérant que cette communication s'inscrit dans le droit fil des conclusions du Conseil européen des 22 et 23 mars 2005 relatives à la relance de la stratégie de Lisbonne dans le cadre du partenariat pour la croissance et l'emploi, ce qui donne à ces lignes directrices intégrées, qui regroupent les GOPE et les LDE, une importance particulière ;

Considérant que cette communication sera soumise au prochain Conseil européen des 16 et 17 juin et que c'est sur cette base que les Etats membres établiront les premiers Programmes nationaux de réforme ;

Considérant que cette communication formule un diagnostic lucide sur certaines des faiblesses de l'économie de l'Union européenne, notamment sur l'insuffisance du taux d'emploi global, du taux d'activité des femmes et de celui des travailleurs âgés, l'insuffisante prise en compte des conséquences, à terme, du vieillissement de la population et les effets de la concurrence des pays tiers émergents ;

Considérant que celle-ci reprend bien plusieurs des orientations définies par le Conseil européen précité des 22 et 23 mars, notamment en ce qui concerne le recentrage de la stratégie de Lisbonne sur la croissance et l'emploi, l'impératif de compétitivité, la nécessité d'un espace attrayant pour investir et travailler, et l'importance primordiale de l'innovation et de la recherche pour la croissance ;

Mais considérant que cette communication reste trop imprécise sur les modalités de mise en œuvre d'une gouvernance économique européenne et, ce qui serait préférable, d'un véritable gouvernement économique de l'Union européenne ;

Considérant également que si elle reprend bien certains thèmes tels qu'une approche du travail fondée sur le cycle de vie, la recherche d'un équilibre entre flexibilité et sécurité sur le marché du travail, l'insertion des demandeurs d'emploi et des personnes défavorisées ainsi que le Pacte européen pour la jeunesse, elle ne réalise pas une véritable intégration entre les GOPE et les LDE, ce qui affaiblit à la fois l'objectif de cohésion sociale affirmé lors du Conseil européen précité des 22 et 23 mars et la référence au modèle social européen ;

Considérant que si la communication met bien l'accent sur les éléments relatifs à l'espace européen de recherche et d'innovation, elle reste beaucoup trop imprécise sur les conditions de création d'une base industrielle européenne solide alors que cet objectif avait été affirmé par le Conseil européen ;

Considérant que c'est dès à présent que les Programmes nationaux de réforme prévus dans le cadre de la relance de la stratégie de Lisbonne doivent être préparés et qu'il est indispensable que le Parlement français, et notamment les commissions compétentes, y soient étroitement associés ;

Approuve, pour l'essentiel, la communication de la Commission mais juge indispensable qu'elle soit complétée sur l'ensemble de ces points. "