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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION des AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES

COMPTE RENDU N° 45

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 3 mai 2000
(Séance de 16 heures 30)

Présidence de M. Jean Le Garrec, président

SOMMAIRE

 

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- Audition, en présence de la presse, de Mme Catherine Tasca, ministre de la culture et de la communication et de M. Michel Duffour, secrétaire d'Etat au patrimoine et à la décentralisation culturelle

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La commission a entendu Mme Catherine Tasca, ministre de la culture et de la communication et M. Michel Duffour, secrétaire d'Etat au patrimoine et à la décentralisation culturelle.

Le président Jean le Garrec a relevé que de nombreux textes de loi concernant l'audiovisuel comme le secteur culturel étaient actuellement en discussion au Parlement. Il faut noter qu'un travail de grande qualité a été effectué par la commission des affaires culturelles, en liaison avec Mme Catherine Trautmann. L'action culturelle de la commission s'est par ailleurs largement développée dans la période récente, comme en témoigne par exemple le travail approfondi réalisé par la mission d'information sur les musées conduite par M. Alfred Recours.

Divers dossiers doivent encore être traités de façon sérieuse dans des délais relativement brefs : on peut citer la question de l'avenir du cinéma indépendant, celle du droit de prêt dans les bibliothèques ou encore les problèmes rencontrés par les artistes du spectacle vivant.

Mme Catherine Tasca, ministre de la culture et de la communication a d'abord souligné que la création d'un secrétariat d'Etat au patrimoine et à la décentralisation culturelle dotait le ministère d'un véritable "moteur renforcé". Le ministère est conçu comme une entité unique et dans cette perspective, aucune division a priori des tâches et des services n'est intervenue entre la ministre et le secrétaire d'Etat, même si les missions liées à la décentralisation culturelle - qui intéresse particulièrement M. Michel Duffour - ont d'ores et déjà été précisées. La volonté de donner un sens renouvelé à la problématique de la décentralisation est et constituera l'un des axes de la politique à mettre en _uvre qui sont au nombre de trois : la diversité culturelle, l'égalité d'accès à la culture et la décentralisation culturelle.

Dans un contexte de globalisation des échanges, qui ne laisse pas de côté les biens et les services culturels, il revient à l'Etat de sauvegarder cette diversité culturelle dont les créateurs de notre pays ont tant besoin. A ce propos, il faut se féliciter de ce que le Gouvernement a accordé, dans le cadre du prochain collectif budgétaire devant être présenté au Parlement, une dotation exceptionnelle de 50 millions de francs destinée à améliorer les marges de création dans les spectacles vivants.

Sur un autre plan, il est essentiel que, face aux différentes tentatives de remises en cause, le droit d'auteur soit défendu.

Il convient par ailleurs de réaffirmer avec force le rôle assigné au secteur public de l'audiovisuel qui doit représenter une véritable alternative aux offres du marché, en respectant notamment les règles élémentaires de la diversité culturelle et du pluralisme. Tel est bien l'un des objectifs essentiels du projet de loi récemment examiné par l'Assemblée et pour lequel le Gouvernement apportera les moyens nécessaires. De même, l'ouverture du numérique terrestre aux opérateurs existants mais également à des nouveaux entrants permettra de proposer à tous les Français une offre renouvelée de chaînes généralistes, gratuites et de qualité.

L'impératif de la diversité culturelle doit, surtout, se décliner au niveau international. Il faut noter que la France a toujours été en pointe de ce combat, par exemple lorsque le Gouvernement de l'époque a, en 1993, fait accepter par ses partenaires la notion d'exception culturelle dans le cadre de l'OMC (Organisation mondiale du commerce). Il est indispensable de concevoir les _uvres d'art, et la culture au sens large, comme des biens ne pouvant se réduire à des produits marchands. Cependant, force est de constater que l'expression d'exception culturelle est rapidement apparue comme peu satisfaisante, juridiquement inexacte et essentiellement défensive. La notion de "diversité culturelle" paraît préférable et semble recueillir une adhésion plus large, notamment dans les enceintes internationales. Elle représente un objectif politique à atteindre et fait aujourd'hui figure de priorité pour l'Union européenne.

Il faut rappeler que, dans moins de deux mois, la France assurera la présidence de l'Union européenne. Aussi est-il important de recueillir dès à présent un soutien maximum de la part des différents ministres chargés de la culture sur les dossiers prioritaires de la défense de l'audiovisuel public, de la propriété intellectuelle, du prix du livre dans l'espace européen et de l'avenir des industries culturelles. Il est certain que la tenue de la CIG (Conférence intergouvernementale), à laquelle la présidence française devra veiller, constituera un événement décisif pour l'ensemble de ces problématiques.

Un deuxième axe fort de l'action du ministère porte sur l'égalité d'accès à la culture, qui reste, plus que jamais, une priorité essentielle de l'action publique.

La première des inégalités est d'ordre territorial et touche à l'équilibre Paris/régions. Cette question récurrente fait l'objet d'une attention permanente et il convient de l'appréhender avec lucidité et volontarisme, mais sans démagogie.

Paris est la capitale de la France et l'histoire l'a dotée d'institutions culturelles majeures, dont le fonctionnement repose quasi exclusivement sur l'Etat. Cela étant, ces dernières décennies, le ministère de la culture a largement progressé en termes de rééquilibrage de ses interventions, y compris entre Paris et le reste de l'Ile-de-France. Il est ainsi passé de 46,4 % du total des crédits d'investissement affectés aux régions, hors Paris, en 1998, à 48 % en 1999 ; pour 2000, l'objectif retenu est de 49,4 %.

Cette action sera poursuivie, même si des opérations importantes sont encore en instance à Paris. L'occasion en est donnée à travers les contrats de plan entre l'Etat et les régions. Par rapport à la période 94-99, la dotation culture est en augmentation de 73,3 % et elle atteindra 2,3 % du total contractualisé par l'Etat au lieu de 1,75 %, l'effort ayant principalement porté sur les régions précédemment les moins bien dotées.

La deuxième action du ministère en matière de lutte contre les inégalités d'accès à la culture est orientée en direction des jeunes, dans le cadre d'une coopération avec le ministère de l'éducation nationale et les collectivités territoriales. L'objectif est d'assurer, à terme, une éducation artistique et culturelle à tous, tout au long de la scolarité, au moyen, notamment, de l'extension des ateliers d'expression artistique dans les lycées et de la généralisation du programme "musique à l'école". La formation des professeurs d'écoles sera également un axe essentiel de cette politique.

Par ailleurs, les nouvelles technologies de l'information et de la communication peuvent, en matière d'accès à la culture et au patrimoine, se révéler la meilleure comme la pire des choses. Il convient donc que le ministère de la culture soit vigilant. Le programme gouvernemental vise à construire une société de l'information solidaire par l'accès du plus grand nombre à ces nouveaux outils. Des efforts seront déployés en faveur des équipements et des connexions mais également de la formation, de l'éducation et de l'amélioration de la convivialité des technologies employées.

Ainsi, le programme des « espaces culture multimédia » sera relancé pour qu'ils constituent des pôles de références dans chaque région. La connexion à hauts débits des lieux culturels et la bonne qualité des connexions seront favorisées. Une importance particulière sera également accordée aux questions de formation, notamment à travers le réseau des écoles d'art sous tutelle du ministère, qui forment aux nouveaux métiers du multimédia que sont notamment le design et le graphisme.

Enfin, le ministère cherchera à être exemplaire dans la politique d'accès à Internet, tout particulièrement en faveur des non voyants et des handicapés.

Le troisième volet de cette lutte contre "l'exclusion culturelle" concerne la poursuite et le renforcement de la décentralisation culturelle. Il convient en effet d'actualiser les évolutions passées pour adapter le besoin permanent de décentralisation aux exigences du temps présent. Le partenariat qui s'est noué dans les deux dernières décennies entre l'Etat et les collectivités territoriales a produit des résultats incontestables en terme d'aménagement du territoire, de mise en valeur du patrimoine et de développement des pratiques culturelles. Les collectivités locales sont devenues de véritables lieux d'initiatives qui consentent un effort budgétaire croissant au développement de la culture et développent en la matière une réelle capacité d'expertise et de suivi. Cette situation a, en conséquence, créé une nouvelle répartition des responsabilités entre l'Etat et les collectivités et entre les collectivités elles-mêmes. Une réflexion sur ces évolutions est en cours au sein du ministère, en concertation avec les associations d'élus locaux, sur la base des travaux de la commission Mauroy.

Dans ce contexte, le ministère s'attachera à poursuivre résolument la déconcentration de sa propre gestion, corollaire de la décentralisation culturelle. Alors que le ministère de la culture a eu longtemps la réputation - justifiée - d'être très centralisé, les directions régionales des affaires culturelles (DRAC) doivent désormais devenir "le ministère de la culture en région". Elles seront, pour cela, dotées des compétences et des moyens adéquats. Ainsi, le programme en cours de transfert, en région, de deux cents emplois sur quatre ans sera poursuivi. Par ailleurs, 66,71 % des crédits déconcentrables seront effectivement déconcentrés dans le cadre de l'exécution du budget 2000.

Cette démarche n'implique évidemment pas le renoncement ou le recul de la politique nationale. Le renforcement de la fonction d'évaluation de l'administration centrale doit permettre d'apprécier la conformité et la cohérence de l'action du ministère dans les régions. Le secrétaire d'Etat au patrimoine et à la décentralisation culturelle a entrepris dans ce but une tournée dans toutes les régions d'ici le 15 juin prochain qui lui permettra de faire un état des lieux de la décentralisation culturelle et de proposer de nouvelles actions.

La ministre a enfin évoqué le programme législatif futur impliquant son ministère. Parmi les chantiers en cours, s'inscrivent le projet de loi audiovisuel, celui des enchères publiques, la proposition de loi sur les trésors nationaux et le projet de loi sur l'archéologie préventive. A l'exception de ce dernier, tous devraient aboutir avant la fin de la présente session.

Parmi les chantiers législatifs nouveaux, celui des musées est de première importance ; il devrait s'enrichir des travaux en cours de la mission d'information sur les musées créée au sein de la commission. Les archives, l'établissement public culturel local et les écoles d'architecture constituent les autres projets prioritaires.

Il faut espérer que les moyens budgétaires qui seront définis dans la loi de finances 2001 seront à la hauteur de ces ambitions. On peut néanmoins d'ores et déjà se réjouir, des 550 millions consentis au ministère de la culture dans le cadre du collectif budgétaire. L'essentiel de cet effort sera certes consacré à la réparation des dégâts causés par les tempêtes de décembre dernier, mais ces moyens donneront aussi l'occasion de procéder à des améliorations ou des transformations qui étaient devenues nécessaires.

Un débat a suivi l'exposé de la ministre.

Le président Jean Le Garrec a insisté sur trois domaines qui doivent, selon lui, faire l'objet d'une attention toute particulière de la ministre : l'accroissement des aides déconcentrées à la création cinématographique et audiovisuelle dans le cadre de la réforme annoncée du compte de soutien (COSIP), la poursuite des efforts de rééquilibrage entre l'Etat et les régions et la présentation rapide de projets de loi sur l'établissement public culturel local d'une part et les écoles d'architecture d'autre part.

M. Didier Mathus a posé des question sur :

- la récente décision du CSA autorisant la publicité télévisée de sites internet dont l'opportunité et le fondement juridique sont tout à fait contestables ;

- l'état de la production audiovisuelle française qui tend à baisser, voire à stagner, en dépit d'un dispositif d'incitation très sophistiqué et qui souffre sans doute de la position dominante de la première des chaînes hertziennes ;

- la présentation prochaine d'un projet de loi sur la société d'information qui devrait mettre en première ligne le ministère de la culture et de la communication afin que l'approche retenue ne soit pas uniquement commerciale et économique.

M. Michel Herbillon a formulé les observations suivantes :

- Les travaux de la commission laissent trop peu de place aux sujets culturels même si le déséquilibre a été quelque peu compensé par la constitution de la mission d'information sur les musées ; d'autres sujets ne devraient pas moins être évoqués, tels le livre et le cinéma.

- Si la promotion de la diversité culturelle, l'accès pour tous à la culture et la décentralisation culturelle sont des objectifs incontestables, la ministre a néanmoins été peu précise quant à leurs modalités de mise en _uvre.

Il a ensuite posé les questions suivantes :

- Quel est le calendrier précis pour les projets de loi sur les musées, les archives, les écoles d'architecture et l'établissement public culturel local ?

- Quelles sont les mesures fiscales et les évolutions envisagées en matière d'acquisition de biens culturels ?

- Quelle est la position de la ministre sur le mécénat ?

- Le patrimoine concourt, dans les banlieues, à la création de repères et d'éléments d'identification ; est-il dans l'intention de la ministre de remédier au manque de crédits pour la rénovation du patrimoine des communes et de renforcer les liens entre les politiques de la culture et de la ville ?

- Quelles sont les orientations envisagées dans le domaine du livre et les moyens prévus pour lutter contre le développement non maîtrisé des multiplexes ?

- Quelles seront les orientations retenues pour le Palais de Tokyo ?

- Est-il prévu d'octroyer les financements nécessaires à la restauration de l'Opéra Bastille qui tombe littéralement en morceaux ?

M. Bernard Outin estimant que la décentralisation culturelle était en panne, a posé la question des moyens prévus pour remédier aux déséquilibres des actions du ministère entre Paris et l'Ile-de-France, d'une part, l'Ile-de-France et le reste du pays, d'autre part.

M. Bernard Perrut a considéré que la décentralisation était un axe important à condition de se traduire par un soutien financier aux initiatives des collectivités territoriales. Il a ensuite posé les questions suivantes :

-S'agissant de l'égalité des chances et de l'accès des jeunes aux pratiques culturelles, est-il dans l'intention de la ministre de généraliser l'usage du chèque-culture et de soutenir les initiatives mises en _uvre dans les quartiers, souvent facteurs d'intégration ?

- En ce qui concerne le programme « musique à l'école » qui a été évoqué, est-on prêt à l'étendre aux collèges et lycées ?

- Quelle est la position du Gouvernement sur le problème du prêt payant dans les bibliothèques ?

- Enfin, est-il prévu de favoriser le mécénat culturel, les entreprises pouvant par exemple participer de façon très positive à la mise en valeur des maisons du patrimoine et des musées territoriaux, véritables lieux de culture régionale et authentique ?

M. Jean-Paul Bret a demandé des précisions sur deux questions d'actualité : le problème de la distribution dans le domaine du cinéma, qui a conduit la ministre à saisir le Conseil de la concurrence sur la question de la carte UGC et la question des droits d'auteur et du prêt payant. Sur ce deuxième point, même si le temps de la réflexion est nécessaire, il serait souhaitable d'avoir des indications sur la méthode et le calendrier envisagés.

M. Marcel Rogemont a posé les questions suivantes :

- Le débat sur la culture est nécessairement lié au problème des moyens qui lui sont affectés ; est-il dans l'intention de la ministre de reprendre la revendication traditionnelle du « 1 % culture » ?

- La décentralisation est déjà une réalité sur le terrain, les actions culturelles étant largement financées par les collectivités locales ; un nouvel effort de décentralisation signifie-t-il que l'on confiera aux acteurs locaux des espaces nouveaux ou que la co-responsabilité sera plus affirmée dans les champs existants ? Dans ce dernier cas, se posera la question des moyens financiers et institutionnels.

- La démocratisation culturelle a souvent été accompagnée par une moindre reconnaissance des artistes ; comment entend-on concilier cette démocratisation et la réaffirmation de la place de l'artiste, « artisan de l'inattendu » ?

M. Serge Blisko a évoqué les points suivants :

- La question du prêt payant dans les bibliothèques parait relativement secondaire au regard des menaces que font peser sur le droit d'auteurs les nouvelles technologies de l'information, par exemple dans le domaine de la musique.

- Il est nécessaire de faire évoluer la conception actuelle du patrimoine afin d'éviter une trop grande uniformisation et ce qu'on appelle le « façadisme ». La loi de 1913 sur le classement a, à cet égard, une vision trop architecturale, alors que la notion est désormais très ouverte.

Après avoir remercié la ministre pour sa participation à la table ronde concluant les travaux de la mission d'information de la commission sur les musées, le 24 mai prochain, M. Alfred Recours s'est interrogé sur l'utilisation des 550 millions de francs inscrits dans le collectif budgétaire pour restaurer le patrimoine après la tempête de décembre dernier. Les procédures d'affectation des dotations risquent en effet d'être très longues, car les architectes des Bâtiments de France attendent que les assurances constituent les dossiers avant de faire des propositions. Il n'est donc pas certain que les crédits puissent être consommés dans l'année. Par ailleurs, il serait souhaitable que les règles habituelles de financement par l'Etat des dépenses d'équipement des collectivités locales soient appliquées afin que celles-ci puissent bénéficier de subventions à hauteur de 60 % des investissements engagés.

En réponse aux intervenants, Mme Catherine Tasca, ministre de la culture et de la communication, a apporté les précisions suivantes :

- A sa demande, le président du CSA a différé au 1er septembre l'application de la décision du Conseil autorisant la publicité à la télévision pour certains sites internet. Il semble en effet que cette décision excède les pouvoirs de l'instance de régulation qui ne doit se substituer ni au pouvoir législatif, ni au pouvoir exécutif. Des recours en excès de pouvoir ont d'ailleurs été intentés devant le Conseil d'Etat pour faire reconnaître le caractère réglementaire de cette décision et donc l'incompétence du CSA. En tout état de cause, si la réglementation doit changer pour tenir compte de l'évolution des équilibres économiques, cela doit se faire après consultation des professionnels des secteurs concernés.

- L'inquiétude face à la baisse du volume d'heures de programmes audiovisuels produits en France est légitime, même si elle s'est accompagnée d'un accroissement du montant total des financements investis. C'est pour cette raison qu'une disposition du projet de loi sur l'audiovisuel en cours d'examen par le Parlement prévoit de réserver les droits sur ces programmes à leurs véritables producteurs, en incitant les chaînes de télévision à n'acquérir que des droits d'antenne. De façon plus générale, une réflexion est actuellement en cours pour permettre une évolution des aides accordées par le COSIP.

- Le futur projet de loi sur la société de l'information est en cours d'examen interministériel, dans lequel le ministère de la culture est très engagé. Le texte traitera de l'aspect industriel de ce sujet, mais aussi des questions déontologiques avec le respect du pluralisme et des droits d'auteur et de la maîtrise des contenus des programmes. Sur ces questions cependant, une réflexion commune doit être menée au niveau européen.

- Il est toujours important d'inscrire l'action du ministère de la culture dans un projet politique. Ce n'est que sur la base d'une politique culturelle définie par l'Etat que des échanges fructueux peuvent avoir lieu avec tous les acteurs du secteur, en vue de la réalisation d'objectifs partagés.

- Le calendrier législatif des textes culturels n'est pas encore définitivement arrêté car il doit s'insérer dans l'ensemble du programme de travail gouvernemental. Outre les nombreux textes encore en cours de navette, une priorité sera accordée d'ici la fin de la législature au projet de loi sur les musées et à un texte relatif à l'établissement public culturel, local outil essentiel au développement de la politique d'aménagement du territoire et de l'intercommunalité. M. Michel Duffour est d'ailleurs chargé d'actualiser ce dossier avec les collectivités locales et les ministères concernés, afin de pouvoir avancer.

- En ce qui concerne la fiscalité des _uvres d'art, la ministre s'est engagée à veiller au maintien de leur exonération au regard de l'ISF, qui lui apparaît fondamentale, car elle constitue un gage de la vitalité du marché des biens artistiques, en particulier des _uvres contemporaines.

- Quant au mécénat, s'il a connu une période faste il y a une dizaine d'années, il a vu depuis son champ se rétrécir, peut-être pour des raisons d'ordre fiscal. Une étude globale de ce sujet a été demandée aux services du ministère. Il convient toutefois d'avoir à l'esprit qu'une grande politique culturelle ne peut se fonder largement sur le mécénat, mais relève, en premier lieu, de la responsabilité publique. Toutefois, il est bon que les entreprises soutiennent la vie culturelle.

- La politique du patrimoine est en effet à mettre en relation avec les actions concernant les sites urbains déshérités, en relation avec le ministère de la ville. Par ailleurs, pour de nombreuses collectivités territoriales, la politique culturelle s'est amorcée autour d'un élément de patrimoine. Aujourd'hui, le ministère développe des actions précises sur la mise en valeur du patrimoine du XXème siècle et entend avoir une approche moins conservatrice, moins muséographique du patrimoine, pour l'intégrer à la politique de la ville. Ainsi, le décret qui a transformé la Caisse nationale des monuments historiques en Centre des monuments nationaux traduit la volonté d'assurer une meilleure insertion des monuments dans la vie locale.

M. Michel Duffour, secrétaire d'Etat au patrimoine et à la décentralisation culturelle, a observé que, depuis vingt ans, la carte culturelle de la France a été bouleversée, grâce à deux phénomènes : le développement du partenariat entre l'Etat et les collectivités locales et l'apparition de nouvelles formes des pratiques culturelles. Il est heureux qu'une institution comme la Caisse des monuments historiques se fixe comme politique de faire entrer les artistes dans les monuments et d'inscrire les monuments dans les pratiques culturelles des régions.

Précisant la méthode de travail qu'il a choisie, le secrétaire d'Etat a indiqué qu'il effectuerait un tour de France pour rencontrer les services des DRAC, les élus, les acteurs de la vie culturelle, y compris ceux qui sont en dehors des institutions, et qu'il ferait ensuite remonter les informations recueillies au ministère. Cinq régions seront visitées avant l'été.

Mme Catherine Tasca, ministre de la culture et de la communication, a ensuite apporté les précisions suivantes :

- L'objectif est de faire du Palais de Tokyo un centre de la jeune création. Ce projet pluridisciplinaire d'un type nouveau avance et l'ouverture est prévue en 2001.

- Le bâtiment de l'Opéra Bastille fait l'objet d'un contentieux en malfaçon relatif aux façades, mais, à l'intérieur, d'importants travaux de sécurité ont été réalisés, pour un montant de 60 millions de francs.

- La décentralisation culturelle est une réalité qui ne doit pas faire l'objet d'appréciations trop sévères, même si des efforts doivent être accomplis pour ce qui concerne les champs nouveaux de la culture.

- La politique envers les jeunes constitue une priorité. Elle passe par la démocratisation de l'accès à la culture et des actions spécifiques, comme la gratuité dans les musées. Par ailleurs, il faut mettre l'accent sur l'enseignement artistique et sur le renouveau de l'éducation populaire, en liaison avec les ministères de l'éducation nationale et de la jeunesse et des sports.

- La carte illimitée UGC va au-delà d'une politique d'abonnement, à laquelle on ne peut qu'être favorable. Elle ressortit à une conception dangereuse, qui ne lie plus l'abonnement au choix d'un film, empêche la remontée des droits aux ayants-droit et menace directement les circuits d'art et d'essai et les exploitants indépendants. Des discussions sont engagées et il a été demandé à l'UGC de suspendre les ventes de cette carte.

- Les multiplexes peuvent être parfois un outil de restructuration ou de création d'un centre ville, mais ce n'est pas toujours le cas. Il convient de trouver un équilibre avec les réseaux indépendants, en menant une étude approfondie de la géographie de leur répartition.

- La question du droit de prêt dans les bibliothèques ne doit pas être abordée avec manichéisme. La lecture publique n'a pas vocation à financer les auteurs et éditeurs et la gratuité, sous réserve du paiement d'un abonnement, doit être maintenue. En revanche, la politique des rabais consentis par les libraires-grossistes aux collectivités locales pose problème. Une concertation sera engagée avec les élus et les signataires de pétitions.

- L'objectif du "1 %" du budget de l'Etat pour le ministère de la culture sera maintenu car la responsabilité de l'Etat est engagée sur ce point et la force du symbole est réelle.

- Le collectif budgétaire prévoit 550 millions de francs supplémentaires pour le budget de la culture en 2000, dont 200 millions de francs pour les réparations du patrimoine n'appartenant pas à l'Etat et 300 millions de francs pour le patrimoine de l'Etat. 300 autres millions de francs devront probablement être dégagés par la suite. Dans tous les cas, les délais d'engagement de ces sommes seront très courts.


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