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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

COMPTE RENDU N° 20

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 26 janvier 2000
(Séance de 10 heures)

Présidence de M. Jack Lang, président

SOMMAIRE

 

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- Convention sur la sûreté de la gestion du combustible usé et sur la sûreté
de la gestion des déchets radioactifs (n° 1432) - rapport


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- Convention d'entraide judiciaire avec la Thaïlande (n° 1658) - rapport

4

- Proposition de résolution de M. Alain Barrau dans le cadre du partenariat
euro-méditerranéen (MEDA) (n° 2033) - rapport


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- Information relative à la Commission

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Convention sur la sûreté de la gestion du combustible usé et sur la sûreté de la gestion des déchets radioactifs

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Georges Sarre, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention commune sur la sûreté de la gestion du combustible usé et sur la sûreté de la gestion des déchets radioactifs (n° 1432).

M. Georges Sarre a tout d'abord rappelé que la Convention commune sur la sûreté de la gestion du combustible usé et sur la sûreté de la gestion des déchets radioactifs avait été adoptée à Vienne le 5 septembre 1997 par une conférence diplomatique organisée sous l'égide de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA).

La Convention commune vient compléter un processus de contrôle de l'utilisation de l'énergie atomique engagé depuis plusieurs années, notamment avec la Convention sur la sûreté nucléaire adoptée le 17 juin 1994 dont le champ d'application était la sûreté des centrales électronucléaires. Son champ d'application est double puisqu'il concerne à la fois le combustible usé et les déchets radioactifs générés par l'exploitation des réacteurs nucléaires. Il ne s'agit donc que du nucléaire civil. Il ne s'agit pas des déchets radioactifs ne contenant que des matières radioactives naturelles et ne provenant pas du cycle du combustible nucléaire comme les déchets miniers par exemple.

Les innovations de la présente Convention portent sur trois points sensibles. En premier, le combustible usé n'est pas un déchet radioactif puisqu'il il est une matière susceptible d'être retraitée. En conséquence, il est considéré comme une ressource dans le cycle de production de l'énergie nucléaire. Et un certain nombre de pays, dont la France, pratiquent l'option retraitement du combustible usé. C'est pourquoi, sur proposition française, la présente Convention est une Convention commune, c'est-à-dire qui traite à la fois de la sûreté de la gestion des déchets radioactifs et de la sûreté de la gestion du combustible usé et ce au moyen de deux séries parallèles de prescriptions que l'on trouve au Chapitre 2 intitulé "Sûreté de la gestion du combustible usé" et au Chapitre 3 intitulé "Sûreté de la gestion des déchets radioactifs". Il s'ensuit que le combustible usé détenu dans les installations de retraitement qui fait l'objet d'une activité de retraitement n'entre donc pas dans le champ d'application de la présente Convention sauf déclaration contraire de la Partie contractante selon laquelle le retraitement fait partie de la gestion du combustible usé. Le Rapporteur a précisé néanmoins que la France acceptait que le combustible usé retraité tombe sous le coup de la présente Convention.

Le deuxième point sensible concerne les déchets radioactifs et le combustible usé faisant partie, ou provenant, de programmes militaires ou de défense. Ceux-ci ne sont pas visés par la présente Convention sauf s'ils ont été transférés définitivement à des programmes exclusivement civils et sont gérés dans le cadre de ces programmes ou sauf déclaration contraire par la Partie contractante.

Enfin un troisième point sensible traite des mouvements transfrontières de combustible usé et de déchets radioactifs. Un principe de base s'applique : le stockage du combustible usé et des déchets radioactifs a lieu dans l'Etat où ils ont été produits. Le droit souverain de chaque Etat d'interdire l'importation de combustible usé et de déchets radioactifs d'origine étrangère sur son territoire est reconnu. Toute expédition au sud de 60 degrés de latitude sud est interdite.

La Convention commune est donc moins un instrument normatif qu'un instrument visant à promouvoir une véritable culture de sûreté nucléaire et à développer des pratiques sures pour la gestion du combustible usé et des déchets radioactifs. C'est une Convention incitative qui réaffirme le principe de la responsabilité exclusive des Etats en matière de sûreté nucléaire. Elle définit des principes que les Etats transposent et mettent en _uvre au travers de mesures nationales.

La Convention impose cependant la mise en place par les Etats d'un cadre législatif et réglementaire permettant de régir la sûreté de la gestion de ces deux matières. A cet égard, le Rapporteur a précisé que la législation française était exemplaire.

En dépit du caractère incitatif de ce texte, des mécanismes de contrôle de la mise en _uvre par les Etats des mesures spécifiées par la Convention existent. Ils font l'objet du Chapitre 6 "Réunions des Parties contractantes".

Au vu de ces observations, M. Georges Sarre a recommandé l'adoption du projet de loi autorisant l'approbation de la Convention commune sur la sûreté de la gestion du combustible usé et sur la sûreté de la gestion des déchets radioactifs.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n° 1432).

Convention d'entraide judiciaire avec la Thaïlande

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Roland Blum, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume de Thaïlande (n° 1658).

M. Roland Blum a souligné que les négociations de la présente convention s'étaient étendues sur plus de vingt ans.

Il a rappelé que la Thaïlande avait connu, à l'instar des pays de la région, une profonde crise économique qui s'était traduite en 1998 par une baisse de 10 % de son produit intérieur brut. Depuis lors, l'important programme de réformes financières et économiques engagées sous la tutelle du FMI par le gouvernement libéral du Premier Ministre Chuan semble porter ses fruits. La croissance est redevenue positive en 1999 et les capitaux sont massivement revenus sur le marché.

Les relations franco-thaïlandaises, après avoir connu une certaine tension à l'occasion de ce que l'on a appelé "la guerre de la crevette", se sont améliorées ces derniers mois. Les entreprises françaises continuent de renforcer leur présence en Thaïlande.

La présente convention d'entraide judiciaire en matière pénale pose un principe de coopération et établit une procédure afin d'accélérer le traitement des demandes, appréciées jusqu'alors au cas par cas. L'obligation d'entraide judiciaire s'applique entre les parties de la manière la plus large possible en ce qui concerne les enquêtes et les poursuites d'infractions pénales dont la sanction relève de la compétence de leurs autorités judiciaires respectives. Cette obligation s'exerce dans des conditions précisées par les différents articles de la convention.

Mme Bernadette Isaac-Sibille a demandé des précisions sur la notion de transfèrement. Elle s'est par ailleurs inquiétée des conditions de détention en Thaïlande et aurait souhaité que la convention introduise la notion des droits de l'Homme.

Le Président Jack Lang a précisé que le terme de "transfèrement" était le terme consacré pour désigner l'action de transférer un prévenu, un prisonnier d'un lieu de détention à un autre.

M. Roland Blum a souligné que cette convention portait sur une entraide judiciaire en matière pénale et que son objet ne comprenait pas l'amélioration des conditions de détention en Thaïlande.

M. Pierre Brana a reconnu que les conditions de détention en Thaïlande étaient particulièrement dures mais a estimé que ce problème ne relevait pas de la présente convention et devait être réglé dans le cadre de la souveraineté de la Thaïlande.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n°1658).

Proposition de résolution de M. Alain Barrau dans le cadre du partenariat euro-méditerranéen

M. Michel Vauzelle a souligné que la politique méditerranéenne de l'Union européenne traverse, depuis plusieurs années, une période difficile. Pour tous ceux qui sont attentifs à l'établissement d'un équilibre entre le développement du Nord et celui du Sud, la période actuelle d'ouverture de l'Union vers les « pays frères » de l'Europe centrale et orientale comporte le risque de voir le développement de la zone méditerranéenne négligé ou moins favorisé.

Le Rapporteur a rappelé que les éléments principaux du partenariat euro-méditerranéen ont été définis à la conférence de Barcelone, tenue en 1995. Ils comprennent notamment la conclusion d'accords d'association entre l'Union et chacun des pays partenaires, ainsi que l'intervention du programme MEDA. Celui-ci se fondait jusqu'à présent sur un règlement du Conseil du 23 juillet 1996 et avait été doté de 4,685 milliards d'écus pour la première période de programmation, soit 1995-1999.

Ce programme, très ambitieux, a reçu une application très inférieure à ce que l'on pouvait espérer. Il est apparu que les procédures d'adoption des projets ainsi que la phase du paiement des crédits étaient trop lentes : le Rapporteur a pu constater ces dysfonctionnements ainsi que les insatisfactions tant de la part des autorités responsables de la mise en _uvre sur le terrain que des gestionnaires de Bruxelles lors de la mission qui lui avait été confiée précédemment par la Commission des Affaires étrangères sur le bilan du partenariat euro-méditerranéen. Le bilan dressé par la Commission européenne en juin 1999, portant sur la mise en _uvre du programme de 1995 à 1998, fait apparaître que si l'engagement des crédits a été de près de 100 %, le paiement en a été très retardé, ne s'élevant qu'à 26 % des crédits.

Le règlement de 1996 prévoyant une révision à l'issue de la première période d'application et de programmation financière, la Commission européenne a présenté, le 20 octobre 1999, une proposition de révision. Cette dernière a été examinée par la Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne, qui a adopté la proposition de résolution transmise à la Commission des Affaires étrangères.

La Commission européenne propose une nouvelle procédure d'adoption des projets qui, selon elle, permettrait de gagner trois mois. Elle consiste à modifier le mode d'intervention des Etats-membres lors de l'établissement des plans de financement indicatifs : ces plans sont établis pour un an et ils incluent la description du projet ou du programme, accompagnée du montant indicatif maximum du financement communautaire. Il s'agit des documents les plus précis de toute la procédure. La Commission européenne souhaiterait que la procédure de réglementation utilisée à ce stade soit remplacée par une procédure de gestion. Les pouvoirs respectifs de la Commission et ceux des Etats-membres (réunis au sein du Comité MED) sont différents dans l'une ou l'autre procédure. En pratique, les pouvoirs d'examen, de contrôle et de suivi des Etats-membres seraient significativement réduits.

Les représentants des Etats-membres sont apparus, pour une majorité d'entre eux, très hostiles à cette proposition lors des premières réunions qui se sont déroulées en groupe de travail du Conseil. Ils ont considéré que l'examen des projets à ce stade (et la possibilité de les amender) devait être préservé : il permet aux administrations d'être informées et de sensibiliser les partenaires économiques de l'éventualité d'appels d'offres dans tel ou tel domaine. Cette information est aussi précieuse pour la coordination de l'aide bilatérale avec l'aide communautaire.

La Commission européenne propose certes de remplacer le contrôle en aval par une concertation plus approfondie en amont, au stade de la planification « stratégique ». Mais cela crée une inégalité entre les Etats : certains seront bien informés et feront prendre en compte leurs vues, grâce à une présence étoffée sur le terrain, d'autres ne le pourront pas.

Les avantages de la nouvelle procédure ne semblent donc pas l'emporter sur ses défauts. La Commission reconnaît d'ailleurs, par la voix du commissaire chargé des relations extérieures, Chris Patten, que ses procédures internes portent leur part de responsabilité (ainsi les multiples approbations préalables et les trente signatures nécessaires pour certaines opérations, parfois mineures).

Le Rapporteur a estimé que l'on veut faire porter la responsabilité des lenteurs sur l'examen des projets par les Etats-membres. En fait, la réorganisation interne de la Commission européenne devrait améliorer significativement la situation.

M. Michel Vauzelle a ensuite mentionné d'autres points non pris en compte par la proposition de règlement, et dont il serait souhaitable de débattre dans les semaines ou les mois à venir. Ces points concernent la nécessité d'une programmation financière à un niveau significatif pour la prochaine période de programmation 2000-2006, alors qu'il s'agit de soutenir l'effort de plusieurs partenaires méditerranéens vers l'instauration d'un libre-échange euro-méditerranéen à l'horizon 2010, la déconcentration de la gestion de l'aide, et l'élargissement du champ des interventions de MEDA pour encourager la coopération sud-sud qui reste à un niveau extrêmement modeste.

Enfin, le Rapporteur a appelé la Commission européenne à rationaliser le rythme de présentation des projets devant le Comité MED, et à tenir ses engagements en ce qui concerne les redéploiements de personnel en faveur des services ayant la charge de MEDA et des autres programmes méditerranéens, dont la Cour des comptes européenne a souligné l'insuffisance des effectifs. A défaut d'un tel redéploiement, qui doit permettre de faire face à notre devoir de solidarité vis-à-vis de nos partenaires de la Méditerranée, l'on peut craindre que la réforme du règlement n'apporte pas les améliorations escomptées.

En conclusion, le Rapporteur a proposé l'adoption de la proposition de résolution présentée par M. Alain Barrau, Président de la Délégation, complétée par deux amendements qui ont pour objet d'apporter des précisions à cette résolution. Le premier amendement demande au Gouvernement de prendre position en faveur du maintien d'un examen individuel de chaque projet ou programme par les Etats-membres, le second rappelle la nécessité d'un redéploiement de personnel au sein de la Commission européenne en faveur de la gestion des programmes méditerranéens et le renforcement en collaborateurs experts dans le contrôle des comptes.

Après l'exposé du Rapporteur, M. Pierre Brana a demandé si la nécessité pour la Commission européenne d'étoffer ses services au moyen de collaborateurs experts dans le contrôle des comptes faisait allusion aux services de l'OLAF, structure récemment mise en place par la Commission pour protéger les intérêts financiers de la Communauté. Il a rappelé l'importance du contrôle vigilant sur l'utilisation des crédits, mentionnant les détournements récemment constatés dans la gestion du programme à destination de la Côte d'Ivoire.

Mme Martine Aurillac, soulignant que la Commission européenne doit procéder par redéploiement de ses ressources en personnel et non par recrutement, a proposé une modification formelle à l'un des amendements du Rapporteur, afin qu'il n'y ait aucun doute à ce sujet.

M. Michel Vauzelle a indiqué que des contrôles financiers devaient être institués au sein même de l'organe de gestion du programme MEDA. Il faut accroître le contrôle interne et c'est le sens de l'amendement.

Puis la Commission a successivement adopté les deux amendements et, conformément aux conclusions du Rapporteur, la proposition de résolution ainsi modifiée (n° 2033).

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Information relative à la Commission

A été nommé, le mercredi 26 janvier 2000 :

- M. François Loncle, rapporteur pour le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des Etats-Unis du Mexique sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (n° 1928).

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· Déchets nucléaires

· Programme MEDA

· Thaïlande


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