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Document E2464
(Mise à jour : 12 décembre 2009)


Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur les fusions transfrontalières des sociétés de capitaux.


E2464 déposé le 10 décembre 2003 distribué le 11 décembre 2003 (12ème législature)
   (Référence communautaire : COM(2003) 703 final du 18 novembre 2003)

  • Travaux en Délégation

    Ce document a été examiné au cours de la réunion du 9 juin 2004

  • Adoption par les instances communautaires

    Ce document a été adopté définitivement par les instances de l'Union européenne :

    Directive 2005/56/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2005 sur les fusions transfrontalières des sociétés de capitaux (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE).
    (JO L 310 du 25 novembre 2005) (Notification d'adoption publiée au JOLD du 31/12/2005 p.20953)

  • Transposition en droit national

      Directive du Parlement européen et du Conseil
       Mesures nationales d'éxécution de nature législative : Loi n° 2008-649 du 3 juillet 2008 portant diverses dispositions d'adaptation du droit des sociétés au droit communautaire

Base juridique :

Article 44, paragraphe 1, du traité CE, relatif à la réalisation du droit d'établissement.

Procédure :

Article 251 du traité CE (codécision).

Avis du Conseil d'Etat :

Cette proposition de directive tend à harmoniser les législations en matière de fusions transfrontalières des sociétés de capitaux.

La proposition de directive prévoit que la fusion transfrontalière est soumise à l'assemblée générale des sociétés qui fusionnent. Elle prévoit également que l'absorption et la fusion entraînent la disparition des sociétés absorbées ou fusionnées et la transmission du patrimoine actif à la société résultant de l'opération d'absorption ou de fusion. Ces principes, dont certains sont mentionnés au code de commerce, sont relatifs au régime des obligations civiles et commerciales. La proposition relèverait, en droit interne, du domaine législatif et doit être, en application de l'article 88-4 de la Constitution, transmise au Parlement.

Motivation et objet :

Cette proposition de directive vise à créer un cadre juridique pour faciliter les fusions transfrontalières de sociétés de capitaux.

Dans l'état actuel du droit, les divergences entre les législations nationales dont relèvent les sociétés commerciales qui fusionnent constituent un obstacle à de telles opérations. Ainsi, les fusions transfrontalières ne sont pas autorisées dans certains Etats membres (Allemagne, Autriche, Danemark, Finlande, Grèce, Irlande, Pays-Bas, Suède), une situation qui oblige parfois les sociétés de ces pays à recourir à des montages juridiques, coûteux et compliqués, tels que la liquidation des sociétés concernées et la constitution d'une nouvelle société.

La Commission a présenté, en décembre 1984, une première proposition de directive sur le sujet, qui n'a jamais été adoptée, en raison des difficultés suscitées par la question de la participation des travailleurs aux organes de direction de l'entreprise fusionnée.

Ce texte a été retiré en 2001, après que ce blocage politique a été levé par l'accord obtenu, en décembre 2000, sur une autre proposition de directive, relative à l'implication des travailleurs dans la société européenne, qui fixe les règles de base en la matière( 1).

La Commission a donc pu engager des travaux visant à préparer une nouvelle proposition de directive sur les fusions transfrontalières, en liaison avec ceux du Groupe d'experts de droit des sociétés, dont les conclusions figurent dans sa communication du 21 mai 2003 sur la modernisation du droit des sociétés.

Fiche d'évaluation d'impact :

Aucune fiche d'évaluation d'impact n'a été transmise.

Appréciation au regard du principe de subsidiarité

L'objectif poursuivi par la proposition de la Commission européenne, c'est-à-dire permettre la fusion entre sociétés établies dans des Etats membres différents, ne peut être réalisé de manière suffisante par les Etats membres agissant isolément. La directive semble donc se conformer au principe de subsidiarité fixé par l'article 3B du traité sur l'Union européenne.

Contenu et portée :

La définition de la fusion (par absorption ou par constitution d'une nouvelle société) retenue par la proposition de la Commission est reprise de la directive 90/434/CEE, qui vise la fusion de sociétés d'Etats membres différents et d'autres formes de société que la société anonyme( 2).

Le champ d'application de la proposition recouvre toutes les sociétés de capitaux communautaires, qui jouissent de la personnalité juridique et ont un patrimoine social séparé. Sont donc concernées les sociétés anonymes, les sociétés en commandite par actions et les sociétés à responsabilité limitée.

S'agissant de la loi applicable à chacune des sociétés qui fusionnent, l'article 2 de la proposition prévoit que chaque société reste, pour cette opération, soumise aux dispositions nationales qui régissent les fusions internes.

S'agissant des mesures concernant l'information et la publicité, les articles 3 et 4 de la proposition prévoient que :

- chaque organe de direction ou d'administration de chacune des sociétés qui fusionnent établit un projet commun de fusion transfrontalière. Ce projet comprend notamment la forme, la dénomination, le siège statutaire des sociétés qui fusionnent et ceux envisagés pour la société issue de la fusion, ainsi que les statuts de la société issue de la fusion ;

- pour chacune des sociétés qui fusionnent, une publicité, un mois au moins avant la date de la réunion de l'assemblée générale de chacune des sociétés qui fusionnent, soit assurée pour les indications concernant la forme, la dénomination et le siège des sociétés qui fusionnent et ceux envisagés pour la société issue de la fusion, ainsi que le registre public auprès duquel ont été déposés les actes des sociétés qui fusionnent et leur numéro d'immatriculation dans ce registre.

Par ailleurs, comme la législation de tous les Etats membres prévoit un rapport sur le projet de fusion rédigé par un ou plusieurs experts pour chacune des sociétés qui fusionnent à l'échelon national, la Commission propose, pour limiter les frais d'experts dans le cadre d'une fusion transfrontalière, d'établir un rapport unique, destiné à l'ensemble des associés des sociétés qui participent à une opération de fusion transfrontalière.

L'obligation de faire approuver le projet commun de fusion transfrontalière par l'assemblée générale de chacune des sociétés qui fusionnent est posée par l'article 7 de la proposition.

La proposition laisse à chaque Etat membre le soin de désigner les autorités compétentes pour contrôler la légalité de la fusion pour la partie de la procédure relative à chacune des sociétés qui fusionnent et qui relèvent de sa législation nationale.

Enfin, l'article 14, qui traite de la participation des travailleurs, n'est applicable que lorsque l'une des sociétés qui participent à la fusion transfrontalière est régie par des règles, obligatoires ou volontaires, de participation des travailleurs et pour autant que la législation de l'Etat membre dans lequel la société issue de la fusion est immatriculée ne prévoit pas de telles règles. Dans tous les autres cas, la législation nationale applicable à la société issue de la fusion détermine les règles de participation des travailleurs. Toutes les obligations (contrats de travail préexistants) sont transférées obligatoirement à la nouvelle direction de l'entreprise fusionnée. Tous les droits acquis convenus par convention collective, ainsi que les droits à prestation vieillesse, invalidité ou autres, sont entièrement préservés.

Réactions suscitées :

Les discussions menées au sein du groupe de travail " droit des sociétés " du Conseil font apparaître les demandes de clarification suivantes :

- s'agissant du champ d'application , l'Allemagne demande que la directive ne couvre, dans un premier temps, que les SA ou les SARL, tandis que les Pays-Bas et la Finlande ont défendu le principe d'une approche par liste positive. La Commission a précisé que, s'agissant des coopératives ou des autres formes de société, elles sont couvertes par la directive, mais que la législation nationale continue, en cas de fusion transfrontalière, de s'appliquer si elle interdit, sur le plan interne, les fusions entre coopératives ou avec d'autres formes de sociétés ;

- s'agissant de la participation des travailleurs , cette question nourrit l'essentiel des discussions. La directive prévoit que, dès lors qu'une société fusionnante connaît la participation des travailleurs et qu'il n'existe pas de législation imposant un tel système dans l'Etat du futur siège, des négociations doivent s'ouvrir, afin de déterminer les règles applicables. En cas d'échec de ces dernières, les dispositions de la directive portant statut de la société européenne s'appliqueront, sous réserve de l'accord des organes dirigeants et de l'existence d'un seuil minimal de 25 % des salariés bénéficiant déjà d'un tel système de participation.

Cette proposition présente un double risque :

- celui, pour certains Etats, que leurs travailleurs perdent leurs droits acquis à la participation ;

- celui, pour d'autres, qui ne connaissent pas de législation dans ce domaine, de se voir imposer un système de participation qui leur est étranger.

Consciente de ces risques, l'Allemagne veut éviter que ses travailleurs, qui bénéficient d'un système de participation plus favorable que dans d'autres Etats membres, perdent leurs droits, dans la mesure où la proposition de la Commission exclut le recours à la négociation quand, dans le pays d'accueil, il existe une obligation légale en matière de participation.

Dans ce but, elle propose de généraliser l'ouverture de la négociation à tous les cas de fusion, sans la restreindre aux cas dans lesquels la législation de l'Etat du siège ne connaît pas de régime de participation obligatoire.

La France soutient une telle généralisation de la négociation dès lors qu'une société connaissant un régime de participation est partie prenante à la fusion.

Elle défend cependant le principe d'une procédure de négociation reposant sur une durée limitée (6 mois au maximum) et un renvoi au droit national du lieu du siège en cas d'échec des discussions plutôt qu'aux dispositions de la directive sur la société européenne.

Elle soutient également la proposition allemande qui prévoit la possibilité de renégocier l'accord sur la participation en cas de changement important survenant dans la société, la Commission ne prévoyant aucune modification du régime de participation même si la structure de la société évolue.

Conclusion :

Après la présentation de ce texte par M. Daniel Garrigue, rapporteur, M. Jérôme Lambert a demandé si la perte de droits acquis que craint l'Allemagne englobe des domaines autres que la participation des travailleurs. Il s'est ensuite interrogé sur le fait de savoir si la création d'un cadre communautaire pour les fusions n'aura pas pour conséquence de faciliter la délocalisation des sociétés. En effet, ne doit-on pas craindre que ces facilités juridiques accordées aux entreprises n'aboutissent à remettre en cause la survie de certaines industries ?

Après que M. Daniel Garrigue ait rappelé que la logique même du marché intérieur tend à encourager la mobilité des sociétés commerciales, la Délégation a approuvé ce texte au cours de sa réunion du 9 juin 2004.

(1) La directive 2001/86 du 8 octobre 2001 prévoit la création, lors de la constitution d'une société européenne (SE), d'un groupe spécial de négociation représentant les travailleurs des sociétés participantes et des filiales et établissements concernés, qui est chargé de négocier avec l'organe compétent des sociétés participantes un accord sur les modalités d'implication des travailleurs au sein de la société européenne. Cet accord doit fixer notamment les règles relatives à la composition de l'organe de représentation au sein de la société, à la fréquence de ses réunions et aux procédures d'information et de consultation. Cependant, les Etats membres qui le souhaitent disposent de la faculté de ne pas transposer ces dispositions de base. En contrepartie, aucune société européenne, pratiquant la participation, n'aura son siège dans ce pays, sauf accord avec les représentants des travailleurs sur leur implication dans la société.
(2) La directive entend par " fusion " l'opération par laquelle : - une ou plusieurs sociétés transfèrent l'ensemble de leur patrimoine à une autre société préexistante ; - deux ou plusieurs sociétés transfèrent l'ensemble de leur patrimoine à une société qu'elles constituent ; - une société transfère l'ensemble de son patrimoine, activement ou passivement, à la société qui détient la totalité des titres ou parts représentatifs de son capital social.