Document mis en distribution le 22 juin 1998
N° 992
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
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N° 510
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998
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Enregistré à la Présidence de lAssemblée nationale le 18 juin 1998
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Annexe au procès-verbal de la séance
du 18 juin 1998
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RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION MIXTE PARITAIRE (1) CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR les dispositions restant en du projet de loi dorientation relatif à la lutte contre les exclusions,
PAR M. Jean Le Garrec, PAR M. Bernard Seillier,
Député. Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : M. Georges Hage, président, député ; M. Jean-Pierre Fourcade, vice-président, sénateur ; M. Jean Le Garrec, député, M. Bernard Seillier, sénateur, rapporteurs.
Membres titulaires : Mme Véronique Neiertz, MM. Alain Cacheux, Patrick Devedjian, Denis Jacquat, Jean-Michel Marchand, députés ; MM. Gérard Braun, Claude Huriet, Paul Girod, Mme Dinah Derycke, M. Guy Fischer, sénateurs.
Membres suppléants : M. Alfred Recours, Mme Hélène Mignon, M. Daniel Marcovitch, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, MM. Gilbert Meyer, Pierre Cardo, François Goulard, députés ; MM. Alain Gournac, Paul Loridant, Jean-Louis Lorrain, Jacques Oudin, Philippe Richert, Alain Vasselle, André Vezinhet, sénateurs.
Voir les numéros :
Assemblée nationale : 1ère lecture : 780, 856 et TA 136
Sénat : 1ère lecture : 445, 450, 471, 472, 473, 478 et TA 154
Mesdames, Messieurs,
Conformément au deuxième alinéa de larticle 45 de la Constitution et à la demande de M. le Premier ministre, une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi dorientation relatif à la lutte contre les exclusions sest réunie le mercredi 17 juin 1998 à lAssemblée nationale.
La commission a dabord procédé à la nomination de son bureau qui a été ainsi constitué :
- M. Georges Hage, député, président ;
- M. Jean-Pierre Fourcade, sénateur, vice-président.
La commission a ensuite désigné :
- M. Jean Le Garrec, député, rapporteur pour lAssemblée nationale ;
- M. Bernard Seillier, sénateur, rapporteur pour le Sénat.
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La commission mixte paritaire a ensuite procédé à lexamen du texte.
M. Bernard Seillier, rapporteur pour le Sénat, a tout dabord observé quau cours de lexamen de ce texte par le Sénat, environ 300 amendements ont été adoptés, dont 240 présentés par les différentes commissions. Une cinquantaine damendements extérieurs, pour moitié de la majorité sénatoriale et pour moitié de lopposition sénatoriale, ont été également adoptés. Enfin, une dizaine damendements du Gouvernement ont été votés sans compter les rectifications quil a suggérées aux différents amendements et qui ont été acceptées par leurs auteurs.
En outre près des deux tiers des amendements adoptés par le Sénat ont reçu un avis favorable ou de sagesse du Gouvernement. Certes, a contrario, une centaine damendements - et parmi eux des amendements importants auxquels le Sénat est attaché - ont été adoptés contre lavis du Gouvernement ; mais ces quelques éléments chiffrés montrent le travail important qui a été réalisé et les nombreux points de convergence qui sont apparus. Cette situation na pas semblé étonnante au rapporteur, sachant que la lutte contre les exclusions est une préoccupation qui est commune à tous les parlementaires.
M. Bernard Seillier, rapporteur pour le Sénat, a indiqué quil présenterait pour chaque volet du texte, brièvement, sans être totalement exhaustif, les éléments qui, a priori, ne devraient pas poser de problèmes particuliers, avant dévoquer, plus en détail, les modifications qui semblent aller à lencontre de dispositions introduites par lAssemblée nationale en première lecture ou qui ont donné lieu à un avis défavorable du Gouvernement.
Sagissant, tout dabord, de larticle premier et du volet relatif à laccès à lemploi, le Sénat a apporté divers amendements qui devraient recueillir un relatif consensus. Il sagit tout dabord de la participation des organisations ayant spécifiquement pour objet linsertion des chômeurs au comité de liaison auprès de lAFPA et de lANPE. Il a été précisé que le point de vue des bénéficiaires des actions du programme TRACE serait pris en compte lorsque serait établi le bilan.
Le Sénat a approuvé linsertion par lAssemblée nationale de larticle 5 bis relatif à lintéressement au retour à lactivité professionnelle et a ajouté lallocation de veuvage à la liste des minima sociaux pouvant faire lobjet dun cumul en cas de reprise dune activité professionnelle et, dune manière générale, a précisé quil sagissait dune activité salariée ou non salariée.
En matière dinsertion par léconomique, il convient tout dabord de noter que le Sénat a largement approuvé les modifications apportées par lAssemblée à larticle 8 qui avait soulevé une certaine émotion dans la version initiale du projet de loi. Il a ajouté que le décret dapplication pourrait prévoir les modalités de suspension ou de résiliation des conventions passées avec lEtat. Le conseil départemental de linsertion par lactivité économique devrait être informé des modalités de rémunération des personnels permanents des entreprises dinsertion ou des associations intermédiaires. Enfin, le Sénat a écarté la mise en uvre de la clause dagrément des personnes mises à disposition par les associations intermédiaires, lorsquil sagit dune mise à disposition auprès dune personne physique.
Par ailleurs, il est à noter que des conventions pourront être passées avec les centres dhébergement et de réadaptation sociale (CHRS) dans le domaine de linsertion par lactivité économique.
Cela étant, il apparaît évidemment des points de divergence éventuels.
Dans le chapitre consacré à lemploi, le Sénat a supprimé larticle 2A qui prévoyait une obligation dinformation de ladministration sur lexécution des plans sociaux. Il a supprimé également le dispositif qui prévoyait une intervention obligatoire des fonds daide aux jeunes (FAJ) dans le cadre du programme TRACE.
Concernant les contrats emploi-solidarité (CES) et les contrats emploi consolidés (CEC), ces contrats ont été étendus aux chômeurs de plus de 50 ans et aux veuves titulaires de lallocation de veuvage et la sanction, qui pesait sur les communes en cas de non-renouvellement dun CES, sans offrir de formation au titulaire, a été supprimée
Le Sénat a invité les partenaires sociaux à négocier au sein de lUNEDIC lamélioration de la mise en oeuvre de lintéressement à la reprise dun emploi pour les titulaires de lallocation unique dégressive.
Il a souhaité un renforcement des aides à linsertion dans le secteur marchand, par un système dintéressement amélioré de deux ans pour les titulaires dun contrat initiative-emploi à mi-temps et par un allégement de charges sociales pour les embauches de personnes bénéficiant dun minimum social depuis plus de deux ans.
Concernant les associations intermédiaires, le Sénat a élargi la liste des organismes habilités à agréer les personnes mises à disposition et a supprimé ce qui semblait de nature à alourdir excessivement les contraintes qui pèsent sur les entreprises qui ont recours aux services des associations intermédiaires.
A linitiative de M. Alain Vasselle, le Sénat a voté un dispositif prévoyant la consultation du président du centre communal daction sociale préalablement à loctroi du RMI. Enfin, larticle 15 qui concerne les contrats daccès à lemploi dans les départements doutre-mer a été supprimé.
Concernant le volet portant sur laccès au logement, certains apports du Sénat devraient vraisemblablement ne pas soulever dobjections de la part de lAssemblée nationale. Il sagit notamment de la représentation des associations daide aux personnes en situation dexclusion par le logement, au niveau du comité délaboration du plan départemental daction en faveur du logement des personnes défavorisées, de la conférence régionale du logement social en Ile-de-France et de la conférence intercommunale du logement.
Le Sénat a prévu la participation des maires des cinq villes comptant le plus de logements sociaux à la section de la conférence régionale du logement chargée de la coordination des plans départementaux en Ile-de-France.
Le Sénat a adopté un amendement qui permet de mieux préciser les conditions dans lesquelles seront organisées les élections des organisations de locataires au sein du secteur locatif social.
Sagissant des critères de priorité, retenus pour lattribution dun logement dans les plans départementaux, le Sénat a accepté la possibilité de faire référence à létat de santé.
Le champ de la médiation locative a été, à linitiative de la commission des affaires économiques, élargi aux actions individuelles ou collectives daide à la recherche dun logement.
Sagissant de lobligation de réalisation daires de parking en cas de transformation ou damélioration de logements HLM, le Sénat a prévu léventualité de la création de surfaces hors oeuvre nette dans la limite dun plafond fixé par décret.
Sur le plan fiscal, il a été voté une exonération dimpôt sur le revenu représentée par la valeur des travaux réalisés par le preneur à bail dun logement et le bénéfice de lexonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties a été étendu aux logements loués par bail emphytéotique ou par bail à construction.
Concernant le dispositif dattribution des logements sociaux, dont le Sénat na pas bouleversé la structure, il a été prévu une possibilité pour le conseil général de déléguer un représentant aux travaux de la conférence intercommunale du logement (CIL), ainsi quune évaluation par cette dernière de létat de la vacance dans le parc des logements locatifs sociaux. Les représentants des collectivités locales devraient seuls avoir voix délibérative pour ladoption de la charte intercommunale du logement.
Certaines dispositions, en revanche, devraient certainement donner lieu à discussion.
Le Sénat est revenu sur le principe de la motivation des décisions de refus dattribution des aides du fonds de solidarité pour le logement (FSL). Il a supprimé la fixation par décret des règles de fonctionnement ainsi que des modalités dintervention de celui-ci.
Dune manière générale, il a transformé en dégrèvement les exonérations de taxe locale prévues par le projet de loi dans le domaine du logement social et a supprimé la dérogation au versement pour dépassement du coefficient doccupation des sols prévue à larticle 28.
Il a refusé le principe de la dissociation entre la location du logement et celle de laire de stationnement dans le parc locatif social.
Diverses modifications ont été apportées à linitiative de la commission des lois au régime de la réquisition avec attributaire : la durée de la vacance a été portée de 18 mois à deux ans ; une dérogation a été prévue pour les immeubles appartenant à des sociétés civiles entre parents et alliés ; lévocation dun motif légitime et sérieux na pas été acceptée sagissant du refus du bénéficiaire de la réquisition de quitter le logement lorsquil lui est proposé un contrat de location ou un relogement. Enfin, le Sénat a souhaité que le dispositif de la réquisition soit prévu pour cinq ans, le Parlement étant libre ou non de proroger le dispositif au-delà de cette limite.
En matière dattribution de logements sociaux, le Sénat a apporté plusieurs améliorations pour mieux garantir les droits des communes : il est revenu à la définition du seuil des logements sociaux qui avait été prévu dans le projet de loi initial pour déclencher la création de la conférence intercommunale du logement ; les préfets sont appelés à mieux respecter la volonté des communes lors de la délimitation des bassins dhabitat ; la possibilité de créer une conférence communale du logement a été ouverte ; enfin, le Sénat a supprimé lobligation de motivation par écrit du refus dattribution de logements sociaux.
Enfin, deux types de dispositions revêtent aux yeux du Sénat un caractère particulièrement important.
Le Sénat a supprimé la taxe sur les logements vacants dans les agglomérations de plus de 200.000 habitants et lui a substitué un dispositif fiscal incitatif à la remise sur le marché des logements non occupés. Par ailleurs, le Sénat na pas accepté la remise en cause de léquilibre auquel était parvenue la loi du 21 janvier 1995, dite loi Carrez, en matière dobligation de construction de logements sociaux.
Sagissant du volet relatif à laccès aux soins, le Sénat a institué dans la loi le principe de la mise en oeuvre de lassurance maladie universelle au 1er janvier 1999. Il a demandé quune visite médicale soit organisée tous les ans au profit des élèves des écoles, des collèges et des lycées situés dans des zones où le recours aux soins est insuffisant. Mais surtout il a prévu le transfert de compétences des départements à lEtat de lensemble des questions relatives à la prévention sanitaire, hors la protection maternelle et infantile.
Concernant laccès à la citoyenneté, le Sénat a adopté une nouvelle rédaction pour lexonération de timbre fiscal lors de la délivrance dune carte nationale didentité dune personne démunie.
Par ailleurs, il a souhaité, à la demande de la commission des lois, quapparaisse le nom de lorganisme daccueil de la personne sans domicile fixe sur les listes électorales, afin que puissent jouer les dispositions du code électoral prévues pour les électeurs forains.
En ce qui concerne le volet relatif au surendettement, le Sénat a adopté, à linitiative du travail coordonné de sa commission des Finances et de sa commission des Lois, un grand nombre damendements qui ont reçu lavis favorable du Gouvernement. Par ailleurs, il a notamment prévu que ne seraient pas prises en compte, dans les plans moratoires, les dettes fiscales, parafiscales et de sécurité sociale. Il a souhaité que la référence au montant du RMI soit supprimée dans la définition du reste à vivre , la garantie dun minimum de ressources insaisissables équivalant au montant du RMI risquant de constituer une incitation au surendettement.
Concernant la saisie immobilière, le Sénat est revenu sur la remise en cause du mécanisme dadjudication sur baisses successives en labsence denchères sur la mise à prix fixée par le juge instauré par la loi du 23 janvier 1998. Il a adopté des dispositions plus rigoureuses pour la détermination des délais de procédure en matière dexpulsion.
Sagissant du droit au compte bancaire, le Sénat na pas souhaité que puissent être fixés par décret les tarifs des services bancaires de base. En matière déducation, outre plusieurs amendements destinés à apporter dutiles précisions, le Sénat a souhaité le maintien du régime de laide à la scolarité qui avait été institué dans le cadre de la loi du 25 juillet 1994 relative à la famille et a supprimé, en conséquence, le retour au régime des bourses denseignement scolaire prévu aux articles 76 et 77.
Enfin, le Sénat na pas été convaincu par le nouveau dispositif institutionnel introduit aux articles 80 bis, 80 ter et 80 quater quil a largement amendé tout en refusant la mise en place du comité départemental de coordination dont lutilité ne lui a pas semblé évidente.
Le texte issu du Sénat comprend, en outre, diverses dispositions supplémentaires parmi lesquelles peuvent être cités en premier lieu le nouveau dispositif relatif à la prestation spécifique dépendance ainsi que celui relatif aux retraites du régime agricole. Au-delà de ces dispositions qui devraient recueillir une large approbation, il convient également de souligner linsertion du contenu de la proposition de loi du sénateur Jean Delaneau, visant à assouplir les conditions dutilisation des crédits départementaux dinsertion. Par ailleurs, à la demande des sénateurs doutre-mer, le Sénat a souhaité que soit significativement amélioré le fonctionnement des agences départementales dinsertion afin que celles-ci soient gérées de manière plus décentralisée.
Enfin, le Sénat a repris le texte de la proposition de loi relative aux gens du voyage quil avait adopté en octobre dernier.
En conclusion, M. Bernard Seillier, rapporteur pour le Sénat, a observé que le vote favorable du groupe socialiste sur le texte amendé par le Sénat, ainsi que labstention du groupe communiste, républicain et citoyen pouvaient être le gage de la réussite de cette commission mixte paritaire dont le Sénat souhaite ardemment le succès, car il y a plus matière à se rassembler quà se diviser pour lutter contre lexclusion.
M. Jean Le Garrec, rapporteur pour lAssemblée nationale, a souligné la qualité du travail accompli à lAssemblée nationale comme au Sénat, ce sérieux constituant incontestablement un gage de lamélioration du texte et donc du succès de son application.
Le Sénat a amélioré le projet sur de nombreux points. Ainsi en est-il de la réintroduction des demandeurs demploi âgés de plus de cinquante ans et des veuves bénéficiaires de lallocation veuvage dans le champ dapplication des CES et des CEC, de la possibilité de cumuler lallocation de veuvage avec les revenus tirés dune activité professionnelle et de la possibilité de prolonger exceptionnellement la durée de laccompagnement personnalisé dun jeune au-delà de dix-huit mois dans le cadre dun trajet daccès à lemploi (TRACE).
Sagissant du logement, il faut souligner que larticle 33 quinquies empêchant la présentation aux élections dans les organes de gestion des organismes HLM de listes inspirées par des objectifs en contradiction avec la politique du logement social constitue un apport très important.
Il en va de même, sagissant du surendettement, de lintroduction à larticle 47 de la possibilité pour les commissions de surendettement de prévoir un report du paiement dune partie des dettes.
Enfin, il convient de citer au titre de ces aspects positifs le fait davoir accepté de doter les centres dhygiène alimentaire et dalcoologie (CHAA) dun statut juridique, les dispositions sur la médecine scolaire et la possibilité pour les chargés denseignement dans les universités de continuer à y exercer leurs fonctions pendant un an sils perdent leur emploi.
Toutefois, des points de désaccord particulièrement importants subsistent entre les deux assemblées.
Le désaccord le plus prononcé porte sur le volet logement. En effet, le Sénat a supprimé larticle 30 instaurant la taxe sur les logements vacants, larticle 34 bis sur la définition du logement social et larticle 34 ter qui fixe les seuils de population à partir desquels les mécanismes contraignants de la loi dorientation sur la ville sont applicables. Le Sénat a en outre inséré dans le texte des dispositions sur les gens du voyage alors que lAssemblée nationale avait décidé de ne pas en traiter dans le cadre de ce projet. En outre, à larticle 33, pour toutes les dispositions liées au mécanisme des bassins dhabitat, une position très défavorable à lintercommunalité a prévalu. Le Sénat a également supprimé larticle 28 bis interdisant de lier la location dun parking à celle dun logement et, à larticle 19, lobligation de motivation des décisions de refus des FSL.
Sagissant du surendettement, un désaccord de fond existe quant aux modalités de calcul du reste à vivre et à luniformité de cette référence sur le territoire, quant au plafonnement des taux dintérêts dans le cadre des recommandations et quant aux pouvoirs du juge en cas de contestation.
Sagissant de lemploi, deux modifications du Sénat sur les associations intermédiaires apparaissent inacceptables : la suppression du principe selon lequel la rémunération de la personne mise à disposition dune entreprise ne saurait être inférieure à celle dun salarié de cette entreprise occupant le même poste et le fait que le Sénat ait prévu, en cas de dépassement de la durée de mise à disposition, une sanction qui frappe lassociation intermédiaire au lieu de lentreprise utilisatrice. En outre, le principe selon lequel lattribution du RMI doit être précédée de lavis du maire apparaît comme un très lourd différend entre les deux assemblées. On peut également regretter que le Sénat ait supprimé la possibilité pour les jeunes daccéder aux aides du fonds daide aux jeunes (FAJ) pendant les périodes où ils ne sont pas en stage de formation ou salariés.
Enfin le Sénat a supprimé les articles 76 et 77, remplaçant laide à la scolarité par le système des bourses de collèges et a prévu une mention spéciale de labsence de domicile fixe sur les listes électorales, ce qui apparaît contraire à légalité de suffrage.
Il faut cependant insister sur le caractère très positif du travail parlementaire accompli en dépit des contraintes de temps que lordre du jour impose. Lhonnêteté intellectuelle conduit à constater de nombreuses améliorations de la part du Sénat et des convergences importantes. Pour autant, il semble que les divergences rendent difficile la possibilité pour la commission mixte paritaire de parvenir à un accord.
M. Jean-Pierre Fourcade, vice-président, a remercié M. Jean Le Garrec pour lobjectivité de son intervention. Puis il a rappelé que le projet de loi était un texte difficile couvrant de nombreux sujets qui auraient pu faire lobjet de plusieurs projets de loi. Chaque assemblée a apporté une contribution importante à lamélioration du dispositif initial, et la complémentarité des apports nexclue pas certaines divergences qui relèvent les unes du symbole, élément important en politique, les autres, dune réelle différence dappréciation. Les interventions des deux rapporteurs permettant denvisager un accord, il convient daborder dans un premier temps les points difficiles pour lesquels une solution est le préalable nécessaire à la concrétisation de cette perspective : la taxe sur les logements vacants, le lien entre le logement et le parking pour les locaux mis en location, la consultation du maire sur loctroi du RMI, les bourses détudes, la saisie immobilière, entre autres.
Sagissant de lemploi, il ny a pas beaucoup de dispositions sur lesquelles un accord ne serait pas possible, sous réserve de quelques ajustements. Il en va de même des dispositions relatives à la citoyenneté et à la santé.
On ne peut manquer dobserver, pour conclure, quen labsence de déclaration durgence, lamélioration du projet de loi en deuxième lecture dans chacune des Assemblées aurait probablement pu permettre un accord en commission mixte paritaire. En outre il est clair, quen cas déchec de celle-ci, la reprise par lAssemblée nationale du plus grand nombre possible des apports du Sénat facilitera laboutissement de la procédure dans les délais impartis par le Gouvernement.
M. Georges Hage, président, a indiqué quil aurait lui-même proposé la même méthode de travail, si M. Jean-Pierre Fourcade, fort de son expérience, ne lavait pas devancé.
M. Paul Girod a rappelé que le souci constant de la commission des lois du Sénat avait été daméliorer la qualité de la rédaction juridique de certaines dispositions. Sagissant du surendettement, de la saisie immobilière et de la réquisition, certains amendements du Sénat sont motivés par le souci de ne pas créer de dispositifs susceptibles davoir des effets pervers pouvant se retourner contre les bénéficiaires.
Mme Véronique Neiertz, sans remettre en cause les points daccord relevés par M. Jean Le Garrec, a indiqué quelle avait cependant beaucoup de difficulté à reconnaître le texte adopté par lAssemblée nationale concernant le surendettement dans la version revenue du Sénat. Sur plusieurs points importants, comme le reste à vivre, les dettes fiscales, les droits du débiteur, les mesures de prévention ou encore le taux dintérêt légal, les positions des deux assemblées sont très éloignées et il est exclu de revenir sur les résultats obtenus après un travail très important, à lissue de la première lecture à lAssemblée nationale.
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La commission mixte paritaire est ensuite passée à lexamen des articles restant en discussion.
M. Georges Hage, président, ayant constaté laccord de la commission sur la nécessité dentamer la discussion par les points de désaccord les plus importants, a proposé daborder larticle 30 créant une taxe sur les logements vacants.
M. Bernard Seillier, rapporteur pour le Sénat, a énuméré les principales raisons de lopposition du Sénat au dispositif prévu par cet article : un champ dapplication exclusivement centré sur le parc privé, une méconnaissance des causes réelles de la vacance qui est le plus souvent subie, et un mécanisme instaurant des formalités administratives à la fois contraignantes et incertaines pour les propriétaires quand il sagira pour eux dapporter la preuve que la vacance est indépendante de leur volonté. En outre lexclusion du parc locatif social risque de créer une inégalité devant les charges publiques.
M. Gérard Braun a tout dabord souligné que la suppression de cet article avait été demandée par lensemble des commissions concernées au Sénat. Outre le problème lié à lexclusion du parc HLM, il suscitera des difficultés dapplication en particulier parce que la notion de vacance indépendante de la volonté des propriétaires qui est particulièrement floue, laisse une part excessive à larbitraire de ladministration fiscale et ne manquera pas dêtre à lorigine dun abondant contentieux.
Ces dispositions vont toucher de nombreux petits propriétaires, qui seront les plus gênés, et sont donc de nature à fragiliser le marché de limmobilier. Larticle 30, dans la version retenue par lAssemblée nationale, apparaît à la fois inadapté et inapplicable. Concluant son propos, M. Gérard Braun a fait part de son intention davancer une proposition susceptible de rapprocher le point de vue des deux assemblées.
M. Alain Cacheux a indiqué quavant dentrer dans le débat technique sur cet article, il convenait de rappeler les éléments de fait qui le justifiaient. Il ne faudrait en effet pas oublier que notre pays compte à la fois plusieurs centaines de milliers de personnes mal logées et environ deux millions de logements vacants, dont 400 000 pourraient être remis sur le marché. Cest cette réalité, dont le caractère anormal ne peut échapper à personne, qui explique larticle 30. Ce dernier nest en rien inspiré par la volonté de maltraiter fiscalement les propriétaires privés, il vise tout simplement à envoyer aux propriétaires négligents un signe fort afin de les inciter à remettre sur le marché des logements quils laissent volontairement vacants. Seuls sont en effet visés les propriétaires négligents. Les autres échapperont à la taxation puisque les vacances subies, pour reprendre une expression souvent utilisée, sont expressément exclues du champ dapplication de ces dispositions. Ce dernier nest pas excessivement étendu puisque seuls sont concernés les logements situés dans des agglomérations de plus de 200 000 habitants où existent des déséquilibres marqués entre loffre et la demande au détriment des personnes défavorisées.
Le champ dapplication de cet article est donc dores et déjà restreint et dailleurs, un certain nombre de députés ont proposé de létendre lors de la première lecture. Si le but recherché avait été véritablement la pénalisation financière des propriétaires, cest une autre solution qui aurait été retenue : la suppression de lexonération de taxe dhabitation pour les logements vacants. En outre, laffirmation selon laquelle ces dispositions généreraient des formalités administratives insupportables sont contestables car ces dernières seront équivalentes à celles qui sont aujourdhui nécessaires pour obtenir lexonération de taxe dhabitation en cas de vacance dun logement. Enfin, lexonération des logements locatifs sociaux, se justifie par la nécessité de rendre compatibles deux objectifs a priori contradictoires, à savoir louverture du parc social aux plus démunis et à la mixité sociale de ce dernier. Or, les logements HLM inoccupés sont en majorité situés dans des quartiers difficiles dans lesquels une forte diminution de la vacance, signifierait inévitablement un renforcement de la ghettoïsation .
En fin de compte, le champ dapplication de larticle 30 est défini de manière suffisamment limitée et correspond à un point déquilibre sur lequel il serait inopportun de revenir.
M. Gérard Braun a convenu quil était normal de taxer les propriétaires qui laissaient volontairement des logements vacants. Mais en réalité, larticle 30 va bien au-delà de cet objectif. Une étude récente, parue dans les Cahiers de lhabitat, démontre que 62 % des propriétaires privés représentant moins de 30 % du parc locatif privé ne disposent que dun seul logement locatif. Ces petits propriétaires, souvent âgés, quelquefois en poste à létranger, seront les plus pénalisés par la taxe sur la vacance et seront ceux qui auront le plus de difficulté à prouver que la vacance de leur logement est indépendante de leur volonté.
M. Gérard Braun a donc proposé, dans un souci de compromis et afin déviter de pénaliser et dinquiéter des gens modestes, tout en allégeant la charge de travail de ladministration fiscale, dexclure du champ dapplication de larticle 30 les propriétaires ne disposant que dun seul logement locatif.
M. Jacques Oudin a estimé que le versement du produit de la taxe à lAgence nationale pour lamélioration de lhabitat (ANAH) était en contradiction avec le principe de non-affectation prévu par larticle 18 de lordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances et indiqué quavant de se prononcer sur larticle, le cas échéant amendé comme la proposé M. Gérard Braun, il convenait de le modifier afin de supprimer cette contradiction.
M. Alain Cacheux a estimé que la proposition de M. Gérard Braun était inacceptable puisquelle entraînerait une réduction de 30 % du nombre de logements auxquels la taxe serait susceptible dêtre appliquée. Or, il faut rappeler que le champ dapplication de la taxe prévu par le projet de loi initial est déjà fortement limité par les conditions qui sont fixées concernant notamment les zones visées. En première lecture, de nombreux députés avaient dailleurs souhaité étendre le champ dapplication de la taxe. En outre, le rétablissement de larticle 30 voté par lAssemblée nationale aurait une visée pédagogique et permettrait dinciter les petits propriétaires de logements à maintenir en bon état leur patrimoine.
M. Gérard Braun a rappelé que le texte voté par lAssemblée nationale, en prévoyant une exception pour les logements sociaux, excluait du champ dapplication de la taxe près de 62 % du parc des logements et que la proposition quil avait présentée réduirait seulement de 30 % le nombre de propriétaires susceptibles dêtre concernés par la taxe.
M. Jean-Pierre Fourcade, vice-président, a estimé quil nétait pas raisonnable de maintenir les propriétaires dun seul logement dans le champ dapplication de la taxe. Il a observé que la taxe serait applicable à toutes les communes de lagglomération parisienne, sans exception. Il a regretté que lAssemblée nationale ne fasse preuve de la même bonne volonté que le Sénat pour tenter de trouver une solution de compromis.
M. Jean Le Garrec, rapporteur pour lAssemblée nationale, a indiqué que le principe du versement de la taxe à lANAH était en conformité avec lordonnance du 2 janvier 1959 précitée, comme la dailleurs confirmé une décision du Conseil constitutionnel du 16 janvier 1982. Le rôle de la commission mixte paritaire est, plutôt que de trouver un compromis, de dégager des points daccord ce qui est, en loccurrence, difficile compte tenu des positions adoptées par lAssemblée nationale après des débats très longs et approfondis sur les différents volets du projet de loi concernant lemploi, le logement et le surendettement.
En ce qui concerne la taxe sur les logements vacants, il faut rappeler la préférence exprimée par lAssemblée nationale en séance publique était détendre le champ dapplication de la taxe plutôt que de la restreindre, comme le Sénat le propose. En tout état de cause, si les deux assemblées ne peuvent trouver un accord sur ce point, il est évident que, comme la souhaité le président Jean-Pierre Fourcade, lAssemblée nationale prendra en compte les améliorations apportées au texte par le Sénat.
M. Paul Girod, citant lexemple des Français qui laissent leur logement inoccupé pendant quils sont en poste à létranger, a estimé que tous les propriétaires de logements vacants nétaient pas forcément négligents. Il a, en outre, rappelé quil existait une réglementation qui permet de faire face aux problèmes dabandon dimmeubles, dimmeubles insalubres ou menaçant ruines. Par ailleurs, en ce qui concerne les articles relatifs au surendettement, il a tenu à souligner que la quasi-totalité des amendements votés par le Sénat avaient reçu laccord du Gouvernement.
Mme Véronique Neiertz a signalé que le Gouvernement avait également approuvé les amendements adoptés, sur ce chapitre, par lAssemblée nationale.
M. Alfred Recours a estimé que la commission mixte paritaire devait délibérer en toute indépendance à légard des positions du Gouvernement et que le dispositif proposé par le Sénat sur larticle 30 vidait complètement la taxation des logements vacants de sa substance.
M. Guy Fischer a précisé les raisons pour lesquelles le groupe communiste, républicain et citoyen du Sénat sétait abstenu lors du vote sur lensemble du projet de loi. Laccord sur les objectifs principaux du texte adopté par lAssemblée nationale a dû être tempéré compte tenu de la suppression par le Sénat darticles particulièrement importants, notamment les articles 2 A, 30, 34 bis, 34 ter, 76 et 77, et de ladoption damendements bouleversant léconomie initiale du projet. Cest le cas notamment en matière dattribution des aides du FSL, de la définition du reste à vivre dans le cadre de la procédure du surendettement et de lexonération de charges sociales pour lembauche de bénéficiaires de minima sociaux.
M. Bernard Seillier, rapporteur pour le Sénat, a exprimé sa déception au vu du refus catégorique du rapporteur pour lAssemblée nationale daccepter la proposition de repli présenté par M. Gérard Braun. Il a souligné que le Sénat navait pas souhaité faire preuve dun a priori idéologique à lencontre du dispositif mais sétait montré soucieux de proposer des mesures facilitant le retour sur le marché des logements vacants sans pour autant porter atteinte au droit de personnes disposant dun logement qui préparent leur retraite ou qui sont à létranger. Il lui a semblé possible de raisonner par analogie avec la situation de défaut dautorité parentale : il ne sagit pas dans ce cas de sanctionner les parents par la suppression des allocations familiales mais davoir une démarche incitative à leur égard pour les motiver.
M. Jean-Pierre Fourcade, vice-président, a émis des doutes sur le nombre véritable de logements vacants. En effet, les évaluations réalisées par lINSEE sur ce sujet lui sont apparues peu fiables et le chiffre de deux millions de logements vacants lui a semblé relever davantage du mythe que de la réalité. Il a estimé quil fallait donc sattendre à un rétrécissement de lassiette lors des prochains recensements.
M. Alain Cacheux a précisé quil existait effectivement des éléments dincertitude sur de tels recensements mais que dautres sources que lINSEE, par exemple le Haut comité pour le logement des personnes défavorisées, donnaient des chiffres similaires. En tout état de cause, les petits propriétaires nont aucune inquiétude à avoir car ils ne seront pas touchés par la taxe, étant donné quils ont intérêt à louer pour disposer dun complément de ressources.
Lorsque un nombre si important de personnes vivent dans des conditions de logement très défavorables, il est tout à fait légitime de vouloir taxer les propriétaires négligents. Mais lobjectif final demeure bien que la taxe nait quun rapport réduit, sinon cela signifierait quil reste beaucoup trop de logements hors du marché. Il faut également souligner que le dispositif incitatif proposé par le Sénat devrait coûter plus dun milliard de francs par an.
M. Jean Le Garrec, rapporteur pour lAssemblée nationale, a indiqué que la majorité de lAssemblée navait jamais considéré que le débat sur la taxe sur les logements vacants avait un caractère idéologique mais quelle avait décidé dadopter cette mesure dans un souci defficacité en tenant compte du fait que le problème du logement était, après celui du chômage, la seconde grande préoccupation des Français.
M. Jean-Michel Marchand, après avoir rappelé quil avait à la fois souhaité étendre lassiette géographique de la taxe et présenter un amendement analogue à celui proposé par le rapporteur du Sénat, a indiqué quil y avait renoncé, dans la mesure où il avait été convaincu par les arguments montrant que de nombreux petits propriétaires seraient, en tout état de cause, exonérés du paiement de la taxe.
Le texte adopté par lAssemblée nationale constitue donc un dispositif équilibré qui doit rester en létat, étant rappelé que les promoteurs de la taxe d inhabitation souhaitent quelle rapporte peu, ce qui démontrerait son efficacité.
M. Alain Vasselle a estimé que le fait de reconnaître, comme lavait fait M. Alain Cacheux, que les petits propriétaires cherchaient par tous les moyens à louer leur logement vacant, montrait que seuls seraient taxés ceux qui nont pas réussi à louer pour des raisons indépendantes de leur volonté, ce qui justifie lamendement proposé par M. Gérard Braun.
Par sept voix contre sept, la commission mixte paritaire a rejeté lamendement de M. Gérard Braun, visant à exclure du champ dapplication de larticle 30 les propriétaires ne disposant que dun seul logement locatif.
Elle a ensuite rejeté larticle 30, par sept voix contre sept.
M. Georges Hage, président, a alors constaté que la commission mixte paritaire nétait pas en mesure dadopter un texte commun sur les dispositions restant en discussion du projet de loi dorientation relatif à la lutte contre les exclusions.
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N° 992. Rapport de M. Jean Le Garrec, au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi dorientation relatif à la lutte contre les exclusions.
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