ASSEMBLÉE NATIONALE
COMMISSION DES FINANCES,
DE LÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN
COMPTE RENDU N° 64
(Application de l'article 46 du Règlement)
Jeudi 25 juin 1998
(Séance de 16 heures 30)
Présidence de M. Augustin Bonrepaux, Président
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Audition de M. Jean-Cyril Spinetta, présidentdirecteur général de la Compagnie nationale Air France
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La Commission a procédé à laudition de M. Jean-Cyril Spinetta, président-directeur général de la Compagnie nationale Air France.
Le Président Augustin Bonrepaux, après avoir accueilli M. Jean-Cyril Spinetta, président-directeur général de la Compagnie nationale Air France, a constaté, pour sen étonner, que ceux qui avaient réclamé laudition de M. Spinetta dans les délais les plus brefs après la fin du conflit qui lavait opposé aux pilotes, nétaient pas présents pour entendre ses explications.
M. Didier Migaud, Rapporteur général, a tout dabord interrogé le président dAir France sur la situation interne de la compagnie après le conflit et sur lannulation, ce jour même, par le tribunal de première instance de lUnion européenne de la décision de la Commission des Communautés européennes autorisant, en 1994, la recapitalisation dAir France . Il a ensuite demandé si lécart de productivité entre Air France et ses principaux concurrents européens était dû aux seuls coûts de personnel ou si dautres facteurs intervenaient. Evoquant la stratégie dalliance dAir France, par rapport à British Airways et aux compagnies regroupées au sein de Star Alliance, il sest interrogé sur lévaluation de lefficacité de cette politique. Il sest enfin enquis du montant actuel de lendettement de la compagnie et des modalités de gestion de la dette.
M. Jean-Cyril Spinetta, présidentdirecteur général dAir France, a indiqué que, si lon exceptait les pilotes, le niveau de rémunérations des autres catégories de personnel nétait pas à lorigine dun écart de compétitivité avec les compagnies concurrentes. Il a rappelé que la situation particulière des pilotes, génératrice, à coup sûr, dun tel écart, était à lorigine de larticle 36 du projet de loi portant diverses dispositions dordre économique et financier qui prévoyait lattribution dactions aux pilotes en échange dune baisse de leur salaire. Il a considéré que le conflit social avait, du moins, eu le mérite de mettre fin, y compris chez les pilotes, à la contestation sur cet écart, ce qui navait fait que renforcer les conclusions des trois audits successifs menés dans les trois dernières années, qui avaient révélé une différence denviron 40 % avec Lufthansa et 20 % avec British Airways. Il a estimé, toutes choses égales par ailleurs, quune telle différence était à lorigine dun écart de charges dun milliard de francs par an entre Air France et ses principaux concurrents européens. Il a ajouté que, si rien nétait fait pour remédier à ce problème, la compagnie verrait rétrécir son périmètre dactivité, sans même lavoir choisi, et se concentrerait dans les seuls domaines où le surcoût lié aux rémunérations des pilotes serait acceptable ; il a précisé que cette considération était directement à lorigine de la cessation de lactivité dAir Charter, qui perdait de 50 à 100 millions de francs par an et quelle pouvait contraindre à remettre en cause, en labsence de toute évolution, lactivité de cargo et à concentrer les efforts de la compagnie sur le long courrier, où le surcoût des pilotes était acceptable, au détriment du court et du moyen courrier, où il ne lest pas.
Le présidentdirecteur général dAir France a reconnu que la question des salaires des pilotes nétait pas la seule cause du déficit de compétitivité, qui pouvait être également imputé à une insuffisante qualité dexploitation et il a estimé que les problèmes correspondants pouvaient être résolus par un effort de réorganisation du travail qui ne porterait pas atteinte aux salaires ou à lemploi. Il a, enfin, insisté sur les causes masquées dinsuffisance de qualité, telles que le manque de ponctualité, évaluant à 3.000 F le coût pour la compagnie du retraitement dun passager qui a raté sa correspondance pour cause de retard.
Evoquant le débat actuel sur lopportunité du recentrage de lactivité des compagnies aériennes sur la seule activité de transport, M. Jean-Cyril Spinetta, après avoir indiqué que lexercice dactivités de maintenance pour compte de tiers était une spécificité des compagnies européennes, a rappelé que cette activité, où Air France jouissait dune réputation justifiée, dégageait pour la compagnie nationale un chiffre daffaires annuel de 3 milliards de francs par an. Il a souligné que lexistence de cette activité accroissait statistiquement le ratio entre les personnels employés et le nombre davions par compagnie, masquant légale compétitivité, à périmètre constant, des compagnies européennes et des compagnies américaines ou asiatiques.
Il a ensuite rappelé que la grève avait duré dix jours, mais que ses effets sétaient étendus sur deux semaines, correspondant au temps nécessaire pour une reprise complète de lactivité. Il en a estimé le coût immédiatement évaluable à 1,5 milliard de francs, à raison de 1,640 milliards de francs de pertes de recettes (1,4 milliard de francs au titre des passagers, 240 millions de francs au titre du fret), compensées partiellement par des économies, dun montant quotidien de 25 millions de francs, sur le carburant, les redevances aéronautiques et aéroportuaires et les salaires. Il a estimé quil fallait ajouter à ces chiffres la traduction financière de la désaffection temporaire des clients, quelle soit due au passage occasionnel vers dautres compagnies ou à une éventuelle perte de confiance. Il a jugé que la grève éroderait de façon significative la capacité dinvestissement de la compagnie, dans une proportion équivalant au financement de deux avions long courrier.
Le présidentdirecteur général dAir France a décrit les grandes lignes du protocole signé avec les pilotes : blocage de la grille des rémunérations jusquen 2005, suppression de la double échelle de salaires envisagée pour les jeunes pilotes, remboursement partiel par ceux-ci, en contrepartie, de la formation assurée par Air France, et, enfin, échange dactions contre baisse des salaires sur la base du volontariat. Dans lhypothèse où la moitié des pilotes accepterait lattribution dactions contre une baisse de salaire, il a évalué léconomie qui résulterait de cette formule à 505 millions de F pour lannée 2002 et, en chiffres cumulés, à 1,331 milliard de francs pour les années 1998 à 2002, et à 3,2 milliards de francs pour les années 1998 à 2005, sur la base du rythme actuel dinflation. Il a cependant rappelé que la valeur de ce chiffrage dépendait des modalités, encore à déterminer, de loctroi des actions. Il a ajouté que le blocage de la grille des salaires correspondrait à une diminution de 10 à 12 % sur sept ans des salaires des pilotes, et que, bien entendu, leffet déconomies pour la compagnie serait plus important si les pilotes acceptaient, en contrepartie dune cession dactions plus importante, une baisse plus rapide de leur salaire.
Présentant les premières indications disponibles sur lévolution du trafic de la compagnie depuis la fin du conflit, il a noté sa forte reprise, par rapport à la période identique de 1997, sur lAfrique, les départements doutre-mer et lAmérique du Nord, et une diminution de lordre de 10 %, par rapport à cette même période, sur lAsie, lAmérique latine et une partie du réseau européen. Qualifiant le conflit dépreuve très lourde pour lentreprise, il a constaté que les pilotes avaient compris le risque pour la compagnie du refus de toute évolution dans une entreprise pleinement exposée à la concurrence et admis la réalité de lécart de productivité lié à leurs rémunérations ; il a toutefois rappelé que la mise au point définitive des accords dont le principe avait été arrêté à la fin du conflit nétait pas achevée.
A propos de la décision du tribunal de première instance de lUnion européenne rendue sur le recours de sept compagnies aériennes contre la décision de la Commission autorisant la recapitalisation dAir France, il a insisté sur le fait que cette décision était motivée, non par une raison de fond, mais par un défaut de motivation. Il a précisé que les juges, estimant que lachat davions était, pour une compagnie de transport aérien, une dépense de fonctionnement normal, avaient en premier lieu reproché à la Commission de ne pas avoir explicitement établi que la recapitalisation nétait pas affectée à cet achat ; il a ajouté quil était en outre fait grief à la décision de la Commission dêtre exclusivement fondée sur la prise en considération de la concurrence aérienne dans lespace économique européen, et de ne pas envisager la situation hors de cet espace.
Se refusant à sexprimer à la place de la Commission des Communautés européennes, à laquelle appartenait le choix sur un éventuel appel, il a cependant jugé plus probable quelle chercherait à remotiver sa décision et que se posait, dès lors, la question de savoir sil était nécessaire douvrir à nouveau une procédure denquête sur laide apportée par lÉtat à Air France. Tout en rappelant que la réponse, en raison des délais différents quelle impliquait, nétait pas indifférente, il a cité des passages du communiqué publié par le tribunal de première instance doù il ressortait clairement que cette juridiction avait rejeté les griefs de fond soulevés par les compagnies requérantes et quelle invitait la Commission à opter pour la remotivation. Il a ajouté que la décision du tribunal nemportait donc pas obligation, pour Air France, de rembourser en tout ou en partie laide que lui avait versée lEtat avec lautorisation de la Commission.
M. Jean-Cyril Spinetta sest félicité de ce que la stratégie suivie par Air France ait doté la compagnie du réseau dalliances le plus important dans le monde, face au système dalliance globale que seul le groupe Star Alliance mettait actuellement en oeuvre. Il a évoqué, en comparaison, la situation de British Airways, qui ne dispose daucune alliance aux États-Unis ou en Europe. Il a mis en valeur, dans le prolongement du récent accord franco-américain sur les droits de trafic, les conséquences positives de lalliance conclue par Air France avec Continental et Delta, qui met à la disposition de la compagnie des vols en partage de code sur les trois nouvelles escales dAtlanta, Houston ou Newark et permet aux clients dAir France daccéder à 35 villes sur le territoire américain, ce qui correspond à environ 500 millions de francs de chiffre daffaires supplémentaire sur lAmérique du Nord. Il a ensuite évoqué les alliances dAir France, en Asie, avec China Estearn, Korean Airlines, JAL, Air India et Indian Airlines, en Afrique avec Royal Air Maroc et Air Afrique avant de considérer que le principal problème était de trouver un allié en Europe.
M. Jean-Cyril Spinetta a expliqué que limportant mouvement de concentrations constatées en Amérique du Nord depuis le début de lannée avec le regroupement de Continental et de Northwest, de United Airlines avec Delta, et de US AIR avec American Airlines, conduisait à réorganiser le transport aérien aux Etats-Unis autour de trois pôles majeurs réalisant environ chacun 200 milliards de francs de chiffres daffaires et disposant de 1.500 avions, contrastant avec les trente compagnies européennes actuelles. Il a mis en lumière la priorité manifestée par ce regroupement en faveur du marché intérieur américain, et les paradoxes résultant de la combinaison de ces accords et des systèmes dalliances liant par ailleurs les mêmes compagnies à dautres compagnies du reste du monde.
Traitant de lendettement de la compagnie, il a indiqué que celuici atteignait, en valeur brute, 27 milliards de francs et, en valeur nette, 15 milliards de francs ; il a observé que lendettement net avait donc diminué de plus de 20 milliards de francs par rapport aux 35 milliards de francs que lon constatait en 19931994, ce qui faisait bien apparaître, en première analyse, que la recapitalisation de 20 milliards de francs par lÉtat avait pu effectivement contribuer au désendettement. Évoquant le ratio endettement net/fonds propres, il a déclaré que celui dAir France était légèrement inférieur à 1 (les fonds propres étant de 15 milliards de francs), ce qui plaçait lentreprise entre Lufthansa, dont le ratio était égal à 0,5, et British Airways, dont le ratio dépassait 1,2 et rendait encore nécessaire un effort en ce domaine. Analysant enfin la structure de la dette, il a indiqué que celleci était répartie en deux parts plus ou moins égales, lune à taux fixe, dont le coût moyen était de 9,04 %, lautre à taux variable, dont le coût moyen était de 4,06 %, le coût moyen de lensemble de la dette étant donc de 6,59 % ; il a expliqué le coût élevé de la dette à taux fixe par son ancienneté et souligné que le remboursement accéléré de ces engagements, compte tenu justement de leur ancienneté, allait entraîner une diminution naturelle des frais financiers dAir France après lan 2000, quand bien même ce ne serait pas le cas de la dette ellemême.
M. JeanLouis Idiart, après avoir rappelé que nombre de membres de la Représentation nationale suivaient depuis longtemps avec intérêt lévolution de la compagnie nationale, sest félicité de son redressement, mais déclaré choqué du manque de responsabilité manifesté récemment par une partie du personnel, alors même que dautres catégories de celuici avaient auparavant accepté des sacrifices. Il a espéré que laccord de sortie de grève qui avait été signé permettrait de ressouder les personnels pour assurer lavenir de la compagnie. Attaché à lappartenance dAir France au secteur public, il a observé avec satisfaction que cela nempêchait pas la compagnie de mener une politique active dalliances.
Puis, il a interrogé le présidentdirecteur général sur les incidences de laccord de sortie de grève sur les embauches de pilotes, évoquant le cas des jeunes pilotes formés au cours des années récentes, et qui navaient pu être embauchés. Il a souhaité connaître laccroissement de parts de marché qui avaient résulté pour Air France de la création des navettes entre Paris et Toulouse, Marseille et Nice et de linstauration de la plateforme de correspondance de Roissy. Il a, enfin, demandé des précisions sur le partage des commandes entre Airbus et Boeing dans le cadre de la politique dachats davions et sur les perspectives de transfert des ateliers de Montaudran à Toulouse.
M. Gilbert Gantier a tout dabord remarqué que lemploi de président dAir France réservait constamment de mauvaises surprises : la grève des pilotes, puis, ce matin même, le jugement du tribunal de Luxembourg, quil était encore trop tôt pour commenter longuement. Il a observé que les problèmes de productivité tenaient sans doute aux salaires des pilotes, mais pas à ceux du reste du personnel, qui ne semblaient pas plus élevés que dans la concurrence ; il a ajouté que lamélioration de la productivité pouvait aussi résider dans un meilleur déploiement des effectifs ; il a également rappelé les coûts dentretien élevés résultant du caractère très composite de la flotte dAir France.
Il a ensuite demandé des précisions sur la part de la flotte dAir France qui se trouvait en leasing, sur les incidences positives de laccord récemment conclu entre la France et les ÉtatsUnis, ainsi que sur la possibilité de lutter contre des alliances de compagnies, principalement américaines, pouvant représenter plus de mille avions. Il a, enfin, interrogé M. Spinetta sur les propos récents du Président de lAssemblée nationale laissant entendre quune privatisation dAir France pouvait être envisagée à terme.
M. JeanJacques Jegou a demandé sil existait une pesanteur spécifiquement liée aux statuts des personnels de la compagnie, lesquels, par exemple, pourraient freiner les redéploiements nécessaires ou porter une part de responsabilité dans les problèmes de « non-qualité » évoqués par M. Spinetta. Il a, par ailleurs, interrogé le présidentdirecteur général sur lavenir des activités dentretien pour compte de tiers de la compagnie, mettant laccent sur les améliorations possibles en matière de sécurité et les difficultés quauraient peutêtre certaines compagnies si Air France abandonnait ces activités.
M. Thierry Carcenac, rappelant les problèmes de rationalisation résultant des différences entre les flottes de lancienne Air France et de lancienne Air Inter, a demandé des précisions sur la politique dachat davions suivie par la compagnie. Il a ensuite interrogé M. JeanCyril Spinetta sur la pyramide des âges des pilotes qui risquait dinfluer sur les recrutements futurs. Il a souhaité connaître également la vision que le président dAir France avait de lavenir du transport aérien et sest demandé si la récente grève des pilotes ne devait pas inciter à une nouvelle approche de la gestion des conflits.
M. Alain Rodet a demandé des précisions sur la nature des relations établies entre Air France et les petites compagnies assurant la desserte des villes moyennes en France.
Le Président Augustin Bonrepaux sest enquis des perspectives de résultats dAir France pour lexercice 1998 après les pertes dues à la grève des pilotes, alors même que les résultats de 1997 étaient en nette amélioration. Il a souhaité connaître le montant et les modalités de financement des investissements de la compagnie pour les prochaines années, ainsi que les conséquences éventuelles que pourrait entraîner, sur les parts de marchés dAir France, un ralentissement des investissements pour tenir compte du coût de la grève des pilotes.
Répondant aux intervenants, M. JeanCyril Spinetta a rappelé que, dans les entreprises de transport aérien, conformément aux normes de lIATA, lexercice budgétaire sétalait du 1er avril de lannée en cours au 30 mars de lannée suivante. Indiquant que la prévision, pour lexercice 1998-1999, avant le conflit, faisait état dune amélioration par rapport aux résultats de lexercice 1997-1998, il a cité les chiffres qui montraient la progression de ces derniers par rapport à lexercice 1996-1997, tant pour le chiffre daffaires (en augmentation de 5 milliards de francs, soit de 9 %), que pour lexcédent brut dexploitation (2,350 milliards de francs, soit 12,6 % du chiffre daffaires, contre 10 %), le résultat dexploitation, qui passe de 200 millions de francs à 1,9 milliard de francs, le résultat courant, de 0,8 à 1,7 milliard de francs ou le résultat social de 0,5 à 1,6 milliard de francs. Il a exprimé sa volonté de rapprocher lexcédent brut dexploitation du taux de 15 % du chiffre daffaires, de manière à mettre la compagnie en mesure de procéder aux investissements nécessaires à son développement.
A ce propos, il a fait valoir, en regard de la perte de 1,5 milliard de francs imputable au conflit, les excellents résultats enregistrés en avril et mai dernier et rappelé quil ne serait possible dévaluer le retour de la confiance des clients de lentreprise quà la mijuillet. Il a maintenu une prévision de résultat positif pour Air France en fin dexercice, certes moindre que prévu, tout en admettant que sa capacité dinvestissement serait, en tout état de cause, érodée.
Il a indiqué que le plan dinvestissement arrêté avant le conflit prévoyait, sur une période de cinq ans, des dépenses dun montant de 40 milliards de francs (32 milliards dacquisitions davions et 8 milliards déquipements informatiques, fret, industrie, etc.), avec un « pic dinvestissement » denviron 10 milliards de francs en 1999. Il a précisé que les commandes davions sur lannée en cours ne seraient pas remises en cause, compte tenu des engagements pris avec les constructeurs, mais que les conséquences financières du conflit amenaient à différer une commande de deux avions long courrier.
Il a ensuite manifesté lintention de la compagnie de ramener le ratio endettement sur fonds propres au-dessous de 0,8, grâce au maintien de lendettement à un niveau constant et à lamélioration de la structure des fonds propres, rendue possible par louverture du capital dAir France, quil faut espérer prochaine. Il a souligné que la grande sensibilité des compagnies aériennes aux retournements de cycles économiques lincitait à une prudence particulière dans lutilisation de lemprunt pour le financement des investissements.
Il a ensuite énuméré les prévisions dembauche de jeunes pilotes pour la période 19982002 : 200 en 1998, 165 en 1999, 220 en 2000, 290 en 2001 et 220 en 2002, soit un total de 1.100 pilotes sur la période, correspondant, compte tenu des départs en retraite, à une création nette de 500 emplois depuis la reprise des recrutements au printemps dernier. Rappelant quaprès avoir été conduite par la pénurie de personnels navigants, en 1988-1989, à organiser le prérecrutement délèvespilotes pour une formation interne, la compagnie avait été obligée par la crise du début des années 1990 à suspendre ces recrutements et à placer les personnes quelle avait formées sur une liste dattente comportant 500 noms, il a indiqué que les embauches étaient réservées par priorité à ces personnes, dont la liste serait épuisée dici lan 2000. Il a ajouté que le problème de la double échelle des salaires, avait été compliqué par lexistence de cette liste, dans la mesure où les personnes formées il y a neuf ans étaient enclines à se considérer lésées par la modification postérieure des conditions dembauche.
Le présidentdirecteur général dAir France a salué limpact très positif sur la clientèle de la navette mise en place sur les trois lignes de Marseille, Nice et Toulouse, qui avait permis à Air France de reconquérir des parts de marché, et de porter cette part à environ 75 % sur Marseille et Toulouse (+ 10 points) et à un peu moins de 60 % à Nice. Il a toutefois estimé que la persistance de ce succès était liée à lamélioration de la qualité dexploitation, et notamment de la ponctualité, pour laquelle, il est vrai, le contrôle aérien avait aussi une part de responsabilité.
Il a confirmé que la plate-forme de Roissy avait eu les effets les plus positifs sur le réseau dAir France, en raison de ses grandes capacités de développement et, en particulier, des possibilités importantes de correspondances quelle offre (environ 5.400 par semaine contre 5.000 à Amsterdam et Francfort et un peu plus de 3.000 à Heathrow). Mettant en valeur latout majeur que la situation de lentreprise sur cette plate-forme constituait pour les liaisons long et moyen courrier, il a exposé que le maintien indispensable de cette position supposait quAir France dispose davions supplémentaires en nombre suffisant et de la capacité dautofinancement en rapport avec ce besoin déquipement.
Concernant lajustement de la flotte de lentreprise publique, M. Jean-Cyril Spinetta a indiqué que sa flotte court et moyen courrier était constituée quasi exclusivement dAirbus et que cette évolution était amenée à se confirmer après la conclusion récente avec Airbus dun accord portant sur trente commandes fermes et trente commandes à option jusquen 2002. Il a ajouté que les fusions successives avaient, de fait, donné à la flotte long courrier un caractère totalement disparate, générateur de coûts, aggravé par labsence dinvestissements mais que le plan quinquennal dinvestissements permettrait de parvenir à une rationalisation autour de trois types dappareils (Boeing 747 et 777 et Airbus 340), et de réduire ainsi les coûts dexploitation grâce aux économies réalisées dans lentretien des appareils et la qualification des pilotes.
Il a ensuite déclaré que 64 % de la flotte dAir France appartenaient à lentreprise, 20 % étaient détenus en crédit-bail et 16 % en location, et que toute compagnie aérienne se devait déviter de ne retenir que la solution de la pleine propriété de manière à conserver une flexibilité suffisante de la flotte, opportune en cas de retournement de cycle.
Il a rappelé que le déménagement de létablissement historique de MontaudranToulouse, dédié à lentretien des avions moyen porteur et employant 500 personnes, était rendu inévitable par son inclusion complète dans le tissu urbain et les nuisances corrélatives. Il a confirmé que le transfert de ces installations était prévu à Blagnac et que la définition précise du projet était subordonnée aux engagements pris par les collectivités locales sur les conditions daménagement du nouveau site. Il a ajouté quen raison dune surévaluation, dans le projet initial, du produit attendu de la cession des terrains de Montaudran par rapport à lestimation de ladministration des Domaines, un complément de financement serait nécessaire.
M. JeanCyril Spinetta a rappelé, par ailleurs, que, dans toute entreprise, publique ou privée, seul lactionnaire, et non le gestionnaire, était habilité à se prononcer sur la composition de lactionnariat, ajoutant que la position de lactionnaire lui était connue lorsquil avait accepté ses fonctions et quil lassumait pleinement.
Il a considéré que la position statutaire du personnel dAir France navait pas que des inconvénients dans la mesure où elle pouvait être modifiée par une simple décision du conseil dadministration après accord des tutelles, alors quune telle modification nécessitait quinze mois de négociations dans les entreprises où le personnel est soumis au droit privé. Il a estimé que la pesanteur était moins liée au statut luimême quà limage que les personnels en avaient et à lillusion persistante, quil semployait à dissiper compte tenu des contraintes européennes, que lEtat actionnaire serait toujours là pour apporter à lentreprise publique le soutien financier nécessaire en cas de difficulté.
Il a, au demeurant, estimé intenable, compte tenu de lintégration de plus en plus rapide résultant de lavancée de lunion économique et monétaire, la perpétuation de la coexistence en Europe de trente compagnies aériennes indépendantes, et prévu en conséquence que les prochaines années verraient, sinon des fusions, du moins des regroupements dentreprises dans le secteur.
Il a rappelé la signature, le 27 novembre 1997, dun protocole de méthode pour la conduite des négociations sociales dans lentreprise, qui navait pas été suivi deffet, et constaté que la gestion des relations sociales devait tenir compte du facteur de complexité constitué par lexistence de huit organisations syndicales parmi les pilotes de ligne.
Il a considéré que les relations entre Air France et les petites compagnies aériennes existant sur le territoire national pouvaient être convenablement organisées, à la satisfaction réciproque des parties, dans le cadre daccords de franchise et daffrètement, dont laccord avec Britair donne un bon exemple.
Il a indiqué que si Air France participait au groupe de travail technique dAirbus sur le projet de très gros porteur AXX, la compagnie néprouvait pas pour lui un intérêt aussi soutenu que British Airways, handicapée dans son développement par la saturation de laéroport dHeathrow. Il a constaté que, déjà propriétaire dAir Liberté, la compagnie britannique progresserait beaucoup dans sa volonté dêtre un opérateur significatif en France si elle avait la possibilité de prendre en outre le contrôle de la compagnie AOM, actuellement détenue par le Consortium de réalisation et dont la cession est prévisible.
fpfp
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