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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION des LOIS CONSTITUTIONNELLES,
de la LÉGISLATION et de l’ADMINISTRATION GÉNÉRALE
de la RÉPUBLIQUE

COMPTE RENDU N° 37

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 9 mars 1999
(Séance de 16 heures 15)

Présidence de Mme Catherine Tasca, présidente

SOMMAIRE

 

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– Audition de Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice, sur le projet de loi renforçant la protection de la présomption d’innocence et les droits des victimes (n° 1079) (Mme Christine Lazerges, rapporteur)

– Projet de loi renforçant la protection de la présomption d’innocence et les droits des victimes (n° 1079) (discussion générale)



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La Commission a procédé à l’audition de Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice, sur le projet de loi renforçant la protection de la présomption d’innocence et les droits des victimes (n° 1079) (Mme Christine Lazerges, rapporteur).

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice, a d’abord souligné que le projet de loi s’inscrivait dans la réforme d’ensemble de la justice, annoncée par le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale, qui a pour triple objectif de rendre la justice plus proche des citoyens, plus respectueuse des libertés individuelles et plus indépendante. Après avoir constaté que la réalisation de cette réforme était bien avancée, l’ensemble des projets de loi ayant été déposés sur les bureaux des assemblées, elle s’est félicitée que le premier à avoir été adopté soit celui relatif à l’accès au droit, devenu la loi du 18 décembre 1998, qui tend à renforcer la justice de proximité et à l’adapter aux besoins des Français. A ce titre, elle a précisé que, si seulement 16 maisons de la justice et du droit fonctionnaient avant juin 1997, 18 avaient été ouvertes depuis lors, dont 7 depuis le 1er janvier dernier, tandis que 41 projets étaient en cours d’examen. Elle a poursuivi, toujours sur le thème de la justice de proximité, en rappelant qu’un décret du 28 décembre 1998 réformant la procédure civile concourrait à l’accélération du règlement des litiges entre particuliers. Elle a également évoqué le projet de loi sur la simplification de la procédure pénale qui, après son adoption en première lecture par le Sénat, doit être examiné par l’Assemblée nationale le 23 mars prochain, soulignant que ce projet était de nature à apporter une réponse aux infractions de petite et de moyenne délinquance, à accélérer les affaires pénales et à faciliter l’entraide internationale en matière répressive. S’agissant du deuxième volet de la réforme de la justice, destiné à rendre la justice plus respectueuse des libertés, elle a rappelé qu’outre le présent projet, la loi du 17 juin 1998 sur la prévention de la délinquance sexuelle assurait une meilleure protection des victimes, notamment mineures. Quant au renforcement de l’indépendance de la justice, après avoir rappelé que le projet de loi constitutionnelle sur le Conseil supérieur de la magistrature, adopté en termes conformes par les deux assemblées depuis le mois de novembre 1998, était en attente d’approbation par le Congrès, elle a confirmé que le projet de loi sur les relations entre le parquet et la chancellerie serait débattu avant l’été en première lecture à l’Assemblée nationale. Elle a constaté qu’à peine plus d’un an et demi après l’annonce de la réforme, sa réalisation ne souffrait d’aucun retard par rapport au calendrier sur lequel le Gouvernement s’était engagé, les deux projets relatifs à la procédure pénale, en particulier, devant être examinés en première lecture d’ici l’été, de sorte que rien ne s’oppose à une convocation rapide du Congrès sur la réforme constitutionnelle.

Abordant ensuite la présentation générale du projet de loi, elle en a souligné l’orientation prioritaire en faveur de tous les justiciables. Elle a appelé l’attention de la Commission sur l’action en faveur des droits des victimes, à ses yeux trop longtemps oubliées dans le procès pénal, les plus démunis étant les premiers concernés. Elle a fait part du souhait du Gouvernement que les victimes soient mieux protégées dans leur dignité, puissent plus facilement obtenir une indemnisation durant le procès et disposent, au cours de la procédure, des mêmes droits que l’accusation et la défense. Afin d’améliorer la situation des personnes mises en cause, elle a précisé que le projet de loi tendait à limiter la détention provisoire, à éviter les atteintes à la présomption d’innocence, à réduire la durée des procédures et des détentions. Elle a rappelé que, chaque année, plus de 300 000 personnes étaient placées en garde à vue.

La garde des sceaux a ensuite insisté sur trois des choix du Gouvernement : elle a d’abord souligné le maintien et même le renforcement du juge d’instruction, illustré par la mise en place de pôles financiers, ajoutant qu’il se trouvait conforté dans son rôle d’arbitre neutre entre les parties ; elle a également mentionné la confirmation de la nature inquisitoire de notre procédure pénale, plus égalitaire que la procédure accusatoire qui favorise injustement les plus riches ; enfin, elle a évoqué la réaffirmation d’une conception du procès pénal fondée sur la déclaration des droits de l’homme et la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme. Avant d’aborder la présentation détaillée de ses dispositions, elle a souligné que le projet de loi était un texte d’équilibre : entre l’efficacité de l’enquête et les droits des parties au procès, entre les droits des personnes mises en cause et ceux des victimes, entre la liberté d’expression et le respect de la présomption d’innocence à tous les stades de la procédure, la proposition de la Commission présidée par M. Pierre Truche tendant à interdire la publication du nom des personnes mises en cause ayant été écartée dans le souci du respect du droit de l’information.

Parmi les dispositions destinées à une meilleure prise en compte du principe de présomption d’innocence, la ministre a d’abord présenté celles renforçant les droits de la défense et le respect du contradictoire : elle a ainsi évoqué l’intervention de l’avocat dès la première heure de la garde à vue, sauf dans les cas de criminalité ou de délinquance organisées, alors qu’actuellement, moins de 10 % des personnes gardées à vue peuvent s’entretenir avec un avocat, l’extension, en cours d’instruction, des droits des parties, qui pourront demander au juge tous les actes nécessaires, certains pouvant être effectués en présence de leur avocat, et l’amélioration de la procédure du témoin assisté, qui ouvre le bénéfice des droits de la défense sans mise en examen. Elle a ensuite indiqué que, pour renforcer les garanties en matière de détention provisoire, qui devrait devenir réellement exceptionnelle, le projet de loi confiait au juge de la détention provisoire la responsabilité de décider des placements en détention, de leurs prolongations et des suites à donner aux demandes de mise en liberté, de sorte que l’accord de deux magistrats soit nécessaire avant toute détention provisoire. Elle a ajouté qu’étaient revues les conditions de placement en détention provisoire en matière correctionnelle, ainsi que la durée de l’ensemble des détentions provisoires, l’indemnisation des détentions provisoires injustifiées étant améliorée. Elle a ensuite indiqué que le projet de loi renforçait le droit à être jugé dans un délai raisonnable, grâce à un contrôle de la durée des enquêtes et des instructions, et tendait à mieux répondre aux atteintes à la réputation d’une personne du fait de sa mise en cause au cours d’une procédure judiciaire, deux nouveaux délits étant créés, celui de publication de l’image d’une personne menottée ou entravée et celui de réalisation ou diffusion de sondages sur la culpabilité d’une personne poursuivie. Elle a enfin évoqué les dispositions relatives aux communiqués du procureur de la République, aux possibilités de débat contradictoire et public en cours de procédure, ainsi qu’au droit de réponse.

Présentant en second lieu le volet relatif à l’amélioration de la situation des victimes d’infraction pénale, la ministre de la justice a indiqué que le principe selon lequel l’autorité judiciaire doit veiller, tout au long de la procédure, à la garantie des droits des victimes serait inscrit en tête du code de procédure pénale. Elle a évoqué la consécration législative du rôle joué par les associations d’aide aux victimes, les modifications permettant d’éviter aux victimes de se déplacer lors du procès, ainsi que la création de nouveaux délits, en cas de publication de l’image d’une victime dans des conditions portant atteinte à sa dignité et de publication de l’identité d’une victime mineure.

La garde des sceaux a, en conclusion, rappelé que les idées forces du projet de loi étaient de rendre plus responsables les différents acteurs du procès pénal – sans que cet objectif ne témoigne d’aucune défiance à leur encontre – et de concilier de façon équilibrée les libertés individuelles avec les nécessités de la répression. Elle a donc annoncé son attitude très réservée sur toute modification tendant à déséquilibrer notre droit. En revanche, elle a indiqué qu’elle attendait avec intérêt les propositions de la Commission et considéré qu’un accord pourrait sans doute être trouvé sur de nombreuses améliorations envisagées par le rapporteur, qu’il s’agisse de la garde à vue, de la mise en examen, du témoin assisté, de la durée de détention provisoire des primo-délinquants, du débat contradictoire pour toute prolongation de détention correctionnelle ou des délais d’audiencement pour les détenus correctionnels.

Mme Christine Lazerges, rapporteur, a considéré que le projet de loi réformait en profondeur la procédure pénale, renforçait l’Etat de droit et ménageait un équilibre subtil entre les nécessités de l’action publique et la préservation des libertés individuelles. Elle a estimé que la présomption d’innocence, toujours fragile, sortirait renforcée de cette réforme, tout comme les droits des victimes, dont la prise en compte est très récente et qui sont insuffisamment garantis. Elle a indiqué que les amendements qu’elle proposerait à la Commission seraient fondés sur le souci de renforcer en parallèle les droits des victimes et ceux des personnes poursuivies.

M. Robert Pandraud a jugé déplorable, sur le plan des libertés individuelles, que des procédures puissent être déclenchées par des lettres anonymes et a regretté que le projet de loi n’interdise pas aux magistrats de prendre en compte cette source d’informations.

Considérant que la France avait encore beaucoup de progrès à faire dans le domaine des droits de la défense, comme le lui rappelle régulièrement la Cour européenne des droits de l’homme, M. Philippe Houillon a estimé que le projet allait dans le sens d’une amélioration. Toutefois, il a regretté que le parquet reste une partie au procès pénal disposant de prérogatives exorbitantes, précisant que sa préférence allait à la création de deux corps distincts de juges et de procureurs. Il a souhaité savoir quel souci d’efficacité, évoqué par l’exposé des motifs du projet, justifiait que, dans certaines hypothèses, l’avocat ne puisse pas intervenir avant la trente-sixième heure. Il a considéré que cette dérogation jetait un discrédit sur les avocats, en laissant présumer qu’ils pourraient avoir des contacts avec les complices de la personne gardée à vue. Par ailleurs, il a proposé que le juge de la détention provisoire soit saisi par le parquet, plutôt que par le juge d’instruction, afin qu’il n’y ait pas de risque de préjugement. Enfin, il s’est interrogé sur l’applicabilité de la réforme dans les tribunaux comptant peu de magistrats.

M. Claude Goasguen a estimé que le projet était globalement positif, tout en souhaitant que des amendements puissent accentuer sa dimension libérale, afin que les personnes mises en examen en France bénéficient des mêmes garanties que celles accordées dans les autres pays européens. Il a souhaité que cette réforme soit l’occasion d’une réflexion sur la place du juge d’instruction dans la procédure pénale, afin de limiter les excès de pouvoir qui peuvent lui être reprochés. Il a, notamment, suggéré que les ordonnances du juge d’instruction soient systématiquement motivées et puissent toujours faire l’objet d’un appel, voyant là un progrès considérable pour la défense et pour les libertés en général. Enfin, il s’est interrogé sur les moyens supplémentaires dégagés pour la mise en œuvre de la réforme, exprimant la crainte que la création d’un juge de la détention provisoire ne se solde par de vives déceptions, après avoir suscité de grands espoirs.

M. Alain Tourret a indiqué qu’il déposerait des amendements tendant à améliorer ponctuellement le projet de loi, qu’il a jugé profondément novateur. Il a notamment souhaité que les préoccupations des victimes, souvent mal traitées pendant l’instruction et le procès pénal, soient mieux prises en compte, en prévoyant, par exemple, le rappel dans toute décision judiciaire de la possibilité de saisir la commission d’indemnisation des victimes d’infractions pénales. Il a également jugé nécessaire qu’un effort soit fait pour améliorer les conditions dans lesquelles sont traités les prévenus – notamment en cas de renouvellement de la garde à vue – et que le bénéfice des dispositions relatives à l’enregistrement des dépositions des mineurs victimes de sévices sexuels soient étendues aux mineurs gardés à vue. Par ailleurs, il a regretté que le projet ne reprenne pas les dispositions relatives à la détention provisoire contenues dans sa proposition de loi adoptée le 3 avril 1998 par l’Assemblée nationale. Sans remettre en cause le principe de la procédure inquisitoriale, il a regretté que le projet de loi n’aille pas plus loin dans la séparation des compétences du juge de l’enquête et du juge de la détention et des libertés, souhaitant que ce dernier soit également compétent en matière de contrôle judiciaire, afin d’éviter des chevauchements de compétences entre les deux juges. Enfin, il s’est interrogé sur l’opportunité de confier la saisine du juge de la détention provisoire au ministère public plutôt qu’au juge d’instruction.

Soulignant qu’il appréciait l’effort, notamment budgétaire, entrepris par le Gouvernement en matière de réforme de la justice, M. André Gerin a indiqué que son groupe soutiendrait le projet de loi qu’il jugeait positif, même s’il n’allait pas aussi loin qu’il l’aurait souhaité. Il a considéré que la crédibilité de la réforme supposait qu’elle permette de faire reculer le sentiment d’impunité, tout en garantissant, parallèlement, les droits des personnes et la protection de la vie privée. Il a regretté que les efforts en faveur des victimes soient insuffisants. Enfin, il s’est demandé s’il n’aurait pas été souhaitable d’approfondir la réflexion sur la collégialité en matière de placement en détention provisoire, précisant qu’il y était favorable.

M. Gérard Gouzes a d’abord déclaré qu’il jugeait le projet de loi équilibré. Il s’est félicité que l’intervention de l’avocat dès la première heure de garde à vue ne suscite plus de débat. Puis il a insisté sur la question de la durée de la détention provisoire et de celle de l’instruction, soulignant qu’en l’état actuel des choses elles étaient très excessives. Il a ensuite souhaité obtenir des précisions sur les moyens financiers qui seront dégagés pour permettre la mise en place du juge de la détention, sans laquelle la réforme serait vidée de tout contenu. Enfin, il a regretté que les décisions de la Commission d’indemnisation des détentions provisoires ne soient pas susceptibles d’appel.

Après avoir exprimé son approbation sur les dispositions du projet de loi qui tendent à améliorer les droits des victimes, M. Michel Hunault a, en revanche, estimé que, sur d’autres volets du texte, de nombreux problèmes restaient en suspens. Il a ainsi évoqué la question de la détention provisoire, notamment pour les délits mineurs, insistant sur ses conséquences en termes de surpopulation carcérale. A cet égard, il a considéré que les solutions retenues dans la proposition de loi de M. Alain Tourret tendant à limiter la détention provisoire, adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture, étaient intéressantes, ajoutant qu’elles mériteraient d’être prises en compte lors de la discussion du projet de loi. Il a, par ailleurs, souligné que la publicité donnée à certaines affaires soulevait le problème du respect de la présomption d’innocence et estimé que, sur ce point, le projet de loi n’apportait pas de solutions satisfaisantes. Souhaitant enfin qu’un débat ait lieu sur la prescription du délit d’abus de bien social, il a annoncé son intention de défendre un amendement sur ce sujet.

Mme Frédérique Bredin a estimé qu’en défendant à la fois la présomption d’innocence et le droit des victimes, le projet de loi soumis à la Commission constituait un texte important pour les libertés publiques. Elle a souligné le caractère innovant dans la procédure pénale des dispositions relatives aux droits des victimes, rappelant que le seul précédent en la matière était la loi relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu’à la protection des mineurs du 17 juin 1998. Elle a, par ailleurs, estimé qu’il existait en France un décalage entre les idéaux des droits de l’homme, hérités des grands principes de la Révolution française, et la réalité des commissariats, dans lesquels se déroulent chaque année 350.000 gardes à vue, et des prisons, qui abritent 20 000 prévenus. Rappelant que la France avait fait l’objet de nombreuses condamnations sur ces questions devant la Cour européenne des Droits de l’Homme, elle a considéré qu’il convenait de mettre un terme aux gardes à vue sans communication avec l’extérieur, ainsi qu’aux détentions provisoires se prolongeant sans que les prévenus puissent connaître l’échéance de leur procès. Elle a estimé nécessaire de motiver le placement en détention provisoire, de le limiter dans le temps et d’améliorer l’indemnisation en cas de placement abusif. Dénonçant ensuite l’hypocrisie actuelle dans les relations entre la justice et la presse, elle a déclaré qu’il était nécessaire de prévoir des fenêtres de publicité dans la procédure, afin de concilier la liberté de la presse et le respect de la dignité des personnes.

Après avoir exprimé son accord sur les dispositions du projet de loi améliorant les droits de la défense et la protection des victimes, M. Pierre Albertini s’est interrogé sur la pertinence de son intitulé, soulignant que, malgré son ambition, le texte risquait de se heurter à l’insuffisance des moyens mis en œuvre. Jugeant regrettable que le projet de loi n’aborde pas la question des relations entre la justice et la police judiciaire, il a, par ailleurs, considéré que le respect de la présomption d’innocence relevait davantage de la déontologie des magistrats et des journalistes que de la législation, dans la mesure où la liberté de la presse ne saurait être remise en cause de quelque manière que ce soit. Abordant la question de la détention provisoire, il a estimé que le caractère collégial de la décision de mise en détention aurait constitué une garantie bien supérieure à celle résultant de la distinction opérée par le projet de loi entre juge d’instruction et juge de la détention. Il a enfin considéré qu’il était nécessaire de restreindre les cas pouvant donner lieu à un placement en détention provisoire, ajoutant qu’il convenait également d’encadrer sa durée.

Estimant que les juges d’instruction devraient être des arbitres impartiaux instruisant à charge et à décharge, Mme Nicole Catala a émis des doutes sur l’intérêt de l’institution du juge de la détention, s’interrogeant, en outre, sur les moyens qui seraient mis en œuvre pour financer le dédoublement entre juges d’instruction et juges de la détention. Elle a, par ailleurs, souligné que la protection de la présomption d’innocence soulevait de nombreuses difficultés, s’agissant notamment des sanctions en cas de diffusion d’images de personnes menottées ou entravées. Elle a enfin estimé nécessaire d’avoir une conception plus large des notions de dignité et d’honneur des individus, considérant qu’il fallait placer, en droit, sur un même plan la victime et la personne présumée innocente.

Indiquant d’abord qu’il voterait sans doute le projet de loi, M. Pascal Clément a constaté que, depuis des années, la création d’un juge des libertés était évoquée, alors même que, selon lui, elle ne constituait qu’une sorte de pis aller face aux problèmes de la justice en France. Il a estimé en effet que, si le juge d’instruction exerçait ses prérogatives de manière satisfaisante, ce qui est la situation habituelle en France, la création d’un juge de la détention provisoire ne se justifiait pas. Il a regretté la suspicion qui pèse sur ce corps de magistrats, constatant que les chambres d’accusation confirmaient la presque totalité de leurs décisions. Il a, par ailleurs, observé que les juridictions ne respectaient pas toujours scrupuleusement les règles de procédure existantes, rappelant notamment qu’au Conseil supérieur de la magistrature les rapporteurs participaient également à la formation de jugement, ce qui est contraire au principe du jugement équitable proclamé par la Convention européenne des Droits de l’Homme. Concernant la question du secret de l’instruction, il a constaté que, même dans les cas où l’on connaissait l’auteur de la violation du secret, aucune sanction n’était appliquée. Il a vivement regretté que, plutôt que de perfectionner notre système judiciaire, l’on préfère ajouter un nouveau dispositif qui risque de se révéler impraticable, notamment dans les petites juridictions. A cet égard, il a rappelé que de nombreuses réformes avaient échoué, certaines même n’allant pas au-delà du vote en première lecture, comme ce fut le cas, par exemple, pour la réforme de la cour d’assises, exprimant la crainte que l’on ne retombe dans les mêmes errements. Il a, par ailleurs, jugé que le texte proposé par la garde des sceaux risquait d’allonger les délais de jugement. Au total, il a regretté que la France soit incapable de faire fonctionner convenablement ses institutions judiciaires existantes.

Constatant que le projet de loi s’attaquait à des problèmes rémanents, M. Guy Hascoët s’est interrogé, tout d’abord, sur la notion de garde à vue, remarquant notamment que, tout en affirmant le principe de la présence de l’avocat dès de la première heure, le texte maintenait trois exceptions à cette règle. Il s’est demandé en quoi la présence de l’avocat pouvait constituer une gêne pour l’enquête. Il a ensuite critiqué la procédure de comparution immédiate en ce qu’elle pouvait être utilisée de manière déviée. Il a fait part d’une expérience récente dans sa circonscription où, à la suite de quelques échauffourées entre des policiers et des jeunes, deux de ces derniers avaient comparu immédiatement devant le tribunal et risquaient d’être condamnés à plusieurs mois de prison, sans avoir pu, dans cette procédure d’urgence, faire valoir véritablement leurs droits. Il a appelé à ce que la présomption d’innocence soit respectée et a également fermement condamné tout soupçon de culpabilité fondé a priori sur l’appartenance à un quartier, l’origine ethnique ou sociale. A cet égard, il a souligné la différence du traitement appliqué aux jeunes de quartiers difficiles, d’une part, et, d’autre part, aux agriculteurs qui, ayant saccagé le bureau de la ministre de l’environnement, n’ont cependant pas été immédiatement présentés à la justice. Il a constaté, en le déplorant, que notre pays, par certains aspects, connaissait encore une justice de classe.

Indiquant à titre liminaire qu’il voterait le projet de loi parce qu’il constituait un progrès, M. Michel Crépeau a néanmoins considéré que ce texte demeurait timide sur quelques points essentiels. Constatant que le projet interdisait la publication de photographies de personnes menottées, il s’est insurgé contre le fait qu’on puisse passer les menottes à des citoyens, procéder à des fouilles au corps humiliantes et les dépouiller de leurs vêtements lors de leur garde à vue. Il a considéré que ces pratiques constituaient des atteintes inacceptables aux droits des personnes et a proposé que les policiers contraints d’y recourir soient soumis à l’obligation de rédiger un rapport le justifiant. Il a regretté, par ailleurs, que les réformes de la justice se soient toujours heurtées à un manque évident de moyens, évoquant à cet égard la réforme relative à l’appel des jugements des cours d’assises. Il a estimé que les conditions de détention en France constituaient des violations des droits de l’homme particulièrement graves, soulignant qu’elles étaient dénoncées régulièrement par Amnesty International. Il a regretté également que l’on n’ait pas assumé le passage d’un système inquisitoire à un système accusatoire, considérant que celui-ci permettrait notamment de faire une économie de postes de magistrats. Il a souligné, en outre, que sa mise en œuvre serait, de toute manière, rendue nécessaire par la construction européenne, observant que le caractère fréquemment transnational des délits contraindrait à terme l’Europe à mettre en place un système judiciaire uniformisé. Il a indiqué qu’il aurait également souhaité voir clairement définis les rôles respectifs du parquet, de la police, et des magistrats. A ce titre, il a appelé de ses vœux un dispositif qui ferait du garde des sceaux la seule autorité hiérarchique de la police judiciaire, le ministre de l’intérieur conservant sous sa responsabilité les actions de police administrative et de maintien de l’ordre public. Enfin, il a estimé que l’on ne pouvait apporter de réponse à 14.000 crimes, délits et contraventions en France sans que soit menée une véritable politique de dépénalisation. Il a déploré que les magistrats prennent l’initiative de définir de nouvelles infractions ou de nouvelles sanctions, évoquant à cet égard l’exemple des abus de biens sociaux, que la jurisprudence a jugés imprescriptibles, ou celui du blâme public suggéré par le ministère public auprès de la Cour de justice de la République.

M. Jérôme Lambert a indiqué qu’il approuvait le maintien du système inquisitorial allié à l’introduction de quelques éléments de procédure accusatoire. Il a exprimé le vœu que la justice française ne ressemble pas à certaines autres, popularisées par une culture dominante qui se voudrait hégémonique. Il a rappelé, en effet, que, dans la procédure accusatoire, lorsqu’un prévenu était défendu dans de mauvaises conditions, ses droits étaient souvent très gravement bafoués. Il a souhaité savoir quels moyens le Gouvernement comptait demander au Parlement de voter pour faire face aux nominations des nouveaux juges de la détention provisoire. En conclusion, il a attiré l’attention de la ministre sur les conditions d’indemnisation des personnes ayant subi une détention injustifiée.

En réponse aux intervenants, la ministre a apporté les précisions suivantes :

—  S’agissant la garde à vue, elle a rappelé que c’était l’opposition actuelle qui avait supprimé en août 1993 l’intervention de l’avocat à la vingtième heure en cas de trafic de stupéfiants ou de terrorisme et reporté celle-ci à la trente-sixième heure pour certains faits de criminalité organisée, avant de rétablir, à la suite d’une décision du Conseil constitutionnel, cette intervention à la soixante-douzième heure pour le trafic de stupéfiants et le terrorisme. Elle s’est opposée à la suppression de ces exceptions, faisant valoir qu’elles constituaient à la fois une mesure de protection pour les avocats, en leur évitant d’éventuelles pressions extérieures, et une mesure de protection de l’enquête. Indiquant qu’elle partageait avec le ministre de l’intérieur et le ministre de la défense le souci d’améliorer les conditions matérielles des gardes à vue, elle a précisé que des efforts avaient été faits récemment en la matière. Tout en reconnaissant que les fouilles avaient souvent un caractère humiliant, elle a fait observer qu’elles étaient en particulier nécessaires pour assurer la sécurité des autres personnes présentes dans les locaux de garde à vue. S’agissant de l’enregistrement sonore des interrogatoires, proposé notamment par la commission de réflexion sur la justice présidée par M. Pierre Truche, elle a déclaré qu’elle n’était pas contre le principe, mais qu’elle s’inquiétait des risques qu’il pouvait présenter, s’agissant tout particulièrement des conditions d’utilisation de la cassette audio dans la suite de la procédure et des éventuelles possibilités de manipulation. Elle a en outre fait valoir qu’une telle mesure nécessitait une mobilisation de moyens supplémentaires qui pourraient utilement être employés pour d’autres priorités. Enfin, elle a exprimé la crainte que cette procédure ne se retourne contre la personne gardée à vue, notamment en cas de rétractations d’aveux.

—  Sur la motivation et l’éventuel appel de la mise en examen, la ministre a rappelé que les articles 80-1 et 116 du code de procédure pénale obligeaient déjà le juge d’instruction à indiquer chacun des faits pour lesquels la personne était mise en examen ainsi que leur qualification juridique. Elle a estimé qu’imposer à ce magistrat de préciser les éléments à charge risquerait de transformer radicalement son rôle et de rendre plus difficile, dans la suite de la procédure, une instruction à décharge. Evoquant l’éventualité d’un appel, elle a souligné que cette possibilité renforcerait encore plus l’aspect « préjugement » de la mise en examen.

—  En ce qui concerne le droit des victimes, la garde des sceaux a annoncé qu’elle accueillerait avec un esprit constructif les améliorations proposées par les parlementaires, tout en soulignant qu’il lui fallait, malgré tout, tenir compte des contraintes financières.

—  Sur les dispositions relatives à la communication, elle a indiqué qu’elle serait hostile à tout amendement qui porterait atteinte à la liberté d’expression.

—  S’agissant du juge de la détention provisoire, la garde des sceaux a estimé que, même s’il devait effectivement être saisi par le juge d'instruction, la décision qu’il rendrait ne risquait pas d’apparaître comme un préjugement. Elle a souligné que l’objectif du projet de loi était, en revanche, d’exiger un double regard pour priver une personne de sa liberté, tandis que la décision d’un seul juge suffirait pour la remettre en liberté. Quant à l’éventualité d’une saisine directe du juge de la détention provisoire par le procureur de la République, elle a considéré qu’elle conduirait à réduire considérablement le rôle du juge d'instruction et, partant, à instituer une procédure de type accusatoire, ce qui n’est pas le choix du Gouvernement. Elle a observé qu’en fait, la réforme proposée tirait les leçons de l’échec des précédentes tentatives et en particulier de celui de la loi de janvier 1993, qui a buté sur une insuffisance de moyens, mais aussi sur une mauvaise définition du rôle du juge délégué qui, chargé de décider du placement en détention provisoire, avait cependant pu apparaître comme se bornant à entériner les décisions du magistrat instructeur. C’est pourquoi, a-t-elle indiqué, le projet de loi préconise que le juge de la détention ait grade de président ou de vice-président, ce qui représente une garantie d’impartialité et d’objectivité. Ajoutant qu’il était sans doute possible d’améliorer la dénomination de « juge de la détention provisoire », la ministre a cependant jugé qu’il ne serait pas opportun de l’appeler « juge des libertés », dans la mesure où cette qualification s’applique, en fait, à l’ensemble des magistrats du siège.

—  Quant au financement de la réforme, elle a précisé qu’il ne s’effectuerait pas à coûts constants, les moyens budgétaires mis à disposition de la justice permettant de recruter, sur deux à trois ans, une centaine de magistrats afin de permettre la mise en place des juges de la détention provisoire ; elle a souligné que, d’ores et déjà, soixante affectations avaient été décidées dans cette perspective, accompagnées de la création de postes de greffiers et du renforcement des moyens de fonctionnement des juridictions. Elle a insisté sur le fait que les difficultés que l’on observait actuellement dans les tribunaux étaient imputables à la pénurie de recrutements organisés entre 1996 et 1997, rappelant que les affectations étaient subordonnées à des délais de formation incompressibles. Elle a indiqué qu’en 1999, devraient apparaître les premières arrivées correspondant au concours de recrutement exceptionnel ainsi que celles résultant de l’augmentation des promotions de l’Ecole nationale de la magistrature.

—  Sur la détention provisoire, elle a admis que le projet de loi ne reprenait pas l’ensemble des dispositions contenues dans la proposition de loi de M. Alain Tourret adoptée par l’Assemblée nationale en avril 1998, soulignant cependant qu’il s’en inspirait, notamment en ce qui concerne la durée de la détention provisoire en matière criminelle, pour laquelle il est proposé de mettre en place des butoirs, alors qu’actuellement celle-ci est illimitée. Elle a observé, en revanche, que les mesures concernant les seuils de placement en détention provisoire n’avaient pas été repris en l’état, parce qu’il apparaissait préférable de laisser une certaine marge d’appréciation permettant l’individualisation des décisions.

—  En ce qui concerne le contrôle judiciaire, la ministre a indiqué que le Gouvernement avait souhaité que le juge d'instruction conserve ses compétences dans la mesure où la maîtrise de cette prérogative pourrait l’inciter à remettre plus facilement en liberté des prévenus incarcérés.

—  S’agissant de la collégialité, tout en considérant qu’elle restait un objectif qui devait être poursuivi, elle a noté que chaque réforme qui l’avait proposé avait échoué par manque de moyens, et souligné que le Gouvernement n’entendait pas être confronté à une telle situation. Ajoutant qu’une décision collégiale pourrait accroître le risque que l’ordonnance de placement en détention provisoire n’apparaisse en réalité comme un préjugement, elle a cependant précisé qu’il n’était pas exclu qu’une telle option soit envisageable dans l’avenir au vu des moyens qui seront disponibles.

—  En ce qui concerne la situation matérielle des prévenus incarcérés, la garde des sceaux a confirmé que les taux d’occupation carcérale les plus élevés s’observaient dans les maisons d’arrêt. Elle a souligné qu’indépendamment des effets de la réforme proposée par le projet de loi qui devraient conduire à diminuer significativement les flux de placements en détention, le Gouvernement entendait mettre l’accent sur le développement des libérations conditionnelles, programmer la construction de six nouveaux établissements et financer la rénovation de 1 100 places dans les prisons existantes.

—  Quant au système inquisitoire, elle a jugé qu’il convenait de le préserver parce que, à l’expérience, la procédure française présentait beaucoup d’avantages, en particulier si l’on s’oriente vers une spécialisation accrue des juges d'instruction, sur le modèle de ce qui est prévu dans les pôles financiers.

—  S’agissant de la mise en place des juge de la détention provisoire dans les petites juridictions, la ministre a indiqué que le Gouvernement avait examiné, avec les chefs de cour, quatre scénarios dont aucun n’entraînait la suppression de ces juridictions: le premier, qui envisage l’affectation de juges de la détention provisoire dans les 185 tribunaux de grande instance (T.G.I.), apparaît inutile et impossible à mettre en oeuvre ; le deuxième, qui préconise de nommer des juges de la détention provisoire dans certains T.G.I., tout en maintenant des juges d'instruction dans chacun d’entre eux, sur le modèle de ce qui existe pour les juges des enfants, est envisageable ; il en va de même du troisième qui conduit à n’affecter des juges de la détention provisoire et des juges d'instruction que dans certains tribunaux seulement ; enfin, on peut également opter pour la mise en place de chambres de T.G.I. détachées. La ministre a ajouté que, pour les plus petits ressorts, le Gouvernement réfléchissait à la possibilité de confier les missions de juge de la détention provisoire aux juges placés près du président, ce qui ne poserait aucun problème pour la composition des formations de jugement et permettrait une spécialisation des magistrats en charge de la détention provisoire.

—  Quant à l’organisation d’un appel des décisions de la commission d’indemnisation des détention provisoires, tout en estimant qu’il était envisageable, elle a souligné la difficulté de déterminer la juridiction compétente dès lors que cette commission est formée au sein de la Cour de cassation.

—  Evoquant enfin le problème des dénonciations anonymes, la ministre a rappelé qu’elles n’étaient en tout état de cause qu’un élément de l’enquête et ne constituaient jamais une preuve, le procureur, conformément au principe de l’opportunité des poursuites, étant seul compétent pour apprécier la suite à leur donner. Après avoir souligné qu’elles pouvaient parfois se justifier, notamment dans les affaires de terrorisme et d’infractions sexuelles, elle a précisé que, selon la jurisprudence, elles ne pouvaient pas servir de base à une enquête de flagrance. Elle a en dernier lieu déclaré que le Gouvernement ne prendrait aucune initiative en matière d’abus de bien social.

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La Commission a commencé à examiner, sur le rapport de Mme Christine Lazerges, le projet de loi renforçant la protection de la présomption d’innocence et les droits des victimes (n° 1079).

Se reportant, pour la présentation générale du projet, à l’intervention de Mme la garde des sceaux, Mme Christine Lazerges, rapporteur, a indiqué qu’elle s’en tiendrait donc à présenter l’esprit général des amendements qu’elle proposera à la Commission lors de sa prochaine réunion. Rappelant que le projet tendait, de manière équilibrée, à protéger aussi bien les personnes poursuivies que les victimes, elle a annoncé qu’elle proposerait une rédaction plus détaillée de l’article préliminaire du code de procédure pénale introduit par l’article premier du projet, l’ensemble de ses autres amendements étant inspiré de cette rédaction. Elle a ajouté que cette rédaction permettrait d’accorder une place plus importante aux droits des victimes, tout en préservant les deux autres aspects principaux de cet article préliminaire que sont la définition des principes directeurs de la procédure pénale et le droit des personnes poursuivies. Regrettant que le Conseil d’Etat, consulté par le Gouvernement, n’ait pas perçu l’utilité de cet article préliminaire au motif que les principes énoncés existaient déjà dans la convention européenne des droits de l’homme et dans les principes constitutionnels, Mme Christine Lazerges a insisté sur la valeur pédagogique d’une telle disposition.

Concernant la procédure de garde à vue, elle a souhaité que son contrôle soit plus précisément défini, notamment par une intervention plus systématique du procureur de la République. Elle a ajouté que, si la présence d’un avocat dès la première heure de garde à vue lui paraissait être une avancée importante, cette mesure ne devait pas empêcher l’avocat de revenir au bout de la vingtième heure et au milieu de la seconde période autorisée de garde à vue. Par ailleurs, elle a considéré qu’un débat clair sur l’enregistrement des interrogatoires réalisés pendant la garde à vue devait être mené au sein de la Commission.

Concernant la procédure de témoin assisté, le rapporteur a reconnu qu’elle n’avait connu jusqu’à présent qu’un succès relatif. Rappelant que le projet offrait aux témoins assistés les mêmes droits qu’aux personnes mises en examen, leur permettant ainsi de devenir partie à l’instruction et de faire appel des ordonnances du juge, le rapporteur a estimé que l’ensemble de ces mesures favoriserait certainement un accroissement du recours à cette procédure. Elle a considéré que l’opportunité de distinguer plus clairement le recours à la procédure du témoin assisté de celle de la mise en examen devrait faire l’objet d’un débat en Commission, en envisageant, le cas échéant, d’imposer aux juges d’instruction d’avoir à justifier les mises en examen.

Concernant la création des juges de détention, présentée souvent comme la réforme principale introduite par le projet, le rapporteur a estimé qu’il semblait effectivement indispensable de prévoir un second avis pour le placement en détention provisoire. Insistant néanmoins sur le fait que la Commission ne devrait pas limiter sa réflexion, en la matière, à la mise en place de cette nouvelle institution, elle a indiqué qu’elle présenterait des amendements concernant les conditions de la détention provisoire ainsi que sa durée, veillant sur ce point à appliquer effectivement la notion de délais raisonnables. S’agissant de cette notion, qui ne concerne pas seulement la détention provisoire mais l’ensemble de la procédure, elle a exclu qu’un temps limité puisse être imparti à l’instruction, observant que le respect d’un délai raisonnable devrait plutôt se traduire par l’intervention de la chambre d’accusation permettant, à intervalles réguliers, de contrôler l’action du juge d’instruction.

Exprimant son accord avec les dispositions du projet concernant les fenêtres de publicité, Mme Christine Lazerges a souligné qu’elles permettraient de concilier au mieux le secret de l’instruction avec la nécessaire transparence des procédures. Enfin, s’agissant des victimes d’infractions pénales, le rapporteur a estimé qu’il convenait d’améliorer les dispositions du projet, tout en précisant que, dans l’attente des conclusions de la mission confiée par le Premier ministre à Mme Marie-Noëlle Lienemann sur le droit des victimes, ces améliorations ne seraient sans doute pas toutes apportées au stade de l’examen en première lecture du projet.

La Commission a rejeté l’exception d’irrecevabilité n° 1 et la question préalable n° 1 présentées par M. José Rossi et les membres du groupe Démocratie libérale et indépendants.

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