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Document E3489
(Mise à jour : 12 décembre 2009)


Proposition de directive du Conseil modifiant la directive 2003/96/CE en ce qui concerne l'ajustement du régime fiscal particulier pour le gazole utilisé comme carburant à des fins professionnelles ainsi que la coordination de la taxation de l'essence sans plomb et du gazole utilisé comme carburant.


E3489 déposé le 5 avril 2007 distribué le 13 avril 2007 (12ème législature)
   (Référence communautaire : COM(2007) 0052 final du 13 mars 2007, transmis au Conseil de l'Union européenne le 15 mars 2007)

Reçue à la présidence de l’Assemblée nationale le 5 avril 2007, cette proposition de directive vise à relever, pour après 2010, le taux minimal de taxation que doivent respecter les Etats membres pour le gazole à usage de carburant (diesel), à aligner à l’horizon 2014 ce minimum sur celui de l’essence sans plomb, ainsi qu’à aménager les conditions d’une taxation différenciée du gazole à usage professionnel (diesel « routier ») et de celui à usage particulier.

Elle tend ainsi à compléter et à modifier le dispositif de la directive 2003/96/CE du 27 octobre 2003 restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l’électricité, qui prévoit notamment pour les carburants les taux d’accise minima que doivent respecter les Etats membres à partir du 1er janvier 2004 et leur évolution jusqu’en 2010. Les Etats sont libres de fixer à des niveaux supérieurs à ces minima, la taxation effective.

Cette proposition s’inscrit donc dans le cadre de l’article 7 de la directive précitée, qui dispose que le Conseil fixe avant le 1er janvier 2012 les taux qui seront applicables après le 1er janvier 2013.

Déposée bien avant cette échéance, elle doit être adoptée à l’unanimité, conformément à l’article 93 du traité instituant la Communauté européenne sur l’harmonisation des taxes sur le chiffre d’affaires, droits d’accise et autres impôts indirects.

* Le relèvement de la taxation du diesel et son alignement sur l’essence sans plomb à l’horizon 2014 devraient améliorer le fonctionnement du marché intérieur en favorisant la convergence des taux entre les Etats membres et contribuer à réaliser les objectifs environnementaux de l’Union, sans avoir d’impact sur la France, où les niveaux actuels de taxation sont d’ores et déjà supérieurs aux propositions de la Commission

La directive précitée 2003/96/CE a établi au niveau communautaire le taux minimum d’accise pour le gazole utilisé comme carburant, à 302 euros pour 1.000 litres à compter du 1er janvier 2004 et à 330 euros, pour 1 000 litres également, à partir du 1er janvier 2010.

S’agissant du sans plomb, le taux minimum d’accise prévu est de 359 euros pour 1.000 litres à partir du 1er janvier 2004.

L’absence de réévaluation du taux applicable à l’essence sans plomb est destinée à rapprocher l’imposition des deux carburants, aucun élément ne justifiant une différenciation. Au demeurant, le contenu énergétique du gazole, plus dense, est supérieur à celui d’un même volume d’essence sans plomb, ce qui fait que la taxation reste favorable au diesel.

Pour être exhaustif, il faut rappeler que certains Etats membres ont obtenu des dérogations leur permettant d’appliquer des taux inférieurs.

Dans sa proposition, la Commission propose successivement :

– d’une part, de rehausser de 330 euros à 359 euros pour 1.000 litres, à partir du 1er janvier 2012, le minimum de taxation du gazole, afin de le mettre au niveau du sans plomb, lequel serait maintenu à ce même niveau de 359 euros de manière à achever l’opération de réduction des écarts entreprise en 2003 ;

– d’autre part, de porter ensuite ce même minima, désormais commun au gazole et au sans plomb, à 380 euros pour 1.000 litres à compter du 1er janvier 2014, afin notamment de lui conserver sur le long terme sa valeur réelle et de neutraliser l’incidence de l’érosion monétaire.

Le tableau suivant récapitule cette évolution.

TAUX MINIMUM D’ACCISE SUR LES CARBURANTS HORS DEROGATION

En euros/1 000 litres

Directive 2003/96/CE

Proposition de directive
 (document E 3489)

au 1er janvier 2004

au 1er janvier 2010

au 1er janvier 2012

au 1er janvier 2014

Gazole (diesel)

302

330

359

380

Essence sans plomb

359

359

359

380

Sur le fond, la proposition de la Commission n’appelle pas de réserve. Les objectifs poursuivis méritent d’être atteints.

D’abord, il s’agit de favoriser la convergence des niveaux de taxation entre les Etats membres, de manière à réduire voire de supprimer, sur le marché intérieur, les actuelles distorsions de concurrence dont bénéficient certaines entreprises de transport routier : d’une part, celles implantées dans un Etat de moindre taxation ou à proximité ; d’autre part, celles dont la flotte de camions permet d’opérer une véritable planification fiscale communément appelée « tourisme à la pompe » (l’autonomie de certains d’entre eux peut atteindre 3 000 kilomètres). Cet élément n’est pas négligeable puisque, comme l’observe la Commission, les accises représentent de 6 à 18% du coût d’exploitation des entreprises concernées (le poste « carburants » atteint entre 20% et 30% de ces coûts et les accises constituent entre 30 et 60% du prix hors TVA du gazole). En effet, comme l’indique le graphique suivant, les actuels écarts de taxation entre les Etats membres de l’Union européenne sont importants (le livre blanc de septembre 2001 « la politique européenne des transports à l’horizon 2010 : l’heure des choix » mentionnait déjà cet objectif d’harmonisation).

GAZOLE CARBURANT (situation au 01/01/2007)

 

Source : Commission européenne

Rappel : Taux d’accise minimum (hors dérogation) : 302 euros pour 1 000 litres

Ensuite, conformément aux engagements internationaux de l’Union en matière d’environnement, notamment ceux contractés en application du protocole de Kyoto, la Commission souhaite contribuer à réduire les émissions de gaz à effet de serre en supprimant notamment les déplacements motivés par la seule recherche de carburant à moindre prix. Enfin, elle veut éviter les pertes de recettes pour les Etats membres, parmi lesquels la France et le Royaume-Uni, qui appliquent un niveau de taxation relativement élevé sur le gazole et sont donc les victimes du « tourisme à la pompe ».

S’agissant de notre pays, les mesures proposées par la Commission n’impliquent d’ailleurs aucune adaptation de la législation interne.

En effet, les niveaux actuels de la taxe intérieure de consommation (TIC) sur le gazole, à raison de 41,69 euros par hectolitre (soit 416,9 euros pour 1.000 litres), hors part régionale, comme sur l’essence sans plomb, avec 58,92 euros par hectolitre (soit 589,2 euros pour 1.000 litres), sont d’ores et déjà supérieurs au seuil de 380 euros au 1.000 litres qui sera exigé à partir du 1er janvier 2014.

De même, le tarif intérieur de consommation sur le gazole professionnel, qui est de 39,19 euros par hectolitre, soit 391,9 euros pour 1.000 litres, est déjà supérieur au taux communautaire prévu pour 2014.

* Les modalités concrètes du découplage, déjà pratiqué par la France, des taux du gazole à usage professionnel et du gazole à usage privé doivent être cependant laissées au choix des Etats membres, et non imposées par la future directive.

Le découplage entre la taxation du gazole à usage privé et celle du gazole à usage professionnel (gazole « routier »), est actuellement autorisé par la directive 2003/96/CE, pour les pays qui le souhaitent.

Deux conditions doivent cependant être remplies par les Etats membres, pour bénéficier de cette option :

– d’une part, le minimum communautaire doit être respecté pour la taxation du diesel professionnel. Le diesel à usage particulier est par conséquent nécessairement taxé à un niveau supérieur à ce minimum ;

– d’autre part, l’Etat membre concerné ne peut taxer le diesel professionnel à un moindre niveau que celui qui y était en vigueur le 1er janvier 2003.

Cette dernière condition peut cependant être levée, pour les Etats membres dont le niveau de taxation était à cette même date du 1er janvier 2003 supérieur au double du minimum communautaire applicable au 1er janvier 2004 (ce qui ne vise en pratique que le seul Royaume-Uni), par l’introduction de redevances routières à un niveau tel que la pression fiscale globale reste équivalente.

Afin de faciliter la diminution de la taxation dans les Etats le niveau est historiquement le plus fort et de favoriser, ce qui est la condition d’une convergence des taux nécessaire à un meilleur fonctionnement du marché intérieur pour le transport routier en rétablissant les conditions d’une concurrence loyale, la Commission propose d’apporter deux aménagements de fond à ce dispositif :

– d’une part, en précisant explicitement que le découplage ne peut intervenir que dans le sens d’une moindre taxation du gazole professionnel, par rapport tant au gazole à usage privé qu’à l’essence sans plomb ;

– d’autre part, en facilitant la réduction de la taxation du gazole professionnel à un niveau inférieur à celui en vigueur au 1er janvier 2003, en contrepartie de la création de redevances routières. L’actuelle condition supplémentaire suivant laquelle ce niveau de 2003 doit avoir été supérieur au double du minimum communautaire prévu pour le 1er janvier 2004 serait supprimée.

Si ces deux modifications n’appellent pas pour la France d’observation particulière, tel n’est pas en revanche pas le cas de celle suggérée sur les modalités concrètes d’organisation de la taxation différenciée du gazole professionnel.

La Commission propose, en effet, de supprimer la liberté dont bénéficient actuellement les Etats membres en la matière, et de les contraindre à mettre en place un mécanisme de remboursement, à l’exclusion de tout autre dispositif tel que, par exemple, des pompes dédiées, pour appliquer directement à la sortie de raffinerie le taux réduit.

La France a, pour l’instant, mis en place un remboursement a posteriori , effectué par l'administration des douanes et droits indirects, sur la base de justificatifs (facturettes la plupart des cas), tel que le propose la Commission. Rien ne justifie cependant que son choix soit définitif et s’impose à tous les Etats membres.

A l’expérience, cette procédure s’avère particulièrement lourde tant pour l’administration que pour les entreprises concernées et il ne faut donc pas exclure qu’elle puisse être aménagée à l’avenir.

Il apparaît donc opportun de n’exclure pour l’avenir aucune évolution en la matière, et de conserver une certaine liberté de choix pour les Etats membres.

D’ailleurs, lors de l’examen de ce dispositif par le groupe des questions fiscales, de nombreux pays, l’Espagne et l’Italie (qui ont invoqué que la définition de telles procédures relevait de la seule compétence des Etats membres), mais aussi la France et le Royaume-Uni (qui ont estimé que les Etats devaient pouvoir opter pour d’autres mécanismes que le remboursement ex post ), ainsi que la Grèce, la Lettonie et l’Irlande, ont contesté la proposition de la Commission.

* Les périodes dérogatoires sollicitées par certains Etats membres doivent être considérées avec vigilance

La Commission propose, enfin, que certains Etats membres, notamment ceux qui bénéficient déjà, pour se mettre au niveau des minima prévus par la directive précitée 2003/96/CE, d’une période dérogatoire, et certains des adhérents les plus récents, disposent d’un délai supplémentaire, allant jusqu’au 1er janvier 2016 (Belgique, Autriche, Espagne, Grèce, Luxembourg et Portugal) ou au 1er janvier 2017 (Lettonie, Lituanie, Pologne, ainsi que Bulgarie et Roumanie), pour respecter les nouveaux minima qui seraient prévus.

La durée de ces périodes doit être considérée avec vigilance, de manière à ne pas mettre en péril, notamment, les objectifs poursuivis par la Commission, tant celui de la suppression des distorsions de concurrence dans le domaine du transport routier, que celui de la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Toute demande d’allongement ne peut donc que susciter des réserves.

*

* *

M. Daniel Garrigue, rapporteur, a présenté ce document au cours de la réunion de la Délégation du 11 juillet 2007.

Suivant l’avis du rapporteur et sous le bénéfice des observations faites, la Délégation a approuvé la proposition d’acte communautaire, en l’état des informations dont elle dispose.