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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION de la DÉFENSE NATIONALE et des FORCES ARMÉES

COMPTE RENDU N° 8

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 17 octobre 2000
(Séance de 9 heures)

Présidence de M. Charles Cova, Président d'âge

SOMMAIRE

 

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- Audition des représentants des associations de retraités militaires sur le projet de budget
pour 2001


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La Commission a entendu les représentants des associations de retraités militaires sur le projet de budget pour 2001.

M. Pierre Ingouf, Président de la Confédération nationale des retraités militaires et des veuves de militaires de carrière (CNRM), a souligné que la plupart des associations participant à l'audition appartenaient au Conseil permanent des retraités militaires (CPRM). Il a précisé qu'elles avaient décidé de présenter en commun, au nom du CPRM, des propositions qui constituaient leur programme revendicatif minimum.

M. Pierre Ingouf a indiqué que ces propositions avaient été élaborées par des groupes de travail créés au sein du CPRM pour traiter des questions relatives aux domaines suivants : le pouvoir d'achat et l'avenir des retraites, les pensions militaires d'invalidité, l'accompagnement de la professionnalisation et les mesures à caractère social. Il a également précisé que le CPRM avait été associé aux travaux d'une commission chargée au sein du ministère de la Défense de la question des maladies professionnelles causées en particulier par l'amiante. Il a ajouté que les groupes de travail qu'il venait d'évoquer avaient, chacun, retenu quelques mesures prioritaires, relativement peu coûteuses, qui avaient été présentées à un collaborateur du Ministre de la Défense au cours de la session de juin du CPRM.

Avec l'autorisation de M. Charles Cova, Président, M. Pierre Ingouf a ensuite demandé aux représentants d'association ayant animé ces groupes de travail d'exposer leurs propositions.

M. André Arrouet, Président de l'Union nationale des sous-officiers en retraite (UNSOR), a présenté les propositions du groupe de travail sur l'avenir des retraites militaires.

Ce groupe de travail a pris note de l'engagement du Gouvernement de privilégier la concertation et de garantir la spécificité du régime de retraite de la fonction publique.

Il a également pris acte des propositions relatives à un possible allongement de la durée de cotisation, qui pourrait être portée à quarante annuités, à une prise en compte éventuelle d'une partie des primes dans le calcul de la pension ainsi qu'à la création d'un conseil d'orientation des retraites.

Il s'est déclaré attaché au régime institué par le code des pensions civiles et militaires de retraite au profit des fonctionnaires civils et militaires de l'Etat, rappelant le caractère régalien et immuable du métier des armes.

Le groupe de travail a fermement défendu le maintien du régime actuel de retraite des militaires, sans remise en cause du droit à pension à jouissance immédiate. Il a proposé une concertation réelle et approfondie sur une éventuelle modification de la durée de cotisation et des limites d'âge et exprimé le v_u que soit étudiée, après l'achèvement de la professionnalisation, la possibilité pour tout militaire d'accéder à une retraite à jouissance immédiate.

Enfin, après avoir souligné que la Ministre de l'Emploi et de la Solidarité avait reconnu que le pouvoir d'achat des retraités avait diminué de 1 % par an depuis 10 ans, il a demandé que soit examinée rapidement la prise en compte d'un pourcentage de primes ou indemnités pour le calcul de la pension de retraite, soulignant que ces primes ou indemnités constituaient 30 % de la solde perçue par les militaires en activité.

Indiquant que la Fédération nationale des officiers mariniers en retraite (FNOM) s'était vu confier le groupe de travail sur les maladies professionnelles causées notamment par l'amiante, M. Georges Gabrielli, Président de cette fédération, a souligné que, jusqu'au 7 mars dernier, les victimes étaient confrontées à leurs difficultés : d'une part, la nécessité de prouver l'imputabilité au service de la maladie, d'autre part, la fixation à 30 % du taux minimum d'invalidité nécessaire pour obtenir une pension de retraite en cas de maladie contractée en dehors d'opérations de guerre.

Il a alors indiqué que, le 7 mars dernier, des représentants du ministère de la Défense avaient accepté de prendre en considération les attestations délivrées par la Marine pour certifier que les victimes avaient été embarquées sur des bâtiments de guerre ou de servitude où elles avaient été en contact permanent avec l'amiante. Ils avaient également admis le principe du confinement qui permet de ne plus tenir compte des spécialités pour prouver l'imputabilité au service de la maladie. A cette date, la nécessité d'un taux d'invalidité minimum de 30 % subsistait cependant. Depuis, la position de l'administration a évolué et une modification favorable du barème d'invalidité en cas de maladie due à l'amiante est envisagée.

M. Georges Gabrielli a par ailleurs souligné que les adhérents de sa fédération étaient étonnés de ne pas trouver, dans la liste des métiers et établissements de la construction et de la réparation navales permettant une cessation anticipée d'activité à l'âge de 50 ans en raison d'un contact prolongé avec l'amiante, ceux de la Marine nationale et de la DCN. De nombreux marins ont pourtant été, durant leur carrière, en contact avec l'amiante. M. Georges Gabrielli a également demandé que l'indemnisation des victimes de l'amiante prévue par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 concerne les militaires, actuellement exclus de ce dispositif.

Soulignant que les militaires retraités attachaient beaucoup d'importance à la question des pathologies de la guerre du Golfe, il s'est ensuite félicité de la constitution d'une mission d'information de la Commission sur cette question. Après avoir observé que le terme de « syndrome » n'était peut-être pas le plus approprié pour qualifier les pathologies en cause, il a estimé que la clarté qui serait faite sur cette question ne pourrait qu'être bénéfique à l'image des armées.

Enfin, s'élevant contre la différence existant entre les pensions militaires d'invalidité des sous-officiers et des officiers mariniers, M. Georges Gabrielli a souligné que les militaires retraités étaient profondément irrités par l'idée, avancée par le Ministre de la Défense, d'un alignement par le bas des deux régimes. Il a sur ce point proposé, au contraire, d'aligner progressivement le tableau des sous-officiers sur celui des officiers mariniers.

M. Alain Clerc, Président adjoint de la Confédération Nationale des Retraités Militaires et des Veuves de Militaires de Carrière (CNRM), s'est alors exprimé au nom du groupe de travail du CPRM sur les questions de reconversion, de reclassement et de droit au travail.

Considérant qu'un reclassement réussi conditionne l'image de marque des armées et la qualité du recrutement, il a rappelé le dispositif existant, constitué :

- d'un crédit-temps sous forme d'un congé initial de six mois, suivi d'un congé complémentaire pouvant atteindre six mois ;

- d'aides spécifiques à dominante « formation professionnelle » ou à dominante « accompagnement vers l'entreprise » ;

- de l'accès pour certains aux emplois réservés ;

- du bénéfice des dispositions de la loi n° 70-2 permettant l'accès à des emplois de la fonction publique civile.

Pour favoriser le reclassement, M. Alain Clerc a recommandé les mesures suivantes :

- la reconnaissance du droit à une formation continue pour les militaires, conjuguée à l'homologation de tous les diplômes militaires délivrés ;

- la pérennisation des dispositions de la loi n° 70-2 et leur intégration dans le statut général des militaires et des fonctionnaires ;

- l'instauration, au titre des emplois réservés, de quotas d'embauche lors des recrutements par concours interne dans toutes les administrations, y compris territoriales, dans les entreprises industrielles ou commerciales bénéficiant d'une concession, d'un monopole ou d'une subvention publique ainsi que dans les établissements nationalisés non assujettis au recrutement obligatoire des mutilés de guerre.

Par ailleurs, sur le plan social, M. Alain Clerc a souhaité que l'affiliation rétroactive à l'Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'Etat (IRCANTEC), rendue obligatoire depuis le 1er janvier 1990, soit prise en charge par le ministère de la Défense pour tous les militaires qui ne perçoivent pas de prime de départ. Il a demandé également que le Conseil de la Reconversion, créé en 1998 et jamais réuni, le soit enfin et qu'aux états-majors, aux membres du CSFM et aux organisations de retraités qui le composent actuellement s'ajoutent des personnalités qualifiées, représentant les branches professionnelles ayant signé des conventions d'emploi avec le ministère de la Défense.

M. Henri Lacaille, Président de l'Union nationale de coordination des associations militaires (UNCAM), a jugé que les actuelles négociations concernant la future convention de l'UNEDIC ne remettraient probablement pas en cause la situation assez favorable consentie depuis janvier 1997 aux anciens militaires ayant perdu leur emploi au cours de leur carrière civile.

Il a néanmoins regretté que le bénéfice de cette situation ne soit pas étendu aux anciens militaires de plus de soixante ans qui, dans la pratique, n'ont pu réunir, tous régimes confondus, le nombre de trimestres nécessaires pour bénéficier du calcul de leur retraite de sécurité sociale au taux maximal. La limite d'âge de soixante ans ayant aujourd'hui perdu son aspect inéluctable comme l'ont montré plusieurs jugements de la Cour de cassation et les positions de certains partenaires sociaux, il conviendrait d'amender la législation pour permettre aux anciens militaires de réunir les conditions d'obtention de la retraite de sécurité sociale à taux plein, ce qui leur rendrait la plénitude de leurs droits.

Présentant les travaux du groupe de travail du CPRM sur l'action sociale des armées et la prestation spécifique dépendance, M. Denis Hellegouarch, Secrétaire général de l'Association nationale et fédérale d'anciens sous-officiers de carrière de l'armée française (ANFASOCAF), a d'abord jugé que les dispositions de la loi du 21 janvier 1997 modifiée relative à la prestation spécifique dépendance n'étaient pas satisfaisantes. Il a déploré, à cet égard, un défaut d'information du public concerné et de trop fortes disparités dans le versement de cette prestation selon les départements, appelant de ses v_ux une meilleure coordination entre les acteurs sociaux, la mise en place d'un dispositif favorable au maintien à domicile, une augmentation des plafonds de ressources ainsi qu'une remise à jour de la grille AGGIR d'évaluation de l'autonomie des bénéficiaires. Il a demandé que les associations représentées au sein du CPRM soient associées à la préparation de la réforme de la prise en charge de la dépendance des personnes âgées annoncée par le Premier ministre. S'agissant de l'action sociale des armées, il a demandé une réorganisation des districts sociaux de manière à rapprocher les décisions des bénéficiaires. Soulignant que de nombreux retraités ignoraient la configuration des districts sociaux, il a regretté que les intervenants sociaux n'aient pas systématiquement connaissance des adresses des retraités militaires. Il a par ailleurs souhaité que le système social des armées soit harmonisé afin que toute demande émanant de militaires ou d'anciens militaires puisse faire l'objet de réponses dans les meilleurs délais, quelle que soit leur armée d'appartenance. M. Denis Hellegouarch s'est également prononcé en faveur d'une représentation des retraités au sein des comités sociaux. Il a en outre proposé que les militaires et retraités soient représentés aux conseils d'administration des mess et cercles et que l'accès aux cercles et mess soit accordé de plein droit aux retraités sous réserve des capacités d'accueil. Il a enfin demandé que la section loisirs vacances de l'Institution de gestion sociale des armées (IGESA) dont les centres lui sont apparus, en général, bien gérés, soit mieux connue des ressortissants et qu'une priorité d'accès à ces centres soit donnée aux militaires en opérations extérieures.

M. Jean-Louis Bernard a rappelé qu'un projet de loi réformant la prise en charge de la dépendance était en préparation et qu'il s'inspirerait des critiques émises par le rapport Sueur sur la législation actuelle. Il a considéré que la principale difficulté de cette réforme résidait dans la définition de la nature des dépendances et de leur évolution observant qu'il conviendrait en outre de choisir entre un système national ou départemental, ce dernier offrant sans doute plus de souplesse de fonctionnement mais créant des risques d'inégalité entre les ayants droit. Enfin, M. Jean-Louis Bernard a également rappelé que la Commission venait de créer une mission d'information sur les pathologies de la guerre du Golfe et qu'un comité d'experts indépendants nommés par le Gouvernement allait mener parallèlement une enquête sur cette question.

M. Charles Cova, Président, a fait état d'observations recueillies auprès du ministère de la Défense à propos de revendications défendues par des associations de retraités militaires :

- s'agissant de la prise en compte de primes ou indemnités dans le calcul de la pension de retraite, il est vrai que certains agents de la fonction publique en ont déjà bénéficié à titre dérogatoire. La généralisation d'une telle disposition pourrait toutefois avoir comme conséquence de remettre en question le caractère non imposable de certaines primes et indemnités ;

- quant à la prise en compte des bénéfices de campagne dans le calcul des droits à pension de retraite du régime général, elle se heurterait au principe selon lequel seuls les services contributifs ouvrent droit à pension.

M. Charles Cova a également fait état de ses démarches relatives au droit des militaires à une formation diplomante et qualifiante, à l'extension du dispositif des emplois réservés à la fonction publique territoriale et à l'intégration des dispositions de la loi n° 70-2 dans le statut général des militaires. Il a également évoqué la question de la revalorisation de la pension des lieutenants retraités avant le 1er janvier 1976, mesure dont le coût est évalué à environ 3,4 millions de francs, ainsi que la situation des veuves allocataires. Il a par ailleurs indiqué qu'il n'était pas envisagé d'harmonisation des tableaux des taux de pension militaire d'invalidité des sous-officiers et des officiers mariniers par alignement de la situation des premiers sur celle des seconds en raison du coût d'une telle mesure. Il a enfin soulevé la question de la revalorisation de la pension des maréchaux des logis chefs de la Gendarmerie partis à la retraite avant le 1er juillet 1986, jugeant injuste la situation qui leur était faite et regrettant que le Gouvernement n'envisage pas actuellement d'y remédier.

M. Jean-Michel Bernard, intervenant au nom de l'Association nationale des officiers de carrière en retraite (ANOCR), a d'abord souligné la nécessité d'introduire dans la loi de finances pour 2001 une mesure de revalorisation de la pension des lieutenants admis à la retraite avant le 1er janvier 1976 analogue à celle déjà prise pour les sous-lieutenants au titre de la loi de finances pour 2000. Il a ensuite fait état d'une évolution récente, dans un sens quelque peu restrictif, de la jurisprudence concernant la couverture des risques des militaires permissionnaires sur les trajets directs aller et retour entre le lieu de leur activité et celui de leur permission. Il a rappelé le principe selon lequel les accidents dont sont victimes les militaires sur ces trajets leur ouvraient droit à une pension militaire d'invalidité et souligné que ce principe découlait du lien de subordination existant, même en permission, entre les militaires et leur hiérarchie. Puis il s'est étonné que la Direction de la Fonction militaire et du Personnel civil du ministère de la Défense ait supprimé de fait sans concertation aucune le droit à pension des militaires accidentés durant un trajet aller et retour direct entre leurs lieux d'activité et de permission. Il a alors demandé le retour à une situation favorable aux militaires, compte tenu toutefois des cas particuliers dus à l'évolution des modes de vie et à la généralisation des permissions lointaines.

M. Charles Cova a souligné que les militaires en permission restent susceptibles d'être rappelés pour les besoins du service, ce qui atteste la permanence du lien hiérarchique.

M. Bernard Lefevre, Président du Syndicat professionnel des anciens médecins des armées (SAMA), a précisé que l'organisation professionnelle qu'il représentait s'associait pleinement aux réflexions des autres associations d'anciens militaires. Evoquant les difficultés de reconversion des anciens médecins des armées, il s'est déclaré particulièrement attentif au maintien du niveau des pensions de retraite. Il s'est également inquiété de la situation des médecins des armées qui, quittant le service actif après avoir acquis une pension de retraite partielle, se trouvent dans la nécessité d'entreprendre une deuxième carrière dans des conditions de reconversion difficiles.

Il a souligné à cet égard que les anciens médecins des armées qui choisissent le salariat restent menacés d'une possible application des dispositions de l'ordonnance du 30 mars 1982 modifiée créant une contribution de solidarité et pénalisant ainsi ceux qui entreprennent une deuxième carrière. Ces dispositions, dont l'application est repoussée d'année en année, ne sont en effet toujours pas abrogées de manière claire et définitive. M. Bernard Lefevre a ajouté que les anciens médecins des armées rejoignant le secteur libéral rencontrent eux aussi d'importantes difficultés, les errances dans le recrutement des futurs médecins, l'analyse exclusivement comptable des problèmes de santé, la mise en place pour des raisons économiques de médecins référents gênant considérablement leur installation forcément tardive, alors même qu'ils ne peuvent bénéficier, vu leur âge, des taux préférentiels pour les crédits nécessaires.

Estimant que ces problèmes n'étaient pas minimes à l'heure où la professionnalisation créait des difficultés nouvelles de recrutement et de réinsertion, il a jugé probable que les carrières se feraient de plus en plus à l'avenir au sein des unités et moins dans les hôpitaux, les armées faisant appel plus à des généralistes qu'à des spécialistes, plus à des médecins jeunes qu'à des médecins très expérimentés. Il a à ce propos précisé que le SAMA avait élaboré, en complément des documents plus généraux proposés par le ministère, un guide à la reconversion pour les médecins quittant le service actif, et regretté que cette initiative nécessaire et coûteuse n'ait reçu aucun soutien matériel, soulignant que le service ainsi offert, s'il n'est pas aidé, devra être facturé.

Abordant la question de l'expression des militaires en activité, il a tenu à remercier MM. Charles Cova et Bernard Grasset pour la qualité de leur rapport d'information sur les espoirs et inquiétudes des personnels des armées. Insistant sur le caractère constitutionnel du droit syndical et soulignant qu'il devait être mis au rang des droits de l'homme, il s'est interrogé sur les raisons qui amenaient à refuser aux militaires français l'exercice de droits reconnus à leurs homologues allemands, néerlandais et suédois. Il s'est alors prononcé en faveur de la reconnaissance d'un syndicalisme purement professionnel, se cantonnant à la défense des droits matériels légitimes des personnels militaires et de leurs droits individuels, dans un cadre bien défini et respecté par tous, sans droit de grève ni de perturbation du service.

M. Charles Cova a estimé que l'abrogation des dispositions restrictives de l'article 7 du statut général des militaires permettrait de mieux reconnaître leur droit à l'expression.

M. André Vauchez a souligné qu'il avait déjà soulevé la question du droit d'expression des militaires lors de la présentation du rapport de MM. Charles Cova et Bernard Grasset devant la Commission. Il s'est alors interrogé sur la possibilité d'instituer des structures permettant l'exercice de ce droit dans le cadre de règles strictes interdisant notamment le recours à la grève.

M. Charles Cova a attiré l'attention des membres de la Commission sur les dispositions de l'article 10 du statut général des militaires qui interdisent aux militaires d'appartenir à des groupements professionnels et qui restreignent fortement leur droit d'association. Souhaitant personnellement l'aménagement de ces dispositions, il a insisté sur les difficultés auxquelles se heurte une telle évolution, en raison des liens établis entre le droit d'association et les droits de manifestation et de grève. Il s'est par ailleurs réjoui que les associations d'anciens militaires s'unissent pour aborder ensemble les questions qui touchent à leurs intérêts communs, formulent conjointement des propositions et les hiérarchisent.

M. Bernard Sorgus, Président de l'Association des officiers de la Marine (AOM), a plus particulièrement insisté sur le suivi, en liaison avec le ministère de l'Education nationale, des formations qualifiantes proposées aux personnels sous contrat de courte durée. Après avoir demandé un bilan du dispositif des emplois réservés, il a souhaité qu'il soit élargi à l'ensemble des ministères, aux organismes publics liés à la Défense nationale et à la fonction publique territoriale. Rappelant que les dispositions de l'article 3 de la loi n° 70-2 sur les reconversions des militaires de carrière dans la fonction publique civile cesseraient de s'appliquer le 31 décembre 2002, il a précisé que l'AOM demandait leur intégration dans le statut général des militaires à l'échéance de 2003.

Indiquant que le rapport d'information de MM. Charles Cova et Bernard Grasset avait été examiné par la Fédération nationale des officiers mariniers (FNOM) lors de son conseil d'administration du 13 octobre 2000, M. Georges Gabrielli, Président de la cette organisation, a félicité les rapporteurs pour la qualité de leur travail et la pertinence de la méthode d'immersion dans les forces qu'ils ont retenue. Il a relevé, entre autres propositions positives, la création d'un médiateur militaire, l'élection des présidents de catégories, le tirage au sort parmi les présidents de catégories pour la participation aux conseils de la fonction militaire, la possibilité pour les membres des conseils de la fonction militaire d'élire leurs représentants au Conseil supérieur, l'amélioration de la formation des représentants des personnels aux conseils, la possibilité d'accorder des décharges aux différents membres des conseils et aux présidents de catégories suivant l'importance des unités et les mesures tendant à rendre son crédit au rapport sur le moral.

Il a précisé que la FNOM regrettait le désaccord entre les deux rapporteurs au sujet de l'article 10 du statut général des militaires. Il a alors indiqué que la FNOM proposait que cet article soit rédigé de la manière suivante : « les militaires en activité de service ne peuvent pas adhérer à des syndicats professionnels ». Rappelant que la plupart des associations de retraités militaires avaient pour but la défense des intérêts moraux et matériels de leurs membres, M. Georges Gabrielli a souligné que les seuls rassemblements ou défilés qui les unissaient étaient patriotiques.

Il a ajouté que la FNOM souhaitait que la Commission procède à un suivi du rapport de MM. Charles Cova et Bernard Grasset et qu'elle entreprenne d'autres réflexions recourant à une très large consultation des personnels concernés. Il a également demandé la mise en application des propositions du rapport.

M. Daniel Rouzeau, Président de la Fédération nationale des anciens militaires de carrière (FNAMC), s'est prononcé en faveur de la création d'un service médical spécifique de détection des psycho-traumatismes postérieurs aux opérations de guerre et aux engagements extérieurs des forces françaises. Il a également demandé la reconduction des dispositions relatives aux conventions collectives d'assurance chômage des anciens militaires ainsi que leur extension jusqu'à 65 ans au lieu des 60 ans actuels. Il a enfin souhaité la prise en compte des campagnes des anciens militaires dans le décompte de la Caisse nationale d'assurance Vieillesse ainsi que de l'IRCANTEC.

M. André Arrouet, Président national de l'Union nationale des sous-officiers en retraite (UNSOR), a souhaité insister plus particulièrement sur deux points.

Il a d'abord indiqué que les conditions d'accès des sous-officiers à l'échelle 4 étaient une source de grande insatisfaction, des sous-officiers remplissant les conditions de diplôme pour y accéder et occupant des postes qui en relevaient se voyant opposer depuis plusieurs années les contraintes budgétaires. Approuvé par M. Denis Hellegouarch, Secrétaire général de l'Association nationale et fédérale d'anciens sous-officiers de carrière de l'Armée française, M. André Arrouet a attiré l'attention de la Commission sur les répercussions de cette situation sur le moral des armées.

Il a ensuite contesté la règle du remboursement, par les bénéficiaires, de l'indemnité de départ en cas d'embauche dans la fonction publique. Précisant que de nombreux bénéficiaires n'entraient dans la fonction publique qu'après plusieurs années d'inactivité et qu'ils ne disposaient plus alors des ressources financières nécessaires à un remboursement immédiat, il a fait part de la demande de l'association qu'il préside tendant à étaler ce remboursement en fonction d'un barème, voire à le supprimer au-delà d'un certain nombre d'années d'inactivité.

S'exprimant au nom du Comité de liaison et de coordination des associations de la Gendarmerie, M. Léon Lebrec, Président national de l'Union nationale du personnel en retraite de la Gendarmerie, s'est tout d'abord félicité que l'initiative de M. Charles Cova en faveur de la revalorisation de la pension des sous-lieutenants admis à la retraite avant le 1er janvier 1976 et de leurs ayants droit ait été suivie par le Ministre de la Défense.

Il a précisé qu'il laissait aux présidents d'associations initiateurs de la démarche le soin d'entretenir la Commission de la situation des lieutenants, qui restait en suspens.

Il a alors attiré l'attention de la Commission sur la situation des maréchaux des logis chefs de Gendarmerie admis à faire valoir leurs droits à retraite avant le 1er juillet 1986. Il a exposé que leur situation était en tous points identique à celle que connaissaient les sous-lieutenants jusqu'à ce que leur pension soit révisée, puisqu'ils perçoivent une retraite inférieure à celle des gendarmes de classe exceptionnelle et à peine supérieure à celle des gendarmes classés au 11ème échelon, pour des responsabilités bien plus grandes. Estimant qu'il était inconcevable de laisser perdurer une situation aussi discriminatoire, il a jugé que le principe de hiérarchie, qui découle du statut militaire, méritait d'être pris en considération pour le calcul de la pension de même que le degré de responsabilité inhérent au grade atteint.

Rappelant que des gendarmes anciens avaient bénéficié, avant la création de l'échelon exceptionnel de gendarme, d'un avancement au grade de maréchal des logis chef au titre d'une promotion sociale en fin de carrière, sans pour autant accéder au grade d'adjudant, il a précisé, que partis en retraite avant le 1er juillet 1986, ils se trouvaient, comme les sous-lieutenants retraités, pénalisés puisque, s'ils étaient restés gendarmes, ils bénéficieraient aujourd'hui d'une pension supérieure.

M. André Polet, Président national de la Fédération nationale des retraités de la Gendarmerie (FNRG) et Président en exercice du Comité de liaison et de coordination des associations de la Gendarmerie, a estimé que, pour compenser le déséquilibre existant entre les statuts des gendarmes et des policiers, il convenait que l'ISSP soit intégré dans la base de calcul de la retraite des personnels de la Gendarmerie après 25 ans de service et dès l'âge des 50 ans.

M. Elie Gambier, Président de la Confédération française des associations de retraités et pensionnés de la Gendarmerie (CFARPG), a d'abord indiqué que les associations affiliées à sa confédération, composées uniquement de retraités de la Gendarmerie et de leurs ayants droit, suivaient très attentivement les dispositions prises dans le cadre de la professionnalisation des armées.

Soulignant que, conformément à la loi de programmation militaire, la Gendarmerie, partie intégrante des forces armées, avait connu et connaissait encore de profondes mutations dans ses structures et s'adaptait à l'évolution des besoins de sécurité, notamment par des redéploiements d'effectifs, il s'est interrogé sur l'évolution de son recrutement.

Jugeant que, si l'emploi de gendarmes-adjoints était apprécié dans la prévention, le secourisme et certaines tâches de maintenance et de sécurité, leur carrière statutaire était très précaire, il a considéré que leur recrutement ne devait pas s'effectuer au détriment de celui des personnels sous-officiers.

Il a estimé au contraire que, eu égard à l'accroissement des nombreuses contraintes qui pèsent sur l'ensemble des personnels et aux besoins découlant du développement des contextes d'insécurité, même dans des zones rurales, les pouvoirs publics devaient s'attacher dès le prochain exercice budgétaire à augmenter très sensiblement les effectifs de sous-officiers et à accorder à la Gendarmerie des moyens matériels en conséquence.

Il a renouvelé les demandes suivantes :

- fixation d'un minimum décent pour les pensions de réversion allouées aux veuves des personnels militaires dont certaines reçoivent moins de 4 000 francs de revenus mensuels, un effort devant être fait pour celles qui n'ont pas d'autres ressources ;

- prise en compte de l'ISSP et de l'indemnité pour charges militaires pour le calcul de la retraite sans condition d'âge ;

- assouplissement des conditions d'admission ou d'élévation dans les ordres nationaux non seulement pour les personnels d'active, mais également pour ceux qui, retraités, assument de grandes responsabilités dans des associations à caractère social et de solidarité corporative ;

- participation effective des associations nationales représentant les retraités militaires à l'ensemble des organismes consultatifs et de gestion, au même titre que les syndicats professionnels.

Il a ajouté que la CFARPG souhaitait obtenir des précisions sur le bénéfice des majorations pour campagnes, en particulier dans le cas des services accomplis en Afrique du Nord ainsi que sur les conditions de la délivrance de la carte de combattant aux personnels ayant servi en Algérie de novembre 1954 à 1962, de nombreux retraités se plaignant de refus motivés par des considérations de temps de présence ou de lieu d'opérations. Il a également indiqué que la CFARPG demandait que les services du ministère de la Défense transmettent plus facilement aux associations les noms et adresses des personnels retraités des armées ou de leurs ayants droit, de nombreux dossiers devant être traités par les bénévoles des associations corporatives ou d'anciens combattants du fait de la pénurie d'assistantes sociales. Il a enfin fait état du souhait de la CFARPG d'obtenir des éclaircissements sur les conditions des redéploiements respectifs de la Gendarmerie et de la Police.

M. Charles Cova a rappelé que le nombre de gendarmes adjoints, qui s'élève actuellement à environ 7 400 allait passer à 11 000 en 2001 et que l'objectif fixé à 16 000 par la loi de programmation militaire serait atteint, selon les propos que le Directeur général de la Gendarmerie nationale, M. Pierre Steinmetz, a tenus lors de sa récente audition par la Commission.

Indiquant qu'il soumettrait au Ministre de la Défense la question de l'attribution de la médaille militaire aux personnels d'active, il a jugé que l'attribution de la carte du combattant aux militaires ayant participé au conflit algérien ne semblait plus soulever de difficultés significatives. Il a par ailleurs fait état d'une lettre qu'il avait adressée au Ministre de la Défense pour souligner le caractère injuste et discriminatoire de la situation des maréchaux des logis chefs de la Gendarmerie partis en retraite avant le 1er juillet 1986.

M. Pierre Ingouf, a souhaité insister sur la nécessité d'améliorer la situation des veuves les plus défavorisées dont certaines perçoivent le minimum vieillesse qui s'élève actuellement à 3 575 francs. Or, le seuil de pauvreté dans notre pays a été évalué à 3 800 francs par mois.

Conscient que cette question dépasse le ministère de la Défense puisqu'elle concerne toutes les personnes percevant le minimum vieillesse, M. Pierre Ingouf a indiqué qu'il souhaitait voir les associations membres du CPRM se joindre à l'action menée en ce sens par l'Union Française des Retraités dans le cadre de la Confédération Française des Retraités.

M. Jean-Louis Bernard, après s'être associé aux éloges déjà formulés à l'égard du rapport de MM. Charles Cova et Bernard Grasset, a tenu à se dissocier des propos tenus sur l'introduction du syndicalisme dans les armées. S'agissant de l'expression des intérêts des militaires, il a considéré que les conseils de la fonction militaire en constituaient le cadre original, soulignant que leur fonctionnement était en amélioration depuis leur création et relevant que tous les participants à leurs travaux pouvaient constater la grande liberté de ton dont faisaient preuve en leur sein les représentants des personnels militaires. Il a regretté que toutes les propositions de ces instances ne soient pas nécessairement suivies d'effets, remarquant toutefois qu'il en allait de même dans le secteur civil pour les propositions émanant de syndicats.

M. Robert Gaïa a également jugé remarquable le rapport de MM. Charles Cova et Bernard Grasset. Sans se prononcer sur l'opportunité d'introduire le syndicalisme dans les armées, il a considéré qu'il conviendrait certainement dans l'avenir de réfléchir au droit d'expression des militaires, estimant peu satisfaisante la situation actuelle dans laquelle les organisations de retraités portent les revendications des personnels en activité.

M. Georges Gabrielli, Président de la Fédération nationale des officiers mariniers (FNOM), a souhaité que les revendications présentées à la Commission obtiennent des réponses.

M. Charles Cova a rappelé qu'il n'appartenait pas à la Commission de donner suite aux demandes des organisations professionnelles, le Parlement ne pouvant, en matière de dépenses nouvelles, que se prononcer sur les propositions du Gouvernement.

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