ASSEMBLÉE NATIONALE
COMMISSION DES FINANCES,
DE LÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN
COMPTE RENDU N° 68
(Application de l'article 46 du Règlement)
Jeudi 9 juillet 1998
(Séance de 10 heures)
Présidence de M. Augustin Bonrepaux, Président
SOMMAIRE
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Examen dun rapport dinformation sur les incitations fiscales à linvestissement outre-mer (M. Didier MIGAUD, Rapporteur général)
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Examen dun rapport dinformation sur lapplication des dispositions fiscales contenues dans les lois de finances (M. Didier MIGAUD, Rapporteur général)
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Informations relatives à la Commission
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La Commission des finances, de léconomie générale et du Plan a dabord procédé à lexamen du rapport dinformation présenté, en application de larticle 145 du Règlement, par M. Didier Migaud, Rapporteur général, sur les incitations fiscales à linvestissement outre-mer.
Le Rapporteur général a indiqué que la mission, constituée par la Commission des finances à la fin de lannée dernière et composée de MM. Jean-Pierre Brard, Arthur Dehaine, Gilbert Gantier et de lui-même, sétait fixé trois objectifs :
faire le point sur les incitations fiscales à linvestissement outre-mer, puisque les mécanismes de la « loi Pons » et les modalités de sa mise en oeuvre sont très mal connus en fait ;
évaluer les effets des mesures prises dans le cadre de la loi de finances pour 1998, les deux principales étant, dune part, la « tunnelisation », à savoir la suppression de la possibilité, pour les non professionnels, dimputer sur le revenu global les déficits nets dexploitation enregistrés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, et, dautre part, lexclusion des subventions publiques de la base défiscalisable ;
faire éventuellement des propositions daménagement législatif afin de stabiliser et prolonger laide à linvestissement outre-mer en moralisant plus encore le système et en accroissant son efficacité au regard de lactivité économique et de lemploi.
Il a annoncé que le rapport comporterait des exemples de montages de financement, transmis par les professionnels, dont la rentabilité avait été analysée, et quil rendrait compte des rencontres de terrain organisées dans les quatre départements doutre-mer (DOM).
Il a dabord constaté que les mécanismes de la « loi Pons » favorisaient les financements par des contribuables soumis à limpôt sur le revenu, car, le taux marginal atteignant 54 %, cest dans le cadre de cet impôt que leffet de levier de la déduction est le plus important.
Il a regretté la mauvaise connaissance du coût de la « loi Pons », dans la mesure où, jusquà la loi de finances pour 1998, la déduction correspondant à linvestissement était opérée dans le cadre des déclarations spéciales de bénéfices industriels et commerciaux (BIC), sans recoupement avec les déclarations dimpôt sur le revenu.
Il a ajouté que le coût total de la défiscalisation était donc inconnu et que les services fiscaux considéraient que la défiscalisation directe par des contribuables résidant dans les DOM était négligeable, lagrément spécial prévu pour la remontée des déficits à partir du 1er janvier 1996 ayant cependant révélé lampleur de la défiscalisation, mis en évidence des fraudes et amené le Gouvernement à en réévaluer le coût.
Il a rappelé, dune part, que les investissements dans les secteurs sensibles étaient soumis à un agrément au premier franc, sauf dans le cas des programmes inférieurs à 1 million de francs réalisés par les entreprises domiennes et, dautre part, que lensemble des programmes supérieurs à 30 millions de francs (10 millions de francs depuis la loi de finances pour 1998) étaient soumis à autorisation préalable, ce qui permettait une bonne connaissance de ce volet de la défiscalisation.
Il a indiqué que les statistiques portant sur les agréments délivrés mettaient en évidence la prépondérance des investisseurs soumis à limpôt sur le revenu et que deux catégories de montages prédominaient : lorsque le contribuable métropolitain est juridiquement lexploitant direct du bien, la remontée du déficit sur son revenu était possible avant lintervention de la loi de finances pour 1998 qui y a mis fin par la tunnelisation, doù le nom de double défiscalisation ; en revanche, lorsque ce contribuable loue le bien à lexploitant, limputation du déficit nest pas possible, doù le nom de simple défiscalisation.
Il a considéré que la prépondérance des contribuables soumis à limpôt sur le revenu était la conséquence logique des mesures prises entre 1993 et 1995, en observant que la majorité élue en mars 1993 avait supprimé labattement de 25 %, institué par la loi de finances pour 1992, sur la base déductible de ces contribuables, tout en maintenant labattement du tiers sur la base déductible par les contribuables passibles de limpôt sur les sociétés en cas dinvestissement dans un DOM. Il a ajouté que, de ce fait, les contribuables à limpôt sur le revenu pouvaient donc déduire 100 % de linvestissement de revenus taxables à plus de 50 %, alors que les contribuables à limpôt sur les sociétés, lorsquils investissaient dans un DOM, ne pouvaient déduire que les deux tiers de linvestissement de résultats taxables, au maximum, à 41,66%, ce qui correspondait à un taux effectif de 27,77%.
Le Rapporteur général en a conclu que la précédente majorité avait favorisé la défiscalisation par les contribuables importants à limpôt sur le revenu, en décourageant celle des sociétés, pourtant les mieux placées pour apprécier la rentabilité des investissements comme le risque encouru.
Il a ensuite rappelé que la première « loi Pons », jusquen 1992, avait été caractérisée par certains scandales qui nuisaient encore à sa réputation et quil demeurait toujours un grand nombre danomalies dans sa mise en oeuvre.
En tout premier lieu, il a constaté que les frais dintermédiation étaient élevés et que les intermédiaires jouaient un rôle excessif dans la mise en oeuvre de montages qui avaient pour caractéristique de reposer sur le financement dimmobilisations outre-mer par des contribuables métropolitains ne connaissant pas nécessairement la nature des investissements concernés. Il a déploré que, sur ce marché segmenté, seuls les intermédiaires contrôlent la chaîne de financement et que leur rémunération puisse quelquefois atteindre 24 % de linvestissement, auxquels sajoutaient des frais de gestion jusquà 4 % par an pendant cinq ans.
Il a ensuite évoqué lisolement géographique et économique des collectivités doutre-mer, induisant des surcoûts appelés localement « frais dapproche », qui pouvaient dissimuler en fait des surfacturations.
Enfin, il a estimé que la prépondérance des montages de déduction dans le cadre de limpôt sur le revenu constituait une atteinte sérieuse à la progressivité de cet impôt, et donc à légalité fiscale, et rappelé que cétait sur ce terrain que la Commission des finances avait entendu corriger la « loi Pons » à lautomne dernier.
Sagissant de limpact de la défiscalisation sur léconomie, le Rapporteur général a fait valoir que trois facteurs permettaient de penser que cet effet était moindre que ce que prétendent ses défenseurs :
il existe une déperdition de leffet du coût de la défiscalisation pour la puissance publique, par rapport à ce que serait limpact dune subvention, dans la mesure où le « gâteau fiscal » doit rémunérer dabord le contribuable, ensuite les intermédiaires et enfin lopérateur outre-mer ;
la « loi Pons » sajoute aux autres mécanismes daide à loutre-mer ; ainsi, en 1996, lensemble du coût estimé de la défiscalisation représentait moins de 5 % des aides publiques recensées par un rapport de linspection générale des finances pour les seuls départements doutre-mer (2,1 milliards de francs à comparer à 46 milliards de francs) ;
enfin, le mécanisme de la double défiscalisation, jusquà la loi de finances pour 1998, permettait un avantage fiscal quelquefois supérieur au montant de linvestissement et donc la rentabilisation fiscale dinvestissements parfaitement stériles.
En conclusion, le Rapporteur général a proposé cinq catégories de mesures.
Il sest dabord interrogé sur léventualité dune suppression du mécanisme permettant la déduction de linvestissement de leurs revenus imposables pour les personnes physiques, tant il porte atteinte à la progressivité de limpôt sur le revenu tout en facilitant des montages coûteux à lefficacité comme à la régularité douteuses. Compte tenu des règles constitutionnelles, parce quil est impossible à linitiative parlementaire de proposer un mécanisme de substitution, il a jugé que cette suppression ne pourrait être que dorigine gouvernementale et quil convenait, dans cette attente, de prolonger le dispositif en vigueur aujourdhui.
Il a estimé que les actions correctrices de la loi de finances pour 1998 devaient être prolongées, car elles étaient très pertinentes.
Il a constaté que la tunnelisation affectait les seuls secteurs de lhôtellerie, des énergies nouvelles et de la navigation de plaisance. Sagissant de lhôtellerie, il a indiqué que les professionnels étaient divisés, car la tunnelisation a pour effet déliminer les projets les moins rentables sans empêcher les investissements économiquement justifiés et a souligné que la situation était différente aux Antilles et à La Réunion. Pour le secteur des énergies nouvelles, il a observé que léquilibre de financement était compromis, parce que les contribuables pouvaient bénéficier auparavant, en plus de la déduction de leurs investissements, dun amortissement exceptionnel sur douze mois, avec leffet exorbitant dun remboursement fiscal de linvestissement en moins de deux ans. Enfin, il a indiqué que le secteur de la navigation de plaisance était caractérisé par une différence entre les professionnels de la location de bateaux et les artisans, voire les amateurs, et que la tunnelisation participait donc à la remise en ordre engagée en 1992.
Il a considéré que, si lon estimait nécessaire de prendre en compte la spécificité de ces secteurs, auxquels on pourrait aussi ajouter la pêche, la double défiscalisation ne paraissait pas la bonne solution. Il a donc suggéré la mise en place de dispositifs daccompagnement plus classiques en cas de situation particulière, pour conforter leffet de levier déjà permis par le régime de simple défiscalisation, loutil fiscal ne devant pas, à ses yeux, être utilisé de manière exclusive.
Il a admis que lexclusion des subventions de la base défiscalisable réduisait fortement lintérêt de la défiscalisation pour les investissements subventionnés, mais a observé que personne ne contestait sa légitimité, chacun saccordant à reconnaître lanomalie du système antérieur qui avait pour effet la déduction fiscale dune subvention et donc un double coût pour la puissance publique.
Il a proposé détendre à tous les secteurs lagrément, qui concerne actuellement les seuls secteurs sensibles, faisant valoir que cette procédure permet à ladministration de mieux connaître les dossiers et que les professionnels de la défiscalisation, même sils déplorent quelquefois la lenteur des services, défendent tous la procédure dagrément, qui sécurise les investisseurs en raison de lapprobation du montage par ladministration fiscale.
Il a proposé dencourager les investissements des contribuables passibles de limpôt sur les sociétés, dans la mesure où lon peut espérer plus de professionnalisme de leur part et en considérant que le taux de taxation à cet impôt, donc le coût fiscal de la défiscalisation, serait moins élevé. Il a proposé que ces entreprises puissent déduire 100 % de leurs investissements outre-mer en renonçant à labattement du tiers sur les bénéfices taxables réalisés dans ce cadre.
Il a indiqué que le suivi des dossiers agréés et autorisés ne faisait pas lobjet de mesures particulières de la part des services fiscaux, certaines autres administrations étant plus présentes. Il a donc jugé nécessaire de renforcer les contrôles par la mise en place de procédures associant lensemble des services concernés pour le suivi des dossiers, non pas après plusieurs années, mais dès lobtention de la décision dagrément. Il a également préconisé de consulter les élus dans le cadre de lexamen des demandes dagrément.
Enfin, le Rapporteur général a souhaité la prorogation du dispositif après 2001. Il a indiqué que plusieurs interlocuteurs rencontrés outre-mer avaient, en effet, manifesté des inquiétudes sur linstabilité législative affectant le régime de défiscalisation, alors que celui-ci doit prendre fin en 2001.
Il a donc proposé, en même temps que seraient introduites les améliorations précitées, de prolonger ce dispositif, sur plusieurs années, par exemple jusquen 2005, du moins pour ce qui concerne limpôt sur les sociétés et la réduction dimpôt sur le revenu.
En conclusion, le Rapporteur général a expliqué quil avait acquis la conviction quil serait souhaitable de supprimer le mécanisme de déduction des investissements pour les personnes physiques au regard des nécessités de léquité fiscale, mais a fait valoir quune réforme de telle ampleur ne pouvait intervenir sans la mise en place dun système de substitution. Puisque la loi de finances pour 1998 a très opportunément mis fin aux situations les plus choquantes au plan de la morale et les plus discutables quant à lefficacité économique, il a jugé pertinent de consolider ces avancées et de prolonger le système dincitation fiscale à linvestissement outre-mer au-delà de 2001.
M. Philippe Auberger a exprimé son profond désaccord avec lanalyse développée par le Rapporteur général, ainsi quavec les conclusions de son rapport, quil a jugé décevantes.
Il a considéré, en premier lieu, que la question centrale aurait dû être dévaluer les effets économiques de la « loi Pons » et notamment son impact sur lemploi. Il a constaté que, malheureusement, ce sujet nétait traité que de façon incidente dans le rapport présenté à la Commission des finances. Il a indiqué avoir observé quen Nouvelle-Calédonie, certains investissements nont été développés quà partir du moment où la « loi Pons » a été appliquée dans ce territoire, ce qui démontre a contrario son efficacité.
Il sest par ailleurs interrogé sur les raisons pour lesquelles ladministration fiscale na jamais accepté la « loi Pons », dont la mise en oeuvre a exigé une volonté politique forte. Il a considéré quil aurait été intéressant de se demander pourquoi la direction générale des impôts est hostile à ce mécanisme.
Il a ensuite exprimé son hostilité à lidée de remplacer une partie des aides fiscales par des subventions. Il a jugé cette orientation rétrograde, considérant quil était préférable dutiliser les mécanismes du marché et linstrument fiscal pour le développement des investissements dans les DOM-TOM, même si, par nature, ces aides concernent davantage les plus hauts contribuables et nuisent à la progressivité de limpôt sur le revenu.
Sagissant de la tunnelisation, il a admis que le cumul de la déductibilité des investissements et des déficits pouvait sembler excessif, mais il a observé que la rentabilité des investissements outre-mer était toujours aléatoire ou à long terme et que la prise en charge des déficits originels était indispensable pour la réalisation des investissements. Il a estimé que la tunnelisation allait sans aucun doute se traduire par une contraction des projets, notamment dans lhôtellerie, ainsi que dans les transports aériens en Polynésie. Il a observé que cette mesure nétait pas indispensable à la moralisation de la « loi Pons », que la précédente majorité avait déjà engagée en mettant en place, en 1996, une procédure dagrément qui est sans doute trop récente pour que lon puisse juger de son efficacité.
Il a admis que les coûts dintermédiation des investissements en outre-mer étaient élevés, mais il a remarqué que le Rapporteur général ne prenait pas suffisamment en compte la particularité des projets dans les DOM-TOM. Il a rappelé que ces investissements nétaient pas financés par lépargne ordinaire et quils impliquaient donc des frais dapproche spécifiques.
M. Philippe Auberger a finalement considéré que linstabilité de la loi fiscale avait eu des effets très négatifs sur les investissements dans les DOM-TOM et quil était préférable de cesser de modifier chaque année un dispositif qui peut certainement être amélioré, mais qui a prouvé son efficacité.
M. Gilbert Gantier a déclaré, de façon liminaire, quun grand nombre dobservations du rapport correspondaient effectivement à des situations rencontrées lors du déplacement de la mission aux Antilles et en Guyane. Il a ajouté quil était difficile de souhaiter le développement des investissements dans les DOM-TOM sans admettre quelques dérogations à la règle de la progressivité de limpôt sur le revenu.
Sagissant des modalités du soutien aux investissements, il a lui aussi critiqué lidée de remplacer certaines aides fiscales par des subventions attribuées par des administrations, qui ne font pas forcément les meilleurs choix économiques. Il a observé que, par définition, les personnes qui choisissent dinvestir dans les DOM-TOM sont des contribuables aisés. Il a également considéré que, sil était toujours possible daméliorer le mécanisme de la « loi Pons », par exemple en renforçant le suivi des dossiers, il était essentiel de garantir la stabilité dun dispositif qui a déjà fait lobjet de trop nombreuses modifications. Il a jugé à cet égard que la tunnelisation avait porté atteinte à son efficacité, soulignant que la rentabilité des investissements dans les DOM-TOM est effectivement souvent à échéance lointaine.
Le Rapporteur général, estimant excessifs certains propos tenus par M. Philippe Auberger, a tenu à dissiper plusieurs malentendus. Il a rappelé, en premier lieu, quil ne remettait pas en cause le régime de défiscalisation simple et, en second lieu, quil considérait inopportun de revenir sur la tunnelisation, puisque dautres mécanismes que la fiscalité, tels les fonds de garantie ou lintervention de sociétés de développement, peuvent se révéler adaptés à certains secteurs spécifiques où la tunnelisation a pu susciter des difficultés.
Répondant à M. Gilbert Gantier, il a précisé que les activités industrielles ne sont pas affectées par la tunnelisation, comme lont démontré les visites effectuées lors des missions dans les départements doutre-mer.
Il a rappelé quil était favorable à la stabilité législative pour mettre fin aux effets anti-économiques des changements annuels de la législation. Il a fait valoir lintérêt de louverture quil propose au titre de limpôt sur les sociétés. Il a enfin indiqué que le rapport ne pouvait prétendre estimer les effets économiques de la « loi Pons », dans la mesure où cette estimation est très difficile à réaliser, compte tenu de la modestie de la part des aides liées à la défiscalisation dans lensemble des aides accordées à loutre-mer.
M. Gilbert Gantier a souhaité pouvoir annexer quelques observations au rapport du Rapporteur général.
Le Rapporteur général a accepté cette demande.
Usant de la faculté que lui donne larticle 38, alinéa premier, du Règlement, M. Camille Darsières a tout dabord tenu à indiquer que les élus doutre-mer avaient particulièrement apprécié les conditions dans lesquelles avaient eu lieu les déplacements des membres de la mission de la Commission des finances dans plusieurs départements doutre-mer. Il a constaté que lesprit du rapport se différenciait de celui qui avait prévalu lors de lexamen du projet de loi de finances pour 1998, qui visait à supprimer le mécanisme de la « loi Pons ». Il a noté que, désormais, la nécessité dun statut fiscal particulier, certes maîtrisé, en faveur de loutre-mer était reconnue, compte tenu des difficultés économiques rencontrées par ces territoires, dont il a indiqué quils comptaient deux fois plus de chômeurs chez les jeunes diplômés quen métropole.
Concernant la première proposition du rapport, visant à substituer une structure souple de financement au mécanisme permettant la déduction de linvestissement de leurs revenus imposables pour les personnes physiques, il a exprimé sa crainte que le ministère de léconomie, des finances et de lindustrie ne profite de cette occasion pour mettre en place un dispositif ne répondant pas au souhait du Rapporteur général, ni aux besoins de loutre-mer. Il a, cependant, indiqué que les autres propositions étaient très intéressantes, notamment celle tendant à prolonger lapplication du dispositif au-delà de 2001, qui devrait donner aux investisseurs une plus grande visibilité. Sagissant de la proposition tendant à renforcer le contrôle administratif sur les investissements défiscalisés, il a proposé la création de cellules locales comprenant des élus et des fonctionnaires, ayant pour mission de donner un avis, avant la délivrance de lagrément, sur la pertinence économique et sociale de linvestissement.
Il a enfin remarqué que nombre dinvestissements susceptibles de bénéficier dune défiscalisation navaient pas pu être réalisés jusquà présent, car plusieurs entrepreneurs locaux navaient ni les moyens, ni les compétences pour sintégrer au système. Il a ainsi regretté que la Martinique ne puisse mieux subvenir à ses besoins, pour les agrumes ou les produits de la pêche, par exemple.
M. Jean Tardito sest déclaré satisfait que la Commission continue à aborder les problèmes de loutre-mer en tenant compte de ses difficultés particulières. Il a néanmoins observé que lencouragement de linvestissement ne devait pas conduire à réduire la progressivité, déjà insuffisante, de limpôt sur le revenu.
Usant de la faculté que lui donne larticle 38, alinéa premier, du Règlement, M. Gérard Grignon a estimé dangereux de maintenir la suppression de la remontée des déficits pour les investissements à long terme, tels que les investissements hôteliers. Il a réaffirmé la nécessité de la stabilité législative et a insisté sur le rôle majeur des personnes physiques dans les investissements outre-mer. Il a notamment précisé que, compte tenu des conventions fiscales conclues avec les TOM, des mesures défavorables aux personnes physiques pénaliseraient les départements doutre-mer par rapport aux territoires doutre-mer. Après avoir souligné lintérêt de la proposition du Rapporteur général tendant à prolonger le dispositif au-delà de 2001, il a regretté que le rapport ninsiste pas suffisamment sur les créations demplois, tant outre-mer quen métropole, résultant des opérations défiscalisées. Il a ainsi cité lexemple dun chantier naval de Saint-Malo qui a pu, grâce à la commande dun navire de croisière destiné à Saint-Pierre-et-Miquelon, maintenir son activité pendant un an et demi et obtenir de nouvelles commandes.
M. Michel Buillard, usant de la même faculté, a constaté que loutre-mer servait la grandeur de la France, comme venait de le prouver le rôle éminent joué par ses ressortissants dans la qualification de léquipe de France de football pour la finale de la Coupe du monde. Il a ensuite noté une tonalité du rapport plus favorable que les opinions exprimées lors de lexamen du projet de loi de finances pour 1998. Il a également rappelé que, grâce à la « loi Pons », la Polynésie avait créé 3.600 emplois depuis 1996, dans un contexte marqué par la réduction des transferts financiers liés au site dexpérimentation nucléaire.
Approuvant pleinement ces propos, le Rapporteur général a déclaré que la France ne serait pas la France sans loutre-mer. Il a estimé, en conséquence, quil convenait de se doter des moyens de développer les régions doutre-mer, dont les spécificités légitiment un régime dérogatoire, composante dune politique daménagement du territoire efficace. Il a jugé que lexpression de « défiscalisation maîtrisée », employée par M. Camille Darsières, sappliquait fort justement aux mesures adoptées dans la loi de finances initiale pour 1998 ainsi quaux propositions présentées dans le rapport soumis à lexamen de la Commission des finances. Il a insisté sur la nécessité de mieux associer les élus locaux aux projets dinvestissements, afin que leurs priorités puissent sexprimer, sans pour autant retarder le calendrier de la procédure dagrément. Réaffirmant que revenir sur la tunnelisation ne serait pas une bonne solution, il a souhaité que ladaptation nécessaire, pour chaque département ou territoire, de laide fiscale à linvestissement outre-mer se fasse par le biais de dispositifs daccompagnement du régime de la défiscalisation simple.
Le Rapporteur général a tenu à souligner laccueil très positif qui a été réservé à la mission dinformation de la Commission des finances. Il sest dit favorablement impressionné par lesprit positif manifesté par de nombreux entrepreneurs et investisseurs rencontrés sur place, et a fait état de plusieurs projets économiques réussis grâce au régime fiscal dérogatoire instauré par la « loi Pons ». Il a enfin souligné la nécessité de donner plus de stabilité au dispositif de défiscalisation des investissements outre-mer, de trop nombreuses modifications ayant pu nuire, dans le passé, aux objectifs mêmes de ce dispositif.
La Commission a ensuite autorisé la publication du rapport dinformation.
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La Commission a ensuite procédé à lexamen du rapport dinformation présenté, en application de larticle 145 du Règlement, par M. Didier Migaud, Rapporteur général, sur lapplication des dispositions fiscales contenues dans les lois de finances.
Le Rapporteur général a tout dabord rappelé quil sagissait du neuvième rapport de ce genre, qui sinscrit pleinement dans le cadre du souhait manifesté par M. Laurent Fabius, Président de lAssemblée nationale, dans son allocution de fin de session prononcée le 30 juin dernier, de voir la représentation nationale se consacrer davantage à la vérification de la bonne application des lois. Il a estimé que la satisfaction de cet objectif reposait largement sur laction des parlementaires, en particulier dans le domaine de compétence de la commission, où le contrôle exercé par les rapporteurs spéciaux doit être complétée par la vérification de la bonne application de la loi fiscale.
Il a précisé que son rapport sattache plus à lexamen des conditions juridiques de lapplication des dispositions fiscales quà lévaluation de ces dispositions et de leur efficacité. Il a souligné lintérêt du dialogue qui est ainsi établi avec ladministration fiscale, dialogue dont la qualité devrait inciter à nuancer les appréciations souvent négatives portées sur cette administration et ses relations avec le Parlement. Il a remarqué que le nombre des instructions administratives publiées, cette année, au mois de juin, à la veille de la présentation de son rapport, illustre bien le rôle daiguillon que peut jouer à cet égard la représentation nationale.
Le Rapporteur général a précisé que, conformément à la méthode retenue dans le cadre des précédents travaux de la Commission des finances, son rapport portait dabord sur le suivi des dispositions fiscales adoptées dans les lois de finances et dans la loi n° 96-314 du 12 avril 1996 portant diverses dispositions dordre économique et financier, et qui, à la date du 30 juin 1997, navaient pas encore fait lobjet des textes dapplication nécessaires, ainsi que sur les dispositions fiscales contenues dans la loi de finances rectificative de 1997, la loi de finances initiale pour 1998 et la loi du 10 novembre 1997 portant mesures urgentes à caractère fiscal et financier, analysant ainsi, au total, les conditions dapplication de 136 articles contenus dans quatorze lois promulguées entre le 30 décembre 1991 et le 30 décembre 1997.
Le Rapporteur général a indiqué que, sur les 136 dispositions fiscales prises en compte, 34, soit un quart, étaient encore en attente de texte dapplication. Il a relevé une amélioration relative par rapport aux années antérieures, cette proportion étant de 31% au 30 juin 1997 et de 56% au 30 juin 1996, mais de 23% seulement au 30 juin 1995. Il a cependant noté que, dans certains cas, le défaut de publication de texte dapplication était lié au caractère lointain de la date à laquelle la mesure en cause sera effectivement applicable.
Reconnaissant que le défaut de publication de telles instructions ne signifiait pas nécessairement que la mesure législative concernée nest pas en état dêtre effectivement appliquée, du moins dans ses dispositions essentielles, il a cependant estimé que, sur le terrain, les administrations attendaient souvent davoir communication de lensemble des textes dapplication dune loi - décrets, arrêtés, mais aussi, et parfois même surtout, instructions et circulaires - pour la mettre en oeuvre. Il a indiqué quen matière fiscale, la technicité des mesures mises en oeuvre, leur caractère sensible et leur foisonnement, conduisaient fréquemment ladministration à développer et à rendre publique ce quil est convenu dappeler sa « doctrine ». Il a jugé, à cet égard, que le manque de transparence qui est fréquemment reproché à ladministration des finances était souvent plus notable dans les autres administrations. Présentant, à titre dexemple, le cas de larticle 90 de la loi de finances initiale pour 1996, relatif aux modalités de neutralisation au regard de la contribution de solidarité des sociétés, de certaines opérations, il a relevé que les difficultés dapplication avaient été réglées, de façon rien moins que transparente, par un simple échange de lettres, non public, entre le directeur de la sécurité sociale et le directeur dun organisme gestionnaire.
Le Rapporteur général a tenu à saluer leffort de rattrapage réalisé par les administrations depuis son précédent rapport, puisque sur les 56 articles - parfois anciens - qui restaient en souffrance au 30 juin 1997, 32 ont fait lobjet dun texte dapplication. Il a souligné, en particulier, que larticle 107 de la loi de finances pour 1993 mesure destinée à renforcer la lutte contre lévasion fiscale grâce à une adaptation du dispositif de taxation des résultats des filiales situées dans des paradis fiscaux avait enfin fait lobjet dune instruction dapplication en date du 17 avril 1998, après quil eut, lan passé, comme son prédécesseur, regretté que cet article restât lettre morte.
Il a cependant déploré que 18 mesures votées antérieurement au 31 décembre 1996 dont la plus ancienne remonte à 1991 soient encore en attente de textes dapplication. A cet égard, il a estimé que, lorsque la consultation des milieux professionnels ou les divergences de vues entre services aboutissent à une telle paralysie, il revenait à lautorité compétente de prendre ses responsabilités et de trancher.
Citant larticle 39 de la loi portant diverses dispositions dordre économique et financier du 12 avril 1996 (obligation dinformation sur la constitution du prix des transactions avec des entreprises étrangères), il a jugé le retard constaté dautant plus dommageable quil sapplique à une disposition importante de contrôle fiscal ayant pour objet dempêcher les entreprises situées en France de transférer des bénéfices à des entreprises non résidentes par le biais de manipulations des prix dachat ou de vente. Il a déclaré attendre du ministère de léconomie, des finances et de lindustrie que le délai qui lui a été annoncé pour la publication dune instruction dapplication (courant juillet 1998) soit effectivement tenu. Il a regretté par ailleurs que, malgré les efforts accomplis pour lapplication des deux lois de finances promulguées fin décembre 1996 avec la publication de textes dapplication concernant 22 articles de la loi de finances rectificative pour 1996 et de la loi de finances initiale pour 1997 dix articles de ces deux lois soient encore, après 18 mois, en attente de texte dapplication.
Sagissant des lois les plus récentes, le Rapporteur général sest félicité dune nouvelle amélioration par rapport à la situation décrite les années précédentes. Il a en effet indiqué que, sur les 60 dispositions fiscales contenues dans la loi de finances initiale pour 1998, les trois quarts (46) étaient pleinement en application au 30 juin 1998, soit que cette application ne nécessite pas, selon ladministration, de dispositions particulières (9 articles), soit que les textes dapplication nécessaires aient déjà été pris (37 articles). Il a rappelé quau 30 juin 1997, cette proportion atteignait tout juste les deux tiers pour les 66 dispositions fiscales contenues dans la loi de finances initiale pour 1997. Il a salué, en particulier la publication rapide des textes dapplication de dispositions dimportance et parfois complexes comme la réduction du taux de TVA applicable aux travaux damélioration réalisés dans les logements sociaux (article 14 de la loi de finances initiale pour 1998) ou bien aux médicaments bénéficiant dune autorisation temporaire dutilisation (article 34 de la loi de finances rectificative pour 1997). Il sest pareillement réjoui de la diligence apportée à lapplication de la disposition instituant un crédit dimpôt pour création demploi (article 81 de la loi de finances initiale pour 1998), ainsi que de la publication, le 13 mars 1998, de linstruction administrative annoncée par le secrétaire dEtat au budget, en réponse à un amendement de M. Raymond Douyère accepté par la Commission des finances, relative à lévaluation forfaitaire des frais kilométriques des contribuables utilisant des motocyclettes.
Le Rapporteur général a ensuite évoqué le fond des mesures dapplication arrêtées par ladministration, en constatant les mêmes errements que par le passé, avec des cas où quelque liberté a été prise avec la loi. Il a plus particulièrement cité, sans prétendre à lexhaustivité, larticle 8 de la loi de finances initiale pour 1998, modifiant le régime dimposition des parts ou actions dorganismes de placement collectif en valeurs mobilières détenues par les sociétés dassurances, dont linterprétation administrative était à ce point en délicatesse avec la loi que celle-ci a dû être rapidement modifiée par larticle 39 de la loi du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions dordre économique et financier. Il a estimé que de telles situations nétaient pas saines et pouvaient être porteuses de graves inconvénients, comme lont montré les développements récents du dossier dit des « fonds turbo ».
Le Rapporteur général a jugé inévitable que lexamen des conditions dapplication de la loi fiscale, auquel se livre chaque année la Commission des finances, conduise à mettre laccent sur certains errements ou dysfonctionnements. Il a, cependant, mis en garde contre des conclusions trop hâtives, ce qui relève nécessairement du florilège nétant pas nécessairement symptomatique dune situation préoccupante de « maladministration ». Au contraire, il a jugé que, globalement, les administrations fiscales, dans leurs instructions, commentaient et appliquaient précisément et loyalement les dispositions adoptées par le législateur, et que, dans un certain nombre de cas, les retards constatés traduisaient de réelles difficultés dapplication. Il a souligné que la responsabilité de ces retards était dailleurs partagée, incombant parfois aux parlementaires, auteurs damendements inapplicables en létat. Il a indiqué que, dans dautres cas, la responsabilité pesait largement sur le Gouvernement, comme le montrait le cas de larticle 83 de la loi de finances pour 1998, relatif au paiement de la TVA dans le cadre du travail à façon, pour lequel ladministration semble quelque peu peiner à définir les modalités dapplication dune rédaction imposée par le Gouvernement malgré lavis défavorable de la Commission des finances.
Il a considéré quen définitive le législateur devait tirer les leçons de cette situation et faire un effort dautocritique, en rompant avec une propension certaine à l« inflation législative », qui conduit à une prolifération de textes dont la préparation, ladoption, puis la mise en uvre sont de plus en plus difficiles à assurer dans des conditions satisfaisantes.
Le Rapporteur général a rappelé quil sétait, lan passé, félicité des prescriptions présentées dans la circulaire du Premier ministre, en date du 6 juin 1997, relative à lorganisation du travail gouvernemental, en vue daméliorer la qualité de la législation, prévoyant, en particulier, daccorder au Parlement « des délais dexamen... sensiblement plus importants que ceux qui ont été observés au cours des années passées ». Il a reconnu que les circonstances ne lavaient guère permis pour les lois de finances examinées à lautomne 1997. Il a rappelé que des progrès étaient annoncés pour lautomne prochain, qui seraient bienvenus du point de vue de la lisibilité et de lapplicabilité de la législation, observant en conclusion que le temps népargne guère ce qui se fait sans lui.
M. Philippe Auberger a estimé que le rapport établi chaque année par la Commission des finances sur lapplication des dispositions fiscales était une uvre utile et nécessaire, et que trop peu de commissions réalisaient un travail similaire de contrôle de lapplication des lois, dans leur champ de compétence respectif. Il a fait valoir que, si lon devait saluer leffort sensible accompli par les administrations pour pourvoir en temps utile à la publication des textes dapplication nécessaires, il convenait surtout de réduire le nombre des dispositions fiscales adoptées chaque année. Prenant exemple de « lembonpoint » croissant, au fil des lectures successives, du dernier projet de loi portant diverses dispositions dordre économique et financier, il a souligné que le législateur noffre guère de visibilité aux agents économiques. Il sest ensuite demandé sil ne serait pas utile de compléter le contenu actuel du rapport par une analyse cursive des décisions les plus importantes prises en matière de fiscalité par le Conseil dÉtat et la Cour de Cassation.
Le président Augustin Bonrepaux a estimé que, trop souvent, les administrations nétaient pas facilement disposées à donner des informations sur certaines dispositions. fiscales. Sagissant par exemple du crédit dimpôt pour dépenses dentretien de lhabitation principale (article 74 de la loi de finances pour 1998), il sest interrogé sur la publicité donnée à une disposition dautant plus importante quelle concerne également les personnes non imposables à limpôt sur le revenu.
Notant que la disposition concernée sappliquerait effectivement à partir de 1999 pour les travaux effectués dès 1998, le Rapporteur général a précisé que linstruction dapplication avait été récemment publiée. Il a ensuite jugé pertinente la proposition de M. Philippe Auberger visant à étendre le champ du rapport annuel de la Commission des finances aux interprétations jurisprudentielles les plus significatives de la loi fiscale. Il a souligné, à cet égard, que le législateur pouvait parfois éprouver quelque difficulté à discerner dans les motivations des juges ce qui y est présenté comme la manifestation de sa volonté.
La Commission a ensuite autorisé la publication du rapport dinformation.
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Information relative à la Commission
La commission des Finances, de lÉconomie générale et du Plan a nommé M. Daniel Feurtet, rapporteur spécial des taxes parafiscales, sur le projet de loi de finances pour 1999.
fpfp
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