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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION DES FINANCES,

DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

COMPTE RENDU N° 65

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 1er juillet 1998
(Séance de 10 heures 45)

Présidence de M. Augustin Bonrepaux, Président

SOMMAIRE

 

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– Examen de la proposition de résolution (n° 955) de M. Gérard FUCHS, Rapporteur de la Délégation pour l’Union européenne, sur l’avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l’exercice 1999 (M. Didier MIGAUD, Rapporteur général)



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La Commission des finances, de l’économie générale et du Plan a examiné, sur le rapport de M. Didier Migaud, Rapporteur général, la proposition de résolution (n° 955) de M. Gérard Fuchs, rapporteur de la Délégation pour l’Union européenne, sur l’avant-projet de budget général des Communautés européennes pour l’exercice 1999.

Le Rapporteur général a indiqué que l’avant-projet de budget communautaire pour 1999 était caractérisé par une structure très déséquilibrée.

Il a remarqué que les crédits pour engagements progressaient de 6,5% par rapport au budget voté pour 1998, tandis que les crédits pour paiements s’accroissaient de 3,4%, et a observé que ces chiffres semblaient indiquer un rythme de progression trop important, contredisant les affirmations de rigueur de la Commission européenne. Il a cependant noté que le jugement devait être plus nuancé car, abstraction faite des actions structurelles, les taux d’augmentation étaient limités à 0,56% s’agissant des crédits pour engagements et à 0,49% au titre des crédits pour paiements. Il a jugé que ces progressions étaient particulièrement modérées et très comparables à celles enregistrées en 1997 et 1998. Il a observé que l’impact du volontarisme affiché au Conseil européen d’Edimbourg en matière d’actions structurelles sur les marges de manœuvre du budget pour 1999 était donc considérable.

Après avoir rappelé que ce volontarisme se traduisait notamment par les montants de crédits consacrés à ces actions, il a noté que l’accord interinstitutionnel du 29 octobre 1993 prévoyait qu’en matière d’actions structurelles, le Parlement européen et le Conseil s’engageaient à respecter les dotations en crédits d’engagement prévues dans les perspectives financières en inscrivant dans le budget le montant des plafonds prévus et que, de surcroît, une rebudgétisation automatique des crédits d’engagements non utilisés était prévue.

Il a indiqué qu’à cet égard, la sous-consommation des crédits, chronique en matière d’actions structurelles ces dernières années, avait des conséquences particulièrement regrettables pour 1999, la procédure d’adaptation des perspectives financières aux conditions d’exécution ayant conduit à augmenter les plafonds pour 1999 de 1,43 milliard d’écus pour les actions structurelles et de 101 millions d’écus pour le fonds de cohésion.

Il a précisé qu’au total, la progression des crédits pour engagements relatifs aux actions structurelles atteignait 16,6%, tandis que les crédits pour paiements augmentaient de 9%.

Il a estimé que l’inscription au budget d’une telle masse de crédits ne serait pas sans poser de délicats problèmes de gestion, avec notamment le risque d’une incitation à la dépense du fait même de la disponibilité des crédits, alors que la pertinence de certaines dépenses structurelles avait déjà souvent été remise en doute.

Il a noté qu’un second problème résidait dans les contraintes que faisait peser l’accroissement des crédits des fonds structurels sur les autres actions communautaires, non seulement pour le budget de 1999, mais aussi pour les exercices ultérieurs, la charge des crédits pour paiements nécessaires pour honorer les engagements au titre des actions structurelles pouvant croître fortement à l’avenir.

Il a estimé que la situation actuelle était quelque peu ubuesque et qu’il convenait d’appuyer les efforts du Gouvernement pour rétablir le cap.

Il a noté que plusieurs pistes étaient envisageables, comme l’étalement des crédits pour engagements ou pour paiements sur les exercices ultérieurs, même si aucune n’était entièrement satisfaisante. Il a toutefois déclaré qu’il était particulièrement nécessaire de limiter les conséquences indésirables des mécanismes de fixation des dépenses de la rubrique des actions structurelles à la fin de la programmation prévue à Edimbourg.

Abordant les autres domaines d’action du budget communautaire, il a relevé que les marges de manœuvre s’étaient révélées des plus limitées, même si la rigueur avait été appliquée de façon inégale selon les rubriques.

Il s’est ainsi réjoui de la progression limitée des dépenses administratives, dont la croissance est essentiellement imputable à la charge croissante des pensions.

Le Rapporteur général a expliqué que les dépenses agricoles avaient été définies a minima, se situant au même niveau qu’en 1998, ce qui aurait pour conséquence une diminution en euros constants. Il a convenu que les facteurs favorables étaient certes nombreux, mais que, les dépenses agricoles étant par nature susceptibles de connaître de brusques à-coups, il convenait de considérer les crédits prévus comme un plancher. Il a annoncé qu’en tout état de cause, la Commission européenne s’était engagée à présenter à l’automne une lettre rectificative comportant des estimations affinées des besoins, compte tenu notamment d’informations plus précises sur le déroulement des campagnes agricoles.

S’agissant des actions extérieures, il a précisé que la progression des crédits pour paiements était limitée à 1,8%, la presque totalité des lignes composant la rubrique connaissant une stagnation, voire une diminution des crédits, du fait de la priorité accordée, dans la perspective de l’élargissement, au programme Phare, relatif à la coopération avec les pays d’Europe centrale et orientale. Il a déclaré partager les inquiétudes manifestées dans la proposition de résolution au sujet de la mise en œuvre de ce programme et a jugé qu’il pourrait être envisagé de procéder à une répartition plus équilibrée des dotations, tenant compte de la capacité réelle d’absorption, par les pays concernés, des crédits du programme Phare.

Il a remarqué que les politiques internes jouissaient d’un statut plutôt privilégié, avec 3% de croissance de leurs crédits pour engagements, tout en faisant valoir que cette croissance était légitime, car ces politiques constituaient le support principal des actions tendant à favoriser la croissance et à améliorer la situation de l’emploi.

Il s’est félicité que l’initiative européenne pour l’emploi soit dotée de 150 millions d’euros en 1999, sur un total prévu, pour la période 1998-2000, de 420 millions d’euros, indiquant que cette action était conforme aux engagements pris lors du Conseil européen extraordinaire sur l’emploi tenu à Luxembourg en novembre dernier et visait avant tout à améliorer les conditions de financement des PME innovatrices.

Il a par ailleurs constaté que les crédits pour engagements en faveur des réseaux transeuropéens représentaient 617 millions d’euros, en forte progression de 10,2%. Evoquant enfin la recherche et le développement technologique, il a remarqué que les crédits pour engagements qui y étaient consacrés augmentaient de 2,3%. Il a fait remarquer que l’exercice 1999 présentait cependant, à cet égard, une particularité de taille, puisqu’il constituerait la première année d’application du cinquième programme-cadre de recherche et développement technologique, devant s’étaler jusqu’en 2002, le nouveau programme procédant à une concentration plus sensible des moyens, en articulant les actions communautaires autour des objectifs que constituent l’emploi, la croissance et la qualité de vie.

Il a rappelé que ce nouveau programme n’avait cependant pas été définitivement entériné en raison des divergences entre le Conseil et le Parlement européen sur le montant total des crédits devant lui être affectés.

Après avoir salué la qualité du travail effectué par la Délégation pour l’Union européenne et son Rapporteur, M. Gérard Fuchs, le Rapporteur général a indiqué qu’il proposerait quelques amendements rédactionnels ou de complément au texte de la proposition de résolution.

M. Gérard Fuchs, Rapporteur de la Délégation pour l’Union européenne, a exprimé son accord avec la présentation effectuée par le Rapporteur général, qui a mis l’accent sur le problème soulevé par le mécanisme régissant les reports des crédits consacrés aux actions structurelles. Il a souhaité apporter quelques nuances aux critiques, souvent fondées, exprimées à l’encontre de la mise en œuvre des actions structurelles par les institutions européennes. Il a d’abord noté que les retards et les problèmes de cofinancement étaient parfois imputables aux Etats membres, qui considèrent, dans certains cas, qu’un moindre engagement de leur part a pour conséquence une limitation de leur contribution au budget des Communautés. Il a ensuite estimé que les actions structurelles ont manifestement eu des effets positifs, citant, à titre d’exemple, l’impact favorable du fonds de cohésion sur des pays tels que l’Espagne, le Portugal et la Grèce.

Il a considéré que l’étalement des crédits pour engagements disponibles en matière d’actions structurelles au-delà de 1999 constituait une proposition sûrement théorique, compte tenu de l’accord politique liant les Etats membres. Il a jugé qu’un étalement des crédits pour paiements consacrés aux actions structurelles sur les exercices ultérieurs était envisageable, mais que cette solution imposerait à la Commission européenne de gérer simultanément deux types d’actions structurelles. Il a donc proposé une troisième voie, consistant à transférer une partie des crédits pour engagements disponibles au bénéfice d’autres actions en faveur de l’aménagement du territoire ou de l’emploi, qui ont également une finalité structurelle. Il a d’ailleurs observé que le niveau des dépenses communautaires envisagées pour les réseaux transeuropéens était dérisoire par rapport à l’ampleur des besoins.

S’agissant de la politique de recherche, il a rappelé que la France et l’Allemagne s’étaient opposées à la Commission européenne lors de la discussion sur la dotation globale du cinquième programme-cadre de recherche, de développement technologique et de démonstration. Il a toutefois observé que la Commission européenne avait pris récemment des engagements en matière de définition des objectifs et de gestion, qui devraient permettre d’atténuer les oppositions constatées.

La Commission a ensuite examiné les amendements à l’article unique de la proposition de résolution.

La Commission a adopté un amendement du Rapporteur général tendant à compléter les visas de la proposition de résolution afin de tenir compte de la transmission tardive de certains documents budgétaires.

Elle a ensuite examiné un amendement du Rapporteur général visant à demander au Gouvernement de soumettre au Parlement, dans le cadre de l’article 88-4 de la Constitution, le projet d’accord interinstitutionnel sur la discipline budgétaire et l’amélioration de la procédure budgétaire.

Le Rapporteur général a fait valoir que ce document était une proposition en vue de l’établissement d’un acte communautaire et que le Conseil d’Etat, en considérant qu’il s’agissait d’un simple document de travail de la Commission européenne, avait privé les Assemblées de la possibilité de se prononcer, le cas échéant, par la voie d’une résolution. Il a jugé cette interprétation surprenante, compte tenu de l’importance du texte en cause et de sa transmission au Conseil de l’Union européenne.

M. Gérard Fuchs a précisé que le Président de la Délégation pour l’Union européenne avait écrit au Président de l’Assemblée nationale à ce sujet. Il a également estimé que ce problème soulevait la question de l’attitude du Conseil d’Etat en matière de transmission des actes communautaires.

M. Maurice Adevah-Pœuf s’est interrogé sur la portée juridique de l’amendement proposé.

La Commission a adopté cet amendement.

Elle a ensuite examiné un amendement du Rapporteur général visant à rappeler aux Communautés européennes la nécessité d’effectuer le même effort de maîtrise des dépenses que celui engagé par les Etats membres.

M. Gérard Saumade a fait part de son accord sur le principe, mais a estimé que le texte proposé comportait une ambiguïté et risquait d’être interprété comme une invitation à mener une politique de rigueur, adressée aux Communautés européennes.

M. Gérard Fuchs a proposé de sous-amender l’amendement par l’insertion d’une référence aux « objectifs communs ».

Après avoir admis que l’amendement pouvait être quelque peu ambigu dans le contexte de la proposition de résolution, le Rapporteur général s’est déclaré favorable au sous-amendement.

La Commission a adopté cet amendement ainsi sous-amendé.

La Commission a ensuite adopté quatre amendements rédactionnels présentés par le Rapporteur général.

Puis elle a examiné un amendement présenté par le Rapporteur général tendant à modifier la rédaction proposée s’agissant de la dotation prévue pour la recherche et le développement technologique.

Le Rapporteur général a considéré que la dotation proposée par la Commission européenne, de 16,3 milliards d’euros, était effectivement une base de négociation convenable, mais que la nécessité d’une gestion plus rationnelle des dépenses relatives à la recherche devait être réaffirmée.

La Commission a adopté cet amendement, qui avait recueilli l’assentiment de M. Gérard Fuchs.

Elle a alors examiné un amendement présenté par le Rapporteur général, tendant à prendre acte avec satisfaction de la décision du 12 mai 1998 de la Cour de justice des Communautés européennes qui a clarifié le problème des bases légales, et invitant le Gouvernement à veiller à ce que l’engagement de toute action communautaire soit autorisé préalablement par un acte normatif.

La Commission a adopté cet amendement, après que M. Gérard Fuchs eut fait observer que la question n’était pas nécessairement définitivement tranchée.

La Commission a ensuite adopté l’article unique de la proposition de résolution ainsi amendé, puis un amendement de précision sur son titre.

M. Jean-Pierre Balligand a alors fait part de son souhait que la Commission des finances se penche sur le problème du bilan des fonds structurels et qu’elle procède, dès la rentrée de septembre, à des auditions sur ce sujet.

Le Président Augustin Bonrepaux a reconnu que la question était importante, tout en observant que la Commission devra alors se consacrer en priorité à l’examen du projet de loi de finances pour 1999.

M. Maurice Adevah-Poeuf a considéré que la préparation des accords de Lomé V justifierait également l’organisation d’auditions.


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