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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

COMPTE RENDU N° 43

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 30 juin 1999
(Séance de 10 heures)

Présidence de M. Jack Lang, Président

SOMMAIRE

 

page

– Projet de loi autorisant la ratification de l'accord euro-méditerranéen
   entre les Communautés européennes et l'Etat d'Israël (n° 82) - rapport ..........


3

– Accord de coopération transfrontalière avec l'Italie (n° 1660) - rapport ..........

6

– Accord de coopération transfrontalière avec l'Allemagne (n° 1662) - rapport ..........

8

– Convention d'entraide judiciaire en matière civile avec le Brésil (n° 784) - rapport ..........

9

– Conventions d'extradition et d'entraide en matière pénale avec le Brésil (n° 1196) - rapport ..........

10

– Accords d'investissements avec le Guatemala, le Honduras et le Nicaragua
   (nos 1650, 1651 et 1652) - rapport ..........


11

– Accords de voisinage et de sécurité sociale avec la principauté de Monaco
   (n° 1430, 1431 et 1469) - rapport ..........


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– Informations relatives à la Commission ..........


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Accord euro-méditerranéen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres et l'Etat d'Israël

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Henri Bertholet, le projet de loi autorisant la ratification de l'Accord euro-méditerranéen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et l'Etat d'Israël, d'autre part (n° 82).

M. Henri Bertholet a tout d'abord souhaité apporter des éclaircissements quant au calendrier d'examen de ce texte par l'Assemblée nationale. En effet, examiné aujourd'hui par la Commission des Affaires étrangères, il ne sera inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée qu'à l'automne. C'est le fruit d'un compromis entre deux préoccupations exprimées par les parlementaires : ne pas cautionner des pratiques contraires à la lettre et à l'esprit de cet accord et ne pas gêner le développement des relations entre l'Union européenne et Israël et entre la France et Israël. Certains parlementaires peuvent légitimement souhaiter adresser un signe positif aux nouveaux dirigeants israéliens. D'autres préfèrent attendre que le nouveau gouvernement israélien ait fixé ses orientations.

Le Rapporteur a exposé quelles étaient les principales caractéristiques de l'Accord. Celui-ci renouvelle et approfondit des accords et des coopérations antérieurs. Ces dispositions techniques ont été mises en œuvre par anticipation grâce à la signature d'un accord intérimaire. L'Accord institue un dialogue politique qui entrera en vigueur après l'achèvement de la procédure de ratification. Le libre-échange industriel entre Israël et la Communauté européenne est une réalité déjà ancienne. L'Accord, de ce point de vue, ne fait que le confirmer et le renforcer. En revanche, il assouplit le régime des produits agricoles et ouvre des perspectives dans de nouveaux secteurs. Trois accords de coopération ont été signés dans les domaines des télécommunications, des marchés publics et de la recherche scientifique. L'Accord contribuera à enrichir des relations déjà très denses.

Le Rapporteur a rappelé que la ratification de cet accord avait été différée par l'Assemblée nationale pour deux séries de raisons. En premier lieu, cette ratification paraissait difficile alors que le processus de paix était complètement bloqué et que la situation des droits de l'Homme dans les Territoires demeurait préoccupante - en dépit du fait qu'Israël est la seule vraie démocratie de la région. En second lieu, la Commission des Affaires étrangères a marqué sa préoccupation à propos de l'application par Israël de certaines dispositions de l'accord intérimaire qui sont reprises par le présent accord. Israël considère en effet que les territoires occupés font partie de son territoire douanier et que les produits originaires de ces territoires peuvent bénéficier du régime commercial convenu avec la Communauté européenne. Israël fait également obstacle à l'application de l'accord commercial signé entre l'Union européenne et l'OLP.

La politique d'Israël n'a pas changé depuis les dernières élections car le nouveau Premier ministre n'a pas encore constitué son gouvernement. Cependant, différer plus longtemps la ratification de l'Accord pourrait être contreproductif. La France est perçue en Israël comme le pays européen le moins amical à son égard. D'autre part, la France a contribué à l'évolution positive de la politique de l'Union européenne au Proche-Orient qui a trouvé son expression la plus avancée lors du Conseil européen de Berlin le 26 mars 1999. A cette occasion, l'Union européenne a souhaité "l'accomplissement prompt" du droit des Palestiniens à l'autodétermination et a déclaré qu'elle était disposée à reconnaître un Etat palestinien dont la création ne pouvait, selon elle, être subordonnée au veto d'Israël. Cette détermination de l'Union européenne incline à penser que le moment est venu pour la France de s'appuyer davantage sur la politique européenne et donc de lever les entraves à l'instauration du volet politique de l'Accord.

Dans ce contexte, une ratification, qui pourrait s'appuyer sur les premières évolutions de la position israélienne, pourrait être une contribution à l'institutionnalisation d'un dialogue respectueux, exigeant et productif. Le débat sera l'occasion de rappeler les points sur lesquels doit se porter la vigilance des parlementaires.

Au bénéfice de ces observations, M. Henri Bertholet a donné un avis favorable à l'adoption du projet de loi.

M. François Loncle s’est déclaré en plein accord avec le Rapporteur. La Commission des Affaires étrangères a eu raison de différer la ratification de cet accord car les espoirs soulevés par les Accords d’Oslo avaient été étranglés par le gouvernement de Benyamin Nétanyahou. Aujourd’hui, l’élection d’un nouveau Premier ministre proche d’Ytzhak Rabin crée une situation nouvelle. La Commission des Affaires étrangères doit saluer ces nouvelles perspectives. Le Rapporteur a opportunément rappelé que la clé de voûte de cet accord était le respect du droit et la poursuite du processus de paix. Il serait utile que la Commission des Affaires étrangères envoie une mission sur place pour constater les avancées dans ces domaines.

M. Georges Sarre a approuvé la ratification de l’Accord et marqué son désaccord avec les analyses du Rapporteur. Il est choquant et malhabile de reporter cette ratification. La France doit avoir à l’égard d’Israël une politique claire et audacieuse. Le peuple israélien s’est prononcé souverainement contre la politique de M. Nétanyahou. Les positions de la France n’ont joué aucun rôle dans cette décision qui résulte d’une prise de conscience. La diplomatie doit agir et non se poser en censeur. Une mission de la Commission des Affaires étrangères serait une démarche emprunte de suspicion et n’aurait aucun résultat concret.

M. François Léotard a souligné la coïncidence de ce débat avec l’échec humiliant d'une mission en Israël du directeur d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient.

Il a exprimé deux regrets : celui que le développement des relations entre les universités ne soit pas suffisamment affirmé et celui que l'Accord n’ait pas été inscrit à l’ordre du jour de la présente session.

M. Pierre Brana a constaté que l’on attendait toujours les signes d’un changement positif de la politique israélienne. En conséquence, il a approuvé les conclusions du Rapporteur en souhaitant que ces signes apparaissent d’ici l’automne.

Mme Louise Moreau s’est déclarée favorable à la ratification de l’Accord. Elle a évoqué la réglementation israélienne relative au secret bancaire qui entrave parfois l’action des juridictions françaises dans le domaine de la lutte contre la corruption.

M. Georges Hage a estimé que si l’Etat palestinien ne voyait pas le jour, l'Histoire reculerait. Cet Etat serait une garantie de sécurité pour Israël. Le vote de la société israélienne a mis fin à trois ans de pouvoir nationaliste mais des interrogations subsistent. Le nouveau Premier ministre a fait quelques déclarations porteuses d’espoir mais la colonisation, obstacle majeur à la paix, devrait se perpétuer. Amnesty International, qui n'est pas une organisation frivole, a dénoncé la pratique de la torture.

Selon lui, il convient donc d’attendre qu’un nouveau gouvernement ait pris des décisions concrètes avant d’autoriser la ratification de ce texte. Il a annoncé qu’il voterait contre l’Accord afin de signifier l'inopportunité de cet examen par la Commission des Affaires étrangères.

Mme Marie-Hélène Aubert a jugé qu’il était délicat de dissocier l’examen de cet accord en Commission des Affaires étrangères de la discussion en séance publique. Aujourd’hui, beaucoup de points restent en suspens et l’actualité est lourde. La crise au Liban sud et les difficultés rencontrées par le directeur d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient ne créent pas un climat favorable. Au reste, l’adoption de ce texte par la Commission des Affaires étrangères ne serait pas un signal si fort. Il serait préférable que la Commission se prononce à l’automne. Pour ces raisons, elle a déclaré s’abstenir.

Mme Bernadette Isaac-Sibille a rappelé qu’une mission de la Commission européenne avait tenté de résoudre les contentieux commerciaux entre Israël et l’Union européenne. En reportant la proclamation de leur Etat, les Palestiniens ont fait une concession importante. De même, en renouvelant l’accord de coopération scientifique avec Israël, l’Union a fait un geste. Ces deux initiatives n’ont pas reçu de contrepartie de la part d’Israël. L’élection de M. Barak soulève un réel espoir mais sa politique n’est pas encore claire alors que le bombardement de Beyrouth, décidé il est vrai par M. Nétanyahou, n’est pas admissible. En conséquence, elle a déclaré qu’elle s’abstiendrait de voter ce texte aujourd’hui.

M. Michel Vauzelle a exprimé son accord avec les conclusions du Rapporteur. Les amis d’Israël se réjouissent que la page Nétanyahou soit tournée. La Commission des Affaires étrangères se doit de saluer cette évolution. Israël détermine souverainement sa politique mais n’est pas insensible à l’environnement international. Avec le développement du dialogue euro-méditerranéen, l’Union européenne peut favoriser une détente au Proche-Orient. L’approbation de cet accord est donc urgente.

Le Président Jack Lang a demandé au Rapporteur de préciser en quoi les pratiques israéliennes étaient en infraction avec certaines dispositions de l’Accord.

M. Henri Bertholet a exposé qu’il existait tout d’abord un contentieux relatif à l’exportation sous label israélien de jus d’orange en réalité importé du Brésil. Mais surtout, Israël et l’Union européenne divergent sur la lecture de l’Accord. Israël estime que les territoires occupés font partie de son territoire douanier et que les règles d’origine établies par l’Accord s’appliquent aux produits originaires de ces territoires. Par ailleurs, Israël ne reconnaît pas la validité de l'accord que l’Union a conclu avec l’OLP. A cela s’ajoutent les obstacles nombreux imposés au développement de l’économie palestinienne. Les participants de la mission de la Commission des Affaires étrangères en Israël ont pu constater que l’administration israélienne était intransigeante sur ces questions. On peut penser que cette position évoluera positivement, notamment à travers l’application des dispositions économiques de l’accord de Wye Plantation.

Il a précisé que les échanges inter-universitaires faisaient l’objet d’une courte référence à l’article 59 de l’Accord.

Le calendrier d’examen parlementaire de ce texte permet un compromis entre deux préoccupations : maintenir certaines exigences quant au respect des dispositions de l’Accord et ne pas entraver le dialogue.

Le Président Jack Lang a estimé qu’il convenait d’être rigoureux lorsque l’on examinait les dispositions d’un traité, spécialement celles relatives au droits de l’Homme et à la paix. Mais il ne peut y avoir deux poids et deux mesures. Le Parlement européen a ainsi adopté un accord avec la Turquie alors que la situation des droits de l’Homme aurait dû conduire à la décision inverse. En Israël, il existe des pratiques répréhensibles mais la plupart des Etats de la région ne s’illustrent pas par le respect des droits de la personne humaine. Pourtant, des accords d’association ont été adoptés sans difficultés par les parlements nationaux ; en particulier celui avec la Tunisie alors que les violations des droits et des libertés fondamentales sont quotidiennes sous ce régime.

Il convient par ailleurs de saluer le changement politique en Israël par l’adoption de cet accord qui devra être confirmée en séance publique même si les relations israélo-palestiniennes connaissent, comme cela est sans doute inévitable, de nouvelles difficultés.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n° 82).

Accord de coopération transfrontalière entre la France et l'Italie

La Commission a examiné, sur le rapport de M. François Loncle, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne relatif à la coopération transfrontalière en matière policière et douanière (n° 1660).

M. François Loncle a rappelé que l'Italie n'a pleinement intégré l'espace Schengen que plusieurs années après avoir signé la convention d'application : la levée des contrôles aux frontières intérieures italiennes a eu lieu le 1er avril 1998. Ce délai, exigé par la "mise aux normes" Schengen, n'a pas empêché la France et l'Italie d'élaborer la présente convention, basée sur l'article 39 de la convention d'application Schengen, et de la signer le 3 octobre 1997 à Chambéry.

Le Rapporteur a souligné que l'Italie demeure toujours, malgré les efforts entrepris par son gouvernement pour maîtriser l'immigration clandestine, un pays de destination et de transit pour les clandestins en provenance de nombreuses régions du monde. La frontière maritime est particulièrement sensible. La détérioration de la situation en Yougoslavie et aussi en Albanie, depuis plusieurs années, a eu pour conséquence une augmentation massive des flux. Le gouvernement italien procède à de nombreuses expulsions, mais aussi à une régularisation massive des clandestins, ce qui appelle une harmonisation au niveau de l'Union européenne.

Cette situation entraîne des conséquences pour la région frontalière franco-italienne, où les interpellations de clandestins sont en augmentation d'un peu plus de 30% en 1998. La réadmission en Italie d'étrangers en situation irrégulière a augmenté dans les mêmes proportions.

Dans ce contexte difficile, la présente convention devrait donner des moyens nouveaux à la coopération transfrontalière, en conférant une base juridique adéquate à la coordination des actions entre les services de police français et italiens et en les engageant à développer les patrouilles mixtes pour surveiller la zone frontalière et opérer les contrôles.

De même, en ce qui concerne la lutte contre la criminalité et la délinquance, la réunion des policiers et des douaniers des deux pays dans les futurs centres de coopération policière et douanière (CCPD) permettra d'accélérer l'échange d'informations entre les services et de préparer des actions en commun pour démanteler les trafics (fraudes, contrefaçon, drogue). Deux CCPD sont actuellement prévus, l'un à Vintimille et l'autre à Modane. Le Rapporteur a regretté que le Gouvernement envisage ces créations à moyens constants. Il demande au Gouvernement d'inscrire dans le projet de loi de finances pour 2000 des moyens supplémentaires pour le fonctionnement des centres, et souhaite que d'autres structures soient prévues à moyen terme.

Enfin, la coopération directe entre les unités sort renforcée de la convention et son développement au quotidien devrait apprendre aux policiers et aux douaniers à mieux intervenir sur le territoire du pays limitrophe, grâce aux procédures qui existent mais sont peu appliquées.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n° 1660 ).

Accord de coopération entre les autorités de police et les autorités douanières de France et d'Allemagne

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Marc Reymann, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne relatif à la coopération dans leurs zones frontalières entre les autorités de police et les autorités douanières (ensemble une déclaration) (n° 1662).

M. Marc Reymann a tout d'abord souligné que l'instauration de la libre circulation entre les Etats Schengen ne signifiait pas absence de contrôle dans l'esprit des concepteurs des accords : la convention d'application du 19 juin 1990 organise de nombreuses mesures compensatoires, dont découle le présent accord, qui a pour vocation de participer à l'édification de l'espace de sécurité que doit aussi être l'espace Schengen. Le présent accord, signé à Mondorf le 9 Octobre 1997 représente une étape supplémentaire de la coopération bilatérale avec l'Allemagne, coopération qui donne satisfaction. Elle se base essentiellement sur l'activité des commissariats communs (dont celui de Strasbourg effectue une tâche impressionnante par le nombre des demandes d'information et d'assistance traitées chaque année) et sur l'échange d'officiers de liaison spécialisés dans le domaine de l'immigration clandestine.

Les nouveaux centres de coopération policière et douanière se trouveront à la disposition de l'ensemble des services chargés des missions de police et de douane des deux pays : ils sont très attendus par les fonctionnaires affectés dans cette région, et la partie allemande attache une grande importance à l'entrée en fonctions du premier centre en cours d'installation à Mondorf. Le Rapporteur a souligné que cette création ne devait pas avoir pour conséquence la fermeture du commissariat commun de Strasbourg qui garde son utilité.

M. Marc Reymann a indiqué les missions assignées à la coopération transfrontalière : la lutte contre l'immigration irrégulière, la garantie de la sécurité et de l'ordre publics et la lutte contre la criminalité et la délinquance.

Il a constaté que les flux migratoires étaient élevés dans la région franco-allemande, et que les nationalités représentées parmi les clandestins étaient le plus souvent turque (kurde), yougoslave, irakienne, roumaine et algérienne. Il a souligné que le contrôle mobile dans la bande des 20 kms était beaucoup plus exigeant que l'ancien contrôle statique à la frontière, et que les moyens humains et matériels devaient être renforcés en conséquence. Toutefois la complémentarité et la coordination instaurées par la convention devraient permettre d'être plus efficace grâce à un meilleur déploiement des contrôles.

Enfin, la convention dresse une liste d'actes que les policiers pourront accomplir directement à la demande de leurs collègues étrangers sans en référer au juge. Ces dispositions souhaitées par l'Allemagne (dont les policiers disposent de prérogatives autonomes de police judiciaire) donnent à la convention franco-allemande son caractère original et novateur.

En conclusion, le Rapporteur a indiqué que la convention prévoit une coopération plus intégrée et se situant dans l'esprit du traité d'Amsterdam et a appelé à l'adoption du projet de loi.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n° 1662).

Convention d'entraide judiciaire en matière civile avec le Brésil

La Commission a examiné, sur le rapport de M. André Borel, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention d'entraide judiciaire en matière civile entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérative du Brésil (n° 784).

M. André Borel a exposé brièvement l'évolution du Brésil et l'état des relations franco-brésiliennes. Après avoir renoué avec la démocratie en 1985, le Brésil est entré, depuis l'élection de M. Fernando Henrique Cardoso en 1994, dans une ère de relative stabilité politique. M. Cardoso a alors engagé des réformes économiques structurelles qui ont porté leurs fruits : le Brésil se dote d'une nouvelle monnaie en 1994, parvient à maîtriser l'inflation, attire les capitaux étrangers et met en place le Marché commun du cône Sud avec l'Argentine, l'Uruguay et le Paraguay. Il doit néanmoins faire face aux conséquences de la crise économique et financière russe et asiatique, qui le contraint à dévaluer puis à laisser flotter sa monnaie. Le Brésil signe avec le FMI fin 1998 un accord prévoyant le versement d'une aide financière internationale de 40 milliards de dollars.

Les relations de la France avec le Brésil sont étroites et diversifiées. Le Brésil est notre premier partenaire en Amérique latine sur le plan de la coopération culturelle, scientifique et technique. Sur le plan économique, il est notre premier partenaire commercial et la première destination des investissements français à l'étranger. Enfin, sur le plan politique, les relations se sont fortement intensifiées entre les deux pays depuis 1996.

Le Rapporteur a ensuite exposé les principales dispositions de la convention d'entraide judiciaire signée le 28 mai 1996. Il s'agit d'un instrument de facture classique qui a pour objet de faciliter, par-delà les frontières, l'action de la justice, notamment la notification des actes judiciaires, la recherche de preuves et l'exécution des décisions de justice.

Par ailleurs, la convention de 1996 abroge une convention d'entraide judiciaire en matière civile que la France et le Brésil avaient signée en 1981. L'application de la convention de 1981 a en effet soulevé des difficultés, notamment en ce qui concerne la traduction des actes transmis entre les deux pays, l'utilisation des commissions rogatoires, la définition des actes dispensés de légalisation et l'exécution des décisions judiciaires concernant la garde des mineurs.

La convention de 1996 constitue donc un instrument plus opérationnel, qui est à même de donner un cadre efficace à la coopération judiciaire en matière civile entre la France et le Brésil.

Mme Bernadette Isaac-Sibille a rappelé qu’elle avait déjà demandé à plusieurs reprises que l’on insiste pour que soient insérées dans tous les accords que la France signe avec d’autres pays des dispositions stipulant le respect de la Convention des Nations Unies sur les droits de l’enfant et de la Convention de La Haye sur l’adoption internationale.

Le Président Jack Lang a indiqué que cette demande avait été transmise par écrit au Ministre des Affaires étrangères et qu’aucune réponse n’avait pour l’instant été reçue.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n° 784).

Conventions d'extradition et d'entraide judiciaire en matière pénale avec le Brésil

La Commission a examiné, sur le rapport de Mme Louise Moreau, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention d'extradition entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérative du Brésil (n° 1195) et le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérative du Brésil (n° 1196).

Mme Louise Moreau a d'abord présenté la convention d'entraide judiciaire en matière pénale signée entre la France et le Brésil. Il s'agit d'un texte de facture classique, s'inspirant des stipulations de la convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale de 1959. Les deux Etats s'engagent à s'accorder dans ce domaine l'aide judiciaire la plus large possible. Les décisions d'arrestation et les infractions militaires sont toutefois exclues du champ d'application de la convention. La convention énumère des possibilités de refus d'entraide qui concernent les infractions ne faisant pas l'objet d'une double incrimination et les demandes d'entraide pouvant porter atteinte aux intérêts essentiels de l'Etat ou motivées par des considérations tenant au sexe, à la race, à la religion ou aux opinions politiques de la personne. Elle stipule également que l'Etat requis fait exécuter les demandes d'entraide qui ont pour objet d'accomplir des actes d'enquête ou d'instruction ou de communiquer des pièces à conviction et des documents.

Mme Louise Moreau a ensuite évoqué les principales stipulations de la convention d'extradition. Il s'agit d'un instrument de facture classique, inspiré de la Convention européenne d'extradition de 1957. Aux termes de cette convention, les deux Etats s'engagent à se livrer réciproquement toute personne poursuivie pour une infraction pénale ou recherchée aux fins d'exécution d'une peine. L'infraction donnant lieu à extradition doit revêtir un certain caractère de gravité : elle doit être passible d'une peine privative de liberté d'au moins deux ans. La convention distingue les cas de refus obligatoire d'extradition des cas de refus facultatif. Les premiers concernent, par exemple, les infractions politiques, les demandes d'extradition de personnes ayant la nationalité de l'Etat requis ou ayant fait l'objet d'un jugement définitif. Enfin, la convention offre à la procédure et à la personne extradée un certain nombre de garanties. Le principe de spécialité est ainsi affirmé : l'Etat requérant ne peut tirer profit de la présence de l'extradé sur son territoire pour le poursuivre, le juger ou le détenir pour des faits différents de ceux ayant motivé l'extradition ou antérieurs à sa remise.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté les projets de loi (nos 1195 et 1196).

Accords d'investissements avec le Guatemala, le Honduras et le Nicaragua

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Pierre Brana, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Guatemala sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (n° 1650), le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Honduras sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (n° 1651) et le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Nicaragua sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (n° 1652).

M. Pierre Brana a tout d’abord souhaité exprimer sa satisfaction devant le court délai qui s’est écoulé entre la signature des trois accords d’investissements et leur examen en Commission. En effet, ces accords avec le Guatemala, le Honduras et le Nicaragua ont été signés en 1998, respectivement le 27 mai, le 28 avril et le 13 février. Ils sont à l’image des quelque 85 accords que la France a d’ores et déjà conclus avec des pays très divers, puisqu’ils reprennent les grands principes du droit international dont l’application permettra d’établir un cadre juridique sûr qui favorisera l’activité des entreprises françaises dans ces pays. Ils s’inscrivent dans une politique générale de renforcement des liens unissant l’Europe, et plus particulièrement la France, avec les pays d’Amérique latine dont la manifestation première passe par l’engagement résolu de ces pays en faveur de réformes politiques : les trois pays s’efforcent en effet de consolider leur ancrage démocratique, de lutter contre la corruption et de moderniser l’Etat.

Parallèlement aux réformes politiques, ces trois pays tentent également de redresser, souvent avec l’aide de la communauté internationale, une situation économique dégradée qui présente des caractéristiques communes : les cultures agricoles d’exportations sont largement dominantes ; une forte proportion de la population, souvent plus de 70 %, vit sous le seuil de pauvreté ; le poids de la dette extérieure publique est considérable ; la forte dépendance à l’égard de l’aide et des financements extérieurs est encore accrue par la catastrophe économique engendrée par l’ouragan « Mitch » à la fin de l’année dernière.

S’agissant plus précisément du Guatemala, la récente mission du MEDEF dans ce pays en octobre 1998 a ouvert la porte du marché guatémaltèque aux entreprises françaises, confortées par la possibilité de financement des échanges. Le plafond de la garantie COFACE est de 10 millions de francs pour le court terme et de 20 millions de francs pour le moyen terme. La place de la France est certes plus que modeste avec une part de marché de 0,8 % (24ème fournisseur) et passe actuellement essentiellement par des filiales commerciales (Rhône-Poulenc Agrochimie, Alcatel, etc.). La Société Générale est la seule banque française implantée dans ce pays. Elle a ouvert en 1996 un bureau de représentation compétent pour l’Amérique centrale. L’afflux de 678 millions de dollars d’investissements directs entre 1990 et 1997 n’a donc pratiquement pas concerné les entreprises françaises qui n’ont pas non plus participé aux premières privatisations (chemins de fer, poste, électricité, télécommunications). Des opportunités subsistent toutefois grâce à la poursuite des privatisations et aux projets bénéficiant de financements multilatéraux (Banque Interaméricaine de Développement, Union Européenne, Banque Mondiale…). D’une manière générale, de nombreux projets pourraient concerner les secteurs porteurs de l’eau, l’électricité, les transports, les télécommunications, les biens d’équipements pour le secteur agro-alimentaire et le tourisme.

S’agissant du Honduras, notre part de marché n’est que de 0,6 %. Le plafond de la garantie COFACE s’élève à 30 millions de francs pour le court terme mais reste fermé pour le moyen terme. La présence française est principalement due à SOFREAVIA qui a réalisé un contrat de fourniture d’équipements aéroportuaires pour l’aéroport de San Pedro Sula. Lafarge (ciment) et Elf Antargaz (distribution de gaz domestique) ont pris des participations majoritaires dans des entreprises locales. Le développement des investissements étrangers au Honduras est récent : 205 millions de dollars ont été investis entre 1995 et 1997. La politique de cession des actifs publics introduite par le gouvernement devrait favoriser les investissements dans les domaines des télécommunications, des aéroports, de l’électricité et de l’hydraulique urbaine.

Enfin, au Nicaragua, la part de marché française est de 0,5 % et il n’y a pas d’investissement direct français. La COFACE ne délivre pas, pour l’instant, de garantie pour les crédits export à court et moyen terme en raison des difficultés économiques et financières du pays. On peut simplement signaler la fabrication sous licence par une entreprise locale de yaourts Yoplait alors que les projets se font plus nombreux. Pourtant l’économie locale s’avère attractive pour les investissements étrangers qui ont représenté 245 millions de dollars entre 1995 et 1997 et qui ne sont nullement le fait de cessions d’actifs publics. Ils témoignent simplement de la confiance des entreprises étrangères dans les potentialités de développement de ce pays.

Mme Marie-Hélène Aubert a souhaité faire une remarque d’ordre général sur les accords d’investissements que la France signe régulièrement avec différents pays. Elle a estimé qu’il y avait beaucoup d’hypocrisie à la fois dans le terme « réciproques » utilisé dans ces accords pour qualifier l’encouragement et la protection des investissements, mais aussi à l’article qui instaure un « traitement juste et équitable ». Son sentiment est que l’on protège ainsi plus les intérêts d’une partie signataire de ces accords, en l’occurrence les pays du Nord de l’Europe et leurs grandes multinationales, que ceux de l’autre partie, c’est-à-dire les pays du Sud.

Le Président Jack Lang a souligné que la grande pauvreté de ces pays était un problème mondial. Il a estimé que la France ne mettait pas en valeur avec suffisamment d'énergie sa culture, son commerce et sa dynamique d’investissements alors qu’elle est souvent sollicitée par ces pays, pour lesquels cet « impérialisme » peut être un contrepoids important à l’hégémonie américaine.

Mme Louise Moreau a rappelé qu’il y a quelques années tous les pays d’Amérique latine avaient été reçus à l’Assemblée nationale et qu’il serait bon de renouveler cette expérience.

M. Paul Dhaille a fait observer que seules les multinationales, et non pas les PME-PMI, avaient les moyens de commercer avec ces pays.

M. Pierre Brana a tout d’abord répondu que le terme « réciproques » était aussi une question de dignité pour ces pays, une sorte de reconnaissance officielle. La signature de tels accords avec eux marque ainsi à la fois leur volonté et leurs efforts en faveur de la démocratisation, de la lutte contre la corruption, etc., que l’on ne peut qu’encourager. Elle leur permet d’être à égalité avec les pays démocratiques dans le concert des Nations. Enfin, il a rappelé que des remises de dettes avaient été opérées, notamment par la France, à l’égard de ces pays, où notre part de marché est d’ailleurs plus que modeste.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté les projets de loi (nos 1650, 1651 et 1652).

Conventions voisinage et sécurité sociale avec Monaco

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Charles Ehrmann, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation d'un accord sous forme d'échange de lettres portant aménagement du titre Ier de la convention de voisinage entre la France et la Principauté de Monaco du 18 mai 1963 (n° 1430), le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation d'un accord sous forme d'échange de lettres relatif à l'application de l'article 7 modifié de la convention de voisinage entre la France et la Principauté de Monaco du 18 mai 1963 (n° 1431) et le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'avenant n° 5 à la convention du 28 février 1952 entre la France et la Principauté de Monaco sur la sécurité sociale (n° 1649).

M. Charles Ehrmann a tout d'abord rappelé les principales étapes historiques de l'édification de la Principauté de Monaco, et souligné que son organisation institutionnelle originale a récemment empêché Monaco d'intégrer le Conseil de l'Europe. Il a souligné le dynamisme économique de la Principauté, précisant que celle-ci emploie 38 000 personnes et connaît un taux de chômage de 7%. En outre le chiffre d'affaires élevé de ses entreprises (44 milliards de francs) doit peu, contrairement à ce que l'on croit souvent, au jeu (1,7 milliard).

Le Rapporteur a expliqué que les deux premiers accords bilatéraux organisent l'insertion de Monaco dans l'espace Schengen, tout en préservant la libre circulation des personnes traditionnelle avec la France.

Les accords modifient la Convention de voisinage de 1963, afin de mettre le régime de visas monégasque en harmonie avec les exigences découlant de la convention d'application de l'accord de Schengen de 1990. Le régime du court et du long séjour a été distingué et adapté, un contrôle systématique aux frontières extérieures du territoire de la Principauté (au port et à l'héliport) sera exercé conjointement par les autorités françaises et monégasques. Les autorités françaises seront garantes de la sécurité de la frontière extérieure Schengen vis-à-vis de nos partenaires de l'espace Schengen. La consultation du système d'information Schengen par les agents français permettra d'éviter l'entrée des personnes indésirables signalées par la France ou par les autres Etats Schengen dans le système. On rappellera que les agents monégasques n'ont pas accès au Système d'information Schengen, Monaco n'étant pas partie à la convention.

Le troisième accord met à jour les relations bilatérales dans le domaine de la sécurité sociale. L'application de la convention de sécurité sociale de 1952 donnait lieu à des dérives financières, qui entraînaient un surcoût annuel de 120 millions de francs pour le régime français. Le présent avenant à la convention donne satisfaction aux deux Parties, en étendant le champ d'application personnel et territorial de la convention, mais aussi en prenant en compte les préoccupations françaises de maîtrise des dépenses de santé, grâce à la suppression des particularités exorbitantes en faveur des assurés de la Principauté.

En conclusion, le Rapporteur a appelé à l'adoption des trois projets de loi.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté les projets de loi (nos 1430, 1431 et 1649).

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Informations relatives à la Commission

Rapporteurs pour avis pour le projet de loi de finances pour 2000 :

· Première partie du projet de loi de finances (article relatif à l'évaluation du prélèvement communautaire)

- Affaires européennes Mme Marie-Hélène Aubert

· Deuxième partie du projet de loi de finances

A. Dépenses civiles

Affaires étrangères :

- Affaires étrangères M. Jean-Louis Bianco

- Coopération et Développement M. Pierre Brana

- Relations culturelles internationales

et Francophonie M. Georges Hage

Commerce extérieur :

- Commerce extérieur Mme Louise Moreau

B. Dépenses militaires

Défense :

- Défense M. Jean-Bernard Raimond

Le Président Jack Lang a indiqué que la Conférence des Présidents avait décidé qu'à titre expérimental, le Budget des Affaires étrangères et de la Coopération serait examiné selon une nouvelle procédure laissant la part essentielle au débat en Commission.

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