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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION DES FINANCES,

DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

COMPTE RENDU N° 18

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 6 novembre 2001
(Séance de 16 heures 15)

Présidence de M.  Yves Tavernier, Vice-Président

SOMMAIRE

 

pages

- Examen de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2002 (n° 3262)

· Ville et article 72 rattaché à ce budget

· Fonction publique

· Défense et articles 31 et 32 rattachés à ce budget

· Industrie

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- Information relative à la Commission

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La Commission a poursuivi l'examen de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2002 (n° 3262).

La Commission a tout d'abord examiné, sur le rapport de M. Pierre Bourguignon, Rapporteur spécial, les crédits de la Ville et l'article 72 rattaché à ces crédits.

M. Pierre Bourguignon, Rapporteur spécial, a salué la mobilisation du Gouvernement en faveur de la politique de la ville en précisant que 72,52 millions d'euros supplémentaires sont inscrits sur le budget de la ville pour 2002. Ces moyens nouveaux bénéficient aux titres IV et VI sur lesquels seront financées les actions prévues dans les contrats de ville. Ils profiteront aux principaux dispositifs mis en place par le Gouvernement depuis 3 ans, et notamment au Fonds d'intervention pour la ville, au programme de renouvellement urbain, au Fonds de revitalisation économique et au dispositif adultes-relais.

L'effort public en faveur de la ville présenté dans le fascicule jaune devrait, en 2002, dépasser 6,2 milliards d'euros, contre 5,9 milliards d'euros en 2001. L'essentiel de cette progression résulte de la poursuite du plan emplois-jeunes et du plan de lutte contre les exclusions, de l'augmentation des apports de la Caisse des dépôts et consignations et d'une participation accrue des collectivités territoriales à la politique de la ville.

M. Alain Rodet a souhaité avoir des précisions sur la manière dont les grands projets de ville ont été sélectionnés.

M. Pierre Hériaud s'est interrogé sur la diminution des crédits prévus en faveur du développement social urbain en Ile-de-France.

M. Pierre Bourguignon, Rapporteur spécial, a précisé que les grands projets de ville ont vocation à constituer des projets globaux de développement social urbain qui visent à réinsérer un ou plusieurs quartiers dans leur agglomération. Les cinquante grands projets ont été sélectionnés selon ces critères. Les crédits destinés à l'Ile-de-France ne font plus l'objet de chapitres budgétaires spécifiques et sont désormais inscrits sur des lignes budgétaires globalisées, pour des montants identiques à ceux votés l'année dernière.

La Commission a ensuite adopté, sur proposition du Rapporteur spécial, les crédits de la Ville pour 2002.

Article 72 : Extension du dispositif des adultes-relais.

M. Pierre Bourguignon, Rapporteur spécial, a présenté cinq amendements :

- le premier rectifiant une erreur matérielle ;

- le deuxième et le troisième maintenant l'accès au dispositif adultes-relais des personnes bénéficiant d'un contrat emploi solidarité ou consolidé et résidant dans un territoire prioritaire des contrats de ville autre qu'une zone urbaine sensible ;

- le quatrième exonérant l'aide versée par l'État aux employeurs d'adultes-relais de charges fiscales ou parafiscales ;

- le dernier renvoyant les conditions d'application du présent article à un décret en Conseil d'État.

M. Pierre Hériaud a souhaité savoir si l'extension du dispositif adultes-relais proposé par le Rapporteur spécial se traduira par une augmentation du nombre de postes. Il a également interrogé le Rapporteur spécial sur le coût de l'exonération fiscale de l'aide versée par l'État.

Le Rapporteur spécial a précisé que ses amendements visent à maintenir les conditions actuelles de recrutement des adultes-relais, et ne devraient par conséquent pas influer sur le nombre de postes prévus, fixé à 10.000. Le coût de l'exonération fiscale est difficile à établir avec certitude. Il devrait néanmoins être beaucoup moins important que le coût de l'exonération des aides versées en matière d'emplois-jeunes.

La Commission a adopté ces cinq amendements, puis cet article ainsi modifié.

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La Commission a ensuite examiné, sur le rapport de M. Jean Vila, Rapporteur spécial, les crédits de la Fonction publique.

M. Jean Vila, Rapporteur spécial, a indiqué que le projet de loi de finances pour 2002 rompait définitivement avec la politique de gel de l'emploi public, malheureusement retenue par le gouvernement dans les trois premiers budgets de la législature. Pour autant, le principe de non-création d'emplois lors du passage aux 35 heures est très inquiétant et risque de se traduire par un affaiblissement des services publics et une externalisation de certaines tâches autrefois dévolues au service public, avec tous les dangers qu'une telle privatisation implique pour les usagers.

Concernant l'évolution des dépenses de personnel de l'État, les crédits inscrits aux trois premières parties du titre III du budget de l'État, hors budgets annexes, s'élèvent à 109,5 milliards d'euros (715,8 milliards de francs), soit une progression de 4,6 % par rapport à 2001. Cette progression est, en partie, due à la revalorisation du point de la fonction publique décidée de façon unilatérale par le Gouvernement après l'échec des négociations avec les organisations syndicales. Pour 2001, le point a été revalorisé de 0,5 % en mai et de 0,7 % en novembre. Pour 2002, un même calendrier d'augmentation est prévu, mais il est d'ores et déjà acquis que l'augmentation de mars 2002 sera plus importante, afin de rattraper le différentiel entre l'inflation anticipée et l'inflation constatée pour 2001. Ce rattrapage sera financé sur le chapitre 31-94 des charges communes, sur lequel une provision de 445 millions d'euros (2,919 milliards de francs) a été inscrite.

Concernant l'évolution des effectifs, le projet de loi de finances prévoit la création de 15.892 emplois, soit 5.780 créations de plus que l'an dernier. Ces créations se concentrent sur les secteurs prioritaires que sont la justice, l'enseignement scolaire et supérieur, la sécurité et l'emploi. Par ailleurs, un effort particulier est réalisé pour réduire les situations d'emploi précaire, sans effet sur les effectifs réels : 3.996 emplois de titulaires sont prévus pour accueillir les agents non titulaires lauréats des examens ou concours ouverts au titre du plan de résorption de l'emploi précaire ; au même titre, 3.550 emplois sont ouverts pour régulariser des postes d'agents contractuels rémunérés sur les ressources propres d'établissements publics ; enfin, 6.197 emplois serviront de support à des contrats à durée indéterminée de droit public créés au profit d'agents recrutés initialement sur des contrats de droit privé.

Les crédits dépendant spécifiquement du ministère de la Fonction publique sont inscrits au fascicule « Services généraux du Premier ministre » et regroupés au sein de l'agrégat 21 « Fonction publique ». Il est regrettable que les crédits relatifs à la direction générale de l'administration et de la Fonction publique (DGAPF) ne soient pas intégrés à cet agrégat. En tenant compte de ces crédits, qui s'élèvent à 7,3 millions d'euros, les crédits « Fonction publique » seront quasiment stables et atteindront 223,96 millions d'euros (1,469 milliard de francs).

Les crédits de l'action sociale interministérielle (chapitres 33-94 et 57-06) baisseront légèrement de 1,62 % pour atteindre 128,4 millions d'euros. Ceci résulte essentiellement de l'ajustement des crédits aux besoins pour les chèques-vacances, la dépense ayant baissé de 10 % en 2000. Par contre, s'agissant des crédits destinés à financer les actions visant à faciliter l'insertion professionnelle des personnes handicapées dans la fonction publique de l'État, il est proposé en 2002 de porter la dotation inscrite au fonds interministériel à 4,57 millions d'euros (30 millions de francs), soit un doublement de la dotation.

Les subventions aux écoles : École nationale d'administration (ENA), Institut international d'administration publique (IIAP) et Instituts régionaux d'administration (IRA) progressent sensiblement de 4 %. L'augmentation est particulièrement importante pour les cinq IRA (+ 8,63 %) en raison de l'augmentation du nombre d'élèves en formation. L'ENA et l'IIAP sont appelés à fusionner le 1er janvier 2002, afin d'harmoniser et de renforcer l'offre française de formation et de coopération administrative aux niveaux national, européen, et international.

Enfin, comme les années précédentes, le Rapporteur spécial a entendu l'ensemble des organisations syndicales de la fonction publique et tient à rapporter leur immense et unanime inquiétude. Inquiétude concernant le passage aux 35 heures d'abord : ce qui devait être un progrès social et un outil de modernisation de l'administration, s'est transformé en quasi-régression sociale qui se fait contre l'usager et contre les missions de service public, à cause du dogme de non-création d'emplois. Or, ce dogme est totalement irréaliste et certains ministères y ont échappé, le gouvernement prenant conscience des dangers de régression du service public : ainsi les ministères de la Justice et de l'équipement prévoient des créations d'emplois pour le passage aux 35 heures. Aussi, les créations d'emplois prévues dans la présent projet de loi de finances risquent d'être largement insuffisantes au vu des attentes, justifiées, des usagers et de la nécessité de sauvegarde des services publics. Les 35 heures vont se traduire par une accélération du mouvement de privatisation des services, directement ou par l'externalisation de certaines tâches.

Une inquiétude doit également être soulignée s'agissant de la précarité : des progrès importants ont été accomplis, mais le recrutement massif de non-titulaires se poursuit envers et contre tout, mettant ainsi à mal le statut de la Fonction publique. La plupart des besoins nouveaux sont comblés grâce à des contractuels, et cette évolution risque d'être accentuée par le passage aux 35 heures. Enfin, l'abandon de la politique contractuelle avec les syndicats qui a amené le Gouvernement à prendre des mesures unilatérales est regrettable. Les négociations doivent impérativement reprendre et s'inscrire dans un cadre plus large de refonte intégrale de la grille Fonction publique, 10 ans après le « protocole Durafour ».

Cette refonte est d'autant plus nécessaire que les années futures vont voir partir à la retraite de nombreux fonctionnaires, qu'il sera indispensable de remplacer. Or le contexte du marché du travail sera très différent dans le futur et la concurrence entre le privé et le public sera accentuée, en particulier pour ce qui concerne les jeunes diplômés. Il est nécessaire que l'État consente un effort salarial accru pour que la fonction publique présente une attractivité forte pour ces jeunes diplômés. Une hausse planifiée des salaires doit être organisée dans les prochaines années, hausse qui passera nécessairement par une refonte de la grille que tous les syndicats réclament. Enfin le Rapporteur spécial s'est félicité de la reconduction du congé de fin d'activité en regrettant qu'il ne soit pas pérennisé.

M. Alain Rodet s'est interrogé sur la non-intégration des crédits du centre des études européennes de Strasbourg dans le regroupement annoncé de l'ENA et de l'IIAP et sur un jeu d'écritures concernant l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique : des crédits passent du titre V au titre III.

M. Pierre Hériaud a demandé des précisions sur caractère réel des créations d'emplois annoncées par le Gouvernement, en particulier si les chiffres avancés intégrent les transformations d'emplois liées au plan de lutte contre la précarité dans la fonction publique.

M. Jean Vila, Rapporteur spécial, a répondu que le nombre de créations nettes d'emplois s'établit à 15.890, et que le centre des études européennes de Strasbourg n'était effectivement pas inclus dans le regroupement avec l'ENA, pour des raisons qu'il convient d'approfondir, d'ici la séance publique.

Après que le Rapporteur spécial s'est déclaré en faveur de l'abstention, la Commission a adopté les crédits de la Fonction publique.

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La Commission a ensuite examiné, sur le rapport de M. Jean-Michel Boucheron, Rapporteur spécial, les crédits de la Défense et les articles 31 et 32 rattachés à ce budget.

M. Jean-Michel Boucheron, Rapporteur spécial, a tout d'abord relevé le caractère novateur du budget de la Défense pour 2002, qui se présente comme le reste du budget de l'État en euros, mais qui, surtout, s'applique à une armée désormais entièrement professionnalisée dans un contexte international profondément modifié.

Le budget global s'élève à 38 milliards d'euros, en croissance de 1,9 % ; les pensions augmentent de 3 %, le titre III, hors pensions, augmente de 2,3 % avec une dotation de 16,46 milliards d'euros, et les crédits d'équipement s'élèvent à 12,8 milliards d'euros, soit une croissance de 0,7 %, en intégrant les 410 millions d'euros de reports de crédits de l'année 2001.

Le titre III est l'un des meilleurs de la législature. Il représentera environ 60 % de la totalité des crédits. Le budget 2002 se traduira par la création nette de 13.000 emplois, hors appelés, et la loi de programmation militaire sera respectée à 99 % au regard des effectifs budgétaires, portés à 436.000 hommes. La progression des rémunérations et des charges sociales reflète la professionnalisation des armées, mais aussi et surtout les mesures de revalorisations salariales applicables à l'ensemble de la fonction publique. Ces mesures sont importantes puisqu'en 1996, un militaire du rang engagé touchait 4.200 francs par mois et qu'en 2002, il gagnera 6.700 francs par mois.

Les crédits de fonctionnement courant augmentent de 7,2 %, ce qui permettra de développer les activités de nos forces, au-delà des seules opérations extérieures qui ne peuvent être considérées comme des entraînements.

Si le titre III est donc très favorable à la condition militaire, le titre V est trop serré et la jonction avec la première annuité de la loi de programmation militaire 2003-2008 sera difficile si le budget 2002 n'est pas exécuté scrupuleusement au niveau de la loi de finances initiale, c'est-à-dire sans gel des crédits ni annulations. Selon que l'on adopte tel ou tel référentiel, le taux d'exécution de la programmation varie, même si la référence qui semble s'imposer puisqu'elle a été approuvée à la fois par le chef de l'État et le Gouvernement, est la loi de programmation militaire 1997-2002 modifiée par la revue de programmes de 1998. Selon cette référence, la loi de programmation militaire est respectée à 96 %, ce chiffre est de 93 % pour la loi de programmation sans revue de programmes, et de 88 % si l'on retraite la base de référence en éliminant les bourrages d'enveloppe.

Il s'agit donc du meilleur taux d'exécution d'une loi de programmation militaire.

On peut toutefois contester le financement dans le budget 2002 de la Défense du Centre national d'études spatiales (CNES) hauteur de 191 millions d'euros, qui ne relève pas par nature de la dépense de défense, ainsi que le financement, à hauteur de 100 millions d'euros, du développement économique de la Polynésie, dont le niveau de contrôle métropolitain apparaît insuffisant.

L'effort en matière d'entretien programmé du matériel est utile, compte tenu de la mauvaise disponibilité technique opérationnelle de nombreux parcs de matériels en service dans les armées. Sur ce point, le budget n'est pas enthousiasmant.

Le budget d'équipement de 2002 permettra notamment la commande de systèmes de défense sol-air de moyenne portée, de munitions aéronautiques, de simulateurs Rafale, de moyens de transmissions pour les garnisons de l'armée de terre ainsi que de 2.300 véhicules pour la gendarmerie. En matière de livraison, on notera plus particulièrement 50 chars Leclerc et 43 missiles Apaches.

En conclusion, le Rapporteur spécial a estimé qu'avec un titre III consolidé et un titre V peu enthousiasmant, on pouvait considérer que le budget 2002 était globalement correct et il a émis un avis favorable à son adoption en soulignant que la loi de programmation suivante serait consacrée aux fabrications, afin que les armées disposent de plus d'équipements, concrets.

M. Alain Rodet a successivement interrogé le Rapporteur spécial sur :

- les sujétions imposées à l'armée de Terre, du type plan Vigipirate ;

- l'évolution du nombre des officiers généraux ;

- l'avion de transport futur qui lui paraissait constituer une priorité européenne ;

- l'évolution du nombre des gendarmes depuis quatre à cinq années.

Après avoir évoqué les plaintes des gendarmes relatives à leur niveau de salaire et leur nombre insuffisant, M. Pierre Forgues a demandé des informations sur l'évolution du plan de charge de GIAT Industries au terme du programme Leclerc.

M. Jean-Pierre Balligand a relevé qu'à la suite de l'échec de la réorganisation territoriale globale des forces de sécurité en France, certaines villes s'étaient montrées candidates pour supprimer les commissariats et accueillir des brigades de gendarmerie, mais que ce processus ne lui semblait pas avoir été conduit de manière exemplaire, puisque le volume réduit des effectifs de ces gendarmeries n'avait pas permis de fournir un meilleur service que précédemment.

M. Jean-Michel Boucheron, Rapporteur spécial, a apporté les réponses suivantes :

- avec une armée professionnelle, on doit changer de modèle et le temps des mobilisations massives de l'armée de Terre pour des missions de service public, du type marée noire, est terminé. Les effectifs mobilisés par le plan Vigipirate sont concentrés sur des sites particulièrement sensibles ;

- le nombre de généraux est constant ;

- la projection de nos forces armées présente deux difficultés : le rayon d'action des hélicoptères des forces spéciales est insuffisant, ce qui impose l'achat rapide de nouveaux hélicoptères plus performants et le vieillissement de la flotte de nos transall impose leur remplacement par l'A400M, qui doit être commandé avant la fin 2001, ce qui passe par l'approbation du Bundestag. À défaut de celle-ci, le Royaume-Uni pourrait se retourner vers un achat auprès des industriels américains et la France affronterait un problème capacitaire grave ;

- le nombre de postes dans la gendarmerie est passée de 81.600 en 1996 à 98.000 en 2002. D'importants efforts ont été faits en matière d'informatique, d'équipements de transmission, de véhicules ou de bureautique. Le problème principal qui mobilise les gendarmes, notamment via les associations de leurs épouses, est celui de la durée du travail et des astreintes, qu'ils comparent au régime des policiers. Le Gouvernement semble prêt à entendre cette argumentation et devrait proposer des mesures au prochain conseil supérieur de la gendarmerie ;

- s'agissant de GIAT, l'entreprise, à la différence de la direction des constructions navales qui peut conquérir des marchés sur des activités en développement, affronte une conjoncture difficile. Le maintien du potentiel industriel passe nécessairement par la conquête de marchés à l'exportation, ce qui n'est pas facile en raison d'un contexte concurrentiel très vif.

La Commission a ensuite adopté les crédits de la Défense ainsi que les articles 31 (Mesures nouvelles. Dépenses ordinaires des services militaires) et 32 (Mesures nouvelles. Dépenses en capital des services militaires), après que le Rapporteur spécial a émis un avis favorable à leur adoption.

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La Commission a enfin examiné, sur le rapport de M. Michel Destot, Rapporteur spécial, les crédits de l'Industrie.

M. Michel Destot, Rapporteur spécial, a décrit l'année 2000, seul exercice clos à l'heure actuelle, comme une excellente année pour l'industrie française, au cours de laquelle une demande intérieure forte a soutenu une croissance très satisfaisante. Jamais autant d'emplois n'avaient été créés depuis 1974. L'investissement a très nettement progressé, et les investissements directs à l'étranger ont été très élevés, montrant le dynamisme de notre industrie, dans le contexte de la mondialisation. Un léger fléchissement a été enregistré en 2001, et les événements du 11 septembre dernier rendent toute prévision éminemment aléatoire. Mais le taux d'utilisation des capacités de production reste élevé, signe que l'activité a bien résisté. Grâce à la politique industrielle menée depuis le début de la législature, les entreprises françaises ont aujourd'hui les moyens de résister à la concurrence, y compris internationale, l'effort de recherche et d'innovation est poursuivi, et la rénovation de la politique énergétique s'effectue dans l'équilibre et la transparence.

C'est dans cette optique qu'il convient d'examiner les crédits de l'industrie pour 2002, certes en baisse globale de 3,48 % à structures constantes, mais qui permettent néanmoins de préparer l'avenir grâce à un important effort de formation, d'améliorer l'environnement des entreprises par un soutien accru aux programmes de recherche et à la modernisation des PME-PMI, et de mettre en _uvre une politique énergétique indépendante et transparente. Au total, les crédits de paiement s'élèvent à 1,9 milliard d'euros (12,46 milliards de francs), en baisse de 4,39 % par rapport à l'an dernier, et à 725,2 millions d'euros (4,76 milliards de francs) en autorisations de programme, soit une diminution de 0,95 % par rapport à 2001.

En matière de soutien à l'innovation et au développement industriel local, seront particulièrement favorisées les nouvelles technologies de l'information et de la communication et les biotechnologies. Ce secteur représente plus de 20 % de la croissance française, et crée cinq fois plus d'emplois que le reste de l'économie. Les crédits du secrétariat d'État dans ce domaine se monteront à 460,49 millions d'euros (3,02 milliards de francs) en 2002, dont 122 millions d'euros (800 millions de francs) pour l'Agence nationale de valorisation de la recherche (ANVAR). La dotation de l'ANVAR est donc maintenue  mais on pourrait songer à l'augmenter. On pourrait également élargir les interventions de l'Agence, notamment en l'autorisant à rendre ses avances remboursables convertibles en participations au capital d'entreprises.

Pour améliorer l'environnement des entreprises, un important effort sera accompli en termes de formation : les écoles nationales supérieures des mines bénéficieront d'une progression de leurs moyens de fonctionnement de 3,5 %, et de 85.000 euros (557.600 francs) supplémentaires pour les bourses accordées à leurs élèves. L'École supérieure d'électricité (Supélec) verra sa subvention augmenter de 12,5 % dans le cadre du plan annoncé lors du Comité interministériel pour la société de l'information de 2000.

La politique énergétique est confortée dans ses grandes orientations, notamment dans le secteur du nucléaire. 2001 aura été marquée par une réorganisation réussie, avec la création d'Areva, société constituée par regroupement de Cogema, Framatome et STMicroelectronics. Quant au Commissariat à l'énergie atomique (CEA), il bénéficiera d'une subvention de 923,6 millions d'euros (6,06 milliards de francs), qui consolidera l'effort budgétaire consenti en 2001, après des années assez difficiles. Le contrat pluriannuel 2001-2004 conclu avec l'État doit notamment permettre d'accomplir des progrès sur l'aval du cycle nucléaire. Telle est également la raison du soutien accru accordé à l'Agence nationale des déchets radioactifs (ANDRA), dont les crédits augmenteront de 20,3 % en 2002. La libéralisation progressive des marchés de l'électricité et du gaz est désormais acquise, et dans ce contexte la Commission de régulation de l'électricité verra ses moyens de fonctionnement augmentés de 16 % de loi de finances initiale à loi de finances initiale. Cependant ce chiffre ne tient pas compte des reports de crédits intervenus au cours de l'année écoulée ; si l'on intègre ces données, la dotation de la Commission baissera de 15 % environ l'an prochain, alors que ses missions s'accroissent - même si elles ne concernent pas encore le marché du gaz. La subvention à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) sera consolidée au niveau de 36,9 millions d'euros (242 millions de francs) en autorisations de programme ; en revanche, 12,2 millions d'euros (80 millions de francs) sont prévus en crédits de paiement, soit une baisse de 60 %, pour tenir compte des importantes disponibilités de l'Agence. Enfin, l'industrie parapétrolière continuera à être soutenue, via le Fonds de soutien aux hydrocarbures, à hauteur de 25,15 millions d'euros (165 millions de francs), en autorisations de programme comme en crédits de paiement. Il s'agit d'une diminution globale de l'ordre de 27 %, ce qui est préoccupant pour l'avenir de ce secteur.

Les actions de restructuration industrielle seront portées par des moyens d'intervention en hausse de 9,19 % en autorisations de programme (actions hors Comité interministériel pour les restructurations industrielles) et de 4,21 %, toujours en autorisations de programme, pour le Fonds d'industrialisation des bassins miniers. Conformément aux engagements européens de la France, la suppression des aides d'État à la construction navale est intervenue le 1er janvier 2001. Enfin, le versement des prestations dues aux anciens mineurs continuera d'être honoré et les crédits destinés à la gestion de « l'après-mines » seront doublés.

Observant qu'en dépit d'une baisse globale des crédits, aucun des grands domaines d'action du secrétariat d'État à l'industrie ne serait significativement altéré, M. Michel Destot, Rapporteur spécial, a recommandé l'adoption des crédits de l'industrie.

M. Pierre Hériaud a souhaité obtenir des précisions sur la baisse de 60 % de la dotation de l'ADEME en crédits de paiement ; s'il s'agit de la résorption de réserves, d'où viennent-elles ? Par ailleurs, à quel pourcentage les aides au secteur de la construction navale sont-elles ramenées depuis le 1er janvier 2001 ?

M. Alain Rodet s'est interrogé sur la multiplication des restructurations industrielles à l'heure actuelle, et en particulier sur le rôle joué par le secrétariat d'État en ce domaine, où l'action publique est largement sollicitée et particulièrement visible.

En réponse, M. Michel Destot, Rapporteur spécial, a apporté les précisions suivantes :

- l'ADEME a fait l'objet de critiques sur sa gestion, et la baisse de sa dotation prévue pour 2002 poursuit un but de rationalisation. La double tutelle de l'Agence n'est pas étrangère à sa situation actuelle ;

- le règlement communautaire en vigueur à propos des aides à la construction navale n'autorise certes plus les aides à la commande depuis le 1er janvier 2001, mais il permet toujours d'autres types d'aides. C'est ainsi que le secrétariat d'État a pu poursuivre sa politique de soutien par l'apport d'aides à la restructuration pour les chantiers, qui doivent réduire leurs effectifs, et d'aides à la recherche en faveur des technologies nouvelles et du développement de navires à haute valeur ajoutée. Le montant global des aides sera donc nécessairement en forte baisse, mais restera significatif, à périmètre comparable ;

- en termes de politique de restructuration industrielle, une meilleure coordination interministérielle et davantage de décentralisation sont sans doute nécessaires, notamment en relation avec le ministère de l'emploi, mais au-delà, la DATAR, les organismes de formation professionnelle et les collectivités locales devraient pouvoir s'impliquer davantage. On ne peut continuer à traiter ces dossiers par des questions au Gouvernement à l'Assemblée nationale. Le temps infini que passe le secrétaire d'État à répondre aux sollicitations diverses sur ce sujet, pour des résultats qui souvent ne dépendent que très peu de son pouvoir direct, montre que ce mode d'intervention est dépassé.

Sur la proposition du Rapporteur spécial, la Commission a ensuite adopté les crédits de l'Industrie.

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Information relative à la Commission

M. Yves Tavernier, rapporteur d'information sur la banque mondiale et le fonds monétaire international, informe ses collègues qu'il auditionnera, le jeudi 8 novembre, à 14 heures 30, au Salon Mars II, M. Pierre Duquesne, administrateur français auprès de ces deux organismes.

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