ASSEMBLÉE NATIONALE
COMMISSION DES FINANCES,
DE LÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN
COMPTE RENDU N° 60
(Application de l'article 46 du Règlement)
Mercredi 17 juin 1998
(Séance de 16 heures 15)
Présidence de M. Augustin Bonrepaux, Président
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Audition de M. Jean-Pierre Chevènement, Ministre de lIntérieur, sur lexécution 1998 et les perspectives pour 1999 des crédits de son ministère
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La Commission a procédé à laudition de M. Jean-Pierre Chevènement, Ministre de lIntérieur.
Le Président Augustin Bonrepaux a indiqué que laudition du Ministre de lIntérieur, consacrée à lexécution 1998 et aux perspectives pour 1999 des crédits de son ministère, était la première dune série de réunions conduites dans la perspective dun meilleur contrôle budgétaire quil souhaitait développer, grâce notamment à lactivité des rapporteurs spéciaux.
M. Didier Migaud, Rapporteur général, a interrogé le Ministre sur les grandes orientations de son prochain budget. Rappelant que la sécurité navait pas été initialement mentionnée parmi les six domaines prioritaires de laction gouvernementale mais leur avait été adjointe depuis, il a souhaité savoir comment cette priorité se traduirait dans le projet de loi de finances pour 1999. Il a ensuite demandé si la définition de nouvelles relations entre lÉtat et les collectivités locales, à la sortie du pacte de stabilité, serait loccasion dun véritable contrat permettant aux collectivités dassurer leurs responsabilités tout en accompagnant la reprise de la croissance.
M. Jean-Pierre Chevènement, Ministre de lIntérieur, a rappelé que le Premier ministre, dès sa déclaration de politique générale, le 19 juin 1997, avait affirmé le droit de chaque citoyen à une sécurité égale pour tous, et que le colloque de Villepinte, en octobre dernier, avait permis au Gouvernement de manifester son souci dune politique de sécurité efficace et globale. Il en a évoqué les moyens : le recrutement dagents de sécurité, la conclusion de 400 contrats locaux de sécurité, dont 40 ont déjà été signés. Il a ensuite énuméré les trois axes de cette politique : la citoyenneté et léducation à la citoyenneté ; la proximité ; le renforcement de la coopération entre les services de lÉtat, notamment la police et la justice.
Il a mis en avant ses deux préoccupations principales : la montée de la violence urbaine et la violence des mineurs dont le Conseil de sécurité intérieure était saisi. Il a précisé que la loi de programmation du 21 janvier 1995, qui avait prévu 8,3 milliards de francs, en dépenses ordinaires, et 8,5 milliards de francs en autorisations de programme, ainsi que la création de 5.000 emplois, navait été appliquée que très partiellement, et que si lexécution des engagements avait été conforme à la loi en 1995 et 1996, le décrochage des deux années ultérieures avait réduit à 60 % le taux dexécution budgétaire, tandis que 1.200 emplois seulement avaient été créés en 1995 et 1996 et 100 emplois supprimés en 1998.
Le Ministre a ensuite évoqué la mise en place des adjoints de sécurité, en annonçant que 8.250 postes devaient être créés pour se substituer à terme aux 8.325 postes de policiers auxiliaires, affectés dans la police au titre du service national et dont leffectif serait progressivement réduit sur trois ans jusquen 2001.
Il a par ailleurs fait état de linscription de crédits correspondant à la création de 1.400 postes en surnombre dans la police nationale, pour compenser laccélération prévisible des départs à la retraite, au nombre de 26.500 pendant les cinq années à venir, et pour faire face au besoin de formation des nouveaux personnels recrutés sans quil soit porté atteinte à la capacité opérationnelle globale des services de police.
Le Ministre a ensuite évoqué la réorganisation des services actifs de la police nationale, et la nouvelle définition des missions des corps de maîtrise et dapplication, impliquant lextension aux personnels de ces corps de la qualification dofficier de police judiciaire, et la suppression correspondante dun certain nombre demplois de commissaires.
Il a mis en relief la diminution de la part des crédits globaux du ministère de lIntérieur dans lensemble des crédits budgétaires de lÉtat (4,07 % en 1993, 3,72 % en 1998). Il a souligné que, compte tenu de limportance particulière des crédits de personnel, encore accrue par les conséquences de laccord salarial dans la fonction publique, une telle évolution navait pu se faire quau détriment des dépenses de fonctionnement matériel, en particulier du renouvellement du parc automobile de la police, actuellement dans un état déplorable. Il a ajouté quun constat semblable pouvait être fait à propos du parc immobilier, dont le caractère vieillot ressortait fortement de la comparaison tant avec les pays étrangers quavec les locaux des gendarmeries. Il a regretté quune telle situation ne permette pas au ministère de faire face aux besoins en implantation de commissariats suscités par la concentration de la délinquance dans les zones très urbanisées, précisant que 80 % de la délinquance affectent 26 départements.
Insistant sur lapparition de formes nouvelles de délinquance, notamment de la délinquance des mineurs, qui représente 39 % des vols et 23 % de la délinquance totale, il a jugé indispensable un redéploiement deffectifs que facilitera le recrutement des adjoints de sécurité. Il a évoqué son action déterminée en vue de laccélération de la mise en place dont lachèvement est désormais prévu en 2007 du système de transmission ACROPOL, déjà opérationnel en Seine-Saint-Denis, en Picardie et dans la région Rhône-Alpes, et quil souhaitait étendre prioritairement à la Corse. Sagissant de la sécurité civile, il a déclaré que la disparition prochaine du service national créait des difficultés importantes pour la brigade des sapeurs pompiers de Paris et conduirait à ne maintenir que deux des quatre unités existantes de sécurité civile (Nogent-le-Rotrou et Brignoles, avec une antenne à Corte).
Faisant ressortir le contraste entre lattente de sécurité constatée dans lopinion comme au Parlement et la pauvreté des moyens de son ministère (7,3 milliards de francs pour les dépenses de fonctionnement hors personnel sur un total de 51 milliards de francs au titre du fonctionnement et 1,7 milliard de francs pour les dépenses dinvestissement), il a souhaité que les collectivités locales se joignent à leffort correspondant à cette attente et annoncé le lancement dune opération « sécurité 2002 » pour laquelle il demanderait dailleurs aux collectivités locales une modeste contribution financière.
Le Ministre, abordant les relations financières entre lÉtat et les collectivités locales, a rappelé que ces dernières accomplissaient 72 % de linvestissement public civil et reconnu que lapplication du pacte de stabilité avait représenté pour elles un manque à gagner important par rapport aux pratiques antérieures. Il a évalué à 250 milliards de francs par an le montant des concours de lÉtat aux collectivités locales, dont 150 milliards de francs pour les dotations de « lenveloppe normée » et 100 milliards de francs pour les concours hors enveloppe, notamment au titre de la compensation du plafonnement de la taxe professionnelle, en rapprochant ce chiffre du produit environ 300 milliards de francs des impôts directs locaux. Évoquant, après la dotation globale de fonctionnement, dont il a rappelé limportance, la dotation de compensation de taxe professionnelle (DCTP), il a mentionné la diminution, ces trois dernières années, de 400 millions de francs par an, de cette dotation servant de variable dajustement dans le cadre du pacte de stabilité. Il a considéré que cette baisse ne pourrait, par construction, que saccélérer avec le retour de la croissance.
Le Ministre a déclaré quune rencontre avec les grandes associations délus et les parlementaires intéressés se tiendrait prochainement afin denvisager les conditions de sortie du pacte, et que, le Gouvernement ayant admis le principe dune certaine indexation, la négociation correspondante devrait prendre en compte un engagement de modération de la pression fiscale des collectivités locales.
Il a annoncé louverture dune enveloppe annuelle de 500 millions de francs pour le financement des communautés dagglomération, qui se fera hors enveloppe normée et permettra le versement dune DGF de 250 francs par habitant en faveur de ces structures, qui pourront mettre en place progressivement, sur douze ans, la taxe professionnelle à taux unique. Il a ajouté que ces mesures permettraient de traiter les problèmes de la ville au seul niveau pertinent.
M. Tony Dreyfus, Rapporteur spécial des crédits de la sécurité, sest interrogé sur les difficultés particulières que suscite à Paris la compensation du départ des appelés du service national par lintégration des adjoints de sécurité.
M. Jean-Pierre Chevènement a reconnu quun problème spécifique de recrutement des agents de sécurité se posait à Paris et, dans une moindre mesure, dans la petite couronne. Il a ajouté toutefois que lapplication du dispositif ne rencontrait pas de difficultés particulières dans les autres départements, 3.600 jeunes se trouvant sur le terrain et 1.000 environ en formation.
M. Tony Dreyfus a demandé sil était envisagé, dans ces conditions, de mettre à la disposition des adjoints de sécurité des logements supplémentaires.
M. Jean-Pierre Chevènement a confirmé que la pénurie de logements constituait effectivement la cause principale des problèmes de recrutement à Paris, avant dindiquer que le ministère prévoyait daugmenter les acquisitions de logements, moins onéreuses en définitive que les mises à disposition et déclaré que la seule solution était de poser le principe, à Paris comme ailleurs, du recrutement régional.
Après avoir rappelé que la conclusion du pacte de stabilité avait répondu au souci dassurer aux élus locaux une plus grande lisibilité de lévolution des concours dÉtat, tout en contribuant au redressement des finances publiques, M. Gérard Saumade, Rapporteur spécial des crédits alloués aux collectivités locales, a relevé que lapplication de ce pacte avait conduit les collectivités locales à fournir des efforts conséquents, à cause de la prise en charge de dépenses auparavant assumée par lÉtat. Il a précisé que la comptabilisation de ces transferts était rendue compliquée par la coexistence de transferts de lÉtat aux collectivités locales et de transferts entre collectivités locales liés notamment au développement de lintercommunalité. Tout en indiquant quil savait le temps compté et lenveloppe budgétaire limitée, il a exprimé le souhait que la sortie du pacte donne lieu à une meilleure reconnaissance de ces transferts de charges dans le projet de loi de finances pour 1999. Il a enfin appelé de ses vux lengagement dune réforme de la fiscalité locale, déplorant lévolution défavorable récente du taux de remboursement assuré par le fonds de compensation de la TVA.
Répondant au Rapporteur spécial, M. Jean-Pierre Chevènement a évoqué la croissance des charges des collectivités locales liée à lapplication des législations récentes, évaluant à 90 milliards de francs le montant total des investissements nécessaires entre 1997 et 2001 pour assurer le respect des normes fixant la qualité de leau, et à 50 milliards de francs les sommes correspondantes en matière de gestion des déchets. Rappelant le niveau actuel élevé déquipement des collectivités locales et leffet du retour de la croissance sur les bases de la taxe professionnelle, il a indiqué que la future concertation entre lÉtat et les collectivités locales ainsi que le maintien des taux dintérêt à un niveau bas pourraient contribuer à résoudre leurs problèmes de financement. Il a affirmé sa volonté daméliorer les systèmes de péréquation et son souhait dappliquer, de façon certes progressive, la révision des valeurs locatives cadastrales.
M. Jean-Jacques Jegou, après avoir indiqué quil avait apprécié le ton et le contenu de lintervention de M. Jean-Pierre Chevènement, a regretté les disparités existantes en matière deffectifs de police entre Paris et les communes avoisinantes, estimant à 50 % linsuffisance de policiers dans la petite couronne. Il sest ensuite interrogé sur la justification et le montant de la facturation aux collectivités locales des mises à disposition de policiers pour assurer la sécurité à loccasion de manifestations et de fêtes sans but lucratif. En tant que membre de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations, il sest ensuite dit préoccupé par la situation financière de la CNRACL, qui ferait apparaître un déficit de 3 milliards en lan 2000. Il a souhaité que cesse la gestion de la surcompensation par des procédés que le Président de la Commission de surveillance avait pu rapprocher, lors de son audition ce matin même par la commission des Finances, de la « cavalerie ». Concernant la baisse des prélèvements obligatoires souhaitée par le Ministre de lÉconomie, des Finances et de lIndustrie, il a estimé que leffort serait probablement fourni par lÉtat, compte tenu de laugmentation des dépenses des collectivités locales. Il sest enfin interrogé sur la raison du maintien du prélèvement de 0,4 % à lencontre des collectivités locales qui se perpétue alors que la révision des bases cadastrales qui le justifiait a pris fin depuis plusieurs années.
M. Arthur Dehaine a interrogé le Ministre sur la situation dun président de service départemental dincendie et de secours (SDIS), élu dune petite commune, dont les fonctions représentaient une charge lourde non compensée par une indemnité.
M. Pierre Hériaud a constaté que les collectivités locales, grâce à la maîtrise de leur gestion et à la diminution de leurs charges dendettement, avaient dégagé un solde primaire positif de 170 milliards de francs, assurant ainsi une contribution positive au respect des critères de convergence fixés par le traité dUnion européenne. Il sest en outre interrogé sur les conditions de sortie du pacte de stabilité, évoquant les effets de transferts de charges non compensés, citant en particulier les dépenses daide sociale et lapplication du dispositif emplois-jeunes.
M. Gilbert Mitterrand, après avoir fait part de la crainte, exprimée par de nombreux policiers, que les emplois-jeunes se substituent à des emplois titulaires non remplacés, sest interrogé sur les moyens de combattre ce sentiment. Il a ensuite demandé si le projet de loi de finances pour 1999 traduirait les préoccupations exprimées par le Premier Ministre en matière de construction daires daccueil destinées aux gens du voyage.
M. Christian Cuvilliez a estimé que les collectivités locales attendaient de la sortie du pacte de stabilité une augmentation de leurs ressources, qui servirait à la fois le développement économique et la justice sociale. Il a souhaité que sengage une réflexion sur une réforme de lassiette fiscale qui éviterait une pénalisation de linvestissement et de lemploi et a préconisé la reprise du processus de révision des bases cadastrales et la mise en place dune réelle péréquation que, selon lui, nassuraient pas les mécanismes actuels. Il a souhaité le maintien des exonérations bénéficiant aux personnes défavorisées et du dispositif de la dotation de solidarité urbaine (DSU). Il sest déclaré attaché à ce que la dotation globale de fonctionnement (DGF) versée aux agglomérations reste comptabilisée de manière autonome par rapport à la DGF versée aux communes. Abordant les problèmes de sécurité, il a demandé des précisions sur la redistribution envisagée des missions des forces de police et de gendarmerie, indiquant que les gendarmes nétaient pas soumis aux contraintes statutaires qui limitaient parfois laction des policiers. Il a également exprimé la préoccupation que le redéploiement envisagé des forces de police ne se traduise pas, pour les communes moyennes, par la disparition de commissariats.
M. Philippe Auberger a souligné que la diminution des charges dintérêt, illustrée par la baisse de quelque trois ou quatre points du taux dintérêt moyen entre 1995 et aujourdhui (de 9 à 5,5 ou 5 %), équivalait à une diminution de 10 % de la pression fiscale et que, si elle ne sétait pas produite, les budgets des collectivités locales nauraient pu être équilibrés. Il a souhaité que, dans la négociation qui doit intervenir à la suite de la sortie du pacte de stabilité, leffet de cette baisse soit prise en compte. Il a demandé le relèvement de la dotation forfaitaire de la DGF pour les communes qui ne perçoivent pas la dotation daménagement 80 % de lensemble et qui subissent les conséquences du ralentissement de linflation sur leur niveau de ressources sans pouvoir augmenter corrélativement leur taux dimposition. Il a constaté que labandon, en 1992, du garde-fous que constituait lindexation sur la valeur du point de la fonction publique, se révélait particulièrement dommageable à la lumière de laccord salarial du 10 février 1998 dont lapplication, par des communes dont la masse salariale représente de 40 à 45 % du budget, conduirait à une augmentation annuelle de 3 à 3,5 % des dépenses correspondantes
Concernant la sécurité, il a souhaité obtenir des précisions sur les écoles de formation de la police et la disparition progressive des policiers auxiliaires et a insisté pour que celle-ci ne porte pas préjudice aux écoles.
Se référant à la loi du 7 août 1985 relative à la modernisation de la police nationale, qui avait permis une remise à niveau de ses équipements pour la période 19851989, M. Francis Delattre a défendu le principe dune programmation pluriannuelle pour laffectation des crédits aux dépenses de police.
Concernant le personnel, il a observé que si le ratio des effectifs cumulés de police et de gendarmerie par habitant était particulièrement élevé en France, les moyens disponibles étaient imparfaitement utilisés et que le fonctionnement de la police au quotidien laissait à désirer. Il a déploré que lobligation de résidence ne soit pas toujours respectée et sest notamment étonné de voir, dans sa commune, les logements destinés aux policiers occupés pour moitié par des membres du personnel des préfectures. Il a enfin attribué au régime actuel des finances locales un effet de déresponsabilisation, nourri par lobsolescence des « quatre vieilles », et préconisé une réforme fiscale comportant linstitution dun impôt correspondant à chaque niveau - communal, départemental, régional - de collectivités décentralisées.
M. Dominique Baert, après avoir appuyé les observations de M. Gilbert Mitterrand sur la réaction des personnels titulaires à linstitution des agents de sécurité, sest interrogé sur les conditions du recrutement de ces adjoints de sécurité, quil a estimé, à la lumière de son expérience locale, un peu trop homogène ; il a demandé en conséquence quelles garanties prendrait le Ministre pour assurer dans ce recrutement la mixité sociale. Il sest également enquis du calendrier de mise en oeuvre des propositions du récent rapport de MM. Hyest et Carraz relatives au redéploiement des effectifs, notamment dans les zones urbaines sensibles. Il a enfin souhaité recueillir le sentiment du Ministre sur lavenir de la dotation de solidarité urbaine, et son évolution pluriannuelle ainsi que sur les modalités dindexation de la dotation globale de fonctionnement sur lévolution du PIB.
Le Président Augustin Bonrepaux, sinscrivant dans une perspective de suivi des autorisations budgétaires, sest étonné de voir les services de lÉtat invoquer la sous-consommation des crédits ouverts au titre de la dotation de développement rural (DDR) comme une preuve de labsence de besoins réels, alors que lexpérience montre la grande utilité de cette dotation comme instrument de financement efficace et rapide dopérations créatrices demplois et de ressources. Il a demandé au Ministre quel calendrier suivait la procédure de notification aux préfets des enveloppes de DDR, considérant que la répartition par ceux-ci des crédits correspondants était organisée trop tardivement pour permettre une utilisation effective des fonds avant la fin de lannée. Il a suggéré, dans lhypothèse où la sous-consommation des dotations serait avérée dans certains départements, que les sommes ainsi libérées soient affectées à dautres départements où elles trouveraient certainement une meilleure utilisation. Par ailleurs, il sest élevé contre une hypothétique limitation de lintercommunalité dagglomération aux seules zones urbaines, et souhaité lapplication à lensemble du territoire, y compris aux zones rurales, des mesures fiscales et financières favorisant son extension.
M. Jean-Pierre Chevènement, Ministre de lIntérieur, a ensuite répondu aux différents intervenants.
A M. Jean-Jacques Jegou, il a objecté que lexpression de « pléthore policière » appliquée à Paris négligeait par trop les caractéristiques propres à la ville : une population permanente de 2.150.000 habitants à laquelle se joignent, chaque jour, de 5 à 6 millions de personnes venant pour la plupart travailler ; laccueil de 25 millions de touristes chaque année ; la situation de ville-capitale, siège des pouvoirs publics, de 170 ambassades, et dorganisations internationales comme lUNESCO ; les nombreuses manifestations qui se déroulent quotidiennement sur la voie publique. Il a en outre fait valoir que le taux de délinquance à Paris, le plus élevé de France, appelait une dissuasion efficace. Il a rendu hommage aux fonctionnaires de police confrontés quotidiennement à une réalité difficile. Il a affirmé que la rémunération de certaines prestations de services, prévue par la loi était appliquée avec modération en fonction des circonstances, relevant au passage que si les actions de sécurité liées aux rencontres de la Coupe du monde étaient prises en charge par les organisateurs, le coût réel des opérations de police correspondantes était bien supérieur. A propos de la situation de la CNRACL, il a rappelé que le Premier ministre avait demandé il y a peu au Commissariat général du Plan un rapport sur les régimes spéciaux de retraites, en précisant que la situation de la Caisse ne rendait pas nécessaire laugmentation des cotisations employeurs en 1999 et quil était ouvert à lidée dune concertation sur ce sujet. Tout en reconnaissant que les charges de personnel étaient lourdes pour les budgets locaux, il a appelé de ses voeux une gestion rigoureuse de la part des élus. Il a admis que le bien fondé du prélèvement de 0,40 % pouvait désormais prêter à discussion.
Le Ministre sest engagé à faciliter, comme le suggérait M. Arthur Dehaine, loctroi dune indemnité aux présidents de SDIS en reconnaissant la lourdeur des responsabilités quils assument.
A M. Pierre Hériaud, il a représenté les progrès considérables réalisés, depuis 1992, sur lintercommunalité, tout en observant que la création de 1.000 communautés de communes en milieu rural, contre 5 communautés de villes, ne correspondait pas à la volonté du législateur, soucieux de développer la coopération en agglomération. Relevant que le rythme annuel de créations de groupements, passées de 300 à 150 par an, restait soutenu, il sest toutefois demandé si le niveau départemental ou au moins celui du pays nétait pas le meilleur pour une politique cohérente. A propos des créations demploisjeunes par les collectivités locales, dont le nombre demeurait insuffisant, il a rappelé limportance de leffort de lÉtat et mis en valeur lutilité du dispositif comme moyen dinsertion professionnelle ultérieure, soit dans un emploi marchand, comme les services de proximité, soit dans la police nationale où pourrait entrer une part importante des adjoints de sécurité.
Répondant à M. Gilbert Mitterrand, le Ministre a assuré que les agents de sécurité ne compenseraient pas des emplois titulaires et rappelé que chaque adjoint avait dailleurs un tuteur appartenant au personnel titulaire. Sur la question des gens du voyage, il a annoncé quune procédure interministérielle en cours étudiait les moyens de renforcer les pouvoirs des maires désireux de réaliser les aires daccueil prévues par la loi Besson.
Reprenant les observations de M. Christian Cuvilliez, M. Jean-Pierre Chevènement a déclaré que lÉtat intervenait à hauteur de 36 milliards de francs pour la compensation de la taxe professionnelle. Il a confirmé que léventuelle révision des bases dimposition de la taxe dhabitation nimpliquait nullement la remise en cause des exonérations existantes. Sur la question de la solidarité entre collectivités locales, et plus particulièrement sur la réforme de la dotation globale de fonctionnement, il a insisté sur la nécessité de disposer des moyens nécessaires pour maîtriser la ségrégation sociale et spatiale par une politique dhabitat appropriée à lévolution de lagglomération. Il a mentionné la forte croissance, au sein de la dotation globale de fonctionnement, de la dotation spéciale aux groupements (5,5 milliards de francs actuellement contre 3,5 milliards en 1992) et précisé que la dotation aux communautés dagglomération sajouterait à ce concours particulier. Constatant que les populations sont en général attachées par principe aux services quelles connaissent de longue date, que ce soit la gendarmerie dans les campagnes ou la police nationale dans les villes, il a rappelé que la répartition nouvelle des personnels en cause avait été décidée par la loi du 21 janvier 1996 et mise en oeuvre par le décret du 20 septembre 1996, et considéré que le redéploiement des moyens se ferait au profit des zones où la délinquance était actuellement la plus forte. Il a estimé que cette procédure était conforme au principe fondamental du service public, « des moyens où sont les besoins », et quelle devait être acceptée, car la citoyenneté implique une certaine abnégation au bénéfice de lintérêt général.
M. Jean-Pierre Chevènement a reconnu que les observations de M. Philippe Auberger sur lincidence de la charge dintérêts méritaient attention ainsi que ses remarques sur lévolution de la dotation forfaitaire au sein de la DGF. Il a déclaré que 17.500 policiers devaient être formés dans les écoles de police en raison de lentrée en vigueur de la loi sur le service national et que le potentiel de formation serait en conséquence porté de 3.000 places en 1995 à 4.500 en 1999.
Il a précisé à M. Francis Delattre que les évolutions quil avait évoquées prenaient pour base les dotations de la loi de finances initiale, mais que, de fait, la régulation budgétaire avait affecté tant le budget de 1995 que celui de 1996. Il a fait valoir les difficultés de promouvoir une meilleure utilisation des moyens en personnel compte tenu des très grandes disparités de situation entre communes. Il a indiqué que 130 millions de francs avaient été consacrés au logement des policiers en 1997. Prenant occasion de lévocation des personnels des préfectures, il a fait connaître son intention den revaloriser la condition compte tenu de limportance des missions quils accomplissent pour le compte de lÉtat. Enfin, il a considéré quune réforme consistant à affecter un impôt à chaque niveau de collectivité était impossible tant que subsisterait un système fondé sur les « quatre vieilles ».
Puis, le Ministre a mentionné les instructions données pour que les décisions de recrutement dadjoints de sécurité soient prises en fonction de ladéquation du profil au poste et non sur la base des seuls diplômes. Il a ajouté quaucun calendrier précis navait encore été fixé pour la mise en uvre des propositions du rapport Hyest-Carraz, dans lattente de la concertation à intervenir. Il sest enfin déclaré favorable à une revalorisation de la dotation de solidarité urbaine.
En réponse aux remarques du Président Augustin Bonrepaux sur la dotation de développement rural, il a rappelé que les crédits alloués au titre de cette dotation étaient répartis au premier trimestre en fonction de données fiscales et que la gestion faisait apparaître un report de crédits chaque année. Il sest engagé à étudier les moyens dune accélération des procédures de notification de crédits aux préfets, tout en indiquant que la redistribution des crédits non consommés par certains départements nécessitait une modification législative. Il sest toutefois fortement interrogé sur la qualité, au regard des objectifs poursuivis par la création de cette dotation, la revitalisation du milieu rural, de certains projets dont il avait eu connaissance. A propos de lintercommunalité dagglomérations, il a mis en rapport le retard incontestable pris par lintercommunalité urbaine et la part prépondérante, 75 %, de la taxe professionnelle acquittée dans les zones urbaines.
fpfp
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