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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION de la DÉFENSE NATIONALE et des FORCES ARMÉES

COMPTE RENDU N° 20

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 7 décembre 1999
(Séance de 17 heures)

Présidence de M. Paul Quilès, Président

SOMMAIRE

 

Pages

- Examen de l'avis sur le projet de loi autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française, le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne, le Gouvernement de la République italienne, le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, portant création de l'Organisation conjointe de coopération en matière d'armement (OCCAR) (ensemble quatre annexes) (n° 1916) (M. Jean-Noël Kerdraon, rapporteur).

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- Information relative à la Commission

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La Commission de la Défense a examiné, sur le rapport de M. Jean-Noël Kerdraon, rapporteur pour avis, le projet de loi autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française, le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne, le Gouvernement de la République italienne, le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, portant création de l'Organisation conjointe de coopération en matière d'armement (OCCAR) (ensemble quatre annexes) (n° 1916).

Le Président Paul Quilès a rappelé que la coopération européenne en matière d'armement souffrait d'obstacles structurels : la difficulté d'harmoniser les besoins et les calendriers, l'obligation de « juste retour » industriel et la complexité des procédures renchérissent les prix des programmes d'armement.

Il a également souligné qu'il ne pourrait pas y avoir d'Europe de la défense, sans base industrielle forte et autonome dans le secteur de l'armement. Après les regroupements majeurs observés du côté de l'offre de la part des industriels, sous l'impulsion des Etats, la création de l'OCCAR était un pas, modeste mais réel, vers la constitution d'une instance intergouvernementale cohérente du côté de la demande, ce qui expliquait que la Commission de la Défense nationale se soit saisie pour avis de la convention l'instituant.

Rappelant que l'augmentation des coûts de développement et la réduction des ressources budgétaires, empêchaient tout pays européen d'être entièrement autonome dans le domaine de l'armement, M. Jean-Noël Kerdraon a indiqué que la France et l'Allemagne, rejoints par le Royaume-Uni et l'Italie avaient mis en place dès 1996, par un accord administratif, une Organisation conjointe de coopération en matière d'armement, l'OCCAR.

La gestion des premiers programmes confiés à cet organisme ayant donné satisfaction, les Etats membres ont souhaité poursuivre dans cette voie et ont signé, le 9 septembre 1998, une convention conférant, entre autres, la personnalité juridique à l'OCCAR. C'est du projet de loi autorisant l'approbation de cette convention que la commission de la défense s'est saisie pour avis.

Rappelant les récentes restructurations industrielles intervenues dans le domaine de l'armement, le rapporteur a insisté sur la nécessité de coordonner également la demande émanant des pays européens, jalon indispensable d'une future Europe de la défense. Il a insisté sur les différents avantages d'une telle démarche :

- du point de vue militaire, l'interopérabilité des forces qu'elle facilite ;

- dans le domaine financier, la réduction des coûts qu'elle permet grâce à l'allongement des séries et au partage des frais de recherche ;

- en matière industrielle, l'effet structurant des politiques de coopération ;

- enfin l'intérêt politique de la généralisation de la coopération dans le secteur de l'armement pour la construction de l'Europe de la défense.

M. Jean-Noël Kerdraon a ensuite fait état des difficultés rencontrées dans la mise sur pied d'instances de coordination dans le domaine de la production d'armement, les intérêts des différents pays européens différant selon qu'ils disposaient ou non d'une industrie de défense. Il a indiqué que ces divergences avaient conduit les membres fondateurs de l'OCCAR à ne pas en faire un organe subsidiaire de l'UEO, comme cela avait été envisagé à l'origine, mais de l'ériger en organisme international indépendant. Il a également souligné l'intérêt de la personnalité juridique qu'il était prévu d'accorder à l'OCCAR : possibilité de passer directement des contrats, d'ester en justice, de contracter des emprunts... Mais, au delà, l'octroi de la personnalité juridique permettra à la nouvelle organisation de devenir un partenaire majeur lors des discussions avec les industriels. En outre, ses personnels seront regroupés sous un seul statut, ce qui devrait accroître sa cohésion et son efficacité.

M. Jean-Noël Kerdraon a présenté les principes de fonctionnement de l'OCCAR, mettant l'accent sur le caractère novateur de certains d'entre eux. Ainsi, il a indiqué que, bien que les principales décisions restent soumises à l'exigence de l'unanimité, certaines, concernant le fonctionnement courant de l'organisation, pourraient être prises à la majorité des voix, chaque membre disposant d'un certain nombre de suffrages, ce qui devrait permettre d'éviter d'éventuels blocages.

Mais il a souligné que l'aménagement de la règle du « juste retour » constituait l'élément le plus novateur : l'usage, quasiment généralisé, consistant à établir une égalité entre la contribution financière des pays et le niveau de participation de leurs industries ne permet pas de trouver au sein d'un programme la configuration la plus économique dans la mesure où les différents partenaires industriels sont imposés et non choisis pour leur efficacité. Cette pratique peut être considérée comme l'une des principales raisons du surcoût des programmes menés en coopération.

L'OCCAR fait évoluer cette pratique en introduisant la notion d'équilibre global multiprogrammes et pluriannuel : le retour industriel devra être recherché sur la durée et non plus seulement pour chaque programme. Un mécanisme de seuil est néanmoins instauré et des mesures correctrices sont prévues si le retour n'est pas égal à 66 % au moins sur un programme ou à 96 % de manière globale sur trois ans.

Sur le plan financier, M. Jean-Noël Kerdraon a indiqué que le budget administratif de l'OCCAR serait financé au prorata des droits de vote de chaque membre tandis que le budget des divisions de programme serait fonction de la participation financière de chaque pays au programme concerné. Le contrôle courant de l'OCCAR sera effectué par un Conseil de surveillance réunissant les ministres des pays membres. Mais la Cour des comptes, pour ce qui concerne la France, aura également une mission de contrôle, de même que le Parlement, puisque les crédits gérés par l'OCCAR, inscrits aux titres III et V du budget du ministère de la défense, seront inclus dans les lois de finances ainsi que dans les lois de programmation militaires. Enfin, il a indiqué que l'OCCAR, implantée à Bonn, était un organisme raisonnablement dimensionné, comptant moins de 200 employés, ce qui constituait un gage d'efficacité.

En conclusion, M. Jean-Noël Kerdraon a rappelé que l'OCCAR avait vocation à accueillir dans ses rangs d'autres pays européens qui en approuveraient le mode de fonctionnement et a insisté sur la nécessité, mise en lumière par le conflit du Kosovo, de la construction d'une authentique Europe de la défense. Il a alors proposé à la Commission d'émettre un avis favorable à l'adoption du projet de loi autorisant l'approbation de la convention créant l'OCCAR.

Le Président Paul Quilès a estimé que, même si elle constituait une étape modeste dans le développement de la coopération européenne en matière d'armement, la création de l'OCCAR permettait de renforcer son cadre institutionnel.

M. Jean-Claude Sandrier, après avoir remarqué que l'OCCAR fonctionnait déjà, s'est inquiété que la priorité soit une nouvelle fois donnée aux aspects économiques, la politique de sécurité et de défense commune de l'Union européenne n'existant pas encore malgré les progrès récents en ce sens. Tout en reconnaissant la nécessité de coopérations industrielles au niveau européen, il a estimé que l'Europe de l'armement n'impliquait pas nécessairement la vague des fusions et privatisations qui ont cours actuellement. Il s'est par ailleurs demandé pour quelles raisons le siège de l'OCCAR avait été fixé à Bonn alors que la France détenait une position de premier rang en matière d'armement en Europe. Il a enfin regretté les atteintes portées au principe d'unanimité dans un secteur aussi sensible que celui de l'armement.

M. Jean-Noël Kerdraon a apporté les éléments de réponse suivants :

- 40 % des salariés de l'OCCAR sont de nationalité française et les industries françaises d'armement occupent une large place dans les programmes en coopération ;

- la coopération européenne en matière d'armement est une nécessité pour la compétitivité des entreprises de ce secteur industriel même si la question de la déclinaison juridique de cet impératif reste ouverte. Prenant l'exemple de la DCN, il a souligné la nécessité d'une bonne adaptation du cadre juridique des activités de production d'armement à leurs spécificités.

M. Jean Briane s'est déclaré favorable à toute mesure, aussi modeste soit-elle, qui renforçait la coopération européenne en matière de défense et permettait des progrès dans l'élaboration d'une politique de sécurité et de défense commune. Il a, par ailleurs, souligné que la coopération européenne en matière de défense ne conduisait pas la France à perdre son identité.

Le Président Paul Quilès a exprimé sa satisfaction que la Commission ait eu l'occasion de se prononcer sur un élément significatif des premiers progrès de la construction de l'Europe de la défense.

La Commission a alors émis un avis favorable sur le projet de loi autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française, de la République fédérale d'Allemagne, le Gouvernement de la République italienne, le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, portant création de l'organisation conjointe de coopération en matière d'armement (OCCAR) (n° 1916), les membres du groupe communiste s'abstenant.

Information relative à la Commission

Sur la demande de la Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, la Commission a saisi cette dernière sur le projet de loi (n° 1867), adopté par le Sénat, relatif aux volontariats civils institués par l'article L. 111-2 du code du service national.

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