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Session ordinaire de 2001-2002

RÉUNION DU JEUDI 15 NOVEMBRE 2001

Projet de loi de finances pour 2002

COMMISSION DES FINANCES,
DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

Audition de M. Laurent Fabius,
Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie

PRÉSIDENCE de M. Henri Emmanuelli,
président de la commission

COMMISSION DE LA PRODUCTION ET DES ÉCHANGES

Audition de M. François Huwart,
Secrétaire d'Etat au commerce extérieur

PRÉSIDENCE de M. André Lajoinie,
président de la commission

La séance est ouverte à neuf heures.

COMMISSION DES FINANCES,
DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

Audition de M. Laurent Fabius,
Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie

PRÉSIDENCE de M. Henri Emmanuelli,
président de la commission

M. Henri Emmanuelli, président de la commission des finances - Nous allons examiner ce matin les crédits du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, puis ceux du commerce extérieur.

M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - Mme Parly et moi nous réjouissons de nous trouver à nouveau devant cette commission élargie, où nous pouvons poursuivre le dialogue dans un cadre moins formel qu'en séance publique. Le programme est vaste : outre le budget du Minefi, ministère de l'économie des finances et de l'industrie, il comprend les charges communes, les taxes parafiscales et les comptes spéciaux du Trésor. Je voudrais pour l'heure insister sur deux éléments clés de nos choix : la modernisation du ministère et la gestion de la dette publique, laquelle est le premier point d'application de la nouvelle constitution financière de la République que vous avez votée.

L'an passé, il nous était apparu clairement qu'une mutation profonde de notre ministère était indispensable à l'efficacité de l'Etat. Nous avons entrepris une démarche de modernisation fondée sur la concertation, l'expérimentation et la transparence. Un an plus tard, les résultats sont tangibles. Le comité technique paritaire que j'ai présidé il y a quelques semaines a décidé d'engager la deuxième étape : toutes les activités du ministère sont dorénavant concernées par la « réforme-modernisation ». Le premier élément de la réforme concerne l'informatique. Dès l'an prochain, le compte fiscal complet de chaque contribuable sera consultable en ligne. Le système Copernic se substituera à notre informatique actuelle, qui est trop segmentée et qui a mal vieilli. A ce propos, un mot sur le regrettable dysfonctionnement de la fin de l'été concernant certains avis d'imposition. Nos services se sont mis immédiatement à la disposition des contribuables concernés et nous avons identifié les causes de l'incident. La mise en place du projet Copernic en est apparue d'autant plus urgente. Les crédits destinés à la réforme-modernisation ont donc été majorés de 26 %, pour atteindre 51 millions d'euros. Par ailleurs, nous allons généraliser un Intranet commun à la direction générale des impôts et à la direction générale de la comptabilité publique.

En complément, nous menons des actions de rapprochement des services, notamment en mettant en place un accueil commun partout où les locaux le permettent. Nous développons également progressivement les centres d'appels téléphoniques, l'expérience menée à Lille ayant montré son utilité. Les particuliers peuvent bien sûr toujours se rendre dans nos locaux, mais beaucoup de questions peuvent être réglées par téléphone.

Les professionnels vont aussi bénéficier de mesures spécifiques. Une direction de grandes entreprises sera mise en place au 1er janvier 2002. Ce sera l'interlocuteur fiscal unique des 22 000 grandes entreprises du pays. Les équipes sont déjà en place. Tout doit être prêt à la date prévue.

Les autres entreprises bénéficieront du rapprochement des centres des impôts et des trésoreries. Par ailleurs, elles pourront désormais se connecter au ministère pour s'informer sans se déplacer, les réponses leur parvenant en vingt-quatre heures. Le dispositif expérimenté dans certains départements sera en effet généralisé.

Suite au rapport Launay, onze trésoreries ont créé des points « Minefi service contact » au sein de maisons des services publics.

Dans toutes ces réformes, nous avons recherché la concertation la plus large.

Pour la rénovation de la direction générale de comptabilité publique, nous avons inscrit pour 2002 la somme de 27,4 millions d'euros.

A l'étranger, nous avons décidé de rassembler dans un réseau unique les services de la direction des relations économiques extérieures et ceux du Trésor. Ainsi, dans chaque pays, une « mission économique » sera placée sous l'autorité de l'ambassadeur.

A l'issue d'une longue concertation, plus de 80 % des agents ont choisi d'anticiper la mise en _uvre de la réduction du temps de travail. Cette réforme s'effectue à effectifs budgétaires constants, ce qui n'exclut pas des redéploiements. Nous avons par exemple renforcé les moyens de contrôle de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. En termes d'emplois, l'autorisation parlementaire pour 2001 a été intégralement consommée.

Certains craignent que la réduction du temps de travail détériore le service rendu. Certes, la diversité des missions et les conditions particulières dans lesquelles certaines doivent être effectuées rendent l'exercice délicat. Mais nous nous sommes efforcés de trouver des solutions positives. La rumeur fait état de fermetures en milieu rural et d'une réduction drastique des horaires d'ouverture. Au contraire, outre la création des points « Minefi service contact », le public pourra plus facilement accéder aux services pendant la pause méridienne. Il est tout de même paradoxal que les services publics ferment au moment où les citoyens peuvent s'y rendre.

Le passage à l'euro approche. Nos concitoyens utilisent de plus en plus cette nouvelle monnaie dans leurs paiements et ils attendent avec confiance l'échéance du 1er janvier 2002. Les billets et les pièces seront au rendez-vous. Il reste à intensifier la préparation des populations fragiles : les actions menées en ce sens vont se poursuivre tout au long du premier semestre 2002. Nous agirons le plus souvent en partenariat avec des associations : 9,9 millions d'euros sont prévus à cet effet.

Au plan de la gestion interne, nous poursuivons notre politique de requalification des emplois afin d'adapter les agents à l'évolution des métiers. En application de la jurisprudence Berkani, nous intégrons les agents précédemment employés comme contractuels de droit privé. Enfin, la création d'un nouvel agrégat rendra le budget plus transparent.

L'année 2001 était importante pour les Monnaies et médailles. Cette administration a su se moderniser pour la frappe des pièces en euro, qu'il faudra achever en 2002. Au total, 1,8 milliard de pièces vont être fabriquées, sans compter la frappe des monnaies grecques en euro. Il faudra continuer à rechercher des commandes étrangères, qui sont un gage pour l'avenir.

La pérennité de cette administration est acquise et l'abandon du projet de laminoir-fonderie n'y change rien. Le volume des frappes a permis de ne pas recourir à la subvention d'équilibre prévue pour 2001 et le plan de charge est tel qu'aucune subvention ne sera nécessaire pour 2002.

La loi organique du 1er août 2001 va donner un nouvel élan à la réforme de l'Etat. Sous le contrôle du Parlement, les ministres seront libres de redéployer les crédits à l'intérieur d'un même programme, chacun étant jugé ensuite sur ses résultats. Pour améliorer la gestion de la trésorerie et de la dette publique, nous avons créé l'agence France Trésor, dont le nom ne doit pas induire en erreur. C'est un nom commercial destiné à faciliter le placement de nos titres auprès des investisseurs internationaux, mais l'agence est bien un service de mon ministère, même si elle bénéficie d'une certaine souplesse de gestion, en particulier dans le recrutement. Parce que l'Etat doit rester en mesure d'assurer ses paiements, il est interdit à l'agence d'avoir un découvert à la Banque de France. Les opérations de gestion doivent se faire dans le souci constant du coût minimum pour les finances publiques. L'enjeu est de taille : la dette représente 650 milliards d'euros, soit 4 000 milliards de francs, et le service de la dette s'élève chaque année à 200 milliards de francs soit 14 % des dépenses de l'Etat. C'est là notre deuxième poste de dépenses.

La façon la plus simple de réduire le service de la dette, c'est de réduire la dette elle-même. Nous nous y employons, puisque la dette, qui représentait 59,3 % du PIB en 1997, s'établissait à 57,6 % à la fin de l'année 2000. Mais sa gestion aussi peut être améliorée par l'application de quelques principes : la régularité des émissions, la simplicité des produits et la recherche d'une gestion active innovante.

Ainsi, l'agence nous fera économiser 200 millions d'euros en 2002 grâce à la mise en place d'un portefeuille de swaps de taux d'intérêts, pour un montant total de 40 milliards d'euros. Elle a émis une obligation indexée sur l'inflation de la zone euro qui a remporté un grand succès : le volume total d'émission se monte à 6,5 milliards d'euros. Enfin, l'agence travaille à améliorer le contrôle des risques : elle a adopté un cahier des procédures, publié au Journal officiel, qui fixe ses normes de gestion.

L'agence a pour objectif de faire de la dette française une référence pour la zone euro, dans laquelle notre marché est déjà le plus « liquide » ; l'Etat se refinancera ainsi à moindre coût à l'avenir.

Une autre amélioration liée à la loi organique est l'adoption dès cette année par anticipation d'un programme de gestion de la dette et de la trésorerie dans le « bleu » des charges communes. Le but est de clarifier tous les enjeux liés à la dette. Grâce aux réflexions et aux travaux menés pour mettre en place l'agence, le ministère y était prêt. Je confirme que la charge de la dette n'a pas qu'une dimension comptable mais traduit des choix dans le calendrier d'émission de la dette et des décisions de gestion active. Dans cet esprit, le programme fixe à l'agence trois objectifs.

Il s'agit d'abord de réduire au minimum le solde des comptes de l'Etat à la Banque de France en fin de journée. Les excédents éventuels en cours de journée sont placés sur le marché interbancaire. Ne pas procéder à cette gestion active de la trésorerie conduirait à des à-coups de 15 à 25 milliards d'euros. L'objectif pour 2002 est de ramener de 500 à 200 millions d'euros le solde moyen des comptes de l'Etat en fin de journée. Cela suppose plus de précision dans les recettes et les dépenses de la part de nombreux services de l'Etat mais aussi de ses correspondants, comme les collectivités locales, et donc une grande rigueur financière pour tous les acteurs publics.

Il s'agit ensuite de placer les excédents potentiels de trésorerie dans les meilleures conditions afin d'obtenir les meilleurs niveaux de rémunération sur le marché à court terme, selon les diverses méthodes habituelles, et en s'appuyant sur les émissions hebdomadaires de titres courts.

Il s'agit enfin de réduire la durée moyenne de la dette négociable, l'objectif fixé à l'agence étant de passer de 6 ans et 4 mois, ce qui est la moyenne actuelle, à 5 ans et 6 mois. Selon nos simulations, l'accroissement de la volatibilité des taux restera marginal et le gain pour le budget atteindra 200 millions d'euros dès 2002. Pour parvenir à ce résultat, l'agence engagera des opérations de swap.

Pour la première fois, nous proposons donc au Parlement des objectifs synthétiques de gestion de la dette, qu'il s'agisse du calendrier d'émission de la dette primaire ou de la gestion active de l'encours. Ce premier programme d'action illustre notre volonté de moderniser le ministère en appliquant la loi organique.

Madame Parly et moi-même répondrons à vos questions. Jean-Pierre Jouyet le directeur du Trésor et Sylvain de Forges, directeur de l'agence France Trésor sont également à votre disposition pour répondre à vos questions ou vous recevoir. Je ne peux que vous inciter à aller visiter les locaux de l'agence France Trésor et la salle des marchés au ministère des finances ; la gestion de la dette doit être transparente et l'agence doit être une maison de verre, y compris pour les parlementaires. Monsieur Carcenac s'y est déjà rendu.

Comme vous le voyez, même si l'on peut souhaiter aller plus vite, aller plus loin, la réforme de l'Etat est en cours.

M. Thierry Carcenac, rapporteur spécial de la commission des finances pour le budget des charges communes - Je ne saurais aborder ici les 41 chapitres du budget des charges communes qui, avec ses 117 milliards d'euros, représente 35 % du budget général. Je vous renvoie donc au détail de mon rapport écrit.

Le budget des charges communes connaît une croissance plus soutenue que le budget général avec une augmentation de 6,5 % contre 2,7 % en loi de finances initiale pour 2001. Cette croissance est même de 12 % pour les remboursements et dégrèvements qui atteignent 62,6 milliards d'euros.

Il s'agit ici de constater le déficit prévisionnel et d'assurer le financement de la dette. Mais au-delà, le budget des charges communes recouvre aussi les dépenses de l'Etat ne relevant d'aucun ministère et concernant par exemple la fonction publique, les dépenses en atténuation de recettes, des moyens de fonctionnement courant de l'administration, les dépenses d'intervention du Trésor à caractère social et économique, ses interventions internationales et ses relations avec les collectivités territoriales.

Depuis 1997, nous avons entendu toutes sortes de critiques sur les choix économiques du Gouvernement : tantôt les recettes étaient trop élevées - épisode de la cagnotte -, tantôt c'était le déficit. En fait, l'évolution maîtrisée des dépenses, la réduction des déficits publics et la baisse des impôts traduisent volontarisme et réalisme.

C'est ainsi que la loi organique du 1er août 2001 qui préfigure la modernisation de l'Etat dans le domaine comptable et budgétaire est mise en _uvre par anticipation. Pour la première fois le Parlement est saisi de vrais choix politiques concernant la gestion de la dette et de la trésorerie de l'Etat. Mais sans doute conviendrait-il de lui permettre d'en débattre plus tôt.

De même la dette française est passée à l'euro dès 1999 et vous avez créé l'agence France Trésor. Pouvez-vous indiquer quelles sont les conséquences du passage à l'euro sur la politique d'organisation du marché et comment vous comptez associer le Parlement aux choix de l'agence France Trésor ? Celle-ci, dont j'ai effectivement visité les locaux, mériterait une présentation plus détaillée. Il s'y posera à terme des problèmes de sécurité, mais je sais que vous en êtes conscients. Pour gérer la dette, le déficit, les amortissements, le compte à la Banque de France, l'Agence dispose de 28 fonctionnaires. Quels objectifs vous êtes vous fixé en ce qui concerne la durée moyenne de la dette négociable ?

Pourriez-vous nous indiquer ceux que vous cherchez à atteindre lorsque vous recourez aux nouveaux instruments de gestion que sont les portefeuilles de swaps ou les obligations à terme indexées ? Pour l'instant, j'ai simplement noté que les 40 milliards d'euros de swaps permettraient d'économiser près de 200 millions d'euros...

Je tiens à féliciter le Gouvernement d'avoir prévu l'abondement des crédits de rémunération des fonctionnaires, dans ce budget des charges communes. Il faudra en effet affronter le départ à la retraite de près de 100 000 fonctionnaires par an. Mais ce choc démographique impliquerait également qu'on veille à l'équilibre des régimes des pensions civiles et militaires, dont la clarification est prévue par la nouvelle loi organique.

S'agissant des dépenses en atténuation de recettes, un nouveau paragraphe du chapitre 15.01 permet d'avoir une vue claire sur la mise en _uvre de la prime pour l'emploi. Ces dépenses progresseront de 737 millions d'euros en raison de la montée en charge du dispositif et je note une réaction positive de la part des bénéficiaires.

Pour toutes ces raisons, je demanderai tout à l'heure à la commission d'approuver ce budget des charges communes.

M. le Président de la commission - Vous me surprenez beaucoup ! Nous aviserons... (Sourires)

M. Dominique Baert, rapporteur spécial de la commission des finances pour les comptes spéciaux du Trésor et les entreprises publiques - Compte tenu de l'ampleur du sujet que j'ai à traiter, je me contenterai de renvoyer à mon rapport écrit, s'agissant de décrire précisément les évolutions prévues pour les comptes spéciaux du Trésor comme pour les entreprises publiques.

En ce qui concerne les premiers, après avoir pratiquement triplé dans la loi de finances précédente, leur excédent devrait de nouveau croître en 2002, mais seulement de 42,4 %. Le solde des opérations définitives des comptes d'affectation spéciale restant négligeable, cette progression s'explique une fois encore, pour l'essentiel, par les mouvements liés aux opérations temporaires.

Le nombre des comptes spéciaux diminue à nouveau d'une unité, passant à 36 contre 44 en 1997.

Cette présentation sommaire étant faite, j'en viens à des sujets qui fâchent. Ainsi, je continue de critiquer les écarts considérables entre les prévisions et l'exécution, pour ce qui est des comptes de commerce. En 1998, cet écart était de 75,5 % ; tombé à 2,1 % en 1999, il est remonté à près de 400 % en 2000 ! Quels sont les responsables ? Les comptes gérés par le ministère de la défense, dont l'opacité semble à la mesure du laconisme qu'on a opposé à mes questions. Je crains que la nouvelle loi organique n'apporte guère de changements et j'en appelle donc à une volonté politique de clarification.

Autre point plus technique : les prévisions de recettes et de dépenses des comptes d'affectation spéciale étant dépendantes du compte n° 902-33, « Fonds de provisionnement des charges des retraites et de désendettement de l'Etat », il est clair que les réformes annoncées en matière de prix des licences UMTS ont un impact important sur la masse annoncée des crédits. Elles devront se traduire rapidement par des amendements de coordination, destinés à ajuster les dépenses.

Année après année, je dénonce la croissance de l'excédent du compte d'avances sur le montant des impositions locales. L'an passé, j'avais prononcé le terme de cagnotte et l'on s'était borné à m'opposer des arguments aussi techniques que savants visant à démontrer que la situation avait un caractère exceptionnel et purement circonstanciel. De cela, je doute fort. Cet excédent est en effet systématiquement supérieur aux prévisions : le solde a été positif de 152 millions de francs en 1997, de 555 millions en 1998, de 4 230 millions en 1999. En 2000, il a été de 7 100 millions ! Comment ne pas réagir, surtout si l'on constate que la prévision révisée pour 2001 est de 3 100 millions et que ce projet de budget fait encore état d'un excédent de 5 900 millions ? Si ce n'est pas une cagnotte, cela a tout du moins l'apparence d'une cassette. Or l'élu local que je suis vit mal cette captation des impositions locales, sachant tout ce qu'il pourrait faire d'une dotation supplémentaire de 500 millions pour sa dotation de solidarité urbaine.

S'agissant du compte de prêts du FDES, pourquoi ne pas demander de dotation nouvelle ? La vocation de ce fonds n'est-elle pas de soutenir le développement lorsque la conjoncture est moins favorable ? Encore faudrait-il qu'on améliore ses instruments d'intervention et qu'on rende plus compétitifs les prêts qu'il distribue. Les conditions en sont restées inchangées depuis 1994.

Je rêve d'une suppression totale de la redevance audiovisuelle. J'ai suggéré la mesure en 1997 et notre rapporteur général a repris l'idée en la défendant avec une inépuisable énergie. Cette suppression ne sera pas acquise sous cette législature, mais tout resterait ouvert pour la prochaine... En 2001 et 2002, nous aurons exonéré les personnes âgées non imposables sur le revenu : ne pourrait-on faire un effort supplémentaire cette année en exonérant également les personnes imposables mais dont l'impôt est inférieur au seuil de recouvrement ? Vos services ayant constaté que l'exonération votée l'an dernier a été moins coûteuse que prévu, on doit bien pouvoir aller un peu plus loin.

En ce qui concerne les entreprises publiques, je tiens d'abord à saluer l'effort de vos services pour élaborer le rapport sur l'évolution de ce secteur. Cependant, des perfectionnements restent possibles, notamment pour ce qui est de l'évaluation du patrimoine détenu par l'Etat et des participations minoritaires.

Une première série de questions portera sur les conditions d'exercice de la tutelle. Après avoir joué son rôle dans la stratégie d'acquisition menée par France Télécom, comment l'Etat entend-il réagir face à l'endettement croissant de l'entreprise ? Pour ce qui est de Gaz de France, je ne peux que regretter l'absence de transposition de la directive de 1998 sur le marché intérieur du gaz naturel. L'entreprise ne peut ainsi lutter à armes égales avec ses concurrents.

D'autre part, quelles seront les dotations en capital prévues pour le secteur public en 2001 ? Que fera-t-on de l'excédent de 9,8 milliards constaté sur le compte 902-24 ? Ne pourrait-on accorder des dotations à l'audiovisuel public, qui n'en a pas reçu depuis 1994, et à Air France dont la dette s'envole ?

Enfin, je reste préoccupé par le coût global de l'opération de cantonnement réalisée pour le Crédit Lyonnais. Ne pourriez-vous d'ailleurs l'actualiser ? Quoi qu'il en soit, le Consortium de réalisation souffre d'une forte inertie, en raison d'une structure tentaculaire : un conseil de surveillance, un directoire, un chef de pôles et plusieurs centaines de filiales, tout cela pour un portefeuilles d'actifs qui a considérablement fondu ! A la fin de juin, le stock n'est plus que de 9,5 milliards en effet. Par ailleurs, je ne peux que dénoncer l'indigence des réponses que cet organisme m'a fait parvenir, via vos services. La représentation nationale n'est pas qu'un compte sur lequel tirer et notre commission revendique le droit de savoir et de comprendre. Merci de nous aider dans cette nécessaire vigilance, Monsieur le ministre.

M. Loïc Bouvard, rapporteur pour avis de la commission de la défense - Deux catégories de comptes spéciaux du Trésor intéressent à divers titres le ministère de la défense : en premier lieu, les quatre comptes du commerce qu'il gère directement - les comptes relatifs aux subsistances militaires, aux exploitations industrielles des ateliers aéronautiques de l'Etat, aux constructions navales et à l'approvisionnement des armées en produits pétroliers - ; en second lieu, le compte d'affectation spéciale relatif aux produits de cessions de titres, parts et droits de sociétés, qui dépend du ministère des finances et qui reflète la situation du secteur public de l'armement.

La présentation de cet avis permet de dresser un bilan sur les résultats des services industriels et des entreprises publiques de l'armement, ainsi que sur les réformes destinées à faciliter leur participation aux restructurations européennes.

Certes, quelques secteurs industriels ont beaucoup évolué depuis trois ans : c'est notamment le cas d'Aérospatiale et de Thomson-CSF, qui ont été privatisées. En revanche, les réformes ont été insuffisantes pour la DCN et pour GIAT Industries, comme l'a relevé la Cour des comptes.

Le service à compétence nationale DCN illustre l'inadéquation du statut de comptes de commerce à l'exercice d'activités industrielles tournées vers l'exportation et son exemple démontre la nécessité d'alliances européennes.

Je me réjouis que le Gouvernement ait décidé, conformément à ma proposition, de transformer DCN en société. Il était temps car la restructuration de la construction navale est bien avancée en Allemagne et la perspective d'une alliance entre les chantiers britanniques et allemands n'est pas exclue. Pour ne pas risquer l'isolement, DCN doit absolument participer au processus de privatisation des chantiers navals espagnols Izar en 2003 et nouer un partenariat durable avec l'italien Fincantieri. Mais je doute que le statut de société d'Etat permette à DCN de s'imposer comme un partenaire européen incontournable. Cela exigerait des ouvertures de capital, ce que le Gouvernement semble exclure.

Il a en outre décidé de soumettre ces dispositions au Parlement dans le cadre du collectif pour 2001. J'en comprends les raisons pratiques : la réforme doit être adoptée avant la fin de la législature pour entrer en vigueur le 1er janvier 2003. Mais, étant donné les réticences des personnels qui se sont exprimés lundi, il eût été plus opportun de présenter un texte spécifique.

J'en viens aux entreprises publiques de l'armement terrestre et aux industries de la propulsion aéronautique. Pour des raisons différentes, SNECMA et GIAT Industries ont du mal à participer à des regroupements européens. Je pense comme vous, Monsieur le ministre, qu'il faut favoriser l'émergence d'un EADS des motoristes à partir d'une alliance entre SNECMA et d'autres fabricants européens. Mais les discussions à ce sujet ont échoué. L'Etat a trop longtemps laissé planer le doute sur ses intentions puisque l'ouverture du capital n'a été annoncée qu'en juin. L'introduction en bourse prévue pour cet automne a donc dû être reportée en raison de l'impact sur les marchés des attentats du 11 septembre. Je ne conteste pas le bien-fondé de ce report, mais un temps précieux a été perdu pour l'ouverture du capital de SNECMA, préalable à la conclusion d'alliances européennes.

Dans le domaine de l'armement terrestre, la situation de GIAT Industries est préoccupante. Après avoir été recapitalisée à hauteur de 2,66 milliards d'euros depuis sa création, l'entreprise manifeste de nouveaux besoins de l'ordre de 610 millions d'euros qu'il faudra couvrir d'ici le premier trimestre 2002.

GIAT Industries reste pourtant un des principaux acteurs européens de l'armement terrestre, et a même noué une association avec Renault Véhicules Industriels pour construire des véhicules blindés de combat d'infanterie. Son principal problème est la faiblesse de son plan de charge. La Cour des comptes préconise la fermeture de six des dix établissements de l'entreprise. Quelles suites l'Etat entend-il donner à cette suggestion, étant donné que le statu quo entraînerait, selon la Cour, une perte supplémentaire de 10 milliards de francs d'ici à 2005 ?

Pour conclure, je porte un jugement nuancé sur le fonctionnement des comptes spéciaux du Trésor intéressant le ministère de la défense. S'agissant du compte d'affection spéciale, il faut en effet approuver l'ouverture du capital de la SNECMA, mais les hypothèques qui pèsent encore sur la gestion de GIAT Industries suscitent des inquiétudes. Quant aux comptes de commerce du ministère de la défense, il apparaît que ce régime juridique, acceptable pour trois d'entre eux, est franchement inadapté pour DCN. Le Gouvernement l'a d'ailleurs compris, puisqu'il a décidé de transformer DCN en société d'Etat. Mais il n'envisage pas l'ouverture du capital, pourtant nécessaire pour conclure des alliances en Europe.

En dépit de ces observations de son rapporteur, la commission de la défense a émis un avis favorable à l'adoption de ces crédits.

M. Henry Chabert, rapporteur spécial de la commission des finances pour les services financiers - Le budget dont nous traitons concerne les trois réseaux de recouvrement des impôts, la DGCCRF, les juridictions financières, l'INSEE et le budget annexe des monnaies et médailles, pour un total d'environ 10,5 milliards d'euros. De gros progrès ont été faits en matière de transparence, notamment à la demande du Parlement ; on note aussi des avancées en matière d'efficacité et de modernisation des services. Il reste cependant beaucoup de progrès à faire pour en améliorer l'efficience.

Je me bornerai à éclairer à titre d'exemple quelques points particuliers. On peut par exemple regretter que les modernisations accomplies et le regroupement de certains services n'aient permis aucune évolution en matière de gestion du personnel, et que peu de choses soient prévues dans les années qui viennent alors qu'en dix ans 50 % des personnels partiront en retraite. La comparaison avec les pays étrangers conduite par l'inspection générale des finances n'a guère été suivie d'effets : on peut le regretter, compte tenu des besoins de l'Etat en effectifs dans d'autres secteurs où la modernisation est plus difficile. Dans le même domaine, les remarques de la Cour des comptes n'ont pas toutes été prises en compte, notamment sur le statut des conservateurs des hypothèques ou le mode de présentation des effectifs. Je pourrais évoquer aussi les rémunérations accessoires, même si une évolution est en cours, les rémunérations sur grade, ou encore les lignes souples qui représentent 246 millions, et que la DGI a curieusement tendance à accroître : on peut se demander pourquoi les recommandations de la Cour des comptes à ce sujet n'ont pas été prises en compte.

En matière de transparence et de régulation, beaucoup de choses ont été faites, mais il demeure un certain nombre de problèmes non résolus qui représentent environ 353 millions d'euros : il s'agit de la remise sur la vente au détail des tabacs manufacturés et de la rémunération des services rendus aux collectivités. Il faut se réjouir que l'activité bancaire de l'Etat soit en passe d'être supprimée, mais on peut se demander pourquoi, dans le domaine des assurances, on continue à vouloir faire jouer un rôle à l'Etat à travers la CNP. Les arguments qui ont conduit à supprimer l'activité bancaire de l'Etat, et notamment l'exigence européenne de concurrence, s'appliquent pourtant aussi à l'assurance : envisagez-vous une évolution dans ce domaine ?

D'autres aspects pourraient être améliorés. J'approuve ainsi les arguments de M. Baert sur la redevance audiovisuelle, dont je propose la suppression année après année. Le rapporteur général lui-même, dans le rapport de la MEC, l'a qualifiée d'impôt archaïque, injuste et coûteux. L'IGF ne dit pas autre chose, même si c'est en d'autres termes. Ce sont 1 500 emplois concernés, et 73 millions d'euros en dépenses directes. Si l'on ajoute les frais indirects, la suppression du service de la redevance se traduirait par une économie de 137 millions d'euros. On pourrait pousser la réflexion plus loin sur le positionnement de ce prélèvement et la difficulté de cerner exactement le budget de l'audiovisuel public aujourd'hui.

Une autre amélioration souhaitable concernerait le dispositif d'appui aux consommateurs. Ceux-ci sont aujourd'hui désorientés dans bien des domaines : protection sanitaire et alimentaire, nouvelles technologies, évolution des services de toutes natures. On peut donc se demander, alors que la demande s'accroît, pourquoi les crédits diminuent. On peut aussi s'interroger sur l'évolution de l'INC, si l'on considère qu'il épuise cette année toutes les réserves constituées pour couvrir son déficit structurel.

Une troisième piste de réflexion possible concerne l'inspection générale des finances. Sur 190 inspecteurs des finances, 58 seulement sont aujourd'hui directement affectés aux contrôles. On sait pourtant l'importance et la qualité de leurs rapports. Pourquoi ne pas renforcer ce corps ? Et pourquoi ne pas aller jusqu'au bout en assurant la complète publicité de ses travaux ? Auditionné par le Sénat, son directeur lui-même a souligné l'intérêt que présenterait cette démarche. L'Etat pourrait jouer une transparence accrue, comme les collectivités territoriales y sont tenues, et rendre les rapports de l'IGF accessibles au public et notamment au Parlement. Par ailleurs, on pourrait autoriser la saisine parlementaire de ce corps, qui a fait la preuve de sa compétence et de son savoir-faire.

L'Etat perçoit un impôt de 0,4 %, qui est porté au budget général depuis 1994, pour la révision des bases cadastrales. Mais celle-ci n'a toujours pas été effectuée et elle n'est pas prévue cette année plus que les autres. 182 millions d'euros ont déjà été dépensés à cet effet sans résultat. Je proposerai donc un amendement pour supprimer cette ligne budgétaire. Elle sera rétablie l'année où il sera réellement décidé de procéder à la révision.

Les Monnaies et médailles ont fait un effort considérable ces derniers temps. Elles ont réussi à assurer un tiers de fabrication supplémentaire. Toutefois, leurs prix de revient et leurs bénéfices demeurent extrêmement obscurs. Que va devenir cette institution lorsque la production de l'euro va chuter, en 2003 ou 2004 ? Sa pérennité est acquise, ce qui n'exclut pas de faire évoluer ses statuts. Elle doit en effet faire face à des missions très différenciées. Elle intervient d'abord sur le marché concurrentiel : la Grèce par exemple lui a acheté des monnaies. En l'occurrence, l'impossibilité d'obtenir un prix de revient détaillé est un handicap. Par ailleurs, les monnaies et médailles rendent un service d'intérêt général en fabriquant pour des musées ou en assurant la survie du métier de graveur par exemple. Il est nécessaire de revoir leur organisation structurelle et je propose un audit à cet effet.

M. Daniel Feurtet, rapporteur spécial de la commission des finances pour les taxes parafiscales - La loi organique du 1er août 2001 supprime les taxes parafiscales à compter du 31 décembre 2003. C'est donc l'avant-dernière fois que nous nous prêtons à cet exercice surréaliste qui consiste à autoriser le maintien des taxes sans pouvoir ni en supprimer, ni en créer, ni en modifier le taux. La loi organique permettra donc de restaurer les pouvoirs du Parlement et de rétablir le principe du consentement démocratique à l'impôt. Reste à régler la question du remplacement de la quarantaine de taxes encore en vigueur, qui représentent 666 millions d'euros hors redevance télévisuelle.

Les taxes parafiscales ont été instituées dans le secret des bureaux, sans débat public. Elles sont très disparates tant par leur poids que par leur destination. Mais ce n'est pas parce qu'un organisme bénéficie d'un financement juridiquement contestable que son action n'est pas utile à la société. Le Gouvernement et le Parlement doivent donc trouver des solutions de remplacement suffisamment rapidement pour que les organismes concernés ne soient pas affectés. Chaque dossier doit être étudié au cas par cas et les réponses doivent être différenciées. Les taxes parafiscales financent notamment des actions collectives de recherche et de développement industriels ainsi que des actions de formation, notamment dans le domaine des transports. Ces actions, qui ne seraient pas assurées par ailleurs, participent de notre politique industrielle et bénéficient à des petites et moyennes entreprises souvent créatrices d'emplois. Peut-on répondre à l'inquiétude légitime des secteurs concernés et leur assurer que les actions de recherche, de développement et de formation continueront à être financées ?

Le Gouvernement envisage de remplacer les taxes parafiscales par des subventions inscrites au budget de l'Etat. Mais il n'est pas souhaitable que les actions de formation, de recherche et de promotion des produits soient assurées par la collectivité sans que les entreprises soient mises à contribution. Par ailleurs, le financement budgétaire n'offre pas les mêmes garanties qu'une ressource affectée puisqu'il n'existe aucun droit à la pérennité d'une dépense budgétaire. Le Gouvernement envisage également d'étendre les cotisations « volontaires obligatoires » qui sont actuellement utilisées en matière agricole. Cette solution sera difficile à mettre en place car elle soulève des problèmes de recouvrement. Elle supposerait en outre de voter une autorisation législative pour la perception de ce type de cotisation. Compte tenu des nombreux secteurs concernés, il est probable qu'elle n'aboutisse pas d'ici deux ans. Dans quels secteurs comptez-vous l'appliquer ?

Le recours aux impositions affectées me semble être la meilleure solution. Il est prévu dans l'article 2 de la nouvelle loi organique si l'organisme bénéficiaire poursuit des missions de service public. C'est indubitablement le cas des centres techniques industriels et des comités professionnels de développement économique et je ne pense pas qu'il existe une incompatibilité de principe entre la défense d'intérêts sectoriels et la reconnaissance d'une mission de service public. L'imposition affectée aurait le double avantage d'assurer le financement de la recherche et du développement industriels et de maintenir la participation des entreprises. Elle implique cependant des contrôles de l'utilisation des fonds. Pouvez-vous préciser les règles de gestion qui pourraient être retenues ? Le recouvrement de ces impositions par les organismes collecteurs des taxes actuellement en vigueur est-il possible ?

M. le Président de la commission des finances- J'ai une autre question à poser. Notre pays a livré une difficile bataille contre ce fléau qu'a été en son temps l'indexation. C'est ainsi qu'il a pu mettre fin à une inflation à deux chiffres. Le Trésor semblait en particulier développer une allergie à toutes formes d'indexation, mais votre prédécesseur en a fait réapparaître une en instituant des OATI : obligations assimilables du Trésor indexées. Voilà qui crée un précédent. Comment justifier l'indexation du rendement du capital ? D'autres pays européens la pratiquent-ils ? Par ailleurs, je partage largement les remarques de M. Baert et j'aimerais avoir des précisions sur l'évolution du solde du compte d'avances des collectivités territoriales.

M. le Ministre - Je répondrai d'abord à M. Carcenac. La gestion de la dette est passée en euro en même temps que les marchés financiers, c'est-à-dire en janvier 1999. Le passage à l'euro nous a permis de lever plus facilement des capitaux sur l'ensemble du marché européen.

L'agence France Trésor a pour mission de réduire la durée moyenne de la dette. On peut y parvenir en modifiant la structure des émissions primaires, mais ce n'est pas suffisant, car les acheteurs souhaitent des engagements d'une certaine durée. Il est donc utile de procéder aussi à des opérations d'échange : c'est tout l'intérêt de la mise en place du portefeuille de swaps.

La baisse des taux d'intérêt doit être recherchée, ce qui nécessite une politique budgétaire sérieuse.

Le programme de swap, pour un montant contractualisé total de 40 milliards d'euros, doit nous faire économiser 200 millions d'euros.

Le solde moyen du compte de l'Etat auprès de la Banque de France s'élève actuellement, en fin de journée, à 500 millions d'euros. Nous voulons le ramener à 200 millions.

La durée moyenne d'endettement est en ce moment de 6 ans et 4 mois : nous souhaitons la ramener à 5 ans et 6 mois, ce qui nous fera encore économiser 200 millions d'euros dès 2002.

Pour répondre au président Emmanuelli, j'ajouterai que l'indexation ne vise qu'à répondre à la demande du marché. En outre, les produits indexés n'évoluent pas de la même manière que les produits usuels, ce qui permet de limiter le coût à terme. De tels produits sont proposés aux Etats-Unis, au Royaume-Uni, en Suède et en Nouvelle-Zélande. Mais il n'est pas question de revenir à des mécanismes d'indexation générale dont les effets pervers sont bien connus. Nous ne faisons que répondre à une demande spécifique dans un cadre limité.

M. le Président de la commission des finances- Il faut tout de même avoir conscience de l'énormité de l'entorse. Il est normal qu'un emprunteur cherche a sécuriser les prêteurs. Mais il s'agit en l'occurrence de sécuriser les rendements, ce qui me rend perplexe.

Monsieur le ministre, avec votre permission, je vais donner la parole à M. Vernaudon qui désire vous poser une question.

M. Emile Vernaudon - Nous sommes à quelques semaines du passage à l'euro et je regrette qu'il ne soit pas prévu d'introduire cette nouvelle monnaie dans les territoires et pays d'outre-mer. Notre monnaie restera le franc pacifique, avec sa connotation coloniale. Cette exception ne peut se justifier par notre statut d'autonomie, puisque la monnaie et le crédit sont de la compétence de l'Etat. L'introduction de l'euro aurait pu constituer un facteur de confiance dans des économies insulaires qui sont encore tributaires des échanges internationaux. En outre, la menace de dévaluation qui plane sur le franc pacifique n'est pas de nature à rassurer les investisseurs.

Pourquoi le maintien du franc pacifique ? La France peut-elle prendre l'engagement de ne pas dévaluer le franc pacifique comme elle a dévalué le franc CFA ? L'euro remplacera-t-il un jour le franc pacifique ?

M. le Ministre - Je vous répondrai dans un instant.

M. Baert est trop averti pour croire qu'il peut exister quelque part une cagnotte ou une cassette. La situation financière de la France s'est certes améliorée, mais il reste beaucoup à faire et nous n'avons pas de trésor caché. Toute dépense suppose une recette et on ne peut supprimer une recette qu'en lui substituant une autre ressource ou bien en renonçant à une dépense. Sous toutes les majorités, il est d'ailleurs très difficile de supprimer une dépense...

Seuls deux comptes de commerce ont un découvert autorisé : le compte d'approvisionnement des armées en produits pétroliers et celui des subsistances militaires. Pour les autres, l'exécution peut se révéler très différente des prévisions. Ainsi, nous constatons un écart de 2,89 milliards sur le compte des constructions navales, parce que la production de la DCN n'est comptabilisée qu'à l'achèvement des programmes.

Sur le compte d'avances des collectivités locales, vous constatez un dépassement constant. Le solde est excédentaire, mais plusieurs éléments doivent être pris en compte. En fait, une évaluation du cumul des opérations du compte depuis sa création fait apparaître un déficit de 100 milliards ; le solde entre les avances consenties aux collectivités locales et les recettes recouvrées se traduit par un manque à gagner pour l'Etat. Les 3 milliards d'excédent dont vous faites état ne représentent qu'un 1 % du flux annuel. Surtout, les recettes pour ordre qui créditent le compte correspondent aux dégrèvements décidés par la loi ou consentis à la demande des contribuables et aux admissions en non-valeur, ce qui représente un montant considérable. De toute façon, les mouvements du compte d'avances n'affectent pas le montant final des dotations aux collectivités. C'est l'Etat qui assume l'écart entre les avances faites et les recettes réalisées.

Beaucoup souhaitent la suppression de la redevance audiovisuelle, faisant valoir qu'il est toujours positif de supprimer un impôt ; d'autres s'inquiètent en revanche de l'avenir de la télévision publique dans ce cas. Vous savez que nous avons choisi de supprimer la vignette. Le coût de l'exonération de redevance pour les foyers fiscaux redevables de l'impôt sur le revenu mais qui ne le paient pas en raison de son faible montant serait d'environ 54 millions d'euros. Je rappelle qu'un certain nombre d'allégements ont déjà été consentis.

Le FDES n'est pas supprimé, même si ses dépenses diminuent depuis quelques années. Nous n'avons pas inscrit de crédits au budget 2001 ni en loi de finances pour 2002 car les reports sont importants. Pour 2002, on évalue les remboursements à 18,29 millions d'euros, mais ce montant peut varier en fonction du taux de recouvrement et du contentieux.

Un certain nombre de questions ont porté sur les entreprises publiques. Le déséquilibre actuel de la situation financière de France Télécom est dû à une diminution de sa valeur sur le marché bien supérieure à ce que l'on anticipait. L'Etat, en tant qu'actionnaire a fixé comme priorité absolue à France Télécom de diminuer son endettement. Il convient également de conforter la stratégie européenne de l'entreprise qui se traduit dans une forte augmentation de ses résultats d'exploitation. France Télécom a un fonds de commerce solide, des actifs de valeur, et donc tous les moyens de restaurer sa situation financière en quelque temps. Un certain nombre de mesures ont déjà été prises, par exemple la cession d'une partie du patrimoine immobilier. De façon générale, les mouvements d'enthousiasme ou de défiance du marché sont excessifs et il ne faut pas en tirer de conclusion définitive. Ces dernières semaines, et ce n'est peut-être pas sans lien avec les décisions que j'ai prises en ce qui concerne les télécommunications, le regain de confiance a été considérable. Comparer les moins-values théoriques liées à la diminution du ticket d'entrée pour les licences UMTS à l'augmentation de la valeur patrimoniale de France Télécom ferait taire bien des critiques.

Oui, GDF a une vraie stratégie industrielle qui s'exprime dans les objectifs ambitieux du contrat de groupe 2001-2003 signé avec l'Etat. Vous connaissez ce qui a trait au nouveau dispositif tarifaire et à l'équilibre économique attendu. Je confirme que la transposition de la directive européenne relative au marché intérieur du gaz est obligatoire. Nous l'avons déjà transposée en fait, sinon en droit. Mais le débat n'est pas fermé et l'Assemblée le reprendra. De même, je n'ai pas changé de point de vue sur l'intérêt que présente pour la « maison » GDF, pour ses salariés et pour l'Etat un certain nombre d'évolutions qui, dans le respect des principes évoqués par M. Baert, devront avoir lieu.

M. Baert a également émis quelques critiques à propos du CDR et demandé des éléments chiffrés. Actuellement 85 % des actifs cantonnés ont été réalisés et les pertes totales, estimées à 100 milliards en 1996, seraient de 72 milliards - ce chiffre est à avancer avec précaution car un certain nombre de contentieux importants restent pendants. Si le CDR a besoin de collaborateurs de très grande qualité, il convient maintenant d'en simplifier les structures et d'en réduire le format, ce à quoi le nouveau président du conseil de surveillance va s'employer.

S'agissant des dotations aux entreprises publiques, le compte d'affectation spéciale 902-24 dispose de 9,8 milliards auxquels s'ajouteront d'ici la fin de l'année quelques recettes supplémentaires provenant de la privatisation de la banque Hervet. Nous sommes en train d'en affiner la répartition et vous aurez tous les détails à l'occasion de l'examen de la loi de finances rectificative. Nous sommes soucieux de financer le plan de consolidation de la croissance. Outre les 2 milliards pour les aéroports et les PME, 4 milliards pour la recapitalisation du GIAT et les engagements de l'Etat envers RFF, il y aura certainement une série de demandes, mais comme toujours plus d'appelés que d'élus.

Effectivement, Monsieur Vernaudon, l'euro a été introduit dans les DOM mais pas en Polynésie française ni en Nouvelle-Calédonie. Au moment où ce choix a été fait, on a considéré que les conditions économiques et politiques d'une telle réforme n'étaient pas réunies. En effet, ces territoires veulent de plus en plus d'autonomie. Par exemple, dans 15 ou 20 ans seront transférées à la Nouvelle-Calédonie, si le corps électoral le décide, des compétences régaliennes sur la monnaie, et la Polynésie demande un statut comparable. Par ailleurs, dans de nombreux domaines, ces territoires bénéficient de règles dérogatoires au droit communautaire, par exemple en ce qui concerne la fiscalité et la liberté d'installation. Un changement monétaire nécessiterait de revenir sur cette situation. Mais la convertibilité entre le franc Pacifique et l'euro est garantie et il n'y a pas de crainte particulière à avoir quant à une éventuelle dévaluation.

MM. Bouvard et Feurtet ont évoqué les opérations intervenues dans l'aéronautique et dans l'électronique. On se souvient des difficultés survenues dans un passé pas si lointain. Au total ces opérations ont été positives et s'il y a des inquiétudes à avoir, ce n'est pas sur le plan juridique mais en raison des secousses sur les marchés. Nous veillerons justement à ne pas y ajouter d'incertitude juridique. Quant à la SNECMA, avant 1997 elle perdait de l'argent ; la mobilisation de ses salariés et de ses dirigeants lui a permis de redevenir très performante.

Nous sommes ouverts à des alliances européennes. Encore faut-il trouver des partenaires qui les souhaitent et qui respectent la place éminente que s'est acquise la SNECMA dans son secteur.

Quant à la mise en Bourse, elle ne doit pas compromettre les intérêts patrimoniaux de l'Etat et elle se fera donc « le moment venu », comme on dit avec une belle concision.

GIAT connaît encore de graves difficultés en raison de la contraction des marchés. Son projet stratégique lui a cependant permis de s'adapter et nous dresserons à cet égard un bilan l'an prochain. Le groupe a conclu des alliances, notamment avec RVI, et je suis convaincu que le dynamisme de ses équipes lui permettra d'en nouer encore d'autres, étant entendu que le ministère de la défense et le mien veilleront à la préservation du savoir-faire acquis par l'entreprise.

Quant à la DCN, elle a fait l'objet d'un article du projet de loi de finances rectificative qui vient d'être soumis au Conseil des ministres. Notre objectif est que la réforme entreprise porte au plus vite ses fruits.

Monsieur Feurtet, vous avez rappelé dans quel contexte s'inscrit notre décision de supprimer les taxes parafiscales et nous partageons votre souci de transparence et de contrôle. L'entreprise ne sera pas aisée, d'autant que nous allons bientôt nous attaquer au noyau dur de ces taxes. Notre avis est qu'il ne peut y avoir de solution unique : en effet, derrière ces taxes, il y a des personnes, et parfois des personnalités (Sourires). Il faut veiller à préserver les activités qui étaient ainsi financées et rassurer les organismes bénéficiaires quant à la pérennité de leurs ressources. Vous avez mentionné plusieurs possibilités : budgétisation, cotisations volontaires ou obligatoires, imposition affectée. Vous semblez accorder vos préférences à la dernière et cela peut se justifier juridiquement, mais nous entendons travailler avec les ministères concernés, avec le contrôleur d'Etat, avec les professionnels, dans un esprit ouvert. Je rappelle par ailleurs que le Conseil d'Etat, que nous avons consulté, a jugé que les impositions de toute nature destinées à financer des dépenses d'intérêt public ne pouvaient être affectées à des personnes privées ni bénéficier à des intérêts personnels, sectoriels ou professionnels.

S'agissant du mode de gestion et de recouvrement, la concertation devrait permettre d'identifier les solutions les meilleures pour chaque secteur ou organisme. Elle devrait commencer à la fin du premier trimestre de 2002, notre objectif étant de présenter un dispositif pratiquement au point à la fin du premier semestre.

Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget - Nous disposons d'assez peu de temps pour réformer la parafiscalité : les solutions de remplacement devront figurer dans la loi de finances pour 2003, de sorte que le dispositif entre en vigueur en 2004. C'est pourquoi la concertation s'engagera au milieu de l'an prochain, comme vient de le dire le ministre. Je suppose d'ailleurs que vous avez déjà reçu des délégations de professionnels. Mais il est clair que nous devons en finir avec un système peu respectueux des droits du Parlement, tout en conservant une approche pragmatique et en préservant les intérêts de tous ceux qui s'étaient organisés en fonction de cette ressource.

Monsieur Chabert, vous nous avez reproché d'avoir réagi avec retard aux observations de la Cour des comptes sur la gestion des personnels du service financier. Ce n'est pas du tout mon avis. Le régime indemnitaire a été totalement refondé. La rebudgétisation prévue dans le budget pour 2001 est maintenant réalisée. Le recensement de l'existant, tâche longue et difficile, a été mené à bien. Le travail juridique est en cours à l'échelon interministériel et la concertation avec les représentants du personnel s'engage.

Pour le régime indemnitaire, nous avons prévu un socle commun à toutes les directions, comportant deux niveaux de primes. Nous avions dit que tout serait prêt au début de 2002 et ce le sera effectivement au cours du premier trimestre.

S'agissant des surnombres, la situation n'a guère évolué depuis quelques années, en raison des conditions de promotion, mais le ministère des finances ne peut agir seul. La question doit être traitée au niveau interministériel.

A la suite de la Cour des comptes, vous avez déploré la présentation des effectifs par statut, qui n'éclairerait pas suffisamment les moyens à la disposition de chaque direction. Le présent projet de loi de finances apporte une première réponse à cette observation : les effectifs relevant du statut d'administration centrale affectés dans les réseaux y sont pour la première fois clairement identifiés.

Les activités bancaires réalisées par la CNP pour le compte de l'Etat vont être interrompues au 31 décembre prochain, pour des raisons juridiques, après une décision très nette du Conseil d'Etat, mais ce ne sera pas le cas des activités d'assurance. Aucun parallèle n'est en effet possible.

Par ailleurs, l'Etat a pris des engagements envers les actionnaires de la CNP lors de la mise sur le marché d'une partie du capital de la société : il serait donc malvenu d'annoncer une interruption brutale de son activité, alors même qu'elle n'est pas justifiée par des raisons juridiques.

Vous vous êtes interrogé, après M. Baert, sur les coûts du service de la redevance audiovisuelle. Depuis quelques mois, de grands progrès ont été faits dans la connaissance de ces coûts, grâce à un audit interne mené par le Trésor public et à un rapport de l'inspection des finances. Il faut s'en tenir à quelques considérations simples. Ce service répond à un besoin, celui de financer l'audiovisuel public, tant qu'une solution alternative n'aura pas été trouvée. La productivité interne du service s'est beaucoup améliorée : les recettes ont fortement augmenté, de même que le nombre de comptes qui a progressé de plus de 13 % depuis dix ans, alors que les effectifs ont diminué en quinze ans de plus de 25 %. L'effort de productivité est donc incontestable, d'autant que la lutte contre la fraude est une des priorités de ce service. Le coût annuel moyen de gestion d'un compte a baissé pour s'établir en-dessous de 22 francs, ce qui est tout à fait comparable au cas des autres pays européens qui ont un système analogue. Sans vouloir conclure ce débat, je tenais à rappeler ces éléments à votre commission.

Comme vous l'avez rappelé, les subventions aux associations de consommateurs ont connu en 1998 une hausse de plus de 30 %, correspondant à une sorte de rebasage. Une certaine stabilisation des ressources des associations est intervenue par la suite, ce qui est de bon augure. Leurs axes d'intervention sont désormais clarifiés et consensuels.

Je vous remercie d'avoir salué la qualité des travaux de l'inspection générale des finances. Vous avez regretté qu'ils ne soient pas diffusés plus largement. Ces travaux, vous le savez, sont des documents internes à l'administration. Dans une certaine mesure, toutefois, ils sont déjà disponibles, au moins pour les assemblées parlementaires : les présidents et les rapporteurs généraux des deux commissions des finances ont la faculté de les demander, et la liste des missions effectuées par l'IGF est communiquée, sur leur demande, aux commissions parlementaires. Le ministre peut apprécier au cas par cas le degré de publicité à donner à ces travaux. La possibilité de les rendre plus largement accessibles au Parlement a été évoquée lors du débat sur la réforme de l'ordonnance organique. La difficulté est de savoir jusqu'où on peut aller sans heurter des considérations de droit fortes, comme le respect du secret fiscal ou celui des droits des agents publics contrôlés par l'IGF. Quant à sa saisine directe par le Parlement, il ressort des conclusions du Conseil constitutionnel sur la nouvelle loi organique du 1er août 2001 que cette perspective se heurte au principe de la séparation des pouvoirs.

Vous avez enfin souhaité un audit sur le service des Monnaies et médailles. Mais cet audit a été d'une certaine manière réalisé lorsque s'est posée la question de la création d'un complexe laminoir-fonderie : il a fallu alors analyser l'activité du service. La conclusion a été que la création de ce complexe doublerait quasiment les coûts de l'établissement. Nous avons donc jugé indispensable que l'activité de la Monnaie se recentre sur son métier de base, la frappe des monnaies métalliques. Evidemment, il ne faut pas oublier qu'après la frappe de l'euro il faudra aussi rechercher de nouveaux marchés, qui ne seront pas nécessairement nationaux.

J'espère avoir répondu à l'essentiel de vos questions. Nous restons bien sûr à la disposition de votre commission.

M. le Président de la commission des finances- Je remercie Mme la ministre et ses collaborateurs. Nous suspendons la commission élargie pour examiner les amendements.

La commission, consultée, donne un avis favorable à l'adoption des crédits du ministère de l'économie des finances et de l'industrie.

COMMISSION DE LA PRODUCTION ET DES ÉCHANGES

Audition de M. François Huwart,
Secrétaire d'Etat au commerce extérieur

PRÉSIDENCE de M. André Lajoinie,
président de la commission

M. André Lajoinie, président de la commission de la production - Nous allons aborder l'examen des crédits du commerce extérieur, avec un retard dont je vous prie de nous excuser. Cela pose le problème de l'organisation de cette nouvelle procédure. Il faudra veiller à ce que chaque commission dispose d'un délai suffisant.

Monsieur le ministre, vous revenez de la conférence de l'OMC à Doha et je suis sûr que nos commissaires seraient heureux d'entendre quelques précisions de votre part.

M. François Huwart, secrétaire d'Etat au commerce extérieur - Avant d'aborder l'examen du budget, je vais en effet vous rendre compte de la conférence de Doha. Les 142 pays membres de l'OMC ont su trouver un accord, ce qui était difficile après l'échec de la conférence de Seattle. Si celle de Doha a été une réussite, c'est parce qu'il n'y a pas eu de perdants. Les pays en développement, les pays les moins avancés, les Etats-Unis, les pays du groupe de Cairns et l'Union européenne, chacun de ces groupes peut se féliciter de quelques avancées. Ainsi, les pays en développement pourront accéder aux médicaments pour lutter contre les pandémies de sida, de malaria et de tuberculose. C'est là un succès de la régulation, puisque l'OMC est parvenue à concilier les règles commerciales avec les exigences de la santé publique. Les pays en développement ont aussi eu satisfaction pour les règles anti-dumping et la mise en _uvre des accords de Marrakech. Pour les pays africains, une dérogation aux accords de Cotonou a été signée, ce qui réjouit aussi la France.

Nous avons pour notre part obtenu un élargissement de l'agenda des négociations. A l'origine, il n'était pas prévu que les questions d'environnement soient abordées dans le cycle qui vient de s'ouvrir. Finalement, l'articulation des règles de l'OMC avec les accords multilatéraux concernant l'environnement entre dans le champ des négociations. Nous sommes parvenus à introduire le principe de précaution, même si ce n'est pas de manière explicite. En matière agricole, la France a dû faire preuve d'une grande fermeté au sein de l'Union européenne. La France, qui défend les subventions à l'exportation ne souhaitait pas qu'elles fassent l'objet d'une pré-négociation ni que la PAC perde son autonomie. Nous avons obtenu un texte qui nous protège en confirmant que la libéralisation de l'agriculture n'est pas à l'ordre du jour.

En matière sociale, les résultats sont très insatisfaisants, car les pays en développement, qui constituent la grande majorité des membres de l'OMC, nous soupçonnent de protectionnisme déguisé.

L'Union européenne sort unie de la négociation. Un long chemin reste à parcourir pour parvenir à une bonne maîtrise de la mondialisation.

J'en viens à notre budget. Les attaques qui ont endeuillé l'Amérique et frappé le monde de stupeur ont ouvert une période d'incertitude. Malgré le ralentissement de l'économie mondiale, le taux de croissance français sera cette année de 2 % contre 1 % en Allemagne et aux Etats-Unis. Le chiffre est négatif au Japon. Ce taux de croissance ne relève pas de l'extrapolation : il reflète la solidité et la compétitivité de notre économie. Les pronostics pessimistes ont d'ailleurs été démentis par les indicateurs économiques réels. Ainsi, notre commerce extérieur en août a dégagé un excédent de 2 milliards d'euros. Sur les huit premiers mois de 2001, les exportations croissent de 4,1 % et les importations de seulement 3 %. L'excédent commercial « fab-fab » corrigé des variations saisonnières est en hausse de 4,4 milliards d'euros sur la même période.

Nous avons le devoir d'informer et de rassurer les entreprises tout en les aidant à se projeter dans l'avenir pour ne manquer aucune des opportunités qui se dessinent et que l'entrée de la Chine dans l'OMC laisse à elle seule deviner.

Dans un souci de modernisation, le réseau international de la direction des relations économiques extérieures va fusionner avec celui de la direction du Trésor. Nos entreprises vont ainsi disposer d'un réseau très dense d'intelligence économique sur l'ensemble de la planète. Cette concentration des moyens s'accompagne d'un redéploiement géographique en direction des pays émergents.

Les organismes d'appui qui dépendent de mon secrétariat d'Etat prennent leur part à cet effort de modernisation. Le CFME-ACTIM disparaît au profit d'UBIFRANCE, qui continuera de promouvoir les entreprises françaises sur les marchés internationaux. Ce changement de dénomination traduit une nouvelle dynamique. Le rapprochement d'UBIFRANCE et du Centre français du commerce extérieur est déjà bien engagé. Ces deux organismes, en outre, se sont associés au programme de certification ISO 9001. A terme, tous nos services aux entreprises devront obéir à cette norme de qualité. UBIFRANCE et le CFCE sont dotés de 40 millions d'euros.

La transformation de CSNE en volontariat international risque de peser sur les finances d'UBIFRANCE, mais c'est un projet qui mobilise les jeunes. Nous serons attentifs aux incidences de cette réforme.

Une partie considérable des subventions servira à encourager l'utilisation des nouvelles technologies.

Au titre du volet export et contrat de plan Etat-région, les crédits mis à la disposition des entreprises sont en forte hausse. Ils passent de 36,4 millions d'euros pour le XIe plan à 63 millions pour la période en cours. En outre, les critères d'éligibilité ont été élargis et les procédures, simplifiées. La politique régionale du commerce extérieur en faveur des PME donne ses premiers résultats. Vingt-six programmes sectoriels PARDI ont été signés avec quinze régions.

La procédure de l'assurance-prospection proposée par la COFACE a été profondément remaniée. Les demandes ont augmenté d'un tiers : j'y vois le premier effet de la simplification de la procédure et de la réduction des délais. Pour ce service très utile aux PME, la dotation reste fixée à 27,44 millions d'euros.

Le résultat technique de l'assurance-crédit de la COFACE était en déficit de 9 milliards de francs en 1991. Il a dégagé un excédent de 7,5 milliards en 1998, de 4,9 milliards en 1999 et de 5,6 milliards en 2000. Pour 2001, le résultat financier devrait s'élever 6,9 milliards de francs. Cela explique l'absence de dotation dans ce budget. Il en va de même pour la stabilisation des taux et la garantie de change, qui sont à l'équilibre.

Pour la garantie du risque économique, il a paru possible de réduire la dotation de 20 % compte tenu des dépenses prévues.

Les crédits du FASEP Etudes s'élèveront à 7,62 millions d'euros en autorisations de programme. Il n'y avait pas eu de dotation en 2001 compte tenu des reports. Les crédits de paiement quant à eux passent de 15,24 à 25,92 millions d'euros. Pour les autorisations de programme et les dépenses ordinaires, les crédits s'élèvent à 296,56 millions d'euros ce qui représente une baisse de 32 %. Elle tient à une dotation nulle sur la ligne des prêts aux Etats étrangers, en raison des reports disponibles.

Mais il n'y a pas lieu d'y voir une diminution des moyens consacrés au développement international de nos entreprises : ils ne sont pas inférieurs à ce qu'ils étaient auparavant. Il faut plutôt souligner la bonne gestion des finances publiques.

Une révolution silencieuse est en cours. La mondialisation oblige nos entreprises à s'adapter en temps réel et le budget du commerce extérieur les accompagne.

M. Gilles Carrez, rapporteur spécial de la commission des finances pour le commerce extérieur - D'abord je me réjouis de l'accord extrêmement important intervenu à Doha et qui préserve les intérêts français, notamment agricoles. On ne souligne pas suffisamment le rôle essentiel que joue désormais l'OMC dans la régulation du commerce international, régulation dont les pays en voie de développement ont besoin pour accéder aux marchés développés. On ne rappelle pas non plus suffisamment que l'OMC est aujourd'hui le seul organisme international à disposer d'un mécanisme de règlement des différends. Il faut faire _uvre pédagogique pour corriger son image d'organisme trop favorable aux pays développés.

Après une croissance exceptionnelle de 12 % en 2000, les échanges internationaux ne devraient augmenter que de 2 % cette année et 2002 sera l'année de tous les dangers. Dans ce contexte, la France n'a pas trop mal tiré son épingle du jeu. Notre taux de croissance devrait atteindre 2 % pour 2001, soit un peu mieux que l'Allemagne. Reste que les hypothèse de 3,3 % pour cette année et de 2,5 % pour 2002 sont surévaluées. Aussi malgré vos efforts, je me montrerai plus critique que les années précédentes. Votre budget pour 2002 est inquiétant.

Dans le cadre du contrat d'objectifs et de moyens signé avec la direction du budget, les crédits de personnel inscrits au titre III sont convenables. Votre administration pourrait même servir d'exemple à d'autres en ce qui concerne le redéploiement - et cela sans sortir de Bercy ! En raison même de cet effort, on aurait pu vous accorder des dotations plus généreuses.

Les crédits du CFCE augmentent bien, mais par un mécanisme de vases communicants, ceux du CFME-ACTIM diminuent de 3,8 %. Selon vous, ce sera sans conséquence sur l'activité à l'étranger. Si, il y en aura, d'autant que diminuent également les crédits de gestion des CSNE devenus VIE, avec la fin du service national et que le fonds de roulement d'UBIFRANCE est inférieur d'un million de francs. Il y aura moins de manifestations et de foires à l'étranger, moins d'activités de presse et l'on accueillera moins de stagiaires qui, après leur formation en France, sont pourtant des relais importants pour nos entreprises. Cela nous préoccupe beaucoup.

Quant à la COFACE, l'assurance-crédit est certes excédentaire, mais sur 2001 et 2002 l'Etat va prélever 23 milliards de francs sur le fonds de roulement qui a été reconstitué. Le budget a sans doute besoin de recettes non fiscales, mais c'est déraisonnable. Pis encore, les crédits de l'assurance prospection, essentielle pour les PME, sont passés de 60 millions d'euros par an de 1996 à 1998, à 40 millions en 1999 et 2000 puis 26 millions en 2001, chiffre reconduit pour 2002. L'an dernier nous vous disions qu'il fallait les augmenter et revenir de 180 millions de francs à plus de 200 millions. Vous sembliez partager notre préoccupation, mais on en est restés là. Il est vrai que le nombre de dossiers traités a augmenté de 30 %, mais il ne s'agit toujours que de quelques dizaines de dossiers pour des dizaines de milliers de PME, confrontées à un contexte international de plus en plus difficile. Que l'Etat récupère 23 milliards sur la COFACE et ne soit pas capable d'accorder 30 millions de plus pour cette procédure particulière a quelque chose d'indécent. Sur ce point, les rapporteurs sont tout à fait prêts à vous soutenir.

Le FASED-garantie dispose de crédits, mais il ne fonctionne pas bien. Au 30 juin 2001, 31 dossiers avaient été soutenus. Il semble que le versement d'une prime de 7 % de l'investissement soit trop coûteux pour les entreprises. Je passe enfin sur les grands contrats et les prêts du Trésor qui sont erratiques et ne représentent pas un enjeu essentiel au regard de l'action à mener pour donner à nos PME les moyens d'exporter.

Après la mission que j'ai conduite cet été à Genève, à Bruxelles et dans vos services, je souhaite présenter quelques observations sur l'organisation générale de ces derniers et leur mission. Le dispositif en faveur du commerce extérieur est d'ailleurs complexe puisqu'il concerne, outre les DRE, les directions régionales du commerce extérieur et le Trésor, les Affaires étrangères et l'Agriculture, ainsi que les différents organismes, CFME, CFCE, etc. Dans une récente analyse, la Cour des comptes assigne trois missions aux DRE et à l'administration centrale de votre ministère : l'information économique et la promotion des échanges ; les négociations internationales et multilatérales ; la gestion des procédures financières accompagnant les échanges. Or vos services consacrent plus de la moitié de leurs moyens à l'information économique et à la promotion des échanges, ce qui s'apparente plutôt au conseil aux entreprises, contre 10 % à la négociation internationale et 40 % à la gestion des procédures financières. Se pose donc la question du recentrage de ces moyens sur des missions de service public. Je distingue d'abord l'information économique et financières des pouvoirs publics - et non des entreprises - dont le Gouvernement a besoin pour définir sa politique dans un domaine dont dépend un emploi sur quatre.

Il y a là un problème d'organisation au sein du ministère. M. Fabius a annoncé à plusieurs reprises qu'il préparait une fusion entre les représentations du Trésor et celles de la DREE : sur la base de ce qui se fait dans les six ou huit postes mixtes existants, comment voyez-vous cette articulation destinée à éviter les chevauchements de compétences, et à quelle échéance deviendra-t-elle effective ?

La deuxième mission a trait aux négociations bilatérales et relève donc des missions régaliennes de l'Etat. A cet égard, la Cour des comptes a déjà souligné il y a deux ans, lors des négociations sur l'AMI, l'insuffisance du dispositif. Pourtant, cette mission devient de plus en plus essentielle. Lors de mon déplacement à Genève, j'ai constaté un fonctionnement efficace, mais terriblement complexe : notre représentation auprès de l'OMC est, cas unique en Europe, autonome par rapport à la représentation auprès de l'ONU et la petite équipe de la DREE, d'une grande qualité, travaille à côté d'elle ; à cela s'ajoute le transfert des compétences organisé par l'article 133 du traité, qui fait que Bruxelles est compétente pour les négociations multilatérales. Le travail de la DREE se réduit ainsi à un travail de lobbying et d'analyse, et il souffre d'un manque de coordination avec le reste du dispositif.

D'autre part, il importerait de renforcer les capacités d'expertise juridique, en raison de l'ampleur prise par les procédures de règlement des différends notamment. Cela supposerait de privilégier des profils différents lors des recrutements et de consolider la formation du personnel.

S'agissant de la troisième mission, la gestion des procédures financières pour l'aide aux entreprises, je me bornerai à constater un manque de coordination entre le Trésor, le Budget et la DREE. Le partage des compétences résulte en effet de décisions ponctuelles et je me demande si la DREE n'a pas des problèmes pour exister au sein de ce dispositif complexe.

La dernière mission - une mission d'information et d'aide à la promotion des échanges extérieurs - s'apparente de plus en plus à un travail de consultant auprès des entreprises. Faut-il continuer d'y consacrer 50 % des moyens et ne devrait-on pas maintenant inciter les chambres de commerce à jouer ce rôle, comme un rapport de l'inspection des finances le suggérait il y a déjà dix ans ? Le temps ne serait-il pas venu aussi de mieux distinguer entre deux missions du CFCE : celle qui consiste à informer les pouvoirs publics et celle qui consiste à nouer des partenariats avec les grandes entreprises du secteur concurrentiel afin de les aider à exporter ? Ce dernier service pourrait faire l'objet d'une tarification.

Cette remise en ordre générale s'imposera à terme mais, dans l'immédiat, il conviendrait que vous obteniez quelques millions de plus, au bénéfice de l'assurance protection et du CFME-ACTIM.

M. Marc Reymann, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères - Les crédits du commerce extérieur concernent plus de 5 millions de salariés travaillant dans le monde à développer nos exportations. Au moment où s'achève la conférence de l'OMC et où le ralentissement économique oblige à revoir les prévisions, il mérite une attention toute particulière. Notre excédent commercial s'étant fortement réduit l'an passé et l'évolution pour 2001 étant encore incertaine, le moment n'est certes pas à un relâchement des efforts.

Les crédits de fonctionnement du ministère du commerce extérieur sont stables mais restent compatibles avec ses besoins, grâce à la réforme des structures et des méthodes d'action qui a été menée à bien. L'organisation en réseau des postes d'expansion économique, l'amélioration apportée à la gestion des procédures et l'informatisation permettent de dispenser aux entreprises des informations très complètes. Malheureusement la politique des aides à l'exportation est trop frileuse.

L'assurance crédit gérée par la COFACE affiche un excédent depuis 1995 et effectue des reversements à l'Etat. On justifie cette évolution par une plus grande sélectivité de la politique de crédit et par la réorientation du soutien au bénéfice des régions dynamiques et solvables. Cependant, est-il bien pertinent de chercher ainsi à toujours réduire le risque pris ? Cette politique n'est-elle pas en contradiction avec le v_u du Gouvernement de voir nos entreprises s'implanter dans des zones comme le Caucase ?

Les trois quarts de nos exportations sont réalisés par de grands groupes. Pourtant chacun estime nécessaire de faire des PME des partenaires à part entière du commerce international. De ce point de vue, nous sommes loin derrière l'Allemagne mais les aides reculeront néanmoins de 16 % dans le volet exportation des contrats de plan tandis que les crédits consacrés à l'assurance prospection, élargie aux PME, fondent d'année en année. Là encore, on invoque la sélectivité et la diminution des demandes, mais quelle est la logique de cette politique ? Ne décourage-t-on pas les entreprises d'aborder certains marchés ?

Lors de ma mission à Varsovie et à Budapest, j'ai pu constater le dynamisme de nos échanges avec ces deux pays. La France était en 2000 le cinquième fournisseur de la Hongrie et le quatrième fournisseur de la Pologne. Comme nos exportations, les importations en provenance de ces Etats se développent à un bon rythme. La France est également le troisième investisseur en Hongrie et le premier en Pologne. Les potentialités à exploiter sont encore importantes, et il conviendrait de favoriser l'intervention des PME.

Le poste d'expansion économique de Budapest a bénéficié du renforcement des capacités d'expertise organisé par la DREE. Il dispose d'une équipe assez nombreuse pour une bonne spécialisation dans les divers secteurs stratégiques et parfaitement qualifiée pour analyser les risques ainsi que les difficultés de l'élargissement. Un équilibre semble avoir été trouvé entre gratuité et facturation des prestations. Ce poste illustre également les effets bénéfiques de la politique du rapprochement avec les réseaux consulaires.

Je tiens à souligner l'importance de l'action culturelle pour le développement de nos relations commerciales. L'Institut français de Budapest, inauguré en 1992, contribue notablement à notre présence en Hongrie et à donner aux échanges un élan que les acteurs apprécient à sa juste valeur.

Lors de ma visite dans ces deux pays, j'ai pu voir que la France était en mesure de s'affirmer sur ces marchés où sa présence n'allait pas de soi, lorsqu'il en existait la volonté politique. Je souhaite donc que cet effort soit entrepris dans toutes les régions du monde où notre présence est souhaitée.

M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis de la commission de la production - Pour la cinquième année consécutive, je dois avouer ma perplexité devant un budget de simple gestion des affaires courantes. Je partage les interrogations de Monsieur Carrez.

Il ne contient aucune mesure nouvelle, il régresse de 32 % en autorisations de programme et de près de 2 % en crédit de paiement, et l'on observe des tassements sur des mesures que pourtant vous aviez vous-même dynamisées, comme l'assurance prospection. Il y a donc de quoi être perplexe. Si mon ton peut paraître plus négatif que les années précédentes, ce n'est pas à votre égard, Monsieur le ministre : je sais quels sont vos efforts, et vous êtes peut-être le ministre qui, ces dernières années, a fait le plus avancer les choses notamment pour les PME-PMI. Je salue en outre l'effort de modernisation de la DREE, qui la rend exemplaire dans le cadre de la réforme de l'Etat. Mais nous regrettons que le Gouvernement ne donne pas à votre secrétariat d'Etat les moyens d'une politique à la hauteur des enjeux. Le 11 septembre n'a fait qu'aggraver mécaniquement un ralentissement qui s'annonçait déjà avant : face à cela, nous avons un budget d'affaires courantes, en tassement, qui n'adresse aucun signe fort aux entreprises. On sait pourtant que, dans une économie mondialisée, la croissance repose largement sur le développement à l'international des entreprises, et particulièrement des PME. Il y avait donc un effort budgétaire à faire. Je ne veux pas dire qu'il faut injecter des milliards dans votre budget. Mais tous les ans nous nous battons sur 15 millions de plus ou de moins pour le CFCE : c'est moins que le budget de la chaîne parlementaire... Quant on dépense 110 milliards pour les 35 heures, on n'est pas capable de trouver 110 millions pour doper le commerce extérieur, qui, lui, crée des emplois.

Je prendrai trois exemples. A maintes reprises mes collègues et moi avons signalé à vos services l'utilité qu'il y aurait à débloquer 300 ou 400 000 francs pour réactiver les réseaux des anciens de l'ACTIM : ce sont autant d'ingénieurs, de responsables dans leurs pays, qui ont étudié en France et pourraient être les ambassadeurs de notre pays. Nous ne sommes pas capables de financer ce genre d'opération. Autre exemple : les Chambres de commerce françaises à l'étranger n'ont pas les moyens d'agir. Votre administration a pourtant fait des efforts pour une meilleure coordination entre elles et les postes. N'est-il pas possible de doper un peu leurs moyens.

Enfin, un sujet crucial est celui des foires et salons. Depuis des années je demande 15 ou 30 millions de francs pour aider UBIFRANCE, car c'est ce qu'on peut faire de plus efficace pour aider le développement des PME à l'exportation. La vie d'un exportateur, croyez-en le praticien, passe largement par le salon.

Voici les chiffres de la DREE sur le nombre de salons qu'organisent différents pays et les budgets qu'ils y consacrent, exprimés en millions de dollars. Pour l'Allemagne, 220 salons pour 29,7 millions de dollars. Pour l'Espagne, 246 salons pour 26,3 millions de dollars. Pour la Grande-Bretagne, 448 salons pour 24 millions de dollars. Pour la France, 90 salons pour 4 millions de dollars.... La situation était la même lorsque j'ai présenté en 1996 un rapport au Premier ministre sur ce sujet, où je soulignais déjà la nécessité d'un effort budgétaire pour nous mettre au niveau de l'Allemagne, de l'Espagne et de l'Angleterre. Je constate que depuis 1996 rien n'a changé. Pour toutes ces raisons je suis très perplexe et un peu désolé de voir le peu de moyens qu'on vous donne pour développer une politique à laquelle, je le sais, vous êtes attaché.

Je conclurai par quelques questions. Concernant UBIFRANCE, comment pourrait-on convaincre Bercy que, sur les 12 milliards d'excédent qu'il prélève sur la COFACE, on pourrait peut-être en reverser 120 millions au commerce extérieur ? Il y aurait pourtant là une sorte de logique. D'autre part, s'agissant du CIVI, pouvez-vous nous garantir que le Gouvernement abondera s'il en est besoin les fonds d'UBIFRANCE ? M. Carrez a parlé d'un fonds de roulement de moins d'un million de francs : comment ferez-vous pour qu'UBIFRANCE ne se retrouve pas dans une situation critique ? Concernant le CFCE, je salue votre effort pour accompagner sa modernisation. Mais pensez-vous que l'effort sera suffisant et la modernisation assez rapide ? Je souhaite également savoir où vous en êtes sur le rapprochement entre le CFCE et UBIFRANCE, en sommeil depuis des années, mais qui semble se concrétiser, au moins au niveau immobilier.

Concernant l'assurance prospection, les crédits sont simplement reconduits alors que les demandes augmentent de 30 % : comment allez-vous faire face ? Quant au FASEP-Garantie, il instruit 30 dossiers alors que nous avons 1,5 million de PME susceptibles d'aller à l'exportation : n'y a-t-il pas lieu de faire quelque chose ? Je conclurai sur une question particulière. Il y a un travail important à faire sur les marchés extérieurs pour coordonner les postes et les chambres de commerce, et donner à ces dernières les moyens d'optimiser leur action. Avez-vous des projets en ce domaine ?

Si mon ton est plus virulent, ou au moins plus passionné que par le passé, c'est qu'on se lasse de devoir toujours répéter les mêmes choses, même si je salue le caractère exemplaire de la réforme de la DREE et votre volonté personnelle.

M. Jean Launay - Le potentiel de croissance de notre pays a été conforté depuis quelques années.

Les PME et PMI, lorsqu'elles portent leur savoir-faire à l'étranger, participent à l'excédent de notre balance commerciale. Les rapporteurs se sont lamentés sur l'importance de votre budget, mais je crois que l'enjeu aujourd'hui, c'est le mieux d'Etat. Je voudrais donc savoir quels outils l'Etat met à la disposition des entreprises pour les aider à s'internationaliser.

M. François Huwart, secrétaire d'Etat au commerce extérieur - Je voudrais d'abord me réjouir de la transparence qui régit les rapports du secrétariat d'Etat et du Parlement. Le niveau de précision de vos interventions a montré qu'il n'y a aucune réticence de notre part à communiquer les informations.

Tout en rendant hommage à la modernisation de la DREE et en exprimant votre considération pour ce que vous appelez mon action personnelle, ce dont je vous remercie, vous regrettez que je sois dans une situation trop misérable pour que ma bonne volonté puisse s'exprimer. Mais nous demeurons le quatrième exportateur mondial, et le troisième pour les services. Les entreprises françaises, dans une économie internationale en récession, n'ont pas perdu de parts de marché en volume. Leur dynamisme n'est donc pas affaibli. Alors certes, l'intervention publique est primordiale, mais c'est sur la question du mieux d'Etat qu'il faut se concentrer. Il ne faut pas que la diminution de 32 % des autorisations de programme masque le maintien global des crédits de paiement. Le secrétariat conserve notamment ses moyens en personnel et en fonctionnement, ce qui, compte tenu de ses missions particulières d'information et de renseignement, est essentiel. Je tiens même à souligner que, malgré un budget de l'Etat contraint à cause du ralentissement économique, les crédits dont nous pouvons disposer sont entièrement maintenus. Les diminutions procèdent en effet exclusivement de reports de crédits.

Certains ont avancé que ces reports étaient dus au fait que nos procédures n'étaient pas assez incitatives. Mais je vous rappelle que la plupart des crédits sont évaluatifs. C'est le cas pour UBIFRANCE. Je suis loin d'être pessimiste sur les recettes dont cet organisme va disposer : il a comptabilisé 25 000 candidatures cette année, et enregistré 830 départs entre février et septembre 2001, dont 512 dans des entreprises à l'étranger. Mais en cas de difficultés, le ministère ferait le nécessaire pour soutenir UBIFRANCE.

Vous vous félicitez de la réforme de l'assurance-prospection, mais vous plaignez de ce que je présente aujourd'hui un budget de gestion normale. Mais l'assurance-prospection n'en est qu'à ses débuts. Son augmentation de 30 % témoigne du succès que rencontrent les nouvelles dispositions et la diminution des délais et des formalités a été appréciée. Nous avons réamorcé la pompe, et les crédits suivront la montée en puissance du dispositif.

M. Carrez a évoqué le FASEP Garantie. Sa dotation est convenable, même si la situation n'est pas totalement satisfaisante. Nous réfléchissons à une réduction de la prime pour rendre la procédure plus attractive.

En ce qui concerne l'organisation du dispositif d'appui, nous avons conscience de la complexité de notre administration. Sur le plan du réseau international, une fusion avec le Trésor sera opérée et les postes d'expansion économique deviendront communs à l'ensemble du ministère de l'économie. Parallèlement, nous faisons un effort pour le recrutement de spécialistes, notamment dans le domaine juridique. Un comité de stratégie sur la globalisation est créé, avec un secrétariat commun entre la DREE et le Trésor. J'avais obtenu une amélioration substantielle des crédits consacrés aux organismes d'appui ces dernières années. Aujourd'hui, ce mouvement s'est inversé mais il correspond au rythme de l'adaptation. Quant au rapprochement des locaux, le ralentissement des opérations n'est pas de notre fait mais de celui de nos partenaires privés. L'emplacement et le projet architectural sont au point.

La part multilatérale de l'action de nos services est supérieure aux 10 % que vous avez évoqués, et ira en augmentant. La DREE et notre représentation à Genève sont organisées en fonction de cet aspect. Il est vrai que dans ce domaine interviennent tant notre administration que l'OMC ou l'Union européenne. Ce type de structure est indispensable. Si le commissaire est le négociateur, ce sont bien les Etats membres qui donnent leur accord et nous devons donc garder un niveau d'expertise suffisant.

La dimension culturelle que M. Reymann a évoquée est fondamentale. Nous prenons soin, avec le ministère des affaires étrangères, de mettre nos moyens en commun pour développer les synergies. Quant aux chambres de commerce, elles trouvent toute leur utilité dans la politique régionale du commerce extérieur que j'ai initiée. Rien ne peut en effet être fait au niveau national si l'on n'encourage pas les projets concrets et si l'on ne répond pas aux préoccupations des entreprises sur le terrain. C'est ce que nous faisons avec les régions et les chambres de commerce.

Les chambres de commerce à l'étranger ont un statut associatif. Elles ne défendent pas nécessairement les intérêts français au sens strict. Je suis favorable à ce que les postes d'expansion économique puissent leur concéder certaines tâches.

Nous avons substantiellement amélioré le subventionnement des entreprises qui participent aux foires et salons. L'expertise faite pour la création d'UBIFRANCE montre que la participation française à ces salons ne sera pas en baisse dans l'année qui vient. Nous avons tendance à préférer les salons sectoriels aux grandes manifestations comme celle qui va s'ouvrir lundi à Pékin. Nous n'avons pas la volonté de réduire les capacités d'intervention d'UBIFRANCE en ce domaine.

Dans un contexte difficile, notre commerce extérieur reste excédentaire et nos entreprises tirent mieux leur épingle du jeu que leurs concurrents étrangers. Pourtant, dans certains pays européens, les collectivités locales disposent de moyens importants qui s'ajoutent aux aides de l'Etat. Les régions françaises n'étaient pas suffisamment impliquées et c'est pourquoi j'ai voulu y remédier.

La situation de notre commerce extérieur reste globalement bonne.

M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis - Ce budget de fonctionnement ne nous donne pas les moyens d'affronter les difficultés qui s'annoncent avec la dégradation du contexte international. Notre commerce extérieur résiste assez bien, mais vous ne faites pas les efforts nécessaires. Je donne donc un avis défavorable à l'adoption de ce budget, même si je connais l'opinion de la majorité.

M. le Président de la commission de la production - Nous souhaitons tous des moyens supplémentaires pour le commerce extérieur. Le ministre vous a prévenu qu'il ne présentait que des crédits évaluatifs.

Les crédits du commerce extérieur, mis aux voix, sont adoptés.

La séance est levée à 13 heures 10.

Le Directeur-adjoint du service
des comptes rendus analytiques,

Louis REVAH

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Jeudi 15 novembre 2001
(séance de 9 heures)

Audition de M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


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