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Document E3636
(Mise à jour : 12 décembre 2009)


Proposition de règlement du Conseil portant dérogation au règlement (CE) n° 1782/2003 établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs, en ce qui concerne la mise en jachère pour l'année 2008.


E3636 déposé le 24 septembre 2007 distribué le 28 septembre 2007 (13ème législature)
   (Référence communautaire : COM(2007) 0523 final du 13 septembre 2007, transmis au Conseil de l'Union européenne le 13 septembre 2007)

La présente proposition de règlement ramène le taux obligatoire de mise en jachère des terres de 10 % à zéro pour l’année 2008. Compte tenu de la gravité de la situation et dans la mesure où les agriculteurs doivent prendre leurs décisions avant les semis de l’automne 2007, la Délégation pour l’Union européenne doit se prononcer en urgence.

I. Le contexte général : des stocks au plus bas ont provoqué une flambée des prix des céréales

Le marché des céréales connaît en ce début de campagne de commercialisation 2007/2008, un déséquilibre entre l’offre et la demande qui entraîne des prix exceptionnellement élevés. Ainsi, la tonne de blé français est passée de 175 euros début juillet à 295 euros début septembre ; elle s’échangeait à 105 euros un an plus tôt. Cette hausse s’explique par un faible niveau des stocks.

D’un hémisphère à l’autre, les résultats des campagnes céréalières sont mauvais. L’Australie, frappée par la sécheresse, a produit 10 millions de tonnes de blé contre 25 millions de tonnes en année normale ; au Canada, la production de blé devrait être de 20 % inférieure à la campagne précédente. Sur le marché international, les stocks de clôture de la campagne 2007/2008 devraient tomber à des niveaux historiquement bas.

Dans les Etats membres de l’Union européenne, la récolte de 2006 de céréales a été moins importante que prévu (266 millions de tonnes) , faisant fondre les stocks d’intervention qui sont passés de 14 millions de tonnes au début de la campagne 2006/2007 à 2,5 millions de tonnes début septembre, principalement constitués de maïs détenu en Hongrie. Les importations de céréales de l’Union européenne sont estimées à 12,4 millions de tonnes contre 10 millions de tonnes pour 2005/2006 et ses exportations à 19,1 millions de tonnes contre 24,9 millions de tonnes en 2005/2006. Les premières estimations de production pour 2007 n’offrent pas des perspectives de nature à rassurer le marché. La récolte s’annonce en effet médiocre après les inondations dans les pays du Nord de l’Europe et la sécheresse dans les pays du sud-Est, notamment en Roumanie et en Bulgarie. Son niveau sera au mieux égal à celui de l’année dernière, ce qui se traduira inévitablement par la poursuite de la réduction des stocks.

II. La suppression de l’obligation de jachère pour la campagne de commercialisation 2008 /2009 a pour objectif de rééquilibrer le marché

Dans ce contexte, l’Allemagne, la France et la Suède ont souhaité que l’Union européenne prenne une initiative afin de répondre aux préoccupations de la demande tant intérieure qu’extérieure en augmentant l’offre de céréales. A leur initiative, un point a été inscrit à l’ordre du jour du Conseil « Agriculture et pêche » du 16 juillet 2007 afin qu’au titre de la récolte 2008 (campagne de commercialisation 2008/2009), les terres soumises à l’obligation de gel puissent être utilisées pour la production d’un supplément de céréales.

Introduite à la fin des années 1980 pour limiter la production à une époque où les capacités de production céréalière dépassaient largement les débouchés, la jachère avait été fixée à partir de 1999/2000 et pour dix ans, à un taux obligatoire de 10 % de la surface en céréales et oléoprotéagineux. Elle représente aujourd’hui environ 3,8 millions d’hectares répartis dans les quinze anciens membres de l’Union européenne ( 1,2 million en France), plus Malte et la Slovénie (les nouveaux Etats membres qui ont opté pour le régime de paiement unique à la surface ne sont pas concernés).

En application de cette proposition de règlement, aucun agriculteur ne serait soumis, pour la campagne de commercialisation 2008/2009, à l’obligation de jachère prévue par l’article 54 du règlement (CE) n° 1782/2003 du Conseil du 29 septembre 2003. La fixation d’un taux nul n’obligera en aucune façon les agriculteurs à cultiver leurs terres qu’ils pourront continuer à maintenir en jachère. Cependant, afin de les inciter à utiliser cette possibilité, les agriculteurs pourront ensemencer leurs terres et en tirer des bénéfices de production sans que la partie liée à la jachère soit retirée du paiement unique.

Selon les estimations, la suppression de la jachère obligatoire devrait permettre de consacrer entre 1,6 et 2,9 millions d’hectares à la production agricole, correspondant à une production de 10 millions de tonnes de céréales supplémentaires. Cette mesure ne mettra certes pas fin à l’ensemble des tensions sur le marché des céréales. Ainsi, une récolte normale en 2008, marquée par des rendements tendanciels et accompagnée de la dérogation posée en matière de jachère permettra au mieux une reconstitution des stocks privés et les stocks de clôture de la campagne seront inférieurs aux stocks d’ouverture de la campagne actuelle. On imagine cependant la dégradation de la situation si la récolte était mauvaise en 2008 et si le taux de jachère obligatoire de 10 % était maintenu.

Toutefois, la suppression totale de l’obligation de mise en jachère pourrait provoquer des dégâts pour l’environnement (érosion des sols, perte de fertilité de la terre, dommages à la faune sauvage…). Il est donc opportun que cette mesure soit transitoire et qu’à l’occasion du bilan de santé de la politique agricole commune, le débat sur cette question soit lié à la prise en compte des questions environnementales.

Par ailleurs, il est largement souhaitable qu’une cohérence soit établie entre la gestion des politiques alimentaires et énergétiques sur le plan communautaire, les terres mises en jachère étant actuellement pour une part dédiées aux cultures industrielles pour la production de biocarburants (En France, sur 1,2 million hectares mis en jachère, 400 000 hectares y sont consacrés).

Sur le rapport de M. Jean Dionis du Séjour, la Délégation a approuvé cette proposition d’acte communautaire au cours de la réunion de la Délégation du 25 septembre 2007.