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![]() N° 997 ______ ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 ONZIÈME LÉGISLATURE Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 18 juin 1998. AVIS PRÉSENTÉ AU NOM DE LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES (1) , SUR LE PROJET DE LOI (n° 587), portant règlement définitif du budget de 1996, PAR M. François LAMY, Député. (1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page. Voir les numéros : 587, 934. Lois de règlement. La commission de la défense nationale et des forces armées est composée de : M. Paul Quilès, président ; MM. Didier Boulaud, Arthur Paecht, Jean-Claude Sandrier, vice-présidents ; MM. Robert Gaïa, Pierre Lellouche, Mme Martine Lignières-Cassou, secrétaires ; MM. Jean-Marc Ayrault, Jacques Baumel, François Bayrou, Jean-Louis Bernard, André Berthol, Jean-Yves Besselat, Eric Besson, Bernard Birsinger, Jean-Marie Bockel, Loïc Bouvard, Jean-Pierre Braine, Philippe Briand, Jean Briane, Antoine Carré, Bernard Cazeneuve, Gérard Charasse, Hervé de Charette, Guy-Michel Chauveau, Alain Clary, Charles Cova, Michel Dasseux, Jean-Louis Debré, François Deluga, Claude Desbons, Jean-Pierre Dupont, François Fillon, Christian Franqueville, Roger Franzoni, Yann Galut, René Galy-Dejean, Roland Garrigues, Henri de Gastines, Bernard Grasset, François Hollande, François Huwart, Jean-Noël Kerdraon, François Lamy, Pierre-Claude Lanfranca, Jean-Yves Le Drian, Georges Lemoine, François Liberti, Jean-Pierre Marché, Franck Marlin, Jean Marsaudon, Christian Martin, Marius Masse, Gilbert Meyer, Michel Meylan, Jean Michel, Charles Miossec, Alain Moyne-Bressand, Jacques Peyrat, Robert Poujade, Gilles de Robien, Michel Sainte-Marie, Bernard Seux, Guy Teissier, André Vauchez, Jean-Claude Viollet, Michel Voisin, Pierre-André Wiltzer, Kofi Yamgnane. S O M M A I R E Pages INTRODUCTION 5 I. LEXÉCUTION DU BUDGET DE LA DÉFENSE EN 1996 : UN BUDGET SOUS CONTRAINTE 7 A. LA CONTRAINTE DE TRÉSORERIE : LES EFFETS DE LA GESTION 19957 1. Des reports de charges massifs 7 2. Un phénomène préoccupant : la hausse continue des intérêts moratoires 9 B. LES CONTRAINTES DE LA POLITIQUE BUDGÉTAIRE 12 1. La régulation budgétaire 12 2. La loi de programmation 1997-2002 16 II. LE FINANCEMENT DE LA DÉFENSE EN 1996 : UN BUDGET DE TRANSITION 17 A. LÉVOLUTION SANS PERSPECTIVE DES DÉPENSES MILITAIRES 18 1. Laugmentation des dépenses militaires 18 2. Dépenses ordinaires et dépenses en capital : des logiques dévolution divergentes 19 a) Les dépenses du titre III : une augmentation régulière et prévisible 19 b) Laugmentation des dépenses en capital 22 B. LES MOUVEMENTS DE CRÉDITS 23 1. Les modifications législatives 24 2. Les modifications réglementaires 27 a) Les modifications du montant des crédits 27 b) Les modifications de la répartition des crédits 32 III. LES AJUSTEMENTS DE CRÉDITS PROPOSÉS PAR LE PROJET DE LOI DE RÈGLEMENT 33 CONCLUSION 35 EXAMEN EN COMMISSION 37 Mesdames, Messieurs, La loi de finances initiale pour 1996 prévoyait par rapport à celle de lannée précédente une baisse du budget de la Défense de 2,4 %, hors pensions, et plus particulièrement, une diminution des crédits déquipement de 6,4 %. Le projet de loi de règlement pour 1996 fixe, quant à lui, un montant total des crédits militaires supérieur de 3 % à celui de lexercice précédent, les dépenses déquipement enregistrant une hausse de 4,4 %. Ce constat témoigne à la fois dun dérèglement de la prévision budgétaire et de lextrême complexité des procédures de gestion des crédits déquipement. Il traduit également les limites de lannualité budgétaire quand sont en jeu des crédits portant sur des programmes de long terme. * Lexercice 1996 sest trouvé pour une large part contraint par les conséquences de la gestion 1995, que daucuns considèrent comme catastrophique. Il a, en effet, au titre de lexercice précédent, hérité de charges très importantes, qui se sont notamment traduites par le paiement dintérêts moratoires à un niveau jusqualors inédit. Nul besoin, à cet égard, de souligner les effets désastreux de ce phénomène sur les petites et moyennes entreprises de larmement et, conséquemment, sur lemploi. La contrainte exercée par lhéritage de lexercice précédent a été dautant plus lourde quelle a été amplifiée par la forte régulation budgétaire qua subie le budget de la Défense en 1996. Les annulations de crédits ont, notamment, suscité de nouveaux retards de paiement et, par un enchaînement devenu classique, lalourdissement des intérêts moratoires. Sest ajoutée enfin la nécessité de ne pas compromettre dentrée de jeu la nouvelle loi de programmation 1997-2002 qui a contraint les gestionnaires publics à apurer autant que possible les effets des gestions précédentes. * Budget sous contrainte, le budget de la Défense pour 1996, qui nentrait dans aucun cadre pluriannuel, na donc pu être quun budget de transition, sans perspective autre que la pression exercée par la nouvelle programmation. I. LEXÉCUTION DU BUDGET DE LA DÉFENSE EN 1996 : UN BUDGET SOUS CONTRAINTE Lanalyse de lexécution du budget de la Défense en 1996 ne peut faire léconomie dune réflexion plus large sur le contexte dans lequel elle sest déroulée. Au-delà de la contrainte budgétaire qui sest traduite par une politique extrêmement rigoureuse, pour tous les départements ministériels dailleurs, le ministère de la Défense a subi des contraintes tout à fait spécifiques, héritées des gestions précédentes pour certaines, issues des perspectives davenir pour dautres. A. LA CONTRAINTE DE TRÉSORERIE : LES EFFETS DE LA GESTION 1995 En 1996, le ministère de la Défense sest trouvé confronté à de graves difficultés de trésorerie, héritées du caractère particulièrement chaotique de la gestion précédente. Si la forte régulation quil a subie simultanément participe également de ces difficultés financières, force est de reconnaître que les effets de la gestion 1995 ont pesé de tout leur poids dans lexécution du budget de la Défense au cours de lexercice 1996, comme en témoigne notamment le profil atypique de lévolution des dépenses en capital au premier semestre. Laugmentation des reports de charges et la croissance des intérêts moratoires, phénomènes qui entretiennent un lien étroit entre eux, constituent les symptômes de cette gestion financière en difficulté. 1. Des reports de charges massifs A la différence des reports de crédits, définis à larticle 17 de lordonnance organique du 2 janvier 1959, les reports de charges nont pas de fondement juridique : la notion elle-même de report de charges entre dailleurs en contradiction avec larticle 16 de cette ordonnance, dont le troisième alinéa dispose que les dépenses sont prises en compte au titre du budget de lannée au cours de laquelle les ordonnances ou mandats sont visés par les comptables assignataires ; elles doivent être payées sur les crédits de ladite année, quelle que soit la date de la créance . Comme lindique la Cour des comptes en réponse à la Commission des Finances de lAssemblée nationale1, la notion de reports de charges peut -doit, selon la direction du Budget- être récusée au regard des principes généraux de la comptabilité publique de lÉtat, qui est une comptabilité de décaissements et dencaissements, et non de droits constatés. Cependant, la Cour des comptes relève que dun point de vue économique et patrimonial, les reports de charges en fin de gestion constituent une donnée pertinente . Lanalyse des reports de charges, qui ont atteint en 1996 des niveaux jusqualors inédits, se révèle donc nécessaire, dautant plus quils se traduisent pour le ministère de la Défense et ses partenaires industriels par des conséquences pratiques tout à fait importantes. La notion ne se laisse pas facilement appréhender. Elle pose un premier problème, dordre méthodologique, qui tient à sa définition. Les reports de charges peuvent être définis comme le montant des dettes impayées au 1er janvier 1996. En termes juridiques, ils correspondent à des mandatements qui auraient dû être imputés sur les crédits dune gestion donnée et qui ne lont été que sur ceux de la gestion suivante. Il sagit là dune interversion dexercice. Équivalents à 12 milliards de francs de 1995 à 1996, ils sont à peu près du même montant que les reports de crédits, ce qui constitue apparemment un indicateur satisfaisant, les charges reportées étant égales aux crédits reportés. Il convient cependant daffiner lanalyse du montant des reports de paiement : sur ces 12 milliards de francs de charges reportées, il apparaîtrait que seulement 8 milliards correspondent en réalité à des retards de paiement effectifs. Les 4 milliards de francs restants correspondent à des factures en attente normale de paiement, ladministration disposant dun délai légal pour acquitter ses dettes. Comme lindique la Cour des Comptes dans sa réponse précitée, ces différents chiffres sont des estimations, ni la Cour ni la Direction des services financiers du ministère de la Défense nétant en mesure de sappuyer sur des données comptables adaptées. Bien que ne faisant pas lobjet dune évaluation comptable rigoureuse, les reports de charges nen constituent pas moins une réalité pour les gestionnaires publics. Le profil atypique de lévolution des dépenses en capital du ministère de la Défense au premier semestre 1996 en témoigne puisque, à la fin du mois de juin 1996, les dépenses militaires en capital étaient supérieures de 10 % par rapport à lannée précédente, à la même date. Cette aggravation très sensible de la pratique des reports de charges tient aux conditions dexécution de lexercice 1995. La fin de cet exercice a été, pour les gestionnaires du ministère de la Défense, particulièrement difficile à maîtriser. Il faut en effet rapprocher les 8 milliards de francs de reports de paiement de 1995 à 1996 des quelque 11,9 milliards de francs de crédits annulés sur lensemble de lannée 1995 et des 6,9 milliards de francs de crédits gelés, officiellement et officieusement au cours du même exercice. Le lien entre les retards de paiement dune part et les gels et annulations dautre part apparaît alors clairement. Il faut espérer que de tels dysfonctionnements ne se reproduiront pas. Tout dabord, la masse des reports de paiement concourt à obscurcir lévaluation des crédits dont le ministère de la Défense peut disposer pour mandater des dépenses correspondant à des engagements nouveaux. De plus, elle fausse les conditions dexécution du budget de lannée suivante, comme lillustre de façon quasi exemplaire la gestion 1996. En outre, en termes économiques, les reports de charges représentent autant de retards de paiement aux fournisseurs du ministère de la Défense. Or, des sommes, faibles au regard des masses financières en jeu, conditionnent souvent la capacité de survie des petites et moyennes entreprises qui, faute dun volant de trésorerie suffisant, peuvent être contraintes au dépôt de bilan. Pour celles-ci en effet, le versement dintérêts moratoires, qui représente, pour le ministère de la Défense, la conséquence financière des reports de charges, ne pallie pas labsence de paiement à léchéance ni les éventuelles baisses deffectifs quauront pu entraîner les ajournements ou les annulations des commandes faites par le ministère de la Défense. Du côté du ministère de la Défense, le paiement dimportants intérêts moratoires grève dautant un budget déjà éprouvé par une régulation massive. 2. Un phénomène préoccupant : la hausse continue des intérêts moratoires En 1996, le ministère de la Défense a payé 811,5 millions de francs au titre des intérêts moratoires, soit une hausse de 157,17 % par rapport à lexercice 1995 qui avait vu le versement de 316 millions de francs au même titre.
Il faut noter cependant quont pu exister à ce sujet des évaluations divergentes entre la Direction des services financiers (DSF) et lAgence comptable des services industriels darmement (ACSIA). La première indiquait en effet un chiffre de 410,9 millions de francs pour 1995, la seconde ayant arrêté le chiffre de 253 millions de francs. A la suite dun examen approfondi des états de recensement de la DSF et par comparaison avec ceux fournis par lACSIA, le ministère de la Défense en a conclu quun double compte portant sur les intérêts moratoires payés par la Direction de la qualité (DQA) avait été fait et a établi, à la suite dun redressement des chiffres, le montant total des intérêts moratoires de lexercice 1995 à 316 millions de francs. A ce propos, le ministère de la Défense souligne que cette correction a révélé les lacunes des modalités du recensement mis en place pour la première fois en 1995, ainsi quil avait été recommandé par la Commission de la Défense dans ses rapports antérieurs, ce recensement étant de nature extra-comptable et effectué auprès des seuls gouverneurs de crédits. Le caractère incertain des réponses des gouverneurs a incité la DSF à compléter son dispositif de recensement par une demande adressée directement aux ordonnateurs. Cette approche plus complète conduit le ministère de la Défense à évaluer, pour 1996, le montant des intérêts moratoires à 811,6 millions de francs, soit 223,2 millions de francs payés au titre de la gestion 1995 et 588,4 millions de francs payés au titre de la gestion 1996. Il apparaît nécessaire aux yeux de votre rapporteur dassurer un meilleur suivi de lévolution des intérêts moratoires, permettant déviter les divergences destimation entre les services du ministère et le comptable. Dès lors que la masse des intérêts versés atteint de tels niveaux, il est essentiel den avoir une vision juste. Le ministère de la Défense a engagé des réformes depuis 1997, afin de mieux cerner lampleur de ce phénomène. Dans cet objectif, a été créé, à titre expérimental pour la gestion 1997, en nomenclature dexécution un paragraphe spécifiquement dédié à limputation des intérêts moratoires sur les principaux chapitres concernés (chapitres du titre V et chapitre 34-20 du titre III). De la sorte, le recensement des intérêts moratoires revêt, pour lessentiel, une forme comptable. Il ne permet pas cependant de distinguer de façon tout à fait certaine les intérêts moratoires payés au titre de factures reçues lannée précédente de ceux payés au titre de lannée en cours, le système de lexercice prenant seulement en compte la date de paiement effectif des dépenses. Il reste à systématiser cette procédure.
Dans la note que consacre à ce sujet la Cour des comptes en réponse à la Commission des Finances2, deux types de causes sont avancées pour expliquer ce phénomène. La très forte augmentation du montant des intérêts moratoires payés par le ministère de la Défense en 1995 et en 1996 traduit tout dabord les effets de la régulation pratiquée en 1995. Les annulations de crédits de paiement ont des effets pervers importants, tout en nétant pas nécessairement efficaces pour diminuer la dépense réelle. Elles créent des reports de charges sur lexercice ultérieur, source dintérêts moratoires, tout en désorganisant les paiements chez les ordonnateurs. Combinée à des dotations trop étroites au regard des dépenses engagées antérieurement en vertu dautorisations de programme, la régulation aggrave donc les risques de retards des paiements. La Cour souligne également la responsabilité propre du ministère de la Défense dans cette évolution, mettant plus particulièrement en avant les dysfonctionnements dans la prévision des paiements et le caractère complexe et mouvant de la réglementation relative aux délais de mandatement et au taux dintérêt applicable. B. LES CONTRAINTES DE LA POLITIQUE BUDGÉTAIRE 1. La régulation budgétaire Les modalités de la régulation budgétaire en 1996 sont sensiblement identiques à celles des années précédentes. Annoncée aux ministres le 26 février 1996, la régulation sest traduite par un plafonnement des dépenses (hors rémunérations et charges sociales) à 50 % des dotations pour le premier semestre, au titre III et aux titres V et VI. A partir de juillet 1996, linterdiction dengagement de la moitié des crédits a été levée progressivement pour le titre III, tandis que, pour les titres V et VI, le déplafonnement seffectua par tranche, mois par mois, selon un rythme extrêmement contraignant pour la dépense et sans que soient prises en compte les propositions déchéancier avancées par le ministère de la Défense. Comme en 1995, la régulation a conduit à une très large remise en cause des crédits votés en loi de finances initiale, notamment par le biais des annulations et des reports de crédits. · Les annulations de crédits 8,507 milliards de francs dautorisations de programme et autant de crédits de paiement ont été annulés en 1996. Là encore, la comparaison avec lannée 1995 se révèle tout à fait pertinente : seuls les crédits déquipement ont été concernés par les annulations, venues en quelque sorte gager les ouvertures de crédits supplémentaires sur le titre III.
Si les annulations ont réduit les marges de manoeuvre dans la gestion des autorisations de programme, elles nont cependant pas entraîné de conséquences dommageables à court et moyen terme, ayant été absorbées par un matelas de dotations. Il en va tout autrement des annulations de crédits intervenues sur les crédits de paiement, qui ont contribué à une dégradation temporaire de la situation de trésorerie des titres V et VI. Lannulation de 2,04 milliards de francs intervenue à la fin du mois de novembre 1996, période extrêmement sensible pour la gestion de la trésorerie, a notamment entraîné un report de charges important de 5,8 milliards de francs sur 1997, cest-à-dire une suspension temporaire des paiements jusquà louverture des crédits en loi de finances initiale pour 1997. Les annulations de crédits ont touché les armées de manière homogène. Il existe en effet deux méthodes de répartition des annulations entre les différents gouverneurs de crédits : elles conduisent à réduire de manière homothétique, soit les dotations allouées aux États-majors et à la DGA en loi de finances initiale, soit les sommes non encore dépensées par les gestionnaires de crédits, au prorata de ce qui leur reste à consommer dici la fin de lexercice. Les annulations de crédits de lexercice 1996 ressortissent de la première méthode, qui, sur le plan théorique, mérite dêtre préférée à la seconde, pénalisante pour les gouverneurs de crédits gérant des programmes plus aléatoires, tels que les programmes en coopération (DGA, Armée de terre). En 1996, les annulations ont donc fait lobjet dun calcul au prorata des ressources initiales, aboutissant ainsi à un résultat homogène.
En pourcentage des dépenses nettes cependant, les services dont le taux de consommation des crédits est inférieur apparaissent mécaniquement plus touchés. Cest notamment le cas des services communs, et plus particulièrement de la DGA.
· Les reports de crédits Le niveau des reports de crédits échappe largement au contrôle du ministère de la Défense puisque cest le contrôleur financier, sur instruction du Ministre du Budget, qui en assure la modulation au regard des objectifs de déficit. Le montant des ordonnances visées par le contrôleur financier en fin de gestion constitue en effet lune des principales variables dajustement des dépenses avant la clôture des opérations budgétaires. La nature des crédits déquipement -reportables de droit- et leur importance au ministère de la Défense, expliquent lattention dont ils font lobjet en fin dexercice budgétaire. Cest cette participation éminente des crédits militaires au réglage fin du déficit budgétaire qui explique également le caractère tardif des arrêtés de report qui permettent au ministère de la Défense de consommer les dotations reportées de lannée précédente. Ce dernier se trouve en quelque sorte pris dans un étau. Dune part, il est autorisé tardivement à consommer les reports de lannée précédente, ce qui, matériellement, est souvent impossible et contribue à dégrader le taux de consommation des crédits. Dautre part, des reports lui sont imposés à la fin de lexercice budgétaire, notamment du fait du refus du contrôleur financier dapposer son visa. Lexercice 1996 na pas échappé à ce schéma.
2. La loi de programmation 1997-2002 La loi de programmation militaire pour les années 1997-2002, votée en juillet 1996, a pesé de manière contraignante sur lexécution du budget de 1996. Le ministère de la Défense sest trouvé confronté à la triple nécessité dapurer les effets de lexercice 1995, de faire face aux modifications importantes imposées en cours dannée aux dotations initiales et de ne pas hypothéquer dentrée de jeu la nouvelle loi de programmation militaire pour les années 1997-2002. Cest dans cette perspective quil convient dinterpréter larbitrage favorable du Premier Ministre qui, à la fin du mois de novembre 1996, a donné au ministère de la Défense un droit à consommation supplémentaire des reports de la gestion 1995. Au total, ont été ainsi consommés 5,816 milliards de francs, soit davantage que les prévisions initiales de réduction de reports (5,2 milliards de francs). Il sagit là dun phénomène tout à fait exceptionnel, à la mesure de la pression exercée par la nouvelle programmation. Habituellement, en effet, non seulement les montants de réductions de reports autorisés ne sont pas atteints, mais, plus encore, la masse des crédits reportés stagne ou augmente.
Cette réduction des reports de crédits était devenue dautant plus impérative quest intervenue, en même temps que lautorisation de consommation supplémentaire des reports évoquée ci-dessus, au mois de novembre, une annulation de 2,04 milliards de francs de crédits de paiement. Les crédits reportés sur 1997 se sont ainsi élevés à 5,274 milliards de francs. Les reports de charges sur le titre V ont cependant atteint 5,7 milliards de francs, ce qui ne lève pas tous les doutes sur léquilibre financier de la construction budgétaire sur laquelle ont été bâties les hypothèses de la programmation, sans compter que le titre III supporte également des reports de charges, à hauteur de 1,73 milliard de francs. Il convient de noter, toutefois, que les conséquences des annulations sur le contenu physique des programmes darmement ont été prises en compte dans lélaboration de la loi de programmation. II. LE FINANCEMENT DE LA DÉFENSE EN 1996 : UN BUDGET DE TRANSITION Le budget de la Défense en 1996 est un budget paradoxal : contraint de ne pas hypothéquer les conditions dentrée dans la nouvelle loi de programmation, sous peine de dévaloriser lidée même de programmation déjà fortement ébranlée par léchec de la programmation 1995-2000, il se déroule hors de tout cadre conceptuel et de toute référence opérationnelle. Il sagit donc dun exercice de transition, sans perspective aucune autre que celle, exclusivement négative, de ne pas invalider dentrée la nouvelle loi de programmation militaire. A. LÉVOLUTION SANS PERSPECTIVE DES DÉPENSES MILITAIRES En 1996, le budget de la Défense évolue sans lisibilité. Alors quil affiche, en loi de finances initiale, une baisse par rapport à lannée précédente, lexécution laisse apparaître une augmentation des dépenses militaires. Cette inversion reflète une gestion extrêmement perturbée des crédits de la Défense en 1995 et en 1996 et souligne la nécessité dorienter lévolution des budgets militaires par des lois de programmation réalistes. 1. Laugmentation des dépenses militaires Lexécution du budget militaire de 1996 conduit à une inversion de lévolution observée en loi de finances initiale. En loi de finances initiale, le budget de la Défense sélevait en effet, y compris les pensions et la dotation affectée au fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels de lÉtat, à 241,442 milliards de francs, soit une diminution globale de 0,8 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1995. Plus encore, hors pensions, la baisse atteint 2,4 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1995, avec 189,592 milliards de francs ouverts en loi de finances initiale pour 1996 A lissue de lexécution du budget de 1996, la situation est totalement inverse : les dépenses militaires passent de 179,965 milliards de francs en 1995 à 185,453 milliards de francs en 1996, soit une progression de 3,04 %. Cette absence de lisibilité de lévolution des dépenses militaires nest pas propre au seul exercice 1996. Le tableau ci-après fait apparaître lévolution quelque peu erratique des dépenses militaires effectives à partir de 1993, année à partir de laquelle baisses et hausses successives alternent sans quil soit possible dy déceler une logique quelconque.
2. Dépenses ordinaires et dépenses en capital : des logiques dévolution divergentes Si lon détaille plus précisément lorigine de linversion en exécution de la tendance affichée en loi de finances initiale, il apparaît quelle est exclusivement due à lévolution des dépenses en capital. En effet, les dépenses nettes du titre III sétablissent à 107,43 milliards de francs, en progression de 2,1 % par rapport à 1995, alors que les crédits du titre III en loi de finances initiale prévoyaient seulement une hausse de 1,3 %. Pour le titre III, la tendance est donc accentuée, mais non inversée. Tout au contraire, alors que les crédits de paiement ouverts en loi de finances initiale pour les titres V et VI étaient en baisse de 6,3 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1995, les dépenses nettes des services militaires augmentent, en 1996, de 4,4 % par rapport à 1995. Cette situation traduit nettement les problématiques dévolution divergentes du titre III, dune part, et des titres V et VI, dautre part. a) Les dépenses du titre III : une augmentation régulière et prévisible Comme lindique le tableau ci-dessus, la montée en charge des dépenses du titre III seffectue progressivement et, depuis 1993, assez régulièrement. Il sagit dune évolution désormais irréversible qui, dans une certaine mesure et toutes proportions gardées, tend à rapprocher la structure budgétaire du ministère de la Défense de celle des autres ministères, où la part des dépenses de personnel et de fonctionnement prime sur celle des dépenses déquipement. Amorcée, en exécution, dès 1990, cette tendance se confirme, en prévision, à partir de 1994.
Ce constat incite à sinterroger sur la pertinence des prévisions budgétaires du titre III du budget de la Défense en loi de finances initiale. De manière récurrente, en effet, certains chapitres apparaissent sous-dotés, ce qui nécessite louverture de crédits supplémentaires en cours dexécution. Dans le même esprit, il peut être relevé, avec la Cour des comptes, que labsence de mesures de régulation budgétaires sur le titre III militaire tend à prouver que les dépenses ordinaires du ministère de La Défense ne sont guère compressibles. La croissance des dépenses du titre III en 1996 nest pas principalement imputable aux dépenses de personnel. Celles-ci ont en effet connu en 1996 une augmentation modérée (+ 1,5 %), notamment au regard de lévolution des dépenses civiles de personnel (+ 3,9 %). La modération de la croissance des rémunérations, alors que sont intervenues en 1996 de nombreuses mesures de revalorisation (application du protocole Durafour , création et mise en place de la nouvelle bonification indiciaire, modification du barème de calcul des primes de qualification, etc.), est due à la déflation des emplois budgétaires, relayée plus ou moins rapidement par celle des effectifs réels.
En revanche, les autres dépenses du titre III enregistrent une augmentation conséquente de 5,7 % : après plusieurs années de baisse ou de stagnation (- 3,5 % en 1995, + 0,6 % en 1996), les dépenses de matériel et fonctionnement progressent de 5,8 %. Cette augmentation est liée à une hausse des crédits disponibles, notamment du fait de louverture dun crédit de 830 millions de francs au titre des opérations extérieures et des reports de fonds de concours qui concernent essentiellement le Service de santé des armées ; les subventions de fonctionnement progressent fortement (9 %), sans que cette augmentation ait un impact significatif sur la progression densemble étant donné leur part mineure (1 %) dans le titre III. Le profil de lexécution du budget de la Défense en 1996 est atypique : depuis 1993, en effet, la progression des dépenses ordinaires des services militaires (+ 7 %) est essentiellement due à la croissance des rémunérations (+ 8,8 %), les dépenses de fonctionnement nayant augmenté que de 2,7 % sur cette période. b) Laugmentation des dépenses en capital Lévolution des dépenses en capital est, au contraire des dépenses ordinaires, difficilement prévisible et nest, ex post, pas toujours lisible. Lannée 1996 marque une inflexion de lévolution de ces dépenses puisquelles augmentent de 3,3 milliards de francs par rapport à 1995 pour sétablir à 78 milliards de francs. Il sagit là dune inversion notable, après plusieurs années de réductions successives qui conduisent, pour la période 1992-1995, à une baisse cumulée de 20,4 %. Lévolution favorable des dépenses déquipement se traduit notamment par une amélioration du taux de consommation des crédits qui remonte, en 1996, à 93,7 %, contre 86,8 % en 1995, année exceptionnelle à cet égard, il est vrai. Lensemble des services et des armées a bénéficié de cette évolution favorable, comme lindique le tableau ci-après.
B. LES MOUVEMENTS DE CRÉDITS Le budget de la Défense fait, de manière habituelle, lobjet dimportants mouvements de crédits qui en affectent le montant et la répartition. Certains de ces mouvements sont récurrents dannée en année et relativement prévisibles. Ainsi en est-il du transfert au budget des charges communes des pensions qui représentent plus de 50 milliards de francs. Cette modification de la répartition des crédits ne pose pas de problème de principe. Il en va différemment dun autre mouvement de crédits, tout aussi prévisible, qui affecte le montant des dotations. Les ouvertures de crédits davance sur le titre III sont, en dépit de la majoration de crédits quelles apportent, critiquables dans leur principe car elles traduisent, pour une large part, la sous-dotation structurelle de certains chapitres du titre III et posent la question de la sincérité du budget voté. Quant aux autres mouvements de crédits importants, ils relèvent de la régulation budgétaire et sinscrivent de ce fait dans lévolution générale de la politique budgétaire menée par le Gouvernement.
1. Les modifications législatives Une seule loi de finances rectificative est intervenue en 1996 (loi de finances rectificative du 30 décembre 1996). Elle a procédé aux ajustements suivants sur le budget de la Défense : ouverture, au titre des dépenses ordinaires du titre III, de 1,2 milliard de francs de crédits supplémentaires ; ratification du décret davance du 26 septembre 1996 qui a ouvert 2,75 milliards de francs pour les dépenses ordinaires du titre III ; reprise des trois arrêtés dannulation des 10 avril, 26 septembre et 13 novembre 1996 annulant 8,5 milliards de francs dautorisations de programme et de crédits de paiement. Comme lors des précédents exercices et à limage de la loi de finances rectificative de 1997, louverture de crédits supplémentaires était justifiée par la nécessité de financer les dépenses de fonctionnement, non ou insuffisamment dotées en loi de finances initiale, induites notamment par les surcoûts liés aux opérations extérieures. Les conséquences budgétaires des opérations extérieures sont dautant plus défavorables que les surcoûts sont difficiles à évaluer, et plus encore à maîtriser. Pour 1996, les surcoûts résultant des opérations extérieures se sont élevés à 5,147 milliards de francs, dont 3,934 milliards de francs au titre III et 1,213 milliard de francs au titre V. Laugmentation constatée par rapport à 1995 (+ 968 millions de francs, dont 874 millions de francs pour le seul titre III) résulte essentiellement de la création de lIFOR (Implementation Force) en Bosnie-Herzégovine, qui a entraîné une restructuration des forces présentes, et de la mise en place de la division multinationale sud-est à laquelle ont participé 8 921 militaires français. De plus, le ministère de la Défense a soutenu le financement de certains contingents étrangers (marocains, jordaniens, ukrainiens) et a apporté des contributions financières au titre de sa participation aux états-majors de lOTAN. Les opérations nouvelles menées en République Centrafricaine (ALMANDIN) et au Yémen (CONDOR), ainsi que la perte dun Mirage 2000 en Arabie Saoudite, au cours de lopération Alysse, contribuent également à expliquer cette augmentation. Lanalyse par titre des surcoûts induits par les opérations extérieures indique quils sont, à 75 %, imputés sur le titre III. La majeure partie de ces surcoûts est liée en effet à laugmentation des rémunérations consécutive aux affectations hors métropole, aux suppléments de charges sociales qui en découlent et aux frais dalimentation et de fonctionnement des troupes en campagne. Si lon raisonne par armée, le tableau ci-après fait apparaître la part prépondérante de lArmée de terre.
Enfin, en termes de théâtre dopérations, lex-Yougoslavie demeure, comme les années précédentes, la première zone dintervention des troupes françaises. Au total, sur la période allant de 1992 à 1996, les surcoûts imputables à la présence française sur ce territoire et dans lAdriatique auront représenté plus de 12 milliards de francs, hors contributions obligatoires à lONU au titre des opérations de maintien de la paix. En prenant en compte les remboursements effectués sur cette période, le montant net de leffort financier français peut être estimé à 7,5 milliards de francs environ. Cette analyse souligne la nécessité, déjà soulignée par votre rapporteur lors de lexamen de la loi de finances rectificative du 30 décembre 1997, de revoir les modalités de financement des opérations extérieures. 2. Les modifications réglementaires a) Les modifications du montant des crédits Cinq types de mouvements dorigine réglementaire sont susceptibles daffecter le montant des dotations votées : les reports de crédits ; les gels et annulations de crédits ; les décrets davance ; les rattachements de fonds de concours ; les rétablissements de crédits. Les reports, gels et annulations ayant fait lobjet dune analyse spécifique, lanalyse portera sur les trois derniers types de modifications. · Le décret davance du 26 septembre 1996 Deux décrets davance sont intervenus en 1996. Le décret davance n° 96-318 du 10 avril 1996 na pas concerné les dotations militaires. En revanche, le décret davance n° 96-849 du 26 septembre 1996, ratifié par la loi de finances rectificative du 30 décembre 1996, a ouvert 2,75 milliards de francs de crédits au titre III afin de financer les surcoûts liés aux opérations extérieures à hauteur de 2,5 milliards de francs (dont 1,84 milliard de francs au titre des seules rémunérations des personnels en opérations). Il a également financé des dépenses pourtant prévisibles au moment de lélaboration de la loi de finances initiale comme les indemnités journalières dabsence temporaire (IJAT) des gendarmes ou les loyers de Gendarmerie.
· Les rattachements de fonds de concours La procédure de fonds de concours permet dassouplir le principe de non-affectation des recettes posé par lordonnance organique, en autorisant des personnes morales ou physiques à concourir avec lÉtat à des dépenses dintérêt public. Outre ces fonds de concours par nature, existent également des fonds de concours par assimilation, en pratique majoritaires, qui permettent dassimiler à des fonds de concours certaines recettes à caractère non fiscal ou certains rétablissements de crédits. En 1996, 4,5 milliards de francs ont été rattachés au budget du ministère de la Défense au titre de la procédure de fonds de concours, dont seuls 533 millions de francs correspondent à des fonds de concours par nature. Le budget de la Défense est ainsi le troisième poste budgétaire, après les charges communes et les services financiers, concerné par les rattachements de fonds de concours par assimilation.
En hausse de 5 % par rapport à lannée précédente, ces crédits ont été majoritairement (64,4 %) rattachés au titre III. Lorigine des fonds rattachés à ce titre ne varie guère par rapport à lannée précédente, le remboursement des soins assurés par le Service de santé des armées constituant toujours la première source de rattachement.
Il en va différemment des fonds rattachés au titre V qui voient la hiérarchie de leur origine modifiée. Si les participations étrangères aux frais détudes et de fabrication relatifs aux programmes en coopération restent toujours majoritaires, on observera en revanche la forte progression des produits provenant daliénations dimmeubles, qui reflète la politique de cession de son patrimoine immobilier par le ministère de la Défense.
Lannée 1996 a, une fois encore, été caractérisée par un rattachement tardif de ces crédits, notamment au titre V. Le ministère de la Défense nest sans doute pas le seul concerné par ce phénomène ; il lest, toutefois, dans une très forte proportion puisque plus de 80 % des rattachements de crédits au titre V interviennent aux troisième et quatrième trimestres, situation qui tend à se détériorer par rapport aux exercices précédents. · Les rétablissements de crédits Autre procédure daffectation de recettes prévue par lordonnance organique de 1959, les rétablissements de crédits se sont élevés à 10,169 milliards de francs en 1996. La part principale de ces rétablissements de crédits est constituée par les remboursements des charges de personnel des arsenaux en provenance des comptes de commerce de la défense, considérés comme des remboursements de cession ayant donné lieu à paiement sur crédits budgétaires. Il faut rappeler en effet que lordonnance organique interdit limputation directe de la rémunération dagents publics sur un compte spécial du Trésor. Là encore, les effets de la régulation budgétaire sur le titre V se sont fait sentir, induisant notamment un ralentissement des virements de crédits de la zone budgétaire vers les comptes de commerce, les rémunérations et charges sociales des personnels employés par les comptes de commerce constructions navales de la marine militaire (DCN) et exploitations industrielles des ateliers aéronautiques de lÉtat (DCAé) étant remboursées au titre III du budget de la Défense par les comptes de commerce à partir des crédits virés du titre V.
b ) Les modifications de la répartition des crédits Trois mouvements sont susceptibles de modifier la répartition des dotations : les transferts de crédits ; les virements de crédits ; les arrêtés de répartition de crédits globaux. · Les transferts de crédits Larticle 14 de lordonnance organique vient assouplir la règle de la spécialité budgétaire en prévoyant que, dès lors que la dépense ne change pas de nature, le service responsable de son exécution peut être modifié sur simple arrêté du Ministre des Finances. Comme chaque année, la quasi-totalité des transferts de crédits intéressant le ministère de la Défense concerne les pensions et seffectue au profit du budget des charges communes. De manière tout aussi habituelle, le ministère de la Défense a bénéficié de transferts de crédits en provenance du budget du ministère de lIntérieur pour lacquisition et lentretien des avions de la sécurité civile. La Cour des comptes souligne toutefois lirrégularité dune telle procédure, dans la mesure où elle se traduit par un transfert du titre VI au titre III. Au total, le solde des transferts de crédits sétablit en 1996 à plus de 51 milliards de francs, répartitions comprises. · Les virements de crédits Contrairement aux transferts de crédits, les virements affectent la nature même de la dépense et font, de par lexception importante au principe de spécialité des crédits quils représentent, lobjet dun décret. Leur solde est nul pour le budget de la Défense en 1996, les ouvertures (37 millions de francs) ayant été égales aux annulations. · Les arrêtés de répartition de crédits globaux Aux termes de lordonnance organique, trois catégories de crédits sont susceptibles dêtre réparties : les crédits ouverts pour des dépenses dont la répartition par chapitre ne peut être déterminée au moment où ils sont votés (article 7 de lordonnance organique du 2 janvier 1959) ; les crédits pour dépenses éventuelles (article 10) ; les crédits pour dépenses accidentelles (article 11). Leur solde sétablit en 1996, pour le budget de la Défense, à 317 millions de francs. III. LES AJUSTEMENTS DE CRÉDITS PROPOSÉS PAR LE PROJET DE LOI DE RÈGLEMENT Les articles 5 et 6 du projet de loi de règlement arrêtent le montant définitif des dépenses militaires. Deux types dajustement interviennent : les ouvertures de crédits complémentaires ; les annulations de crédits non consommés. Ces deux mouvements modifient le montant des dotations ainsi quil est indiqué dans le tableau ci-après.
Les ouvertures de crédits complémentaires sélèvent à 113,045 millions de francs et viennent abonder le chapitre 33-90 cotisations sociales et, comme il est traditionnel, le chapitre 37-91 frais de contentieux - règlement des dommages et accidents du travail , chapitres dotés de crédits évaluatifs. Les dépassements de la dotation initiale constatés sont la conséquence : au chapitre 33-90, du report sur 1996 du règlement de cotisations sociales pour un montant de 90,37 millions de francs, dues au titre de 1995 ; au chapitre 37-91, du paiement, à la suite dune décision de justice, dintérêts moratoires à des techniciens détude et de fabrication. Les annulations de crédits non consommés portent sur un montant de 1,249 milliard de francs. CONCLUSION Lexercice 1996 offre un profil tout à fait particulier, largement dû à labsence de ce cadre de référence quest la loi de programmation. Budget sous contrainte, budget de transition, il a illustré, de manière éclatante, la nécessité, pour les gestionnaires publics, de trouver un point déquilibre entre les objectifs annuels et le temps long des programmes darmement, comme il a révélé un certain nombre de dysfonctionnements quillustrent lexistence de reports de charges massifs et la très forte croissance des intérêts moratoires. Les symptômes connus, il convient de proposer des remèdes en proposant daméliorer les méthodes de fonctionnement de ladministration et de clarifier les procédures budgétaires, condition nécessaire de lefficacité du contrôle démocratique. Lexamen parlementaire de la loi de règlement peut y contribuer. * La Commission de la Défense ne peut, en la matière, que renouveler sa proposition dinscrire, en loi de finances initiale, des dotations qui reflètent davantage le montant des crédits effectivement mis à la disposition du ministère de la Défense. A cet égard, il est souhaitable de mettre fin à lalourdissement des reports de charges, comme à la technique des reports de crédits imposés : ces pratiques obscurcissent considérablement le cadre budgétaire et, en conséquence, handicapent le contrôle parlementaire. Si elles cessaient, non seulement lautorisation budgétaire sen trouverait davantage respectée mais en outre, les gestionnaires du ministère de la Défense seraient à même de travailler dans une perspective de long terme et un contexte stabilisé, indispensables à la réussite des réformes actuellement mises en oeuvre. Il serait également souhaitable dencadrer la régulation budgétaire de principes qui permettraient datténuer les perturbations qui en résultent pour la gestion des crédits. Il faut constater à ce propos que lexécution du budget de la Défense pour 1997 paraît, jusquà présent, beaucoup plus satisfaisante, tant en ce qui concerne les reports de charges et les reports de crédits imposés que la régulation budgétaire. * La lourdeur des processus de gestion internes au ministère de la Défense amplifie les rigidités induites par la régulation budgétaire. A cet égard, les réformes actuellement mises en oeuvre au ministère de la Défense, qui visent à doter celui-ci dun contrôle de gestion moderne et efficace, devraient mettre fin à larchaïsme de certaines procédures. Votre rapporteur se félicite en particulier de la mise en place en 1997 dune comptabilité spéciale des investissements au sein de ce ministère, dautant quelle existe depuis quinze ans dans les ministères civils. La clarification ainsi opérée dans la gestion des autorisations de programme traduit la modernisation du ministère de la Défense. Plus satisfaisante sur le plan juridique, elle permet, sur le plan comptable, de resserrer le lien entre autorisations de programme et crédits de paiement. Reste cependant le problème de lextrême globalité de certains chapitres du budget du ministère de la Défense, peu conforme au principe de spécialité posé par lordonnance organique du 2 janvier 1959. Il conviendrait donc de revoir la nomenclature budgétaire, en particulier le chapitre 53-80 qui, à lui seul, englobe 47 milliards de francs, soit la moitié des dépenses dinvestissement de lÉtat. Il est à espérer que les projets du ministère de la Défense, qui visent à une présentation des crédits déquipement détaillée par opérations budgétaires dinvestissement, trouvent une concrétisation dès la loi de finances initiale pour 1999. * La régulation budgétaire particulièrement brutale en 1995 et en 1996 souligne la nécessité cruciale dun meilleur dialogue entre les ministères du Budget et de la Défense pour la gestion des crédits militaires. Il paraît en particulier nécessaire à votre rapporteur dabandonner définitivement la pratique du refus de visa du contrôleur financier en dehors de toute décision préalable de blocage des crédits. Sur ce point, la signature le 24 avril 1997 dune instruction interministérielle sur la gestion des crédits déquipement du ministère de la Défense entre le Ministre du Budget, le Ministre de lÉconomie et des Finances et le Ministre de la Défense, pourrait constituer le point de départ dun rapprochement, souhaitable pour lefficacité de la dépense, des méthodes, des instruments et des concepts mis en oeuvre par les administrations des Finances et de la Défense. EXAMEN EN COMMISSION La Commission a examiné, pour avis, sur le rapport de M. François Lamy, les projets de loi portant règlement définitif des budgets de 1995 (n° 33) et de 1996 (n° 587) le jeudi 18 juin 1998. M. François Lamy, rapporteur pour avis, a tout dabord regretté le caractère largement formel de la procédure dexamen des lois de règlement, faisant observer que celles-ci constituent, pour le budget de la Défense, la seule occasion de mener une analyse pertinente sur ladéquation entre les crédits effectivement ouverts et les orientations fixées par la loi de programmation, eu égard à lécart très important entre la loi de finances initiale et le budget exécuté. Il a indiqué que lexamen de la partie des lois de règlement relative aux crédits militaires permettait en outre de porter un regard sur les méthodes de gestion du ministère de la Défense, ce qui dépasse les simples enjeux de technique financière pour poser la question de leffectivité du pouvoir de contrôle du Parlement sur un budget souvent peu transparent et permet de sinterroger sur le lien entre lévolution des dotations et celle de leur contenu physique. Il a ensuite présenté conjointement les deux avis sur les lois de règlement pour les budgets de 1995 et 1996, soulignant leur caractère indissociable tant dans leurs modalités que dans les enseignements quils livrent. Il a souligné labsence de correspondance stricte entre les crédits votés en début dannée et les dépenses nettes du ministère de la Défense en 1995 et 1996, dont lévolution avait même été inverse de celle présentée en loi de finances initiale, et fait observer que ce décalage tenait exclusivement aux dépenses déquipement. Il a rappelé qualors quen loi de finances initiale, le budget de la Défense pour 1996 affichait par rapport à 1995 une baisse de 2,4 % de son montant global et de 6,3 % pour les dépenses déquipement, les dépenses nettes sétaient révélées en exécution supérieures à celles de 1995 de 3 % pour lensemble des crédits militaires, et de 4,4% pour les dépenses déquipement. Il a fait observer que la raison essentielle de cette déconnexion entre la loi de finances initiale et le budget exécuté tenait à la très forte régulation appliquée, à lépoque, au budget de la Défense, en conséquence dune politique budgétaire et fiscale particulièrement rigoureuse. Il a relevé que cette régulation sétait traduite essentiellement par un niveau élevé dannulations de crédits déquipement (12 milliards de francs en 1995 et 8,5 milliards de francs en 1996) et par une masse très importante de reports de crédits qui avaient permis au budget de la Défense de jouer le rôle de variable dajustement du déficit de lEtat. Sans prétendre jeter lanathème sur le principe même de la régulation budgétaire, M. François Lamy a toutefois déploré ses modalités, mentionnant notamment le caractère verbal des instructions reçues du ministère du Budget par le contrôleur financier sans que, par définition, les gestionnaires du ministère en soient informés. Il a estimé que cette procédure paraissait peu compatible avec les engagements du ministère de la Défense à légard de ses fournisseurs et, après avoir rappelé que le paiement de plus de 12 milliards de francs de charges avait été reporté en 1995 sur lexercice 1996, il a précisé que sur ces 12 milliards de francs 8 milliards avaient entraîné le versement dintérêts moratoires pour une somme de 812 millions de francs en 1996, soit une augmentation de 157 % par rapport à 1995. Le rapporteur pour avis a en conséquence souligné que lexercice 1995 apparaissait catastrophique puisquil sétait traduit par une baisse de 15,5 % des crédits déquipement entre la loi de finances initiale et le budget exécuté, y compris toutefois les transferts vers le budget civil de la recherche. Il a ajouté que lexercice 1996 sétait révélé tout aussi délicat en raison de trois contraintes : la contrainte financière héritée de lexercice 1995, la contrainte budgétaire très forte de 1996 et la nécessité de ne pas hypothéquer dentrée de jeu la loi de programmation 1997-2002. M. François Lamy, soulignant la rupture introduite par la crise financière issue des exercices 1995 et 1996, a relevé que deux enseignements pouvaient en être tirés. Il a insisté sur la nécessité de faire évoluer le budget de la Défense dans un cadre pluriannuel clair et réaliste, soulignant que lexercice 1996 en avait été dépourvu, ce qui avait donné lieu à des errements chaotiques. Il a dailleurs fait observer que cest précisément ce constat, nourri des enseignements tirés de léchec de la loi de programmation 1995-2000, qui avait présidé à la revue de programmes permettant dactualiser les données retenues par la loi de programmation militaire 1997-2002. Il a souligné en outre que la lourdeur des processus de gestion internes au ministère de la Défense avait contribué à amplifier les effets de la régulation et les carences de la programmation, tout en indiquant que des améliorations étaient récemment intervenues sur ce point, notamment à la suite de la signature dune instruction interministérielle commune aux ministères du Budget et de la Défense. Il a rappelé, à ce propos, que le ministère de la Défense avait, depuis le 1er janvier 1998, adopté la comptabilité spéciale des investissements, en vigueur dans les ministères civils depuis quinze ans déjà. Il a également indiqué quétait actuellement envisagée une réforme de la nomenclature budgétaire susceptible de permettre un suivi plus fin de laffectation des crédits déquipement, et articulée autour de la notion d opération budgétaire dinvestissement , qui se situerait à un niveau intermédiaire entre lextrême globalité de certains chapitres du titre V et les quelques 8 000 opérations budgétaires existant actuellement. Il a enfin souligné que les signes de dysfonctionnements les plus flagrants tels que les intérêts moratoires semblaient partiellement résorbés (environ 300 millions de francs en 1997), des mesures ayant par ailleurs été prises pour limiter leurs effets négatifs sur les petites et moyennes entreprises partenaires du ministère de la Défense. M. François Lamy a estimé que sil fallait se féliciter de cette évolution des pratiques gestionnaires et budgétaires, il restait néanmoins à espérer quelles se traduiraient rapidement dans la présentation des documents budgétaires, notamment à loccasion de la loi de finances pour 1999. Suivant les conclusions de son rapporteur pour avis, la Commission a donné un avis favorable à ladoption des projets de loi portant règlement définitif des budgets de 1995 et de 1996. ______________ N° 997. Avis de M. François Lamy (au nom de la commission de la défense), sur le projet de loi (n° 587), portant règlement définitif du budget de 1996. 1 Cité dans le rapport n° 933 sur le projet de loi portant règlement définitif du budget de 1995, p. 198. 2 Rapport n° 933 sur le projet de loi portant règlement définitif du budget de 1995, pp. 215-218. |