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le 2 décembre 1998

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N° 1221

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 25 novembre 1998

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES (1) SUR LES PROJETS DE LOI, ADOPTÉS PAR LE SÉNAT :

- autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Namibie sur la coopération culturelle, scientifique et technique,

- autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Namibie en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune,

PAR M. RENÉ MANGIN,

Député

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(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Voir les numéros :

Sénat : 203, 266, 202, 339 et T.A. 98 et 142 (1997-1998)

Assemblée nationale : 785, 921

Traités et conventions

La Commission des Affaires étrangères est composée de : M. Jack Lang, président ; MM. Georges Hage, Jean-Bernard Raimond, Roger-Gérard Schwartzenberg, vice-présidents ; M. Roland Blum, Mme Monique Collange, M. René Rouquet, secrétaires ; Mmes Michèle Alliot-Marie, Nicole Ameline, M. René André, Mmes Marie-Hélène Aubert, Martine Aurillac, MM. Edouard Balladur, Raymond Barre, Dominique Baudis, François Bayrou, Henri Bertholet, Jean-Louis Bianco, André Billardon, André Borel, Bernard Bosson, Pierre Brana, Jean-Christophe Cambadélis, Hervé de Charette, MM. Yves Dauge, Patrick Delnatte, Jean-Marie Demange, Xavier Deniau, Jacques Desallangre, Paul Dhaille, Mme Laurence Dumont, MM. Jean-Paul Dupré, Charles Ehrmann, Jean Espilondo, Jean-Michel Ferrand, Georges Frêche, Jean-Yves Gateaud, Jean Gaubert, Valéry Giscard d'Estaing, Jacques Godfrain, Pierre Goldberg, François Guillaume, Jean-Jacques Guillet, Robert Hue, Mme Bernadette Isaac-Sibille, MM. Didier Julia, Alain Juppé, André Labarrère, Gilbert Le Bris, Jean-Yves Le Déaut, Jean-Claude Lefort, François Léotard, Pierre Lequiller, François Loncle, Bernard Madrelle, René Mangin, Jean-Paul Mariot, Gilbert Maurer, Charles Millon, Mme Louise Moreau, M. Jacques Myard, Mme Françoise de Panafieu, MM. Etienne Pinte, Marc Reymann, Jean Rigal, Mme Yvette Roudy, MM.  Henri Sicre, Mme Christiane Taubira-Delannon, MM. Michel Terrot, Joseph Tyrode, Michel Vauzelle, Aloyse Warhouver.

Mesdames, Messieurs,

Les deux projets de loi qui nous sont soumis ont pour objet l'approbation d'un accord de coopération culturelle, scientifique et technique et d'une convention fiscale, signés entre la France et la Namibie. Ils ont déjà été adoptés par le Sénat les 25 mars et 20 mai 1998.

L'examen de ces deux accords, les premiers jamais soumis au Parlement français, sera l'occasion d'une brève présentation de ce jeune Etat avant d'aborder les principales dispositions des deux projets de loi et leur portée pratique.

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NAISSANCE D'UNE NATION

La Namibie doit son nom au désert du Namib qui signifierait "pays où il n'y a rien" ou encore "terre de personne". Ces dénominations peu engageantes ne doivent pas nous rebuter ; la première est singulière compte tenu de l'importance considérable des gisements de diamants, d'uranium et autres ressources minières, de la densité du cheptel bovin et ovin et des ressources halieutiques ; la seconde est plus pertinente, puisque ce vaste territoire de 825.000 km² (environ les 2/3 de la superficie de l'Afrique du Sud) est l'un des moins peuplés d'Afrique, avec moins d'1.600.000 habitants, représentant une grande diversité ethnique.

La Namibie présente des zones géographiques bien différenciées : le désert du Namib s'étend tout le long de la façade atlantique, formant un littoral si inhospitalier qu'il avait été baptisé par les marins "côte des squelettes". On y trouve un seul port naturel, Walvis Bay. Les villes sont concentrées sur le plateau central. Au Sud et à l'Est, des frontières rectilignes à travers le somptueux désert du Kalahari, immortalisé par le film "Les Dieux sont tombés sur la tête", marquent la séparation avec l'Afrique du Sud et le Botswana. Au Nord, les plaines sablonneuses qui jouxtent l'Angola accueillent les deux tiers de la population. Au Nord-Est, l'étrange "bande de Caprivi", du nom d'un chancelier allemand, rappelle l'ambition des premiers colonisateurs d'obtenir un accès à la Rhodésie.

L'ensemble du pays souffre d'une sécheresse endémique.

L'histoire de la Namibie, pour être courte, n'en est pas moins mouvementée. Découverte tardivement, elle fut d'abord protectorat allemand sous le nom de Sud-Ouest africain. En 1914, le général sud-africain Botha envahit le territoire et obtint la reddition allemande. Cette région du Bothaland sera confiée en 1920 par la Société des Nations à l'Afrique du Sud, en tant que territoire sous mandat. Pretoria refusera en 1946 de transformer le régime du mandat en celui de tutelle, prévu par la charte des Nations Unies. Malgré de nombreuses résolutions, l'Afrique du Sud persistera à occuper la Namibie au motif du péril communiste constitué par le principal mouvement de libération, la SWAPO, et instaurera la pratique de l'apartheid.

A la suite d'innombrables péripéties, la situation sera débloquée en 1989 grâce à la mise en oeuvre de la Résolution n° 435 des Nations Unies, adoptée 10 ans plus tôt.

La Namibie est le dernier pays africain à avoir, en 1990, accédé à l'indépendance.

Dès la proclamation de l'indépendance, la France a ouvert une ambassade à Windhoek. Une ambassade de Namibie a été ouverte à Paris en août 1991, marque évidente d'intérêt pour notre pays, compte tenu de la modestie du réseau diplomatique namibien. Le rapprochement avec notre pays répond à la préoccupation de la Namibie de diversifier des relations historiquement confinées dans la sphère germano-anglo-saxonne. Il est également motivé par la reconnaissance, dans la mesure où notre pays s'est fortement impliqué dans le processus d'indépendance. Membre du groupe de contact de l'ONU sur la Namibie, la France a été associée à la rédaction de la Résolution 435. Le refus de lier la question de l'indépendance au retrait des Cubains d'Angola en 1983 nous a valu la reconnaissance de la SWAPO. La France bénéficie ainsi d'un indéniable capital de sympathie.

La qualité des relations franco-namibiennes est illustrée depuis l'indépendance par les fréquentes visites des autorités namibiennes en France, et par les quatre déplacements effectués par nos ministres de la Coopération dans ce pays. La visite d'Etat du Président de la République en juin 1998 à Windhoek a permis de renforcer encore les relations bilatérales. Pour sa part, le Président Nujoma a été reçu en visite officielle en France en 1993. Il participe au XXème sommet France-Afrique réuni en ce moment même à Paris.

UNE COOPÉRATION EN PLEIN ESSOR

L'Accord de coopération culturelle, scientifique et technique a été signé à Windhoek le 22 mars 1995. Il n'a été soumis au Sénat que trois ans plus tard car certaines de ses dispositions nécessitaient la négociation de la convention fiscale qui nous est soumise concomitamment.

De facture classique, cet accord précise les statuts des personnels mis à disposition par la France ainsi que les règlements s'appliquant aux matériels et fournitures associés à l'assistance technique prévue par un programme ou un projet de coopération.

L'accord institue une commission mixte dont le rôle est de fixer les orientations et de déterminer les modalités du programme de coopération. Cette commission se réunira tous les trois ans, alternativement en France et en Namibie. La première réunion pourrait se tenir au cours du premier semestre 1999.

L'accord conclu pour une durée de cinq ans est renouvelable par tacite reconduction pour de nouvelles périodes de deux ans.

La coopération française privilégie quatre axes d'intervention : la satisfaction des besoins essentiels des populations défavorisées, l'appui au dispositif de santé, la participation au développement économique et institutionnel et l'aide à la formation.

Elle est complétée par une action culturelle dynamique grâce à l'action du centre culturel franco-namibien ouvert en 1991 et à la promotion de la langue française, perçue comme une ouverture sur l'extérieur, en particulier vers l'Afrique francophone.

Au total, les moyens mis en oeuvre par la coopération française depuis 1990 s'élèvent à 278 MF. En 1998, ils représenteront 16,5 MF, auxquels s'ajoutent 10 MF sur les crédits du fonds d'aide et de coopération. Avec 4,07% de l'aide totale, la France est le septième bailleur d'aide à la Namibie, derrière la RFA, les pays scandinaves et les Etats-Unis. Cette aide directe est complétée par celle que nous apportons par l'intermédiaire de l’Union européenne, qui fournit près de 10% de l'aide totale à la Namibie.

Il n'existe pas d'accord de coopération entre nos deux pays en matière de police, de justice ou de sécurité. Cependant, la Namibie souhaite bénéficier de l'assistance française en matière de défense et de police afin d'élargir le champ de ses interlocuteurs traditionnels sur ces questions. A la suite d'une évaluation conduite en 1996 par une mission d'experts, un conseiller technique a été mis en place auprès du Ministre de l'Intérieur depuis juin 1998 et un fonds d'aide et de coopération d'un montant d'environ 5 MF pourrait être mis en oeuvre à partir de 1999. Par ailleurs, un attaché de police vient d'être accrédité par les autorités namibiennes.

UN DISPOSITIF FISCAL CLASSIQUE

La convention fiscale est conforme, dans ses grandes lignes, au modèle OCDE ; elle comporte néanmoins les aménagements habituellement retenus dans les conventions conclues par la France et quelques traits originaux qui prennent en compte certaines spécificités des deux législations.

La rédaction des articles relatifs aux revenus immobiliers, aux gains en capital et à la fortune est directement inspirée du modèle OCDE. Toutefois, elle s'en distingue en prévoyant des règles particulières relatives au régime d'imposition des actions et autres droits dans des sociétés à prépondérance immobilière et, s'agissant des gains en capital et de la fortune, au régime d'imposition des participations substantielles. Cet ajout, habituel dans les conventions conclues par la France, répond au souci de préserver l'application des dispositions législatives françaises en la matière.

L'article 10 relatif aux dividendes retient le principe du transfert de l'avoir fiscal aux actionnaires non-résidents personnes morales (si elles détiennent moins de 10% de la société française distributrice) et personnes physiques (quelle que soit la participation). Cette disposition est généralement prévue dans les conventions fiscales conclues par la France depuis 1970, dans le but de favoriser l'investissement de portefeuille étranger en actions françaises.

S'agissant des rémunérations publiques, l'article 19 de la convention applique strictement la règle de l'imposition exclusive dans l'Etat qui paie ces rémunérations, conformément à la pratique française.

L'article 24 comporte les clauses habituelles de non-discrimination et inclut des stipulations particulières. Il prévoit l'application réciproque des avantages fiscaux prévus dans chaque Etat au profit de l'autre Etat et de ses autres personnes publiques dont l'activité n'a pas un caractère industriel et commercial. Des difficultés diplomatiques naissant régulièrement de l'application du taux de droit de mutation à titre gratuit de 60% aux donations et successions faites à des Etats ou organismes étrangers, la France tend à intégrer dans les conventions qu'elle conclut de telles dispositions, sous réserve toutefois de réciprocité.

L'article 24 prévoit également que les clauses générales de non-discrimination ou de la nation la plus favorisée contenues dans les accords conclus entre les deux Etats antérieurement à l'entrée en vigueur de la convention fiscale sont dénuées de portée dans le domaine fiscal.

Il prévoit, enfin, que les cotisations versées en France dans le cadre d'un régime de retraite par une personne résidente de Namibie seront déductibles du revenu imposable dans ce dernier Etat de la même manière que si elles avaient été payées à un régime de retraite reconnu par la Namibie (la même règle sera applicable en sens inverse). Cette disposition permet à un Français temporairement expatrié en Namibie de continuer à cotiser, en franchise d'impôt, à un régime de retraite en France, et donc de ne pas perdre ses droits à pension relatifs à la période au cours de laquelle il a été amené à résider en Namibie.

Enfin, à titre de curiosité, on notera qu'une ferme d'hôte constitue un établissement stable dans le cas de la Namibie.

Ce dispositif fiscal est, pour le moment, d'une portée pratique limitée puisqu'il concerne environ 150 français immatriculés en Namibie. La communauté française en Namibie est totalement nouvelle et essentiellement concentrée dans la capitale. La communauté namibienne en France compterait, pour sa part, 18 membres.

Cette convention fiscale complète le réseau de conventions déjà conclues par la France dans la région, avec l'Afrique du Sud et le Zimbabwe.

Les relations franco namibiennes ont acquis aujourd'hui une densité que rien ne garantissait au moment de l'indépendance. Pays neuf, étranger à notre champ d'intervention traditionnel, historiquement tourné vers l'Allemagne et la Scandinavie, la Namibie est devenue un partenaire politique important de la France en Afrique australe. La sympathie de ses dirigeants à notre égard est une donnée non négligeable.

Les relations économiques bilatérales sont encore modestes. Cependant, dans un pays volontiers présenté comme démocratiquement exemplaire, au potentiel de développement prometteur, le dispositif conventionnel qui se met en place et qui devrait être rapidement complété par un accord d'investissement est de nature à renforcer la présence économique française.

C'est la raison pour laquelle votre Rapporteur vous recommande l'adoption des présents projets de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné les présents projets de loi au cours de sa réunion du mercredi 25 novembre 1998.

Après l’exposé du Rapporteur, et suivant ses conclusions, la Commission a adopté les projets de loi (nos 785 et 921).

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La Commission vous demande donc d’adopter, dans les conditions prévues à l’article 128 du Règlement, les présents projets de loi.

NB : Le texte de l'accord et de la convention figurent respectivement en annexe aux projets de loi (nos 785 et 921).

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N°1221. - Rapport de M. René Mangin (au nom de la commission des affaires étrangères) sur les projets de loi, adoptés par le Sénat :
- autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Namibie sur la coopération culturelle, scientifique et technique (n° 785);
- autorisant l’approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Namibie en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion et la fraude fiscales en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune (n° 921).