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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION DES FINANCES,

DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

COMPTE RENDU N° 30

(Application de l'article 46 du Règlement)

Jeudi 6 décembre 2001
(Séance de 11 heures)

Présidence de M. Henri Emmanuelli, Président

SOMMAIRE

 

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- Audition de M. Laurent Fabius, Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, et de Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget, sur le plan pluriannuel des finances publiques



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La Commission des finances, de l'économie générale et du Plan a procédé à l'audition de M. Laurent Fabius, Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, et de Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget, sur le plan pluriannuel des finances publiques.

M. Laurent Fabius a d'abord évoqué l'évolution de la situation économique internationale. Les difficultés actuelles proviennent de l'inversion du cycle économique aux Etats-Unis, dès les mois d'août et de septembre 2000, selon les statistiques actuellement publiées. La dernière augmentation du taux directeur des fonds fédéraux est d'ailleurs intervenue dans les mois qui ont précédé l'élection présidentielle de novembre 2000. Au Japon, la situation économique, détériorée depuis plusieurs années, ne s'est pas améliorée. C'est en Europe que l'activité a été la moins touchée. Dans l'ensemble, les événements tragiques du 11 septembre ont accentué ces difficultés et l'année 2001 sera mauvaise pour les Etats-Unis et le Japon, qui représentent 45% du PIB mondial, difficile pour les pays émergents et relativement plus favorable en Europe.

Evoquant le cas de la France, M. Laurent Fabius a estimé que son économie se trouvait dans une situation meilleure que celle des autres pays, avec une croissance qui devrait être de l'ordre de 2,1% en 2001, même si elle est moins importante que ce qui était prévu à l'origine. L'acquis de croissance constaté aujourd'hui permet de considérer cette prévision comme fiable désormais.

S'agissant de l'année 2002, un rebond de l'activité est prévu par les différents organismes de conjoncture. Il est dès aujourd'hui anticipé par les marchés financiers. Plusieurs éléments structurels sont favorables à une reprise de la croissance : les évolutions technologiques, les gains de productivité, les perspectives d'évolution de la demande, aux Etats-Unis, probablement, et en Europe. Le délai dans lequel interviendra ce rebond est néanmoins incertain. L'objectif de la politique économique est de faire en sorte qu'il soit le plus court possible. D'ailleurs, si les différents instituts économiques internationaux estiment que la croissance française, en 2002, sera inférieure à la prévision sur la base de laquelle a été établi le projet de loi de finances, ils envisagent, en revanche, une assez forte reprise en 2003, même ceux d'entre eux pour lesquels, habituellement, la France n'a que des perspectives de croissance modestes.

A plus long terme, avec une croissance de 3,5% en 1998, 3% en 1999, 3% en 2000 et un peu supérieure à 2% en 2001, la croissance potentielle de l'économie française apparaît plus forte que par le passé. C'est très certainement le résultat des efforts structurels qui ont été effectués. La croissance a d'ailleurs été plus forte en France qu'en Allemagne, avec un écart d'environ 1 point à 1,5 point par an ces dernières années.

M. Laurent Fabius a ensuite évoqué le plan pluriannuel des finances publiques.

Il a précisé que la programmation prévue par le Gouvernement s'inscrivait dans la ligne des choix antérieurs. Elle s'articule autour de deux hypothèses de croissance : la première retient un taux de croissance annuelle du PIB de 2,5%, en moyenne, jusqu'en 2005 et peut être considérée comme prudente ; la seconde retient la perspective d'une croissance durable de 3% à l'horizon 2005, grâce à une amélioration structurelle du marché du travail. Conformément à ce qu'a indiqué le Premier ministre, il est, en effet, prévu d'aller vers le plein emploi et d'augmenter le taux d'activité. Ce dernier a progressé de 1 point par an depuis 1997 et la France se rapproche ainsi de l'objectif de 70% fixé par le Conseil européen de Lisbonne (mars 2000). L'essentiel de la politique économique doit donc se concentrer sur le développement de l'activité et de l'emploi. Par ailleurs, l'objectif consistant à ramener les dépenses publiques à un niveau raisonnable ne saurait être infléchi par des éléments de court terme : les perspectives pluriannuelles doivent être considérées comme indépendantes de la conjoncture. Ce n'est pas parce que la croissance d'une année sera plus forte que prévu qu'il faudra augmenter les dépenses publiques. Inversement, une évolution défavorable de la conjoncture ne doit pas donner lieu à une compression de la dépense.

Le plan établi par le Gouvernement, pour les années 2002-2005, prévoit une augmentation de 4% en volume pour les dépenses de l'ensemble des administrations publiques, soit une progression moindre que celle de la richesse nationale, et de 1% en volume pour les seules dépenses de l'Etat. Il s'agit donc, pour ces dernières, de reconduire la norme retenue dans la précédente programmation. Ces éléments tiennent compte de la difficulté de maîtriser la progression des dépenses de santé ainsi que de la décision de ne pas « recycler » en dépenses nouvelles l'économie résultant de la diminution prévue des transferts vers l'Union européenne entre 2003 et 2005. Cette maîtrise des dépenses publiques doit permettre de procéder à une baisse du déficit et à une diminution des prélèvements obligatoires. La dépense publique devrait ainsi représenter un peu moins de la moitié du PIB en 2005, ce qui ramènerait la France au niveau qu'elle connaissait avant l'apparition d'un chômage massif.

En ce qui concerne les prélèvements obligatoires, le Gouvernement a fait le choix de diminuer ceux qui pèsent sur l'activité et a prévu d'appliquer en 2003 la troisième étape du plan triennal d'allégement des impôts. Au-delà, de nouvelles perspectives d'allégement apparaissent en 2005, lorsque la croissance sera suffisamment établie, grâce à la maîtrise des dépenses publiques.

Le Gouvernement envisage enfin le retour à l'équilibre des finances publiques, ou à une situation proche de cet équilibre, dès 2004.

Concluant son intervention, M. Laurent Fabius a insisté sur le fait que la consolidation en profondeur des finances publiques résultait du choix consistant à « caler » l'évolution tendancielle des dépenses publiques à un niveau inférieur au potentiel de croissance. Ce choix est possible parce que le Gouvernement a la capacité de les maîtriser. Il permet d'envisager un retour à l'équilibre en 2004, au-delà des incidences inévitables des fluctuations conjoncturelles. L'équilibre des finances publiques est une condition nécessaire à la réalisation de l'objectif de plein emploi, car il permet de réduire la charge de la dette publique. La forte progression de la dette, qui représentait 20% du PIB en 1980 et près de 60% en 1998, a entraîné une augmentation de la charge des intérêts, laquelle a empêché le Gouvernement d'affecter les ressources nécessaires à des dépenses plus efficaces. En outre, l'équilibre des finances publiques permet une diminution des taux d'intérêt, qui favorise l'investissement et la croissance. Enfin, l'équilibre budgétaire constitue l'un des éléments indispensables à la bonne gestion du choc démographique à venir, qui exige de disposer d'importantes marges de man_uvre budgétaires.

M. Didier Migaud, Rapporteur général, a considéré que les orientations annoncées par le Gouvernement s'inscrivaient dans la continuité des choix faits, en juin 1997, par la majorité plurielle et qu'elles recevaient l'approbation de la Commission des finances.

Il a d'abord interrogé le Gouvernement sur les possibles aménagements du pacte de stabilité et de croissance pour une meilleure coordination des politiques budgétaires, alors qu'apparaissent certaines propositions pour le transformer en « pacte d'adaptabilité ». Comment pourrait-on aménager ce mécanisme ?

Il a ensuite demandé quels facteurs permettraient de réaliser l'objectif d'un retour à l'équilibre des comptes publics à l'échéance 2004, compte tenu de la révision à la baisse des hypothèses de croissance économique.

Constatant que la France avait maintenu l'objectif de retour à l'équilibre, il a souhaité des précisions sur la situation de l'Allemagne en la matière.

Il a également demandé des précisions sur l'évolution des prélèvements obligatoires à l'horizon 2005 et les effets du plan triennal de baisse des impôts sur cette évolution d'ici à 2003.

Compte tenu du poids de la dette, il a souhaité des indications sur l'évolution du rythme de baisse du ratio dette/PIB sur la période 2003-2005.

Enfin, le Rapporteur général a demandé comment le Gouvernement envisageait de maîtriser les dépenses des administrations publiques autres que l'Etat. Quels moyens sont envisagés pour conjuguer l'objectif de maîtrise des dépenses de la sécurité sociale avec le maintien de la politique sociale du Gouvernement ?

M. Philippe Auberger a considéré que le Gouvernement, avec la présentation du plan pluriannuel de finances publiques, se livrait à un exercice théorique, déconnecté de la réalité et des données statistiques constatées ou estimées pour 2001 et 2002. Le Gouvernement retient l'hypothèse d'une croissance durable de l'emploi, sans apporter plus de précision sur la politique permettant d'atteindre cet objectif, les contrats emploi solidarité (CES) et autres stages de formation n'apparaissant manifestement pas à la dimension de l'enjeu. En outre, les effets de la réduction du temps de travail ont été surestimés, elle entraînerait la création de 200.000 à 220.000 emplois au lieu des 400.000 annoncés.

Le Gouvernement évoque des allégements d'impôts sans préciser s'ils s'appliqueraient, par exemple, à l'impôt sur les sociétés ou à l'impôt sur le revenu. Cette annonce est d'ailleurs déconnectée des programmes de la majorité, particulièrement celui récemment rendu public par le Parti socialiste.

Enfin, le discours sur la maîtrise des dépenses ne correspond pas aux dérapages constatés, en particulier en matière d'assurance maladie. L'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) n'est jamais respecté par le Gouvernement, sa croissance annuelle s'élevant, depuis plusieurs années, à 6 ou 7%, au lieu des 4% recherchés.

M. Gilles Carrez a rappelé que la qualité d'une prévision sur trois ans s'appréciait au regard des constatations des années passées et des estimations pour le proche avenir, c'est-à-dire 2002. Il a affirmé que, de 1998 à 2001, l'objectif de maîtrise des dépenses n'avait pas été tenu, avec un doublement de l'évolution annoncée en 1998 et une augmentation de 50% en 1999. Le dérapage est plus faible sur 2001 à cause de la réévaluation de l'inflation. En matière de sécurité sociale, l'ONDAM a toujours été dépassé à tel point que sa base de calcul a dû être constamment réajustée. Au total, pour 2001 et pour la première fois depuis 1996, le déficit budgétaire de l'Etat devrait dépasser celui de 1999. La croissance pour 2002, selon les prévisions réalistes des instituts de référence, devrait atteindre 1,5% à 1,8%. Le déficit du budget de l'Etat devrait s'élever à 39,64 milliards d'euros (260 milliards de francs), soit environ celui de 1997. La dette a connu une très forte progression en valeur absolue et, en conséquence, le ratio dette publique/PIB a très peu diminué et se maintient à environ 57% à la fin de 2001. Il n'est donc pas possible d'accorder du crédit à la prévision, irréaliste, d'un retour à l'équilibre en 2004.

M. François d'Aubert s'est d'abord interrogé sur la prévision d'évolution des dépenses de personnel au sein d'une progression globale des dépenses estimée à 1% sur trois ans, compte tenu des embauches prévues dans le secteur de l'Education nationale, ainsi que des réévaluations - certes légitimes - des rémunérations accordées ces dernières semaines, aux policiers et aux gendarmes notamment. Il a constaté que la seule marge de man_uvre apparemment à la disposition du Gouvernement résidait dans une diminution du prélèvement en faveur des Communautés européennes, qui constitue d'ailleurs un prélèvement sur recettes, et dans l'amélioration du solde de l'UNEDIC. Il s'est donc demandé si cette marge serait suffisante.

Constatant que le Gouvernement mettait fin à sa politique de baisse des impôts à compter de 2003, il s'est demandé si cette décision était liée à une volonté politique ou à une absence de marges de man_uvre.

M. Pierre Hériaud a regretté que le ministre n'ait pas évoqué les perspectives concernant l'inflation, qui sont pourtant une donnée importante, puisque tous les indicateurs sont calculés en francs courants. Il a également souhaité connaître les prévisions d'évolution des dépenses sur les titres III et IV, qui concentrent l'essentiel des crédits et qui, ces dernières années, ont progressé de l'ordre de + 3,7% à + 4% chaque année.

M. Gérard Fuchs s'est interrogé sur la pertinence de la procédure relative aux perspectives pluriannuelles des finances publiques, telle qu'elle est actuellement appliquée au sein de l'Union européenne. Il s'agit plus d'une présentation pays après pays des démarches engagées, sans mise en _uvre de ce que l'on pourrait qualifier de « jeu coopératif à somme positive ». Il serait pourtant utile, comme le montrent les disparités actuelles entre la France et l'Allemagne, de mettre en place des méthodes de travail impliquant une véritable coordination des différentes politiques.

M. Jean-Marie Le Guen a observé que, depuis 1996, les dépenses d'assurance maladie sont censées être régulées dans le cadre des ordonnances dites « Juppé ». Or, du fait des désaccords sociaux et des contentieux engagés, on constate, en réalité, une absence de régulation. Il s'est donc demandé s'il ne serait pas souhaitable de déclarer caduques les ordonnances « Juppé » et d'envisager d'autres formes de régulation.

M. Pierre Méhaignerie a exprimé sa crainte que les augmentations de dépenses de personnel accordées ces derniers temps se traduisent par une diminution des investissements civils. Il s'est également demandé si elles ne seraient pas de nature à provoquer une surenchère dans tout le secteur public.

Le Président Henri Emmanuelli a observé qu'il serait souhaitable de commencer par s'abstenir de toute démagogie.

M. Pierre Méhaignerie a ajouté que beaucoup d'administrations seront d'ailleurs en dessous du seuil des 1.600 heures de travail annuelles.

M. Georges Tron a souligné que les prévisions données par le ministre étaient quasiment identiques à celles fournies l'an passé à l'occasion d'une réunion similaire. Il s'est donc demandé pourquoi le Gouvernement n'avait pas tenu compte des événements survenus au cours de 2001.

En réponse aux différents intervenants, M. Laurent Fabius a d'abord noté que le pacte de stabilité et de croissance comporte deux versants qui sont complémentaires. Il prévoit une limitation à 3% du PIB du besoin de financement des administrations publiques et un objectif de rééquilibrage à moyen terme des déficits publics. Il n'apparaît pas que des difficultés conjoncturelles doivent conduire à modifier ces règles, dans la mesure où les objectifs qu'il poursuit permettent de préparer l'avenir dans de bonnes conditions. Il a néanmoins rappelé que des circonstances exceptionnelles étaient d'ailleurs prévues par les textes. Avec une croissance à moyen terme estimée entre + 2,5 et + 3%, il faut poursuivre l'objectif de retour à l'équilibre des comptes publics, le déficit signifiant nécessairement une augmentation des prélèvements obligatoires, qui ne manqueraient pas d'avoir des répercussions sur l'emploi. Il a observé qu'une partie de l'opposition prônait effectivement « l'adaptabilité » du pacte de stabilité et de croissance, quoique l'addition de toutes les propositions de l'opposition, si elle devait être faite, ne manquerait pas de montrer qu'elle se situe déjà très au-delà de la simple « adaptabilité ».

Il a ensuite souligné que le Gouvernement avait tenu compte des événements survenus en 2001. Les simulations qu'il a réalisées montrent qu'une oscillation conjoncturelle au sein d'un cycle de longue période restant bien orienté n'affecte pas les prévisions d'arrivée si les dépenses restent maîtrisées. Dès lors, si la croissance 2002 s'avérait inférieure aux prévisions et se traduisait par une diminution du PIB de trois dixièmes de point, il n'y aurait pas de remise en cause de l'objectif de retour à l'équilibre en 2004.

En outre, le Gouvernement a pris en compte les difficultés actuelles de trois façons :

- en premier lieu, les marges dégagées par la réduction de la contribution en faveur de l'Union européenne et l'amélioration du solde de l'UNEDIC ne sont pas recyclées ;

- en deuxième lieu, si le creux actuel est suivi d'un rebond, il en résultera une élasticité accrue des recettes ;

- enfin, il convient de noter que, par rapport aux prévisions faites l'an passé, le solde de 2004 subit une baisse de 0,2 point.

Abordant la situation allemande, M. Laurent Fabius a rappelé que la croissance devrait être de 0,75% en 2001 et de 1,25% en 2002. Les prévisions de retour à l'équilibre en 2004 ont été maintenues sous l'hypothèse d'un retour à une croissance de 2,5% par an. Il a toutefois été indiqué que si cette croissance était d'un niveau inférieur, le retour à l'équilibre n'aurait lieu qu'en 2006, notamment parce que l'exercice 2005 serait marqué par un ressaut du déficit, compte tenu des modalités du plan de baisse des impôts. Ces évolutions posent certes des problèmes s'agissant du respect du pacte de stabilité, mais il convient de noter que l'Allemagne fait de réels efforts s'agissant de la maîtrise des dépenses. Selon une étude de la Commission européenne, la faiblesse actuelle de la conjoncture en Allemagne est due pour moitié à un problème de compétitivité et pour moitié au poids que représente l'absorption des Länder de l'Est. Tous ces points feront l'objet de discussions entre les Etats membres en janvier et février prochains.

S'agissant des prélèvements obligatoires, les prévisions retenues font apparaître une baisse de ces derniers en 2003, en raison de la troisième étape du plan triennal de baisse des impôts, une stabilité en 2004 et, de nouveau, une orientation à la baisse en 2005. A cette date, les prélèvements obligatoires devraient atteindre 43,8% du PIB. S'il faut alléger ces prélèvements, et tout particulièrement ceux qui pèsent sur l'activité, dans le même temps, il convient de financer dans de bonnes conditions les services publics et de continuer à réduire le déficit.

En matière de dette, les travaux de la direction de la prévision font apparaître que celle-ci a été ramenée de 59,5% du PIB en 1998 à 58,5% en 1999, à 57,6% en 2000 et que les prévisions pour 2001 et 2002 s'élèvent respectivement à 57,1% et 56,3%. Sous l'hypothèse d'une croissance économique de 3% par an, le ratio dette publique/PIB serait de 51,8% en 2005. Il serait de 52,9% si la croissance moyenne sur la période était de 2,5%. De nombreux pays de l'Union européenne se situent à des niveaux nettement plus élevés.

Abordant la question de l'évolution des dépenses sociales, M. Laurent Fabius a souligné l'extrême difficulté de leur maîtrise. Certes des efforts significatifs ont été consentis ces dernières années mais, si l'on considère le rapport entre la qualité et le coût des dépenses de santé, le résultat obtenu n'est pas satisfaisant. Force est de constater que l'objectif national des dépenses d'assurance maladie voté par le Parlement n'est pas respecté en exécution. Il faut sans doute revoir en profondeur le système en clarifiant les responsabilités des différents acteurs, et notamment le partage des rôles entre l'Etat et les partenaires sociaux. S'agissant de ces derniers, il faudra également s'attacher à responsabiliser les prescripteurs. Un effort de réforme comparable par son ampleur à celui effectué pour modifier l'ordonnance organique relative aux lois de finances devra être entrepris, notamment en ce qui concerne le mécanisme de régulation et la définition des objectifs à long terme.

Depuis 1997, plus d'un million et demi d'emplois ont été créés dans le secteur marchand et ce mouvement ne saurait être réduit aux seuls dispositifs d'assistance et d'accompagnement de l'Etat. Il existe une dynamique propre de création par les entreprises qu'il convient de stimuler et susciter, afin de permettre la poursuite de la réduction du chômage.

En matière de dépenses, les objectifs annoncés ont été tenus. Les objectifs chiffrés concernant la maîtrise des dépenses ne distinguent pas entre celles de personnel et celles d'investissement. Les départs massifs à la retraite prévus dans les prochaines années vont conduire à effectuer des choix s'agissant des recrutements en fonction des secteurs prioritaires. Nous nous sommes fixés une enveloppe globale, mais il convient de reconnaître qu'elle n'est pas forcément aisée à respecter.

La prévision d'inflation sur la période est de 1,5% par an.

Du point de vue de la coopération budgétaire au sein de l'Union européenne, il a déjà été décidé en commun, cette année, de faire jouer les stabilisateurs automatiques face au ralentissement de la croissance. Les débats sont nourris et chacun en tient d'ores et déjà compte dans la définition de ses politiques nationales. Dans le futur, il sera souhaitable d'aller vers une coordination plus étroite.

S'agissant des mesures de revalorisation récemment annoncées, leur financement est bien assuré par des redéploiements de crédits qui n'affectent pas les investissements civils et qui seront effectués à l'intérieur des budgets concernés. Il convient à cet égard de souligner que si l'usage conduit tel ou tel à demander que « l'Etat débloque des crédits », en fait, il serait plus honnête que les revendications soient exprimées sous la forme suivante : « nous demandons aux Français de payer telle somme en notre faveur ». De fait, deux voies s'ouvrent pour financer ces mesures : il s'agit soit d'un jeu à somme nulle, donc au détriment de certains, soit d'une augmentation des déficits et donc des impôts et/ou de la dette. Quant à l'expression des revendications, le ministre s'est déclaré un ardent partisan du respect de l'autorité de l'Etat.

Le Président Henri Emmanuelli a souhaité que les représentations caricaturales ne soient plus utilisées, relevant qu'il n'existait pas de partisans de l'impôt en soi, mais qu'il y avait un véritable débat politique portant sur le niveau et la qualité de l'action publique. Il a enfin relevé que diverses revendications catégorielles avaient suscité moins de rappels au nécessaire respect des règles et de l'autorité de l'Etat que d'encouragements peu responsables.


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