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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION de la DÉFENSE NATIONALE et des FORCES ARMÉES

COMPTE RENDU N° 34

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 15 mai 2001
(Séance de 16 heures 15)

Présidence de M. Paul Quilès, Président

SOMMAIRE

 

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- Examen d'un rapport de la mission d'information sur les conditions d'engagement des militaires français ayant pu les exposer, au cours de la guerre du Golfe et des opérations conduites ultérieurement dans les Balkans, à des risques sanitaires spécifiques (Mme Michèle Rivasi et M. Claude Lanfranca, Rapporteurs).




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La Commission a procédé à l'examen du rapport de la mission d'information sur les conditions d'engagement des militaires français ayant pu les exposer, au cours de la guerre du Golfe et des opérations conduites ultérieurement dans les Balkans, à des risques sanitaires spécifiques (M. Bernard Cazeneuve, Président de la mission, Mme Michèle Rivasi et M. Claude Lanfranca, rapporteurs).

Après avoir rappelé que la Commission avait créé cette mission d'information le 2 octobre dernier afin de faire la lumière sur les risques sanitaires spécifiques auxquels ont pu être exposés les militaires français au cours de la guerre du Golfe, le Président Paul Quilès a ajouté que son mandat avait été élargi aux opérations des Balkans en janvier dernier. Il a ensuite précisé que la mission d'information présentait à la Commission un document principalement consacré à la guerre du Golfe mais qu'elle prévoyait d'établir un second texte qui traitera plus spécialement des opérations des Balkans, au cours du mois de novembre 2001.

Le Président Paul Quilès a souligné que, par l'intermédiaire d'une mission d'information créée en son sein, la Commission avait, une nouvelle fois, après ses rapports sur les crises du Rwanda et du Kosovo, reçu du Gouvernement communication de tous les éléments nécessaires à ses travaux, et notamment de documents opérationnels ou internes au ministère de la Défense déclassifiés à son intention, selon une procédure désormais bien établie. Il a ajouté que la mission d'information avait également procédé à de nombreuses auditions de personnalités politiques, militaires, scientifiques et associatives, le plus souvent en présence de la presse, de manière à donner à ses travaux toute la transparence nécessaire. Il a ensuite indiqué que la mission avait effectué des déplacements en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis, pays où l'impact sanitaire des opérations du Golfe sur les militaires qui y ont participé avait déjà donné lieu à de nombreux travaux. Il a également souligné qu'elle avait analysé une masse importante de documents « ouverts » d'origine française et étrangère, émanant soit d'autorités publiques, soit d'organismes à vocation scientifique.

En préalable à la présentation des travaux de la mission par son Président, M. Bernard Cazeneuve, et ses deux rappporteurs, Mme Michèle Rivasi et M. Claude Lanfranca, le Président Paul Quilès a fait ressortir que ces travaux n'étaient pas, par nature, destinés à porter des jugements d'ordre scientifique et médical. Il ne revenait pas, en conséquence, à la mission de « découvrir » l'existence ou non d'un syndrome dit « du Golfe ». Le Président Paul Quilès a néanmoins relevé que la mission avait été attentive aux explications des militaires de tout rang et qu'elle avait pris soin d'entendre les récits, voire les plaintes de ceux qui estimaient que la dégradation de leur état de santé résultait de leur participation aux opérations. Il s'est félicité que son important travail d'investigation lui ait permis de formuler un certain nombre d'interrogations d'intérêt général et de propositions concrètes.

Après avoir souligné l'excellent climat dans lequel s'étaient déroulés les travaux de la mission d'information puis indiqué que ses membres étaient parvenus à une approbation unanime des conclusions présentées à la Commission, M. Bernard Cazeneuve, Président de la mission d'information, a souhaité préciser, à titre liminaire, son contexte de création, ses objectifs et ses méthodes.

Il a tout d'abord souligné que la question des pathologies spécifiques auxquelles auraient pu être exposés les anciens combattants de la guerre du Golfe prenait son origine dans les revendications formulées, dès 1992 et 1993, par des participants américains, canadiens et britanniques à ce conflit. Il a rappelé pour mémoire que du 16 janvier au 28 février 1991, une coalition composée de vingt et un pays, comportant notamment 697 000 Américains, 54 000 Britanniques, 26 000 Français, et 4 500 Canadiens, pour ne parler que des principaux contingents, avait affronté les forces armées irakiennes puis contraint l'Irak, par une victoire militaire, à quitter le sol koweïtien annexé le 2 août 1990.

M. Bernard Cazeneuve a observé qu'en France aussi, des anciens combattants du Golfe s'étaient plaints de pathologies spécifiques, beaucoup plus tardivement cependant. Il s'est notamment référé à la création, en juin 2000, de l'association Avigolfe afin de regrouper des malades qui attribuaient leurs symptômes à leur participation à la guerre du Golfe et faire valoir leurs revendications. Il a aussi indiqué que, sur les quelque 300 demandes de pensions adressées aux services du Secrétaire d'Etat à la Défense chargé des Anciens combattants au titre du code des Pensions militaires d'invalidité, seulement 120 avaient été concédées, essentiellement pour blessures. Il a remarqué au passage que ce faible nombre laissait préjuger l'ampleur des pathologies spécifiques que certains anciens combattants de la guerre du Golfe déclaraient éprouver.

Il a alors fait valoir que la Commission, confrontée aux demandes visant à faire la lumière sur les circonstances exactes de l'engagement des militaires français ayant participé à la guerre du Golfe, s'était montrée soucieuse de répondre aux légitimes attentes de soldats ayant servi les intérêts de la Nation en décidant, le 2 octobre 2000, de créer la mission d'information dont il avait assumé la présidence.

M. Bernard Cazeneuve s'est ensuite attaché à démontrer que, sur le plan méthodologique, cette mission d'information avait voulu procéder avec une rigueur similaire à celle qui caractérise l'application de protocoles scientifiques.

Il a ainsi fait état des nombreuses auditions de responsables politiques, militaires, scientifiques, associatifs, actuels ou de l'époque, qui avaient été réalisées, le plus souvent de manière publique. Il a également mentionné les déplacements effectués par les membres de la mission d'information à Londres ainsi qu'à Washington et New York. Il a particulièrement insisté sur la consultation des nombreux documents secrets déclassifiés par le ministère de la Défense à la demande de la mission d'information.

M. Bernard Cazeneuve a souligné que les membres de la mission d'information avaient cherché en toute liberté à formuler des préconisations de nature à améliorer le sort des anciens combattants présentant des pathologies dont le lien avec l'engagement resterait difficile à déterminer et à promouvoir la sécurité des militaires susceptibles d'être déployés à l'avenir sur d'autres théâtres extérieurs.

Il a néanmoins tenu à rappeler la vocation parlementaire, et non scientifique ou médicale, de la mission d'information, précisant que celle-ci se bornait à participer directement au contrôle de l'Exécutif, sur ses actes passés et présents comme sur la sincérité des informations qu'il destine à l'opinion. Il a estimé que le rôle de la mission d'information ne pouvait être celui d'un groupe d'experts qui serait chargé de découvrir l'existence ou non d'un ou plusieurs « syndromes ».

Soulignant l'avance prise par les Etats-Unis en matière de recensement et de recherche grâce aux travaux effectués, à la demande du Gouvernement fédéral, par la Rand Corporation puis par l'Institute of Medecine, organisme dépendant de l'Académie nationale des Sciences, il a considéré que cette situation n'était pas étonnante, non seulement parce que les premières plaintes d'anciens combattants avaient été adressées aux autorités américaines quelques mois après la fin du conflit, mais également parce que des financements considérables avaient pu être dégagés pour éclaircir les causes des pathologies constatées.

M. Bernard Cazeneuve s'est alors attaché à énumérer, au travers de quelques exemples précis, les faits mis à jour par la mission d'information. Il a tout d'abord rappelé que, dès la première audition publique, celle du Général Michel Roquejeoffre, la mission d'information avait clairement fait préciser quelles avaient été les conditions d'usage d'une substance à vocation préventive contre les toxiques, la Pyridostigmine, alors que dans les mois précédents une réelle confusion caractérisait la communication officielle sur ce point.

Il a ajouté que plusieurs occurrences d'exposition à des toxiques chimiques avaient été mises en évidence pour des unités des forces françaises engagées dans le Golfe. Il a néanmoins précisé qu'il s'agissait de traces de substances toxiques, résultant non pas d'un usage offensif d'armes chimiques par les forces irakiennes mais de résidus liés à des émanations consécutives à des bombardements alliés sur des sites de stockage. Il a fait valoir que ce constat avait pu être dressé précisément parce que la mission avait exigé la transmission des messages d'alerte chimique détenus par les états-majors, puis qu'elle avait confronté les observations qu'elle en avait tirées avec des informations connues de longue date par les autorités militaires et le Congrès aux Etats-Unis.

Abordant le sujet de l'utilisation par les Américains et, dans une moindre mesure, les Britanniques, d'armes incorporant de l'uranium appauvri, M. Bernard Cazeneuve a souligné que la mission d'information avait constaté là encore des contradictions entre différents responsables du haut commandement français sur leur degré d'information, à l'époque, tant sur les risques de ces armes que sur la possibilité même de leur mise en _uvre sur le terrain par les principaux alliés de la France. Il a indiqué que l'analyse des journaux de marche des différentes unités composant la Division Daguet avait permis d'établir que l'exposition de militaires français à des poussières d'uranium appauvri était avérée en conséquence des tirs d'appui effectués par les avions américains A 10 dits « tueurs de chars ». Il a précisé que cette exposition n'était pas due à un impact direct des bombardements ni même à des tirs fratricides analogues à ceux subis par les forces américaines, mais simplement au contact immédiat d'un mélange de poussières d'uranium appauvri et de débris de cibles présent sur les zones d'intervention des militaires français.

Soulignant que cette question des conséquences du recours à l'uranium appauvri donnera lieu à des développements complémentaires et sans doute plus approfondis dans le second rapport de la mission d'information, plus particulièrement consacré aux opérations dans les Balkans, il a estimé qu'elle appelait une interrogation majeure, d'ordre politique, concernant le degré d'information consenti par les Etats-Unis à leurs alliés, pour des opérations conduites conjointement.

M. Bernard Cazeneuve a enfin précisé que la mission d'information avait exploité l'ensemble des comptes rendus d'opérations, des notes et documents internes du Service de santé des Armées, qui avaient été déclassifiés à son usage. Observant que ce travail avait permis, notamment, de mieux comprendre l'organisation du soutien sanitaire des unités combattantes, il a souligné qu'il présentait également l'intérêt d'établir d'utiles comparaisons avec les pratiques médicales en opérations suivies par les principaux alliés de la France.

Il a cité à cet égard l'exemple des vaccinations, dont les pratiques françaises supportaient la comparaison avec celles des Etats-Unis ou de la Grande-Bretagne, notamment en ce qui concerne le nombre des pertes de documents vaccinaux postérieurement au conflit. Il a néanmoins souligné que, parmi les dix propositions que la mission d'information formulait dans son rapport, figurait l'adjonction de mentions obligatoires supplémentaires sur le livret individuel de vaccination, adopté de longue date par les armées françaises.

Il a ensuite souligné que les documents déclassifiés émanant du Service de santé des Armées avaient permis de faire le point sur l'usage en opération d'un médicament nouveau dont le nom de code, à l'époque de la guerre du Golfe, était le « Virgyl ». Précisant que cette molécule, développée conjointement par des chercheurs du Service de santé des Armées et un laboratoire privé, ne disposait pas, à l'époque de son premier usage expérimental en opération, d'une autorisation de mise sur le marché, il a observé que, de surcroît, son administration n'avait pas véritablement eu lieu uniquement sur ordre exprès du commandement.

Il a estimé que cet eugrégariant, dont l'emploi ne poursuit pas une finalité thérapeutique mais un objectif de meilleure disponibilité opérationnelle en repoussant les besoins en sommeil, n'était probablement pas en lui-même dangereux sous réserve que les risques d'un mauvais usage soient écartés. Il a néanmoins mis en exergue l'absence de possibilité réelle d'évaluation ultérieure des effets du « Virgyl », notamment par défaut d'une connaissance exacte des personnels concernés.

S'appuyant sur le bilan du travail accompli, M. Bernard Cazeneuve a insisté sur le caractère quasi « notarial » du rapport de la mission d'information, qui incorpore de nombreuses références et reproductions de pièces officielles. Il a estimé que l'exigence d'objectivité à laquelle s'étaient soumis dès le départ les membres de la mission d'information était de nature à désarmer toute polémique ou mauvaise querelle.

En conclusion, il a salué la forte implication des membres de la mission d'information dans l'élaboration du rapport, en remerciant tout particulièrement les deux rapporteurs qui s'étaient attachés à vérifier les faits en toute objectivité sans donner corps à ce qui relevait des allégations ou des présupposés. Il s'est enfin félicité du caractère constructif des débats que les membres de la mission d'information avaient menés.

M. Claude Lanfranca, rapporteur, a précisé que le contexte d'engagement des quelque 25 000 soldats français ayant participé à la guerre du Golfe avait été au c_ur des réflexions de la mission d'information.

Abordant les facteurs d'exposition aux risques, il a plus particulièrement analysé les problèmes liés aux mesures de prévention et de protection, qu'elles soient proprement médicales ou qu'elles aient trait à des matériels défectueux.

Il a tout d'abord indiqué que la mission d'information s'était notamment intéressée aux mesures de prophylaxie, incriminées par certaines études épidémiologiques étrangères. Il a observé que, si les militaires français avaient fait l'objet des vaccinations réglementaires contre la tuberculose, la diphtérie-tétanos, la typhoïde, la poliomyélite et l'hépatite virale A auxquelles s'était ajoutée une vaccination contre la grippe et la méningite cérébro-spinale, ils n'avaient pas été vaccinés contre le charbon ni contre la peste botulique, à la différence de leurs camarades britanniques ou américains.

Il a estimé qu'il n'était pas possible d'avoir une position tranchée sur la question de l'innocuité de certaines campagnes de vaccination, compte tenu notamment de l'hypothèse d'une implication de leur adjuvant aluminique dans l'apparition de lésions musculaires proches de celles dont les anciens combattants de la guerre du Golfe déclarent souffrir. Il a estimé que des études plus approfondies étaient nécessaires sur ce point.

M. Claude Lanfranca a ensuite évoqué une autre substance médicamenteuse suspectée : le bromure de Pyridostigmine. Après avoir observé que des déclarations contradictoires avaient pu, dans un premier temps, focaliser l'attention sur cette substance, de manière quelque peu exagérée, il a rappelé que la mission d'information avait pu apporter, dès sa première audition publique, des précisions irréfutables, espérant qu'elles avaient mis un terme à la confusion qui avait présidé à la communication du ministère de la Défense sur ce sujet. Il a par ailleurs souligné que le principe d'emploi de ce prétraitement contre le risque chimique avait été arrêté au sein des armées françaises au cours de l'année 1982, conformément aux préconisations médicales de l'OTAN. Il en a conclu qu'il n'était pas anormal en soi que les soldats dépêchés dans le Golfe aient pris de cet antidote.

Il a convenu qu'il n'était pas impossible que, ponctuellement, certains soldats n'aient pas respecté les consignes d'emploi, d'une prise toutes les 8 heures, après ordre du commandement jusqu'à ordre contraire. Il a également observé que cet ordre n'avait pas été donné par écrit, selon les propres dires du Général Janvier, commandant la Division Daguet, mais il ne lui a pas pour autant semblé raisonnable d'incriminer la Pyridostigmine, d'autant que la majorité des affections dont se plaignent les anciens combattants de la guerre du Golfe sont essentiellement musculaires ou articulaires.

M. Claude Lanfranca a ensuite abordé la question de l'usage du « Virgyl » ou Modafinil, substance éveillante administrée pour la première fois sur un théâtre d'opération aux militaires français lors de la guerre du Golfe. Il a indiqué qu'une étude sur huit sujets humains sains, réalisée peu auparavant à l'hôpital d'instruction militaire Larrey de Versailles, n'avait pas fait apparaître de séquelles particulières. Après avoir démontré le caractère rigoureux des conditions d'emploi et de délivrance de cette substance, il a évalué, sur la base des témoignages et rapports d'activité, en l'absence de registres spécifiques tenus par les médecins et les infirmiers, que le nombre des personnels relevant de la Division Daguet qui aurait utilisé le « Virgyl » serait, en toute hypothèse, inférieur à 10 % des effectifs et se situerait vraisemblablement entre 400 et 700.

Il a toutefois observé qu'au cours des opérations, cette substance avait été prescrite par anticipation de l'accord des autorités sanitaires, avant l'autorisation de mise sur le marché.

Evoquant ensuite l'efficacité des matériels de protection et de lutte contre les agents chimiques, bactériologiques et nucléaires, M. Claude Lanfranca a constaté qu'elle avait été mise en doute à plusieurs reprises.

Il a cité, à l'appui de sa démonstration, un rapport du Colonel Claude Baguet, commandant l'école de défense nucléaire, bactériologique et chimique (NBC) de l'armée de Terre, dans lequel il était indiqué que le Detalac, équipement collectif de détection des agents chimiques, connaissait des « pannes fréquentes » et « ne détectait pas l'Ypérite ». Il a ajouté que ce rapport jugeait les détecteurs individuels « en nombre très insuffisant » et s'étonnait de leurs « consignes d'utilisation délirantes ». Enfin, il a souligné que le port du survêtement de protection à port permanent (S3P) y était qualifié de « difficile, voire impossible par temps chaud ».

M. Claude Lanfranca a estimé qu'en règle générale, le retour d'expérience concernant la protection individuelle des militaires était très critique et signalait de nombreuses défaillances, ce qu'illustrait le compte rendu du Médecin chef des services Puygrenier, du 25 mars 1991, faisant notamment état de plusieurs anomalies quant à l'entraînement au port des moyens de protection et à la discipline. Il en a déduit que de telles carences n'étaient sans doute pas restées sans conséquences.

Mme Michèle Rivasi, rapporteure, a souligné qu'à des risques afférents à la prévention sanitaire et technique se sont ajoutés les risques opérationnels.

Elle a observé qu'à la lecture des documents envoyés par le ministère de la Défense et selon les enseignements des différentes auditions, il était apparu que la plupart des dangers envisageables, à savoir les menaces chimiques, biologiques et nucléaires, avaient été pris en considération. Elle a cependant estimé que le déroulement des opérations s'était effectué dans de telles conditions psychologiques et climatiques que les menaces n'avaient pas été forcément toujours maîtrisées.

Elle a ajouté que les militaires avaient été très peu sensibilisés, voire pas du tout, à des risques qui n'étaient pas perçus comme tels à l'époque, à savoir les poussières d'uranium appauvri et les particules de suie dégagées par les puits de pétrole incendiés par les Irakiens.

Constatant que, dix ans après les événements, la mission d'information elle-même avait rencontré quelques difficultés pour accéder à certains documents susceptibles d'apporter des éclaircissements indispensables, tels que les comptes rendus des alertes chimiques des Detalac et les rapports isotopiques des munitions françaises à uranium appauvri, elle a souligné qu'elle était à présent en mesure de préciser la nature et les circonstances des expositions auxquelles les militaires français avaient pu être soumis pendant la guerre du Golfe.

S'agissant de l'exposition aux agents chimiques, elle a indiqué, sur la base de données transmises par le ministère de la Défense, que des détections de contrôle positives, confirmant les alertes des Detalac et attestant ainsi la présence ambiante d'agents chimiques consécutive à des bombardements de dépôts irakiens, avaient été enregistrées par le groupement de soutien logistique de la Cité du Roi Khaled le 19 janvier 1991 à 16 h 30, le groupement de soutien logistique de la zone avancée le 20 janvier à 8 h 00, le 3ème Régiment d'Infanterie de Marine le 21 janvier à 9 h 47, le 4ème Régiment de Dragons le 21 janvier à 13 h50 et l'Etat-major de la Division le 21 janvier à 23 h 30.

Elle a attiré l'attention sur le fait que tous les comptes rendus consécutifs aux alertes des Detalac, qui avaient confirmé la présence de neurotoxiques soulignaient le caractère « infinitésimal » des concentrations relevées. Elle a néanmoins tenu à préciser que les Detalac ne détectaient pas l'ypérite. Prenant acte de la faiblesse estimée du risque encouru par les personnels, elle a néanmoins fait valoir que des témoignages laissaient à penser qu'il n'était pas impossible que certains soldats, isolément, n'aient pas respecté les consignes de sécurité, ou ne l'aient fait que partiellement, notamment parce que, en raison de la fréquence des alertes, beaucoup d'entre eux ne mettaient pas toujours leurs masques de protection. Elle en a déduit que, dans ce cas très particulier seulement, l'exposition avérée à des traces de neurotoxiques ou de vésicants pourrait peut-être ne pas avoir été sans conséquences, tout en précisant qu'il appartiendra aux experts scientifiques, bien que la grande majorité d'entre eux soient militaires, de se prononcer à ce sujet. Elle a d'ailleurs remarqué que, si la Pyridostigmine était un antidote efficace contre le Soman, il n'en allait pas de même contre le Sarin.

Mme Michèle Rivasi a constaté que ces informations recoupaient les éléments recueillis par le Sénat et la Chambre des Représentants américains.

Elle a ajouté que la mission d'information avait également mis à jour une forte présomption de stockage d'armes chimiques sur l'aérodrome d'As Salman, hypothèse évoquée par un compte rendu opérationnel en date du 12 janvier 1991. Elle a conclu que l'éventualité d'une contamination chimique du terrain n'était pas à exclure et que les éléments français amenés à « dépolluer » l'aérodrome, notamment le 6ème REG, ainsi que les unités stationnées aux alentours, pourraient y avoir été exposés, d'autant qu'ils n'avaient pas forcément bénéficié de consignes strictes quant au port de leurs masques de protection.

Evoquant les risques potentiellement induits par l'uranium appauvri, elle a indiqué que la mission d'information avait acquis la conviction qu'ils étaient surtout de nature chimique, une contamination radiologique ne pouvant toutefois être totalement écartée puisque des traces d'uranium 236 ont été décelées dans les urines d'anciens combattants du Golfe par un ancien médecin militaire américain, le Docteur Assaf Durakovic.

La rapporteure a également souligné que, lors de leur déplacement aux Etats-Unis, les membres de la mission d'information avaient eu confirmation que l'uranium appauvri utilisé dans les obus employés dans le Golfe provenait soit du processus d'enrichissement, soit d'un uranium retraité présentant des traces de transuraniens.

Mme Michèle Rivasi a alors expliqué que la mission d'information s'était attachée à mettre en évidence les unités qui avaient été plus particulièrement exposées à l'inhalation éventuelle de poussières d'uranium appauvri à proximité des blindés bombardés avec des munitions comportant cette substance, risque le plus significatif.

Se référant aux différents journaux de marche et d'opération des unités de la Division Daguet, elle a indiqué que, lors de l'offensive terrestre et même après, au moins quatre unités de la Division Daguet s'étaient trouvées sur des sites ou en présence d'objectifs bombardés par les avions A 10 américains, utilisant des munitions à uranium appauvri.

Elle a précisé que s'étaient trouvés dans cette situation le 4ème Régiment de Dragons les 24, 25 et 28 février 1991, le 3ème Régiment d'Infanterie de Marine, les 28 février et 3 mars, et les 1er Régiment Etranger de Cavalerie et 2nd Régiment Etranger d'Infanterie, le 25 février. Elle a conclu à une forte présomption d'exposition des militaires de chacune de ces unités à des poussières d'uranium appauvri.

Elle a estimé par ailleurs qu'il y avait tout lieu de s'interroger sur le niveau de protection des soldats de la Division Daguet face à ces aérosols, au regard des précautions prises par les personnels de la DGA qui expertisent les armes à uranium appauvri (port d'une combinaison étanche, d'une paire de bottes, d'une paire de chaussettes, d'une paire de gants, d'un masque respiratoire et d'un dosimètre, autant de moyens dont les militaires exposés étaient dépourvus sur le théâtre d'opérations).

Mme Michèle Rivasi a enfin abordé la question des fumées des incendies de puits de pétrole. Reconnaissant qu'elles ne constituaient pas en soi le danger sanitaire le plus important auquel les soldats français pourraient avoir été exposés, elle a estimé que ce risque ne pouvait cependant pas être éludé.

Elle a rappelé à cet égard que, selon une note de l'Institut français du pétrole sur l'impact écologique de la destruction des infrastructures pétrolières du Koweït datant de janvier 1991, le nombre de puits de pétrole incendiés dans la région du Golfe arabo-persique au cours du conflit, soit par l'action des troupes irakiennes, soit du fait des combats, s'élevait à 493. Puis, elle a cité les conclusions du rapport final de la campagne d'analyses du laboratoire mobile régional de mesure de la qualité de l'air envoyé au Koweït du 27 mars au 4 avril 1991, soulignant qu'elles mettaient notamment en évidence un risque d'exposition à des pollutions en ozone, dioxyde de soufre, monoxyde de carbone, monoxyde et dioxyde d'azote pour le cantonnement du Détachement français présent dans la ville de Koweït City.

M. Claude Lanfranca a tenu à préciser, à propos des risques afférents à l'uranium appauvri, que les travaux du Docteur Durakovic reposaient sur un protocole scientifique dont la validité n'était pas unanimement reconnue.

Il a ensuite souligné que la mission d'information s'était aussi attachée à formuler des recommandations de portée spécifique concernant les personnels engagés dans la guerre du Golfe, et générale, relatives à la prévention des risques encourus par les armées lorsqu'elles se trouvent déployées sur un théâtre extérieur.

Il a alors indiqué que la mission d'information s'était prononcée en faveur d'une étude épidémiologique portant sur les militaires français engagés lors de la guerre du Golfe, comme l'avait préconisé le Professeur Roger Salamon dans le rapport qu'il avait remis aux Ministres de la Santé et de la Défense au nom du groupe d'experts qu'il présidait.

M. Claude Lanfranca a néanmoins estimé, sur la base des enseignements recueillis au cours des déplacements de la mission d'information et de ses nombreuses auditions, qu'il était illusoire de préconiser des études épidémiologiques comparant un panel représentatif des quelque 25 000 militaires français engagés avec une population témoin, dix ans après les événements. Il a remarqué que, outre le coût important de telles études, le principal obstacle qui s'opposait à leur réalisation dans de bonnes conditions résidait dans la représentativité des anciens combattants retenus et la comparaison avec une population témoin suffisamment pertinente.

Il a indiqué que la mission d'information préférait suggérer, après le dépouillement des réponses au questionnaire envoyé aux 25 000 soldats engagés dans le Golfe, la réalisation par plusieurs organismes scientifiques, sous l'autorité de l'Institut de veille sanitaire, d'études de mortalité, de morbidité et de descendance portant sur les personnels ayant été plus particulièrement exposés aux traces de gaz toxiques et aux poussières d'uranium appauvri.

Observant par ailleurs que rien n'était véritablement prévu afin d'assurer le nécessaire suivi médical des anciens combattants de la guerre du Golfe sur le long terme, il s'est fait l'avocat de la création d'un observatoire des risques rémanents des militaires en opérations extérieures, structure spécifique rattachée au ministère délégué à la Santé, afin de centraliser leur prise en charge sanitaire. Il a fait valoir que, dans l'attente de son installation, une cellule spécifique pourrait être créée à cet effet au sein du ministère délégué à la Santé.

M. Claude Lanfranca a ensuite précisé que la mission d'information avait également cherché à savoir quels enseignements avaient été tirés du conflit en matière de prévention et de protection des soldats face au risque nucléaire, bactériologique et chimique (NBC). Il s'est interrogé sur le niveau de préparation des forces à ce type de menace puis il a souligné que la mission d'information, à l'instar de son Vice-président Charles Cova qui avait récemment interrogé le ministère de la Défense sur ce point, jugeait indispensable de consacrer davantage de moyens à l'entraînement et à l'équipement des forces pour faire face à la menace NBC, notamment au regard des 11 millions de francs et des 49 millions de francs respectivement affectés à cette fin par l'armée de l'Air et l'armée de Terre en 2000.

Il a ensuite reconnu que la question des effets des armes à uranium appauvri continuait à se poser, tout en observant que des analyses avaient là aussi, sous la pression de l'opinion, des médias et des parlementaires, permis d'aboutir à une connaissance plus précise des risques. Il a souligné à ce propos que la mission d'information se prononçait en faveur d'une sensibilisation accrue des militaires aux conséquences sanitaires éventuelles des munitions à uranium appauvri.

Complétant la présentation des propositions formulées par la mission d'information, Mme Michèle Rivasi a précisé qu'il était apparu nécessaire de simplifier les procédures administratives en vigueur dans l'attribution des compensations financières des maladies ou infirmités des anciens combattants, en supprimant la possibilité pour le service des pensions du ministère des Finances de demander le réexamen des dossiers.

Elle a ajouté que la mission d'information souhaitait également que soit encouragée la formation d'avocats spécialisés en matière de pensions militaires d'invalidité. Elle a en outre indiqué que la mission proposait une révision des dispositions de l'article L3 du Code des pensions militaires d'invalidité fixant les critères d'imputabilité au service des pathologies et troubles constatés.

Insistant sur ce point, qu'elle a jugé essentiel au regard de l'impératif de fidélisation des recrues, elle a estimé que le rôle de l'expertise médicale s'en trouverait renforcé. Elle a ajouté que, s'agissant des anciens combattants de la guerre du Golfe, les conclusions des études épidémiologiques lancées par l'INSERM ou à la suite des recommandations de la mission d'information, constitueraient de ce point de vue une base de travail intéressante. Elle a également fait valoir que l'administration conserverait toujours la faculté de prouver la non-imputabilité au service des pathologies et troubles.

Mme Michèle Rivasi a indiqué que la mission d'information proposait aussi qu'un dispositif d'allocation conservatoire soit prévu pour les malades les plus atteints, cette allocation étant versée dès le moment où ils auraient déposé un dossier de demande de pension.

Se référant à la situation de détresse de certains des anciens combattants de la guerre du Golfe malades et sans ressources, elle a indiqué que la mission d'information se prononçait en outre en faveur d'un mécanisme transitoire d'attribution de pensions pour les malades dont les symptômes demeurent inexpliqués dès lors que ces symptômes correspondraient à une liste préétablie de pathologies reconnues comme ouvrant droit à une compensation financière, à l'image de ce qu'avait décidé le législateur américain. Elle a estimé que cette mesure ne concernerait probablement que quelques dizaines de soldats qui avaient servi les intérêts de la Nation et qu'il s'agissait là du moyen le plus rapide de répondre de la manière la plus juste possible aux attentes de personnes dont le sens du devoir ne saurait être méconnu.

Faisant observer que la mission d'information avait formulé des recommandations concrètes et pratiques, elle a souhaité qu'elles soient suivies d'effets le plus rapidement possible, aussi bien pour garantir l'attrait de l'engagement au service de la défense de la Nation que pour maintenir la confiance entre l'opinion publique et les armées. Elle a conclu que la mission d'information en formulant ses propositions avait témoigné de sa préoccupation à l'égard du sort des personnels masculins et féminins engagés sur des théâtres extérieurs.

Se félicitant de la création de la mission, M. Jean-Louis Bernard a estimé qu'elle avait permis d'y voir plus clair sur un sujet qui avait fait l'objet de trop nombreuses assertions erronées de la part de journaux ou d'individus en manque de célébrité. Il a salué le travail méthodique, sans a priori et sans passion, de la mission, qui avait permis de dénouer en grande partie l'écheveau compliqué des questions qu'elle avait à traiter. Il s'est également réjoui de la bonne ambiance dans laquelle s'étaient déroulés ses travaux. Tout en reconnaissant que l'objet de la mission n'était pas de produire un travail scientifique, il a néanmoins souligné qu'elle avait été conduite à se livrer à un exercice de pathologie rétrospective et prospective et a regretté à cet égard qu'elle n'ait pas eu la possibilité de collaborer plus étroitement avec le groupe d'experts présidé par le Professeur Salamon. Il a dit son espoir que cette collaboration s'instaure pour la suite des travaux de la mission d'information.

Evoquant ensuite le fond des problèmes soumis à la mission, il a rappelé qu'elle avait été confrontée à la question de trouver un facteur explicatif commun à la multiplicité et à la disparité des troubles dont souffraient des personnes ayant participé aux opérations militaires dans le Golfe. Il a remarqué à cet égard que ni l'uranium appauvri, ni la Pyridostigmine, ni le Virgyl ne permettaient d'expliquer l'ensemble des pathologies observées. Si l'uranium appauvri peut expliquer le développement des cancers, il n'en reste pas moins que des études épidémiologiques américaines ou conduites par le service national de santé (National Health Service) britannique ont montré qu'on observait moins de pathologies cancéreuses parmi les militaires ayant servi dans le Golfe qu'au sein d'un groupe témoin. S'agissant de la Pyridostigmine, il semble difficile de lier la prise de ce médicament, dont les quantités absorbées par les militaires français sont deux fois moindres que celles dispensées par la médecine civile, à l'apparition de troubles quelque dix ans après.

M. Jean-Louis Bernard a également évoqué l'éventuelle responsabilité des vaccins administrés aux soldats français, se référant sur ce point à l'audition du Professeur Gherardi. Il a rappelé que ce chercheur français avait trouvé des lésions anormales, révélant une accumulation d'aluminium dans la fibre musculaire d'anciens soldats sur lesquels avait été pratiquée une biopsie au point d'injection du vaccin. Il a expliqué que ces lésions pouvaient rendre compte des douleurs et fatigues dont souffraient ces personnes mais également d'autres troubles pouvant résulter de phénomènes de réaction auto-immune bien connus en pathologie. C'est dans cette perspective que la mission propose qu'un droit à pension soit reconnu aux anciens combattants souffrant de pathologies de type musculaire et de lésions de même nature que celles identifiées par le Professeur Gherardi à partir des points de vaccination.

M. Jean-Louis Bernard a ensuite insisté sur le rôle que le stress avait pu jouer dans les pathologies observées. Il a évoqué à ce propos un entretien de la mission avec des experts de la faculté de médecine de Georgetown University au cours duquel les phénomènes de stress, encore mal connus aujourd'hui, mais que l'on observe dans toutes les guerres, avaient été identifiés comme des facteurs pathologiques. La difficulté consiste cependant à établir le lien entre une pathologie et les formes de stress subies par les personnes concernées pendant une guerre mais aussi en raison d'événements personnels ou familiaux survenus par la suite. En tout état de cause, s'agissant de la guerre du Golfe, qui s'est déroulée sur un théâtre éloigné et dans un contexte de menace diffuse, notamment chimique, le stress est un élément à considérer. En l'absence de certitudes toutefois, la question de l'attribution d'un droit à pension pour les pathologies liées au stress reste ouverte.

En conclusion de son intervention, M. Jean-Louis Bernard a indiqué que le groupe UDF approuvait totalement les analyses et les conclusions du rapport.

Le Président Paul Quilès a dit partager les remarques de M. Jean-Louis Bernard sur l'absence de collaboration, qu'il a jugé regrettable, entre la mission et le groupe d'experts présidé par le Professeur Salamon. Il a rappelé à cet égard que, lors du lancement de la mission d'information, il avait insisté sur l'établissement de relations de travail entre les deux instances. Il a à ce propos regretté qu'alors que la mission avait fait la lumière sur les conditions d'emploi des militaires français, les experts n'aient pas tiré profit de ce travail pour les besoins de leurs propres recherches. Il a jugé utile que, pour la suite des travaux de la mission concernant les Balkans, des contacts s'instaurent entre cette dernière et le groupe d'experts.

M. Bernard Cazeneuve a jugé cette absence de collaboration d'autant plus regrettable qu'existait en théorie une parfaite complémentarité entre les travaux du groupe d'experts et la mission parlementaire, le premier ayant pour tâche d'étudier le lien éventuel entre les situations où étaient placés les militaires français et l'existence de pathologies spécifiques, alors que la seconde s'attachait à étudier les conditions d'emploi des forces ayant pu les exposer à des risques sanitaires. Il a relevé à cet égard que le groupe présidé par le Professeur Salamon s'était limité au recensement et à l'exploitation d'une bibliographie déjà constituée par d'autres sans avoir recours aux documents de la mission. Il a également constaté le contenu extrêmement synthétique des préconisations épidémiologiques émises par ce groupe. Il s'est d'ailleurs étonné que la mission n'ait eu connaissance du contenu de ces propositions que très peu de temps avant leur divulgation publique.

Faisant remarquer que l'évolution des conditions d'engagement des forces poserait de plus en plus fréquemment la question des risques sanitaires qui en découlent pour les militaires concernés, M. Robert Gaïa a souligné l'inadaptation du Code des pensions militaires d'invalidité à ces données nouvelles. Il s'est alors demandé si, pour éviter les polémiques dues à l'inadaptation d'un système dépassé, il ne faudrait pas réformer ce code en inversant la charge de la preuve de l'imputabilité au service.

Approuvant ces propos, Mme Michèle Rivasi a souligné que les dispositions du Code des pensions militaires d'invalidité ne laissaient que trois mois à un militaire qui revenait d'un conflit pour faire le lien entre ce conflit et sa pathologie alors que les maladies repérées parmi les anciens combattants de la guerre du Golfe, comme les affections neuro-musculaires ou les leucémies, pouvaient se déclarer après une longue période de plusieurs années. Elle a également jugé qu'il était vraisemblable que les prochains conflits se déroulent dans des environnements chimiques, bactériologiques ou nucléaires. Elle a alors fait ressortir l'importance de la proposition d'inversion de la présomption d'imputabilité au service formulée par la mission d'information.

Elle a également insisté sur les propositions de la mission d'information tendant à supprimer la possibilité pour le ministère des Finances de demander un nouvel examen du dossier de pension une fois la procédure initiale achevée, celle-ci étant déjà très lourde. Elle a enfin souligné que la mission proposait d'améliorer la transparence des conditions d'examen des dossiers par la Commission consultative médicale, la procédure actuelle ne permettant même pas au demandeur de connaître l'identité du médecin qui aura traité sa demande.

M. Charles Cova, après s'être réjoui des conditions de travail de la mission d'information et notamment de la confiance totale qui avait régné entre ses membres, a félicité les rapporteurs pour l'excellente synthèse qu'ils avaient fait d'un volume considérable de documents et de données. Il a ensuite exposé qu'au nom du groupe RPR, il approuvait sans réserve les conclusions de la mission.

Rappelant que la mission proposait l'adaptation à une situation nouvelle du Code des pensions militaires d'invalidité, il a indiqué, à titre personnel, que son seul souci au cours de sa participation à ses travaux avait été de protéger les militaires des conséquences des pathologies dont ils pouvaient souffrir du fait de leur service et de faire en sorte qu'ils puissent être justement indemnisés.

Le Président Paul Quilès a alors félicité le Président, les rapporteurs et les membres de la mission d'information pour l'importance du travail qu'ils avaient accompli et pour l'excellent climat dans lequel ils avaient rempli leur tâche. Il a ensuite insisté sur le progrès que représentait, pour l'information du Parlement, la procédure de transmission de documents classifiés aux missions d'information de la Commission, après déclassification à leur intention. Cette procédure établie au début de la législature et qui faisait à présent jurisprudence avait pu être largement utilisée par la mission d'information sur les conditions d'engagement des militaires français ayant pu les exposer à des risques sanitaires spécifiques.

M. Charles Cova a ajouté que, depuis la création de la mission d'information, le Ministre de la Défense avait pris un grand nombre de textes destinés à améliorer la protection des militaires en opérations, notamment dans les Balkans, jugeant que les travaux de la mission d'information avaient contribué à cette attitude. Il y a vu une des justifications essentielles de la constitution de la mission d'information.

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La Commission a alors autorisé à l'unanimité conformément à l'article 145 du Règlement la publication du rapport d'information sur les conditions d'engagement des militaires français ayant pu les exposer, au cours de la guerre du Golfe et des opérations conduites ultérieurement dans les Balkans, à des risques sanitaires spécifiques.

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